Vous êtes sur la page 1sur 3

Les procédés d’écriture ou figures de style

Définition : Les expressions « figure de style » ou « procédé d’écriture » renvoient à la manière d’employer les mots d’une façon ou d’une autre pour exprimer son
point de vue. Dans la mode, il y a des styles, des manières de s’habiller ; en skate ou snowboard, des manières d’avancer avec plus ou moins de difficulté. En littérature, on
emploie les mots et leur combinaison pour créer des effets. Chaque figure de style ou procédé d’écrire possède un effet propre qu’il faut savoir analyser pour bien comprendre
les intentions de l’auteur et ce qu’exprime le texte.

1) Figures de ressemblances
• La comparaison rapproche deux éléments grâce à un outil de comparaison (comme, tel que, ainsi que, pareil à, semblable à…).
ex. : « Le poète est semblable au prince des nuées. » (Ch. Baudelaire – Les Fleurs du mal, « L’Albatros »).

• La métaphore rapproche deux éléments sans outil de comparaison.


ex. : le manteau de neige, les perles de rosée, un tapis de fleurs …
« Cette faucille d’or dans le champ des étoiles. » (V. Hugo – La Légende des siècles, « Booz endormi »).

• La personnification attribue une pensée ou un comportement humain à un objet, un lieu, un phénomène.


ex. : « La Lune, qui le voit venir, en est toute confuse. » (M.-A. G. de Saint-Amand – Les Œuvres, « Le Soleil levant »).

• L’allégorie représente une idée abstraite sous forme matérielle ou humaine.


ex. : l’horloge ou le sablier pour le temps, la balance pour la justice, la faucheuse pour la mort.
« Je veux peindre la France, une mère affligée qui est, entre ses bras, de deux enfants chargée. » (A. d’Aubigné – Les Tragiques, I).

• La métonymie remplace un terme par un autre, logiquement associé : le concret par l’abstrait, le contenu par un contenant, la partie pour le tout, etc.
ex. : recevoir les lauriers (= la récompense d’un travail), finir son verre (= sa boisson)
« Le fer qui les tua leur donna cette grâce. » (F. de Malherbe – Poésies, « Les Larmes de saint Pierre »)

• La périphrase remplace un terme par une expression de même sens.


ex. : le plancher des vaches (= la Terre), le Toit du monde (= l’Everest)
« La fille de Minos et de Pasiphaé. » (J. Racine – Phèdre, I, 1).

2) Figures d’opposition
• L’antithèse oppose dans une phrase deux mots ou deux notions contraires.
ex. : le petit/le grand, le noir/le blanc, le gentil/le méchant, l’avare/le généreux
« Un ver de terre amoureux d’une étoile. » (V. Hugo – Ruy Blas, II, 2).

• L’oxymore oppose dans un même G.N. un nom et un adjectif de sens contraire.


ex. : « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles. » (P. Corneille – Le Cid, IV, 3)

• Le chiasme inverse symétriquement l’ordre de deux expressions (schéma AB-BA).


ex. : « Il faut manger pour vivre et non vivre pour manger. » (Molière – L’Avare, III, 1)
« Le sein martyrisé d’une antique catin. » (Ch. Baudelaire – Les Fleurs du mal, « Au lecteur »)
3) Figures d’exagération
• L’hyperbole consiste à exagérer la réalité pour frapper l’imagination.
ex. : « Je suis mort ! » (exagération de la fatigue)
« Ses moindres actions lui semblent des miracles. » (Molière – Tartuffe, I, 2)

• La gradation est une énumération croissante ou décroissante.


ex. : « Je me meurs, je suis mort, je suis enterré ! » (Molière – L’Avare, IV, 7)
« C’est un roc ! C’est un pic ! C’est un cap ! Que dis-je, c’est un cap ? C’est une péninsule ! » (Ed. Rostand - Cyrano de Bergerac, I, 4)

4) Figures d’atténuation
• L’euphémisme atténue l’aspect désagréable d’une idée.
ex. : « Hippolyte n’est plus. » (J. Racine – Phèdre, V, 6).
« Cette petite grande âme venait de s’envoler » (V. Hugo – Les Misérables, V, 1, XV).

• La litote atténue une idée pour mieux la renforcer.


ex. : « Va, je ne te hais point. » (P. Corneille).
« Ce n’était pas un sot » (J. de La Fontaine – Fables, VIII, XX).

5) Figures de répétition
• L’anaphore fonctionne en répétant en début de phrase la même expression. C’est un marteau-piqueur de rhétorique …
ex. : moi, président de la République … moi, président de la République … moi, président de la République … (17 fois)
« C'est pour toi qu'on a fait toute cette Iliade ! C'est pour toi qu'on livra ces combats inouïs ! C'est pour toi que Murat … » (Victor Hugo – Les Châtiments, VI, 1)
« Marcher à jeun, marcher vaincu, marcher malade. » (V. Hugo – La Légende des siècles, 1ère série, « Le Petit roi de Galice »)

• L’accumulation ou énumération dresse une liste d’éléments, sans ordre de grandeur.


ex. : « Quand on m’aura jeté, vieux flacon désolé, décrépit, poudreux, sale, abject, visqueux, fêlé … » (Ch. Baudelaire – Les Fleurs du mal, « Le Flacon »)
« Les trompettes, les fifres, les hautbois, les tambours, les canons, formaient une harmonie telle qu’il n’y en eut jamais en enfer. » (Voltaire – Candide, III)

• L’allitération est la répétition d’un même son de consonne dans une phrase ou un vers.
ex. : « Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes ? » (J. Racine – Andromaque, V, 5)
« Tam tam sculpté, tam tam tendu sur ta peau qui se moire » (L. S. Senghor – Œuvres poétiques, « Femme nue, femme noire »)

• L’assonance est la répétition d’un même son de voyelle dans une phrase ou un vers.
ex. : « Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire. » (J. Racine – Phèdre, I, 3)
« Triste et mélodieux délire » (G. Apollinaire – Alcools, « La Chanson du Mal-Aimé »)
Exercice – Dans le texte suivant, retrouvez : personnification, antithèse, hyperbole, anaphore, énumération,
métaphore, métonymie.

Texte support : Sénèque – Thyeste (Ier s. après J.-C.), traduit du latin par Florence Dupont, vv. 753-784

Dans cette tragédie latine inspirée de la mythologie grecque, Atrée a volé le pouvoir à son frère Thyeste. Atrée craint
que les enfants de Thyeste ne revendiquent le pouvoir et ne le détrône. Il décide alors de tuer les enfants de son frère et
de les lui servir à manger lors d’un banquet. Les règles du théâtre antique interdisaient de représenter la mort sur
scène, c’est donc un messager qui vient informer le spectateur de ce qui s’est passé dans les coulisses.

LE MESSAGER Atrée le remet en place


1 Mais voici le crime incroyable dans l’histoire des hommes Malgré lui il brûle
Car on ne peut l’imaginer 30 Malgré lui il reste
Et l’avenir refusera d’y croire Les foies hurlent sur les broches
Il sort les entrailles rituelles de leurs poitrines encore Les flammes et la chair humaine gémissent sous la
chaudes de vie torture
5 Les viscères sont pris de frémissements Une fumée grasse et noire sort du feu
On entend siffler l’air dans les poumons Une fumée de deuil
Le cœur tressaute, terrorisé 35 Elle stagne au-dessus du foyer
Mais, lui, sépare les lobes du foie Au lieu de s’élever dans le ciel
Et consulte les sorts Elle forme un lourd nuage
10 Il examine l’intérieur des organes encore chauds Les dieux de la maison sont entourés d’une horrible
Après avoir vérifié que tout est en ordre vapeur
Que les dieux agréent les victimes Soleil tu l’as laissé faire
Il peut maintenant sans soucis 40 Et après tu t’es enfui
Préparer le repas sacrificiel Tu as reculé
15 Qu’il offrira à son frère. En plein midi tu as plongé le jour dans l’ombre
C’est encore lui qui découpe les corps en séparant les Mais ton soir est venu trop tard
membres Le père est en train de découper ses fils en petits
Il détache les bras du tronc, désarticule l’épaule, il coupe morceaux
les tendons qui retiennent les muscles, d’un geste brusque 45 Il mâche sa propre chair
il fait apparaître les os de l’articulation Et empoisonne sa bouche de cadavre
Puis il désosse les chairs Thyeste brille de partout
Il ne garde intactes que les têtes et les mains droites Ses cheveux sont luisants de parfums
20 La bouche qui parle et la main qui promet Il est abruti de vin
La viande du sacrifice est partagée en deux 50 Par moments sa gorge se serre
Une partie est enfilée sur les broches La nourriture passe mal
Et grillée doucement sur un feu de braises Thyeste est en plein malheur
L’autre est mise à bouillir dans un chaudron Mais il est joyeux
25 Le feu tente d’éviter ces nourritures posées sur lui Parce qu’il ne le sait pas
Le feu saute hors du foyer 55 Et c’est son seul bonheur
Deux fois, trois fois Mais ce bonheur disparaîtra à son tour

Vous aimerez peut-être aussi