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Abdellatif RYAHI
Enseignant chercheur
Faculté des Sciences Juridiques, Economiques et Sociales de Settat
Université Hassan Premier
Settat
Maroc
ryahi129@gmail.com
Revue Internationale des Sciences Juridiques, Economiques
et Sociales
Résumé :
La gestion des compétences est une nouvelle approche managériale qui a suscité l’intérêt des
administrations publiques marocaines ces dernières années. La revue de la littérature montre
que l’administration publique éprouve de grandes difficultés à gérer ses compétences. C’est la
raison pour laquelle nous avons été amenés à nous demander pourquoi cette dernière ne
parvient-elle pas à gérer efficacement les compétences de ses RH.
Le mode de triangulation choisi nous a permis de croiser trois sources de collecte de données à
savoir : les entretiens semi-directifs, l’observation et l’analyse documentaire. Ce choix
méthodologique s’est avéré nécessaire pour conduire notre recherche qualitative. Le résultat de
l’étude a montré que la notion de compétence est rarement prise en compte dans les pratiques
de GRH dans l’administration. Cette dernière est encore ancrée dans le mode classique de GRH
et éprouve de grandes difficultés à mettre en place une gestion des compétences à même
d’améliorer ses pratiques de GRH.
Mots clés :
ABSTRACT:
Competencies Management is a new approach which has attracted the interest of the Moroccan
public administrations recently. The review of the literature has revealed that the public
administration face many difficulties in managing the competencies of their employees. For
this reason, the present study seeks to answer the question of why can’t the Moroccan
administrations fully manage the competencies of their human capital. The present study has
adopted a triangulation of research instruments: semi-structured interviews, observations and
document analysis. Adopting the three research instruments is necessary to conduct this
qualitative research. The results of this study revel that the notion of the competence is rarely
adopted in HRM in the administration. The latter is still anchored in the classic HRM mode and
faces huge difficulties in adopting a competency-based approach and in ameliorating the HRM
systems.
KEY WORDS:
INTRODUCTION :
La problématique qu’on se propose de résoudre alors dans cette étude est de savoir comment
l’administration marocaine peut-elle adhérer à une nouvelle conception de Gestion des
Ressources Humaines (GRH) basée sur les compétences dans un contexte général et particulier
très contraignant. Autrement dit, est-il possible de mettre en place une gestion qualitative des
RH privilégiant la logique compétence dans l’administration? Le constat montre que cette
dernière éprouve de grandes difficultés à adhérer à une GRH axée sur les compétences (REC1,
GPEC2). Ces difficultés peuvent être liées, à notre sens, au régime statutaire (SGFP3), ainsi
qu’au mode classique de GRH.
La revue de la littérature ainsi que notre expérience professionnelle dans le terrain d’étude nous
amènent à formuler deux principales hypothèses :
H1 : Le SGFP, actuel, n’est pas assez favorable à la mise en place d’une GRH axée sur les
compétences.
1
REC : Référentiel des emplois et des compétences
2
GPEC : Gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
3
SGFP : Statut général de la fonction publique
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Pour mener à bien notre travail, nous avons choisi un cas pratique à savoir le Ministère de
l’Education Nationale (MEN). Ce choix se justifie par le fait que ce dernier se trouve confronté
à des défis et contraintes tous particuliers :
La compétence est un concept qui a investi le champ du management des ressources humaines
ces dernières années. C’est un concept polysémique et «la difficulté à le définir croît avec le
besoin de l’utiliser ».7 Dans ce qui suit nous allons mettre l’accent sur le concept de compétence,
4
MEF (2020), « Rapport sur les RH, Loi de Finance 2020, synthèse ».
5
AREF: Académie Régionale d’Education et de Formation
6
CRMEF: Centres Régionaux des Métiers de l’Education et de Formation
7Meignant. A (1995), Les compétences de la fonction ressources humaines, diagnostic et action, Editions Liaisons, p.19.
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ses caractéristiques ainsi que l’importance de la gestion des compétences en tant que nouvelle
approche managériale.
Selon le dictionnaire Larousse, le mot "compétence" vient du latin "competentia" qui veut dire
« l’aptitude d’une juridiction à instruire et à juger une affaire » ou « l’aptitude d’une autorité à
effectuer certains actes »8 . La revue de la littérature nous a permis de distinguer entre les
compétences individuelles et les compétences collectives. Le capital des compétences d'une
organisation, publique soit-elle ou privée, ne se compose pas uniquement de compétences
individuelles des individus mais également des compétences collectives.
Dans la littérature en GRH, on peut trouver une panoplie de définitions sur la compétence. En
GRH, le « modèle de la compétence » (Zarifian, 2001)16suggère une alternative au mode de
gestion inspiré du taylorisme et porte les espoirs d’un renouveau en profondeur des pratiques
de GRH.
12
Meignant.A(1995), Les compétences de la fonction des ressources humaines, Op cit, p.20.
13
Meignant.A (1995), Les compétences de la fonction des ressources humaines", Ed. Liaison, Paris, p.22.
14
Le Boterf.G (1999), De la compétence, essai sur un attracteur étrange, Edition d’organisation, Paris. P.128.
15
Pemartin.D(1999), Gérer par les compétences ou comment réussir autrement ? Editions Management Société, p.124.
16Zarifian, P. (2001), Le modèle de la compétence, Paris, Editions Liaisons. p. 70
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18Leboterf G(2001). « Ingénierie et évaluation des compétences », 3ème édition, Editions d’Organisation,
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pouvons dire que la compétence est un processus ou une construction, de nature contingente,
finalisée et suppose une reconnaissance sociale.
L’importance de plus en plus accordée au concept de compétence à travers le temps a permis
aux théoriciens et praticiens de remettre en cause la conception traditionnelle de la GRH basée
sur le poste pour la remplacer par une logique managériale axée beaucoup plus sur les
compétences. Les travaux récents de certains théoriciens comme Le Boterf, Leboyer, Zarifian,
Batal et autres constituent une référence internationale importante. Ils ont, en effet, beaucoup
fait évoluer la question de la compétence et la fonction GRH. C’est pourquoi on assiste ces
dernières années à l’émergence de la notion de gestion des compétences comme nouvelle
approche managériale dans beaucoup d’organisations.
En sciences de gestion, la gestion des compétences prend de plus en plus d’importance; pourtant
elle reste un concept flou (Defélix, 2003)19 du fait de l’ambiguïté de la notion de la compétence.
Selon Defélix (2004), gérer les compétences signifie, pour une organisation, chercher à acquérir
les compétences individuelles et collectives dont elle a besoin, mais aussi les stimuler et les
réguler20. Pour Zarifian21, « lorsqu’on parle de management par les compétences, ce qu’il s’agit
de manager, c’est avant tout la mise en œuvre de la stratégie de service et l’atteinte des
performances qui y correspond, en faisant, de la compétence, une ressource centrale pour
assurer cette mise en œuvre avec succès. Nous l’appelons : la politique de la compétence. Elle
est un moyen au service de la stratégie, très fortement imbriquée dans le fonctionnement
organisationnel de la firme ».
Boyé et Ropert (1995)22 définissent la gestion des compétences comme « la capacité à mettre
en œuvre, dans un environnement donné, les connaissances et les comportements nécessaires
aux missions en fonction de la contribution attendue par l’organisation ».
Selon ces auteurs, trois rôles essentiels sont assignés à la gestion des compétences. Il s’agit de
développer les compétences, valoriser les compétences et optimiser les compétences. Le
19 Defelix .Ch., « Ce que gérer les compétences veut dire », in SEES et revue économique et sociale. pp. 121-128
20Defelix .Ch., . (2004), « La gestion des compétences au défi de la mesure : des réceptions différenciées de la norme ISO 9001, Version
2000 », Actes du colloque del’AGRH, Montréal, Tome 3, pp. 1507-1525.
21Zarifian P. Extrait de http://perso.wanadoo.fr/philippe.zarifian/page63.htm - Manager par les compétences, manager les compétences. Synthèse des résultats de la
recherche menée dans une unité de services aux clients d'une grande entreprise, p. 63
22
Boyé M.et Ropert G(1995), Gérer les compétences dans les services publics, Editions d’organisation, p.17.
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Conscient du rôle que doit jouer l’administration publique dans la conduite des réformes et les
défis à relever, le Maroc, s’est engagé, depuis le milieu des années1990 avec le concours du
PNUD23, et à partir des années 2000 dans le cadre du PARAP24, dans d’importants chantiers
de réforme et de modernisation de son administration.
Dans cette dynamique de réformes, « la modernisation de la GRH demeure un axe stratégique.
En effet, sans une approche innovante de la gestion du capital humain, basée sur le mérite et le
développement des compétences, les divers chantiers de modernisation resterons inachevés et
de faibles impacts. D’ailleurs, la redéfinition des missions de l’administration et de ses modes
de gestion ne peut apporter les résultats escomptés en termes d’optimisation, de cohérence et
d’efficacité des actions, sans être accompagnée par une gestion moderne du capital humain et
sans l’implication et l’engagement des femmes et des hommes de l’administration »25.
L’administration marocaine a besoin, aujourd'hui, d’améliorer ses pratiques de GRH en mettant
en place un management stratégique de ses RH, privilégiant la logique compétences. En effet,
celles-ci se trouvent actuellement au cœur des réflexions menées sur le thème de l’emploi et de
la performance, aussi bien au niveau des organisations qu'à l’échelle macro-économique.
Dans cette deuxième partie, nous allons mettre le point sur l’évaluation de la gestion des
compétences au sein de l’administration publique marocaine en général et le MEN en
particulier.
23
PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement
24
PARAP : Programme d’Appui à la Réforme de l’Administration Publique
25
MFPMA (2013), « Elaboration du référentiel des emplois et des compétences de l’administration (RECA) »,Demos.mai 2013, P3,
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Notre travail de recherche s’inscrit dans le cadre de l’approche GRH qui appartient au courant
des recherches en sciences de gestion qui, elles-mêmes, appartiennent à un champ plus vaste,
celui des sciences sociales.
Pour appréhender notre objet de recherche, nous avons retenu l’approche qualitative comme
méthode de recherche. La méthode qualitative est une méthode de recherche utilisée souvent
en sciences sociales.
Dans le domaine de la GRH, les méthodes qualitatives sont les plus exploitées. Igalens et
Roussel (1998)26pensent que ces dernières favorisent « l’observation dynamique » des
phénomènes et leur compréhension. C’est pourquoi les recherches qualitatives sont souvent
qualifiées de compréhensives dans le sens où elles cherchent à expliquer le phénomène étudié.
Pour nous, le choix de la démarche qualitative se justifie d’une part, parce que l’approche
qualitative est généralement utilisée comme une démarche de recherche pour les études de cas,
et d’autre part, vu la nature des données manipulées dans le cadre de notre recherche puisqu’il
s’agit plutôt des interviews, des perceptions, des avis et des témoignages en général que de
données numériques, quoi que cela n’exclut pas le recours aux chiffres dans notre recherche.
En effet, afin d’appréhender les pratiques de la gestion des compétences dans l’administration
marocaine, nous avons procédé par une étude de cas (le MEN). Il s’agit, pour nous, d’une
recherche exploratoire qui vise à comprendre un phénomène émergent et peu étudié jusqu’à
présent dans la sphère publique. « L’étude exploratoire est orientée vers l’observation de la
réalité en vue de définir les principaux éléments d’un problème, d’une situation ou d’un
comportement. L’objectif est de récolter un très grand nombre de données d’observation sur un
phénomène peu ou mal connu. »27.
Dans son ouvrage le modèle de la compétence, Zarifian (2000)28, constate que l’organisation
qui adopte un mode de gestion par la compétence accorde de l’importance à la politique de
26
Igalens J. et Roussel P(1998). Méthodes de recherche en GRH, Préface de Michel Godet,Editions Economica, 207 p
27
Zagré. A. (2013), Méthodologie de la recherche en sciences sociales, l’Harmattan, 128 p
28
Zarifian.P(2000), Le modèle de la compétence, Edition d’organisation, paris.
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Notre recherche s’est focalisée sur l’administration publique marocaine en général et le MEN
en particulier. Le choix du MEN, se justifie par le fait qu’il est un département qui a des
spécificités à part entière en termes de volume de ses effectifs, diversités de ses missions et ses
niveaux hiérarchiques, multiplicité de ses cadres, etc.
Le choix de l’échantillon a porté, au niveau de l’administration centrale du MEN, sur 30 cadres
et responsables appartenant à 6 directions centrales. Dans cet échantillon, presque 50% des
cadres rencontrés exercent dans la DRH étant donné que l’information se concentre en grande
partie à ce niveau.
Comme le montre le tableau ci-dessous, nous avons rencontré, au sein du MEN, 12 cadres
administratifs et 18 responsables répartis entre directeurs centraux, directeurs adjoints, chefs de
divisions et chefs de services.
Nous avons retenu comme mode de collecte de données trois outils différents mais
complémentaires, que nous considérons essentiels dans les études de cas en GRH. Il s’agit de
l’analyse documentaire, de l’observation directe et de la technique des entretiens. Cette
triangulation des données est centrale dans la stratégie de recherche par étude de cas (Roussel
et Igalens, 1998)29. La recherche documentaire s’est effectuée à travers l’exploitation de la
documentation existante aussi bien au niveau du MEN qu’au sein d’autres départements dont
notamment le MFPMA et le MEF. Le recours à l’observation nous a permis d’identifier des
dysfonctionnements qui n’étaient pas déclarés lors des entretiens. Dans ce cas, l’observation
vient complémenter les résultats des entretiens. L’observation, en tant qu’outil d’investigation,
a été, pour nous, une source importante d’information. Outre l’observation et l’analyse
documentaire nous avons eu recours à la technique des entretiens comme mode principal de
collecte de données. C’est ainsi qu’un guide d’entretien a été conçu en fonction du terrain
d’étude et des objectifs de la recherche. Il nous a permis de rapprocher les différentes facettes
de la problématique. Les variables qui constituent notre cadre conceptuel et figurent dans notre
guide d’entretien, sont empruntées de la revue de la littérature, des entretiens exploratoires et
des travaux empiriques.
Le guide d’entretien a été structuré en deux volets. Le 1ervolet relatif aux informations
générales concernant le terrain d’étude et le 2eme volet concerne des informations relatives aux
différents thèmes constituant l’objet de notre recherche à savoir : la GRH et ses principales
composantes, la gestion des compétences et l’articulation entre les composantes GRH et la
compétence.
D’après Igalens et Roussel (1998), la triangulation des données consiste à obtenir des informations de sources différentes concernant la
29
même question de recherche. Une réponse homogène a une grande probabilité d’être exacte à l’issus de l’analyse de ces informations.
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Pour confirmer ou infirmer nos hypothèses de départ, nous avons tenté d’évaluer le cadre
juridique régissant les ressources humaines (SGFP) et le mode de GRH pratiqué au sein du
MEN tout en les rapportant à la notion de compétence.
2.2.1. Cadre juridique régissant les RH : Le Statut Général de la Fonction
Publique
Aujourd'hui, 62 ans après l’élaboration du SGFP (1958), de grands changements sont survenus
affectant ainsi son administration et son environnement. Peut-on alors se demander si ce statut
général est toujours valable ; Est-il adapté aux nouveaux besoins des cadres de l'administration
marocaine30? Faut-il le remplacer complètement par un autre statut ou on se contente de
l’améliorer et le réviser ?
Certes, le SGFP a ses atouts. Il offre, en effet, de nombreuses opportunités qu'il est nécessaire
d'exploiter convenablement pour assurer une meilleure GRH. De même, il a fait l’objet de
nombreuses modifications (1958 à 2011) qui ont porté essentiellement sur des domaines
spécifiques (14 textes de loi).31 Néanmoins, en raison des évolutions évoquées précédemment,
certaines dispositions de ce statut se trouvent dépassées et ne cadrent plus avec les besoins d'une
administration moderne et en plein développement, et ce, malgré les quelques
perfectionnements dont il a fait l'objet depuis son adoption en 1958. Nous pouvons limiter les
dysfonctionnements inhérents au cadre juridique régissant les RH dans les lacunes qui entravent
la bonne pratique de GRH, le déséquilibre entre l'unité du cadre et la multiplicité des statuts
particuliers, et les contraintes liées aux rigidités statutaires.
En dépit de ses atouts, dont on a parlé auparavant, les diagnostics que nous avons réalisés
montrent que le SGFP comporte des lacunes sur plusieurs aspects constituant ainsi un frein à la
mise en place d’une gestion des compétences moderne et professionnalisante. Ainsi, dans un
premier temps, nous remarquons que les notions de compétences et de métiers ne sont pas
inscrites du tout dans les articles stipulés dans le SGFP. En 2ème lieu, nous trouvons qu’un même
grade permet d'exercer différents métiers et un métier peut être occupé par différents grades.
Chaque emploi correspond à un ensemble de compétences ; il n'est pas précisément défini, étant
30
Il est à noter qu’un projet pour la refonte du statut est en en discussion depuis quelques années par le
MFPMA
31
MFPMA (2013), la réforme du SGFP : Séminaire organisé par le CAFRAD sur « la réforme, l’innovation, et
modernisation de l’administration publique et des statuts généraux de la fonction publique », Direction de la
fonction publique, Tanger, 7-9 Octobre 2013.
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donné que la définition fonctionnelle des emplois n’est pas encore explicitée dans un répertoire
des emplois vu le manque d’une GPEC ou la difficulté de son application pour la plupart des
administrations. Au niveau du MEN, objet de notre recherche, la GPEC n’est pas encore mise
en place.
De même, le dispositif statutaire en matière d'évaluation du personnel est très limité. Aucun
entretien d’évaluation n'est prévu par le statut et les critères d’appréciation des fonctionnaires
ne se fondent sur aucun élément objectif.
A côté du SGFP et les dysfonctionnements qui en découlent, nous trouvons également une
pléthore de statuts particuliers.
2.2.1.2. La multiplicité des statuts particuliers
32
En 2016, le secteur public employait un effectif de personnel d’environ 860253 dont 583071 fonctionnaires civils de l’Etat (Cours des
comptes, système de la fonction publique, synthèse, octobre 2017)
33
Ce nombre a été réduit récemment à 48 statuts
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Les rigidités du SGFP sont matérialisées par la centralisation de la GRH, et par les mécanismes
comptables et budgétaires en vigueur.
Bref, les résultats auxquels nous sommes arrivés à propos de la corrélation du SGFP avec une
GRH axée sur les compétences, se résument dans le tableau ci-dessous indiqué.
prévisionnelle des RH, comme le REC et la GPEC, leur présence dans l’administration et leur
intégration dans les composantes de la GRH préalablement citées dans le cadre d’une logique
compétence, pourra aboutir à une GRH moderne, efficace et efficiente. (Hypothèse 2).
Les diagnostics que nous avons effectués au sein du MEN ont révélé l’existence de
dysfonctionnements majeurs au niveau des modes et techniques de recrutement, des plans de
RH, de l’identification des besoins et de la lourdeur de la charge administrative et financière
des recrutements. Dans tout le processus de recrutement, c’est généralement le diplôme qui
prime au détriment de la compétence.
Concernant le système de formation au sein du MEN, l’analyse des données recueillies nous a
permis de constater que ce système de formation est inefficace, faiblement lié à une logique
compétence et peu intégré dans le système global de GRH.
Malgré les avantages du nouveau système d’évaluation mis en vigueur en 2006 34, le MEN
éprouve beaucoup de difficultés à mettre en place le système d’évaluation. Il en est de même
pour beaucoup de départements ministériels « les administrations font face à des difficultés
réelles pour mettre en application le dispositif de notation et d’évaluation résultant du décret de
2005.... C’est que la plupart des administrations ne semblent pas encore être en mesure
d’assigner des objectifs précis à leur personnel, ce qui en dit long sur les chances d’introduction
dans l’administration du système de gestion fondé sur les résultats »35.
Au niveau du MEN, qui regroupe 48,6% de l’effectif budgétaire global de l’Etat36, l’évaluation
du personnel en tant que telle n’est pas du tout pratiquée. Les responsables au niveau des
administrations centrales se limitent à la notation et à l'appréciation générale prévues par le
statut. On en déduit donc que le système d’évaluation tel que pratiqué au sein du MEN est
déconnecté des autres composantes de la GRH (recrutement, formation, rémunération,). Il s’agit
d’une simple formalité administrative servant pour la promotion sur la base de l’ancienneté. De
34
Voir décret de 2 décembre 2005
35
Note de cadrage, Rencontre d’experts GRH sur le Thème : Regards croisés sur le système de notation et d’évaluation dans l’administration
: atouts et limites, Organisée en partenariat entre l’Observatoire marocain de l’administration publique (OMAP) et l’Ecole Nationale
d’Administration (ENA). 4 juin 2014 à l’ENA, Rabat.
36
Ministère de l’économie et des finances, synthèse du Rapport sur les RH , PLF, 2020 Rabat, Maroc
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même le système tel que conçu et pratiqué n’est pas corrélé à la logique compétence et la notion
de mérite. C’est l’ancienneté et le diplôme qui priment au détriment des compétences.
La rémunération des fonctionnaires dans la fonction publique marocaine est régie par des
dispositions législatives et réglementaires qui trouvent leur fondement dans le SGFP et dans
divers statuts particuliers régissant le personnel de l’Etat.
Le diagnostic que nous avons réalisé au sein de l’administration publique en général et au MEN
en particulier a révélé que le système de rémunération tel que pratiqué actuellement souffre de
dysfonctionnements majeurs et ne répond pas aux objectifs d’une administration moderne,
efficace et équitable. Il se caractérise, en effet, par les principales insuffisances suivantes : une
structure de rémunération déséquilibrée, une rémunération non attractive pour les cadres et
cadres supérieurs, la non-corrélation des rémunérations salariales et non salariales aux
compétences.
La GPEC constitue le noyau dur de toute gestion stratégique des RH. Or, le diagnostic effectué
au sein du MEN montre des lacunes importantes à ce niveau. Si certains ministères arrivent à
mettre en place une GPEC quoi que modeste, (MEF, M. Emploi, MFPRA), d’autres
départements, comme le MEN sont encore loin de là. Les responsables des RH sont préoccupés
la plupart du temps par la gestion administrative courante et n'ont pas encore une connaissance
assez mure en gestion stratégique et qualitative des RH.
S'inspirant des méthodes qui ont fait leurs preuves dans le monde de l'entreprise,
l'administration marocaine s’est engagée dans un vaste programme visant le
développement, voire la réhabilitation, de ses effectifs. « Le caractère pléthorique des
effectifs qui plombe la masse salariale, leur mauvaise répartition, la multiplicité des
statuts, un système de carrière essentiellement basé sur l'ancienneté, un système de
notation et de promotion peu transparent, l'absence de toute gestion prospective
concernant la carrière des fonctionnaires, autant de dysfonctionnements sources de
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Ministèr M.
Départements MEN MMSP e de Jeunesse MEF
Questionnements l’Emploi et sport
Engagement dans la Oui Oui Oui Oui Oui
démarche 2006 2006 2006 2006 2006
Quelle Année ? B. B. B. B. B.
Bureau d’étude ou non d’étude d’étude d’étude d’étude d’étude
Mode ou nécessité ? nécessité nécessité nécessité nécessité nécessité
Démarche achevée REC O/N O O O O
Démarche achevée GPEC N O O N O
Mise en application N N O/N N O/N
Facilité d’application N N N N N
Implication des cadres N Oui 30% N Oui
Le SGFP est-il un obstacle
à la mise en place de la Oui Oui Oui Oui O/N
GC ?
Tableau n°3 : Evolution de la Gestion des Compétences dans quelques
départements ministériels
Source: Construction personnelle, suite aux entretiens effectués
La lecture de ce tableau montre que tous les départements ont été conscients de la nécessité
d’adopter une démarche compétence. Généralement, c’est en 2006 que les différents
37
ZEIDGUY R, (2007) « Les nouvelles approches de la gestion des ressources humaines dans la fonction publique au Maroc » dans un
séminaire sur « les administrations publiques dans les pays arabes méditerranéens », Conférence du Groupe Européen d'Administration
Publique, INAP, Madrid 19-22 septembre 2007.
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départements ministériels ont commencé à mettre en œuvre une GPRH axée sur la compétence,
à travers l'élaboration de leurs REC et la mise en place de la GPEC. Ces derniers constituent,
certes, un préalable nécessaire et une véritable clé de succès de toute politique moderne de GRH
axée sur les compétences.
Aujourd’hui tous ces départements ont finalisé plus ou moins leur REC. De même certains
d’entre eux, comme le MFPMA, le Ministère de l’emploi et le MEF, ont mis en place l’outil de
GPEC. Mais le problème réside dans la mise en pratique de ces outils en liaison avec le système
de GRH. Presque tous les responsables interviewés ont éprouvé de grandes difficultés pour
mettre en pratique les outils de la GPRH. Les raisons diffèrent selon chaque département
(manque d’engagement, non implication des acteurs, manque de RH compétentes, etc.). Au
niveau du MEN, le projet GPEC a été lancé avec un bureau d’étude comme le cas, d’ailleurs,
des autres départements mais il n’a pas abouti.
La question de l’inadéquation entre les compétences des individus et les emplois qu'ils occupent
n'est pas propre au MEN. Pratiquement, toutes les organisations la subissent en raison,
notamment, de l’accélération du changement et les conséquences qui en découlent sur les
métiers, et de l'évolution des technologies de l'information. Toutefois, compte tenu de
l'importance de ses effectifs, de l'évolution de ses missions et de la priorité accordée aux
garanties juridiques énoncées dans le SGFP, l'administration se trouve confrontée à des
contraintes particulières. En effet, le système de carrière de la FPM offre un cadre de gestion
ambivalent. Ainsi, la grande stabilité des personnels et l'évolution rapide des métiers créent un
risque d'inadéquation entre les compétences des individus et les contenus des postes.
Les techniques de collecte des données à travers la démarche qualitative que nous avons adoptée
dont notamment l’observation directe et les entretiens effectués à la fois avec des responsables
et des cadres au sein de l’administration centrale du MEN, nous a permis de constater que la
question de l'inadéquation entre les compétences et les emplois trouve son origine dans les
pratiques de GRH et surtout au niveau des activités de recrutement, formation, affectation,
évaluation, etc.
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Conclusion
Le diagnostic que nous avons effectué, au sein de l’administration publique en général et du
MEN en particulier, a montré que la notion de compétence est rarement prise en compte dans
les pratiques de GRH. Le MEN est encore ancré dans le mode classique de GRH. La corrélation
entre les variables de la recherche (recrutement, formation, évaluation, rémunération) et la
compétence est pratiquement faible en raison de l’absence des outils modernes de GRH (REC-
GPEC).
Par ailleurs, la gestion statutaire qui a prévalu jusqu'à présent relève d'une logique basée
essentiellement sur les aspects réglementaires, juridiques et quantitatifs, écartant la prise en
compte des compétences du personnel. Ainsi, le SGFP constitue pour l’administration moderne
une source de blocage pour la mise en place d’une GRH moderne axée sur les compétences.
Des résultats présentés, analysés et discutés, nous pouvons déduire que le MEN éprouve de
grandes difficultés à mettre en place une gestion des compétences à même d’améliorer ses
pratiques de GRH. Tout d’abord, le SGFP, à l’état actuel, constitue un premier blocage pour la
mise en œuvre d’une GRH axée sur la compétence (Validation H1). Ensuite, le mode de GRH,
ancré dans une approche classique, n’est pas favorable pour une GRH qualitative, basée sur la
compétence (validation H2).
Pour pallier aux insuffisances et aux limites qui freinent encore la fonction GRH et pour faire
de celle-ci un levier de modernisation de l’administration, il est nécessaire pour l’administration
d’adopter une politique consistant à rénover ses modes de GRH. La mise en place d'une GRH
dynamique et efficace axée sur les compétences nécessite, à notre sens, de la part des
responsables au niveau de la fonction publique, de créer un environnement favorable à
l'exploitation effective des outils existants, en faisant de la GRH un axe stratégique de l'action
administrative (révision du SGFP), et de la part des responsables du MEN, de moderniser et de
professionnaliser les pratiques de GRH à travers la mise en place d’une GPRH permettant
l'articulation et l'orientation des outils existants.
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BIBLIOGRAPHIE
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