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Chapitre 3
4 D’ailleurs, le modèle des ressources et des compétences offre un cadre d’analyse pour une littérature
émergente en management stratégique des ressources humaines (Lado & Wilson, 1994 ; Kamoche, 1996 ;
Wright & al., 2001). Ces travaux examinent principalement comment les pratiques en ressources humaines
et les relations professionnelles affectent l’avantage concurrentiel, comment en particulier elles facilitent
ou freinent le développement et l’utilisation de compétences, ou encore comment les dirigeants et
l’encadrement contribuent à la performance de l’entreprise (Lamarque & Lamarque, 2003).
Þ Les compétences individuelles sont composées des connaissances, capacités et
aptitudes des individus, lesquelles sont utilisées ou seront utilisées par les
employés en situation de travail ;
5 « (…) opportunities and limitations defined at the time of their conception and foundation that are largely
independent of the organization’s subsequent development of knowledge and skills » (Nordhaug, 1996).
Source : Nordhaug (1996, p. 211)
Cette représentation dépeint les synergies qui s’effectuent entre les trois niveaux
d’analyse de la compétence, non seulement l’existence d’influences directes entre les
différents niveaux de compétence mais également sur l’existence d’une hiérarchie entre
ces niveaux. En effet, selon l’auteur, il apparaît « un phénomène d’agrégation et de
transformation des compétences individuelles en compétences collectives comme, plus
tard, il est possible d’observer ce même phénomène d’agrégation et de transformation de
ces deux catégories de compétences en compétences organisationnelles »6. En d’autres
termes, les compétences individuelles des salariés s’agrègent en compétences collectives,
lesquelles participent à l’élaboration des compétences organisationnelles de l’entreprise.
La logique retenue par Nordhaug est donc une démarche « bottom-up », partant du niveau
6 « (…) a conception of the aggregation and transformation of individual competence into team
competence, and, furthermore, the aggregation and transformation of these into organizational
competence » (Nordhaug, 1996, p. 210).
individuel, puis collectif, pour arriver au niveau organisationnel, et ceci par agrégations
successives. Cependant, cette démarche d’analyse pas le passage du niveau
organisationnel au niveau individuel, pour montrer comment l’entreprise peut induire le
développement de certaines compétences individuelles.
Autres auteurs ont également mis en avant l’importance d’une approche transversale des
compétences, les trois niveaux de la compétence sont en interaction permanente. Cette
interaction aboutit à un enrichissement mutuel, ce qui rend leur analyse isolée peu
pertinente et renforce encore la difficulté d’avoir une vision claire de la notion de
compétence. Dejoux (2000) considère qu’à la fois aux niveaux théorique et empirique, il
est important de privilégier une analyse transversale de la compétence qui est
représentative d’une mise en réseau des différents savoirs de l’entreprise. Rouby & Solle
(2002) prônent également une approche non segmentée des compétences individuelles,
collectives et organisationnelles.
En outre, selon ces auteurs, une lecture transversale de la thématique des compétences
conduit les entreprises décloisonner leurs fonctions et à s’interroger sur les modalités de
leurs recoupages, tel que celui de la GRH et de la stratégie7.
Toutefois, bien que ces différents travaux recommandent une approche transversale des
compétences reliant les micro, méso et macro niveaux d’analyse, ils ne détaillent pas la
nature de leurs relations. En fait, le travail sur l’articulation des niveaux d’analyse de la
compétence n’en est qu’à ses prémisses en sciences de gestion. Dès lors, il émerge un
besoin apparent de développer des recherches prenant en compte les relations entre les
trois niveaux de compétence, et notamment de s’interroger sur le « comment ? » de
l’articulation de ces derniers.
En résumé, à l’inverse de l’approche « classique » du management des compétences,
laquelle est majoritairement présentée dans la littérature comme une approche segmentée
et additive des compétences individuelles, collectives et organisationnelles, nous
considérons que l’analyse des compétences au sein des entreprises ne peut être réduite à
7 Selon Lecocq (2002), le cloisonnement et le découpage fonctionnel (marketing, finance, contrôle de
gestion, gestion des ressources humaines, stratégie, etc.) adopté par les gestionnaires pour diviser leur
champ d’étude constitue un frein au développement de travaux sur l’articulation des niveaux d’analyse
d’un concept.
la simple agrégation de ces niveaux, c’est-à-dire se superposant les uns aux autres sans
s’enrichir mutuellement par interactions dynamiques. Au contraire, les trois niveaux de
compétence ne sont pas indépendants, mais interagissent les uns les autres d’une façon
itérative et continuelle.
Dans la littérature, deux branches issues de la théorie des ressources, sont largement
représentées : la « Competence-Based View » (CBV) et la « Knowledge-Based View »
(KBV). Pour l’approche CBV, les compétences organisationnelles jouent un rôle critique
dans le développement et la survie de l’entreprise. Pour l’approche KBV, ce que
l’entreprise fait mieux que le marché, c’est le partage et le transfert des connaissances des
individus et des groupes dans l’organisation. En fait, cette approche prône la
prédominance d’un type de ressource, la connaissance8, et l’analyse en détail, mettant au
second plan les autres types de ressources initialement privilégiés par la théorie des
ressources. Notamment, les connaissances figurent au rang des ressources sur lesquelles
une entreprise peut fonder son développement stratégique. C’est ainsi que la gestion des
connaissances, plus connue sous le nom de Knowledge Management (KM), a rencontré
un essor important ces dernières années.
Le KM place la connaissance, qu’elle soit individuelle ou collective, au centre des
préoccupations de l’entreprise et s’intéresse aux dispositifs de recension, de codification,
de stockage, de transmission, de partage et d’apprentissage.
1. Les données
La matière brute de cette chaîne est constituée par les données. Une donnée est un fait
discret et objectif. Elle résulte d’une acquisition, d’une mesure effectuée par un
8 Dans la littérature française, le terme anglo-saxon « knowledge » est traduit indifféremment
par « Connaissance » ou « savoir ». De même, dans l’entreprise, la tendance est d’utiliser indifféremment
les terme connaissance » et « savoir ». En effet, la distinction entre « la connaissance » et « le savoir » est
délicate. Pourtant, à la différence du savoir qui désigne plutôt des informations enregistrées de manière plus
ou moins définitive et structurée, la connaissance nécessite un travail d’identification pour parvenir à
restituer une information (Bruneau & Pujos, 1992). Par convention, dans notre recherche, nous emploierons
indifféremment les termes « connaissance » et « savoir », dans la mesure où nous considérons la notion de
savoir dans une acception large.
instrument naturel ou construit par l’homme. Elle peut être qualitative ou quantitative.
Une donnée seule a peu de valeur, mais elle est très facile à stocker et à manipuler
(notamment grâce aux technologies de l’information et de la communication).
2. L’information
Une information est une collection de données qui sont triées et organisées pour donner
forme à un message (le plus souvent sous une forme visible, imagée, écrite ou orale),
résultant d’un contexte donné. Cette transformation des données en information est
parfaitement subjective, puisqu’elle résulte de l’intention et de l’intelligence de
l’émetteur, mais également de l’individu qui la reçoit.
3. La connaissance
4. La compétence
La compétence est le stade le plus élaboré de la chaîne de transformation. D’une manière
générale, la compétence est souvent définie comme l’application effective des
connaissances à une situation donnée (résolution de problème, décision, action).
Autrement dit, elle est souvent considérée comme des connaissances en action. Dès lors,
la notion pivot de l’articulation entre connaissance et compétence est celle d’activité ou
de processus d’action. En d’autres termes, disposer des connaissances n’est pas suffisant
pour la réussite de l’activité.
En revanche, être capable de les mettre en œuvre est indispensable. Ainsi, la prise en
compte simultanée des connaissances et de leur mise en œuvre dans l’action (les
compétences) préconise de ne pas séparer management des connaissances et management
des compétences, ce qui reviendrait alors à « séparer gestion des sujets pensants et
gestion des sujets agissants »
Le développement interne des compétences est le principal moyen pour les organisations
de maintenir et augmenter leurs compétences. Contrairement aux alliances et aux
acquisitions qui nécessitent des interactions avec d’autres organisations, le
développement interne laisse l’entreprise libre de ses propres décisions et limite le besoin
de révéler ses connaissances et compétences. De plus, le développement interne est
particulièrement intéressant en termes d’appropriabilité des compétences. Il permet
d’avoir le contrôle le plus élevé sur les nouvelles compétences développées, ce qui va
renforcer son avantage concurrentiel.
Les recherches relatives à l’apprentissage en interne des compétences se développent
selon deux voies, plus précisément à partir de deux niveaux distincts. Ces deux niveaux
d’apprentissage prennent des dénominations différentes selon les auteurs. Nous pouvons
citer :
Þ L’apprentissage en simple boucle versus l’apprentissage en double boucle ;
Þ L’apprentissage de niveau inférieur versus l’apprentissage de niveau supérieur ;
l’apprentissage adaptatif versus l’apprentissage génératif ;
Þ L’apprentissage par exploitation versus l’apprentissage par exploration ;
Þ L’apprentissage tactique versus l’apprentissage stratégique ;
Þ L’apprentissage opérationnel versus l’apprentissage conceptuel ;
Þ L’apprentissage par accumulation d’expérience versus l’apprentissage par
expérimentation ;
Þ L’apprentissage du « comment » versus l’apprentissage du « pourquoi » ;
Þ L’apprentissage par optimisation des compétences existantes « competence
leveraging » ;
Þ L’apprentissage par construction de nouvelles compétences.
c. Le désapprentissage
Conclusion
Le management des compétences est non plus une manière segmentée et statique, telle
que le suggère l’approche « classique » du management des compétences, c’est-à-dire à
partir des trois niveaux usuels d’analyse du concept de compétence (individuel, collectif
et organisationnel), mais de manière « renouvelée ».
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KAMOCHE K. (1996), « Strategic Human Resource Management within a Resource-Capability
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KOEING G. (1994), « L’apprentissage organisationnel : repérage des lieux », Revue Française de
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Based View of the Firm », Journal of Management, vol. 27, n°, pp. 701-721.