Vous êtes sur la page 1sur 6

44-103

Encyclopédie Médico-Chirurgicale 44-103

Amputations et désarticulations
des membres
P Anract
A Camilleri
JY Larivière
Prise en charge du patient avant,
R Terracher
D Ménager
pendant et après l’intervention
G Chiesa Résumé. – Se trouver en situation de décider une amputation ou une désarticulation peut poser à tout
N Vassilief opérateur différents problèmes. Ceux-ci sont évoqués successivement et concernent les étapes qui précèdent,
entourent et suivent l’acte chirurgical.
L’information du patient et/ou de sa famille débute ce processus. Elle est indispensable, objective, adaptée au
contexte pathologique. Elle respecte la psychologie du patient et permet en règle d’obtenir un consentement.
L’anesthésie et l’antalgie sont souvent des aspects concrets qui préoccupent en sus le patient. Accéder à une
antalgie efficace est de nos jours un objectif licite et recommandé, mais c’est aussi sans doute un des moyens
efficaces qui concourt à diminuer ou à éviter l’évolution vers l’algohallucinose.
Quel que soit le contexte ou le site d’amputation, certaines règles techniques générales sont à respecter et
définissent les bases de la chirurgie d’amputation.
Une fois l’intervention réalisée, le plus souvent le patient entre dans une phase de rééducation. Celle-ci est
précoce et constitue la première étape de la réadaptation qui autorise, grâce à l’appareillage, la récupération
fonctionnelle.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Mots-clés : amputation, désarticulation, technique chirurgicale, membre fantôme, prise en charge


psychologique, myoplastie, myodèse, névrome, rééducation précoce.

Aspect psychologique [3, 8, 15, 23, 24] intervient le plus tôt possible dans la prise en charge du futur opéré.
Une amputation imposée au patient sans lui laisser le temps de
l’accepter est probablement nocive et favorise la survenue du
L’environnement psychologique dans lequel se déroule le symptôme du membre fantôme.
« sacrifice » d’un membre revêt une grande importance pour le vécu La prise en charge psychologique des patients lors d’une amputation
de la situation nouvelle qu’est l’amputation, tant pour son ne requiert pas de connaissances élaborées en psychiatrie et en
acceptation que pour la prévention du syndrome douloureux. psychologie, mais simplement du bon sens et du temps afin
Deux situations peuvent se rencontrer : d’écouter et d’expliquer.
Elle est le reflet du respect que le chirurgien doit avoir vis-à-vis de
– l’amputation se discute dans le cadre de l’urgence extrême avec,
son patient. Parallèlement, un soutien psychiatrique ou
parfois, un patient inconscient. Il faut informer le patient, quand
psychologique peut être proposé au patient s’il le souhaite.
cela est possible, ou à défaut un membre de sa famille. L’indication
Cette préparation paraît fondamentale et représente l’essentiel de la
d’amputation dans cette situation doit être solidement étayée par
prévention pour éviter la survenue d’un membre fantôme
des arguments cliniques et radiologiques conservés dans le dossier
douloureux.
médical et si possible des documents photographiques ;
– de façon plus habituelle, cette intervention est programmée. Le
praticien a alors le temps d’informer le patient ; cette discussion Anesthésie et antalgie [1, 2, 6, 10, 11, 12, 13, 18, 19, 20, 21]

La prise en charge par un anesthésiste d’un patient pour une


amputation repose sur les deux points suivants :
Philippe Anract : Chirurgien, praticien hospitalo-universitaire, faculté Cochin-Port-Royal, université Paris V,
service de chirurgie orthopédique B (professeur B Tomeno). – la procédure anesthésique ;
Nicolas Vassilief : Médecin-anesthésiste, praticien hospitalier, service d’anesthésie-réanimation.
Hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France. – la prise en charge du retentissement neurologique et
Antoine Camilleri : Chirurgien, praticien hospitalier, chef de service. neuropsychologique de l’acte chirurgical.
Jean Yves Larivière : Chirurgien, praticien hospitalier.
Richard Terracher : Chirurgien, praticien hospitalier. Si la procédure anesthésique ne diffère pas de celle utilisée pour
Service de chirurgie orthopédique, centre hospitalier, 25, rue Pierre-de-Theilley, 95500 Gonesse, France. tout autre type de chirurgie, le problème qui domine est celui de
Domenico Ménager : Médecin-chef.
Gérard Chiesa : Médecin, chef de service. l’apparition du membre fantôme (hallucinose) et du cortège de
Centre de rééducation et d’appareillage, 2, rue du Parc, 94460 Valenton, France. douleurs qui peuvent l’accompagner (algohallucinose).

Toute référence à cet article doit porter la mention : Anract P, Camilleri A, Larivière JY, Terracher R, Ménager D, Chiesa G et Vassilief N. Amputations et désarticulations des membres. Prise en charge du patient avant, pendant et
après l’intervention. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Techniques chirurgicales – Orthopédie-Traumatologie, 44-103, 2000, 6 p.
Amputation et désarticulations des membres.
44-103 Techniques chirurgicales
Prise en charge du patient avant, pendant et après l’intervention
Le membre fantôme douloureux ou « algohallucinose des amputés » recouvert d’une peau certes de bonne qualité, mais surtout sensible.
réalise un syndrome algique complexe du membre absent et pose la Faire abstraction de cet élément conduirait à des complications lors
question d’une véritable inscription douloureuse dans le système de l’appareillage, du fait de l’apparition de lésions cutanées en
nerveux central. La physiopathologie de ce syndrome qui fait territoire insensible. Celles-ci risquent d’évoluer rapidement vers de
intervenir de très nombreuses structures nerveuses, de l’étage larges zones d’ulcération.
supérieur cortical jusqu’aux éléments les plus distaux comme les
nerfs périphériques, rend le traitement d’autant plus complexe. Potentiel de cicatrisation
Celui-ci est multipolaire et associe des méthodes très variées, Il est lié au contexte vasculaire, apprécié par le bilan clinique et par
psychosomatiques et pharmacologiques, adaptées à chaque les investigations contributives à la décision, telles que le doppler
situation. La durée des différents traitements est très variable et peut ou la pression transcutanée d’oxygène (TcPO2). L’état nutritionnel
conduire, pour quelques rares patients, à un traitement à vie. est également un élément pronostic important, il est jugé sur le
dosage de la protidémie, de l’albuminémie, ainsi que sur le nombre
de lymphocytes, des chiffres respectivement inférieurs à 60 g/L,
Bases de la chirurgie d’amputation 30 g/L, 1 500 lymphocytes sont des données péjoratives.
L’équilibration de la glycémie chez le diabétique est enfin
indispensable [5].
DÉFINITION
Quelle qu’en soit la cause, l’amputation reste de nos jours un acte Tracé des incisions
lourd dans ses conséquences, tant psychologiques que physiques.
Il est effectué en début d’intervention à l’aide d’un crayon
Elle traduit l’échec des traitements médicaux et conservateurs face à
dermographique. Cette étape préalable est nécessaire car elle oblige
une pathologie donnée, mais ne concrétise pas pour autant l’entrée
à envisager les problèmes que l’on souhaite maîtriser, et contraint à
dans une phase d’abandon ou de renoncement. Elle peut se discuter
imaginer la forme définitive que l’on va tenter de donner au
tandis qu’évolue une autre pathologie, elle-même source
moignon.
d’inquiétude. Si la réalisation technique s’apparente à un geste
réputé facile, faisant appel à un matériel simple, plusieurs règles Maniement des téguments
doivent être respectées. L’acte opératoire n’est pas délégué aux plus
jeunes, car il requiert maîtrise technique et minutie. Les plus extrêmes précautions sont requises, d’autant que l’on se
trouve en contexte vasculaire. Les mêmes règles qu’en chirurgie
plastique prévalent et amènent à mobiliser les valves cutanées
UTILISATION DU GARROT manuellement, en évitant l’utilisation des pinces à griffe. Les valves
De type pneumatique, il est placé à la racine du membre. Son usage peuvent aussi être maintenues par des fils montés sur pinces-
est parfois facilité par l’utilisation d’un garrot stérile. En repères. Les qualités mécaniques et le degré de vascularisation des
cancérologie, mais aussi en présence d’une pathologie infectieuse, le téguments sont évalués.
garrot est gonflé après surélévation du membre, sans utilisation de
bande d’Esmarch. Son utilisation est proscrite quand existe une ¶ Muscles
souffrance tissulaire. C’est le cas dans les causes vasculaires, mais
aussi dans certaines situations traumatiques. Exposition et examen
Leur abord reste limité à la réalisation technique souhaitée. Les
dissections étendues aggravent la dévascularisation et favorisent les
INSTALLATION
collections hématiques ou infectieuses.
Il n’y a pas de standard défini. Elle est pensée et effectuée pour aider Un examen minutieux renseigne sur l’aspect, la coloration, la
à la réalisation des différents gestes prévus. Le badigeonnage contractilité. Les tissus musculaires jugés non ou mal vascularisés
extensif est débuté sur le site prévu de l’amputation, puis étendu au sont excisés, pour ne laisser que des fibres bien vivantes.
restant du membre, en terminant par la zone la moins propre. En
contexte infectieux, la partie septique du membre est exclue, pour Muscles et moignon
diminuer le risque contaminant, en l’enfermant dans une chaussette
plastifiée. En regard du site d’amputation, les muscles n’ont aucune utilité
fonctionnelle, puisqu’ils n’ont plus de cible effectrice. Ils améliorent
la trophicité globale du moignon et en capitonnent la partie la plus
PROTOCOLE OPÉRATOIRE distale. Ils sont ajustés par excisions itératives. Cette excision conduit
Plusieurs recommandations sont apportées selon les éléments à raccourcir les muscles à la longueur utile, mais aussi à les
anatomiques auxquels on s’adresse, qu’il s’agisse des téguments, des désépaissir, plutôt par leur face profonde, afin de respecter les
muscles, de l’os, des vaisseaux ou des nerfs. aponévroses superficielles et la vascularisation fasciocutanée.

¶ Téguments Plasties musculaires


Plusieurs techniques ont été décrites :
Trophicité tégumentaire et qualité de cicatrisation
– la myoplastie consiste à suturer dans un même plan, avec une
La peau constitue l’interface avec la prothèse ; sa qualité, peu de tension suffisante, en bout de squelette restant, les groupes
temps après l’intervention, renseigne assez bien sur les chances de musculaires agonistes et antagonistes ; la stabilisation de cette sangle
tolérance de l’appareillage. L’évolution de la cicatrisation en n’est pas toujours aisée, ce qui peut conduire à sa luxation ;
postopératoire conditionne un accès précoce à l’appareillage. Tout
– la myodèse est une adaptation de la technique précédente, où
est fait pour privilégier une cicatrisation de première intention et
l’extrémité osseuse est préparée par forage de plusieurs trous, afin
éviter la survenue d’une nécrose cutanée postopératoire, à moins
de fixer en transosseux, sous bonne tension, les groupes musculaires.
que les conditions locales n’aient incité à choisir une technique de
moignon « laissé ouvert ». Le choix final est lié au contexte, mais combine volontiers
l’utilisation des deux techniques [4, 9, 17].
Sensibilité cutanée On leur reconnaît plusieurs avantages [4, 9] :
L’étude de la sensibilité cutanée en préopératoire est importante, en – elles améliorent le modelage distal du moignon, la vascularisation
particulier chez le patient diabétique, car le moignon doit être cutanée et musculaire, les informations proprioceptives ;

2
Amputation et désarticulations des membres.
Techniques chirurgicales 44-103
Prise en charge du patient avant, pendant et après l’intervention
– elles s’opposent à certaines déformations liées aux déséquilibres Capillaires
musculaires occasionnés par l’amputation elle-même, notamment à
Ils sont souvent bien visibles au niveau des tissus et attestent de la
la cuisse ;
qualité de la vascularisation. Il faut les mettre à l’abri d’une
– elles contribuent à diminuer les douleurs fantômes, ainsi que les compression ultérieure, source d’ischémie localisée, en évitant les
contractions musculaires involontaires douloureuses, lors de la suffusions hémorragiques et hématomes, par une hémostase
station debout et de la marche ; soigneuse et un drainage satisfaisant. Un pansement trop serré, en
– elles ne nécessitent pas de modification du protocole de particulier chez les patients vasculaires, est contre-indiqué.
rééducation.
Elles sont cependant contre-indiquées en présence d’une infection, Hémostase
d’une atteinte musculaire ischémique ou de toute autre circonstance À toutes les étapes de l’intervention, et notamment après la levée
qui peut éventuellement nuire à la cicatrisation. du garrot, elle est réalisée avec soin. Elle est effectuée, selon le calibre
des vaisseaux, soit par ligature, soit par coagulation au bistouri
¶ Squelette
électrique, à l’aide d’instruments fins. Garante de suites simples, elle
Longueur diminue le saignement postopératoire et le risque d’hématome,
Le squelette constitue la structure rigide du segment de membre améliore indirectement la microcirculation tissulaire, abaisse le taux
restant. Il lui faut donc transmettre à l’appareillage les différentes de surinfection.
forces qui permettent au patient de récupérer le mouvement et de
¶ Nerfs
restaurer la fonction. Pour un segment de membre donné, plus le
squelette est long, meilleur est le résultat fonctionnel. Malgré les Indépendamment des gros troncs nerveux, que l’on identifie
progrès réalisés en matière d’appareillage, on ne peut améliorer la aisément, il faut repérer les nerfs à visée sensitive, dont certains
transmission des forces lorsque la longueur du bras de levier est cheminent dans l’espace cellulaire sous-cutané. Ces deux types de
insuffisante. nerfs nécessitent un traitement identique, car ils peuvent être à
Garder le plus long possible, c’est aussi savoir composer avec les l’origine de névromes douloureux. Beaucoup de choses ont été dites
nécessités qui conduisent à l’amputation. ou écrites sur l’attitude qu’il convient d’avoir chirurgicalement à
En chirurgie cancérologique, la détermination du niveau de section propos des nerfs [22].
osseuse est liée, entre autres données, au type de la tumeur, à Un nerf sectionné évolue constamment vers un névrome, qui
l’importance de l’envahissement. Il est très important de respecter correspond au mode de cicatrisation habituel. Celui-ci doit être situé
la stratégie définie, afin d’être carcinologiquement efficace. en dehors des zones de contrainte. Il faut éviter de placer la tranche
En traumatologie, il faut amputer au foyer distal, lorsqu’on se trouve de section nerveuse près de l’extrémité osseuse, dans un site qui
en présence d’une fracture bifocale, ou recourir à un artifice risque d’évoluer vers un tissu scléreux ou cicatriciel, soumis aux
plastique de recouvrement, devant un squelette dénudé. sollicitations mécaniques.
Ce principe, qui concerne la longueur, trouve cependant quelques Le nerf concerné est libéré sur quelques centimètres, attiré vers le
exceptions, notamment au niveau de l’arrière-pied. bas, puis coupé nettement, le plus haut possible, à l’aide d’une lame
de bistouri froid. Le tronc restant se rétracte à l’intérieur des tissus.
Préparation de l’extrémité osseuse Pour les gros troncs nerveux, une hémostase fine ou une ligature de
La section osseuse est réalisée à l’aide d’une scie qui peut être l’artère centrale du nerf est utile, afin d’éviter un saignement
simple, de Gigli ou motorisée. L’extrémité osseuse est traitée afin préjudiciable.
d’être la moins agressive. Elle est débarrassée des spicules Lors de la section d’un nerf, et quelle que soit la modalité
menaçants ; elle est parfois poncée, arrondie, afin de réaliser, en d’anesthésie ou d’analgésie, le cerveau recevrait une information
association avec l’ensemble des tissus, un complexe distal nociceptive dont il conserverait une trace. Pour éviter cet
fonctionnel. L’abrasion des arêtes osseuses est effectuée à l’aide inconvénient, il est recommandé soit d’infiltrer le périnèvre
d’une pince-gouge, d’une scie ou d’une râpe. La poussière d’os est préalablement à sa section par un anesthésiant à base de lidocaïne,
éliminée par un lavage au sérum physiologique. soit d’intervenir sous bloc nerveux [22]. Cette modalité diminuerait
L’attitude par rapport au périoste n’est pas univoque. Certains l’usage des antalgiques en postopératoire et abaisserait la fréquence
préfèrent le réséquer afin d’éviter la survenue d’ossifications, de l’algohallucinose [1, 7, 14, 16].
d’autres recommandent d’en conserver des lambeaux pour les
suturer en bout de squelette. Dans cette dernière éventualité, ils
peuvent être difficiles à individualiser, car réduits à une très fine DRAINAGE ET FERMETURE
membrane, en particulier chez le sujet âgé.
¶ Drainage
En cas de désarticulation, bien que les avis ne soient pas
convergents, la tendance actuelle est plutôt de garder le cartilage. Différentes attitudes sont rencontrées. Si l’absence de drainage est
licite en présence d’une chirurgie propre, limitée, avec décollements
¶ Vaisseaux
peu importants et effacement de tous les espaces par des points
On distingue les pédicules principaux à destinée distale, les d’affrontement, ailleurs la sécurité prime et impose d’assurer
pédicules nourriciers des différents tissus, enfin les capillaires l’élimination des sérosités.
intratissulaires. Dans une ambiance propre, et pour peu que le saignement soit
Pédicules principaux minime, le drain de Redon est une bonne solution. À l’opposé, s’il
existe un doute infectieux ou si une hémostase défectueuse a laissé
Selon le niveau d’intervention, le calibre des vaisseaux est plus ou persister un saignement, il faut mettre en place une lame de Delbet
moins important. Lorsque le calibre le permet, il faut disséquer en séton. Le moignon « laissé ouvert » correspond au mode de
l’artère et la veine et ligaturer l’extrémité des deux types de drainage le plus avancé. Responsable de séquelles dystrophiques
vaisseaux séparément au fil non résorbable, à l’aide d’un nœud de tissulaires, il est réservé aux étiologies infectieuses et vasculaires.
Meunier. Si le calibre des vaisseaux n’autorise pas une dissection
séparée, ceux-ci sont ligaturés ensemble. ¶ Fermeture cutanée
Pédicules nourriciers Non systématique, elle est cependant à privilégier. Elle permet
En amont du site d’amputation, quelle que soit leur destinée, ils l’évolution rapide vers une cicatrice fine, peu adhérente, très
sont respectés par une dissection minutieuse, économe et réduite à avantageuse, en vue de l’appareillage ultérieur. Elle est recherchée
ce qui est indispensable. dès que l’on se trouve dans des conditions de sécurité.

3
Amputation et désarticulations des membres.
44-103 Techniques chirurgicales
Prise en charge du patient avant, pendant et après l’intervention
1 Amputation transtibiale. Pansement. Schéma du
bandage réalisé avec des bandes de crêpe de 15 cm de large.
Le genou est en extension.
A. Débuter au-dessus du genou.
B. Faire deux aller-retour, avec une bande sous ten-
sion.
C. Terminer le pansement, en partant de l’extrémité
du moignon et en remontant des tours de bande
jusqu’au-dessus du genou.

3
*
A

1
*
B *
C

RADIOGRAPHIE POSTOPÉRATOIRE
Elle est réalisée en postopératoire et avant le départ en centre.
Ce document peut avoir une utilité médicolégale et est nécessaire
aux médecins appareilleurs lors de la première consultation.

PANSEMENT
Il est confortable pour le patient, absorbant pour les exsudats, stable
sur le moignon, réalisé pour être le moins douloureux lors de son
ablation. Après l’antisepsie cutanée, selon le type de fermeture
effectuée, on applique directement sur la zone opératoire des
1 3
compresses sèches ou vaselinées. Des pansements absorbants sont
ensuite apposés pour envelopper toute la partie distale du moignon.
Lorsqu’une lame a été mise en place, les compresses circonscrivent 2
ses extrémités, qui sont ensuite enfouies dans les pansements 1
absorbants. Des tours de bandes de crêpe, serrés modérément,
complètent le pansement (fig 1, 2). Le pansement est terminé par
l’application d’une contention tubulaire élastique en filet. Le patient *
A *
B
est installé dans son lit, le moignon en légère surélévation.

a
Prise en charge postopératoire
Débutée rapidement après l’intervention, elle s’évertue à prévenir
l’apparition des troubles orthopédiques et des complications liés au b
décubitus. Un intérêt particulier est porté lors du renouvellement
des pansements, à la réalisation d’une contention, modérément
compressive, par bande de crêpe. Une contention plus puissante,
assurée par un bandage élastique, est proscrite du fait des risques c
encourus, liés à un serrage excessif. Le rôle de ce bandage est
important et son utilisation quasiment constante permet de :
– diminuer l’œdème ;
– limiter, voire faire disparaître les douleurs ;
– faciliter la cicatrisation ;
*
C *
D
– préparer à l’appareillage ultérieur.
2 Amputation transfémorale. Pansement. Schéma du bandage réalisé avec des ban-
des de crêpe de 15 cm de large.
DE L’INTERVENTION AU PREMIER LEVER A. Débuter à la racine de la cuisse.
B. Faire deux aller-retour, avec une bande sous tension.
C. Terminer le pansement, en partant de l’extrémité du moignon et en remontant
¶ Installation du patient jusqu’à la racine de la cuisse.
Elle se fait en règle en décubitus dorsal. La traction continue qui D. Si le moignon est bref, passer le bandage en spica autour de la taille, avec effet
de rappel en extension.
était préconisée auparavant n’est plus utilisée. Lorsqu’il n’y a pas

4
Amputation et désarticulations des membres.
Techniques chirurgicales 44-103
Prise en charge du patient avant, pendant et après l’intervention
de composante vasculaire péjorative, la partie inférieure du lit est
surélevée afin de faciliter le drainage, le moignon est posé à plat sur 3 Amputé transfémoral au cours d’une
compétition sportive.
le plan du lit. L’articulation sus-jacente au moignon est l’objet d’une
attention particulière, afin d’éviter la survenue d’une attitude
vicieuse qui serait de nature à compromettre le résultat final de
l’appareillage. De ce point de vue, l’utilisation de coussins placés
sous le moignon est proscrite, notamment pour le niveau transtibial.

¶ Récupération
Elle consiste en soins locaux et intéresse le recouvrement de la force
musculaire grâce à des méthodes d’éveil et de renforcement. Un gain
progressif sur les amplitudes articulaires est recherché pour préparer
le membre lésé à supporter les contraintes qui accompagneront le
début de l’appareillage. La mobilisation est fréquente, au début
passive puis assistée, de moins en moins, jusqu’à l’obtention de
mouvements actifs. Il faut s’assurer régulièrement de la récupération
d’une amplitude articulaire satisfaisante sur les articulations sus-
jacentes à l’amputation.

¶ Réadaptation définitive avec laquelle le patient peut habituellement rejoindre son


domicile. L’« amaigrissement » du moignon se poursuit de façon
Elle regroupe les soins généraux qui ont pour but le réapprentissage
moins rapide au cours des mois suivants. La deuxième prothèse
des gestes usuels, plus ou moins désappris par l’amputé,
définitive est fournie lorsque la première est devenue trop grande,
éventuellement à l’aide de quelques suppléances.
en général au bout de 3 à 6 mois. L’amputé est alors en possession
Elle vise essentiellement à réautonomiser le patient, en prévenant des deux prothèses définitives appelées « mises » dans le
les complications du décubitus et en lui permettant d’accomplir vocabulaire administratif et qui lui sont attribuées pour une durée
quelques gestes courants.
de 5 ans.
Dans l’intervalle, l’emboîture est changée autant de fois que les
APRÈS LE PREMIER LEVER circonstances liées à des modifications du moignon ou à des
Selon la raison de l’amputation et l’état médical du patient, un altérations de l’appareillage l’exigent, en moyenne tous les 1 à 2 ans.
programme conduit le plus souvent en centre, permet de renforcer
l’autonomie de l’amputé, d’améliorer son entraînement à l’effort afin ¶ Prise en charge par les organismes sociaux
de le préparer en vue de l’appareillage.
Les frais relatifs à la fourniture d’une prothèse pour amputé sont
pris en charge à 100 % par la Sécurité sociale, à condition que les
APPAREILLAGE éléments constitutifs de l’appareil soient inscrits au tarif
interministériel des prestations sanitaires (TIPS).
¶ Évolution
Les demandes d’inscription de nouveaux matériels au TIPS sont
Il est commencé dès que l’état local le permet, au 21 e jour souvent longues et compliquées. De plus en plus, des composants
habituellement. Au moignon, on constate un œdème, même lorsque récents, aux vertus pourtant indiscutables, d’origine étrangère ou
le bandage a été correctement effectué, ainsi qu’un début d’atrophie non, ne peuvent donc être fournis aux assurés sociaux français. La
musculaire. Tandis que l’utilisation du moignon s’intensifie, celui-ci pratique consistant à faire supporter à l’assuré la partie de la
est le siège de changements, qui concernent autant le volume que la dépense non couverte par la Sécurité sociale, bien qu’interdite par
forme et rendent nécessaires les modifications itératives de les textes, se répand. Il devient, en effet, très difficile de limiter
l’emboîture prothétique. Cette phase, dite « d’appareillage l’accès des patients aux matériels performants dont ils prennent
provisoire », va se poursuivre jusqu’à ce que la stabilité de volume connaissance par les médias, ou à l’occasion de congrès et de
du moignon permette la réalisation de la première prothèse manifestations sportives pour handicapés (fig 3).

Références ➤

5
Amputation et désarticulations des membres.
44-103 Techniques chirurgicales
Prise en charge du patient avant, pendant et après l’intervention

Références
[1] Bach S, Noreng MF, Tjellden NU. Phantom limb pain in [9] Gottschalk F. Transfemoral amputation. Biomechanics and [16] Melzack R. Phantom limbs. Sci Am 1992 ; 266 : 120-126
amputees during the first 12 months following limb ampu- surgery. Clin Orthop 1999 ; 361 : 15-22
tation, after preoperative lumbar epidural blockade. Pain [17] Murdoch G. Myoplastic techniques. Bull Pros Res 1968 ; 4 :
1988 ; 33 : 297-301 [10] Jensen TS, Krebs B, Nielsen J, Rasmunsen P. Phantom limb, 9-10
[2] Bromage PR, Melzach R. Phantom limbs and the body phantom pain and strump pain in amputees during the
first 6 months following limb amputation. Acta Neurol [18] Ollat H. Traitement pharmacologique de la douleur neuro-
schema. Can Anesth Soc 1974 ; 21 : 267-274
Scand 1984 ; 17 : 243-256 pathique. Rev Neurol 1992 ; 148 : 521-531
[3] Buckman R. Breaking bad news - Why is it still so difficult? Br
Med J 1984 ; 288 : 1597-1599 [11] Jensen TS, Krebs B, Nielsen J, Rasmunsen P. Immediat and [19] Parkes M. Factors determining the persistence of phantom
[4] Burgess EM, Romano RL, Zettl JH. The management of long term phantom limb pain in amputees: incidence, clini- pain in amputee. J Psychosom Res 1973 ; 17 : 97-108
lower-extremity amputations. Surgery. Immediate post- cal characteristics and relationship to pre-amputation. Pain
surgical prosthetic fitting. Patient care. First edition 1969. 1985 ; 21 : 267-278 [20] Sherman RA. Published treatments of phantom limb pain.
Revised edition 1996 for the world wibe web. Washing- Am J Phys Med 1980 ; 59 : 232-244
ton : Prosthetic and sensory aids service. Department of [12] Katz J, Melzack R. Pain “memories” in phantom limbs
veterans affairs, 1996, http://weber.u.washington.edu review and clinical observations. Pain 1990 ; 43 : 319-336 [21] Sherman RA, Tippens JK. Suggest guidelines for treatment
of phantom limb pain. Orthopedics 1982 ; 5 : 1595-1600
[5] Early JS. Transmetatarsal and midfoot amputations. Clin [13] Katz J, Vaccarino AL, Coderre TJ, Melzack R. Injury prior to
Orthop 1999 ; 361 : 85-90 neurectomy alters the pattern of anatomy in rats. Anesthe- [22] Smith DG, Fergason JR. Transtibial amputations. Clin
[6] Easson WM, Sask S. Body image in children. Arch Gen Psy- siology 1991 ; 75 : 876-883 Orthop 1999 ; 361 : 108-115
chiatry 1961 ; 4 : 619-621
[14] Malawer MM, Buch R, Khurana JS, Garvey T, Rice L. Post- [23] Tomeno B, Anract P. Amputations pour tumeurs. Amputa-
[7] Fisher A, Meller Y. Continuous postoperative regional anal- operative infusional continuous regional analgesia - a tech- tions du membre inférieur. In : Appareillage et rééduca-
gesia by nerve sheath block for amputation surgery: a pilot nique for relief of postoperative pain following major tion. Paris : Masson, 1996 : 41-48
study. Anesth Analg 1991 ; 72 : 300-303 extremity surgery. Clin Orthop 1991 ; 266 : 227-237
[8] Fisher K, Hanspal RS. Phantom pain, anxiety, depression, [24] Tomeno B, Anract P, Ouaknine M. Psychological manage-
and their relation in consecutive patients with amputated [15] Marsden F. Amputation: surgical technique and postop- ment, prevention and treatment of phantom pain in ampu-
limbs: case reports. Br MedJ 1998 ; 316 : 903-904 erative management. Aust N Z J Surg 1977 ; 47 : 384-392 tations for tumours. Int Orthop 1998 ; 22 : 205-208

Vous aimerez peut-être aussi