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VOLUME I
Présentée par :Mlle ASSOUMACOU Elia Béatrice le 21 Septembre
2010 à 9 heures à l’Espace DEGS
A
A
THESE DE DOCTORAT NOUVEAU REGIME EN SOCIOLOGIE
VOLUME I
B
REMERCIEMENTS
Nous tenons à exprimer nos profonds et vifs remerciements à toutes les personnes, qui ont
contribué à la réalisation de la présente thèse, et plus particulièrement à:
- Le prince Dina Guy HERIMISY, qui a bien voulu faciliter la réalisation de nos
recherches sur terrain,
À qui nous voudrions exprimer notre profonde gratitude.
A
Qu’il veuille bien trouver ici l’expression de nos sincères remerciements et
l’assurance que nous resterons fidèles aux bons préceptes reçus à l’issu de notre
entretien durant son séjour à Madagascar.
- Enfin, nous remercions tous ceux qui, de près ou de loin, ont contribué à
l’élaboration et à la réalisation de cet ouvrage.
B
SOMMAIRE
CHAP. II.TROMBA
3.1. Le sikidy
3.3. La sorcellerie
DEUXIEME PARTIE : RITES FUNERAIRES : PRATIQUES IDENTITAIRES DANS
LE « BOENY »
4.1. Lanonana
4.2. Famadihana
4.3. Fanompoa be
4.5. Tsangan-tsaina
4.6. Fitampoha
4.8. Havoria
4.9. Ati-damba
C
CHAP V. ELEMENTS DETERMINANTS DE LA REPRODUCTION SOCIALE
D
AVANT- PROPOS
Chaque ethnie située dans les différentes régions de Madagascar a ses propres
ressources : naturelle, humaine, culturelle, économique, etc., qui permettraient de dégager
des efforts pour son développement.Cependant, on ne peut pas s’isoler à soi même,
l’interactivité est un impératif.
Ainsi, l’actuel ouvrage décrit dans ses grandes lignes les croyances
traditionnelles en pays sakalava pour valoriser et pérenniser l’identité , équilibrer les
relations traditionalité et modernité , surtout du point de vue de ralliement et de
compatibilité . On y attribue à chacun un rôle de conscientisation et de prospection aux
changements des fonctions des rites funéraires.
La question qui se pose est : dans quelle mesure les interactions entre l’organisation sociale et
les rites funéraires, peuvent-elles participer à une régénération de la logique du social au
titre de facteurs dynamisant et de moteur pour tout développement et toute pérennisation de
l’identité culturelle ?
E
Mais avant d’identifier les problèmes, de recontextualiser la structure et
l’organisation de la société sakalava, il faut disposer d’une vision multidisciplinaire et
d’une analyse socio-anthropologique afin de bien interpréter les phénomènes sociaux.
F
INTRODUCTION GENERALE
Intérêt du thème
Les rites funéraires que l’on retrouve en pays sakalava1, en tant que symbole
d’existence, permettent aux vivants d’honorer leurs membres de famille, de faciliter le
passage de ceux-ci vers l’autre monde et aux défunts de sentir le dernier moment sur terre,
dans le monde visible en sortant par la porte de bois pour entrer à la porte de pierre2.
Les rites funéraires sakalava du Boeny, à l’instar des diverses identités culturelles
régionales et locales à Madagascar, sont à cheval sur l’ensemble systémique de la structure
sociale globale pour pérenniser et l’identité culturelle sakalava et l’identité culturelle
malgache.
Parce que le fonctionnement des rites funéraires sakalava n’est aujourd’hui qu’un
titre symbolique du pouvoir ancestral transformé et influencé par l’acculturation et la
déculturation.
1
Du sud au nord de la côte Ouest de Madagascar.
2
La porte de la maison était toujours en bois dans la société primitive mais il est à signaler qu’on en
voit en métal ou en vitrine de nos jours. Donc l’homme sort par la porte de la maison à sa mort pour
entrer à la porte du tombeau qui est en général en pierre.
3
Car il s’agit, chez les Sakalava, du fahavoazana : qui signifie perte ici et de mauvaise nouvelle
quand on annonce la mort d’un individu.
1
Contexte
Dans la région Boeny en général, et au sein des trois doany (Bezavo, Betsioko,
Mahabo), les rites funéraires sont très particuliers chez les Sakalava. Quelles que soient leurs
motivations, les rites funéraires désignent à la fois l’identité culturelle des Sakalava ainsi que
leur volonté de pérennisation.
En effet, ce sont des pratiques qui traduisent aussi bien la diversité ethnique que la
spécificité culturelle existante à Madagascar. Elles sont présentes dans chaque région et
s’orientent vers un même objectif, mais elles ont quand même quelques divergences en ce
qui concerne la forme, la dénomination et le déroulement. Bien qu’il y ait ces variantes
mineures, les rites funéraires permettent de reconstituer les relations entre les morts et les
vivants.
Dans le contexte actuel de la mondialisation, les sciences sociales ont une fonction
autre que celle pour laquelle elles ont toujours été conçues du point de vue des intérêts des
pays riches, principalement des pays américano-occidentaux.
Pour ces derniers, les sciences sociales ont à œuvrer pour la systématisation de
l’économie néolibérale dans le contexte durable de la domination, de l’exploitation des pays
pauvres par les pays riches.
De notre point de vue , celui des pays pauvres ,les sciences sociales ont à se
positionner sur une dimension à la fois des contestations et d’intégrations au sein de cette
logique des pays riches.
2
Techniquement et relativement, la mondialisation a transité sur 4 étapes dans
l’époque moderne :
Relation qui a été formalisée dans le cadre du partage du monde entre pays
colonisateurs et pays colonisés.
Alors que pour les pays dominés, cela a été la souveraineté nationale. Cette
troisième étape s’est soldée vers les années 80 par la stratégie de l’ajustement structurel.
Il n’était plus question de procéder à des génocides et des assassinats des chefs
politiques des pays pauvres , il suffisait de poser dans les termes des échanges la volonté de
financement de la part des pays riches dans la mesure où les pays pauvres veulent bien se
soumettre à des conditions imposées par les pays riches pour leur processus de
développement.
4
Centre : pays américaino-occidentaux, périphérie : pays africain, asiatique, américain-latinien,
océanien.Cf.AMIN S. (1970), L’économie à l’échelle mondiale, Paris, Edition Anthropos.
3
Ces conditions posent les règles d’actualisation du système de l’économie de traite
héritée de la colonisation, sauf ici on ne parle plus de métropole mais de banque mondiale,
des fonds monétaires, etc.
-En la quatrième étape, il n’est plus question pour les pays pauvres de se laisser
aller à une attitude attentiste. La mondialisation étant irréversible et incontournable, il
faut y faire face en cherchant une meilleure intégration.
Cette quatrième phase de la mondialisation impose aux pays pauvres des mesures
d’ajustement des dynamiques intra et intersectoriels pour insuffler à la base économique un
élan rationnel dans le sens de l’autonomisation de mouvement de la structure sociale globale.
4
Ainsi , la question est -elle pour l’heure d’identifier et de déterminer le mode
d’intégration de ces deux éléments essentiels dans une logique d’efficacité opérationnelle des
apports de la multiculturalité et / ou de l’interculturalité véhiculée par la mondialisation au
profit des masses ?
Ensuite, après avoir passé une bonne décennie pour des études universitaires à
Antananarivo et à Fianarantsoa, nous aurions encore voulu nous spécialiser dans la
5
rubrique : anthropologie culturelle pour apporter le peu de fruits que nous avons récoltés
d’une part, et mettre en pratique les quelques savoirs dont nous nous sommes appropriés
d’autre part, en savoir faire et en savoir être.
Enfin, pour nous permettre de mieux assumer nos futures attributions dans la
carrière enseignante, le choix du thème : « Les rites funéraires royaux dans le Nord-Ouest de
Madagascar », cas de la région Boeny, a été fait sans hésitation.
Située sur la partie Nord-ouest de la Grande Île, la région Boeny est composée de 6
districts dont Mahajanga I comme chef-lieu de région, Mahajanga II au nord, Soalala à
l’extrême sud-ouest, Mitsinjo à l’ouest, Marovoay au centre-sud et Ambato Boeny à l’Est. La
région occupe une superficie totale de 29.830 km25.
Par rapport aux autres régions, celle du Boeny est délimitée géographiquement : au
nord par la région Sofia, à l’est par la région Betsiboka, au sud par la région Melaky, à l’ouest
par le Canal de Mozambique.La carte géographique (cf. Annexe n°02) nous donnera plus de
clarté.
5
Inventaire de Fivondronana / 1989. Ministère de l’Agriculture de l’Elevage et de la Pêche. Instat in
PRD Boeny 2005.
6
Toutes les zones de pêche correspondent à des baies ayant des caractères communs :
une profondeur relativement faible, la nature vaseuse ou sablo-vaseuse du fond, la présence de
zones de mangroves bien développées.
Par ailleurs, la région Boeny est largement drainée par un réseau hydrographique
particulièrement dense qui met à sa disposition un capital en eau inestimable, susceptible de
dynamiser les activités liées au transport fluvial et maritime, à l’alimentation en eau et à
l’énergie hydroélectrique. Les rivières sont constituées par : la Mahajamba, la Betsiboka, et la
Mahavavy Sud.
Les flux successifs de migrants ont refoulé vers les franges littorales ou les plateaux
intérieurs, les autochtones généralement allergiques à tout contact avec les étrangers pour des
raisons essentiellement d’ordre culturel et cultuel fondées sur le Doany (c’est-à-dire, le lieu, la
case où reposent les reliques sacrées des principaux souverains du passé).
6
PRD Boeny 2005.
7
est de même pour les émigrants des Hautes -Terres présents dans la partie centrale : à
Marovoay et à Ambato Boeny. Elle constitue le moyen le plus efficace pour relever, analyser
et comprendre les relations spatiales entre les régions voisines et l’intérieur de ladite région :
la région Boeny (cf. Annexe n°2).
Après avoir présenté la région Boeny, nous allons voir plus particulièrement la
commune urbaine de Mahajanga qui n’est autre que le chef-lieu de la dite région.Sur le plan
géographique, cette commune est située dans le centre-ouest de la province de Mahajanga,
sur la rive droite de la Bombetoka.
La côte de la ville qui s’étire sur 10 km est baignée par les eaux salées du Canal de
Mozambique. Sa superficie est de 53 km2, soit 0,35% de celle de la province. Dans le cadre de
la géographie administrative, la commune en question est à la fois chef-lieu de la province de
Mahajanga et chef-lieu de la région Boeny ; elle est aussi la capitale du royaume Sakalava.
Cette commune est limitée à l’Ouest par le Canal de Mozambique, à l’est, au sud et au nord
par le district de Mahajanga II.
Au cours du XVIIIème siècle, bien que faisant partie du royaume sakalava du Boeny,
la cité jouissait d’un statut autonome particulier. Au début du XIXème siècle, le roi Radama 1er
entreprit la conquête du Boeny et combattait à plusieurs reprises les troupes de la royauté
sakalava. Andriamandisoarivo8suivant les directives d’Andriamisara, donna le nom
« Andriamisara Efadahy » (Andriamandisoarivo, Andriandahifotsy, Andriamboeniarivo,
Andriamisara).
C’est un roi sakalava, très célèbre qui avait dirigé Mahajanga pendant une grande
partie de l’époque anti-coloniale. Il avait son propre Doany, renommé depuis 1973 « Doany
7
Terme désignant les populations qui viennent d’au-delà des mers, les Arabes, les Comoriens ou les
Indo-pakistanais, groupes islamisés, ils sont surtout des commerçants.
8
Andriamandisoarivo : le Roi fondateur du royaume du Boeny, fils d’Andriandahifotsy ou
Andrianihanina. Il a quitté le royaume du Menabe pour fonder son propre royaume après un litige
l’opposant à son frère.
8
Miarinarivo » à Mahajanga I, situé dans le quartier de Tsararano Ambony. Il convient de
mentionner que le « Doany » est un lieu sacré pour les communautés traditionalistes.
En outre, les Comoriens avaient aussi construit leur propre expression « Moujanga ».
Fondée en 1745, la capitale du Boeny fut transférée de Marovoay à Mahajanga. A l’époque,
des commerçants ou des négriers, des Arabes et des Indiens se livraient déjà à un trafic
florissant sur les côtes malgaches.
D’une vision globale, la ville est cosmopolite avec la forte présence de divers
groupes sociaux. Les flux successifs de migrants ont refoulé les autochtones sur leurs
pratiques traditionnelles. La religion traditionnelle, accompagnée de ses rites et ses interdits
représente encore un élément fondamental d’identité culturelle et d’unité ethnique dont les
Sakalava sont très fiers. La commune en question est composée de 26 fokontany dans
lesquels on peut faire une légère distinction en matière d’activité quotidienne et d’ethnicité.
Problématique
Il nous revient ainsi, autant que faire se peut, de part les faibles moyens qui sont mis
à notre disposition, d’identifier les mécanismes d’impacts des éléments superstructurels pour
nous permettre de cerner le sens évolutionniste de la logique sociale présente ; ceci donc, afin
9
d’utiliser les éléments nécessaires pour la conception d’une stratégie de développement local,
régional, national.
Dans quelle mesure les interactions entre l’organisation sociale et les rites funéraires,
peuvent elles participer à une régénération de la logique du social au titre de facteurs
dynamisant et moteur de tout développement et de pérennisation de l’identité culturelle , en
nous limitant au contexte de la région Boeny ?
Objectifs généraux
En troisième lieu alors , nous avons à esquisser sur le plan prospectif le mode par
lequel l’unité de ce culturel et de cet organisationnel peut participer à la rationalisation des
rapports dialectiques entre la tradition et la modernité pour une meilleure intégration des
sociétés malgaches à la mondialisation.
Objectifs spécifiques
10
- Comment s’articulent sur le plan régional et local les trois niveaux de la
structure sociale globale dans l’identification spécifique des fonctions du culturel et de
l’organisationnel ?
- Comment les rites funéraires sakalava et les volontés d’innovations culturelles
régionales et locales peuvent – ils être intégrés à une dynamique de synergie pour une
dialectique tradition –modernité, participant à une reconstruction du social œuvrant de
façon positive à l’opérationnalisation des principes d’ouverture proposés par la stratégie
nationale du développement qui est en cours sur le plan politique .
Hypothèses
En hypothèse globale, nous proposons, compte tenu des fonctions récurrentes des
traditions culturelles et identitaires malgaches, l’impossibilité d’opérer une rupture entre la
tradition et la modernité .Quelle qu’en soit la forme et la finalité de cette relation, les forces
d’impacts de la mondialisation et de la globalisation sont considérables.
De là, nous avons voulu nous situer à trois niveaux d’hypothèses spécifiques :
- Les rites funéraires royaux sakalava constituent –ils une base sine qua non de la
pérennisation à la fois des identités culturelles locales et principalement de l’identité
culturelle malgache dans la perspective des fonctionnalités efficientes des principes
de la stratégie ponctuelle et de la politique de développement ;
- Les rites thanatologiques malgaches définissent les aspects à la fois impératifs et
multidirectionnels d’une logique de maintien et de la pérennisation du concept de
malgachéité dans cette optique .L’enracinement psychique de cette dimension
thanatologique de l’identité du malgache détermine l’actualité permanente d’une
tradition de refus de l’ingérence dite étrangère par rapport aux épreuves historiques
d’une conscience nationale aguerrie ;
- A l’exemple du phénomène de genre féminin dans l’Ouest et le Nord –Ouest
malgache , la rationalité économique dans sa logique néolibérale a des dimensions
ponctuelles objectives et prospectives pour ce qui concerne la réussite de
l’entreprenariat rural c'est-à-dire sur une dimension agro-industrielle ,
industrialisant.
11
Ces trois niveaux d’hypothèses nous amènent à la formulation d’une hypothèse
synthétisante dans la part des responsabilités des sciences académiques, dans le domaine des
exigibilités des sciences appliquées.
Les sciences sociales peuvent - elles constituer des forces de synthèse régénératrice
de la dynamique de toute dynamique sociale en terme de synergie pour une mondialisation ,
une globalisation humanisant dans l’intérêt d’un vivre ensemble mondial , excluant ainsi la
vision manichéiste dans le rapport entre tradition et modernité ?
Méthodologie
Documentation
La recherche documentaire ou la documentation a une place significative dans toutes
les recherches en sciences sociales. Elle aide le chercheur à situer sa position vis-à-vis de la
réalité passée.
-la vision et le suivi des réalités quotidiennes à partir de la scène médiatique publique
et privé (journaux, presse écrite, radio, télévision, etc.) ;
12
et peuvent ainsi faire l’objet de corpus autonomes, distincts et complémentaires de ceux que
produit l’enquête sur terrain.
Démarche
Notre démarche d’investigation qui a été sous-tendue par 3 niveaux d’approches
est à la fois hypotético-déductive et inductivo-déductive :
Instruments d’analyse
La multiplicité des domaines investis par la science sociale et la multidisciplinarité y
afférente ont été valorisées à leur juste valeur dans le recours relatif simultané mais articulé
aux divers concepts.
Pour cette recherche, nous adoptons une approche individualiste, pour laquelle
« tout fait social n’est que la résultante de l’interaction d’un ensemble de comportements
individuels, même lorsque ceux-ci se trouvent soumis à l’influence de normes ou de valeurs
13
collectives »9.Toutefois, il nous faut adopter certains regards holistes, dans la mesure où la
théorie susmentionnée admet les influences des « normes ou des valeurs collectives ».
Technique d’enquête
Sociologie, anthropologie, et histoire, bien que partageant une seule et même
« épistémologie »11, se distinguent par les formes d’investigation empirique que chacune
d’entre elles privilégie, à savoir les archives pour l’historien, l’enquête par questionnaires
pour le sociologue, et le « terrain » pour l’anthropologue. Il ne s’agit là que de domaines
indépendants, et il n’est pas rare que l’on aille en emprunter chez l'une ou l'autre discipline.
En particulier, l’enquête sur terrain a acquis une place non négligeable en sociologie.
En fait, il n'y a aucune différence fondamentale, quant au mode de production des données,
dite parfois « qualitative », entre la sociologie et l'anthropologie.
Alors, une descente sur terrain s’avère nécessaire et impérative pour vérifier la
validité et la fidélité des hypothèses ainsi qu’assurer la valeur empirique de l’analyse. Une
9
FERREOL G. et alii, (1991 – 1995) Dictionnaire de sociologie, Cursus, Armand Colin, Paris, art.
« Individualisme méthodologique ».
10
FERREOL G. (2007), Les méthodes quantitatives, Cours de DEA en Sociologie, Fac .DEGS,
Université d’Antananarivo.
11
PASSERON J-C., (1991), Le raisonnement sociologique. L'espace non-poppérien du raisonnement
naturel, Paris, Nathan.
14
petite enquête a été effectuée auprès des diverses catégories de personnes dans le but de
compléter les données déjà recueillies.
-L'entretien libre laisse à l’interrogé toute latitude de réponse. Il vise à recueillir des
données riches en signification mais rend délicat le contrôle des réponses. Celui-ci a été fait
auprès du Prince Guy Herimisy12, fils du feu Mpanjaka Dezy, (actuel dirigeant du doany
Miarinarivo) ainsi qu’à ses conseillers.
12
Il est en conflits avec le Prince Richard, un fils naturel et reconnu du feu Commissaire des polices
NANY Charles qui était un fils d’une princesse sakalava et du feu NANY Alfred, président du
ère
parlement de la 1 République 1960 – 1972.
13
Cf. Chapitre V.Les éléménts déterminants de la reproduction sociale.
15
-Enquête par questionnaire
Nous avons mené une enquête par questionnaire qui relève des informations
circonscrites et codées sur la base d’échantillons raisonnés et dotés de critères de
représentativité, dans une situation artificielle interrogatoire dont les réponses sont
consignées. Par contre, dans une optique anthropologique qui se veut au plus près des
situations naturelles des sujets, il nous a fallu produire des connaissances « en situation »,
contextuelles, transversales visant à se rendre compte du point de vue de l’acteur, des
représentations ordinaires, des pratiques usuelles et de leurs significations.
L’enquête par questionnaire permet de saisir une réalité plus vivante bien que les
opinions et attitudes de la collectivité ne fournissent qu’une opinion moyenne. Elle a pour but
d’étudier la collectivité dans son contexte socio-économique ou d’une façon générale, dans
son cadre habituel. Quant au choix du questionnaire, nous avons fait beaucoup d’efforts pour
être plus objective et neutre, et surtout nous avons aussi fait en sorte que les questions soient
simples et compréhensibles.
En effet, après avoir établi plusieurs petites questions, nous avons procédé à
l’enquête aux différentes catégories de population, les devins, les membres de la famille
royale, les autorités, habitants, etc. En fait, l'enquêté n'a plus la latitude de commenter ses
réponses : il répond par oui ou par non ou bien en termes de préférences.
Enfin, cette technique de question fermée rend possible une codification immédiate
des réponses et, par conséquent, leur quantification ainsi que leur traitement statistique.
Comme dans l'interview de type inorganisé, le rôle de l'enquêteur consiste moins à interroger
le sujet qu'à l’aider, à éclairer lui-même l'incidence du stimulus sur ses attitudes et son
comportement.
-Echantillonnage
Il s’agit de choisir un certain nombre de personnes dit « échantillon », si bien que les
observations faites puissent être généralisées à la population mère.
Autrement dit, il faut donc que l’échantillon présente les mêmes caractéristiques que
la population. C’est la représentativité de l’échantillon. Il est évident que la validité et la
fidélité des résultats d’une enquête dépendent de l’échantillon interrogé.
16
Nous nous sommes servies de deux types de démarches : d’une part, nous avons
mené des enquêtes rapprochées, c'est-à-dire que nous avons approché des ménages, pour avoir
un schéma presque semblable à des réalités vécues. D’autre part, nous avons décidé de nous
poster pendant quelques temps dans le doany, pour interviewer les responsables rituels.
Le noyau de ce travail est constitué par 600 personnes (dont 400 de sexe féminin et
200 de sexe masculin), elles sont concernées directement ou indirectement par les rites
funéraires, et elles habitent dans la région Boeny. Nous avons choisies ces personnes selon un
critère précis, et selon leur quota au sein du quartier (pratique ou non du tromba, niveau de
vie, situation matrimoniale, membre ou non de la famille royale, etc.). Le tableau n°01 qui
suit nous donne plus de clarté.
Sexe Nombre
Masculin 200
Féminin 400
Total 600
Source, résultats d’enquête, Région Boeny, 2008.
Il existe une fausse idée qui stipule que les traditions constituent un frein pour le
développement. Nous avons relevé cette information au cours de notre pré-enquête. Alors que
chaque individu doit avoir des comportements et des visions moins réticentes de la tradition.
C’est pour cela que des enquêtés qui ne sont pas Sakalava figurent parmi notre échantillon,
pour avoir la perception multiple, concernant notre sujet d’étude.
Il n’est pas séant de ne considérer que ceux qui pratiquent les rites funéraires. Les questions
de représentativité sont en jeu. C’est pour cela que nous intégrons des gens qui n’en
pratiquent pas, pour avoir leur vision sur la question et les raisons qui les motivent. Nous
17
avons aussi cherché des personnes qui respectent mais ne pratiquent pas les rites funéraires.
Ce qui n’a pas été facile, puisqu’il a fallu mener une exploration poussée et longue pour
pouvoir les approcher.
Devins 76 40 52,63
Médiums 116 100 82,20
18
Limites et problèmes rencontrés
L’insertion du chercheur dans une société ne se fait jamais avec la société dans son
ensemble, mais à travers des groupes particuliers. Il s’insère dans certains réseaux et pas dans
d’autres. Ce biais est redoutable autant qu’inévitable.
Le chercheur peut toujours être assimilé, souvent malgré lui, mais parfois avec sa
complicité, à un groupe social donné. Nous faisons sûrement face à de tels problèmes. De ce
fait, la plupart des données sont produites à travers les interactions avec les enquêtés et avec la
mobilisation de la subjectivité. Ces données incorporent alors un facteur personnel non
négligeable.
A part cela, la réticence des enquêtés nous a empêché de disposer des données
exhaustives. Toutefois, malgré ces obstacles, nous avons quand même essayé d’atteindre les
objectifs.
En effet, nous nous sommes contentés du peu qu’on nous a donné. Tout cela, pour
dire que le travail de recherche était difficile et il y avait des obstacles mais ceux-ci ne nous
ont pas empêchés de continuer notre recherche.
La deuxième partie sera consacrée aux rites funéraires dans le Boeny. C’est dans
cette partie que nous déterminerons l’approche du sujet : les exemples des pratiques
identitaires malgaches (lanonana, famadihana, fanompoa be, rasa harena, tsangan-tsaina,
19
fitampoha, havoria, ati-damba), les éléments déterminants de la reproduction et les rites
funéraires sakalava.
Enfin, la troisième partie, sera constituée par le changement de fonctions des rites
funéraires. Elle aura pour objet de faire des analyses et remarquer certaines précisions en se
référant à des points de vue de quelques auteurs, de voir certaines remarques sur les conflits
entre modernité et identité locale, le statut de leadership populaire et de l’essence royale et
les jeux interactifs avec la mondialisation.
20
Première partie: THANATOLOGIE ET CULTURE SAKALAVA
« Mourir au loin s’apparente souvent, dans les sociétés archaïques, à la pire des mauvaises
morts pour celui qui meurt et ses proches ».
21
Introduction de la partie
Autrefois, à la mort d’un grand personnage dans les hautes terres centrales, certains
de ses esclaves étaient mis à mort. La plupart du temps on se contentait du sacrifice d’un seul
esclave, s’il ne s’agissait pas d’un grand seigneur de très haut rang ou d’une personnalité
opulente. Cela se passait habituellement de la façon suivante : les esclaves étaient accusés
d’avoir provoqué la mort de leur maître en usant de sorcellerie.
De ceux qui étaient mis à mort de cette façon, on disait « ils sont morts, non pas par
un jugement ».L’ordalie n’était pas une épreuve qui les condamnait car ils étaient
complètement innocents du crime dont on les accusait. Leur mort était décidée d’avance.
La même coutume se rencontrait chez les Sakalava. Là, on ne cachait pas le sens
qu’on y attachait. Leur maître leurs avait donné des coups de pieds, et les avaient traités
arbitrairement. Ces conditions devaient se perpétuer après la mort. Le « lafika »14était alors
ressenti comme « le sommet de l’esclavage ».
On s’en rend mieux compte lorsqu’on sait combien les Malgaches étaient émus par
la pensée que le corps était perdu, c’est-à-dire ne se trouvait pas dans le tombeau de leurs
ancêtres. Le culte des ancêtres était assez souvent marqué dans le paganisme malgache.
Il avait une grande influence sur la morale. La grande piété envers les parents et le
respect de l’autorité paternelle qui est un si beau trait dans la vie populaire malgache ont
leur origine dans les sentiments qui se groupent autour du culte des ancêtres.
14
C’est le fait de « servir les morts ».Durant l’époque royale, les esclaves les plus serviables étaient
choisis pour servir de lit de mort du roi défunt.
22
Mais la crainte ou le « respect » des ancêtres demeure une valeur culturelle de la
société malgache. La pratique toujours courante de diverses coutumes ancestrales est là pour
en témoigner, de même que le soin que l’on apporte à la thanatologie et à la culture.
23
CHAP.I : LES CROYANCES TRADITIONNELLES
Introduction du chapitre
Les gens habitant dans les coins les plus reculés de la campagne et aux confins fonds
de la brousse, préfèrent garder leur religion traditionnelle plutôt que de se convertir au
christianisme qui condamne cette religion et ses pratiques.Les traditionalistes croient en la
vertu de leurs ancêtres comme les chrétiens en leur Dieu.
D’une façon générale, la religion constitue un tout indivisible, formé d’un système
complexe, d’imaginaire, de mythes, de dogmes, de rites et de cérémonies. Il en résulte deux
catégories de phénomènes religieux : croyances et rites. Les croyances sont un mode et un
système de représentation collective. Les croyances constituent une adhésion de tout homme à
une idée ou un objet, à une puissance, un divin sur lesquels se construisent les représentations.
En quelque sorte, c’est à la fois un état de sentiment (émotion) et un acte de volonté (action).
Religions et croyances ont un lien étroit avec la vie au quotidien. Dans ce chapitre
consacré aux croyances traditionnelles, nous exposons Zanahary : Dieu, Razana : ancêtres et
la fonction du sacré : hasina. La réflexion sur le sacré (hasina) a été marquée par les travaux
de DURKHEIM E. sur les rites sacrés et les rites profanes, sur le naturel et le surnaturel.15
1.1.1. Définition
A propos de Zanahary, Andriananahary, et Andriamanitra, qui désignent les êtres
divins en malgache, Otto Christian Dahl écrit : « Ces mots peuvent se référer à toutes les
déités du panthéon malgache et sont alors des noms communs. Quelques fois, on les emploie
aussi pour caractériser les ancêtres morts qui occupent une position divine ».16
Ces désignations divines appliquées aux ancêtres sont donc employées comme noms
communs. Mais les ancêtres n’y ont droit que si les vivants accomplissent les rites funéraires
et post-funéraires indispensables.
A contrario, il n’est pas nécessaire d’être mort pour être ancêtre, des personnes
possédant des connaissances ou des pouvoirs extraordinaires peuvent être considérées comme
ancêtres vivants.
15
Cf.DURKHEIM E., (1912), Les formes élémentaires de la vie religieuse. PUF, Coll.Quadrige(1985).
16
Cf.DAHL OTTO C., (1992), Zanahary, Andriananahary, Andriamanitra, Désignation des Etres divins
en malgache.In Disciplines croisées, hommage à Bernard Phillipier Groslier, Paris, Edition de l’Ecole
des Hautes Etudes en Sciences Sociales.
24
C’est pourquoi, lors d’un enterrement, la distribution des morceaux du bœuf tué à
cette occasion ne s’apparente ni à un holocauste, ni à une offrande, mais manifeste la
participation de chacun à la vie communautaire. C’est un signe d’appartenance. Ce n’est
qu’après six mois ou un an qu’on offrira un holocauste aux mânes des ancêtres.
Lorsque ces mêmes noms sont employés comme des noms propres, alors ils
désignent l’ETRE SUPREME. La question qui vient à l’esprit est la suivante : pourquoi
donner trois noms différents à l’ETRE SUPREME ? D’après O.C. Dahl, chacun des noms met
l’accent sur l’un ou l’autre attribut de l’ETRE SUPREME. Ainsi Zanahary indique le Dieu
Créateur, Andriananahary montre sa supériorité sur tous les dieux (« Seigneur Créateur »).La
signification d’Andriamanitra, qui veut dire le « Seigneur Parfumé », peut être comprise de
deux façons : il est le Seigneur auquel on offre un holocauste odoriférant – et à Lui seul –, ou
bien il est le Seigneur imputrescible, éternel. Quand le riz est cuit et qu’on prolonge la cuisson
sans brûler le riz, l’odeur particulière qui s’en dégage est appelée manitra.
Ces trois noms utilisés dans la religion ancestrale malgache ont été repris par les
missionnaires venus à Madagascar qui les ont donnés au Dieu des chrétiens, utilisés comme
noms propres. Par exemple, là où la Bible française (T.O.B) traduit : « Dieu, le Seigneur »
Josué 22 :22, la Bible malgache (version protestante) a utilisé Andriananahary. De même, au
Psaumes 50 :1, « Le Dieu des dieux, le Seigneur », la version malgache donne Andriamanitra
Andriananahary.
En passant en revue les proverbes qui parlent de Dieu, il est difficile de savoir si les
attributs et qualités qu’ils véhiculent sont issus de la religion ancestrale ou influencés par le
christianisme. Par exemple, Aza ny lohasa mangina no jerena fa Andriamanitra ao an-
tampon’ny loha – « Ne regardez pas la vallée silencieuse mais Dieu qui est au-dessus de
votre tête » (Même si vous vous sentez seul, Dieu est là).
En revanche, dans les hymnes et cantiques, le doute n’est pas permis, c’est au Dieu
des Chrétiens que l’on s’adresse quand on invoque Zanahary. On peut donc dire que les
chrétiens, en reprenant les noms des anciennes divinités, s’adressent à Dieu au malgache.
25
On peut ajouter que la religion ancestrale qui postule l’existence de l’âme et de la vie
après la mort facilite l’adhésion des Malgaches à la foi chrétienne sans doute davantage que
pour des français formés par les Lumières. Ce point d’attache peut être considéré comme une
pierre d’attente que la révélation chrétienne doit ensuite compléter.
D’ailleurs, il reste beaucoup à faire pour éclaircir les positions respectives de la Bible
et de la religion traditionnelle sur la mort. Les luthériens qui encouragent leurs pasteurs à
participer aux famadihana pour y prêcher l’Evangile, ou même que les catholiques, plus
tolérants à cet égard.
Zanahary est le dieu créateur des Sakalava (« ilay nahary »). Il est au-dessus de tout
le monde ainsi que les razana ; parfois, il est considéré comme le dieu des chrétiens et des
musulmans. Il est le propriétaire de tout l’univers.
En malgache, il n’y a pas de genre masculin ou féminin, pourtant des auteurs parlent
de Zanahary lahy et de Zanahary vavy, d’autres encore évoquent le nom de Zanahary
masoandro ou « dieu soleil », pour en savoir plus, il est à conseiller de consulter Charles
RENEL (1920) in Ancêtres et Dieux, Tananarive, Imprimerie Piot de la Beaujardière.
26
Le soleil symbolise l’espoir. Au moyen de la clarté et de la chaleur qu’il apporte, il
redynamise la vie et les activités des humains ralenties après l’obscurité de la nuit. Donc, le
Zanahary masoandro ou dieu soleil, porteur de lumière, chaleur, espoir et bonheur est très
vénéré par certains Malgaches qui le considèrent supérieur aux autres Zanahary.
N’est –il pas vrai qu’ « il y a plusieurs dieux mais un seul soleil ? » : le dieu soleil est
unique. La mythologie grèque a connu de multiple dieu et déesse à l’instar d’Eole (dieu du
vent), Dionysos (dieu de la végétation et vin), Artémis (déesse de la chasse), Aphrodite
(déesse de la beauté et de l’amour).
Comme tous les couples dans une quelconque société, le Zanahary lahy et le
Zanahary vavy sont soumis à la règle de l’hérédité et vont assurer la reproduction de
génération en génération.Certains ajoutent encore le terme de zanaka Zanahary comme le fils
issu de cette relation.
Les Sakalava ont l’habitude de s’adresser au Zanahary lahy quand il s’agit des
problèmes d’ordre général (argent, santé, relation sociale, etc.) et au Zanahary vavy lorsqu’il
est question des thèmes liés au ménage (relation familiale, stérilité, polygamie, violences
conjugales, etc.).
Il est à signaler que l’on ne se tourne que très rarement au zanaka Zanahary ;
précisément, quand on a affaire aux maladies graves des enfants.
Primo, les Zanahary correspondant aux quatre points cardinaux, qui ont pour
fonction de veiller sur les habitants de chaque point cardinal. Il y a ainsi le Zanahary
27
avaratra( dieu qui se trouve au Nord ),le Zanahary atsimo (celui qui est au Sud), ensuite le
Zanahary andrefana (celui de l’Ouest), et enfin , le Zanahary antsinanana ( celui qui est à
l’Est ).
JAOVELO-DZAO R. avance encore les concepts de dieu trine ou les trois dieux,
les sept créateurs de l’homme, les sept /huit hypostases divines.17
« Lasan-dranahary » = parti pour devenir dieu, est une expression courante pour
parler du défunt. Les razana sont sacrés, ont des pouvoirs quelconques qui leur permettent de
bénir, de protéger, et d’aider les vivants.
17
JAOVELO-DZAO R., 1996, Mythes, rites et transes à Madagascar, Ambozontany, Karthala, pp.60-
62.
28
les Malgaches l’occasion des pratiques ostentatoires dans lesquelles il est en effet encouragé
de faire preuve de prodigalité effrénée en dons et contre dons, condition nécessaire de
resserrement des liens sociaux entre différents groupes lignagers d’une part, entre les vivants
et les morts d’autre part.
La mort n’aura été, pour le mort qu’un accident de parcours, qu’une simple rupture
lui permettant dorénavant de « vivre » autrement. La force mortifère qui a frappé et qui a
déstructuré momentanément la famille du mort (défunt) n’a eu, en dernière analyse, aucune
emprise réelle et définitive sur la vitalité festive et sur la capacité organisationnelle de
l’ensemble de la communauté des survivants.
A Madagascar, les rites funéraires sont l’un de ces précieux ferments de la cohésion
sociale du groupe et du resserrement des liens sociaux des survivants. Face à la force
dissolvante du temps, en égard aux jeux et aux enjeux de la course à la différence que suscite
toute vie en société, ces rites funéraires sont des « temps forts » dans la recherche et dans
l’affirmation d’une identité personnelle et collective toujours à innover et à renouveler à
chaque instant.
Dans la Grande Île, tout groupe lignager ou toute ethnie a ses propres pratiques
ancestrales en matière de rites funéraires et tient autant que faire se peut à les préserver et à se
les voir respecter par d’autres, sans pour autant essayer de les imposer aux autres. Etre privé
des rites funéraires conformes à son statut social et ne pas avoir accès à son tombeau ancestral
signifient que l’on n’a pas joui de ses droits fondamentaux en tant qu’être humain.
C’est là une mort sans appel, la plus terrifiante et la plus humiliante de toutes les
morts possibles. Et l’insulte la plus douloureusement ressentie dans une telle organisation
sociale est la dévalorisation de la personne humaine à travers ses ancêtres (tevateva razana).
29
A Madagascar, la terre où reposent les restes mortels des ancêtres est le lieu
privilégié d’ancrage d’une recherche identitaire toujours à renouveler, toujours au quotidien.
C’est là également que ceux des générations d’aujourd’hui, une fois libérés de leur
enveloppe charnelle visible, jouiront, eux aussi, du repos éternel puis fusionneront, à leur tour,
avec les éléments constitutifs du milieu ambiant (l’eau, l’air, l’obscurité, la lumière, les
roches, les animaux, les arbres, le bruit, le silence, etc.) pour se transmuer progressivement en
puissances nourricières au service des générations de demain.
C’est bien à partir des profondeurs invisibles et intimes de cette « terre ancestrale »
que va s’opérer, en silence, cette parfaite synergie entre sexualité et fécondité que ne saurait
atteindre, durant cette vie, aucun être vivant même si ce dernier l’appelle pourtant de tous ses
vœux. On est en droit de se demander, si l’eschatologie judéo-chrétienne basée sur cette
dichotomie âme et corps est en vérité la seule voie qui soit réellement opératoire pour se
rendre judicieusement compte de toute la richesse et de toute la complexité du devenir
humain.
C’est aussi à travers la figure d’une sexualité pleinement assumée, d’une sexualité
rayonnante de cette force génésique à nulle autre pareille et non pas à travers la figure de la
souffrance d’un Christ ressuscité que le mystère de la victoire de la vie sur la mort a été
dévoilée et annoncée aux humains. En tout cas, il faut lire dans ces scènes la vie sexuelle post-
mortem une certaine hiérophanie.
30
Pour les Sakalava de la région de Morondava, ces statuettes funéraires sont les
signes de l’entière participation de leurs ancêtres à la fécondité divine cosmique. Ces illustres
ancêtres, grâce aux rites funéraires appropriés, sont maintenant « béatifiés » voire même
élevés au rang de divinités, sans prétendre pour autant être les égaux de Dieu ou de Zanahary.
Les différents « tabous » ou fady, qui y sont intimement liés ont pour fonction
essentielle, non pas tant d’en interdire l’accès, mais plutôt d’indiquer positivement aux
humains les codes secrets pour permettre à ces derniers d’y prélever en toute sécurité et dans
la durabilité, les ressources nécessaires à leur total épanouissement. Ce sont les autochtones,
« les fils de la terre », qui sont les vrais gardiens et les maîtres de ces codes secrets.
A travers tout cela, l’on comprend aisément que la représentation de la« terre
ancestrale » et du tombeau ancestral est ce qui donne effectivement consistance et sens à la
vie.
Toutes ces explications sur les secondes funérailles et la terre ancestrale nous incitent
à poser des questions sur le sens de la vie, le refus de la mort, la vénération de la mort et la
considération du mort comme ancêtre, enfin comment les Malgaches considèrent-ils leurs
morts comme ancêtres.
31
1.2.4. Hasin-drazana ou sacralité ancestrale : ancestralisme
Pour les Sakalava, un mort n’est pas encore considéré comme ancêtre, sans que les
formalités n’aient pas encore été accomplies pour le rendre prestigieux, dotés de puissance.
Les rites funéraires sont les coutumes qui permettent d’élever un mort au grade supérieur des
ancêtres pouvant aider les vivants, c’est ce qui leur donne leur hasina ou sacralité. C’est à
partir de ce moment là que diffère le monde des morts de celui des vivants.
S’il a été susmentionné que la vie comprend 4 étapes (naissance, jeunesse, vieillesse,
mort), l’ancestralisme, il se caractérise par 2 phases distinctes.La sacralité ancestrale
commence par la mort, celle-ci étant la dernière étape de la vie.Donc, il faut d’abord que la
personne soit morte pour que l’on puisse parler d’ancêtre. La première phase consiste donc
aux premières funérailles.
C’est cette seconde et dernière phase qui octroie à l’ancêtre sa sacralité. Cette
seconde funéraille ne peut avoir lieu qu’à partir d’une année après l’enterrement.
Sur le plan social, pour protéger la santé publique, on doit attendre que le cadavre
soit complètement desséché (faty maina).
Sur le plan économique, après cette période, la famille aurait suffisamment réuni de
l’argent pour l’exhumation vu les dépenses lors de l’enterrement.
Sur le plan psychanalytique, on peut dire que l’âme entretient une relation étroite
avec le corps ; le corps en tant que son ancienne demeure, par habitude, l’âme ne peut pas
s’empêcher de s’en approcher. L’absence du corps dans le tombeau signifie à la fois la
rupture totale entre les deux et l’intégration de l’âme dans son nouveau monde.
32
Les doubles obsèques sont caractérisées par des obsèques définitives après des
obsèques provisoires qui semblent être une pratique assez répandue chez beaucoup de
peuples.
Les doubles obsèques sont pratiquées chez certains Bantous en Afrique, chez les
Papous océaniens, et semble-t-il, chez certaines tribus indiennes de l’Amérique du Nord, et
également dans les Iles indonésiennes, dans certaines tribus des Célèbes et de Bornéo.Dans
cette pratique, il y a les obsèques finales qui s’appellent le « Tengke » dans le centre des
Célèbes chez les Alfourous, et elles se nomment la « Tiwah » à Bornéo chez les Olo Maangan
et les Olo Ngadju. Louis Vincent THOMAS parle beaucoup de ce Tiwah dans son livre « Le
Cadavre ».
Les obsèques définitives peuvent se dérouler suivant différentes modalités selon les
populations considérées, mais il y a une idée commune qui n’est pas très loin de la conception
malgache du famadihana, à savoir l’attente de la dessiccation naturelle du cadavre avant de
donner aux ossements leur sépulture définitive, en sachant que le cadavre ne peut être
considéré comme sec (faty maina) qu’après un an à partir du premier enterrement, et on prend
seulement soin des ossements. Le sujet sur le cadavre sec appelé aussi faty maina en
malgache et sur le cadavre frais – faty lena, sera abordé un peu plus loin. 18
La pratique des obsèques finales est une cérémonie coûteuse. Les familles doivent
avoir suffisamment d’argent pour organiser ce rite où les invités ne doivent pas manquer. Les
vivants peuvent parler, communiquer aux défunts lors du moment de l’enveloppement des
corps aux obsèques finales.
L’objectif de ces doubles obsèques est de réunir tous les morts dans la sépulture
familiale, de changer le deuil en joie et c’est une des raisons principales qui incitent les
Malgaches à pratiquer le famadihana. Le famadihana pourrait donc être considéré comme une
variante malgache des obsèques définitives après les obsèques provisoires.
18
Cf.RAJAOSON F. (1969), Contribution à l’étude du famadihana sur les Hauts-Plateaux de
Madagascar, Thèse de Doctorat de IIIème Cycle, Paris, pp.208-213.
33
Notons que cette seconde funéraille est pratiquée dans toutes les régions de l’île et
se différencie seulement sur la dénomination et le déroulement.Par exemple, le famadihana
chez les Merina, le rasa harena chez les Tsimihety, l’ati – damba chez les Betsimisaraka,
etc.).19
Cette 2ème phase, par le biais de ses rituels, permet au défunt de se hisser au rang
des ancêtres sacrés, lui attribuant ainsi le hasin-drazana : ancestralisme.La section suivante
développera ces questions ayant trait à la fonction du sacré : hasina.
Les rites constituent un mode d’action ; ils signifient une classification des choses
réelles ou idéales. Ici, la classification est toujours dichotomique entre le sacré et le profane.
Comme dans d’autres religions aussi bien modernes que traditionnelles, la religion
traditionnelle sakalava distingue aussi ces deux mondes. Le sacré et le profane sont conçus
par la pensée humaine comme mondes séparés. La dissemblance entre les deux est
19
Cf. Chapitre IV : Exemples des pratiques identitaires malgaches.
20
Plante : hasina (dracoena reflexa lam.) classée parmi les arbres sacrés chez les sakalava.
34
universelle. Une chose sacrée suppose une place hiérarchique. Le sacré suppose une
supériorité en dignité et en pouvoir.
Chez les Sakalava donc, tout tourne autour de Zanahary, ancêtres, rois, princes,
princesses; et tout ce qui touche à ces derniers est considéré comme sacré. Il convient de
mentionner que ce sacré ne dépend pas nécessairement de l’ordre social. L’aspect sacré de
Zanahary dépend d’une relation réciproque entre Lui et les hommes.
Quant au profane, la croyance traditionnelle religieuse n’existe plus quand tout est
réduit au profane. Elle ne provoque plus de système de représentation du sacré. Pour le rite
cérémoniel du tromba, par exemple, on peut distinguer des choses sacrées et des choses
profanes. En d’autres termes, la séparation est nécessaire car l’esprit humain ne supporte pas
la confusion de ces deux mondes.
2) Le même radical désigne le péricarpe des fruits surtout des citrons, les filaments
des viandes, des bois et des blocs d’un rocher.
3) C’est aussi la plante , une liliacée arbustive à tige souple (Dracoena reflexa
Lam. ) , sur la tige des cicatrices circulaires quand elles deviennent fanées. Le hasina
demeure pour les Sakalava l’arbre sacré par excellence.
21
Dahl, 1951, Malgache et Maanjan, Oslo, EI, p.40.
35
6) Hasina, est enfin le sacré, la force spéciale particulière à certains êtres et à
certaines choses, les hasina les rendent efficaces et capables d’actes extraordinaires.22
Dans ce cas, il y a obligation de renouveler les amulettes ou charmes (aody) pour les
sacraliser. En un mot, les êtres et les choses sacrées ne sont pas à l’abri de l’évaporation du
hasina car ils peuvent à tout moment, en être privés : lany hasina ou maty hasina dépourvu
de la force surnaturelle. Selon RIVIERE C. «c’est toujours l’homme qui décide de
l’investissement par une puissance qu’il pense supérieure d’un être, d’un animal, d’un objet,
lequel fonctionne comme principe de conjonction du profane et du sacré »23.
Masina est le dérivé du radical hasina et désigne le corps du roi défunt dans la
thanatologie sakalava. Il est interdit de dire «corps du défunt», « corps du décédé », « faty »
ou encore «razana» lors de la mort d’un roi. Il faut tout simplement appeler ou nommer ce
dernier de «masina»24 car le roi fait partie des êtres dotés de pouvoir mystérieux, redoutables,
extraordinaires : hasina.
22
JAOVELO-DZAO R. 1996, Mythes, rites et transes à Madagascar, Ambozontany Anatananarivo,
Karthala, Paris, pp. 108 -109.
23
Rivière C. 1995, « Introduction à l’anthropologie », Hachette supérieur, Paris, pp.119.
24
Masina peut aussi être le caractère salé d’une chose chez les Sakalava mais toujours considéré
36
1.3.3. Les variétés du hasina
Souvent confondu avec le fady25ou tabou, car toute chose sacrée est considérée
comme interdite, le hasina a trois variétés : les êtres sacrés, les choses sacrées, les animaux
sacrés.
Il existe donc plusieurs êtres sacrés : Zanahary (le créateur, le chef suprême de tout
univers) ,razana, tromba (les ancêtres protecteurs ainsi que leurs esprits qui se réincarnent
dans des corps vivants pour transmettre des messages) , roi (le souverain au trône), divins ou
devins (le maitre de la divination et souvent guérisseur : mpisikidy), astrologue (le maître des
destins, bienfaiteurs, guérisseur : mpanandro) ,cadavre royal (le corps du roi défunt, il est
interdit de considérer le cadavre royal comme faty ou razana, car il est sacré : masina).
Les animaux sacrés sont ceux que l’on abat lors d’une grande cérémonie rituelle dans
laquelle ils se servent d’un sacrifice. Il y a donc : le zébu (bœuf), (mariage, enterrement, bain
de reliques, jôro, etc.) ; le poulet (poule), (fatidrā, enlèvement des sorts (mosavy ou tolaka),
remède.
Parmi les choses sacrées, on peut citer : les endroits et les arbres sacrés : Lac (lieu de
promesse aux ancêtres), doany (temple royal, tombeau), tamarinier (sacrifice, objet de
divination (graine).
Le hasina est d’une grande et spéciale valeur pour les Sakalava. Il est utilisé dans
toute cérémonie traditionnelle et pratique identitaire pour l’ethnie sakalava. Donc, toutes les
prières, les sollicitations engendrées par le culte des ancêtres sont sacrées pour les Sakalava et
marquent leurs identités culturelles. On peut affirmer que le hasina fait partie intégrante de la
pratique identitaire sakalava et également de celle de toutes les autres ethnies de la Grande
Ile.
Conclusion du chapitre
Pour conclure ce premier chapitre, on peut affirmer que malgré toutes les réserves
qu’on peut faire, l’explication de toutes ces croyances religieuses semble être dans la ligne du
symbolisme. La tradition sakalava est caractérisée par la vénération du Zanahary, le respect
du Razana et est constituée par la crainte de la mort : la sacralité ou le hasina de cette
dernière. Constituant la pierre angulaire du culte de ladite ethnie, le hasina caractérise, le
comme sacré car on ne verse jamais du sel par terre, on donne à ce qui en demande, seulement on
ne l’achète pas ni l’offre pas à quelqu’un à partir du coucher du soleil.
25
Cf.Section 3.2, Le fady, tabou ou interdit, pp.58.
37
hataka (demande de bénédiction), le fanompoa be (bain de relique royale), le jôro (sacrifice),
le tolotro (offrandes), le tromba (rite de possession, de transe).
Les morts peuvent communiquer avec le monde des vivants grâce à la réincarnation
c'est-à-dire la naissance d’un nouveau né qui prend le portrait d’un ancêtre et à la cérémonie
du tromba lorsque l’esprit prête le corps d’un individu pour lui posséder. Du reste, le chapitre
suivant va nous faire une description du tromba, un culte de possession.
CHAP. II.TROMBA
Introduction du chapitre
Cette cérémonie est une pratique magico-religieuse lors de laquelle sont provoqués
un contact et une communication avec les Esprits par l’entremise d’un médium en transe ou
saha26.
Le saha effectue un voyage dans les cieux pendant lequel il procure la guérison ou la
divination en combattant les Dieux ou les Esprits. Il est fondé sur la croyance en la
réincarnation d’un roi, d’une personnalité célèbre ou d’un aïeul dans le corps d’une personne
vivante.
L’esprit s’empare du médium et par son entremise parle, donne des conseils, prend
des décisions, résout les litiges et soigne les malades dans un état de transe totale. Ses
directives sont suivies aveuglément par l’assistance et la cérémonie se termine lorsque l’esprit
quitte le corps de la personne possédée qui s’affaisse à bout de force, de tension et de fatigue.
26
Le saha est un médium possédé par l’esprit d’un roi défunt, considéré comme une sorte
d’intermédiaire entre les ancêtres royaux et les descendants vivants.
38
envahissement de l’individu par des agents extrahumains, de la possession par un esprit,
n'impliquant pas nécessairement transe, ou seulement au cours de l'exorcisme.
D’une manière générale, le tromba est un esprit qui vient chercher momentanément
refuge dans le corps d’une personne encore vivante.Et durant cette période, la personne
vivante sera capable d’agir comme le Mpanjaka quand il était encore en vie même si elle n’a
jamais vu ni connu le Mpanjaka. Quand la mort d’un Mpanjaka survient, on dit qu’il est
folaka ou miamboho (car il est interdit de dire que le Mpanjaka est décédé ou mort), c’est-à-
dire qu’il tourne le dos.
Evidemment, le corps d’un roi qui a tourné le dos n’est pas un cadavre normal. On
l’appelle ny masina ou le saint ; on n’enterre pas le saint, mais on le cache (afenina ou
asitrika) tout simplement. Il est à signaler que jusqu’à maintenant, des membres proches de la
famille royale ne mangent pas de la viande de bêtes abattues lors d’un enterrement ou d’un
famadihana. Cette viande est appelée hena ratsy ou mauvaise viande, et elle est réservée au
peuple.
L’âme du roi défunt se transmet à une personne vivante qu’il appréciait de son
vivant. Parfois, une réincarnation de l’esprit de ce Mpanjaka se manifeste juste quelques
heures après sa mort afin de révéler ce qu’il faudra faire pour son inhumation, quels
vêtements il doit porter, quel jour et à quelle heure devra avoir lieu son enterrement, etc.
27
Le swahili est la langue principale parlée en Afrique de l’Est (Tanzanie, Kenya, Ouganda, Rwanda
et Burundi).
28
ASSOUMACOU E.B. (2007), Tromba : pratique royale ou populaire d’identification royale chez les
Sakalava de Boeny, Mémoire de DEA en Sociologie, Fac DEGS Université d’Antananarivo.
39
juste avant que la mort ne le surprenne, ou bien durant toute sa vie ; le suffixe arivo signifie
que son peuple est très nombreux.
Les opinions et les attitudes de la royauté à propos du tromba sont, de nos jours, dans
le Boeny, constituées d’éléments de bases principales dont : l’individualisation des rapports
sociaux de production et du syncrétisme religieux qui se traduisent par les mariages entre
famille royale et famille populaire.
Mais est-ce que cela va apporter des bouleversements ? Est-ce que, finalement,
l’individualisme va dissoudre le tissu social établi jusqu’à remettre en question l’identité de la
personne du Sakalava ? La religion traditionnelle doit faire face à un syncrétisme de façade.
L’origine du tromba doit être recherchée en pays Sakalava : la conquête merina s’y
est traduite par un culte aux rois locaux décédés qui étaient censés revenir parmi leur peuple.
La cérémonie est le jeu des relations imaginaires avec le roi. Donc au départ, l’esprit du roi
mort se réincarne dans le corps d’une personne vivante pour indiquer comment doit se
dérouler son enterrement, comment il doit être habillé pour ses funérailles, quel jour il doit
être enterré, à quelle heure et en quel endroit.
Il se réincarne donc dans le corps d’une personne de la famille royale (de sa famille
ou d’une autre famille royale). C’est à ce moment aussi qu’il donne ou prononce son nouveau
nom car il ne portera plus son nom de vivant une fois qu’il a tourné le dos
(mort).Actuellement, c’est une personne du groupe appelé « Ragnibia 30» qui choisit le nom
du roi après sa mort. De son vivant, le roi est souvent en contact avec une personne du groupe
Ragnibia via son choix pour elle comme possédée.
La famille royale a toujours tendance à penser que le tromba est une propriété royale
car il doit son origine à la réincarnation de l’esprit des rois morts. Pour elle donc, le tromba
29
Les Mpanjaka changent de nom après leur mort pour leur accorder plus d’honneur, car leur mort
les rend beaucoup plus sacrés.
30
Ragnibia : groupe désigné par le roi de son vivant pour le servir et aussi pour s’occuper de ses
funérailles.
40
est quelque chose de sacrée, sainte, propre, qui doit être respecté, vénéré et à qui on peut
demander de l’aide, des bénédictions, la santé et la richesse.
Le tromba est une tradition et une culture royale sakalava, il a sa propre spécificité
par rapport aux autres pratiques dans l’île. Il marque et constitue ainsi l’identité culturelle
sakalava.
On doit toujours respecter les rois pour avoir leur bénédiction car ils sont présumés
avoir un pouvoir imaginaire et des forces symboliques. Le tromba, une pratique magico-
religieuse lors de laquelle sont provoqués un contact et une communication avec les esprits
par l’entremise d’un médium en transe ou Saha est l’illustration parfaite de cette puissance
symbolique.
L’esprit s’empare du médium et par son intermédiaire parle, donne des conseils,
prend des décisions, résout les litiges et soigne les malades dans un état de transe totale. Ses
directives aveuglément par l’assistance et la cérémonie se terminent lorsque l’esprit quitte le
corps de la personne possédée qui s’affaisse à bout de force, de tension et de fatigue.
41
Au cours de nos enquêtes à Mahajanga, nous avons eu la possibilité d’interroger plus
de 500 habitants issus de groupes sociaux divers.Une chose que nous avons remarquée durant
les interviews est que la pratique et la consultation des tromba est d’une valeur populaire,
mais non pas uniquement royale.
Les Sakalava respectent beaucoup les ancêtres et pour eux la pratique du tromba est
une obligation, cela leur dicte le futur de leur vie. C’est aussi dans le but de recevoir la
bénédiction des ancêtres, et en même temps ceci a pour signification le respect du contrat
entre les vivants et les ancêtres qui sont sacrés et qui ont des pouvoirs surnaturels.
Les Merina, les Betsileo, ainsi que les Tsimihety sans oublier les Antandroy,
consultent aussi des tromba et la raison est surtout de vouloir améliorer leurs conditions de vie
matérielles (devenir riches, avoir une famille stable et heureuse. Les Antandroy et les
Tsimihety sont plus nombreux à Mahajanga, et essaient de s’intégrer dans la société
sakalava.Les gens se déplacent à Ambalakida (un village des rois sakalava du clan
Voromahery, un endroit où on prend le miel pour le Fanompoa be) pour consulter des tromba.
Leur pouvoir symbolique peut maudire et peut causer une grave maladie ou bien la
mort à ceux qui leur manquent de respect. Les rois continuent toujours à devenir riches ainsi
que leurs descendants tandis que leur peuple reste, de leur côté, serviteurs du maître d’où la
pérennisation et la continuation des rapports de domination entre le roi (maître) et le peuple
(serviteurs).
Cela ne cesse pas jusqu’à nos jours car l’identité culturelle sakalava est basée sur le
royaume et son histoire ainsi que les rapports de parenté qui constituent leur organisation
sociale. Cette puissance symbolique est donc le noyau de la structure sociale ainsi que de la
42
culture sakalava et elle est toujours très forte tant dans la cosmologie que jusqu’à la
thanatologie.
Années Effectifs
1998 782
1999 793
2000 971
2001 1006
2002 1065
2003 836
2004 854
2005 968
2006 998
2007 1000
2008 1042
2009 1998
43
après une légère regression de 2003 -2007 à cause de la stabilité de la vie économico –
politique, cette proportion s’est nettement accrue de 2008 à nos jours (Cf.Tableau n°06).
Les gens continuent toujours à le pratiquer mais en cachette (dans les données du
tableau n°06 et du graphique récurrent, l’enquête s’étant déroulée durant le mois de février
2007 jusqu’au mois de juillet 2009, certainement le nombre de pratiques dépasserait l’effectif
des autres années), surtout durant ces temps-là. Le Tromba, une pratique qui s’est faite
auparavant d’une manière formelle est devenue actuellement une pratique informelle.
2500
1998
2000
1500
Effectifs
1065 1042
1000
1006
971 968 998 1000
793 836 854
782
500
0
1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010
Nous pouvons dire que le Tromba est une pratique tant royale que populaire. Elle a
une double fonction en l’occurrence, la logique de reproduction sociale, la sacralisation et la
reproduction du pouvoir royal. Tout ceci nous permet déjà d’anticiper sur les prospectives de
la dialectique pratique populaire et identité royale.
44
2.2. Typologie et objets cérémoniels du tromba
On classe parmi les « tromba ratsy », ceux qui sont adeptes de la sorcellerie et qui
peuvent causer la mort à une personne. Ils ont toujours tendance à créer des problèmes dans la
vie des autres.
Les « tromba mpanajary », sont les tromba guérisseurs, faiseurs de biens. Leur
travail, c’est de donner la richesse, l’enfant (rendre enceinte une femme stérile par le biais de
leur médicament et de leur bénédiction), la réussite dans la vie (étude, travail), etc.
A part ces deux catégories de tromba, il existe encore le « vady tromba ». On parle
de ce dernier lorsque le possédé ou le médium est une femme et que l’esprit ou le tromba en
elle est un homme.Ainsi, le tromba entretient une alliance matrimoniale avec son saha. Le
saha sera donc appelé « vady tromba ».
Tromba be 38 32,75
45
Le tableau n°07 nous montre les différents types de tromba chez les Sakalava du
Boeny. Les « tromba be » ou les « grands tromba » représentent 32,75% des 116 tromba
enquêtés. Ils sont les plus nombreux, ce sont les grands rois du Boeny et ceux qui
appartiennent à la famille royale.
Viennent ensuite les « tromba lahy », les tromba de sexe masculin qui occupent
21,55% de l’effectif total. Ils sont aussi nombreux car chez les Sakalava, les femmes ne
tiennent pas le pouvoir royal sauf si dans un cas très spécial.
Les « tromba vavy » qui représentent 12,93%, sont des tromba de sexe féminin,
elles s’occupent très souvent de la guérison des enfants malades et aussi de l’établissement de
la recupération d’un partenaire perdu, d'établir le calme et l’ordre dans une famille.
Les « tromba tandrano » sont les tromba qui sont morts noyés lors de la guerre entre
les royaumes à Madagascar.Ils occupent 8,62% des tromba enquêtés, et sont également
réputés être très sévères et guérisseurs.
Et enfin, les « tromba zaza » qui sont en dernière place avec seulement 4,31%, ils ne
sont pas nombreux car ce sont les esprits des enfants qui sont morts avant d’atteindre la
dixième année de leur existence.
Mais nous n’allons pas nous étaler sur ces derniers car cela nécessite une analyse
profonde et un long développement et tout simplement, cela a une autre signification et
appartient à un autre domaine.
46
Tableau 8:Les matériels utilisés lors de la cérémonie d’invocation du tromba
Emboko 94 81,03
Vaka 32 27,58
Barisa 57 49,13
Ranomanitra 68 58,62
Rano 22 18,96
Kitarafa 22 18,96
Fanjava 23 19,82
Sigara 20 17,24
Fandrama 36 31,03
Le matériel utilisé dans la cérémonie et la pratique du tromba sont très souvent des
objets qui ont des significations sacrées dans les croyances et tranditions sakalava. En
l’occurrence, le fandrama (miel), le barisa (alcool), le sigara (cigarette), l’emboko (encens),
le ranomanitra (eau de toilette et /ou parfum), l’eau, le miroir, les pièces de monnaie, le
kaolin, les perles (Cf.Tableau n°08).
Ces objets sont utilisés pour guérir des personnes malades, pour une demande de
bénédiction. Ils servent aussi à faciliter l’arrivée des tromba, à les sacraliser, etc.
Sur 116 tromba et cérémonies assistées, on a constaté que 81,03% des tromba
utilisent l’encens. Ce dernier a pour objet de faciliter l’arrivée de l’esprit, raccourcir l’appel,
47
et chasser les mauvais esprits. Mais le plus important c’est que l’encens sert aussi à sacraliser
le tromba. Avant, l’utilisation de l’encens est obligatoire pour tous les tromba, mais à présent,
il peut être toléré car on n’en a besoin que lors d’une cérémonie de demande de bénédiction
ou « hataka ».
Le kaolin ou « tany malandy », (77,58%) est aussi très utilisé ; signifiant pureté et
sainteté de l’esprit, il sert aussi de médicament pour guérir plusieurs maladies. De part sa
vertu thérapeutique , le kaolin sert de remède pour les consultants et /ou patients . Il joue
un rôle d’une boussole car il est employé pour guider l’esprit dans sa direction. En outre, le
kaolin se révèle être d’une utilité politique délimitant ainsi le territoire de l’esprit afin
d’assurer la protection de la personne marquée.
Le barisa ou la boisson alcoolique (49,13%) est surtout utilisé par les tromba jeunes
et les esprits de sexe masculin. Il existe beaucoup de tromba qui ne boivent pas de l’alcool. Le
barisa a aussi un caractère sacré qui lui permet d’établir une communication entre le monde
réel et le monde irréel, c’est pourquoi on verse toujours un peu d’alcool dans le coin Nord –
Est réservé aux ancêtres. Dans la pratique du tromba, le barisa n’est plus une boisson
alcoolique mais une boisson sacrée qui va faciliter le voyage de l’esprit depuis le point de
départ jusqu’à l’arrivée.
Les vaka ou les perles (27,58%) sont nécessaires pour l’accommodation des
amulettes (aody).Existant en plusieurs variétés , plus de centaine, les perles ont chacune ,
des vertus spécifiques . Les unes se différencient des autres selon leurs couleurs et leurs
formes.
48
Citons les exemples de « vaka miary » ou perle droit, debout, qui aide une personne
à se relever d’un problème, elle est de couleur transparente, un centimètre de diamètre et en
forme de bouton.
Le « vaka tsy misaraka » ou perle inséparable, comme deux boules colées, cette
perle est en verre transparente et prend la forme cylindrique. Elle a pour objet d’éviter la
séparation.
Le « vaka tsy leon-doza » ou perle impalpable est une perle que le malheur ne peut
atteindre. Elle est de couleur rouge et présentée sous forme d’une boule.
31
Cf. Chapitre III: Divination, astrologie et sorcellerie.
49
tromba mais cette sacralité tient une autre forme « un peu familière » dans la vie
quotidienne chez les Sakalava.32
Le plus souvent, l’esprit répond à l’appel de ses gens ; le chant s’arrête. C’est
l’incarnation de l’esprit qui parle à la bouche du possédé. Il s’habille selon le sexe de l’esprit.
Ainsi le possédé change de visage et de paroles suivant l’ethnie de l’esprit. C’est là qu’on lui
offre les boissons qu’il aime, ses cigarettes, etc.Le possédé révèle le personnage réel de
l’esprit, explique ce qu’il aime, et ce qui lui met en colère, etc.
Le dialogue est direct dans la plupart des cas, mais il y a toujours des cas où un
intermédiaire est appelé pour servir d’interprète car l’esprit ne parle pas souvent dans la
langue de la personne qui l’appelle. Cette soumission est appelée : lamalamaqui n’est autre
32
Il est jugé comme interdit et /ou tabou de ne pas accepter d’offrir de l’eau à celui qui en
demande car cela peut engendrer malheur.
33
Chant traditionnel chanté lors des veillées funèbres et pour rassembler les gens car les sakalava
ont passé le tiers de leurs vie à un conflit de pouvoirs : guerrier, cela change selon le rythme comme
dans la formation musicale militaire, donc, il y des consignes à passer et chaque membre de groupe
doit s’y connaitre.
50
que l’acte de se soumettre, contrairement au ringiringy : signification du respect envers
l’esprit qui va venir.
Nakôry ireo jiaby any Comment vont votre famille et vos amis ?
Avant de répondre, le tromba examine d’abord les gens, les dons apportés, touche les
assiettes qu’on lui présente, compte l’argent offert, goûte et boit le contenu des bouteilles avec
des grimaces, de dégoût. Il mine un air très sévère et coléreux, car il est toujours insatisfait, il
donne des ordres accompagnés d’insultes, qui devront être obéis immédiatement.
Ainsi, l’esprit annonce à l’assistance qu’il veut bien rester en leur présence et en
celui de l’individu à qui il veut s’adresser ou passer un message. Le discours cérémoniel
change selon le tromba mis le rapport de domination est toujours présent, et le degré de
domination dépend du comportement et de l’humeur de l’esprit.
Donc, il n’y a pas de rituel précis. Le discours est basé sur une preuve de respect sans
limite envers le tromba à partir de son appel jusqu’à son départ.
51
On a vu à travers ce discours cérémoniel, la sacralisation du tromba ainsi que sa
vénération par ses serviteurs pour avoir sa bénédiction. Cela nous incite à voir l’essence des
bénédictions royales.
Souvent, il est établi par des personnes d’autorité après interprétation d’expériences
fâcheuses, de rêves, de visions ou de mythes. Il a pour fonction de protéger la valeur de
certains biens et d’êtres fragiles, tout en soumettant l’individu à la loi du groupe.34
Toute la croyance des Sakalava tourne autour du fady qui provoque, par exemple, la
stérilité, la pauvreté, la maladie, etc. comme les conséquences de sa transgression.
Selon DURKHEIM37 qui précise que les rites sont des règles de conduites qui
prescrivent comment l’homme doit se comporter avec les choses interdites, il existe deux
rites : rites négatifs qui consistent en tabous (tabou alimentaire) et les rites positifs qui
prescrivent des comportements (sacrifice).
Il nous est impossible de faire un long exposé sur les tabous malgaches, car cela
exigerait un développement plus important mais il est à conseiller de consulter le livre de
VAN GENNEP A. « Tabou et Totémisme à Madagascar » pour en savoir plus.38Nous nous
contenterons de mentionner seulement les tabous qui peuvent être regroupés en trois
catégories :
52
- le tabou par l’usage ;
- le tabou qui a une relation avec les charmes.
- Le tabou qui repose sur le « serment des ancêtres ». Autrefois, lorsqu’ un clan
se réunissait pour faire un serment quelconque, le doyen posait ses mains sur les épaules du
deuxième en âge, et ainsi de suite jusqu’au plus jeune de l’assemblée ; tous juraient alors que
ce qu’ils s’étaient promis de s’interdire de faire, serait tabou dans le clan ;
- Un usage qui, au cours du temps est devenu tabou. Ici, il est difficile de
distinguer entre « fomba » (usage) et « fady » (tabou). Agir à l’encontre de ce qui est d’usage,
déshonore ; pécher en bravant un tabou, entraîne toujours un châtiment ;
- Le tabou qui a une relation avec les « ody » (charmesou amulletes). A chaque
charme sont attachées plusieurs choses qui sont tabous. Les Malgaches ont un nombre élevé
de tabous. Et ils prennent au sérieux le respect des tabous. Pécher contre un tabou est puni par
une maladie, un accident corporel dont la gravité dépend de la gravité du péché accompli, et
même la mort. Un péché à l’encontre d’un tabou rattaché à un charme, enlève à ce dernier le
pouvoir de protéger celui qui le détient ou l’adore.
Ces trois catégories de tabous nous permettent de faire appel à A. COMTE, le père
du positivisme. Il propose d’instituer un nouvel ordre social fondé, non sur des croyances
d’ordre théologique, mais sur les acquis de la philosophie positive. Selon COMTE, le
positivisme peut être appréhendé à partir de deux règles élémentaires : « observer les faits à
l’écart de tout jugement de valeur et énoncer des lois », et c’est le cas de ces tabous
(interdits).
Les changements survenus dans les coutumes ont fait que les jeunes se posent des
questions sur la valeur des fady en révélant une défaillance dans les idées vis-à-vis de certains
fady dont le respect et l’obéissance présentent des inconvénients indéniables.
39
Cf. COMTE A. (1830), Ière Edition, (1842) Nouv. Edition, «Cours de philosophie positive », Tome I.
53
En outre l’éducation moderne exerce une grande influence dans le nouvel état d’âme
des jeunes. L’opinion actuelle pense que les ancêtres n’auraient plus créé de fady, mais que ce
seraient seulement les anciens (gardiens de la tradition) et les interprètes des us et coutumes
ancestraux qui peuvent dispenser de l’observation des fady décidée par les ancêtres.
Le fady est l’interdiction magique et religieuse appliquée aux personnes, aux lieux,
aux choses, aux temps. Pour les Malgaches, les morts participent à la vie divine, ils sont les
protecteurs naturels de leurs propres descendants.
Selon MANGALAZA R.E.42, c’est l’une des qualités essentielles propre à l’homme
qui consiste à renoncer aux femmes de son lignage pour élargir le cercle de ses relations
sociales, en réservant aux autres les femmes de son groupe lignager.
40
Fihavanana dans la langue malgache officielle, il est l’équivalent de fraternité.
41
Idem.
42
MANGALAZA E.R., 1998, « Vie et mort chez les Betsimisaraka », Essai d’anthropologie
philosophique, L’Harmattan, Paris, p.36.
54
Les tabous appliqués aux lieux sont souvent liés au doany, lac sacré et grotte .Nous
prendrons l’exemple de doany ici car il a beaucoup d’importance pour les Sakalava.
Etant fady ou tabou, les secrets de doany ne doivent jamais être révélés en n’importe
quelles circonstances même aux pouvoirs et /ou autorités pouvoirs publics. Il est interdit de
s’asseoir en pointant les pieds vers le doany.
Certains tromba interdisent leur saha d’entrer à l’église car c’est la source de leur
conflit avec les Merina (les tromba antandrano).Par contre, d’autres le font car leurs ancêtres
étaient chrétiens (cas des tromba betsimisaraka).Mais il en existe d’autres qui autorisent
l’entrée à la mosquée (cas des tromba bemazava).
Souvent, sont effectués des charmes auxquels sont attachés des tabous : pécher
envers un tabou d’un charme cause une maladie et enlève à celui-ci le pouvoir de protéger la
personne qui le possède ou l’adore. Cette croyance est utilisée par exemple, par les bandits,
qui, lorsqu’ils veulent attaquer un village ou une propriété, introduisent des charmes qui
poussent les villageois à violer leurs tabous, perdant ainsi par la suite leur pouvoir de
protection.
Les amulettes sont mises dans des morceaux de bambous cachés sur le mur de
l’enceinte ou enterrés devant les portes. La même ruse est utilisée dans un combat amenant
l’ennemi à violer les tabous de guerre en lui faisant perdre tout pouvoir ou force. Les charmes
du tabou deviennent efficaces lorsque par l’entremise d’une petite corde on attache à la
poignée ou au biceps des perles magiques, des morceaux de bois sacré, des écorces d’arbre et
une bague rituelle en argent.
Les enterrements, les retournements des morts ou les bains de reliques ne devraient
pas être faits un jour néfaste. Beaucoup de gens croient que si l’on néglige de suivre l’ordre
du mpanandro les ancêtres seraient déshonorés. Les désobéissants seraient poursuivis par leur
colère. Pauvreté, maladies ou autres malheurs, mort prématurée seraient les châtiments
55
inévitables pour ceux qui commettent une offense pareille. La superstition joue un rôle
important.
Seulement pour quelques uns de ces fady (tabous), on peut demander au tromba
concerné, au devin ou divin et aux razana de donner une autorisation pour ne pas les
respecter. Cela peut se faire mais, moyennant de l’argent ou autre chose telles qu’un zébu, un
mouton, une poule de couleur unie (blanche ou noire), etc.
Quoiqu’il en soit, ces fady ne peuvent pas tous être achetés ou autorisés.Chaque
tromba a un ou deux jours néfastes propres à lui. Il y a aussi les interdits imposés par les
ancêtres ainsi que ceux qui sont en correspondance avec l’astrologie et que doivent respecter
les devins. D’une manière générale, c’est le jour où il est tombé malade ou est décédé.
Par conséquent, on ne les appelle pas ces jours-là et même si on insiste à les appeler,
ils ne viennent pas. Cette période néfaste commence la veille même du jour néfaste en
question à partir de 16 heures et se termine au coucher du soleil.
Par exemple, si le jour néfaste est le jeudi, le tromba ne vient pas à partir du mercredi
à 16 heures jusqu’à jeudi au crépuscule. Il arrive même que les saha ne sont pas autorisés à
faire des achats, de sortir de l’argent durant cette période néfaste. S’ils sont obligés de le faire,
ils laissent d’avance l’argent nécessaire à cet effet dans une autre maison qui n’est pas la leur.
43
Les doany sont des temples, des lieux sacrés liés au royaume chez les sakalava et les merina ;
c’est le domaine de quelques rois ou reines, mais aussi parfois des tombeaux de plusieurs ancêtres
royaux.
56
Tableau 9:Les variétés des interdits
Jours 03 6,38
Aliments 20 42,55
Endroits 14 29,78
Vêtements 10 21,27
Le tableau n°09 nous montre que le taux le plus élevé est celui des tabous
alimentaires car ils prennent souvent les aliments comme cause de la mort .Les aliments qui
ont causé la mort aux rois sont tabous pour son saha et ses descendants.
- Interdits alimentaires
Les plus importants sont les fady alimentaires car très souvent, ils ont été à l’ origine
de la mort du roi, ou encore ce sont ces aliments qui ont permis sa guérison lors d’une maladie
grave, par conséquent, la transgression des tabous alimentaires est à éviter car cela suppose
des sanctions et punitions inimaginables.
- Interdits vestimentaires
Les fady vestimentaires viennent après et occupent les 33% de la proportion totale.
Ce sont les vêtements que le roi a porté avant que la mort lui surprenne, et aussi les vêtements
qui lui ont porté malheur (par exemple, défaite lors d’une guerre, perte du pouvoir, etc.).
-Interdits journaliers
Et enfin, les jours fady de consultation ou d’invocation, ils sont moins importants car
on peut demander au tromba de supprimer l’un d’entre eux, sauf le jour où le tromba est
tombé malade, ou le jour de sa mort.
57
2.3..3. Synthèses et domination à travers le fady
La mort, purificatrice de toutes les fautes commises sur terre, ramène tout le monde
directement à Zanahary (Dieu)44, et on dit de celui qui est mort qu’il est lasa-razana, c’est-à-
dire qu’il est devenu ancêtre. Le fady est créé par les ancêtres pour éloigner les descendants
d’un mal ou pour perpétuer le souvenir d’un bénéfice. La transgression d’un fady est jugée
comme une faute devant les ancêtres et non devant Dieu. Ainsi la rémission de la faute est
demandée au représentant le plus qualifié des ancêtres.
Les changements survenus dans les coutumes ont fait que les jeunes se posent des
questions sur la valeur des fady en révélant une défaillance dans les idées vis-à-vis de certains
fady dont le respect et l’obéissance présentent des inconvénients indéniables.Le non respect
de ces fady peut entraîner la mort, la maladie, la folie chez les saha même s’ils ont oublié ou
si quelqu’un d’autre les ont fait à leur place. Ils subissent directement la punition avant l’autre
personne.
45
WEBER M. distingue le pouvoir de la domination .Le pouvoir (la puissance),
signifie toute chance de faire triompher au sein d’une relation sociale sa propre volonté
même contre des résistances. La domination signifie la chance de trouver des personnes
déterminables prêtes à obéir à un ordre de contenu déterminé. Toutes les dominations
cherchent à éveiller et à entretenir la croyance en leur légitimité. Donc, tout rapport de
domination comporte un minimum de volonté d’obéir, par conséquent un intérêt à obéir.
44
Il s’agit ici du Dieu des chrétiens et des musulmans qui sont au-dessus de tout le monde ainsi que
des razana, et non d’un dieu quelconque.
45
WEBER M., « Le savant et le politique », Plon, Trad.fr., 1963 (1919 Ière Ed.) Paris.
58
WEBER M. distingue trois types de dominations :
-la domination légale rationnelle : repose sur la croyance en la légalité des règlements arrêtés
et du droit de donner des directives qu’ont ceux qui sont appelés à exercer la domination (fady
dans la pratique du tromba).Ces trois types de domination sont présents dans le fady et
surtout en ce qui concerne la vie quotidienne et la croyance des Sakalava.
Conclusion du chapitre
Le tromba est une pratique tant royale que populaire. Il a un double fonction, en
l’occurrence, la logique de reproduction sociale, la sacralisation et reproduction du pouvoir
royal. Le fady est lié à la catégorie de l’impur et joue un rôle de régulation permettant
d’écarter ce qui menace la condition sociale. Le tabou en tant que règle surdétermine tout art
de divination, tout acte de sorcellerie et toute manifestation du tromba.
Le tromba est une pratique de statut anti et altermondialiste card’une part, il voit une
autre forme de colonisation à travers la mondialisation et d’autre part, il se méfie du
phénomène d’acculturation véhiculée par l’interculturalité.
59
CHAP III. DIVINATION, ASTROLOGIE ET SORCELLERIE
Introduction du chapitre
3.1. Le sikidy
GRANDIDIER, auteur de nombreux ouvrages sur l’Île Rouge, affirmait que le tiers
des Malgaches savait exercer l’art divinatoire par graines. A ces observateurs précurseurs ont
succédé des missionnaires, tels que Dahl, Vig, Callet, Rusillon qui ont réalisé un début
d’étude sur le sikidy des Hautes-Terres malgaches, tandis qu’au Nord-Ouest de Madagascar,
Dandouau entreprit le même travail.
La vie dans la campagne sakalava est profondément conditionnée par les esprits, et
par leurs représentants terrestres, les sorciers (les moasy) qui utilisent des intermédiaires
végétaux afin de pouvoir communiquer avec eux. Les Sakalava ont beaucoup de respect pour
les grands arbres parce qu’ils pensent qu’en offrant de l’ombre, ils sont dotés naturellement de
vertus protectrices.
46
JAOVELO-DZAO R., 1996, « Mythes, rites et transes à Madagascar », Karthala, Ambozontany,
Paris, Madagascar, p. 273.
60
Certains, presque toujours loin des autres, sont l’objet d’une vénération particulière
puisque, ils sont considérés comme la demeure des esprits ; ils acquièrent une considérable
importance sacrée jusqu’à être utilisés comme autel sur lequel des offrandes sont déposées.
Dans la campagne sakalava, le tamarin (madiro ou kily) est vénéré en tant qu’arbre
sacré.Le rôle de médiateur entre l’homme et le monde surnaturel est valorisé dans toutes les
régions sakalava par l’emploi du sikidy ou la divination par les graines ou les cartes. Cette
pratique est réputée pouvoir répondre à toutes les questions et résoudre tous les problèmes,
notamment, ceux concernant les maladies qui seront soignées, ensuite par le respect des fady
(tabous et interdits).
Le mot « sikidy » trouve son origine dans la langue arabe, « chickel » qui signifie
figure, du fait que la divination est faite par l’interprétation des figures créées par disposition
des graines jetées sur une natte, lesquelles graines sont réparties en trois principales variétés :
Lors d’une consultation, après échange de politesse, le sage prend une position
tournée vers l’Est, le point cardinal le plus favorable, place devant lui une pierre bleue claire
appelée « vatomahita », c’est-à-dire pierre qui voit, et pose des graines de madiro ou kily sur
une petite natte.
61
Après avoir proposé aux divinités les questions du requérant, le mpisikidy ou le
moasy prend les graines, en lance une poignée sur la natte et commence à les ranger suivant
différentes méthodes de sikidy choisies ; avec la main gauche, il forme quatre tas, et de
chaque tas, il enlève les graines deux à deux suivant les règles du chickisme jusqu’à former
16 colonnes dont chacune a un nom bien spécifique.
A la fin de l’interprétation, le mpisikidy lance pour une dernière fois les graines pour
demander l’accord des divinités.
1 2 3 4
1er tirage
oo oo oo oo
5 6 7 8
2ème tirage
oo oo oo oo
9 10 11 12
3ème tirage
oo oo oo oo
13 14 15 16
4ème tirage
oo oo oo oo
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16
oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo oo
62
Si la requête du demandeur concerne la richesse et les enfants, l’oracle se basera sur
la consultation et l’interprétation des cases 2 et 5.
Ces figures, dans la tribu, si nous pouvons nous exprimer ainsi, Sakalava présentent
la différence confirmant son identité, la forme de sa divination, et aussi l’origine arabe de
cette même divination.
Le tableau ordinaire du sikidy est présenté par 16 figures. Chacune des axes présente
des intérêts vitaux de l’existence du consultant.
6- ABILY, de l’arabe « abid » qui veut dire esclaves, le sixième casier, représente
les esclaves. Il est à noter que le mot vidy ou vily est le dérivé d’abid signifiant achat.
63
« baity » ou « beity » : maison et « al-nisaa » : épouse. Donc betsilisay ou épouse de maison
indique la femme à la maison (vady an-trano, vady be), la première femme dans
l’anthropologie de la parenté c’est-à-dire, celle qui vit avec soi à la maison, évidement,
différente de la petite et seconde femme (vady kely ou vady masay) dans le deuxième cas de
la polygamie : polygynie.
9- FAHASIVY, le neuvième casier, représente les aïeux donc relié aux esprits
protecteurs, esprits des morts.
15- SAFARA ou LALANA, constitue la quinzième figure qui trouve son origine
dans le nom arabe « safara » qui signifie route, chemin et voyage. Elle représente le chemin.
64
le Coran : le livre saint. Cette dernière figure de sikidy représente donc la maison et ses
habitants ainsi que l’économie ou l’épargne que l’on y cache.
Le sikidy be ou sikidy fano appelé aussi sikidy voan-kazo est la divination qui
consiste en l’utilisation des graines de fano (piptadenia chrysostack). Il se réalise par une
création d’une figure en rectangle à l’aide des graines en leur donnant une forme juxtaposée.
Toujours groupées par trois, les graines ont pour objectifs de former les quatre
angles qui représentent les quatre points cardinaux. A l’Ouest se trouvent alokola, alikisy et
alakarabo mais les deux destins alakaosy et alohotsy les accompagnent après le coucher de
soleil c'est-à-dire à partir de 18h. A l’Est se dirigent adabaray,alitsimay ainsi qu’alahamora,
ilssont renforcés par alakaosy et alohotsy au levé jusqu’à la monté du soleil donc à partir de
4h du matin jusqu’à 10h de la journée. Au Nord se fixent alimizà, alibiavo, karija et adalo et
ils sont complétés par alakaosy et alohotsy dès 14h jusqu’à 18h.Enfin, vers le Sud s’orientent
tareky, asombola, alahasady et betsivongo qui sont suivis par alakaosy et alohotsy entre 12h
à 14h.
Le divin débute la divination par des excuses pour le dérangement des esprits.
Ensuite il sort les graines dans un petit sac de couleur blanche (unie) et les étendre sur une
natte spéciale pour l’art divinatoire. Elle mesure 1m de longueur et 50 cm de large. Le divin
dépose le vatomahita un morceau de cristal (pierre qui voit) pour réveiller le sikidy. Le
consultant doit payer Ar 200 comme droit à la divination. Ainsi, il met en état le
fonctionnement, l’incantation. Toute la scène se déroule au coin nord-est de la demeure de
divin qui tourne vers l’est et remue à plusieurs fois les graines et continue de murmurer et de
plaidoyer pour appeler les divinités.
65
Après cette longue invocation, le divin procède à l’aménagement des graines et
présente enfin la figure et le résultat obtenu. Il range les graines et les reprend ; il forme
quatre tas sur la natte. Il enlève les graines de chaque tas deux par deux jusqu’à ce qu’il n’en
reste qu’ une ou deux graines. Le divin recommence les mêmes gestes et opérations pour
obtenir une deuxième colonne verticale qu’il dispose à gauche de la première et continue pour
avoir la troisième et enfin la quatrième colonne. Ce sont ces quatre colonnes fondamentales
qui font naître les autres.
Les quatre colonnes sont nommées respectivement de droite à gauche 47 : tale (1),
maly (2), fahatelo (3), bilady (4).
Chaque opération et figure du sikidy s’effectue de droite à gauche comme dans l’écriture arabe ce
47
66
Ainsi le divin trie des graines d’un angle et commence à effectuer la divination
ou la recherche. La signification et l’interprétation dépendent du résultat ou de la figure
obtenue. Le divin interprète alors les figures et donne au consultant les réponses qu’il cherche.
Le sikidy karata est l’art divinatoire qui se réalise par un tirage des cartes. Elle
consiste à lire par les cartes afin d’élucider les problèmes difficiles à résoudre tout simplement
les énigmes de la vie. Si la totalité des cartes en général est au nombre de 52, le sikidy n’en
utilise que 32. Les cartes inférieures à 7 c’est à dire 2, 3, 4, 5 et 6 ne sont d’aucune nécessité
ni utilité dans l’art divinatoire.
Il convient de noter que certaines cartes correspondent aux sept jours de la semaine
et ceci est en grande collaboration avec l’interpretation du sikidy.
67
-Le lundi correspond à 10 de cœur qui signifie joie et bonheur ;
-Le jeudi attaché à l’as de carreau engendre aussi des mauvaise nouvelles ;
-Le vendredi correspondant à l’as de pique est le jour de la visite pleine de respect et
d’honneur ;
-Le samedi associé à l’as de trèfle est réservé aux enfants et à la famille ;
-Et le dimanche est en collaboration avec l’as de cœur qui indique la maison et le foyer.
Le mardi et le jeudi qui sont des jours tabous pour les Sakalava engendrent toujours
des mauvaises nouvelles et c’est la raison pour laquelle on ne doit pas pratiquer le sikidy ces
deux jours. Ces derniers sont dangereux, n’apportent que du malheur tant au requérant qu’au
devin.
Dans ce fanandroana , à part la division des douze mois lunaires ,il y a les divers
destins qui sont au nombre de 28,les destins fastes(tsara) ,les destins forts(mahery), les
destins mauvais (ratsy).Donc, l’astrologie a pour but d’indiquer et de fixer les jours
favorables pour chaque cérémonie ou évènement.
68
Par ailleurs, les habitants de la région Boeny ont l’habitude d’aller consulter
l’astrologue : le mpanara-bintana ou le mpanandro pour déterminer les jours favorables et
fastes pour réaliser, organiser ou débuter un événement dans leur vie telle que la circoncision,
la première coupe de cheveux pour un bébé, un mariage, la construction d’une maison, les
achats et ventes de marchandises, l’ouverture et la fermeture des tombeaux lors d’un
enterrement, etc.
Les mpanandro n’ont pas la faculté d’interpréter les règles, ils sont tout juste les
dépositaires de ces interprétations anciennes.
Le fanandroana trouve son origine dans la civilisation et la culture arabe car les
mpanandro se servent du calendrier lunaire pour exercer leur science par le biais des éléments
principaux du système du fanandroana qui sont présents dans les douze mois lunaires arabes.
Il est à noter que dans un mois, il y a 29 à 30 jours, cela varie et donne au maximum
360 et au minimum 354 jours. Ainsi on a 6 mois de 29 jours ou de 30 jours ce qui fait qu’il
y a un décalage de 10 jours chaque année en avance, cela ne cesse de décaler d’année en
année et dès fois la fin de ramadan(l’aidil fitri ) coïncide avec le nouvel an du calendrier
grégorien , ce qui correspond aussi à la tradition malagasy : l’alahamady be qui se déroule
aussi le premier jour après la fin du ramadan.
Ces douze mois sont projetés sur la surface terrestre plus précisément le pourtour des
quatre murs de la maison qui constitue le plan de référence des douze mois en question.
69
Figure 2:Représentation des destins correspondant aux douze mois lunaires
10 11 12 1
9 2
8 3
7 6 5 4
1-Alahamady;
2-Adaoro;
3-Adizaoza;
4-Asorontany;
5-Alahasaty;
6-Asombola;
7-Adimizana;
8-Alakarabo;
9-Alakaosy;
10-Adijady;
11-Adalo.
12-Alohotsy.
70
Nom malgache Nom arabe Signes du zodiaque Nom islamique Nom grégorien
1. Alahamady : est un destin faste, une période favorable, correspond au destin du grand
roi .Etant un destin mère ou majeur, il n’a pas besoin d’être réparé mais il faut quand
même faire attention à la bouche d’alahamady (1er décan) qui est dangereuse ;
2. Adaoro : période favorable mais toujours recherchée par la foudre. Cette période
peut parfois entraîner une incendie ;
3. Adizaoza : est un destin assez favorable, il est ni bon ni mauvais ;
4. Asorontany : un destin mère et très puissant, il est lié à la mort et à la période faste
pour la construction des tombeaux ;
5. Alahasaty : un destin du sorcier, un destin noir et défavorable. Ce destin nécessite
une réparation et une modification ;
6. Asombola : un destin favorable, il recherche toujours la richesse et la fortune.Il
entraîne une dépense folle mais apporte beaucoup de gain ;
71
7. Adimizana : est un destin mère, il est placé à la porte de la maison où entre et sort le
bonheur et le malheur ;
8. Alakarabo : est un destin fécond, placé à l’Ouest de la demeure auprès de la porte
d’entrée, il fait partie des destins mineurs. Les plantations faites durant cette
période seront chargées de fruits ;
9. Alakaosy : un destin très puissant et propice aux actes des rois quels qu’ils soient. Les
enfants du peuple nés pendant cette période des rois, des princes et des aristocrates
seront éliminer de leurs existences ;
10. Adijady : appartient généralement aux quatre destins mères, il est puissant et indique
l’emplacement de la fenêtre de la maison (cf. Figure 04).Sa période est faste et
favorable au mariage, à la construction et à l’inauguration d’une maison. Chaque
chose effectuée cette période est durable ;
11. Adalo : est un destin toujours en larme et malheureux. Il est placé à l’Ouest du pilier
Nord de la maison ;
12. Alahotsy : destin instable, peu stable. Il est placé à l’Est du pilier Nord de la demeure
et correspond, durant l’époque royale, au jour interdit.
Il existe 4 destins mère qui sont : alahamady, asorontany, adimizana et adijady. Ces
destins majeurs s’opposent deux à deux (alahamady se contrarie avec adimizana et
asorontany à adijady) et se divisent en 3 jours astrologiques (vava, bouche, vonto : enflur,
vody : queue). Nous les expliquons largement dans la sous section qui va suivre (les 28
destins).
Les destins mineurs sont au nombre de 8 et eux aussi se contrarient deux à deux.
Adaoro s’oppose à alakarabo, adizaoza à alakaosy, alahasaty à adalo, et enfin asombola à
alohotsy. Ils se divisent en deux jours seulement : le vava (bouche) et le vody (fin). A chaque
fois qu’on compte 07, on obtient deux destins opposés. La figure ci-dessous nous donnera
plus de clarté.
72
Figure 3:Les destins qui se blessent.
Adolo Alohotsy
11
11 12
Adijady 10 1 Alahamady
Alakaosy 9 2 Adaoro
Alakarabo 8 3 Adizaoza
Adimizana 7 4 Asorontany
6 5
Asombola Alahasaty
: Destins mères
SOURCE : Auteur, enquête à Majunga, 2009
: Destins mineurs
73
D’après cette figure l’astrologie utilise la géométrie et l’arithmétique car on obtient
4 triangles rectangles pour les destins principaux (mères) qui se blessent et 8 autres triangles
rectangles pour les destins secondaires.
Il y a donc :
Il est à signaler que les chiffres formant les 6 triangles correspondent respectivement
à chacun des 12 mois lunaires. Les deux angles complémentaires des triangles rectangles
c'est-à-dire les angles 30° et 60° (1 et 7) correspondent à deux destins qui s’opposent.
Les destins ont chacun leur opposé mais il faut également remarquer leur
compatibilité. Chaque fois qu’on compte 8, on obtient les destins compatibles et
complémentaires.
74
10) Adijady : adizaoza, alahasaty ;
Les destins correspondant aux chiffres pairs sont compatibles à deux destins
correspondant aux chiffres impairs et vice-versa.
La bouche du destin est toujours néfaste, le milieu est mitigé et à la fois favorable.
Les jours les plus puissants sont : la bouche d’alahamady, la bouche d’Asorontany, la bouche
d’Adimizana, la bouche d’Adijady et la bouche d’Alakaosy. Ce sont tous des destins majeurs
excepté la bouche d’alakaosy qui appartient aux destins mineurs mais réputé être le plus fort,
puissant et dangereux de tous.
Les quatre destins mère se situent dans les quatre coins de la maison : alahamady se
trouve au coin Nord-est réservé à la vénération et l’adoration des ancêtres ; on y conserve des
charmes (aody). Asorontany est au Sud-est, ensuite Adijady au Nord-Ouest et enfin au Sud-
ouest est placé Adimizana. Les 10 destins mineurs sont placés à chaque côté de la maison, qui
porte deux destins, à savoir :
Les 6 destins femelles sont : adaoro, asombola et adijady qui sont associés à la terre
et viennent enfin ceux qui sont liés à l’eau : asorontany, alakarabo et alohotsy.
75
Selon les mpanara-bintana sakalava (astrologue) les destins du même sexe sont
favorables mais ceux de sexe différent sont néfastes en général. C’est dans ce deuxième cas
que l’astrologue joue son rôle de modificateur et de réparateurs des destins. Les destins de
sexe différent peuvent se relier sous la condition que l’on arrive à éviter chaque discordance
entre les deux ce qui est rarement le cas car on a souvent tendance à l’oublier.
Les noms des douze mois se trouvent déjà cités plus haut. Quatre de ces mois, à
savoir, Alahamady, Asorontany, Adimizana, et Adijady, ont chacun 3 destins.
Il est à signaler que le mot destin est ici utilisé comme l’équivalent du « vintana » en
malgache.
Ils sont placés, avec leurs destins, dans les quatre coins de la case.
Alahamady, qui est placé au coin Nord-Est49 et les autres, à la suite, aux autres coins.
Les huit (8) mois restant, qui ne comprennent chacun que 2 destins, sont placés sur les murs, 2
sur chaque mur (cf. figure 02).
Dans certaines régions où l’on construit des cases en bois, la charpente est faite de28
poteaux, un poteau pour chaque destin. Dans chaque coin sont placés 3 poteaux et quatre sur
chaque côté. On a ainsi son almanach et son livre de destins à l’intérieur de la case, toujours
bien en vue. La figure suivante montre comment sont placés ces 28 destins faisant le tour de
la case.
48
Le mois lunaire compte entre 29 et 30 jours mais à chaque mois, les mpanandro retranchent 1 ou 2
jours.
49
Coin de l’adoration des ancêtres, où sont conservées les idoles de la maison.
76
Figure 4:Dispositif des quatre grandes divisions astrologiques lunaires sur les faces de la
maison
Fenêtre
Alakaosy
Adaoro
IX II
OUEST EST
Pilier central
Foyer
Alakarabo
Adizaoza
VIII III
Porte d’entrée
Pilier
Asombola Alahasaty
ADIMIZANA VII VI SUD V IV ASORONTANY
77
Figure 5:Les 28 destins
Postérieur
Postérieur
Bouche
Bouche
Postérieur 24 25 26 27 28 1 Bouche
ALAHAMADY
Enflure 23 ADALO ALOHOTSY 2 Dépression
ADIJADY
Bouche 22 3 Fin
Postérieur 21 4 Corne
ALAKAOSY
ADAORO
Bouche 20 5 Postérieur
ALAKARABO
Postérieur 19 6 Feuille
ADIZAOZA
Bouche 18 7 Fertilité
Postérieur 17 8 Bouche
ASORONTANY
ADIMIZANA
Bouche 15 14 13 12 11 10 Secouement
Postérieur
Postérieur
Bouche
Bouche
Chacun de ces douze mois lunaires correspond à un vintana, par exemple le mois alahamady
correspond au destin alahamady. Donc chaque mois comportant un vintana est divisé à son
78
tour en jours astrologiques, dont chacun correspond à un tonon’andro particulier, qui est en
quelque sorte un dérivé du vintana. Les jours astrologiques ou tonon’andro sont aussi projetés
sur le pourtour de la maison.
D’après la figure 2, les quatre coins de la maison sont censés véhiculer les quatre
destins-mères, appelés aussi reny vintana [alahamady, asorontany, adimizana, adijady]. La
terminologie que l’on utilise pour distinguer les 3 jours astrologiques dans chaque destin-mère
est la suivante :
Pour les quatre coins, on a donc quatre fois trois jours, ce qui fait 12 tonon’andro.
Les huit autres sont appelés destins-enfants ou zana-bintana, et ils ne comportent chacun que
2 tonon’andro ou 2 jours astrologiques qui correspondent respectivement au début et à la fin
en se référant à l’explication précédente.
En général, les destins qui comportent chacun deux ou trois jours astrologiques sont
véhiculés d’une force spécifiques à chaque journée (tonon’andro). Le début du destin est plus
fort que sa fin.Exemples d’explication de destin :
- Le destin-mère alahamady qui s’étale sur 3 jours est considéré comme le plus
fort et le plus important des destins.
50
Asorontany est le signe de la mort et du tombeau ; on pose la première pierre de la tombe au milieu
ème
de asorontany (2 jour ou vonto asorontany). C’est le coin Sud-est et un jour faste pour les travaux
79
d’exceptionnel, il peut être dangereux. Le destin adijady est incompatible avec le destin
asorontany d’après les mpanandro. Ces deux destins se blessent : la pleine lune survient
autour du 13ème et du 14ème jour pour le mois adijady, or le 15ème jour est déjà asorontany. La
pleine lune du mois adijady est donc interprétée dans le fanandroana comme étant due au
destin asorontany (d’où leur incompatibilité).
- Le vava adalo est un destin néfaste pour le retournement des morts, par contre
le vody adalo en est un très bon. Adalo est un destin trop léger comme Alohotsy qui est le plus
léger, et encore plus léger que les autres destins réputés légers.
- Le vody adalo est un jour faste pour le retournement des morts, mais seulement
pendant l’après-midi à partir de 13 heures. Et le vava alohotsy est au contraire faste pendant la
matinée.
Le choix d’un jour faste pour organiser un famadihana est conseillé par le
mpanandro aux familles organisatrices ; ce jour doit correspondre aux quatre destins
suivants : asorontany, adizaoza, alahamady, alohotsy.
3.3. La sorcellerie
Les sages qui interprètent le sikidy sont appelés « mpisikidy », et le mpanadro ou
astrologue sont réputés bienfaisants, par contre les sorciers ou mpamosavy ne font que jeter
des mauvais sorts et des maléfices. Ces derniers sont tant redoutés comme porteurs de
chagrins et de malheurs.
de construction d’une tombe en respectant toujours la règle d’incompatibilité des destins. Pendant le
famadihana le coin Sud-est doit être laissé vide par crainte de la mort que le puissant asorontany est
capable de provoquer.Pour en savoir plus, voir RAJAOSON F. (1969), Contributuion à l’étude du
famadihana sur les Hauts –Plateaux de Madagascar .Thèse de IIIème Cycle, Sorbonne, Paris.
80
3.3.1. Précision sur le moasy
Avant de parler de la sorcellerie et du sorcier, permettez-nous de faire une précision
sur le guérisseur ou moasy appelé encore « masy » ou « mpimasy ».
Le moasy ou masy est le dérivé du radical hasina, souvent utilisé dans le dialecte
sakalava et parfois employé comme prénom d’un enfant. Il désigne le divin guérisseur,
trouvant ainsi son origine dans le mot swahili « mwasi » qui signifie désobéissant.
Le moasy peut donc être considéré comme le rebelle de zanahary (dans ce sens) pour
certains individus, mais étant guérisseur, il est l’auteur des bonnes choses et prend le statut de
l’adversaire de mpamosavy ou sorcier : jeteur des sorts.
51
Il n’existe pas vraiment de vocabulaire approprié pour traduire le mot dans la langue de Molière,
mais certains auteurs l’ont selon leurs disciplines traduit en : amulettes, médications, idoles, fétiches,
talismans, charmes, etc.
52
EVANS-PRITCHARD. E. E., «Les Nuers. Anthropologie sociale », Ière édition, Oxford, (1940), trad.
81
si elle a la substance en elle ou pas. Cette conception justifie la sorcellerie transmise par la
grand-mère à la petite fille ou par le grand-père à son petit-fils.
Il faut un canal pour qu’il y ait communication. Donc, il n’y a pas de transmission de
message possible sans réseau53 de communication qui est ici remplacé par le sikidy,
fanandroana et le mosavy.
82
Le réseau de communication est de type en étoile ou en Y. Etant un réseau centralisé,
il a pour but de centraliser les messages au point de vue de réception (l’irréel) mais également
au point de vue d’émission (le réel).
Conclusion du chapitre
L’astrologie , la divination et la sorcellerie sont étroitement liées par les tabous et les
interdits qu’elles imposent aussi bien dans leur pratique que dans ce qu’elles peuvent
conseiller. Les traditionalistes sakalava, suivent méticuleusement ce qui est ordonné par les
mpanandro, les mpisikidy et les autres vieux sages de leur village.
83
Conclusion de la partie
Les Sakalava ne veulent pas d’une culture occidentale, ils veulent respecter leurs
ancêtres et garder leurs traditions. Ils ont grandi dans ces pratiques et pensent donc avoir
une dette envers leurs ancêtres : c’est de les respecter et les obéir pour avoir leurs
bénédictions, c’est comme si ils ont signé un contrat avec les ancêtres.
La colonisation les a tenu à l’écart et a fait en sorte que le pouvoir traditionnel est
devenu un témoin ou plus précisément un titre vaniteux. Ce n’est plus un pouvoir réel ou un
plein pouvoir. Ils ne peuvent plus contrôler leurs enfants quant à la transmission des savoirs
et des sciences traditionnelles, avant c’était facile parce qu’il n’y avait pas d’autres
religions ni d’autres pouvoirs.
L’analyse de la relation entre le fady et les vivants à l’égard de la divinité dans les
croyances traditionnelles (le tromba, le sikidy, le fanandroana et le mosavy), utilise les
apports psychanalytiques qui nous permettent de comprendre pourquoi ce tabou se pérennise
et pourquoi il ne peut se résumer à « une superstition ».
A présent, la modernité qui a apporté des changements, est presque devenue le seul
maître à bord alors que pour les Sakalava, c’est la tradition qui devrait l’être. La deuxième
partie qui suit va nous exposer les pratiques identitaires , en rappelant l’existence des
différentes pratiques identitaires malgaches et en montrant la spécificité des rites funéraires
populaires et royaux chez les Sakalava de Boeny .
84
Photo n° 1
Photo n° 2
Le cortège rentrantdans le village éscorté par six gaillards en torse nue. Mitsinjo en 2007.
85
Photo n° 3
Photo n° 4
86
Photo n° 5
Photo n° 6
87
Photo n° 7
Photo n° 8
88
Photo n° 9
Photo n° 10
89
Photo n° 11
Photo n° 12
90
Photo n° 13
Photo n° 14
91
Photo n° 15
Saha de l’esprit Zamakely en pleine transe, esprit d’un enfant qui est mort à l’âge de 7 ans,
il est classé parmis les zana tromba ou tromba madiniky.
Photo n° 16
Les femmes, cheveux tressés et lachés, chantent et dansent pour manifester leur
satisfaction en revenant du fleuve Mahavavy Sud. Photo prise à Mitsinjo en 2008.
92
Deuxième partie : RITES FUNERAIRES : PRATIQUES IDENTITAIRES DANS LE
« BOENY ».
« L’histoire n’est pas liée à l’homme, ni à aucun objet particulier : elle consiste entièrement
dans sa méthode ».
93
Introduction de la partie
On parle de culte lorsque divers rites s’articulent entre eux et avec des croyances.
En un sens large, un culte est constitué par l’ensemble des marques de soumission et de
déférence à l’égard d’un pouvoir sacralisé que l’on honore.
Tout peuple a sa propre histoire et ses propres us et coutumes qui le diffèrent des
autres .L’origine complexe du peuple malgache a créé des coutumes diverses et particulières
suivant les régions où elles sont pratiquées .En dépit des nombreuses configurations
ethniques, certaines coutumes sont présentes dans presque toute l’Ile mais marquent
quelques discordances par leur nomination et leur déroulement .Ces traditions sont toutes la
base de l’identité culturelle malgache.
94
identité culturelle sakalava. Parmi ces pratiques traditionnelles, on peut citer le fitampoha, le
fanompoa be, le famadihana, le rite de possession et les rites funéraires.
En tant que sujet de notre réflexion, ces derniers nous intéressent plus
particulièrement car la pratique des rites funéraires reste toujours vivace au temps présent.
Malgré l’interculturalité entre le traditionalisme et le modernisme, l’arrivée massive de
croyances et de religions modernes, ce rituel est toujours pratiqué par les Sakalava dans la
région Boeny.
95
Chap. IV. EXEMPLES DES PRATIQUES IDENTITAIRES MALGACHES
Introduction du chapitre
Il est évident que c’est seulement à partir des cultes des ancêtres et /ou cultes
des identités que l’on témoigne notre identité et notre unité qui vont juger notre
existence , notre culture ,et notre histoire.
Il esiste une relation etroite entre les rites funéraires et les pratiques identitaires
malgaches car ces dernières ne peuvent pas être organisées sans les rites funéraires.
4.1. Lanonana
La description ci-dessous est le résultat des entretiens effectués auprès de quelques
Betsileo lors de notre descente sur terrain dans le fonkotany de Sahamena – Ambovoka
à Fianarantsoa en (Juin-Août) 2008
4.1.1. Définition
Littéralement, lanonana signifie fête ou réjouissance. Chez les Betsileo, ce
terme désigne les cérémonies rituelles de réjouissance où il y a sacrifice d’un ou
plusieurs zébus. Autrement dit, ceci est festoyant des grands rites tels que le famadihana,
le saotra ou le fanefana.
96
puisque le rite met en relation les vivants et les non-vivants ou lesrazana.La période et la
durée du déroulement du lanonana varie selon les coutumes. Il est à noter que les points
principaux des rites sont le sacrifice de bœufs ou zébus suivi d’une offrande et de
l’enveloppement des morts avec des nouveaux linceuls.
Historiquement, cette coutume vient d’un rite malaisien dont les Malgaches
sont originaires ; et qui consiste en une obligation d’être enterré sur la terre
ancestrale.Lors de l’installation des asiatiques à Madagascar, la dite coutume ne pourrait
être pratiquée qu’occasionnellement. C’est alors l’occasion de grandes fêtes.
4.1.2. Préparatifs
La première étape des préparatifs est la concertation des membres de la famille.
Cela définira les modalités de la cérémonie ; entre autre ; la réparation des dépenses et de
la date du rite ainsi que le nombre de convives et la durée des évènements. Cette étape
implique tout spécialement les zoky olona ou les anciens, et particulièrement le
patriarche de la famille, sans être le plus riche et le plus âgé des hommes.
Les dépenses peuvent alors être collectives ou à la charge d’une seule personne,
celui-ci ayant les moyens de le faire. Une explication plus détaillée sur cela sera donnée
dans la sous-partie enjeux et implication.
4.1.3. Déroulement
Le kabary, discours officiel prend une part omniprésente dans le rite. Le premier
est le Tambànina ny Fahasivy56, appel des esprits ancestraux, ceci est fait la veille des
56
Sorte de médium guérisseur.
97
cérémonies en vue de préparer les razana. Cet acte est le début du rite à lanonana. Le
lendemain, tôt le matin, le sacrifice du zébu entame la cérémonie.
Le sang du zébu, du moins une partie, est recueillie dans un tandro- potsy60 et
sera utilisé pour marquer les cadres des portes.
Par suite, la bête sacrifiée est enflammée afin de la débarrasser de ses poils
car sa peau est aussi consommée. Des échantillons sont alors prélevés sur chaque partie
du bovidé, le reste sera dépecé pour le repas des convives en partie, et séché pour être
conservé.
Ce dernier rituel est dirigé par le chef de famille dans la maison principale du
village. Présentée sur des feuilles de bananier, l’offrande est placée au zoro
firarazana62.Une fois les rites terminés, la viande est passée au –dessus du feu pour être
purifiée, puis elle est partagée et consommée sur place.
57
Discours cérémoniel que l’on prononce lors des évènements pour débuter et pour terminer. Il
est aussi utilisé lors des réunions ou des sacralisations dans les pratiques rituelles.
58
Notable religieux responsable du sacrifice.
59
Poignard spécialement utilisé pour le sacrifice rituel.
60
Corne de zébu.
61
Divinité principale de la terre.
62
Le coin Nord-est réservé aux ancêtres et considéré comme un lieu sacré de la maison.
98
4.1.4. Repas
A part le riz, alimentation de base des Malgaches, le laoka63 est constitué
principalement de la viande des zébus sacrifiés. Typiquement pour le famadihana ,
l’huile ou la graisse fondue de la viande est mélangée avec le riz pour faire du vary be
menaka (littéralement du riz graissé) .Ce mets est particulièrement riche et gras. Le
galeoka64 , est une boisson très prisée par les Betsileo, hommes et femmes .Sa
consommation est en grande quantité et fait partie de la culture du pays betsileo en temps
de fêtes.
Or, l’organisation du lanonana revient au plus offrant, car cela nécessite des
moyens financiers mais rapporte un prestige énorme et une grande considération, vis-à-
vis de sa famille et des invités. Organiser le lanonana est donc le privilège du chef de la
famille.
63
Accompagnement.
64
Rhum artisanal.
99
Mais quelques points pertinents font que le lanonana ne soit pas une
réjouissance totale pour l’ensemble des participants. Une manie locale, plus coutumière
qu’autre, oblige les invités à offrir un don, riz dans les débuts du peuplement, en
l’occurrence, l’argent, aux organisateurs.
Appelé adidy (devoir), le fond du dilemme se situe sur le fait que l’adidy sera
rendu quand les rôles se renverseront en doublant la somme et ainsi de suite, il y a donc
la présence du phénomène de « potlatch »65 comme dans le « atero ka alao » lors du
famadihanadans les Hautes-Terres Centrales.
Cela est complexe puisque avec l’actuelle inflation, il est possible que des
agriculteurs, pour s’acquitter de leurs adidy, vendent des récoltes sur pieds. De plus,
cette occasion est vue comme étant le reflet du statut social de l’organisateur donc un
lanonana mal préparé peut exposer ce dernier à l’exclusion sociale et / ou à l’ostracisme
volontaire ou involontaire.
4.2. Famadihana
Le famadihana, c’est le retournement des morts qui se pratique surtout sur les
Hautes -Terres malgaches. C’est aujourd’hui un rite d’initiation qui a pour objectif
d’unifier tous les descendants d’un même ancêtre et parfois déplacer un mort d’un
tombeau à un autre.
Au famadihana toutes les couches sociales sont reinhumées en plus ce sont les
corps qui sont renveloppés et non les reliques. Tout cela nous affirme qu’il y a une
grande différence entre le famadihana et le fanompoa be selon leurs dénominations mais
aussi selon leurs déroulements sur le fonds et dans la forme.
65
Terme utilisé par Marcel Mauss pour la théorie de donner recevoir et rendre.
100
4.2.1. Les étapes du famadihana
101
Tous les membres de la famille étendue prennent part à la préparation matérielle
du festin. On abat des bœufs ou des porcs. La cuisson de la viande dure toute la nuit et
elle est réservée généralement aux gendres.
Il n’y a pas de trajet à faire si la tombe est dans la cours de la maison ou très loin
(dans ce cas ce déplacement se fait en voiture).
Tout ce qui va suivre, ainsi que les danses doivent se faire du côté Ouest et Nord
de la cour du tombeau, le coin Sud -Est devait être laissé vide, car il abrite le destin-mère
asorontany66.
66
L’un des quatre destins mères (Alahamady, asorontany, adimizana et adijady) dans
l’astrologie malgache, réputé d’être dangereux car il symbolise la mort et les ancêtres.
102
On procède au déterrement pour les sépultures souterraines, c’est un homme âgé
qui donne le premier coup de bêche, et ce sont les gendres de la famille qui terminent la
tâche. Sur les Hauts-Plateaux, un tombeau doit être orienté normalement vers l’Ouest,
avec une légère inclinaison vers le Sud.
Il est à signaler que chaque membre de la famille est concerné dans ce qui va
suivre et il n’y a pas d’individus déterminés par le système de parenté pour accomplir
telle ou telle tâche. Chaque fois qu’un corps est sorti, son nom est annoncé et ses plus
proches parents vivants l’accueillent avec une natte. A la fin, tous les corps sont étalés
sur des nattes du côté Ouest et Nord de la cour du tombeau.
Le moment de parler avec les ancêtres est donc arrivé. Les enfants enduisent le
corps de leurs grands-parents de graisse, on enveloppe les parents avec des objets ou des
comestibles qu’ils aimaient de leur vivant.
Chaque corps, enveloppé de linceul mais encore étalé sur une natte, est porté sur
les épaules par les proches parents vivants. Ceux-ci les portent en dansant au milieu de
cris divers, on leur fait faire le tour de la tombe dans le sens des aiguilles d’une montre
(ouest-nord, est-sud) avant de les enterrer de nouveau.Le nombre de tours, toujours
103
impair, varie de un à sept67. Au ré-enterrement, c’est le grand ancêtre qui rentre le dernier
pour fermer la porte selon la coutume.
Pendant un court laps de temps, les femmes se précipitent pour arracher une des
nattes qui viennent de recueillir les razana, ces nattes sont chargées de superstitions. Il y
a la croyance selon laquelle une femme stérile est censée avoir un enfant si elle se couche
sur une de ces nattes.
67
Sept tours de tombeau pour désorienter et éviter les Razana de retrouver le chemin du village.
C’est le chiffre sacré réservé autrefois au souverain ou à sa royauté. C’est le nombre complet
pour les Malgaches.
Un pied = 33 cm environ. 18 pied 6 mètres ; 9 pied 3 mètres environ.
68
104
Entre temps on se reposait quelques semaines avant de se remettre à l’œuvre. La
pierre était solidement attachée par des cordes d’herbes tressées sur une sorte de traîneau
en bois et était tirée par un câble fait de la même façon.
- mosaïque ;
- anglais ;
- versoir ;
- tombeau souterraine ;
- tombeau extérieur.
Dans la région des Hauts -Plateaux, un tombeau doit être normalement orienté
vers l’Ouest, avec une légère inclinaison vers le Sud. L’intérieur ressemble à une
maisonnette, et les dalles sur lesquelles sont allongées les corps, sont disposées en étage
sur les trois murs : Sud, Est, et Nord.
105
Figure 6:Tombeau sur les Hautes -Terres Centrales69
Vu de dessus (extérieurement)
NORD
OUEST EST
Asorontany (destin-mère) :
côté à laisser vide
SUD
Vu de face (intérieurement)
Le famadihana est un grand devoir des vivants envers les morts pour éviter
leurs punitions, leurs sanctions et leurs jugements négatifs mais aussi et surtout pour
gagner leurs bénédictions.
69
RAJAOSON F. (1969), « Contribution à l’étude du famadihana sur les Hauts-Plateaux de
Madagascar », Sorbonne, Paris, Thèse de IIIème Cycle, pp 50-51.
106
Cette pratique est donc le maintien de l’identité culturelle qui se caractérise
par une manifestation de l’alliance permanente entre les vivants et les morts, les
ancêtres et les ascendants ce qui constitue la base de l’univers traditionnel malgache.
Nombreux sont ceux qui disent que le famadihana est inutile, que c’et de la
sorcellerie, de la religion ancestrale et constitue un blocage pour le développement ; il
s’agit ici des occidentaux et ceux qui suivent les religions modernes70 .
Le famadihana étant une pratique identitaire ne signifie guère qu’on prie aux
ancêtres mais plutôt qu’on rend hommage à ces derniers pour qu’ils puissent s’intégrer
facilement à leur nouveau monde dans la vie après la mort. Et c’est tout simplement un
rite d’où le conformisme suite à la conscience collective.
70
Le christianisme et l’islam.
107
4.3. Fanompoa be
Nous tenons à préciser que la description du fanompoa be qui va suivre est la synthèse
des résultats de nos enquêtes au doany Miarinarivo, Mahajanga I lors du fanompoa be,
2007 - 2009.
4.3.1. Définition
Le fanompoa be ressemble plutôt au fandroana qui est le bain royal que les
Merina pratiquaient pour intensifier la sainteté des rois ou reines. Le alahamady be dans
la région des Hauts-Plateaux de l’Imerina qui est le Nouvel an lunaire malgache
caractérisé par le Bain Royal et le culte des ancêtres, qui fait la reconnaissance officielle
de l’identité merina, à travers tous les lieux sacrés de l’merina, a beaucoup plus de points
communs avec le fanompoa be que le famadihana.
4.3.2. Déroulement
108
Les participants sont invités par le Mpanjaka au trône et doivent verser ce qu’ils
peuvent pour ce tati-bato encore appelé « famoria fanompoa ». Par contre, dans le cas
du famadihana, c’est la famille organisatrice qui invite les participants, sans oublier les
dépenses énormes de ces invités.
71
ASSOUMACOU E.B. Mémoire de maîtrise en sociologie, Le fanompoa be et le famadihana,
Université d’Antananarivo, 2006, pp. 85-87.
109
Tout transport du miel au Doany Miarinarivo Tsararano Ambony doit être
effectué à pied ; il est interdit de transporter ce miel en voiture ou en avion même si le
transport à pied dure plusieurs jours de marche. Le fanompoa toamainty consiste à la
cuisson du « gorago » (miel) avec du « barisa », ou « toaka gasy » (boissons
alcooliques) pendant des heures et des heures, des jours et des jours jusqu’à ce qu’il
devienne noir, d’où le nom de toamainty (toaka mainty.
Chacune de ces armes est portée par un homme et les porteurs s’alignent en rang
serré. Quatre hommes en « uniforme » et en bonnet rouge pénètrent alors dans le
« Zomba Vinda » pour en ressortir chacun avec un coffret attaché à l’aide d’un « Lamba
Landy » marron et blanc à rayures sombres (ce lamba landy est appelé sobahia par les
sakalava) sur le dos.
72
Les jongô ou jingoa sont les compagnons d’Andriamandisoarivo et aussi ses « lafika ». Le
lafika d’un roi est une personne qui se sacrifie volontairement ou involontairement pour servir de
lit de mort au roi défunt.
73
Sorte de linceul et tissu de haute qualité spécialement utilisé pour envelopper et honorer le
roi.
110
table. Aidés de leurs congénères, ils dénouent le sobahia et posent chacun son tour les
quatre coffrets sur la table, geste symbolisant le déshabillage des rois prêts à prendre leur
bain.
Quand les quatre coffrets sont bien propres, débarrassés de la poussière, c’est au
tour des armes royales anciennes de recevoir le lavage. Les uns après les autres, leurs
porteurs passent devant la table et se servent des mêmes chiffons pour les nettoyer. Ils
commencent par le bout du manche et remontent jusqu’à la pointe de l’arme. Cette
opération se poursuit dans un concert de chants.
Dans la grande cour, cette procession passe entre quatre zébus de sacrifice,
étendus sur le sol. Chaque année, les Tsiarana (descendants d’Andriamandikavavy
épouse d’Andriamandisoarivo et mère d’Andriamboeniarivo) sacrifie un zébu pour
demander l’accord d’Andriamandikavavy. On doit avoir sa bénédiction et son accord car
elle s’est sacrifiée pour donner le royaume à son époux et après à son fils
Andriamboeniarivo ; sans elle, il n’y aurait jamais de royaume du Boeny.
Les quatre coffrets sont remis à leur place dans le Zomba Vinda et y resteront
jusqu’à la prochaine édition du Fanompoa. Juste après cela, on commence à faire le
111
rebiky : les gens dansent ainsi que les tromba dans la grande cour, le tsandrarafa. Jeunes
et vieux, tous sont habillés en rouge. Tout le monde félicite le Mpanjaka.
Le fanompoa devait revêtir la même forme dans les régions, comme Tsahabingo
est sali actuellement par des pollutions de toutes natures (physiques, chimiques et
spirituelles) : les quatre rois (Ndramisara Efadahy Manankasina) ont donné l’ordre de ne
pas leur faire prendre leur bain là-bas. C’est ainsi qu’a été prise la décision de leur faire
prendre leur bain au Doany Miarinarivo Tsararano Ambony. Les quatre rois pensaient
qu’ils y seront vraiment à l’aise.
Après leur bain, on leur fait faire le tour du Zomba pour faire connaître aux gens
que le bain est tout à fait terminé et que ces derniers peuvent maintenant danser, chanter
pour montrer leur joie, sans oublier les coups de fusil pour marquer cette fin (au nombre
de sept ou vingt et un).
Apres la visite du Doany, une fine pluie tombe sur le Doany surprenant les
couples continuant une idylle contractée lors du « tsimandrimandry » de la veille. Pour
les traditionalistes cette eau tombée du ciel est signe de l’acquiescement des ancêtres.
Le manantany vit dans la partie nord du Doany. Si le roi est considéré comme
président, le manantany est alors le vice-président.
112
Les Bemanangy : ce sont les conseillères et les agents de recouvrement. Elles
sont aussi trésorières et animatrices lorsqu’il y a une activité particulière dans le Doany
ou dans le royaume.
Les Ampangataka vivent dans la partie ouest du Doany ; ce sont des contrôleurs,
des sortes d’intermédiaires à travers les esprits des ancêtres ; ils apportent les demandes,
prières et requêtes des sujets sakalava, et reçoivent leurs sacrifices, l’argent pour les
ancêtres, mais aussi le prix d’entrée dans le doany. C’est à eux qu’incombe la tâche
d’ouvrir le Zomba Vinda et d’y faire le ménage si besoin est. Ils s’occupent aussi de la
sécurité du doany. Le fahatelo peut aussi accomplir leurs tâches mais seulement à
certaines occasions.
Dans cette section, nous allons développer les résultats de nos enquêtes dans la région
Sofia. Nous avons eu la chance d’assister à une cérémonie de rasa harena lors de notre
passage à Bemololo, Port-Bergé, en Août 2009. Nous nous sommes tournés vers
quelques « sojabetsimihety »(les plus âgés, les sages) résidant dans la Commune Urbaine
de Mahajanga car le passage à Bemololo qui a duré une semaine n’était pas
satisfaisant.
4.4.1. Définition
Le rasa harena présente en pays des Tsimihety74 dans la région Sofia75 est
aussi une pratique identitaire. Il se caractérise par le besoin des ancêtres à vouloir
partager leurs richesses et préparer leur intégration et adaptation au monde et au rang
des ancêtres.
74
Ethnie, issue des Sakalava et des Betsimisaraka, habitant dans le Nord- Ouest de
Madagascar : dans la région Sofia.
75
Une des quatre régions constituant l’ex-province de Mahajanga.
113
Ainsi, le chef de famille réunit toute la famille pour annoncer qu’il va faire un
rasa harena. Le rasa harena s’effectue à partir de un an après la mort du défunt au
minimum et a lieu pendant la saison sèche entre le 15 juillet et le 15 novembre à peu
près la même période que le famadihana dans les hautes terres et c’est seulement après
la cérémonie du rasa harena que l’on peut toucher à l’héritage et le partager.
4.4.2. Préparatifs
Un bœuf sera choisi et il n’y a pas vraiment de préférence pour la couleur mais
ceux qui n’ont pas de cornes et de couleur zébrée rouge sont tabous et interdits car ils
sont jugés non présentables et anormaux donc inappropriés pour honorer les ancêtres.
4.4.3. Déroulement
Dès le matin, le chef de famille et le sojabe79 se consultent pour débuter la
cérémonie .Arrivant au lieu de la célébration80 , le sojabe fait une demande de
bénédiction ou le « jôro », il verse donc de l’alcool et du miel sur l’endroit pour
donner aux razana leur hasina et aussi pour avoir leur autorisation . Voici un extrait du
jôro du sojabe lors du rasa harena :
76
Le jour le plus néfaste pour tout les Malgaches durant lequel on se prive de tout évènement
important de la vie.
77
L’eau que l’on cherche de beau matin à la rivière et que les êtres vivants hommes et
animaux n’ont pas encore traversée ni bue.
78
Boisson alcoolique d’origine malgache comme le galeoka chez les Betsileo et le barisa chez
les Sakalava.
79
Sorte de sage qui tient le même rang que le tangalamena et l’olobe, le plus âgé du village qui
sait beaucoup de choses sur la tradition.
80
Un endroit spécialement choisi pour la festivité, se trouvant hors du village et loin du
tombeau : dans la forêt.
114
Ao koa anà razana nangao rasa; A toi surtout qui a demandé le rituel ;
84
Les ziva font circuler un morceau de bois à feu autour du zébu pour chasser
les mauvais esprits et éviter les sorts. Les gens dansent et boivent de l’alcool traditionnel
(lemadio et betsa) et font cuire la viande de la cérémonie ou henan-jôro et il est à
signaler que la préparation de ce menu est sans sel et coupé en grand morceau. Une fois
cuite, on procède au « sôrontsôrogno »85 et la cérémonie se termine par le grand repas et
la danse.
81
Source : Auteur, enquête à Port-Bergé en 2009.
82
Les invités, le peuple.
83
Donner la bénédiction à la famille et à tous les invités ainsi que le zébu à sacrifier.
84
Frère par plaisanterie.
85
Rituel de guerre de viande effectué par les jeunes ayant des parents vivants, avant que le
sojabe et tous les invités n’en mangent.
115
4.4.4. Aspects socio anthropologiques
Le rasa harena fait partie de la coutume tsimihety et il est considéré comme le
moyen de garder le lien entre les vivants et les morts : les ancêtres ne cessent de
transmettre à chaque génération leurs traditions et les vivants croient au fait que les
ancêtres sont des intermédiaires et les protègent.
Le rasa harena a donc une valeur phénoménologique, qui, en tant que partage
de richesse entre les héritiers, permet aux deux mondes, l’un qui est réel et l’autre qui
est invisible de s’échanger aussi des richesses : les morts assurent aux vivants de la
protection et de la bénédiction tandis que les vivants les respectent, les honorent et les
vénèrent en retour.
4.5. Tsangan-tsaina86
4.5.1. Définition
Le tsangan- tasina pratiqué par les Antakarana87 est une cérémonie périodique
de 05 à 07 ans et consiste à ériger un mât de pavillon royal d’Antakarana dont
l’emblème est un croissant de lune et une étoile à 06 branches88.
L’origine de cette cérémonie se présente sous deux formes : l’une sous forme
de mythe fondateur du tsangan-tsaina communiquée par Said Abdourahim Solotany
Andoany Ambatoharagnana, et l’autre selon l’histoire du royaume antakarana depuis
son origine.
86
MANIRY S., Le tsangantsaina, Emission « Couleurs des Iles », à la Télévison Malagasy, le
Samedi 19 Septembre 2009, à 21h.
87
Une branche du groupe ethnique sakalava, vivant dans l’extrême Nord de Madagascar, qui
vient des roches calcaires Ankarana. Ces roches forment à l’intérieur une route spacieuse qui
servira de refuge et de siège aux peuples.
88
Ce qui marque la forte présence de la religion musulmane dans la région et les 06 plus une
lune qui est égal à 07, symbolise la sacralisation du drapeau et du rituel car le 07 est un chiffre
complet et sacré dans la croyance sakalava.
116
grande fête. Ce rituel de tsangan-tsaina consiste à manifester l’attachement du peuple à
sa tradition, surtout à son roi et s’accompagne de l’érection d’un nouveau mât
remplaçant l’ancien abimé par le temps.
Le choix du nouveau mât qui portera les valeurs traditionnelles antakarana est
de plus méticuleux. La phase préparatoire se déroule à Ambilobe, après la délibération
du conseil composé des membres de la famille royale et des gardiens des rites : les
manantany et fahatelo, les rangahy.
Ces derniers se rendent le jour fixé dans la forêt pour couper les deux troncs
du hazoambo, mâle et femelle d’une hauteur de plus de dix mètres, soigneusement
choisis dans la forêt .Les deux parties seront imbriquées l’une sur l’autre puis entourées
d’une chaine en argent symbolisant l’union .
Quand les deux arbres sont abattus, deux groupes de jeunes guerriers miment la
guerre entre les deux dynasties antakarana89.
Après avoir versé un breuvage sur le mât sacré, on porte le mât du lieu
d’abattage vers le village d’Ambatoharagnana, là où se trouve le palais du roi.
4.5.2. Déroulement
La cérémonie comporte deux étapes dont la fusion des arbres sacrés et l’érection
du mât c'est-à-dire mettre les arbres fusionnés dans le sol.Mais depuis la menace
d’intégration monarchique antakarana dans le royaume merina pendant le règne de
Tsimiharo I, les lieux se replient de la communauté antakarana durant cette période
éprouvant ont constitué de nouvelles phases dans les rituels du tsangan-tsaina.
Actuellement, il se présente sous quatre étapes, à savoir :
89
Les Zafinimena et les Zafinifotsy.
90
MANIRY S.Idem.
117
Le roi TSIMIHARO I a formulé le vœu et a fait une promesse de se convertir à
l’islam s’il connaitrait un jour l’issue heureuse à l’occupation merina et c’est à ce
moment là que les Antakarana sont devenus musulmans.
Mais il est à noter que cette conversion à l’islam n’empêche pas les Antakarana
de s’attacher à leur croyance traditionnelle ni à la combinaison des deux religions
(moderne et traditionnelle) ;
-la visite des grottes sacrées : avec son peuple, le roi se déplace pour effectuer la
visite à la grotte sacrée. Afin de marquer le rang social qui différencie le roi du
commun du mortel, on le transporte sur un rahangy.91
Une autre demande de permission est faite par le manantany avant d’effectuer
la visite. Il est à noter que cette grotte n’est pas seulement un refuge providentiel pour
les vivants en temps de guerre, mais et surtout un lieu de repos du premier roi
antakarana. Le roi TSIMIHARO I est le dernier roi inhumé dans cette grotte, ceux qui
ont régné après reposent aux tombeaux musulman d’Ambatoharagnana ;
-La recherche et la fusion des arbres du mât : les Antakarana conduits par le
manatany vont chercher les arbres du mât à Antsahamahavelona, qui veut dire
91
Une chaise spéciale de voyage royal transportée par 04 ou 06 jeunes hommes costaux.
92
Résidence royale.
118
littéralement forêt de vie .Mais avant d’y aller les princesses préparent le toa-mainty93
appelé également toa-drazana.
Les arbres du mât doivent être au nombre de 02, ce chiffre paire symbolise la
possibilité d’union et assure la continuité du royaume, qui était la prédiction du roi
Andriandahifotsy : «Ton royaume sera petit mais il durera longtemps ».Ils doivent être
d’une longueur qui surpasse tous les autres arbres de la forêt. C’est pourquoi on les
appelle hazo ambo ou tsitakon’ala qui exprime le caractère distinctif de la royauté afin
de conserver sa transcendance par rapport à ses sujets.
L’arbre femelle est plus long que le mâle et une fois les arbres coupés, la
conque annonce leur départ pour Ampasimbe où aura lieu la fusion. Durant le cortège, la
femelle est toujours devant pour montrer que dans la société malgache la femme ouvre
le chemin tandis que son époux derrière elle assure sa protection en cas de danger
éventuel.
-La fusion des arbres du mât : elle s’effectue à Ampasimbe, le centre entre le
Sud et Nord (la forêt et le village royal). Il se trouve à la rive gauche de la Mahavavy et
la cérémonie est appelée la cérémonie du fitohizana qui signifie d’une part, la continuité
de la monarchie et d’autre part, l’unité du peuple Antakarana. Cette fusion rappelle
qu’aucune continuité n’est possible sans l’union du mâle et de la femelle. Or cette
dynastie est appelée à se perpétrer selon la prophétie du grand ancêtre sakalava
Andriandahifosy.
Une fois que l’assemblage est fait, l’arbre devient hazo manjaka ou un arbre qui
règne. C’est à cet instant que les princesses versent le toa –mainty ou toa- drazana sur
l’arbre du mât pour redonner son pouvoir redoutable. Avant de le transporter à
Ambatoharanana, le manantany implore la bénédiction et protection des ancêtres pour
que cet arbre soit dépourvu de tous les mauvais sorts ou des malédictions.
93
Boisson sacrée à Ankiabe dans le sud de la Mahavavy, préparée avec du miel et de l’alcool.
Ce toamainty est redoutable car il est doté de pouvoir réunir les forces invisibles.
94
La capitale rituelle ou tout simplement le temple royal.
119
le sol, un membre de la famille royale ,en l’occurrence, le prince, monte l’arbre du mât
glissant pour accrocher la corde du drapeau ou « saigny ».Du haut du mât , il fait savoir
au cosmos qu’une fois de plus le mât d’Ambatoharanana est érigé.
4.6. Fitampoha
Comme la région centre Ouest ne nous est pas familière, nous aurions voulu y rester plus
longtemps pour pouvoir visiter le MENABE mais notre statut d’étudiant ne nous a pas
permis de faire. Nous avons focalisés nos observations sur deux localités
importantes :Morondava et Belo sur Tsiribihina pendant 10 jours, lors du dernier
fitampoha de 2008. Le prochain fitampoha se deroulera en 2013.
120
4.6.1. Définition
Dans les sociétés sakalava de centre Ouest, le culte des reliques est un système
ancien, pratiqué dans un cadre familial, avant la formation de la monarchie. Il évolue en
culte dynastique au fur et à mesure de la constitution des dynasties.
Dès lors, des reliques sont confectionnées à partir d’éléments prélevés sur le
corps des rois défunts .Par leur médiation, l’ancêtre royal prend la même place
protectrice que le saint médiéval pour les descendants royaux, mais aussi pour
l’ensemble des sujets. La protection reconnue aux reliques se transforme au XVIIIème
siècle en légitimation du pouvoir dynastique.
Désormais, les restes du corps des rois défunts sont conservés dans un
reliquaire et tiennent un rôle fondamental dans l’exercice du pouvoir.Si les reliques ont
une condition du pouvoir, elles peuvent être objet de convoitise. Source de légitimation,
source légitimant, elles ont un rôle déterminant lors d’une perte d’indépendance des
royautés de l’Ouest.
Le fitampoha, fête du bain royal des reliques, est analysé sous l’angle de
plusieurs acteurs : les porteurs des reliques, les gardiens des tombeaux, les possédés ou
sazoka. Le fitampoha est un culte dynastique qui marque la légitimité et la
reconnaissance de la royauté.
La fête du bain concerne aussi bien le roi régnant qui peut ainsi réactualiser son
pouvoir, que les reliques royales, identité remarquable d’ancêtres réputés « fondateurs
d’un groupe bara, clan et auquel on attribue une force protectrice pour les sociétés qui les
vénèrent».
Les sages « enjike » ont une grande importance pour les Masikoro95.Les ancêtres
se manifestent directement aux vivants à travers les sages pour réclamer du respect, la
célébration d’un bain doit être exécutée si on ne veut pas avoir des punitions de la part
95
Masokoro : une branche du groupe ethnique sakalava vivant dans le sud ouest de
Madagascar.
121
des ancêtres ( les maladies , les accidents , la mort du bétail , la mauvaise récolte, voire
la mort, etc.).
4.6.2. Préparatifs
La maison qui est le centre de ralliement, appelée zomba be est semblable à une
grange de feuilles de palmier.N’ayant que 2 portes et une fenêtre, l’intérieur en est
sombre. Le sol est recouvert de natte et la grande pièce est divisée en lieu réservé et
lieu sacré par une immense bande de calicot qui sert de rideau.Dans le lieu réservé ne
peuvent entrer que les femmes de certains clans.
Dans le lieu sacré le zomba faly , la case sur pilote avec un petit escalier ou
échelle au coin nord est du bâtiment se réunissent les descendants des anciens rois et
on expulse avec vivacité les intrus . Cette case est jugée sacrée et on y conserve des
reliques, des armes, etc.
Le zomba faly contient le reste des trois grands rois, conservé dans petite boite
d’argent et de bois. Elles ne sont pas visibles en temps ordinaires et ce n’est qu’avec
des protections spéciales qu’on peut être admis à l’heure du bain, derrière la grande toile
pour les contempler.
Deux ou trois semaines à l’avance, des émissaires sont envoyés à travers tous
le pays pour faire part à chaque clan , à chaque lignage , de la prochaine tenue du bain
de reliques dont chaque groupe est dans l’obligation d’offrir un zébu et une certaine
somme d’argent .Derrière l’immense toile, les princes et les princesses arrangent le lit
qui prend l’aspect d’une table. On le recouvre d’une natte puis une grande nappe
blanche est étendue par-dessus.
96
Les possédés royaux.
97
Maître de la cérémonie.
122
Sous le meuble ainsi préparé, on place les petites coupes dans lesquelles brûle
« l’emboka » 98qui répand une odeur âcre ; pendant ce temps un ancêtre s’empare du
corps d’un vieillard. Celui-ci avance péniblement, le corps secoué par de violents
spasmes.
Il monte avec lenteur l’échelle du « zomba faly », et son bras droit se met à
trembler, sa cause apparente, cela dure près d’une heure. Une femme, cette fois, veut
s’approcher de l’échelle d’où la discussion entre les esprits. Ils semblent s’étendre, un
mot circule : « la clé »99.
Enfin, on ouvre la porte du zomba faly .Au pied de la petite case, tous les
princes se rangent ; une cruche en terre pleine d’eau sacrée, dans laquelle on lave la
lance, est remise à un individu possédé, qui asperge avec générosité tous ceux qui
viennent se présenter.
4.6.3. Déroulement
Elle dure une semaine :
-le vendredi, les reliques sont sorties du zomba par les mpibaby101.C’est le
gardien du sanctuaire qui ouvre la marche, suivi par le porteur de sagaie ensuite par les
mpibaby et enfin par les mpinday basy et les andevon-janahary102 portant les ustensiles
nécessaires à l’organisation du rituel.
Un climat de fête règne sur l’îlot où chaque soir des femmes étonnent des
chants, des olo be racontent des tantaran-draza et des tapasiry. Les jeunes se mesurent
98
Encens qui sert à chasser les mauvais esprits et protège contre le mal.
99
Le mot est tantôt en français et tantôt en malgache.
100
Doit être un bœuf à tête blanche qui est une couleur signifiant la sainteté et la propreté.
101
Les femmes du clan royal, choisies pour porter les reliques dans leurs dos lorsqu’est venue
l’heure du bain.
102
Les serviteurs des rois qui sont des descendants des lafika (des personnes qui sont servis
pour le lit de mort des rois à l’époque royale) du roi.
123
entre eux par le morengy ; des zébus sont abattus pour nourrir la foule et c’est à la
tombée de la nuit qu’aura lieu l’annonce officielle de la tenue du bain par le prince
détenteur des reliques. La veillée « tsimandrimandry » va alors commencer.
Car durant cette nuit, les hommes cherchent leurs futures moitiés et il y a aussi
l’excès sur la prise de la boisson alcoolique qui peut entrainer une certaine liberté
sexuelle proche de règle de la polygamie ;
-le bain de relique proprement dit : sous l’ordre du prince, le cortège se met en
marche pour Ambinany, le lieu du bain. Le fahatelo ou le responsable du doany est à la
tête de la marche, viennent ensuite les mpibaby, la porteuse d’eau et le souffleur de
conque marine.
Arrivé sur les lieux du bain, les cortèges s’arrêtent sur la berge, alors que les
gens, par centaine, prennent d’assaut les monticules qui les confluent pour ne perdre
aucun détail du rite qui va être célébré : le bain des reliques. On les lave abondamment,
avec soin, avec tendresse et l’opération se poursuit sans le moindre bruit.
124
Le fitampoha tient un rôle très important dans la région Menabe et surtout
dans la vie des pratiquants. Ces derniers se divisent en deux catégories, d’une part,
ceux de la famille royale et d’autre part, ceux qui sont proches de la famille royales ou
les serviteurs et les Sakalava toute entière.
4.7.1. Définition
Le dika vohitra est une pratique identitaire Antemoro .Etymologiquement,
Antemoro vient des mots « ante » et/ ou « anta » qui signifie quitter un lieu pour
s’installer dans un autre. Le mot antemoro se différencie du mot antaimoro, mais ce qui
est vrai, ilssont tous des musulmans. Sur un autre sens, le mot antemoro a été donné
par des Antesavana qui sont des « Maures » venant d’Algérie migrant vers l’Arabie, ils
sont donc des vraies « antes -maures».103
Après leur arrivée sur l’île, bon nombre de leur coutume surtout aux funérailles
sont imités par les Malgaches. C’est pour cela que ce groupe ethnique malgache précise
les rites au moment des funérailles.
Chez eux, quand un Antemoro est mort, il doit être emporté dans le
« tranobe »104.Durant cet événement, des zébus sont choisis et abattus.
Au sens propre « dika » veut dire enjambé et « vohitra » signifie colline. Le dika
vohitra rappelle à la fois l’identité du village et du tombeau. Ce dika vohitra est alors
103
Source : Archives du Tahala Rarihasina, Analakely, Antananarivo.
104
Une maison commune pour faire passer le deuil ,il est interdit d’apporter et de manger
quelque chose à l’intérieur sauf le toaka gasy (rhum artisanal).
125
l’enjambement qui est une pratique voisine du famadihana dans les hautes terres
centrales.
Pourtant, ce dernier est un ensevelissement des reliques alors que le dika vohitra
un recouvrement des reliques par des « raribe »ou tsihy (natte).Outre, différents
interdits caractérisent aussi le dika vohitra. C’est une pratique xénophobe par crainte de
vol d’ossement.
4.7.2. Déroulement105
Lorsque le « katibo »106 finit de choisir, le jour favorable qui correspond
souvent au mois Alakarabo107 et cela durant la nouvelle lune, et le zébu du sacrifice, les
hommes du groupe les emportent près du tombeau et ils se regroupent pour le dika
vohitra. C’est tout les 5 ou 6 ans que les membres masculins du groupe rénovent le
tombeau commun. Cette rénovation est à entendre au sens large car elle désigne au delà
des tous entretiens et réfection de la construction.
L’enjambement consiste non pas à passer d’une colline à une autre mais, à
passer, l’intérieur du tombeau, d’une partie Ouest à l’Est. Les morts enjambent les
couloirs qui séparent l’Ouest de l’Est comme ils changent de collines en accédant au
tombeau familial.
Pendant le déroulement, tous les hommes boivent le toaka gasy, c’est pour les
encourager de finir le travail de réfection. Avant que les jeunes hommes emportent les
défunts dans le tombeau, enfermés entre deux pirogues en bois (madriers), les jeunes
femmes chantent quand le cercueil est fermé car cela permet de faciliter le transport
car « c’est un homme qui rentre chez lui » donc, il n’y a pas lieu de pleurer.
105
Source : Archives Nationales, Tsaralalana, Antananarivo.
106
De l’arabe hatwib qui signifie prêtre et maître de la cérémonie ou tout simplement le divin.
107
Onzième mois dans le calendrier lunaire malgache et arabe.
108
Les morts récents ou humides.
126
De part et d’autre du couloir de séparation, des cadavres sont entreposés selon
l’ordre de séniorité et selon le sexe, les plus âgés se trouvent au sud. Les compartiments
sont constitués par des cloisons de bois faites avec des madriers assemblés par une
traverse perpendiculaire aux madriers.Parfois, les femmes et les enfants ne peuvent pas
assister à cette manifestation, de peur qu’ils pleurent près du tombeau110.
Le dika vohitra occupe une grande place chez lesAntemoro et ces rites sont
importants car ils représentent leurs identités culturelles. Ainsi, les péripéties ici relatées
révèlent les jeux de la tradition alors que la dialectique des pouvoirs, invite ici, à réfléchir
sur l’inévitable dérangement causé par les contraintes de ceux qui jugent la tradition
comme un frein pour le développement.
4.8. Havoria
Cette étude du havoria a été réalisée à partir des informations reccueillies lors de nos
entretiens auprès de la communauté Antandroy dans les deux fokontany :Maromiandra,
Commune Rurale deBoanamary, et Amparemahitsy dans celle de Belobaka, dans le
District de Mahajanga II en 2009.
4.8.1. Définition
Le « havoria » est une cérémonie religieuse et traditionnelle dans le Sud, chez
les Antandroy. Le radical « vory » signifie littéralement réunion ou rassemblement de
plusieurs personnes et présider par un chef bien déterminé du groupe.
110
Car cela peut porter un malheur et selon leur tradition, les femmes sont faites pour donner
une vie donc on les éloigne du tombeau et de la mort.
127
Donc, havoria est l’acte de rassemblement et/ou de réunion organisée par le
groupe ethnique Antandroy pour fêter un évènement spécial rendant hommage aux
morts.
Toutes les régions de Madagascar font des réunions familiales mais leurs
appellations, motivations et significations diffèrent d’une région à l’autre. Par exemple,
chez les Bara d’Ihosy, le havoria est une cérémonie d’intronisation d’un nouveau roi
après la récolte, accompagné par des sacrifices de zébus, des danses, et de grand festin.
Le havoria désigne une cérémonie, que les Antandroy ont l’habitude de faire,
avant de placer les « lolo »111 dans leurs tombeaux ancestraux appelé « kibory »112. Le
havoria se fait dans un endroit particulier et bien choisi d’avance que l’on appelle
« haravane » qui n’est autre que le lieu du rituel. C’est un endroit spacieux, déserte, loin
du village et assez ombré pour que le défunt ou lolo ne se détériore pas par le soleil et
la chaleur.
4.8.2. Déroulement
La cérémonie peut durer plusieurs jours, elle est en fonction de la richesse du
défunt, au cours de laquelle, l’entièreté du troupeau de zébu (qui peut atteindre parfois
une centaine de tête) lui ayant appartenu sera sacrifiée et consommée par les invités.
Les festivités se termineront le dernier jour par le partage des restes de la viande entre
les convives.
Les havoria est donc la cérémonie d’adieu entre le défunt et tous les proches,
car bon nombre de Malgaches pratiquent le famadihana ou le retournement des morts
111
C’est l’appellation du défunt avant le havoria.
112
De l’arabe Kabîr’, appelé kabory par les Sakalava de Boeny, il signifie tombeau ou cimetière.
113
Autre clan qui est lié par la règle du frère par plaisanterie : ziva.
128
,mais les Antandroy , eux ,sont obligés de dépenser le maximum des biens du défunt
pour lui rendre un dernier hommage .
Une fois la date est choisie, le havoria se tiendra dans un lieu loin du village,
vaste et ombré pour protéger le défunt contre la chaleur. Cette réunion définit les
démarches à suivre ainsi que la répartition des tâches pour la famille du défunt.
Tous les zébus du défunt ainsi que ceux qui sont offerts par les gendres, vont
suivre cette parade, suivie des femmes qui vont chanter.
Arrivé sur le lieu, les tâches sont réparties comme l’avait dit le tsimahaivelo,
les hommes abattent le zébu à coup de lance et cet acte est appelé « mitomboke ». Tandis
que les femmes s’occupent de la cuisson .Elles se chargent aussi donc de servir et de
nourrir les invités.
L’après - midi venu, le défunt ne sera pas directement enterré mais il sera
transposé dans un endroit appelé « fanalate » avant de le mettre dans le tombeau des
ancêtres ou bikory qui est un endroit désert, loin du village. On y laisse le défunt
pendant une journée entière. Et pendant la nuit, des chants et des danses se font entendre
dans le fanalate.
Le matin venu, tous les proches ainsi que les invités se réveillent pour
transporter le défunt vers le kibory. Ce sont les hommes qui épauleront le fitsombe en
chantant le beko et en dansant le tsinjake. En même temps le coup de fusil se fait
entendre derrière eux jusqu’à l’arrivée au tombeau.
114
Sorte de lit de mort avec lequel on porte le corps du défunt
115
Respectivement, la danse et le chant traditionnel des Antandroy.
129
Une fois près du tombeau, un ou deux zébus bien choisis sont abattus pour
l’ouverture du tombeau dont la bosse ainsi que le foie sont brûlés à l’intérieur du
tombeau pour faire le « evoke »116.Cette pratique est faite dans le but de demander aux
ancêtres de ne pas prendre les vivants mais de donner leur bénédiction
On peut dire alors que le havoria a subi à la fois les phénomènes d’acculturation
et de déculturation. Une déculturation, du fait que certains rites ont été considérés
comme des cultes dédiés à des fausses divinités via la présence du christianisme et une
acculturation car des nouvelles coutumes , traduites par le fait de chanter des chants
évangéliques lors de la marche vers le kibory et durant les nuits du tsinjake et beko, se
sont introduites et ont pris racine.
116
Qui va servir d’encens pour purifier le tombeau et éloigner le mal, la sorcellerie.
130
4.9. Ati-damba
4.9.1. Définition
Le ati-damba est une cérémonie de reenveloppement des morts .Elle est présente dans le
pays betsimisaraka. Comme tous les Malgaches, les Betsimisaraka croient en la sacralité
des ancêtres et en la vie après la mort.
Un dicton disait : «le corps meurt mais jamais l’âme », ce qui sous entend que
les ancêtres n’ont plus de contact physique avec les vivants mais leurs âmes et leurs
esprits se correspondent de temps en temps lorsqu’il y a un message à transmettre.
La famille décide donc d’aller voir le tangalamena, qui est connu comme le
sage, le plus âgé du village et le plus respecté, considéré comme le chef suprême dans la
société pour l’accompagner chez les « mpanandro » ou astrologue.
4.9.2. Préparatifs
Ceci dans le sens de remettre aux défunts leurs hasina ou leur fonction sacrée.
Le lamba symbolise le soin accordé aux défunts et leurs part de couverture afin qu’ils ne
se sentent plus froid.
Mais il faut aussi diviser les tâches, ce qui est nécessaire pour le bon
déroulement de la cérémonie, à savoirs, l’achat du matériel, la distribution des
131
invitations, la préparation du toaka gasy, l’abattage des zébus, la réception du
« soron’afo »117, etc.
4.9.3. Déroulement118
-Le premier jour : il est marqué par l’offrande du « soron’afo » et le
« lavoan’omby » ou le joro puis la distribution de la nourriture et enfin la festivité qui
sera prolongée toute la nuit.
Dès le petit matin, au premier chant du coq, les femmes vont cuir le riz qui va
être conservé dans le « volo »119. Il y a un discours spécial et l’on échange de parole
pendant la remise du soron’afo qui est ainsi marqué dans un cahier ou carnet car la
famille organisatrice va en avoir besoin lors du partage du riz et de la viande du joro.
Il faut remarquer que lorsqu’on abat le zébu, sa tête doit tourner vers l’Est, on le
tranche en deux parties verticalement et la partie droite va servir de déjeuner pour la
famille organisatrice et les invités , la partie gauche va servir de henam-pokonolo ou
viande du peuple ou viande partagée entre ceux qui assistent à la cérémonie .
117
Le don ou la participation des invités pour la cérémonie : synonyme de « atero ka alao » au
famadihana et le « mosarafa » au fanompoa be.
118
Cf.LAHADY P. (1979), Le culte betsimisaraka et son système symbolique, Fianarantsoa,
Librairie Ambozontany.
119
Feuille de bananier spécialement préparée pour la cuisson du riz et pour servir d’assiettes.
132
hommes qui ont le droit de l’emballer. Car on imagine que les défunts ressentent
toujours de la honte et c’est aussi et surtout le hasina qu’on les octroie.
Tous les membres de la famille du défunt doivent être présents par respect et
solidarité vis-à-vis de la famille mais envers le défunt lui –même. Il faut noter que l’ati-
damba s’effectue toujours dans la matinée vers le misandratra andro mais jamais à
midi ou le soir.
« Le fafa lapa », consiste à remercier les invités de leur présence, à faire des
vœux et le « rasa volagna » le discours d’au revoir. C’est le mpijoro qui va porter la
parole ainsi tout le monde s’en va et la cérémonie se termine. La pierre levée sera
recouverte par un lamba soga ou tissu spécialisé à ceci et on procède à la dernière
demande de bénédiction.
Conclusion du chapitre
Pour conclure ce premier chapitre de la deuxième partie, on peut dire donc que
les cultes identitaires occupent une grande place et les rites y afférentes sont intéressants
pour la continuité de l’histoire des Malgaches mais aussi pour l’organisation et le
fonctionnement de la société toute entière.
133
CHAP V. ELEMENTS DETERMINANTS DE LA REPRODUCTION SOCIALE
Introduction du chapitre
Nous ne pouvons pas dissocier les rites funéraires et le tromba, de ce qui les
contient. Il en est de même pour le roi mort de sa demeure funéraire. Les différents lieux
de résidence du roi dans les deux phases principales de sa nature de vivant et d’ancêtre,
sont autant de repères de l’idéologie sakalava et concrétisent la territorialisation du sacré
autour des sanctuaires liés à la royauté.
134
Nous pouvons distinguer deux types de sites. D’abord, le doany, lequel
représente la demeure du roi dans le Nord-Ouest. Puis, le mahabo qui est le tombeau
royal.
La plupart du temps, les lieux sacrés sakalava se distinguent par certains arbres
« privilégiés » tels que le tamarinier, le kily(tamarindus indica L.) et le manguier
(Manguifera indica L.). D’autre part, ce type de végétation entre dans la composition des
talismans.
Ces arbres sont les vecteurs du pouvoir sacré et font partie, avec la terre et l’eau,
des éléments vitaux du système cosmique et de ce fait, ils servent de piliers principaux
de l’espace cultuel. A cause de la sacralité des lieux de culte d’Andriamisara, et par
respect de la confidentialité, nous ne pouvons pas divulguer certaines informations.
Elle s’appelle zomba kely, zomba vinda ou zomba faly, seconde maison, une
reduction au tiers. Celle-ci a été faite sur le modèle de l’ancienne case royale. Ce zomba
120
Source : auteur, enquête au doany Miarinarivo, Mahajanga en 2008.
121
Sorte de paravent qui sépare en deux le zomba ou le bâtiment en dur, pour plus de clarté, voir
le plan du doany dans l’annexe
135
faly sert spécialement de demeure des reliques des dady : Andriamisara Efadahy
Manankasina, dont on parle comme s’ils étaient encore en vie.
Le toit de la maison qui était pendant très longtemps en satraña (latanier) a été,
sous le règne de Mpanjaka be Dezy, renové en T.O.G. (Tôle Ondulé Galvanisé). Le
bâtiment a deux protes et une fenêtre. Les portes sont de simples battants qui s’ouvrent
vers l’intérieur.
A l’intérieur, le sol est couvert de nattes. La grande pièce est divisée en un lieu
réservé (dans lequel, ne peuvent entrer que des femmes de certains lignages) et en un lieu
sacré protégé par une toile blanche : safodahy. Dans cet endroit sacré, qui est le lieu de
réunion des descendants des rois, se trouve le zomba faly.
Il s’agit d’une case sur pilotis avec un petit escalier au coin nord-est de la
construction. Là sont conservées les reliques d’Andriamisara Efadahy Manankasina dans
de petites boites en or et en argent que nous avons déjà évoqué.
Le doany est constitué par trois enceintes successives : la première est de 40m sur 40m,
faite de pieux de 2m de haut ; dans cette première enceinte se trouve la case contenant les
reliques.
Une deuxième enceinte, faite d’un mur cimenté de 20m sur 20m englobe des tombeaux
divers : tumulus de pierre et cercueils exhaussés.
136
Une troisième enceinte symbolique de 6m sur 6m délimite un enclos où sont disposés le
cercueil d’Andriamandisoarivo à gauche et celui de Ndramandikavavy à droite. Une
porte en bois à deux battants sur laquelle sont sculptés quatre larges fers de lance.
Devant le premier enclos, deux grandes jarres de terre cuite (sajoafaly), d’un mètre de
haut, sont couchées, l’orifice vers l’enclos. Par devant, d’autres cercueils, on a pu
remarquer des ustencils brisés, provenant de l’Iinde et enfin deux gargoulettes de
cuivre. Le village est alors près des tombeaux bien que les rizières soient à trois
kilomètres. Il est désert au moment des cultures.
- des cruches sajoafaly, reproduisant celles apportées du Menabe qui auraient été cassées
(toutefois les jarres brisées ont été remplacées par d’autres faites sur place). Lors d’un
décès royal, les Morarivo les remplissent d’eau sacrée (ranofaly), l’une s’il s’agit d’un roi
défunt mais l’autre d’une reine), et les jingoa lavent les cadavres royal ;
- des sabres : ceux utilisés à l’occasion des fanompoa. On les faisait une tournée dans
chaque village pour réclamer des bœufs et de l’argent. Ceux qui refusaient de donner
étaient considérés comme des mpamosavy.
122
Source : auteur, enquête au doany Bezavo, Mitsinjo, 2007.
137
grand rituel pour récuperer, la clé et le manandriabe123, qui sont des éléments essentiels
pour le culte, partent dejà de leur lieu de conservation.
Lors de notre passage, nous pu retenir ceci : un large espace carré, entouré de
rondin de bois pointus à un bout : c’est la « valabe » ou grande enceinte. A l’intérieur de
celle-ci se trouve une deuxième enceinte plus petite appelé « valamena » ou enceinte
sacrée.
L’espace entre ces deux barrières est accessible à tout le monde, seulement il
faut avancer le pied droit en franchissant le seuil de la porte. Les tombes surmontées
chacune d’une Maison Sainte en bois sont éparses dans la cour de la valamena.
Le tour fait environ 100m, le nettoyage ne se fait donc pas en une seule journée.
Un autre jour sera fixé pour le nettoyage de valamena. A Tsinjoarivo, les zébus font le
travail mais comme la clôture est unique, ils ne rentrent pas à l’intérieur.
123
Sorte de grand tambour utilisé lors du fanompoa be.
138
Il y a deux moments :
- A l’intérieur de la fiaro omby, la surface est nettoyée par les zébus, mais près
des tombeaux, seuls les mains peuvent approcher.
Il est à signaler que les chronogrames, les activités ainsi que le plan de ces deux
sanctuaires à savoirs : Mahabo et Betsioko sont identiques à quelques points près.
124
Observation de l’auteur lors de la visite des doany à Marovoay et Ambato Boeny en 2007 et
2008.
139
Il s’est répandu sur à peu près les 2/3 de l’île, de la côte Sud-Est (région
ANTASAIKA), au fleuve Mahavavy Nord (région de l’ANKARANA) en passant par le
Sud-Ouest (Maroseranana), le Centre-Ouest (Menabe) et le Nord-Ouest (Boeny).125
Moudzi = ville
Wa = de
Angaya = fleur.
125
Cf.DESCHAMPS H. (1965), Histoire de Madagascar, Paris, Editions Berger-Levraut.
126
Capitale originelle du royaume sakalava du Boeny. Là où son fondateur – Andriamndisoarivo,
parti d’un autre royaume sakalava, celui du Menabe, s’est établi dans le but de créer son propre
royaume. D’où la naissance du royaume sakalava du Boeny.
127
Source : auteur, entretien avec Soudjay Bachir Adeham, ex-Sénateur de Madagascar,
membre de l’Académie Nationale Malgache, Mahajanga, 2006.
140
Exemple :
س, ش, ﻅ, ﺹ, , , ﺈ, ﺕ, ب, ﻡ, ﻕ, ﺂ, et de l’autre : l’existence de
quelques mots ou vocabulaires arabes dans la langue malgache comme :
-baraka = honneur ;
-afa-baraka = déshonoré.
Les noms des sept jours de la semaine viennent de l’arabe ainsi que ceux des
douze mois du calendrier lunaire (constellation du zodiaque) :
Le royaume sakalava du Menabe fut créé par les Maroserana, une des dynasties
venues du Sud-est fondatrices des premiers royaumes du Sud et du Sud-ouest. .
141
mais l'appareil monarchique subsista sous des formes symboliques, centrées autour des
reliques, qui ont des effets politiques et économiques encore importants de nos jours.
Dans le passé, les vols de reliques et les guerres qui s'en suivirent montrent que
la domination politique fut toujours liée à leur détention. La permanence de ce lien, en
analysant lamésentente qui dure depuis quarante ans, offre une nouvelle lecture des
rapports de pouvoir, non seulement entre les branches dynastiques qui se disputent les
reliques, mais aussi avec les forces politiques nouvelles, nées sous la colonisation et
depuis l'indépendance sous les régimes successifs.
142
leurs prérogatives sous l'administration française. L'Ambongo et le Sud-ouest n'ont pas
d'héritiers royaux suffisamment puissants pour devenir des notables influents.
Dans le Boeny, déjà morcelé dès le début du XIXe siècle, les oppositions
internes aux branches dynastiques reflètent les tensions nationales entre le soutien au
colonisateur et le nationalisme. Ces oppositions donnent finalement lieu
auxdesaccordscommencés en 1947, mettent au jour une réalité disparate et reconstruite,
bien éloignée de l'histoire idéologique des dynasties ; la légitimité même des reliques y
est controversée. Les reliques jouent toujours un rôle aujourd'hui pour des affirmations
identitaires locales, ethniques, liées à de nouvelles stratégies de pouvoir.
Le nom de Tongay ne dit sûrement rien au grand public, sauf à ceux qui
connaissent l’histoire, base de l’identité culturelle nationale. Tongay est donc la
capitale originelle du royaume sakalava du Boeny. Là où son fondateur
143
Andriamandisoarivo, parti d’un autre royaume sakalava , celui du Menabe, s’est
établi dans le but d’instituer son propre royaume .
Bezavo et Tongay ne font pourtant qu’un. Le nom de Tongay lui fut attribué
après l’arrivée du roi Andriamandisoarivo et de sa suite , sur les directives
d’Andriamisara : « Tonga ahay » qui veut dire « nous sommes arrivés ».
Bezavo est le théatre d’une cérémonie rituelle perpétuée depuis au moins deux
siècles : le « fanompoa ». Ce terme désigne tout ce qui est service lié aux « doany »,
là où reposent les restes mortelles des rois sakalava . A Bezavo, il s’agit de celles
des premiers rois du Boeny, Andriamandisoarivo en tête, ensuite Andriamboeniarivo,
Andriamanarinarivo, Andrianiveniarivo, Andriamihantanarivo, Andriamanatoarivo,
128
Andriamandikavavy.
Selon BALLARIN M.P.129 , le debut du XIX ème siècle, est le théatre des
velléités conquérantes des souverains merina . Andrianampoinimerina, puis son fils
Radama I, entament une politique expansionniste avec le concours des Anglais. La prise
128
ASSOUMACOU E-B. (2004), Le Fanompoa be sakalava, Mémoire de Licence en Sociologie,
Universit é d’Antananarivo.
129
BALLARIN M.P. (2000), Les reliques royales à Madagascar : source de légitimation et
enjeu de pouvoir (XVIII -XX siècle), Karthala, Paris, pp.43-44.
144
de Mahajanga en 1822 puis 1824 par l’armée merina a brisé la structure de la royauté
du Boeny.
130
NOEL ,(1844),Recherches sur les Sakalava ,Bulletin de la Société Géographique de Paris ,
ème
2 série ,pp.53 -54.
145
Bemihisatra du Sud , est crée vers 1850 à la suite des conflits ayant accompagné
l’abolition de l’esclave en 1848 .
En aout 1957 ,Vahoaka , reine des Bemihisatra porte plainte contre inconnu
pour vol et violation de domicile avec constitution de partie civile au Tribunal de
131
Première Instance de Mahajanga . Cette décision se situe dans le prolongement des
tentatives de Me Laforest , avocat de la partie Bemazava, lequel ,depuis1952 essaie de
porter l’affaire des manantany en justice .
Ceci est possible puisque depuis 1946, en matière pénale, la justice de droit
traditionnel, réservée aux indigiènes est rattachée aux juridictions de droit commun,et
passe ainsi de l’administrateurr au juge, permettant ainsi une séparation des pouvoirs
judiciaire et politique. De plus, c’est un moyen de contrer l’ administration , car en
131
Archives procès, Mahajanga, 21 Août 1957, au juge d’instruction près du Tribunal de
Première Instance.
146
1957 au moment des élections aux Assemblées Provinciales (mars – avril) , NATAÏ
J.J. promet les clés du doany au clan Bemazava s’ il vote pour lui 132.
Vahoaka est donc reconnue comme la plus grande princesse du Boeny voire
même l’héritière légale du royaume.
Le jour dit, les quatre reliques ont été transférées illégalement au doany
avaratra. Depuis ce moment, les cérémonies des cultes des ancêtres se sont déroulées
en ce doany. L’opposition entre les deux branches dynastiques continue de se renforcer
132
BALLARIN M.P. (2000), pp. 356-358.
133
Informations reccueillies auprès du feu Mpajaka be Dezy, Mahajanga, 2006.
147
jusqu’à la mort de la princesse Vahoaka qui est succedée par son fils , le prince
Andrianirina Désiré Noël .
En 2004 , les reliques majeures des rois sakalava sont prévues de changer
de doany du site sacré de garde , c'est-à-dire du doany Sud au doany Nord . Les
reliques d’Andriamisara Efadahy Manankasina qui étaient supposées quitter le doany
Sud le lundi 02 Août 2004 n’ont pas bougé d’un iota.
148
sud , et que si aucun message ou aucun signe ne lui seront transmis par les
« ancêtres « ou « dady » c’est qu’ellles veulent tout simplement rester là .
Conclusion du chapitre
Tous les conflits commencent par des accusations de vols des bijoux et
reliques, de détournements d’argent, de non respect des rites, etc. Les Bemihisatra et
les Bemazava entrent naturellement en guerre et cela se traduit, par la suite, en lutte
politique. La royauté étant instrumentalisée par l’administration, les partis politiques et
quelques princes puissants du Boeny, est exposée à la fracture entre les dominants et
les dominés. La société sakalava est une société conservatrice et hiérarchisée mais ce
statut est changé par l’introduction de l’économie de marché et le prolongement de la
querelle interne incessante .
Cette situation donne naissance à une crise identitaire car les Sakalava sont
en face d’une incapacité économique qu’idéologique. Tout cela conduit les Sakalava à
l’affaiblissement, à l’éffondrement de leur royaume.
134
Source : auteur, enquête auprès du Tribunal de Première Instance de Mahajanga et entretien
avec Dadilahy Kassim, un médium au doany Miarinarivo.
149
CHAP.VI : LES RITES FUNERAIRES SAKALAVA
Introduction du chapitre
Il existe une vision dialecticienne entre les pays du Nord et les pays du sud en ce
qui concerne la mort.Les uns repoussent la mort, éludent le deuil et optent pour
l’importance de la vie des survivants. Tandis que les autres, issus d’une société primitive,
croient en la vie après la mort et hissent les défunts au rang de la sacralité.
Ainsi, ils respectent les ancêtres et les versent jusqu’à interpréter les rites
funéraires comme un moyen, d’entretenir les relations entre les vivants et les morts d’une
part et d’accepter les continuités d’autre part. Dans le monde occidental, la mort est
phénomène individualiste car elle véhicule discrètement ou indirectement une exclusion
sociale : toute organisation est confiée au service funèbre et non à la famille du défunt.
Contrairement à cela, en tenant le statut holiste, la mort témoigne chez les Sakalava, la
cohésion sociale du groupe et renforce le fihavanana.
On dit souvent que « olo tsy miady amin’ny faty » : chaque conflit doit se
dissoudre et tout le monde doit s’entraider car si la mort a frappé à la porte d’autrui
aujourd’hui elle peut aussi rendre visite chez soi demain. La croyance traditionnelle des
Sakalava tourne autour de la naissance et de la mort. Ces dernières sont liées par un
contrat dont l’objet est de faire passer chaque individu au fameux pont de la vie, qui
va même en constituer la cause.
Les Sakalava ont donc recours aux rites funéraires pour pérenniser cette relation
dialectique afin de faciliter le voyage, dès le point de départ : naissance en passant par la
mort, jusqu’à la destination : l’au delà. Dans ce chapitre nous allons mettre en évidence la
différence entre les funérailles populaires et les funérailles royales et dans un essai
d’analyse, donner les trois étapes des rites funéraires.
150
6.1. Conception de la mort chez les Sakalava
Etant le seul rendez-vous qui ne figure pas dans notre agenda, il est toujours
raté puisque sa présence signifie notre absence et à l’inverse notre présence souligne
son absence.
-Le faty lena appelé aussi cadavre frais, ou cadavre pourrissant est en général, le
cadavre enterré depuis moins d’un an. C’est le cadavre durant la période de
pourrissement, de salissement, c’est-à-dire à partir de la mort absolue (arrêt du travail du
cœur-poumon-cerveau) en passant par les obsèques provisoires jusqu’aux obsèques
définitives.
Il est en même temps vulnérable et dangereux durant cette période (mérite d’être
pris en soin et son double risque de roder autour des vivants). La conduite des vivants à
l’égard du mort est marquée par la sollicitude et le rejet quise manifestent de manière
symbolique ou réaliste selon des aspects variés suivant les ethnies. Le cadavre est aussi
appelé « faty lena » durant la période de deuil.
135
Selon la conception durkheimienne de la sociologie est « toute manière de faire fixée ou
non susceptible d’exercer sur l’individu une contrainte extérieure ».
151
-Le faty maina, appelé aussi cadavre sec ou intégrant, est en général le cadavre
enterré déjà depuis plus d’un an et prêt à passer aux obsèques finales ou définitives.
Le sort du cadavre sec est réglé au moment des secondes obsèques : on procède
à des rites d’intégration, c’est-à-dire, intégration du cadavre dans la société des ancêtres.
Le défunt est alors invité à rejoindre les ancêtres, et à préparer son après-mort
(métamorphoses, réincarnation, séjour près de Dieu, etc.). Le plus important est
d’orienter l’âme du cadavre pour qu’elle atteigne le ciel. Le cadavre sec ou faty maina est
aussi considéré comme étant un signe pour la rupture de deuil pour les vivants.136
La mort d’un membre du groupe est souvent considérée comme une perte
mettant ainsi en danger sa survie et sa cohésion sociale .La mort renforce non
seulement la collectivité du groupe mais veille aussi à sa solidarité qui va jouer un
rôle important dans sa pérennisation .En d’autres termes, si la vie présente un aspect
holiste, la mort quant à elle, montre son aspect individualiste.
Nul ne peut connaître l’origine de la mort, elle est souvent causée par une
maladie, un accident et d’autres encore. On cherche toujours un coupable alors qu’il
faut tout simplement se consoler par le fait que « la mort vient de dieu » ou « kabarin-
dranahary » en dialecte sakalava.
Donc, la mort ne doit pas être perçue comme mauvaise car c’est la volonté
divine, étant donné qu’elle possède deux variantes : négative parce que de perte,
dommage et échec, et positive puisqu’ elle signifie une nouvelle vie, une continuité et
une réincarnation.
Pour en savoir plus, voir RAJAOSON F., 1969, « Contribution à l’Etude du Famadihana sur les
136
Hauts Plateaux de Madagascar », Thèse de III ème cycle, Sorbonne, Paris, pp. 208-213.
152
La mort est le voyage sans billet retour que chaque individu doit effectuer,
seul ou accompagné. La date de départ pour ce voyage n’est jamais déterminée
auparavant et la destination peut donc être qualifiée d’eidétique.
Tout le monde n’accède pas à un tombeau. Les gens très pauvres et sans parenté
bien établie courent le risque d’être « alevina » c’est-à-dire mis dans un simple trou, en
terre. Isolés, ils ne seront pas visités et seront rapidement oubliés. « Mourir et ne pas être
enterré par ses parents, c’est mourir comme un chien » dit le proverbe. « Même le
fangaraka (abeille sauvage) fait des funérailles à sa grand-mère ».
D’autres connurent un sort plus dur encore : les gens réputés mpamosavy
(sorciers) étaient enterrés dans la « terre mauvaise », à fleur de sol, après avoir été traînés
là au moyen d’une corde. Leur tête était orientée vers le Sud, direction des sorciers, ou
bien leur corps était jeté dans le fleuve. Etaient aussi interdits de tombeau, les gens morts
du tanguin ou condamnés à la peine capitale, les varioleux et les lépreux.
Ces derniers, enterrés dans une fosse d’allure provisoire, devaient attendre
plusieurs années une autorisation royale donnée à la famille. Préoccupant aussi pour leur
famille fut le cas des gens morts au loin qui sont sur les marges, souvent dans des
engagements militaires.
Lors de la mort, s’imposent deux convictions. La première, est que le mort est
malheureux de quitter cette vie, qu’il peut être jaloux des vivants si ces derniers ne lui
donnent pas des témoignages de respect, d’affection assez évidents, et qu’il est
137
Lambamena : suaire rouge, de soie sauvage, dont on enveloppe les morts. Une insulte
particulièrement pénible pour un malgache est encore de lui souhaiter de ne pas avoir de lamba
pour linceul.
153
potentiellement dangereux. Pour assurer un bon rapport avec lui, il faut dépenser sans
compter pour l’enterrement.
La deuxième idée est que le mort part pour une autre société où il retrouvera les
membres de la famille, foko, etc., une société où se reproduit la hiérarchie des statuts. Il
faut donc lui assurer la possession des objets symbolisant une position sociale : les
bœufs, l’argent. Les bœufs abattus dont les morceaux sont distribués aux participants
suivront le mort dans l’au-delà.
154
là, au moins les principaux. La cérémonie se déroule à l’heure indiquée par l’astrologue.
Après un culte chrétien ou une apostrophe debout, joro, les jeunes de la famille
transportent le corps dans le tombeau grand ouvert.
Les femmes, quant à elles, n’ont pas le droit d’y pénétrer pour y mettre ou
prendre un mort. Chez les chrétiens la mise au tombeau s’achève par une célébration et
un chant de résurrection. Sinon, le joro faty appelle les ancêtres à recevoir le nouveau
mort qui va habiter désormais chez eux, dans ces termes :
« Nous voici, vivants, nous nous tenons débout devant vous, les grands ancêtres.
Nous venons ici, descendants d’untel, nous vous portons ici untel, nous l’accompagnons
dans sa nouvelle demeure. Ne le repoussez pas parce qu’il risque de nous faire du mal, de
rendre nos terres infertiles, de tuer nos enfants en bas âge. Accueillez-le parce que c’est
maintenant votre parent et non plus le nôtre. Il vous appartient, tenez-le bien, qu’il ne
vienne pas troubler notre vie ».
Une fois la porte du tombeau fermée, des rites de purification peuvent être
accomplis comme, par exemple, allumer au seuil de la maison un feu que chacun doit
enjamber pour entrer ; brûler les effets du mort ou même sa maison pour éviter qu’un
vivant ne l’habite ; aller se laver dans un cours d’eau ou, plus symboliquement, y tremper
un coin de lamba. Ces rites ont pour but d’effacer toute trace de contact avec le mort.
Un mort dont l’enterrement n’a pas été accompagné de tous les rituels
nécessaires (tsy vita fomba) peut revenir troubler les vivants car il regrette sa vie
antérieure et n’accepte pas son nouveau statut. Pour marquer sa tristesse, il sort de
satombe et exerce des forces destructives et négatives sur les vivants. On l’appelle un
lolo.
155
Il est nécessaire d’exposer ces grands traits pour saisir ce qui change, sous quel
effet et dans quel but. L’enterrement est un effet marqué dès le XVIIIème siècle et
jusqu’à nos jours par des modifications qui tiennent aux prescriptions du pouvoir,
intéressé par la cohésion sociale, c’est à la mode, donc aux effets de distinction
poursuivis par les élites, deux processus parfois contradictoires. Interdiction est faite aux
descendants du mort de l’enterrer discrètement, sans faste, entre parents. L’enterrement
doit être une affaire sociale large, remise aux mains de la communauté.
Tous ceux qui sont partis ne sont jamais revenus et n’ont jamais donné de
leurs nouvelles, est ce parce que leur nouveau monde est paisible pour oublier leur
ancien monde ou bien il est rebutant qu’ils ne veulent pas alerter les vivants ? Ou est-ce
tout simplement un secret ? Personne ne connaît la réponse ?
La mort est inévitable. Après la disparition de la vie, il n’y a que le corps qui
reste et qui va devenir « poussière ». La mort est donc différente du mort qui n’est autre
que le défunt lui-même ou la personne décédée.
La mort est sentie comme une mutation pour le vivant, car elle se caractérise par
la séparation du corps et de l’esprit ou de l’âme, séparation très relative d’ailleurs,
car lorsqu’on veut honorer le corps au tombeau, l’esprit y est aussi présent.
Après la mort, le fanahy, ou l’avelo, ou l’ambiroa, c’est-à dire l’âme ou l’esprit,
se sépare du corps et continue de vivre selon la croyance malgache.
Certains pensent et croient que les morts éprouvent quelque fois les mêmes
besoins que les vivants : par exemple, ils peuvent avoir soif et on leur apporte de l’alcool,
156
ils peuvent avoir froid et on les enveloppe dans de chauds linceuls, ils aiment aussi avoir
de jolies demeures, et on leur construit de somptueux tombeaux.
La mort n’est rien d’autre que « la force dissolvante du temps qui finira bien, un
jour ou l’autre, par nous soustraire définitivement à la vie ».
En tout cas, la mort ne peut pas nous laisser entièrement indifférent et ne pas
susciter en nous une certaine émotion, surtout quand cette mort vient de frapper un
proche parent, un visage familier et intime, éveillant ainsi, au plus profond de nous-
mêmes, une angoissante perspective de notre propre disparition.
Dans ce sens, elle ne peut être perçue que comme négativité et comme désordre.
« La mort n’est jamais bonne s’il y a un événement qui nous fait réellement violence, en
effet, et qui désorganise radicalement la conception organisatrice de la vie », c’est bien
cet événement là.
Car la mort nous déstructure dans la mesure où elle nous prive pour toujours de
notre « existence corporelle visible » au sein de la communauté des vivants, pour nous
précipiter, sans ménagement, dans un monde inconnu, et tout à fait autre ; c’est en
fonction de la représentation que nous avons de la mort que nous apprécierons ou
n’apprécierons pas à sa juste valeur ce qu’est cette vie. En tout cas, si paradoxal que cela
puisse paraître, c’est la mort qui donne un sens à la vie.
Le fait de savoir que les hommes doivent tous mourir ne suffit pourtant pas pour
rassurer l’individu sur sa propre mort. Cet individu deviendrait désormais le mort ou le
défunt lorsqu’arrive ou se produise le caractère inexorable de la marche du temps et de
l’humaine condition.
Avant de parler du mort avançons quelques précisions sur l’homme (car avant de
mourir chaque individu est appelé ainsi, mais immédiatement après sa mort il sera
appelé le défunt ou le mort).
157
L’homme est différent des animaux d’après les écritures saintes. L’homme a été
créé avec des spécificités particulières : sa place, sa supériorité par rapport aux autres
êtres vivants. Toutefois, il est important de faire connaître qu’au même titre que les
animaux, l’homme a été fait avec de la terre.
Dans les croyances malgaches, le monde est composé de trois sphères, à savoir :
- les cieux ;
- la terre (là où vivent les hommes), ils prient Dieu ;
- le sous terre (là où les morts vivent), plus de prière.
Les morts se dirigent vers une vie invisible que les vivants ne maîtrisent pas et à
laquelle ils ne sont pas liés. L’on croit que c’est le mort dans le tombeau qui va se lever
lors de la résurrection. Qu’en est-il alors pour les accidentés d’avion, les naufragés de
bateau, etc. dont les corps n’ont pas pu être enterrés ? D’où vont-ils se lever ? Si l’on se
réfère aux écritures saintes, c’est complètement faux.
Dans un tel contexte, la mort revêtira toute une autre signification. Elle cessera,
pour les différents acteurs sociaux en phase avec leur ritualité, d’être perçue comme étant
cet événement sans appel, d’ordre uniquement biologique, qui rend impossible toute
possibilité de changement.
Au contraire, grâce aux rites funéraires, la mort devient ce par quoi le mort n’a
fait seulement que « changer de peau », lui permettant d’accéder ainsi à une autre
dimension de l’existence, invisible celle-là, mais qui reste néanmoins aussi réelle, et
peut-être même plus exaltante et plus épanouissante encore que celle qu’il apprécie tant
actuellement.
158
A Madagascar, le mort est le personnage principal à partir duquel s’articulent les
rites funéraires. C’est donc en fonction de l’intégration sociale de ce dernier, de
l’importance du rôle social qu’il a pu jouer durant sa vie au sein de la communauté que
les survivants vont devoir se mobiliser plus ou moins massivement pour lui.
Selon une telle logique, les rites funéraires restent finalement l’une des grilles de
lecture apparemment les plus pertinents pour mesurer la surface sociale ainsi que le poids
politique du mort et de son groupe lignager.
Etre pleuré par toute la communauté des vivants d’une part, rester longtemps
présent dans la mémoire collective des générations à venir d’autre part, signifient dans un
tel contexte que l’on a su mener une vie humainement bien remplie et socialement
reconnue.
Rupture, marginalité et intégration sont donc les trois temps forts qui ponctuent
ces rites funéraires. En un mot, ces rites ont pour fonction essentielle de faciliter le
passage du monde familier des vivants à celui tout à fait autre des morts, tout en assurant
aux survivants la tranquillité des jours qu’ils ont encore à vivre. De la « mort surprise » à
la « mort reprise » : telle est donc la métamorphose opérée grâce aux rites funéraires.138
Les exhumations des morts pratiquées par les Malgaches ont suscité
l’élaboration de divers hypothèses heuristiques, toutes produites en référence aux
« secondes funérailles » ou à la fin sociale du deuil.
La non acceptation de la mort en tant que fin apparaît clairement dans les rites
funéraires, particulièrement s’ils concernent un vieillard. Puisque celui-ci a pleinement
rempli son existence terrestre (voky andro, littéralement « rassasié de jours »), il mérite
138
Cf. MANGALAZA E.R., 1998, « Vie et mort chez les Betsimisaraka de Madagascar, Essai
d’anthropologie philosophique », L’Harmattan, Paris, p.154.
159
de « monter » au stade supérieur. Il est arrivé au terme de ce qu’on appelle hasina, la
sagesse ou la sainteté que toute personne n’acquiert qu’avec l’âge.
Ainsi, lors du décès d’un individu très âgé, il n’y a pas lieu de pleurer comme on
le fait quelque temps pour un jeune homme. Au contraire, c’est une occasion de
réjouissance : pendant des jours et parfois des mois selon la région, on danse, on rit, on
boit de l’alcool, on mange la viande des zébus qui appartenaient au défunt et qu’on a
abattus pour la circonstance. On parle au mort, on lui adresse des plaisanteries à
connotation sexuelle. Puis le corps, soigneusement enveloppé ou déposé dans un cercueil
fait d’un bois spécial, est transporté dans le tombeau familial parmi les siens.
La mort est un passage particulier, parce que l’être change à la fois d’état et de
statut. De l’état corporel, il passe au spirituel. La transformation qu’il subit correspond à
une croissance.
160
Il doit, laisser à ceux qui viennent résider à son ancien campement les marques
de son séjour (biens matériels ou spirituels). Par ailleurs, quand on a à voyager (et c’est le
cas du moment) il n’y a pas lieu de se surcharger inutilement des bagages ».139
3- Mourir en étant socialement important. Celui qui, pendant sa vie a pu, par
la force de son travail, accumuler beaucoup de biens matériels et, par la ferme volonté,
progresser dans la voie de la connaissance et de la sagesse peut porter avec quiétude. Non
seulement sa place future est assurée là-bas, mais ici, même ses descendants continueront
à jouir de son prestige social ;
139
MANGALAZA E. R. (1998), Vie et mort chez les Betsimisaraka de Madagascar. Essai
d’anthropologie philosophique, l’ Harmattan, Paris, p.167.
140
Idem, pp. 168-169.
161
7- Mourir sans que l’agonie soit trop longue. Selon la croyance populaire le
« sorcier maléfique » ou mpamosavy n’a jamais un départ facile (tsymôra fialaña) car il
doit payer une partie du mal qu’il a causé à la société. « sorcier maléfique qui agonie
finira bien à la longue par s’en aller », affirme précisément un proverbe betsimisaraka.141
Il convient de noter qu’il existe plusieurs façons chez les Sakalava d’annoncer
qu’une personne est décédée. Les Sakalava disent donc : tsy nisyizy : il n’est plus, il est
absent, rôso izy : il est parti, robaka izy : il est détruit,nihilaña izy : il est incliné et folaka
izy : il est brisé. Ou niambôho : parti pour de bon, à tourner le dos. (Les deux derniers
sont pour annoncer la mort d’un souverain).
La famille du défunt prévient et informe donc tous les membres sans exception.
Dès lors, hommes et femmes se mettent en tenue de deuil.
Les hommes portent un sikiny (paréo) et les femmes se revêtent des salovana de
couleurs sombres (complet de paréo). Tous les bijoux sont donc interdits et les cheveux
des femmes doivent être tressés.
Ainsi, on crie, on pleure, on se désole. Les femmes semblent souvent être les
plus touchées par l’évènement car elles ne cachent pas leurs douleurs contrairement aux
hommes qui versent tout simplement de larmes sans faire du bruit. Tout le monde est
invité à assister à cette scène des lamentations.
Mais les pleurs et les lamentations doivent suivre les règles imposées car
onn’en a le droit que lorsqu’un membre de la famille vient d’arriver sauf au moment des
pleurs collectifs qui se font à l’aube, après la mise en bière, à la levée du corps, en partant
du tombeau et en rentrant au village.
141
MANGALAZA E.R., op. Cit. pp. 168-169.
162
6-2-2- La toilette et la veillée funèbre.142
Généralement, ce sont les ziva (ou parent à plaisanterie) accompagnés d’un
parent143 qui se chargent de la toilette funèbre car tout rite chez les Sakalava exige une
purification. Que ce soit par l’eau mélangée avec du kaolin ou par l’encens brulé au feu,
etc.
La séparation entre les vivants et les morts est marquée par le changement de
nom car le défunt est désormais appelé razana (ancêtre), faty (mort), fahavoaza (perte),
baraka (honte), raha (chose), faharobata (déstruction).
Le corps du mort est placé sur l’Est, la tête tournée vers l’Ouest où le soleil
rejoint l’obscurité, les deux bras sont tendus sur les côtés. On commence alors la
purification en versant de l’eau trois fois, de la tête aux pieds pour que les impuretés du
corps inférieur ne viennent pas salir le corps supérieur et on lave le corps mortuaire par la
suite.144
Une fois la toilette achevée, les deux bras sont déployés sur le ventre et liés
avec du raphia, les deux gros orteils sont liés aussi à leur tour.
Dans cette toilette funéraire, l’eau joue un rôle purificateur sans laquelle le
défunt ne peut entrer facilement dans le monde sacré des ancêtres. Cela nous rappelle
l’échange entre le monde des vivants et celui d’un mort car à l’arrivée d’un nouveau-né
on procède aussi à la toilette du bébé pour qu’il devienne un être humain social à l’instar
d’un produit biologique.
142
Auteur, enquête, Mahajanga, 2008.
143
Un membre âgé dans la famille mais pas forcément les parents biologiques.
144
Enquête et observation des funérailles populaires à Ambatomalama, Mahajanga II, 2008.
145
Un tissu de couleur unie (blanche) qui sert de drap et d’habit pour le défunt.
146
Chambre funèbre construit immédiatement après la mort à l’écart de la maison avec une
petite dimension (3m de long-2m de large) et qui sera brulée après l’inhumation : on le purifie
avec de l’eau ensuite avec du feu.
163
On se contente d’un rituel symbolique par quelques gouttes d’eau lorsque l’état
du cadavre ne permet pas la toilette funéraire complète, toutes les choses utilisées pour
cette purification seront enterrées ou jetées très loin pour éviter toutes sortes de
sorcellerie.
La viande est partagée selon un ordre hiérarchique spécifique. La tête (loha), les
cornes (ampôndo) ainsi que les os (taola) sont brûlés et les hommes et les femmes ne
mangent pas ensemble.
Dans la croyance sakalava, les morts suivent de près les faits et gestes des
praticiens de la thanatologiecar leur intégration parmi les ancêtres en dépendent. Le
trépassé veut donc en savoir plus. Les praticiens sont ainsi mis sous l’obligation et le
serment de ne rien révéler en ce qui concerne le corps du défunt.
Les interdits reposent aussi sur la norme que : si le défunt est une femme ce sera
aux femmes de procéder à la toilette funèbre et aux hommes lorsqu’il s’agit d’un homme.
Les praticiens de la thanatologiequi sont en contact avec les morts grâce à leur
travail doivent passer à un bain purificateur après la toilette funéraire pour pouvoir
réintégrer à la communauté des vivants. Ils se lavent les mains, le visage et boit un peu de
cette eau de purification avant de verser les restes de la tête au pied en une seule fois
(purification de l’habitation, les éléments purificateurs).
164
La veillée funéraire est chez les Sakalava l’opposé des rites positifs qu’ils
appellent « tsimandrimandry », littéralement le fait de veiller en s’amusant : la veille du
jour cérémonial.
La veillée funèbre est donc un rite négatif marqué par la mort qui n’est autre que
le droit acquis à chaque individu mais que chacun a sa propre date pour s’en jouir.
La veillée funéraire peut durer au moins une nuit et les autres jours se
déterminent par le statut social et la personnalité du défunt car il y a de quoi à dépenser
en offrant du riz, de zébu, de la boisson alcoolique (barisa), du café (kafe) et du thé (dite)
à ceux qui sont venus.
Il nous semble opportun ici de signaler que la veillée funèbre n’aura pas lieu
quand il s’agit d’un défunt reconverti à l’islam de son vivant. S’il a atteint la mort dans
l’après-midi à partir de 14h, ou loin du pays, dans ce cas, la veillée funéraire sera
organisée mais autrement.
La veillée funèbre valide donc le séjour du défunt au monde visible tandis que
l’enterrement lui serve du passeport pour accéder au monde invisible. Ainsi, le mort
passe de l’état matériel à l’état spirituel.147
Il faut veiller sur le cadavre au moins une nuit chez les Sakalava pour être sûr
qu’il est parti à jamais et abandonne le chemin de retour. Car il se peut que l’esprit (âme)
quitte le corps pendant un moment et tente de revenir pour permetre au corps de vivre
normalement, c’est pourquoi, on ne cesse pas de masser le cadavre avec de l’eau tiède
lors de la toilette funèbre pour éviter toute sorte de paralysie, afin de connaître si un
retour est possible.
Avant de terminer cette veillée funèbre il importe de noter qu’il est interdit de
faire une visite de condoléance pendant la nuit et la mise en bière ainsi que la sépulture se
mesurent en fonction des dons collectés lors de cette visite de condoléance.
147
Auteur, enquête sur terrain, Ambatomalama, Mahajanga II, 2008.
165
- Oh kakazo, oh kakazo ; oh arbre, oh arbre ;
La présence des zanaka (enfants) et des zafy (petits-enfants) est conseillée car
ils ont été isolés durant la période des funérailles pour les épargner de la souffrance et de
toute sorte d’émotions.
Le corps est déjà enroulé dans plusieurs148 draps blancs : des tissus appelés
« bafota » qui vont servir de linceul et/ou de jabo : un tissu de raphia ou encore la trame
de coton et attend l’emballage dans une grande natte attachée avec du raphia au niveau de
148
Au nombre de 3 (trois) en minimum et 7 (sept) au maximum mais toujours avec les chiffres
impairs.
166
7 (sept) endroits : la poitrine, le ventre, les reins, les genoux, les pieds et les deux
extrémités. La dépouille est placée dans l’auge (femelle) et les chants et la danse sacrée
s’exécutent. On fixe enfin le couvercle avec 7 clous149.
La date de l’enterrement désignée par le devin ainsi que les interdits y afférents
seront respectés. Parmi ces tabous on peut donc citer l’interdiction de : ne pas peigner, ne
pas siffler, ne pas allumer la radio, ne pas voyager, etc.
Une fois la date indiquée, on procède aux discours funèbres. Il existe trois temps
de discours funéraires :
A la fin, l’officiant demande au défunt de laisser les vivants et lui interdire tout
retour au village ou de se venger de son sorcier s’il y a eu ensorcellement.
149
Le chiffre 7 est considéré comme sacré et complet dans la croyance sakalava. Ce chiffre est
autrefois réservé au souverain ou à sa royauté .C’est le nombre complet pour les Malgaches.
167
Pour suivre la disparition du soleil et respecter la loi de l’astrologie sakalava
(fanaraham-bintana) l’enterrement doit avoir lieu dans l’après-midi mais jamais dans la
matinée. On fait retourner le défunt 7 fois autour du trano raty avant d’aller au cimetière ;
ceci pour que l’esprit ne se souvienne pas du chemin de retour.
A cet instant les membres de la famille se lamentent, crient et pleurent alors que
les ziva se moquent de façon grossière de la dépouille mortuaire en la traitant d’animal de
viande à jeter et de fou et dansent avec le cercueil. Les ziva et le défunt sont liés par la
parenté à plaisanterie et la mort en tant que rupture va briser cette relation .Donc, la mise
en bière est un moment pour les ziva de montrer leurs dernières affections au défunt.
La famille prend ensuite le chemin de retourau village. Elle doit proceder à une
purification dans l’enceinte de la maison ou à la mer.
Nous allons voir à présent les funérailles royales qui font aussi partie des rites
funéraires sakalava.
Dans la société sakalava comme dans toute autre ethnie : le roi ne meurt jamais,
il est interdit de dire que le roi est décédé ou mort. Il faut dire tout simplement qu’il a
168
tourné le dos et son corps défunt n’est pas un cadavre, on l’appelle « ny masina » ou le
saint ; on n’enterre pas un saint, mais on le cache (asitrika ou afenina).
La mort d’un roi est un événement capital qui interrompt la liaison avec les
puissances symboliques. La dépouille royale est appelée « raha sarotro » (chose difficile
et dangereuse) dans les mêmes termes que les reliques royales,il faut donc inhumer le roi
avant de trouver son successeur si non cela constitue une menace sur les vivants.
Ensuite, on abat un troisième bœuf car sa peau sert à envelopper le corps. Une
pièce en or est enfouie dans la bouche du défunt, puis le corps est lavé enduit de miel et
enroulé dans une étoffe blanche151. Les jingoa152 se chargent de la récuperation des
sanies dans des cruches qui seront versées dans des lacs dits « matsabory faly » (lac
interdit).
150
Enceinte, palissade qui entourent les constructions funéraires et maisons reliquaires. C’est là
qu’on tue les bœufs pour les sacrifices lors du fanompoa be.
151
Decary R. (1962), Rites et coutumes funéraires, pp.254-256, C’est à ce moment là que l’on
prélève les reliques. Le miel correspond à la nourriture des groupes tompon-tany de chasseurs,
substance essentielle du monde de la nature.
152
Groupes de personnes, compagnons des rois et en même temps serviteurs, ils sont souvent
choisis pour servir de lit de mort des rois et autorisés à nettoyer les reliques lors du fanompoa be.
169
qu’une semaine actuellement. On ne cesse pas de brûler de l’encens jusqu’à
l’enterrement ; c’est pour faciliter le passage et l’entrée dans le monde du surnaturel :
pour transformer le défunt en ancêtre.
Le corps est porté par quatre hommes, qui prennent soin à ce que les pieds
soient toujours devant la tête tournée à l’Est vers les ancêtres. Avant de commencer il
faut verser un mélange de miel et d’eau à l’endroit où sera creusée la tombe.
A l’intérieur d’une construction entourée par deux clôtures en bois, propres aux
sanctuaires royaux, la profondeur de la tombe ne devrait pas dépasser un mètre cinquante
La dépouille mortelle est isolée de la terre par des pierres plates. A l’origine, ce sont les
jingoa qui étaient sacrifiés et placés sous le corps dans la fosse funéraire. La fosse est
comblée par des pierres blanches, mélangées à du sable.
« Ecoutez-nous, nous t’en prions, nous te léchons les pieds ! Nous devons te
laisser à présent, protège-nous, qui sommes ta famille, contre ceux qui ne nous aiment
pas, nos ennemis, nos adversaires. Tu les transformeras en sel qui fond dans l’eau et en
œuf qui se bat contre une pierre. Défends aussi le régime en place « fanjakana » qui a
bien voulu nous autoriser à effectuer cette cérémonie pour toi et toute la région Boeny
qui t’a rendu hommage ; que les habitants fassent de bonnes récoltes et réussissent dans
toutes leurs vies ! Reste ici où reposent tes ancêtres, car tu comptes parmi les divinités, à
partir de ce jour tu porteras le nom de Andrianahavitaniarivo ».153
Le nom du roi défunt ne sera plus prononcé après sa mort, il portera un nouveau
nom. Un mot qui désigne les actes et les gestes qu’il a accomplis juste avant que la mort
le surprenne, ou bien durant toute sa vie ; le suffixe -arivo signifie que son peuple est très
153
Auteur, terrain à Ambato Boeny en Mai 2007.
170
nombreux. Le Mpanjaka change de nom après leur mort pour leur accorder plus
d’honneur car leur mort les rend beaucoup plus sacrés154.
Les funérailles royales ont donc une fonction de resserrer et de renforcer les
liens sociaux. Après l’enterrement, on procède à une cérémonie de purification familiale
et un grand repas pour la famille royale et la population. Tout cela c’est pour la cohésion
sociale et la préservation du pouvoir royal.
On met une pièce d’or dans la bouche du roi et on la bande avec de la soie. Les
sambiarivo chauffent de l’eau, et les Maharitra et les Bahary157 se précipitent à liés les 2
gros orteils et les 2 pouces par de la soie importée. L’assistance se lamente, verse des
larmes et crient dans la cour à l’Ouest de la case dans laquelle est déposé le corps du roi,
pendant plus d’une heure.
Ensuite les membres de la famille royale montrent aussi leur douleur durant une
demi-heure après tout le monde se relève pour les consoler.
Les ministres (manantany et fahatelo) ainsi que les conseillers
(ranitriniampanjaka) envoient des messagers pour informer les divers villages du
154
Pour en savoir plus, cf. Decary R. (1962), Rites et coutumes funéraires à Madagascar, p.244.
155
Marovavy : servantes et hétaires du roi.
156
Sambiarivo : clan qui se charge de tous les travaux du doany ; ils gardent les tombeaux
royaux.
157
Autres clans qui se chargent de la toilette funèbre. Le corps est lavé avec du miel, un ongle
d’un doigt de la main droit et une mèche de cheveux sont coupés pour être conservés en tant
que reliques royales dans le Zomba vinda à l’intérieur du doany (temple royal).
171
royaume. Les messagers sont chargés d’annoncer la mauvaise nouvelle. Les Sambiarivo
et les Maharitra ainsi que quelques esclaves accomplissent la toilette funéraire.
Après le bain de purification, on enveloppe le masina (cadavre royal) dans le
sobahia (tissu de soie spécial que personne n’appartenant pas à la famille royale n’a pas
le droit de porter).
On choisit un zébu gras de couleur unique du troupeau royal, on l’abat et
enlève délicatement la peau qui va servir d’emballage pour le corps du roi défunt.
Ce dernier est enroulé dans ce corps de zébu et une ouverture est envisagée pour
laisser se répandre et le corps corrompu et la plus spécialement appelée (ronono) lait,
venus du cadavre royal. Cette dépouille mortuaire est allongée sur un lit d’argent (kibany
fanjava) et on place des couches (appelées balasy) en terre en dessous pour que les
liquides putrescibles ne se versent pas par terre.
Ceci dure plusieurs semaines et il faut renouveler la peau de la bête et la soie
enveloppant le défunt hebdomadairement. A chaque changement on jette l’ancienne peau
et la soie à la mer ou les enterre dans un lieu sacré (interdit). Les mêmes gestes se
produisent jusqu’à la dessiccation complètedu masina (cadavre).
Les chants, danses, les tambours (hazolahy) ainsi que les pleurs ne cessent
jamais que lorsqu’arrive le temps pour inhumer le corps du roi défunt.
Les femmes effectuent une danse sacrée réservée aux funérailles royales tandis
que les hommes s’amusent avec des chants érotiques et plus osés à l’égard des organes
sexuels.
A l’instar du trano raty (mauvaise maison) ou la chambre mortuaire dans les
funérailles populaires, le corps du roi folaka est déposé dans le zomba faly (maison
interdite). Ce dernier est construit dans la cour du doany appelé « tsandrarafa »158, il est
aussi provisoire et se présente sous deux grandes cases : dans l’une est placée la dépouille
royale et dans l’autre est fabriquée le cercueil nommé fiaravonotra (véhicule humide).
La fabrication est interrompue durant les jours tabous, en l’occurrence, le mardi,
le jeudi et le dimanche. Le fiaravonotra est aussi composé d’un couvercle (lahiny) à la
forme de toit de case avec des pigeons aigus décoré de sculpture en argent et en or.
158
Cf. plan du doany Miarinarivo d’Andriamisara Efadahy Manankasina dans l’annexe n°05.
172
Si les Jingoa ou Jingô sont destinés à porter le corps royal dans le doany et à
servir de lit de mort (lafika) parce ce qu’ils étaient les serviteurs les plus fidèles
autrefois, les Antakoala159 seuls ont le droit de descendre la dépouille mortuaire dans la
fausse alors que le manantany et le fahatelo160 sont appelésà ouvrir la porte de la tombe.
Les deux parties du cercueil sont attachées : le male avec une chaîne ou en
argent et la femelle avec de la soie, ainsi on passe au sacrifice d’un jingô pour asperger la
fosse avec son sang mais cette pratique n’est plus d’actualité. Huit Antakoala descendent
dans la fosse et 8 autres font passer les pierres et le varimalandy (sable fin).
159
Un autre groupe de clan sakalava.
160
Ministre et adjoint du roi.
161
Activité de creuser la fosse.
162
Partage de tissu blanc aux principaux chefs sakalava en guise de cadeau de la part du défunt
pour son souvenir ; les dons collectés lors du fanompoa be sont aussi appelés ainsi.
173
On descend l’auge, puis le couvercle, une fois pleine on dresse des pierres plates
en bordures. Chacun rentre chez soi après le bain collectif obligatoire et la purification.
Le roi Andrianirina Désiré Noël, le Mpanjaka be du Boeny, est celui qui est
resté au pouvoir pendant 36 ans.
Arrivé au trône en 1971, et plus précisément le 27 Août 1971 pour succéder à sa
défunte mère connue sous le nom du princesse VAHOAKA (littéralement peuple) et qui
revêt le nom post mortem d’Andriatsifoinarivo (celle que le peuple ne s’en passera
jamais).
Le Mpanjaka be Dezy était surtout célèbre par les diverses réhabilitations,
constructions et/ou innovations qu’il entreprenait tout le long de son règne et ce, dans
tout son territoire du Nord au Sud et d’Est en Ouest pour réactualiser et adapter aux
exigences du temps les infrastructures du doany163.
Il est en quelque sorte Louis XIV car entre sa mère et son fils actuellement il
était le 14ème roi de son royaume sakalava du Boeny. Ainsi toutes ses réalisations lui a
permis de porter le nom post mortem d’Andrianahavitanarivo (celui qui a beaucoup fait)
ou zaman’ady (oncle de disputes).Le Mpanjaka Dezy (1934-2007) est un mpanjaka mena
(souverain de lignée rouge) car ses parents sont tous de la grande famille royale (mère :
princesse et père : prince). Resté 36 ans au pouvoir, il a été décoré grand officier
malgache a son décès, le 19 mai 2007 à Ambato-Boeny.
163
Infrastructures relatives au doany (temple royale, sa demeure et son tombeau).
174
La conjointe du mpanjaka n’est plus appelée par son nom, immédiatement, après
le départ du mpanjaka, elle porte désormais le nom de « sava ». Mais le conjoint vivant
sera appelé « biby » dans le cas où c’est la conjointe qui a tourné le dos.
Dès lors un trano vorona(tranofaly) ou maison interdite est construite au coin
Sud-Est où est placé le destin Asorontany qui indique la mort et tout ce qui est en rapport
avec. Dans cette maison interdite est déposée la dépouille mortuaire dans l’angle Nord-
Est : Alahamady qui est associé au destin du souverain. Des cries, pleurs, lamentations,
chants et danses se mélangent et les travaux ne s’arrêtent pas sauf le mardi et le jeudi
ainsi que le dimanche.
164
Sable blanc très fin que l’on prend à la levée du soleil le jour indiqué.
165
On n’enterre pas le masina mais on le cache (manitrika Mpanjaka)
175
A la fermeture du zomba et mahabo, on sacrifie encore un zébu pour avoir la
bénédiction du roi, la santé et la paix. Durant les funérailles du Mpanjaka be Dezy, les
disputes entre les membres de la famille royale n’ont jamais cessé. Il n’est pas encore
enterré que tout le monde veut s’entretuer pour le succéder. D’où le choix du nom post
mortem du Mpanjaka « Zaman’ny ady » : oncle de disputes.
De son vivant, juste quelques temps avant son inclinaison, le Mpanjaka a
annoncé à son épouse le nom de son successeur qui n’est autre que l’un de ses fils
« HERIMISYDina Guy», et qu’il sera inhumé au Doany Mahatsinjoarivo à
Maromandalo auprès de son père et non pas au Doany Betsioko à côté de sa mère. Tout
ceci n’a fait qu’aggraver le conflit de pouvoir au sein du doany.
176
l’enterrement illustre parfaitement cette séparation car il sert à empêcher le retour du
mort dans la société des vivants. Le mort ne doit pas revenir parmi les vivants puisqu’il
peut être dangereux, incontrôlable.
Cela nous rappelle les deux des quatre concepts (le concept de membre, le
concept de réflexivité, le concept d’indexicalité et le concept de descriptibilité ou
accountability en anglais) qui jouent un rôle important dans l’ethnométhodologie
d’Harold Garfinkel166. Les rites funéraires mettent en valeur le concept d’indexicalité car
ils désignent l’isolation, l’exclusion du défunt dans le trano raty lors des funérailles et
favorisent et la marginalisation et l’exclusion du trépassé.
166
Pour en savoir plus voir GARFINKEL H. (1987), Les travaux de l’Ecole de Chicago, Edition
Coulon, Paris.
177
au moment des funérailles et il n’est pas temporaire donc peut durer 40 jours, 6 mois ou
une année (la durée seulement à partir delaquelleon peut organiser le retournement des
morts, le rasa harena etc.).Les rites funéraires par le biais de cette exclusion facilitent
l’ancestralisation c’est-à-dire l’intégration du mort dans la communauté des ancêtres
sacrés.
Certains Sakalava ne pratiquent pas les secondes funérailles donc pour eux tout
se passe lors des premières funérailles. La relation qui unit les vivants et les morts chez
les Sakalava est interdépendante puisque les premiers ont besoin de protection et de
bénédiction des ancêtres, et les derniers en retour assurent à ce que les vivants leur
donnent leur sacralité et leur pouvoir en les faisant passer aux trois étapes des rites
funéraires.
Les Sakalava classent les ancêtres par un ordre hiérarchique en suivant leurs
statuts : de morts anciens, de morts ritualisés et de morts récents.
178
Conclusion du chapitre
Les rites funéraires sont aussi considérés comme des cultes des ancêtres. Pour
les Sakalava, il est impossible de mener sa vie de façon solitaire et individuelle. Tenant
ce statut d’holiste, les Sakalava croient donc en la vie après la mort qui doit être
préparée non pas par le défunt lui-même mais par les membres de sa famille vivants
pour qu’il puisse accéder au rang des ancêtres.
Faute de pouvoir empêcher la mort qui est d’une puissance irrésistible, les
vivants ne peuvent que se contenter d’affirmer leur unité et pérennité en défiant ainsi la
mort par le biais des différents rituels funéraires.
Les enfants qui n’ont pas atteint l’âge de 6 mois n’auront pas droit aux
funérailles par contre une place leur sera réservée dans le tombeau familial. Les rites
funéraires donnent aux vivants la force et le courage de continuer le chemin malgré la
défaite face à la mort.
179
Conclusion de la partie
Pour conclure cette deuxième partie, on peut affirmer qu’il y a trois typologies
de hasina si on se referait aux fonctions et aussi à la sacralité.
Le sens du sacré existe dans toutes les régions de la Grande Île et souvent il est
source de motivation des Sakalava et des Malgaches en général à organiser et à
pratiquer les différents cultes identitaires. Ces derniers, malgré lesnombreuses variantes
ont les mêmes significations car c’est le moment de tisser le lien social entre les vivants
lors de leurs réunions pour la vénération des ancêtres.
En aucun cas, les cultes identitaires ne peuvent être ni un frein, ni une des
causes du sous-développement. Les rites funéraires sont des miroirs qui affichent les
consciences collective et individuelle de la population malagasy et en même temps un
moteur qui rend possible l’intégration du défunt au monde des morts.
180
La réincarnation est la migration de notre âme (nos sentiments, nos désirs
cachés), de nos vies successives antérieures, dans un autre corps humain juste avant
notre naissance. Notre vie actuelle est la résultante de nos vies antérieures .Donc, la
réincarnation donne un sens à toutes les inégalités présentes dans le monde : chaque
vie transforme un esprit , une âme , grâce à nos nouvelles expériences, notre chemin
,nos réalisations de vie , nos années personnelles , en fonction de nos existences
antérieures profondément ancrées dans notre subconscient.
La mort prête un corps vivant pour pouvoir accéder encore une fois au monde
visible qui n’est pas le sien puisque son monde à lui est spirituel et en tant qu’ancêtre, il
a le devoir de veiller sur les membres de sa famille. Pour ce faire, il a recours au rituel
de possession : tromba.
181
Photo n° 17
Photo n° 18
182
Photo n° 19
Photo n° 20
Source : Auteur, photo prise lors de notre descente sur terrain en ,2007 .
183
Photo n° 21
Photo n° 22
184
Photo n° 23
Photo n° 24
185
UNIVERSITE D’ANTANANARIVO
Faculté de Droit, d’Economie,
de Gestion, et de Sociologie
DEPARTEMENT SOCIOLOGIE
VOLUME II
Présentée par :Mlle ASSOUMACOU Elia Béatrice le 21 Septembre
2010 à 9 heures à l’Espace DEGS
Professeur Titulaire
Année universitaire : 2009 - 2010
Troisième partie : CHANGEMENT DES FONCTIONS DES RITES
FUNERAIRES SAKALAVA.
« La culture ne s’hérite pas elle se conquiert. Une culture ne meurt que de sa propre
faiblesse ».
186
Introduction de la partie
Dans cette dernière partie, nous nous proposons de donner les prospectives de
changement des fonctions des rites funéraires. Etant originaire de Mahajanga,
descendante d’une famille royale sakalava, et ayant des parents résidant dans le chef-
lieu de la région Boeny, notre choix de terrain a été fait sans hésitation. L’application de
la sociologie du « dedans» nous a été d’une grande aide, et a été un atout certain dans
la réalisation de notre recherche.
Dans nos convictions profondes, nous pensons qu’une bonne maîtrise et une
bonne connaissance de sa culture et de son histoire, que le fait de savoir les utiliser à
bon escient permettrait un développement de la personne même et de son pays.
Il est évident qu’il existe plusieurs points de divergeances entre les coutumes
funéraires et la mondialisation mais le but de cette partie c’est de repérer l’angle de
compatibilité entre les deux pour que la tradition et le respect du culte des ancêtres ne
constituent pas un obstacle pour le développement.
Cette partie est donc composée de trois chapitres : premièrement, les conflits
entre modernité et identité locale, deuxièmement, le statut de leadership populaire et de
l’essence royale, troisièmement, les jeux interactifs avec la mondialisation.
187
CHAP VII: CONFLITS ENTRE MODERNITE ET IDENTITE LOCALE
Introduction du chapitre
Avec la modernité chaque ethnie essaie de marquer leur différence par le biais
de l’identité locale pour échapper à l’uniformisation de la culture véhiculée par la
mondialisation .Madagascar et plus précisément la région Boeny ne constituent pas une
exception à ce phénomène. D’où, l’attachement des Sakalava aux rites funéraires.
167
GOFFMAN E. (1973), Mise en scène de la vie quotidienne, Edition de Minuit, Paris.
188
rites funéraires n’ont pas de justification utilitaire, mais une portée symbolique orientée
vers la communication avec les puissances surnaturelles : les ancêtres et leurs pouvoirs.
On peut donc affirmer que ce sont des rites d’interaction car ils sont considérés
comme des rites de la vie quotidienne dans l’analyse de GOFFMAN. Car d’après ce
dernier, la mise en scène de la vie quotidienne a une dimension fortement rituelle.
Les rites funéraires sont une propriété populaire et en même temps royale, donc
ce sont des rites collectifs. Il n’est seulement pas d’une valeur royale, c’est une valeur
qui fait corps de la valeur historique des deux entités en l’occurrence, le peuple et la
royauté.
Beaucoup d’auteurs ont déjà mené des études surles rites funéraires, mais c’était
sur sa dimension sociopolitique : le rapport de pouvoir et la domination dans les rapports
sociaux dominants –dominés. L’aspect culturel ou anthropologique est un peu mis de
côté alors que l’ensemble du vocabulaire de Lévi-Strauss est employé dans ces rites.
La transe est l’une des manifestations les plus prégnantes de l’issue heureuse
d’un tel cheminement personnel puisqu’il s’agit d’affirmer d’une part, sa capacité de se
délester de la pesanteur de sa corporéité et de sa matérialité (en s’appuyant sur tel objet
particulier), et d’autre part, d’assurer son incorporation avec l’invisible et sa
transcommunication avec le monde divino-ancestral.
189
Il s’agit plutôt d’un véritable travail de « construction de soi » dans un
mouvement ternaire qui va de la rupture (mort initiatique) à l’intégration (renaissance
initiatique) en passant par une période de marge (réclusion).
Mais quel que soit le degré d’élévation auquel est parvenu le « maître du
tromba » dans cette quête du savoir et du pouvoir, il ne doit jamais s’enfermer sur soi
mais il est plutôt appelé à éclairer les autres de sa luminosité divino-ancestrale.
L’essentiel c’est de faire de son mieux et de se mettre en route sur les voies de la
connaissance. La différence est au cœur du social. N’est-il pas vrai d’ailleurs, selon
l’adage populaire malgache que « les arbres d’une même forêt n’atteindront jamais les
mêmes hauteurs et qu’un arbre, quelle que soit sa taille, ne constituera jamais à lui tout
seul une forêt » ?
N’est-il pas vrai que « ce sont les branches les plus élevées qui bénéficient le
mieux des rayons du soleil et qu’il leur appartient en contre partie de s’exposer plus que
les autres aux caprices du vent » ?
190
vrai contour ainsi que les nuances éventuelles de leur couleur, nous permettant ainsi de
les distinguer puis de les situer les uns par rapport aux autres.
Dans une telle perspective, le renfermement (le conservatisme), c’est cette sorte
d’opacité de notre intelligence qu’il faut combattre de toutes nos forces, précisément,
parce qu’elle nous empêche de réaliser judicieusement notre humanité.
Dans la vision du monde des Sakalava, le cosmos est comme un grand tambour
sur lequel, entre l’intervalle qui va de la naissance à la mort, chacun est appelé
incessamment à tambouriner en s’efforçant d’être en phase avec le rythme divino-
cosmique.
Au cas où ces moyens offerts par l’éducation ne suffisent pas, d’autres adjuvants
sont là pour aider l’individu à retrouver intimement sa mélodie intérieure pour essayer
d’être de nouveau en vibration avec ce rythme divino-cosmique.
Ces règles remontent toutes via le domaine de Zanahary jusqu’à l’homme, etc.
La construction structuraliste réduirait le fady à une « simple fonction de régulation
sociale assurant rétroactivement et activement la permanence du groupe » et serait apte à
interpréter notamment la violence et l’absence des conflits au sein d’une société.
L’analyse des relations entre l’affection des vivants à l’égard des morts durant
le déroulement du rituel utilise les apports psychanalytiques qui nous permettent de
comprendre pourquoi ces rituels se répètent et pourquoi ils ne peuvent se résumer aux
funérailles.
191
Une analyse de la notion « d’ambivalence » du point de vue de la psychanalyse
permet certaines interrogations sur l’épisode relativement « violente » des rituels à
l’égard des désirs incestueux auxquels on doit renoncer. Cette interprétation via le conflit
de l’ambivalence tel que proposé par FREUD168 au sujet de la lutte éternelle entre l’eros
et l’instinct de destruction ou de mort, se conclut sur la conversion de sentiments
d’amour à l’égard desdéfunts, afin de maintenir l’ordre social.
168
FREUD S. (1921-1968), « Psycholgie collective et analyse du moi », Traduction de
l’Allemand par Dr JANKELEVITCH S., Paris, Editions Payot, pp.83-176.
192
funéraires consistent en une « identité culturelle », et en une liaison entre le monde
des vivants et celui des morts, pourquoi ces rituels se répéteraient ils dans le temps et ce,
pour des différénts défunts mais toujours à l’égard des mêmes ancêtres.
En réalité, le cacher dans toute structure sociale, c’est sa raison d’être, son
principe explicatif169.Il est très important de s’interroger aux hypothèses de Lévi-Strauss
sur les choix préférentiels et les dualistes en fonction du sang ou de la terre dans son
analyse du rapatriement des reliques et de choix d’être possédé : Les rites funéraires
assurent une fonction presque équivalente, complémentaire à celle que remplit le
mariage entre voisins pour les vivants ; ils sont créateurs rétrospectifs et posthumes de
parenté réelle, résolutifs de dualisme race / terre .170
Les rites funéraires sont des illustrations de la servilité de fait chez les
Sakalava. Si l’on se réfère à la pratique du tromba où la personne qui va être possédée
169
Cf.RIVIERE C. (1995), Introduction à l’Anthropologie, Hachette, Paris, p.47.
170
Cf. LEVI-STRAUSS C., (1967), Les structures élémentaires de la parenté, Paris, Mouton.
193
tombe malade. Ses proches iront voir un médecin. Si celui-ci ne peut rien faire pour le
guérir, ses proches consultent un voyant, plus précisément un « moasy » confirmant ainsi
qu’il s’agit vraiment d’un tromba qui veut venir.
Le prélude de la cérémonie est fort long. Le saha dirige les chants qui sont
systématiquement orientés vers la supplication ; les tambours résonnent avec violence et
le saha invoque, supplie, énumère les dons ; on implore l’esprit de venir à travers tous les
modes possibles de communication : longues prières, chants, danses exprimant le
désespoir et toutes formes de servilité.
Parfois des gens confessent des fautes (le plus souvent : transgression
d’interdits) qu’ils ont commises ; pour les effacer, ils rajoutent des dons en monnaies ;
parfois, il y a dénonciation d’un coupable qui est censé être la cause de la réticence de
l’esprit à apparaître : il est tout de suite chassé172.
Malgré toutes les réserves que l’on peut faire, l’explication du tromba semble
être dans la ligne du symbolisme constitué par la crainte de la puissance symbolique. Le
171
Peut être traduit par une séparation, écartement, éloignement mais aussi demande, requête,
prière et sollicitation. Dans cet ouvrage, on emploie le deuxième sens.
172
ALTHABE G. (1969), Oppression et Libération dans l’Imaginaire, Maspero, Paris, p.98-99.
194
tromba est donc un phénomène purement symbolique et c’est un simple instrument qui
permet au contraire de renforcer la cohésion sociale.
Le Tromba un phénomène social total, car il n’est pas réduit à un simple fait
culturel : il véhicule un système complexe de valeurs politique, sociale, économique et
religieuse. Bref, le Tromba représente la même forme et la même valeur que le
« potlatch » de Mauss M173.
173
MAUSS (M), Essaisur le don : forme et raison de l’échange dans les sociétésarchaïques, in
« Sociologie et Anthropologie », Paris, PUF,
174
Idem.
195
Toutes les bases et tous les éléments constitutifs du social surtout au point les
plus reculés du monde sont implacables et là, on doit avoir recours à la théorie marxiste
où tout devient marchandise : tout se vend, tout s’achète.
Bon nombre de Sakalava pensent que le tromba est un moyen pour demander la
bénédiction des ancêtres royaux et avoir leurs protections. La servilité symbolique chez
les Sakalava est donc considérée comme le contre don en échange de ces protections et
bénédictions.
Cela nous rappelle dans une certaine mesure les caractéristiques du potlatch175 et
ses trois obligations : donner, recevoir et rendre. La servilité symbolique reçue est
rendue. Dans le tromba, les notions d’honneur, de prestige ainsi que de respect des morts
et des ancêtres royaux sont toujours présentes.
Malgré tout cela, la servilité n’atteint pas le niveau complet du potlatch, elle
représente des prestations totales de type agnostique, pour reprendre la terminologie de
Mauss. Mais les ancêtres royaux et les Sakalava n’arrivent pas à tout donner, jusqu’à leur
vie, pour rivaliser contre l’autre comme dans le potlatch.
Donc, c’est par le don et le contre don que l’on entretient une alliance et une
communication. Dans la pratique rituelle comme le tromba, les dons réciproques sont
destinés non à amasser des avantages socioreligieux ou à retirer des privilèges
psychologiques pour les esprits et les Sakalava, mais à entretenir des relations d’alliance.
175
Analysé par MAUSS M. in Essai sur le Don, Editions PUF, p.145-249.
196
La demande de bénédiction aux ancêtres est la principale philosophie sur
laquelle repose le tromba, car on pense que l’ancêtre va devenir un dieu176 auprès duquel
on va pouvoir demander de l’aide.
Pour commencer nous allons essayer de donner une vision globale sur l’éducation.Dans
le passé, l’éducation était essentiellement perçue comme un processus d’apprentissage de
la dynamique de la vie et d’acquisition de la compétence professionnelle précédant
l’entrée sur le marché du travail. Ainsi, le concept de l’éducation se rapporte
habituellement au processus par lequel les connaissances, les compétences et les valeurs
sont transmises d’une génération à l’autre.
Selon DURKHEIM, l’éducation est l’action exercée par les générations adultes sur celles
qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de
développer chez l’enfant un certain nombre d’états physiques, intellectuels et moraux
que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel
il est particulièrement destiné.
Il affirme que l’éducation est un fait social ; « chaque société, considérée à un moment
déterminé de son développement, a un système d’éducation qui s’impose aux individus
avec une force généralement irrésistible ».177
Pris dans son sens le plus général, selon FERREOL178, le terme « éducation » recouvre
toute activité sociale visant à transmettre à des individus l’héritage collectif de la société
où ils s’insèrent. Son champ de compréhension inclut alors tout autant la socialisation du
176
Les ancêtres morts sont entrés dans la sphère de Dieu, et font partie de la famille divine,
comme ils peuvent aussi être appelés dieu.
177
BEITONE, A. al. , (2002), Aide mémoire en sciences sociales, Paris, Editions Sirey, pp.211-
215.
178
FERREOL, G. (2002), Dictionnaire de sociologie, Paris,Armand Colin ,pp.53 - 54.
197
jeune enfant par sa famille, la formation reçue dans des institutions ayant une visée
éducative explicite (écoles, mouvements de jeunesse) ou dans le cadre de groupement
divers (associations sportives, culturelles, groupes politiques), l’influence du groupe des
pairs, des masse médias, etc. A la limite, le champ de l’éducation est tellement vaste
qu’aucune action visant une quelconque transmission de la culture et des valeurs d’une
société ne peut en être exclue.
Ensuite l’éducation a été dispensée par les Missionnaires LMS (London Missionnary
Society).Ils ont appris aux enfants à lire, écrire, compter, et évangéliser. La première
école a été ouverte à Tamatave et plus précisément à Manangareza le 08 septembre
1818.Celle d’Antananarivo en 1820 à BesakanaanatyRova de Manjakamiadana. Le roi
Radama I a appris le français et l’anglais respectivement avec les sergents Robin et
Hastie.179
179
Source : Archives de la CISCO (Circonscription Scolaire) Mahajanga I
198
Selon la définition de la Banque Mondiale, le système éducatif est une structure,
un mode de fonctionnement et de service assurant la formation et le développement
intellectuel d’un être humain. Dans ce chapitre, nous allons voir un aperçu historique du
système éducatif malgache puis ses typologies et enfin les enseignants. A Madagascar,
les lacunes de l’enseignement public ont été combinées par l’enseignement privé, qui a
quelque fois supplanté le premier.
Ainsi, c’est par différentes vagues et selon des modalités différentes, nous le
verrons, que ces deux systèmes ont vu le jour dans le pays.Avec les graves crises
politiques, Madagascar a fait l’objet d’un changement de régime au profit d’une
Révolution Nationale Démocratique qui a imposé sans le vouloir la malgachisation du
système éducatif.Ce dernier visait à malgachiser le contexteà partir des réalités locales
a pourtant tourné en malgachisationà outrance avec rejet .
180
Plan de réforme (MAP éducation) primaire en sept années.
199
A titre d’exemple, la loi 94-033 du 13/03/95 en son article 2 stipule que
« l’Education et la formation à Madagascar visent à favoriser l’épanouissement
physique, intellectuel, moral et artistique de la personnalité de l’individu, de la pleine
puissance de la liberté ».
Mais la question qui doit être posée est que : « Quels sont ou quelles ont été les
mesures prises ou les moyens mis en place pour un « suivi-évaluation » de l’atteinte de
ces objectifs ? Personne ne pourra répondre à cette question car ces lois n’ont pas changé
à cause de leur inefficacité mais à chaque avènement d’un nouveau régime (en 1978,
1994-95, 2004, 2008-2009).
Il en est de même pour les programmes scolaires, les curricula. Les décisions
n’ont jamais été pédagogiques, prises par des techniciens mais plutôt idéologiques,
dictées par des politiciens.
Ceci nous amène à nous interroger sur la manière dont cette réforme a été
décidée. Y- à t il eu une consultation au niveau de la population, des enseignants ? Mais
si, c’est seulement le ministère, les circonscriptions qui ont décidé, la décision serait
181
La fin de l’année 2008 et le début l’année 2009.
200
minoritaire et nous savons tous quel serait l’impact d’une telle décision. C’est la raison
pour laquelle des spots télévisées, des publicités à la radio sont très fréquents pour
essayer de récupérer, d’impliquer et les enseignants et les parents.
Nous parlons ici des cas de 90% de nos enseignants connus sous le nom
d’instituteurs FRAM ou ENF (enseignant non fonctionnaire) qui sont actuellement au
nombre de 38.000 (environ) soit la moitié des fonctionnaires du MEN. Ces enseignants
n’ont jamais reçu de formation initiale et sont laissés à la merci de tous dans des villages
les plus reculés de brousse.
Avec une telle situation, notre chance de réussir semble être minime et ne laisse
pas prétendre grand chose.
Pourtant, jusqu’en 1972, une bonne partie (plus de la moitié) des élèves
fréquentant les lycées dont il n’en existait qu’un seul par province à l’exception de celle
de Tananarive qui en possédait six (06), étaient des enfants de coopérants ou de
commerçants français fortunés, et la plupart des enseignants étaient des Français183.
- gratuité des écoles primaires publiques dans tous les fokontany, implantation
des collèges d’enseignement général à chaque chef lieu des Communes, un
182
NC 15.418 : Français langue d’enseignement.
183
RANDRIAMASITIANA, G.D. (2002) : « Forces et Faiblesses du Système Educatif Malgache
durant la Première Décennie de l’Indépendance ». In Revue Historique des Mascareignes, N°4,
2002. Les années soixante dans le Sud-ouest de l’Océan Indien : La Réunion, Madagascar,
Maurice, Mayotte, Sainte Clotilde, AHIOL, p.43-66
201
lycée par District et un Centre Universitaire Régional (CUR) pour chaque chef
lieu des provinces;
- définition d’un plan d’études de base pour l’enseignement primaire ;
- formation des enseignants malgaches en malgache ;
- mise en place d’un service national pour le recrutement des enseignants.
Ces idées ont été inspirées des régimes chinois, nord-coréen et soviétique,
visaient à former des citoyens révolutionnaires aptes à combattre l’impérialisme français
car le gouvernement a voulu résister contre toute forme de colonisation que ce soit
économique, politique ouculturelle.
184
KOERNER, F (1999), Histoire de l’Enseignement privé et officiel à Madagascar (1820 –1995),
L’Harmattan, Paris.Elle prévoit la décentralisation, la démocratisation et la
malgachisation de l’enseignement.
185
Cf.RAJAOSON, F., (1985), L’enseignement supérieur et le devenir de la société
202
Le statut du français était presque inconnu par suite de l’autorisation du
bilinguisme.La malgachisation prenait place ; les résultats étaient non satisfaisants pour
des raisons d’ordre socio-politico-pédagogique et matériel. Par manque d’encadrement,
aucune instruction méthodologique concernant les manuels à utiliser ne fut donnée. D’où
la dévalorisation des cadres locaux qui sont considérés comme des gens peu formés et
incompétents.
D’après ces analyses, nous avons pu constater par-ci et par-là divers obstacles
d’ordre sociologique, économique, matériel et méthodologique en ce qui concerne le
système éducatif malgache. Tout ceci constitue pour nous, sociologue et formateur et
futur responsable du système éducatif, un problème à résoudre ; et ce problème mérite
d’être étudié au sérieux. On dit souvent qu’un homme averti en vaut deux, nous le
sommes à l’heure actuelle.
Encore une fois, il est bon de rappeler que l’éducation occupe une place très
importante dans ce monde moderne où nous vivons et constitue un tremplin pour le
développement. Non seulement parce qu’elle permet un développement humain, social
203
et économique (en terme de résultats), mais aussi et surtout, elle constitue la base de
l’identité et l’avenir de chaque individu.
En tant que sociologue, nous dirons que si la majorité des écoles, des
enseignants des parents et pourquoi pas des apprenants n’épouse pas cette idée, la
décision, la reforme de l’état et / ou du ministère risquerait de tomber dans l’eau. Ce
système en général et la reforme en particulier ne pourraient pas être le moteur du
développement mais resteraient plutôt une remorque à trainer.
Nous craignons fort que cette reforme ne devienne pas comme l’APC (approche
par les compétences) qui tend déjà à être reléguée au rang des archives et remplacée par
l’APS (approche par les situations) parce qu’elle n’a pas été mûrement réfléchie.
L’application de cette reforme a été freinée par la crise politique qu’a connu le
pays et le changement de régime et plus précisément l’actuel Ministère de l’Education
Nationale a annulé le prolongement du primaire et des questions se posent car la loi a
été remplacée par une ordonnance ; ce qui est sûr c’est que personne n’est plus en mesure
de savoir ce qui se passe dans le pays en ce qui concerne l’orientation du système
éducatif .
204
survie des membres de leur famille .Ainsi, l’éducation est placée au second plan. Ceci
nous amène à voir la mise en application des programmes en vigueur depuis 1995.
Conçu pour lutter contre toute sorte de décrochage scolaire186, l’EPT (Education
Pour Tous) ne pourra pas, d’un seul coup, devenir une stratégie de valorisation éducative.
186
Le fait de ne pas réussir à l’école. Ou bien l’élève abandonne en cours de route sans atteindre
la fin de l’année scolaire (en pleine année scolaire) ou bien il arrive à terme de l’année scolaire
sans obtenir aucun diplôme et il finira par quitter l’école ou cesse d’y aller. Probablement, il va
redevenir « analphabète ».
205
ainsi que l’identité commune . Le travail divisé selon la règle ancestrale (tâches
spécifiques pour chaque groupe) authentifie l’origine et l’histoire des Sakalava.
La division sociale du travail dans les rites funéraires permet d’organiser la
société après le désordre causé par la mort et rappellle déjà la compléxité de l’univers
traditionel et l’intégration des Sakalavaau monde moderne. La vie dans la société
sakalava tourne autour de la préparation de la mort, comme on le dit : « pour mieux
vivre, il faut préparer la mort ».
La division du travail générée par la société industrielle a affecté les liens
communautaires et de la « solidarité mécanique », on est donc passé à la solidarité
organique selon E. DURKHEIM187 dans la division de travail social, la solidarité a cédé
la place à la singularité de l’individu ; ceci a creusé l’écart entre éducation et tradition.
Les relations sociales traditionnelles basées sur le « fihavanana » ont cédé la
place à une politique d’assimilation aux valeurs européennes louant les mérites de la
civilisation scientifique, de l’individualisation.
Dès lors, les pratiques traditionnelles se sont soumises par la force au
modernisme. Depuis, la conscience collective s’est beaucoup amenuiséeet actuellement
un aphorisme cynique tend à s’installer : « Samy mandeha, samy mitady » : chacun pour
soi.
187 ème
DURKHEIM E. (1967), La division du travail social, 8 Ed. , PUF, Paris.
206
Le postmodernisme désigne une idéologie qui rompt avec les idéaux de la
modernité et qui prend des formes très diverses, il y a un postmodernisme passéiste qui
veut un retour en arrière, qui adopte un esprit critique, négatif, ne débouchant sur aucun
projet d’avenir mais se refugie dans un passé obsolète et atrophique, ainsi qu’un
postmodernisme dynamique, constructif qui a tant proposé des solutions prospectives.
207
demeure l’hiver australe, de juin à septembre. En août surtout, plusieurs famadihana se
déroulent dans les Hautes-Terres, entre Antsirabe et Fianarantsoa, sans oublier le
fanompoa be sakalava qui est une manifestation culturelle accompagnée de festivités
artistiques. Il est célébré annuellement.
Ces deux cérémonies permettent aux Sakalava dans la région Boeny et
auxVakinankaratra de tenir, garder, conserver et préserver leur culture, leur histoire, et
leur identité.
Le développement du tourisme (culturel, d’investigation, etc.) dans la région Boeny
s’appuie largement sur les particularités propres à leurs natifs. Dans lesdifférentes
sociétés, on retrouve pour la circulation des biens les limites que celles de l’endogamie,
la sphère dans laquelle on échange dons et repas pour entretenir l’amitié (et où l’on se
marie) celle qui est extérieure à l’endogamie, avec laquelle on n’échange pas, mais avec
laquelle on se bat.
Chacun prend part à des tâches sans attendre l’autre dans un but de réussir
ensemble et de renforcer la solidarité sociale car c’est le progrès de la division du travail
qui permet de transformer la nature du lien social et qui rend possible le passage d’une
forme de solidarité à l’autre.
Dans cette solidarité, tout changement dans une partie se traduit par un
changement dans les autres. Il peut donc y avoir un développement national si l’on se
réfère au fanompoa be.
208
Chaque année, la célébration du fanompoa be est pratiquée non seulement par
les Sakalava mais assistée aussi par les autres tribus royales malgaches. Durant cette
cérémonie, des familles et des familles sont invitées, des chercheurs étrangers y
viennent également.
En tant que culture, le fanompoa be qui est une réunion des temples de Tromba
favorise le développement de l’écotourisme à Mahajanga; le va et vient des étrangers lors
de cet événement en est la preuve concrète.
Pour les saha du tromba, l’entrée des cultures occidentales à Madagascar est la
cause du désordre de la communauté, et perturbe l’harmonisation de la société. Ils ont
ajouté que ces nouvelles cultures leur ont incité à aimer encore plus l’argent, leur a
poussé à devenir égoïstes et le pire c’est le fait qu’elles n’ont pas pu maintenir
l’importance du « Fihavanana » à Madagascar.
Les temples du Tromba que nous avons enquêtés ont affirmé qu’ils reposent sur
le même et unique Dieu, celui des chrétiens, En d’autres termes, leur Dieu n’est pas
différent du Dieu créateur. Seulement pour eux, le Dieu a donné le pouvoir de la nature
qui a recours aux feuilles, aux plants et aux arbres. Ces temples ont aussi affirmé que
c’est le même « Zanahary » qui a divisé en deux la voie qui mène vers lui.
209
- et d’autre part, la voie du christ (le cas du christianisme).
Ceux qui ont choisi la voie du christ vont à l’église tandis que ceux qui ont
choisi l’autre voie vont avoir recours au rite tromba. Ces temples du Tromba ont aussi
ajouté que nous les Malgaches, nous devons vénérer nos ancêtres et non celui des autres.
« Les Vazaha ou les garamaso » c’est ainsi qu’ils appellent les étrangers, bien
que ces derniers ont leurs ancêtres qu’ils respectent (Jésus christ), ils n’ont pas le droit de
préjuger notre religion, car nous, on ne dit jamais du mal sur leur religion. Tout le monde
s’adresse au même Dieu, mais c’est seulement l’intermédiaire qui diffère.
En effet, la majorité des temples du Tromba n’ont pas le droit d’aller à l’église,
parce que pour eux, cela signifie laisser ses ancêtres pour aller glorifier l’ancêtre des
autres. Les temples de l’esprit Jao, de l’esprit Kotomola et de l’esprit Ravoay qui, selon
l’histoire, ont préféré se suicider en se jetant dans la mer entre Antsohihy et Analalava
(vavan’ny Laloza)188, plutôt que de se soumettre à la domination Merina et au
christianisme. Ils n’accepteraient jamais que leurs temples aillent à l’église, pour eux,
aller à l’église est une forme de trahison et de sousmission étrangère.
Par ailleurs, quelques uns des temples de Tromba n’ont pas de problème avec le
christianisme. En d’autres termes, ils vont à l’église tout en étant temples du Tromba. Ces
derniers ont affirmé qu’il n’existe pas de différence entre le Dieu que les Tromba
glorifient et le Dieu des chrétiens.
« C’est le même Dieu qui se trouve là haut, donc il n’y a pas de mal à prier les
deux », ils pensent même que c’est plus bénéfique. Les temples de l’esprit
Tsimandefitrarivo (qui était une métisse Merina par exemple) ont affirmé qu’aller à
l’église ne veut point dire trahir sa tradition.
210
symboliques, tant s'en faut. Al'évidence, ce ne sont pas des querelles de succession à la
tête d'une monarchie dont le siège est bien hypothétique qui peuvent expliquer la
multiplication des cérémonies royales et le très grand succès d'audience qu'elles ont su
rencontrer.
En général, les Malgaches sont affiliés à une terre mère, celle de leurs ancêtres,
identifiée par leurs tombeaux et sur laquelle leurs droits sont légitimes et
imprescriptibles. Comme ils ne peuvent passe référer à une terre ancestrale réelle ou
mythique, ces gens deviennent dépendants, symboliquement : esclave du tanin-drazana
(terre mère).
Le fait d'être ou de ne pas être d’un clan noble ou roturier, de tel outel lignage,
né dans la région ou venu d'ailleurs, de religion chrétienne ou rendant culte aux ancêtres
royaux etc., sont autant de signes, de déterminants ou de stratégies qui vont définir la
Place de chacun, ce qui n'est pas nouveau, mais dans une compétition foncière qui tend à
s'exacerber, avec les difficultés économiques de pays, liées à une pression
démographique (notamment migratoire) également croissante.
211
Et comme y participent nombre d'immigrés venus d'autres parties de l'Ile, on
comprend d'autant mieux que les malgaches affirment que l'accès aux biens fonciers
passe toujours par l'intermédiaire des ancêtres. D'autant plus que, entre ces deux
logiques opposées, la balance de la Loi, finalement, est plutôt en faveur de l'un.
Expulser les démons, c'est expulser le sacré traditionnel, c'est expulser les
médiateurs obligés entre le sacré et la terre en expulsant les référents qui fondent leur
prétention.
Sans même considérer le cas des lignées royales dont la généalogie s’étire sur
plusieurs centaines d’années (on ne remonte guère au-delà du XVIe siècle), ni celui des
lignages côtiers qui se réfèrent à un ancêtre mythique fondateur, l’individu est
socialement inexistant en-dehors de la référence à un ancêtre connu et effectivement
enterré dans le tombeau collectif, dont l’écart généalogique avec les aînés vivants ne
dépasse guère, dans les pratiques, cinq ou six générations.
212
C’est par rapport à lui que chaque catégorie identitaire de base accède à un
groupe de descendance plus large, autrefois précisément territorialisé, que l’on pourrait
appeler un clan.
La langue oppose ainsi les vivants visibles (olona hita maso en malgache
officiel) et les vivants invisibles (olona tsy hita maso). Tout individu est comptable en
permanence devant ces derniers du maintien d’un ordre cosmique normatif (lahatra) dont
ils sont les gardiens.
Pour limiter les risques d’erreur (en particulier dans le respect des préséances
dont la vie sociale est émaillée), la tradition recommande de n’entretenir de relations
suivies qu’avec la parentèle ou au moins avec ses voisins les plus proches, qui, en tout
état de cause, partagent une communauté de résidence et sont également associés de plus
aux rituels du cycle de vie et à ceux, annuels, des prémisses du riz .Ce sont des mpiara-
monina : ceux qui résident ensemble en malgache officiel. Mangeant le même riz, ils
partagent le même fluide vital (aina) dont les ancêtres sont la source.
213
Cette construction symbolique traditionnelle a connu un destin inégal :
maintenue avec un affaiblissement de sens dans beaucoup de sociétés périphériques, elle
se réduit sur les hautes terres à un certain nombre de formes culturelles héritées,
déconnectées de l’idéologie monarchique qui fournissait la plénitude de leur sens.
Dans tout le pays, la fête de l’indépendance est ainsi une échéance majeure du
calendrier familial de l’année : achats de vêtements pour les enfants, jeux organisés par
les mouvements de jeunesse des paroisses, visites familiales des cadets aux aînés, des
jeunes couples à leurs ascendants immédiats ou aux anciens (ray aman-dreny).
Conclusion du chapitre
Comme un destin contre lequel on ne peut rien et auquel il faut se plier. En fait,
ce sont les dirigeants de la cérémonie funèbre qui se sont pliés à la mort et ils nous
présentent le phénomène comme incontournable dans son intégralité.
214
CHAP.VIII: STATUT DE LEADERSHIP POPULAIRE ET DE L’ESSENCE
ROYALE
Introduction du chapitre
D’autre part, la famille royale se sent obligée et elle n’a pas le choix sur la
question de la cohabitation ou de lanon cohabitation. Elle est plongée dans l’obligation
car le développement de l’économie de marché a favorisé ce nivellement de richesses et
il est devenu difficile de contrôler le pouvoir royal.
Les gens ne respectent plus leur tradition et le plus souvent, ils ne savent même
pas ce que sont leurs cultures. Ils sont influencés par les religions modernes et la religion
215
traditionnelle est mise de côté. Personne ne s’intéresse plus vraiment à la pratique
traditionnelle.
Selon les uns, Mahajanga vient du swahili : Moudji wa Angaïa qui signifie « la
cité ou la ville des fleurs ». Selon les autres, ce nom fut attribué à ce grand port de
l’ouest par le roi Andriamandisoarivo, fondateur du royaume de Boeny au XVIIIè siècle
qui guérissant de quelque maladie mystérieuse, la baptisa MAHAJANGA c’est à dire « la
ville de la guérison ».
Cette énorme cité habitée par une population cosmopolite à vocation maritime
mérite les trois interprétations. Dans cette ville toutes les ethnies de Madagascar sont
présentes mais il y a en plus des étrangers vahiny et zanatany189. La majorité des
Zanatany sont les Indo pakistanais ou les karana et les comoriens ou Ratalata (l’avion
n’arrive que le mardi).
189
Zanatany vient du mot Zanaka qui veut dire fils ou enfant et du mot tany qui veut dire terre ;
zanatany désigne donc les étrangers qui ont déjà cons truit leurs tombes à Mahajanga.
Egalement, ce mot veut signifier autochtone.
216
Dans cette cohabitation on peut reconnaître les gens à partir de leurs
comportements et de leur culture. Les Sakalava par exemple sont des individus
xénophobes, en étant descendants des rois, ils se considèrent supérieurs par rapport aux
autres habitants.
Par contre les Tsimihety sont des gens n’éprouvant pas de problème de vivre en
société avec les étrangers. Ils aiment se sentir libre et ont une facilité d’adaptation aux
autres communautés. Le mot « fihavanana » est très important à leurs yeux, la preuve en
est que, assumer l’hospitalité d’un ami constitue un grand plaisir pour eux.
A part cela ; on reconnaît aussi les gens à partir de leurs activités. Les activités
principales des Sakalava à Majunga sont : la pêche en mer, l’élevage extensif de bovins
et l’agriculture. Les raisons qui amènent les Tsimihety à Manjunga sont le travail et les
études ; d’où l’abondance des fonctionnaires et des étudiants Tsimihety à
MAHAJANGA.
Ils travaillent aussi souvent comme gardien auprès des Karana et comme tireur
de pousse-pousse. Comme les Tsimihety, la raison qui pousse les Comoriens à
217
MAHAJANGA est l’étude. Quand aux Indo-pakistanais ou Karana c’est le commerce
qui les retient.190
Il est à noter que dans cette cohabitaion, il existe quand même une hiérarchie à
respecter en ce qui concerne l’organisation du pouvoir dans le cadre de la royauté
sakalava symbolisée par l’existence du Mpanjaka.
Une fois le conseil entendu et quelle que soit l’opinion émise par ses membres,
si le roi persiste dans sa volonté, ses ordres sont immédiatement exécutoires. C’est le
droit de véto. Sur le plan de la stratification, il est possible de répartir en cinq niveaux les
classes sociales.
- Ampanjaka Be : Le souverain.
190
DE FOY (G.P), Madagascar aujourd’hui, Éd. Jaguar, 2004
218
- Andevo : le terme andevo est par contre connu mais n’est utilisé que de manière
péjorative. Les descendants des anciens andevo sont actuellement confondus avec les
groupements de roturiers.
Ils sont assimilés à des esclaves (andevo) par certains dignitaires roturiers. Ils
occupent, en fait, une place institutionnelle très particulière, selon qu’ils soient chargés
de la garde des tombeaux royaux, Mahabo, et d’un grand nombre de prestations
funéraires (fanompoanamafana), ou qu’ils servent de serviteurs et de gardiens.
Voici quelques témoignages, des points de vue qui affichent des positions des gens
concerant cette cohabitation avec la modernité.
- Une personne de notre échantillon : « La cohabitation est une astreinte, une contrainte
indirecte pour la famille royale, il faut donc lui donner une place spécifique dans la
société pour qu’elle puisse pérenniser son pouvoir ».
- Une autorité politique : « La cohabitation doit se passer très bien et sans aucune
difficulté. La famille royale doit s’adapter à la modernité et elle continuera à pratiquer
les traditionnels sans aucun souci. On pourra médiatiser la tradition et faire un
marketing sur lui afin de contribuer à l’économie touristique du pays et d’attirer des
visiteurs».
219
-Auteur : « Les rites funéraires ont le but de rappeler l’origine, le statut social et /ou
rang social du défunt. A l’heure actuelle de la mondialisation, le secteur tertiaire prend
une place décisive au sein de la population active.
Et on a insisté sur la récupération des classes moyennes pour assurer les services
marchands (commerce, transport, télécommunication, tourisme, services aux entreprises
et aux ménages) ou non marchands (santé publique). On assiste donc à une
« tertiairisation191 » du secteursecondaire pour éliminer le système de classe aggravé
par l’économie de marché.
Les rites funéraires ont une seule finalité qui est de préparer le défunt à
occuper une place dans la société des morts et pour participer moralement à établir
l’ordre dans la société des vivants.
191
Tertiarisation : phénomène qui correspond à l’augmentation du poids du secteur tertiaire au
sein de la population active.
192
BOURDIEU P. et PASSERON J.C. (1964), Les héritiers : les étudiants et la culture, Les
Editions de Minuit, Paris, p.106-109.
220
Il faut donc recycler et renover ces rites funréraires pour qu’ils deviennent
emblématiques d’une culture nationale afin de respecter et de s’engager dans le
nouveau système de l’économie libérale. II est ici question de renforcer les capacités
culturelles du pays pour pouvoir cohabiter avec la modernité».
Elle est remarquable par son irrésistible extension à l'ensemble des activités
humaines et à la totalité de la surface de la terre, même si, ici ou là, sa pénétration est
inégale.
193
Dictionnaire de la mondialisation », sous la direction de Pascal Lorot, Edition Ellipse
221
Au sens anthropologique, « Tout individu né dans une société, participe à une
culture. Si les besoins sont innés et universels, la façon de les satisfaire varie : façon de
se nourrir, de dormir, etc. ». Une culture est la configuration des comportements appris et
de leurs résultats dont les éléments qui la composent sont partagés et transmis par les
membres d'une société donnée » .La culture n'est donc pas un ensemble de connaissances
intellectuelles, mais l'ensemble des valeurs, des façons de vivre et de penser de tous les
membres d'une société.
Selon l'UNESCO, «La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme
l'ensemble des traits distinctifs, spirituels, matériels, intellectuels et affectifs, qui
caractérisent une société ou un groupe social.
Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de
l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances». Conférence mondiale
sur les politiques culturelles (Mondiacult) en 1982 à Mexico.
Nous y incluons également la langue, la religion etc.
D'une manière générale, la culture est une manière d'être relativement stable dans un
espace donné, pour une période donnée. Elle organise les comportements particuliers
(notamment les habitudes de consommation), à travers des procédures techniques, des
normes, des rites, des valeurs.La culture façonne notre vision sur le monde et peut
devenir une manière de vivre ensemble en partageant dans la paix et la solidarité.
222
rompre avec les formes occultes de la pensée unique qui tend à situer les défis de la
croissance démographique en dehors du système monde où la société malgache est
désormais confrontée aux contraintes de la globalisation.
Pour une analyse approfondie des crises, nous avons tenté d’ouvrir la recherche
sur l’impact des transformations qui s’opèrent lorsque les Malgaches doivent passer à
une «modernité » économique mettant en cause le modèle de croissance et de
développement lié à l’avènement de l’État post-colonial. L’épuisement de ce modèle a
obligé le pays écrasé par le fardeau de la dette à se soumettre à un ajustement qui
s’apparente à une colonisation rampante et engendre l’appauvrissement et l’enlissement.
223
que nos conceptions d'appartenance territoriale et sociale. Par exemple, il est significatif
d'entendre parler de promoteurs du développement local en misant sur le sentiment
d'appartenance des malgaches sans que l'on sache véritablement quelles en sont la
signification théorique et la portée empirique.
C'est dans ce contexte que nous nous sommes intéressés à mieux cerner
l'expression apparemment banale et devenue «clichée» du «sentiment d'appartenance», à
mieux comprendre les processus de construction identitaire pour se rendre compte des
solidarités de base nécessaires au développement local ou régional, et en particulier
l'apport des lieux.
Nous voulons mieux explorer les liens qui se nouent entre les individus et
l'espace qu'ils habitent. Pour certains, engagés dans des mobilisations territoriales ou
pour d'autres confrontés à des mobilités géographiques, les relations sociospatiales sont
révélatrices du «sentiment d'appartenance» manifesté et déclaré.
Nous verrons que c'est sur cette base que pour certains s'articulent des
engagements mobilisateurs pour le développement local ou régional alors que pour
d'autres, le lien à l'espace peut devenir un obstacle majeur à la réinsertion sociale et à
l'implication communautaire.
Le lien à l'espace devient contraignant alors que l'exclusion sociale est doublée
de l'exclusion territoriale. Appartenance et exclusion sont ici antinomiques.
224
Dans un premier cas, celui du « village », bien que l'appartenance soit dite
territoriale, nous verrons qu'elle demeure fragile au regard des intérêts en jeu. Dans
l'autre cas, celui de l'organisme communautaire, l'appartenance territoriale peut apparaître
comme étant un handicap à l'insertion sociale.
225
Dans ce sens, la mondialisation aggrave la précarité de l'emploi dans le domaine
culturel. Telle est la limite de la binarité dominante de l'approche culture ; y adjoindre un
deuxième pôle essentiel de nature socio- économique est-il envisageable ?
Les civilisations, elles, sont des viviers où les peuples puisent leurs valeurs,
leurs goûts, leurs langues, leurs modes de vie et d'habitat, autant d'éléments
caractéristiques que la mondialisation permet de transmettre à d'autres civilisations pour
qu'ils soient connus par l'autre, sinon adoptés par lui.
226
du « saha » qui n’est autre que le possédé. Une partie de la communauté sakalava
pratique deux religions différentes : l'islam sunnite et le catholicisme, qui malgré leur
différence arrivent à vivre en harmonie.
Dans la philosophie sakalava, la mort est perçue comme une étape nécessaire
qui va permettre au défunt de quitter le monde visible de la matière pour accéder au
monde invisible de l’esprit. Il est donc important que l’âme d’un trépassé puisse
rejoindre, dans de bonnes conditions, le monde des ancêtres et acquérir son statut de
protecteur et de masina, le seul qui lui permet d’agir efficacement pour sa descendance.
Néanmoins, le défunt ne peut être qualifié d’ancêtre que s’il a été correctement
« installé » dans l’au-delà par une longue série de pratiques obituaires. L’entretien
mortuaire, l’enterrement, le deuil et le culte offerts par les vivants sont autant de rituels
nécessaires pour marquer la purification de l’âme du défunt, pour faciliter son accession
définitive au statut d’ancêtre et rétablir l’ordre social qui a été perturbé par la mort.
227
Le corps nettoyé et habillé est ensuite exposé aux proches et aux membres de la
communauté pour une veillée mortuaire. Tout défunt, quel que soit son rang social, a
droit au moins à une nuit de veillée funéraire. Chez les Antandroy, quelques mois
peuvent s’écouler entre le décès et l’inhumation. La dépouille d’un roi peut être
conservée plusieurs mois avant qu’il ne soit rendu des obsèques auxquelles peuvent donc
assister des milliers de personnes.
Des chants funèbres accompagnent les prières et les airs cantiques lors des
veillées mortuaires. Dans les Hauts-Plateaux, le Zafindraony - chant polyphonique
typique de l’art vocal betsileo - prône le fihavanana. Chez les Antakarana, le passé du
défunt est relaté sur un ton mélancolique lors d’un baheza. Les Betsimisaraka mettent en
avant les exploits réalisés par le défunt dans un tsikaretiky. En pays sakalava, les pleurs
et lamentations sont « réglementés » et se font en chœur.
Les funérailles donnent lieu à des repas mortuaires qui impliquent l’abattage de
plusieurs bêtes. La fortune d’une famille est estimée au nombre de zébus abattus. La
répartition des morceaux de viande est codifiée selon les régions. Pour les Sakalava, les
228
gardiens de la dépouille mortuaire gardent le loha (tête) et les tomboky (membres) des
zébus.
Le tratra (la poitrine), le vodihena (la partie postérieure) et une bonne portion du
trafo (la bosse) sont réservés aux charpentiers et aux chanteurs. Le reste est distribué aux
invités sachant que le jabora (suif) ne sera servi qu’au moment de la mise en bière et de
la sépulture.
Dans la société sakalava, le cadavre est balancé d’épaule en épaule sous prétexte
qu’il pèse trop lourd et reçoit des injures de la part de ceux qui le transportent malgré les
supplications des proches du défunt.
Ce rite qui incarne la résistance finale du défunt à quitter le monde des vivants
se termine peu avant l’arrivée au tombeau pour marquer la force de la vie sur celle de la
mort.Les tombes reflètent - à travers les sculptures, fresques ou nombre de cornes de
zébus exposés- les goûts, les préoccupations et le statut social de ceux qui y sont enterrés.
L’art funéraire malgache a donné lieu à des constructions des tombeaux avec
des motifs et des inspirationsoriginales.Les formes des tombes varient selon les régions :
cubiques (pour les Mérina), parallépipèdes (Mahafaly et Sakalava) ou pyramidales (chez
les Antanosy).
229
La solidité des demeures aménagées pour les ancêtres détonne bien des
habitations des vivants qui sont le plus souvent construites en végétaux. Généralement
situées en dehors des villes, elles peuvent être visibles en hauteur (en Imérina), situées
dans un îlot (Nord -Ouest), au bord des routes (chez les Antandroy) ou en pleine forêt.
Pour les Betsimisaraka, le simbon-trano (littéralement : « le pagne de la maison qui
abrite les morts » désigne l’espace forestier où s’établissent les sépultures.
Si certains usages n’ont pas été accomplis comme cela se doit, l’âme du défunt
risque de rejoindre la cohorte des esprits sans attache qui errent aux alentours des vivants
et, à l’occasion, les tourmentent. Les vatolahy (pierres levées) sont dressées en mémoire
des défunts qui sont morts au loin sans sépulture.
L’ensemble des rites funéraires vise donc à s’assurer la protection des ancêtres
en les attachant à un lieu qui est le tombeau familial. La réintégration d’un défunt qui n’a
pu être enterré dans le tombeau familial au moment de sa mort ou l’apparition en rêve
d’un ancêtre qui se plaint d’avoir froid sont autant de facteurs que les descendants, dans
certaines régions, se doivent de prendre en compte pour envisager une cérémonie
consistant à faire passer l’âme du défunt d’une vie marginale à une vie « socialement
reconnue et valorisée ».
230
Le « famadihana » en Imérina ou les deuxièmes funérailles Betsimisaraka
permettent donc aux proches de se ressaisir de la douleur éprouvée lors des premières
funérailles pour célébrer la vie. La dessiccation du corps - à savoir la transformation du
faty lena (corps non encore débarrassé de sa chair) en faty maina (restes du corps réduits
à l’état de squelette ou en poudre) marque la dernière étape de la marche pour accéder au
statut de « Razana » et symbolise ainsi le retour à l’ordre normal des choses. Le rituel
déclenche le processus « de revitalisation, deresocialisation et de réintégration » aussi
bien pour le défunt que pour les survivants.
La cérémonie doit être organisée pendant la saison froide, c’est à dire entre juin
et août. Il a, par ailleurs, été avancé que « l’opposition chaleur-fraîcheur permet de cerner
la dialectique de la vie et de la mort ».
A la différence des Hautes Terres qui montent sur le tombeau pour faire
l’annonce, les Bestimisaraka touchent la tombe avec un bâton qui symbolise à la fois la
rupture et le lien de communication entre les vivants et les morts. A la fin du discours, les
personnes présentes se partagent du taoka gasy (alcool local) tout en prenant soin de ne
pas oublier la part des ancêtres.
231
Parvenu au tombeau, les femmes et les adolescents continuent à danser tandis
que quelques hommes entrent dans le tombeau pour sortir les restes des razana identifiés
au fur et à mesure, par leur nom de vivant prononcé à voix haute sans les faire précéder
du Tompokolahy ou Tompokovavy (feu ou feue) qui marque la mort.
Les corps exhumés, par ordre d’aînesse, sont ensuite confiés aux zana-drazana
qui les tiennent un temps sur leurs genoux. Les restes, séchés un moment au soleil, sont
ensuite réenveloppés dans des suaires neufs.
Ensuite, les zana-drazana élèvent les linceuls enveloppant les restes de leurs
ancêtres à bout de bras et au dessous de leurs têtes. La coutume veut qu’on fasse tourner
les ancêtres, au rythme des chants et de la musique, sept fois autour du tombeau avant de
les replacer sur les dalles qu’ils occupaient précédemment. Les femmes s’arrachent
quelques morceaux des nattes avec lesquelles les corps ont été enroulés car, placés sous
le lit, ces morceaux de nattes sont réputés favoriser la fécondité.
Pour les Betsimisaraka, deux ans séparent les premières des deuxièmes
funérailles. Pendant que les femmes fredonnent des chants traditionnels (ôsi-drazana), les
hommes valides se relayent pour creuser la tombe. Seuls les proches parents et les amis
intimes peuvent procéder, en silence, au « fitsimponana » (ramassage des ossements).
Dès que le ramassage est terminé, un tronc de bananier fraîchement coupé est
jeté dans la fosse pour combler le « trou mortuaire ». Les restes sont rassemblés et
déposés sur des nattes neuves. On assiste ensuite à des jeux de rôle entre le groupe
agnatique (les zanaka ny lahy -maître des cérémonies et des terres) et le groupe utérin
(les zanaka ny vavy - maître de la sécurité et de la paix) où des combats ritualisés sont
simulés.
Dès que le soleil est au zénith, les restes mortels sont enveloppés dans des
linceuls neufs puis installés dans le tombeau ancestral. Les descendants des autres
232
ancêtres qui sont dans le même tombeau familial profitent, par ailleurs, de cette occasion
pour demander aux leurs d’intervenir en leurs faveurs.
Le Razambe (ancêtre fondateur) ne peut pas être déplacé. Les restes du corps
sont ré enveloppés sur place. Les représentants des différentes branches (teraka)
marquent donc leurs déférences en procédant au safon-drazana. Cette pratique est à
rapprocher des coutumes d’autres ethnies qui réenveloppent leurs morts sans sortir les
corps des tombeaux (comme lors d’un atin-damba).
D’autres ethnies honorent leurs ancêtres à travers des bains de reliques dont les
plus connus comme le « fanompoa be » chez les Sakalava du Boeny, sont le
« Fitampoha » des Sakalava du Menabe et le « Tonintany » des Masikoro.
Les Malgaches entretiennent des relations permanentes avec les défunts qui,
promus aux statuts d’ancêtres, servent de médiateurs entre les vivants et les divinités.
L’expression consacrée « Que Dieu et les Razana vous bénissent » atteste cette croyance
aux capacités des ancêtres à inspirer des rêves ou des idées à leurs descendants comme,
en sens inverse, à transmettre aux divinités des demandes d’intervention en leur faveur.
Mais un ancêtre ne peut faire l’objet d’un culte que s’il est reconnu comme tel
par ses descendants qui, en retour, se chargent de perpétuer, de génération en génération,
les pratiques et traditions prescrites par leur ascendant.
Cette notion de parenté permet d’affirmer que la société malgache est structurée
selon une hiérarchie bien précise : l’aîné - qui exerce une très grande influence au sein de
233
la cellule familiale - sert d’intermédiaire auprès de l’ancêtre qui à son tour intercède
auprès de Dieu. La mort d’un individu ne doit pas altérer la sauvegarde voire la survie
d’un groupe. Les rites funéraires visent à minimiser le pouvoir de la mort singulière en
exaltant la force de la vie collective.
Ce qui gêne le plus dans la forme actuelle de mondialisation c'est, d'une part,
son caractère fortement américano- centriste, d'autre part sa foi naïve (ou peut-être
cynique) dans la vertu de l'entreprise capitaliste et du marché. Dans ces conditions, la
résistance culturelle peut provenir d'un refus de domination économique et politique
américaine ou d'un sage désir de recentrer la vie autour d'objectifs qui ne se limitent pas à
la surconsommation d'excédents.
L'Afrique ne cultive plus le sorgho parce qu'elle doit absorber les surplus
agricoles européens ou américains, surplus artificiellement gonflés par des méthodes
polluantes (nitrates) et potentiellement dangereuses (génétique) et par le clientélisme
électoral. Le décollage de l'Asie orientale ne s'est pas produit grâce à la démocratie de
marché mais à la culture. En Europe, les cultures nationales défendent en principe « les
produits biens de chez eux » et dénoncent « la concurrence sauvage » et « la camelote
étrangère » mal contrôlée.
De la même manière, la culture peut être utilisée par Madagascar pour imposer
leurs règles aux investisseurs étrangers. Ex : langue malgache à utiliser pour les produits
à importer à Madagascar.
234
Malgré le côté conservateur, voire rétrograde de certaines résistances, il faut leur
maintenir un certain rôle dans l'équilibre des marchés. En effet lorsqu'une collectivité,
fût-ce une grande démocratie, atteint une position d'extrême domination, avec les
technologies correspondantes, elle peut pousser sa logique au-delà du raisonnable. Sauf si
elle implose de l'intérieur, à la manière de l'Union Soviétique par exemple.
235
selon laquelle les industries culturelles, tout en étant capables d'être les clés précieuses
d'un développement durable, de par leur contribution substantielle au produit national,
doivent cependant bénéficier d'un régime différent.
« Les cultures sont faites pour dialoguer ». Cette phrase suggère que non
seulement une culture est riche, mais que par sa diversité elle contribue aussi au dialogue
et au partage avec l’autrui.
L’enjeu est que l’instauration ou la restauration d'un dialogue des cultures qui ne
serait plus seulement celui des producteurs et des consommateurs, mais qui réaliserait les
conditions d'une création collective , véritablement diversifiée, et qui mettrait le
récepteur en mesure de devenir émetteur tout en s'assurant que l'émetteur institutionnalisé
réapprenne à devenir récepteur.Il faut suciter le développement harmonieux dans la
diversité et le respect réciproque ,souligner le lien entre : économie et culture ;
développement économique et culturel.
236
- L'extrême variété des centres d'intérêt, des provenances linguistiques et
culturelles des nouveaux et des anciens sujets sociaux et culturels ainsi que de leurs
formes d'action démontrent que s'il y a une source d'une nouvelle diversité, c'est bien
celle de la pluralité des protagonistes qui ont surgi dans la sphère civique mondiale
depuis la fin du siècle dernier.
- les combats pour la diversité culturelle ne prennent sens qu'à la lumière d'une
interrogation plus vaste sur le modèle de société : quel statut pour l'ensemble des biens
publics communs ?
- Tous ces biens devraient être produits et répartis dans des conditions d'équité
et de liberté selon les principes constitutifs de la définition même du service public, quel
que soit le statut des entreprises qui assurent cette mission.
237
des frottements des cultures et dans l'ordre naturel des choses, lorsque deux cultures sont
en présence car la plus forte domine sur la plus faible.
Ceci est dans le but de prévenir et d'empêcher des situations où des peuples sont
déshumanisés parce que dépouillés de ce qui est leur raison d'être, leur identité,
pourraient leur faire conduire comme des désespérés, en perpétrant des désordres
préjudiciables à la paix et à la sécurité dont tout le monde a besoin pour se développer et
s'épanouir.
La diversité culturelle bien comprise nourrit jusqu'à la démocratie parce que les
qualités d'écoute et d'ouverture aux autres sont alors magnifiées pour évacuer les risques
de désordres que génère le dialogue des sourds. En d'autres termes, cette convention est
une nécessité vitale, car défendre la culture, c'est simplement défendre la vie.
238
-Quant aux politiques culturelles « visant le monde » (cinéma, livres,
communications...), elles passent aujourd'hui par des négociations âpres au niveau de
l'OMC, car les produits culturels font l'objet d'un commerce, et donc soumis à des règles
commerciales, quelle est donc la place de Madagascar dans ce domaine ?
Aussi faut-t-il donner plus d'importance aux ressources et aux potentialités dont
dispose chaque culture face au développement et renforcer ces qualités dynamiques tout
en favorisant la créativité.
La diversité culturelle dont il est question ici n'est pas un simple repli identitaire
mais une recherche de l'unité et de la solidarité dans la diversité. En tout état de cause, si
Madagascar laisse la culture lui échapper, il ne lui restera que les yeux pour pleurer,
marginalisée qu'elle est déjà aux plans politique, économique et industriel.
Conclusion du chapitre
239
CHAP.IX: JEUX INTERACTIFS AVEC LA MONDIALISATION
Introduction du chapitre
Mais une riposte ne doit pas être une attitude de refus mais plutôt une attitude
d'adaptation : comme dans les sports de combat, une riposte consiste à utiliser les forces
en présence. Elle implique un état d'esprit d'ouverture.Certes la mondialisation favorise la
liberté mais il convient d'y introduire de la justice, de la sécurité et le sens de la
solidarité.
La mondialisation n'est ni une espérance à célébrer ni une facilité : elle est une
évolution à maîtriser. Il est possible de se développer dans la mondialisation.La pire des
attitudes à l'égard de la mondialisation, qui est d'ailleurs souvent adoptée spontanément
en face d'un phénomène inconnu, nouveau et complexe, est celle de la peur.
240
matérialité (en s’appuyant sur tel objet particulier), et d’autre part, d’assurer son
incorporation avec l’invisible et sa transcommunication avec le monde divino-ancestral.
Mais quel que soit le degré d’élévation auquel est parvenu le « maître du
tromba » dans cette quête du savoir et du pouvoir, il ne doit jamais s’enfermer sur soi
mais il est plutôt appelé à éclairer les autres de sa luminosité divino-ancestrale.
La différence est au cœur du social. N’est-il pas vrai d’ailleurs, selon l’adage
populaire malgache que « les arbres d’une même forêt n’atteindront jamais les mêmes
hauteurs et qu’un arbre, quelle que soit sa taille, ne constituera jamais à lui tout seul une
forêt » ? N’est-il pas vrai que « ce sont les branches les plus élevés qui bénéficient le
mieux des rayons du soleil et qu’il leur appartienne en contre partie de s’exposer plus que
les autres aux caprices du vent » ?
241
Plus cette source est puissante et lumineuse, mieux également elle arrive à donner aux
objets leur vrai contour ainsi que les nuances éventuelles de leur couleur, nous permettant
ainsi de les distinguer puis de les situer les uns par rapport aux autres.
Dans une telle perspective, l’ignorance, c’est cette sorte d’opacité de notre
intelligence qu’il faut combattre de toutes nos forces, précisément, parce qu’elle nous
empêche de réaliser judicieusement notre humanité.
Au cas où ces moyens offerts par l’éducation ne suffisent pas, d’autres adjuvants
sont là pour aider l’individu à retrouver intimement sa mélodie intérieure pour essayer
d’être de nouveau en vibration avec ce rythme divino-cosmique. Le tromba en est ici l’un
de ces adjuvants.
9.1.2. Christianisme
Les misssionnaires jésuites se sont heurtés à des obstacles majeurs pour la
christianisation de la région d’Andriamisara à l’époque et jusqu’à l’heure actuelle. Les
Sakalava sont islamisés, pour la plupart ; une petite communauté seulement est
christianisée, composée des migrants dont peu sont Sakalava.
242
Avec le travail d’ évangélisation actuelle , le christianisme connaît une grande
expansion aussi bien dans la région Boeny que dans toute la grande île alors que la
religion traditionnelle occupe toujours la première place .
Mais force est ici de constater que les Sakalava sont réfractaires à la parole
évangéliste même si la conversion au christianisme exige la scolarisation.
9.1.3. Islamisme
La majorité de la population dans la région est islamisée. C’est un islam
« maritimisé » limité à la communauté antalaotra,qui n’a pas de territoire réel, à
l’époque mais soutenu par une forte présence comorienne à l’heure actuelle.
Les Indiens sur la côte Ouest relayent les Antalaotra (Arabe) et se métissent
peu à peu avec les Sakalava . Le culte d’Andriamisara et l’islam cohabitent et la
famille royale convertie se multiplie d’annné en année.
Ce geste est traduit par plutôt un acte politique qu’un acte de foi. L’islam
apparait comme un moyen d’échapper au christianisme puisque l’identité sakalava
passe toujours et avant tout par le culte des reliques.
243
9.2 Identité véritable de l’universalité
Cette section traitera le fihavanana sur une dimension altermondialiste car il est
la raison, la base et le facteur d’interculturalité dans la multiculturalité.
Les rites, les langages changent selon la localité, mais chaque ethnie pratique le
tromba et l’un et l’autre assiste à la cérémonie du tromba car le but est de garder la
multiculturalité. Chacun respecte la culture de l’autre, et ceci étant pour garder et
respecter leur identité respective.
Ainsi, la malgachéité trouve sa pérennité car les gens cohabitent quand même
sur le plan culturel en sachant pertinemment que chacun a sa propre culture et tout cela
prend la direction vers la multiculturalité/malgachéité et ne peut pas s’en cacher.
On ne peut pas passer outre la malgachéité, car cet exercice du pouvoir devient
l’essence de la politique à partir du pouvoir de l’Etat jusqu’à l’échelle plus bas en
l’occurrence le fokontany : c’est l’impératif de la dichotomie.
244
le pouvoir légal officiel, lequel constitue la structure publique, basé sur les
trois séparations du pouvoir (exécutif, législatif, judiciaire) ou Etat légal
(moderne) ;
Le but de cette dichotomie est de dire que la relation entre ces aspects est
toujours là. Il y a toujours une alliance entre le pouvoir traditionnel (tangalamena), et le
pouvoir légal (Etat).Maintenant nous allons parler de la malgachéité à l’universalité.
Compte tenu de la puissance tutélaire des bailleurs, l’Etat national ne peut que
se soumettre au régime des conditionnalités imposées. Il dispose cependant d’une large
manœuvre d’action à l’échelle du culturel pour préserver une identité nationale face aux
manœuvres d’instrumentations des différences culturelles.
245
culture, le ministère de la fonction publique, et enfin le ministèrede l’éducation
nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique ;
246
Quasiment, il n’y a pas de logique d’entreprise si la valorisation des règles de
l’économie néolibérale s’impose, il est nécessaire de recourir à une approche horizontale
de la problématique.
C’est une question d’approche par créativité et par activité. Il ne revient pas,
semble-t-il, à la modernité d’imposer ses règles à la tradition. C’est du néo-libéralisme
sauvage. C’est à la tradition de s’approprier la modernité dans une démarche
normativiste. Quelle est à ce titre la place à attribuer au post-modernisme ?
Le but est d’être admis au rang de partenaire légal, même en l’absence d’une
base économique proportionnelle au rang accordé. De ceci semble découler la pleine
appropriation du devenir par la tradition, sur le moyen et le long terme. Le court terme
est dédié à des pratiques d’ajustement et de réajustement de structures, du vertical à
l’horizontal.
247
Les pouvoirs publics ont l’obligation d’assurer une éducation et un
enseignement adéquat pour toute la population à des fins de développement, et d’apporter
des réformes nécessaires aux traditions et aux pratiques pour mener à bien leur mission.
Malheureusement, ils n’ont pas donné aux traditions le poids qui convient.
La région a tendance à invoquer ses traditions pour ne pas affecter les ressources
adéquates propres pour le processus de développement. L’Etat peut, en outre, sensibiliser
directement les gens de la campagne, en envoyant des instituteurs pour enseigner les us et
coutumes de chaque tribu dès la classe primaire, pour faire visiter aux élèves les musées
et temples dans le but de montrer et de démontrer l’importance de la tradition.
Au sujet des parents ; ils retirent leurs enfants de l’école pour les jeter dans la
vie traditionnelle et les livrer à la pratique des tromba car ils pensent que l’école éloigne
leurs enfants des traditions et par conséquent, ils craignent d’être accusés à tort (par leur
groupe) de comportement irresponsable.
Sur le rôle central joué par les enseignants. Il leur incombe de transmettre aux
élèves la connaissance des traditions. Ils doivent aussi inculquer aux élèves l’envie de
savoir et de connaître. Ils peuvent également leur apprendre à suivre parallèlement
l’école et les traditions et enfin de les adapter à la situation prévalante.
Quant aux médias, ils jouent un très grand rôle sur les informations concernant
ces traditions. Ils peuvent montrer, à travers des reportages, les conséquences du fait de
s’attacher trop aux traditions, non seulement, le côté positif, mais aussi le côté négatif
(l’abêtissement, l’ignorance, le refus du progrès, etc.) qui est source de la pauvreté.
248
En outre, les médias sont aussi responsables du côté de l’encouragement de
chaque citoyen à voir le bon côté des traditions et les concilier à la modernisation.
Si les pays riches en sont au stade de la détermination des stratégies les plus
appropriées pour la sécurisation de leur avoir, et la surcapitalisation de celui-ci au-delà
des possibilités des ressources humaines ainsi que des conditions-limites de la stabilité
écologique, les pays pauvres dépensent leurs décennies, voire même leurs siècles
d’existence à faire fébrilement la décompte de leurs misères dans des processus
multiples de recherche, d’affirmation ou de préservation d’identité, rien de plus .C’est là
le niveau atteint par la démocratie mondialisée.
Le Nord fait une économie de pauvreté, le Sud conforte ses capitaux d’identités.
Au-dessus, les Etatsdébattent sur les avancées démocratiques et la vocation humanisant
des bonds technologiques, symboles de réussite de la postmodernité ; ils appelent à
l’adhésion aux idéaux du post-modernisme.
249
La crise économique mondiale frappe sévèrement les pays du Nord mais les
pays du Sud ne sont pas non plus épargnés.
Les rapports politiques dans le Nord-Ouest sont marqués par l’opposition entre
les deux branches (Bemazava et Bemihisatra). Actuellement, le problème entre ces
deux branches révêt une connotation politique qui oppose les Bemihisatra, pro -régime
en place appuyés par les opérateurs économiques, des élus et les Bemazava proches de
l’opposition.
Tout tourne donc autour du doany et les deux branches luttent pour mettre en
place ( à la garde dedoany ) des notables qui leur seraient favorables . Le débat
politique est en terme ethnique car les deux parties s’affrontent sans cesse. Cet
affrontement est doublé par l’opposition ethnique entre les Merina et les Côtiers.
Tout ceci nous amène dans la logique des adversités : Bemazava/Bemihisatra, Merina
/Côtiers.L’opposition cède ici la place au conflit lignager.
250
Plus on se rapproche de leur territoire, plus les Sakalava s’éloignent et cette
« autoexclusion » est dûe à la forte volonté de pérenniser leur identité et de valoriser
leur culture .
Ces derniers n’envoyent à l’école que les enfants issus des lignées secondaires
qui n’ont aucune chance d’acceder au pouvoir royal. Le rejet de l’école et de l’étranger
à travers les structures traditionnelles, s’explique par le refus du christianisme et cela se
solde par un faible taux de scolarisation des Sakalava.
Il n’est pas nécessaire de rappeler que les Hautes -Terres jouissent d’une
avance remarquable par rapport aux côtes depuis l’époque coloniale si l’on se réfère aux
domaines de l’enseignement et du christianisme .
251
L’appartenance à l’église protège les migrants et l’opposition entre doany et
église garde les chrétiens du monde ancien, polythéïste. La concurrence entre les
principales confessions et la condamnation des traditions sakalava ont aggrandi le fossé
entre les deux parties et ont empêché la christianisation en profondeur.
L’église reste l’associé des groupes des migrants et des étrangers mais
certains Sakalava rejoignent les lieux de culte chrétien à l’instar des originaires des
Hautes Terres qui praticipent au culte d’Andriamisara .
Une réflexion sur les élites côtières et l’intellectualité sakalava mérite donc
d’être effectuée à partir de cet instant. La resistance des populations sakalava du
Boeny se réalise sur le mode réactionnaire : cette attitude de refus est leur réponse au
phénomène de la mondialisation.
252
La communauté Tsimihety acquiert sur le plan national , un souffle nouveau
qui ne peut se répercuter à l’échelle locale ; rien d’étonnant alors à ce que les
Sakalava évoquent la présence des Tsimihety au doany .
Conclusion du chapitre
Le dernier chapitre de cet ouvrage a été consacré aux jeux interactifs avec la
mondialisation. Le traditionalisme sakalava, l’opposition : traditionisme / modernisme, la
domination étrangère nous ont permis d’effectuer une approchescientifique en vue de la
lisibilité et de la visibilité de la réalité sociale dans le Boeny.
253
Conclusion de la partie
Ce que nous aurions aimé montrer dans cette dernière partie, c’est la place de
la tradition sakalava au sein de la société malgache moderne, l’importance de son
histoire et de son identité face à la modernisation mais c’est le partage des pratiques et
des connaissances qui est mal communiqué.
254
Photo n° 25
Photo n° 26
255
Photo n° 27
Un zébu à tête claire : omby mazava loha, sacrifié expréssement au bord du fleuve pour
purifier ce dernier avant le fitampoha. Mitsinjo en 2007.
Photo n° 28
256
Photo n° 29
Les jeunes garçons s’amusant à faire des morengy pour degager la route afin
de permettre au cortège de passer librement le retour au village. Mahavavy Sud, en
2007.
Photo n° 30
Les invités composés des autorités administratives locales et des élus. Mitsinjo
en 2007.
257
Photo n° 31
Photo n° 32
258
Photo n° 33
La femme du groupe razan’olo porte sur sa tête les nattes sur lesquelles vont
être étalées les mosarafa et les offrandes .Auteur, terrain, 2008.
Photo n° 34
259
Photo n° 35
Une jeune fille portant sur le front une marque en kaolin en forme de lune et un
point signifiant la réussite du fanompoa : tombo. Auteur, terrain, en 2009.
Photo n° 36
260
CONCLUSION GENERALE
Pour les Malgaches, la mort est aussi importante que la vie. Ils pratiquent avec
ferveur le culte des morts en bâtissant et en entretenant des monuments funéraires
somptueux. Ils espèrent ainsi en être récompensés en attirant la bénédiction de leurs
aïeux qui leur donnera bonne santé, fertilité et richesse, avant d’accéder eux-mêmes, un
jour, au glorieux statut d’ancêtre immortel.
Pour être plus précis, dans le système de ce genre, il est impossible de parler de
la culture indépendante de sa transmission car il n’y a pas de trésor d’idées collecté, ni
de conduites qui constituent la séparation d’objet de transmission sans la valeur et la
réalité.
Brèf, le fanompoa be, est une manifestation culturelle caractérisée par le bain
des reliques royales honorant et respectant les ancêtres alors que le famadihana et les
autres pratiques funéraires, quant à eux, consistent à exhumer des morts familiaux pour
renouveler des linceuls. Ils sont tous des coutumes funéraires mais totalement différents
en ce qui concerne les denominations, les formes et le déroulement. Ils organisent le
rapport entre vivants et morts, en un mot entre le passé et le présent.
261
Dans le champ laissé vacant par l’interruption du récit historique, en l’absence
d’initiatives du pouvoir, les individus assument cette relation sans laquelle le présent perd
tout sens.
Ce que nous aurions aimé montrer dans cette recherche, c’est la valorisation des
pratiques identitaires, leurs places au sein de la société moderne malgache ainsi que leurs
importances face à la modernisation. En outre, la richesse, la vie, la vigueur et la force
de ces traditions ne sont pas opposées à la modernisation, mais c’est le partage des
pratiques et des connaissances qui est mal communiqué.
Aujourd’hui, les psychanalystes disent que pour mieux vivre, il faut préparer la
mort. Ils semblent redécouvrir ce que la société malgache connaît et pratique depuis
toujours. « La tradition est la communauté de comprendre que les participants d’un
dialogue partagent le même langage » et pourquoi pas la même pratique, la même foi, et
le même engagement.
262
Le rapport au sacré reste alors un enjeu essentiel car la référence aux ancêtres
royaux fonctionne donc dans les tournants de l’histoire politique de la côte Ouest , sans
cesse instrumentalisée par les différentes formes de pouvoirs qui se sont succédé . Le
culte des ancêtres est remodelé en fonction des intérêts du moment. Cette réhabilitation
de certains rituels participe à l’expression d’une logique identitaire au niveau local
mais aussi à l’échelle nationale.
La reviviscence actuelle des cultes des ancêtres, perçue sur l’ensemble de l’île,
renvoie, en première approche, à une logique de reconstruction identitaire locale. En
deuxième approche, on perçoit une réelle tentative de légitimation de la logique
ancestrale dans le cadre d’un Etat laïc.
Malgré toutes les réserves qu’on peut faire, l’explication de toutes ces croyances
religieuses semble être dans la ligne du symbolisme. La tradition sakalava est
caractérisée par la vénération du Zanahary, le respect du Razana et est constituée par la
crainte de la mort.
Le tromba est une pratique cérémonielle qui représente l’identité culturelle des
malgaches, et plus précisément des Sakalava. Il cherche la valorisation et la pérennisation
face aux défis de la post modernité (mondialisation / globalisation). Il faut donc chercher
et identifier les modes et les angles de compatibilité entre les pratiques rituelles telles que
le tromba et la dynamique marchande (économie de marché).
Dans les sociétés sakalava du Boeny, letromba est un système très ancien, à la
fois pratiqué aussi bien par la classe populaire que par la famille royale. Il est d’une
263
valeur tant royale que populaire. Il entretient la friction d’une continuité symbolisant
ainsi les anciennes formes de pouvoir. Il reste un enjeu à l’époque coloniale et
postcoloniale.
Quoi qu’il en soit, le tromba entretient, quant à son rapport avec l’économie de
marché, une relation horizontale.De statut anti et altermondialiste, le tromba favorise
l’interaction entre le monde magico-religieux et le monde divin.
194
Les deux mots ont chacun leur signification dans le français courant mais dans cet ouvrage,
nous les utiliseront pour designer le maître de la divination. Donc, il n’y a aucune différence entre
devin et divin.
264
régulation permettant d’écarter ce qui menace la condition sociale. Le tabou en tant que
règle surdétermine tout art de divination, tout acte de sorcellerie et toute manifestation
du tromba.
Cette règle affermit l’ordre établi dans le domaine de Zanahary jusqu’à celui
de l’homme, etc.La construction structuraliste réduirait le fady à une « simple fonction de
régulation sociale assurant rétroactivement et activement la permanence du groupe » et
serait apte à interpréter notamment la violence et l’absence des conflits au sein d’une
société.
Le sens du sacré existe dans toutes les régions de Madagascar et souvent il est
source de motivation des Sakalava et des Malgaches à organiser et à pratiquer les
différents cultes identitaires. Ces derniers, malgré les nombreuses variantes ont les
265
mêmes significations car c’est le moment de tisser le lien social entre les vivants lors de
leurs réunions pour la vénération des ancêtres.
Le hasina a une grande valeur pour les Sakalava. Il est utilisé dans toute
cérémonie traditionnelle et pratique identitaire pour l’ethnie sakalava. Constituant la
pierre angulaire du culte de ladite ethnie, le hasina caractérise, le hataka (demande de
bénédiction), le fanompoa be (bain de relique royale), le jôro (sacrifice), le tromba (rite
de possession, de transe), le tolotro (offrandes).
Les Sakalava ne veulent pas d’une culture occidentale, ils veulent respecter
leurs ancêtres et garder leurs traditions. Ils ont grandi dans ces pratiques et pensent donc
avoir une dette envers leurs ancêtres : c’est de les respecter et les obéir pour avoir leurs
bénédictions, c’est comme si ils ont signé un contrat avec les ancêtres.
De nos jours, la modernité qui a apporté des changements, est presque devenue
le seul maître à bord alors que pour les Sakalava, c’est la tradition qui devrait l’être. Les
266
pratiques identitaires rappelent l’existence des différentes pratiques identitaires
malgaches et montrent la spécificité des rites funéraires populaires et royaux chez les
Sakalava de Boeny.
Donc, toute prière et sollicitation engendrées par le culte des ancêtres sont
sacrées pour les Sakalava et marquent leurs identités culturelles. On peut affirmer que le
hasina fait partie intégrante de la pratique identitaire sakalava et également de celle de
toutes les autres ethnies de la Grande Ile.
Les cultes identitaires occupent une grande place et les rites y afférents
sont intéressants pour la continuité de l’histoire des Malgaches mais aussi pour
l’organisation et le fonctionnement de la société toute entière. Ces cultes authentifient
donc l’identité des Malgaches et permettent de rendre un dernier hommage aux défunts,
ceci dans le but de pérenniser le pouvoir ancestral et d’obtenir leur bénédiction en retour.
Les rites funéraires sont aussi considérés comme des cultes des ancêtres. Pour
les Sakalava, il est impossible de mener sa vie de façon solitaire et individuelle. Tenant
ce statut d’holiste, les Sakalava croient donc en la vie après la mort qui doit être
préparée non pas par le défunt lui-même mais par les membres de sa famille vivants
pour qu’il puisse accéderau rang des ancêtres. Ceci permet au défunt de revivre les
sentiments affectifs et associatifs, faisant de lui un être social car le corps meurt mais
l’âme ne meurt jamais.
Les rites funéraires ont pour objectif d’adapter et d’intégrer le défunt dans un
domaine holiste où l’individuation et l’individualisation sont des éléments perturbateurs
de l’ordre socialement établi. Il n’y a que la cohésion sociale et la collectivité qui sont les
bienvenues.
267
entre les deux mondes.Les rites funéraires sont les prix à payer pour inscrire
définitivement le défunt dans le monde des ancêtres .
Faute de pouvoir empêcher la mort qui est d’une puissance irrésistible, les
vivants ne peuvent que se contenter d’affirmer leur unité et pérennité en défiant ainsi la
mort par le biais des différents rituels funèbres. Les enfants qui n’ont pas atteint l’âge de
6 mois n’auront pas droit aux funérailles par contre une place leur sera réservée dans le
tombeau familial. Les rites funéraires donnent aux vivants la force et le courage de
continuer le chemin malgré la défaite face à la mort.
La croyance aux cultes des ancêtres valorise d’abord la culture de chaque région
et renforce les liens qui existent entre les vivants et les morts. A chacun de prôner sa
propre identité ainsi que d’apprendre à s’intéresser aux autres cultures pour vaincre
l’inconvénient de la mondialisation qui ne cesse de s’enraciner dans les pays en voie de
développement.
En aucun cas, les cultes identitaires ne peuvent être ni un frein, ni une des causes
du sous-développement. Les rites funéraires sont des miroirs qui affichent les
268
consciences collectives et individuelles de la population malagasy et en même temps un
moteur qui rend possible l’intégration du défunt au monde des morts.
La mort prête un corps vivant pour pouvoir accéder encore une fois au monde
visible qui n’est pas le sien puisque son monde à lui est spirituel et en tant qu’ancêtre, il a
le devoir de veiller sur les membres de sa famille. Pour ce faire, il a recours au rituel de
possession : tromba.
269
Il s'agit de ne pas confondre l'industrie culturelle et la culture car la première
cherche, par les biens culturels, à faire du profit, la seconde cherche à produire de l'être, à
lui dire d'où il vient et à l'aider à se construire. Une vraie mondialisation de la culture, au
sens de patrimoine commun à toute l'humanité reste donc bien à construire. Et c'est bien
dans cette construction que les pouvoirs politiques ont un rôle essentiel à jouer. Les
instances publiques ont en effet un rôle de rééquilibrage et de contre-pouvoir à jouer.
Le conflit n’est jamais soumis aux instances étatiques que lorsqu’il ne peut
plus être réglé au sein du doany ou entre lignages. Il a toujours existé et perdure
même si la forme et les acteurs changent : c’est bien là son intérêt. Sortir de la
270
colonisation au départ , afficher et conserver leur identité , sont des sources de
tensions pour les royautés dans le Nord-Ouest .
L’intervention des gouvernements peut être utile mais n’est acceptée que
dans la mesure où elle est planifiée dans la tactique. Pour les princes, être en
possession des reliques, c’est avoir le prestige et la reconnaissance.
Il font donc appel à l’ Etat pour avoir de la légalité et de la légitimité mais ils
ne s’inclinent pas devant la loi (par exemple le refus absolu de rendre les reliques de
part et d’autre) . Donc, le système des reliques est une structure compressible qui peut
servir les intérêts de chacun.
Entant que sociologue de formation, nous avons orienté notre recherche dans un
domaine multi et l’interdisciplinaire ainsi que l’approche holistique .Des nouvelles
démarches sont donc à identifier et à adopter.
195
Entretien avec le Mpanjaka be Dezy, Mahajanga, 2006.
271
Faire connaitre à tout le monde l’importance de savoir sa propre culture ainsi
que de connaitre celle des autres est plus que jamais nécessaire pour le développement et
la modernisation de son pays.
D’une part, leur nombre a augmenté, et d’autre part, ils sont positivement
engagés à la modernisation et sont issus de l’ère contemporaine.
Le culte des ancêtres s’affiche aujourd’hui comme centre des rivalités tant au
niveau interne (organisation) qu’externe (relation avec l’étranger).
L’essentiel de cette thèse a été consacrée à la région Boeny, qui est un terrain
insuffisamment exploré par les anthropologues et les sociologues contemporains. Nous
avons donc voulu montrer la permanence du pouvoir symbolique sakalava qui
exprime la volonté de conservation de son identité .
272
Ce que nous avons essayé de montrer dans cet ouvrage ce sont les
changements de fonction des rites funréraires. La continuité, la pérennité de la tradition
caractérisent le monde ancestral sakalava. La richesse, la vivacité et la force de la
tradition ainsi que sa faiblesse y sont démontrées et analysées. La tradition (les rites
funéraires) présente ici une double face dont l’une s’oppose à la modernité et l’autre
cohabite obligatoirement avec.
273
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGES GENERAUX
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Documents télévisés
142 -Emission « Fitsinjo» du mardi 25 octobre 2009 de 17 heures sur TVM, animée
par RATSIMINDRAMANANA Charles.
143 -Emission « Talk Gasy : Fanandroana sy ny Finoana » du dimanche 11
décembre 2005 de 20 heures sur RTA, animée par Guilot RAMILISON et Steve
MANIRY.
144 -Emission « Couleurs des Iles » du Samedi 19 Septembre 2009 de 21heures sur
la Télévision Malagasy, animée par Steve MANIRY.
Journaux
145 -RAKOTOARISOA, J-A. (1999), « Madagascar au XXI ème siècle. Comment
le Malgache peut –il s’adapter au monde de demain ». Interview, L’expresse de
Madagascar, 23 Janvier 1999.
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dans le Journal l’Expresse de Madagascar.
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Documents officiels
147 -LOI 78 – 040 du 17 juillet 1978 portant sur le cadre général du système
d’éducation et de formation à Madagascar.
148 -LOI 94 – 033 du 13 mars 1995 relative à l’orientation générale du système
d’Education et de formation à Madagascar.
149 -LOI 2004 –004 du 25 juillet 2004 relative à l’orientation générale du système
d’Education et de formation à Madagascar.
150 -LOI 2008 – 011 du 17 juillet 2008 relative à l’orientation générale du système
d’Education et de formation à Madagascar.
Webographies
151 -www.primeminister.com
152 -www.haisoratra.org
153 -www.madamaki.com
154 -www.ethnology.gasy.org
155 -www.photolagarde.com
156 -html/retournement.htm
285
REMERCIEMENTS.......................................................................................................... A
SOMMAIRE .......................................................................................................................C
AVANT- PROPOS ............................................................................................................. E
INTRODUCTION GENERALE ........................................................................................ 1
Première partie: THANATOLOGIE ET CULTURE SAKALAVA ...................... 21
CHAP.I : LES CROYANCES TRADITIONNELLES ............................................ 24
1-1 Zanahary : Dieu ............................................................................................... 24
1.1.1. Définition ................................................................................................. 24
1.1.2. Zanahary lahy, Zanahary vavy ................................................................ 27
1.1.3. Autres faciès de Zanahary........................................................................ 27
1-2. Razana : ancêtre............................................................................................. 28
1.2.1. Statut social des ancêtres : ancestrisme .................................................. 28
1.2.2. Tanin-drazana : la terre ancestrale ......................................................... 30
1.2.3. Fasan-drazana : tombeau ancestral ........................................................ 30
1.2.4. Hasin-drazana ou sacralité ancestrale : ancestralisme .......................... 32
1.3. La fonction du sacré : hasina .......................................................................... 34
1.3.1. Définition du hasina : sacré ..................................................................... 34
1.3.2. Le hasina chez JAOVELO-DZAO ........................................................... 35
1.3.2. Le sens du sacré ....................................................................................... 36
1.3.3. Les variétés du hasina .............................................................................. 37
CHAP. II.TROMBA ................................................................................................. 38
2.1. Définition et évolution de la pratique du tromba ............................................ 38
2.1.1. Origine étymologique ............................................................................... 38
2.1.2. Nom du tromba......................................................................................... 39
2.1.3. Evolution de la pratique du tromba ......................................................... 41
2.2. Typologie et objets cérémoniels du tromba .................................................... 45
2.2.1. Catégorisation des tromba ....................................................................... 45
2.2.2. Objets cérémoniels du tromba ................................................................. 46
2.2.3. Discours cérémoniel et appel du tromba ................................................ 50
2.3. Fady : tabous ou interdits ................................................................................ 52
2.3.1. Essai de définition .................................................................................... 52
2.3.2. Variétés des fady .................................................................................... 54
2.3..3. Synthèses et domination à traves le fady ............................................... 58
CHAP III. DIVINATION, ASTROLOGIE ET SORCELLERIE .......................... 60
3.1. Le sikidy ......................................................................................................... 60
I
3-1-1- Considérations générales ........................................................................ 60
3.1.2. Orientation des figures............................................................................. 62
3.1.3. Différentes formes de sikidy ..................................................................... 65
3.2. Le Fanaraham-bintana ou fanandroana ......................................................... 68
3.2.1. Considérations générales ......................................................................... 68
3.2.2. Les douze mois lunaires ........................................................................... 69
3.2.3. Les 28 destins malgaches ......................................................................... 76
3.3. La sorcellerie .................................................................................................. 80
3.3.1. Précision sur le moasy ............................................................................. 81
3.3.2. Sorcier : être maléfique............................................................................ 81
3.3.3. La différence entre moasy (guérisseur) et mpamosavy (sorcier) ............. 82
Deuxième partie : RITES FUNERAIRES : PRATIQUES IDENTITAIRES DANS
LE « BOENY ». ........................................................................................................... 93
Chap. IV. EXEMPLES DES PRATIQUES IDENTITAIRES MALGACHES ....... 96
4.1. Lanonana......................................................................................................... 96
4.1.1. Définition ................................................................................................. 96
4.1.2. Préparatifs ............................................................................................... 97
4.1.3. Déroulement ............................................................................................. 97
4.1.4. Repas ........................................................................................................ 99
4.1.5. Enjeux et implications .............................................................................. 99
4.2. Famadihana ................................................................................................... 100
4.2.1. Les étapes du famadihana ...................................................................... 101
4.2.2. Les formes .............................................................................................. 104
4.2.3. Buts et valeurs de la pratique ............................................................... 106
4.2.4. Famadihana face à la modernité ........................................................... 107
4.3. Fanompoa be ................................................................................................. 108
4.3.1. Définition ............................................................................................... 108
4.3.2. Déroulement ........................................................................................... 108
4.3.3. Le bain des reliques ............................................................................... 110
4.3.4. Doany Miarinarivo Tsararano Ambony Mahajanga ............................. 112
4.4. Rasa harena ................................................................................................... 113
4.4.2. Préparatifs ............................................................................................. 114
4.4.3. Déroulement ........................................................................................... 114
4.4.4. Aspects socio anthropologiques ............................................................. 116
II
4.5. Tsangan-tsaina .............................................................................................. 116
4.5.1. Définition ............................................................................................... 116
4.5.2. Déroulement ........................................................................................... 117
4.5.3. Aspects religieux et socio politique ........................................................ 120
4.6. Fitampoha ..................................................................................................... 120
4.6.1. Définition ............................................................................................... 121
4.6.2. Préparatifs ............................................................................................. 122
4.6.3. Déroulement ........................................................................................... 123
4.6.4. Les valeurs socioculturelle et politique. ................................................ 124
4.7. Dika vohitra .................................................................................................. 125
4.7.1. Définition ................................................................................................... 125
4.7.2. Déroulement ........................................................................................... 126
4.7.3. Valeurs socio -culturelles...................................................................... 127
4.8. Havoria ......................................................................................................... 127
4.8.1. Définition ............................................................................................... 127
4.8.2. Déroulement ........................................................................................... 128
4.8.3. Essai d’interprétation ............................................................................ 130
4.9. Ati-damba ..................................................................................................... 131
4.9.1. Définition ............................................................................................... 131
4.9.2. Préparatifs ............................................................................................. 131
4.9.3. Déroulement ........................................................................................... 132
CHAP V. ELEMENTS DETERMINANTS DE LA REPRODUCTION SOCIALE
................................................................................................................................ 134
5.1. Triangle Bezavo –Betsioko –Mahabo .......................................................... 134
5.1.1. Les doany du Nord-Ouest ...................................................................... 134
5.1.2. Le tombeau de Bezavo............................................................................ 136
5.1.3. Les tombeaux de Mahabo et de Betsioko ............................................... 137
5.2. Branches dynastiques : Bemazava - Bemihisatra ......................................... 139
5.2.1. Histoire du royaume sakalava du Boeny ............................................... 139
5.2.2. Relation Bemazava-Bemihisatra ........................................................... 144
5.3. Conflits de pouvoirs royaux.......................................................................... 146
5.3.1. Début du conflit ...................................................................................... 146
5.3.2. Création du doany Nord à Mahajanga ................................................. 147
CHAP.VI : LES RITES FUNERAIRES SAKALAVA ........................................ 150
III
6.1. Conception de la mort chez les Sakalava ..................................................... 151
6.1.1. Approches socio-anthropologiques........................................................ 151
6.1.2. La mort et le mort................................................................................... 156
6.1.3. Du refus à la vénération de la mort ...................................................... 159
6-2- Les funérailles populaires ............................................................................ 160
6-2-1- La séance de pleurs et de lamentations ................................................ 160
6-2-2- La toilette et la veillée funèbre. ............................................................. 163
6-2-3- La mise en bière et la sépulture. ........................................................... 165
6-3- Les funérailles royales. ................................................................................ 168
6 -3 -1 . La sanctification lors des funérailles royales.................................. 168
6-3-2- Le déroulement de la séance. ................................................................ 171
6.3.3. L’enterrement du Mpanjaka be Dezy ..................................................... 174
6-4- Les trois étapes des rites funéraires.............................................................. 176
6-4-1- La première étape : rites d’isolation..................................................... 176
6-4-2- La deuxième étape : rites d’exclusion. .................................................. 177
6-4-3- La troisième étape : rites d’intégration. ............................................... 178
Troisième partie : CHANGEMENT DES FONCTIONS DES RITES
FUNERAIRES SAKALAVA. ................................................................................... 186
CHAP VII: CONFLITS ENTRE MODERNITE ET IDENTITE LOCALE .......... 188
7.1. Adhésion à la modernité et pratique syncrétique ........................................ 188
7.1.1. Rites funéraires : pratique cérémonielle anti-modernité ....................... 188
7.1.2. Identité de fonction................................................................................. 191
7.2. Relation éducation – tradition ....................................................................... 197
7.2.1. Essai d’analyse du système éducatif ...................................................... 197
7.2.2. Distance entre éducation et tradition.................................................... 205
7.2.3. Ralliement de la tradition à l’éducation ................................................ 207
7.3. Accommodation statutaire et complaisance idéologico-religieuse des masses
............................................................................................................................. 210
7.3.1. Logique d’accointance entre modernité et traditionnalité .................... 210
7.3.2. Diachronie des changements de fonction des cultures d’identités ........ 212
CHAP.VIII: STATUT DE LEADERSHIP POPULAIRE ET DE L’ESSENCE
ROYALE ................................................................................................................ 215
8.1 Volonté de pérennisation ............................................................................... 215
8.1.1. Volonté libre de cohabitation................................................................. 215
8.1.2. Les pratiques identitaires à travers les récits de vie .............................. 219
IV
8.2. Dimension interculturelle ............................................................................. 221
8.2.1. Mondialisation et culture ....................................................................... 221
8.2.2. Les logiques interculturelles .................................................................. 222
8.2.3. Impacts de la mondialisation sur la culture traditionnelle .................... 225
8.3. Synthèse des rites et individuation des rapports sociaux ............................. 226
8.3.1. Synthèse des rites ................................................................................... 226
8.3.3. Diversité culturelle ................................................................................. 235
CHAP.IX: JEUX INTERACTIFS AVEC LA MONDIALISATION .................... 240
9.1 Pratique moderne et conservatisme identitaire ............................................. 240
9.1.1. Débat dans un contexte de postmodernité et d’hypermodernité ............ 240
9.1.2. Christianisme ......................................................................................... 242
9.1.3. Islamisme ............................................................................................... 243
9.2 Identité véritable de l’universalité ................................................................. 244
9.2.1. Des culturalités régionales à la malgachéité ......................................... 244
9.2.2. Impératif de la dichotomie d’exercice du pouvoir politique .................. 244
9.2.3. De la malgachéité à l’universalité ......................................................... 245
9.3 Logique d’intégration des Malgaches à la mondialisation ........................... 247
9.3.1. Modernité traditionnalisée et tradition post-modernisante .................. 247
9.3.2. Considérations synthétiques .................................................................. 249
9.3 .3.Le post-modernisme et la censure ......................................................... 249
BIBLIOGRAPHIE .......................................................................................................... 274
ANNEXES ........................................................................................................................ VI
LISTE DES PHOTOS ................................................................................................ XXVI
LISTE DES TABLEAUX ......................................................................................... XXVII
LISTE DES FIGURES .............................................................................................XXVIII
GRAPHIQUE ...........................................................................................................XXVIII
LISTE DES ABREVIATIONS .................................................................................. XXIX
GLOSSAIRE ................................................................................................................XXX
V
ANNEXES
ANNEXE 7: Madagascar
VI
Source : PRD, Boeny, 2005
VII
SOURCE : PRD, Boeny, 2005
VIII
ANNEXE 3 : GUIDE D’EXPLORATION QUANTITATIVE
Age :
Appartenance sociale:
Confession religieuse :
Origine ethnique :
Sexe :
Niveau d’étude :
Situation matrimoniale :
Profession du conjoint :
Adresse :
Nombre d’enfants :
Possession d’esprit :
Positif :
Négatif :
En cours d’évaluation :
Pas d’avis :
IX
ANNEXE 4 : GUIDE D’EXPLORATION QUALITATIVE
4. Pour vous les rites funéraires sont –ils obligatoires ou non, pourquoi ?
11. Comment est-ce que votre entourage perçoit le fait que vous pratiquer le culte
des ancêtres ?
16. Est-ce que vous pensez que la valorisation de la culture traditionnelle peut
opérer un développement durable pour Madagascar ?
X
ANNEXE 5
NORD
Pouvoir
Autorité
Commandement
Domination
ADALO ALOHOTSY
(verseau) (poisson)
ADIJADY 10 11 12 1 ALAHAMADY
(capricorne) (bélier)
ALAKAOSY 9 2 ADAORO
(sagittaire) Foyer (taureau)
Lit
OUEST EST
Profane Jarre Sacré
Impur Divin
Intrus Ancêtres
Etranger Centre Créateur
ALAKARABO 8 3 ADIZAOZA
(scorpion) (gémeaux)
Porte Volailles
Pilon/mortier
ADMIZANA 7 4 ASORONTANY
(balance) 6 5 (cancer)
ASOMBOLA ALAHASATY
(vierge) (lion)
Place du veau
SUD
Soumission
Humilité
Servitude
Dominé
XI
ANNEXE 6
Plan du Doany Ndramisara Efadahy Manankasina
(Doany Miarinarivo Tsararano Ambony)
NORD EST
RELIQUES
Safidahy Varavara menalio
Zomba Vinda (kely)
Manantany
Fahatelo
ZOMBA (be)
OUEST SUD
VALAMENA Varavara (porte principale)
habitations
TSANDRARAFA
Résidences et habitations Mbabilahy GUY Gardien
humaines Antandrano
et
Maison des
Résidences
TROMBA
humaines
Source : Auteur, enquête à Majunga, 2007
XII
ANNEXE 7 : MADAGASCAR
La Population
Madagascar compte aujourd’hui environ 15 Millions d’habitants. La population descend
essentiellement des Malais et des Indonésiens arrivés sur l’île il y a plus de 1500 ans.
La population est très jeune, puisque plus de la moitié à moins de 26 ans. Elle qui croît
déjà rapidement, devrait doubler d’ici 2015.
Certains peuples se distinguent par leur origine : les Merina de la région d’Antanarivo et
les Betsileo de la région de Fianarantsoa sont plus marqués par leur origine indonésienne,
alors que les Sakalava de la côte Ouest sont plus proches des peuples africains de l’Est.
XIII
région de Fort Dauphin.
Antandroy : « ceux des épines ». Sud, région d'Ambovombe.
Bara : Ils ont le type africain. Sont généralement gardiens de zébus. Centre-Sud, région
de Ihosy.
Betsileo : « les nombreux invincibles ». Principalement des riziculteurs et artisans du
bois. Dans la région de Fianarantsoa.
Betsimisaraka : « ceux qui sont solidaires », Cultivateurs de girofle, de café et de canne
à sucre, les Betsimisaraka sont les spécialistes de la 'Betsa-Betsa', jus de canne fermenté.
Toutefois aujourd’hui le français est dominant, ce qui pose problème pour une grande
XIV
partie de la population, notamment en campagne, qui n’utilise que des dialectes.
L’importance du français dans l’île vient de la période prérévolutionnaire durant laquelle
l’enseignement du français débutait dés la maternelle.
En 1972, durant les événements de mai, les étudiants réclamèrent un enseignement
adapté à la réalité malgache. Mais l’enseignement universitaire étant toujours donné en
français, les élèves issus de la « malgachisation » étaient en décalage.
Le français est donc redevenu la langue principale depuis 1993.
Selon la croyance malgache, certains sinistres comme les accidents ou les maladies
seraient les conséquences d’un manquement au culte des ancêtres. Ce serait un châtiment
infligé par exemple à ceux qui auraient violé un « fady » (tabou). Les ancêtres
garderaient leur individualité et leurs attaches familiales. Leur pouvoir est révélé à travers
les « ordres sacrés » qui dictent l’organisation politique, culturelle et médicale de la
famille ou de la communauté.
L’importance de ce culte voué aux ancêtres explique l’ampleur de l’art et des rites
funéraires dans certaines régions.
XV
principalement sur la cote Ouest et dans la capitale. Les musulmans représentent environ
10% de la population malgache.
Le christianisme
Si l’évangélisation a été réussie à Madagascar, cela est dû en grande partie à la souplesse
des missionnaires européens qui ont réussi à adapter la religion chrétienne à celle des
malgaches, fondamentalement monothéiste. Les deux religions s’associent grâce à des
similitudes comme notamment la résurrection du Christ qui peut facilement être admise
pas les malgaches croyant en une mort sans ruptures mais par une transition vers une
autre vie.
La religion protestante domine les Hautes Terres alors que la religion catholique règne
dans les régions côtières. Cette schématisation semble simpliste, mais elle est le fruit de
l’implantation des différents missionnaires français et anglais dans les différentes régions
de Madagascar. Dans certaines villes importantes comme Antananarivo et Fianarantsoa,
les deux religions cohabitent parfaitement et le paysage est ponctué de clochers d’églises
avoisinant ceux des temples.
L’animisme
Inspiré des rites orientaux, l'animisme est à vrai dire la religion des ancêtres. C'est à ce
titre que même les chrétiens s'y attachent.
L’islamisme
Importé par les marchands arabes, il s'est considérablement dilué dans la civilisation
malgache construite par des apports de tous horizons.
XVI
accompagnent en battant des mains. Porté au tombeau et enterré, un monument est
ensuite élevé à la mémoire du défunt.
Cette cérémonie se déroule sur plusieurs jours accompagnée de sacrifices d’animaux dont
le nombre augmente selon la richesse du défunt. Ce sont quelquefois des centaines de
têtes qui feront l’objet du sacrifice.
Les croyances
La mort
La mort, pour la religion traditionnelle malgache, marque le passage du rang d'être
humain au haut rang de Razana. Trois cérémonies importantes accompagnent la mort.
Il s'agit des funérailles, du 'Famadihana' (exhumation) et des sacrifices.
Le Famadihana ou retournement des morts : ce n'est pas une simple tradition, mais entre
dans le domaine profond de la culture malgache. L'objectif est de 'rapatrier' les
descendants d'une même lignée dans un même environnement, voire dans un même
caveau. Cette cérémonie festive est l’occasion de purifier un défunt en lui changeant son
linceul.
Ce rituel se fait selon un ensemble de rites précis : le corps du défunt est exhumé du
tombeau puis enveloppé dans une natte. Il est ensuite porté par deux hommes alors
qu’une procession de proches suit le corps en chantant et en jouant de la musique. Après
avoir reçu des onctions de miel, de tabac, de riz ou d’alcool, le défunt est ensuite
enveloppé dans un nouveau linceul.
La coutume veut qu’on fasse ensuite tourner le corps cette fois autour du tombeau avant
de le redéposer dans son caveau. La cérémonie est clôturée par un discours en mémoire
du mort et à la destinée des vivants.
Les fady
'Fady' peut se traduire par tabou. L'autorité de 'Razana' est dictée à travers des ordres qui
s'accompagnent des 'fady'. Enfreindre un fady équivaut donc à se rendre coupable envers
les ancêtres. De nombreux interdits se créent en fonction de chaque personne selon son
sexe, son appartenance familiale ou communautaire, selon le lieu (espace) et la période
(le temps).
XVII
Le fomba (la coutume)
L'usage peut au fil du temps dériver sur une tradition. Or, s'opposer à la coutume
entraînerait un châtiment de la part des ancêtres. La coutume veut par exemple qu'avant
de boire ou de partager une boisson au cours d'un évènement on verse en guise d'offrande
aux ancêtres un peu d'alcool sur le sol (symbolisant la terre).
La Famorana
La circoncision des garçons malgaches dès leur jeune âge, est l'héritage des croyances
hybrides hébraïques et animistes. Elle se pratique à l'hôpital ou à la maison familiale par
un médecin agréé quelle que soit l’ethnie ou la religion d'appartenance.
Cette manifestation se fait généralement dans une ambiance festive.
L’opération de circoncision est indispensable à la virilité de tout enfant pour qu’il assure
la postérité.
Dans le Sud-Est
Dans l’Anosy, on peut trouver des ensembles de dizaines de mégalithes formés par des
pierres commémoratives. Elles se trouvent à proximité des tombeaux, des poteaux
entaillés (alo-alo), desquels surplombent des sculptures d’oiseaux notamment. On peut
voir ce type de monuments, en bordure de forêt entre Fort Dauphin et Sainte Luce.
Dans le Sud
Les Bara érigent également des mémoriaux surmontés de figurines d’oiseaux. Ils se
distinguent par le caractère géométrique des motifs. Le Musée de l’Homme de Paris a
conservé un modèle de ces poteaux, qui représente une femme avec son enfant.
XVIII
Chez les Antandroy et les Mahafaly, les tombes sont de grandes tailles allant jusqu’à 15m
de côté et 1,50m de hauteur. Les motifs représentés sont notamment « la croix mahafaly
». Leur sommet est planté de poteaux de bois sculpté, d’une hauteur allant jusqu’à 2m.
Ces poteaux appelés les alo-alo sont représentatifs de la personnalité du défunt. On peut
ainsi voir régulièrement des poteaux décorés de sculptures de gendarme, de cycliste ou
d’avion, etc.
Dans l’Ouest
Les sculptures des tombes les plus anciennes représentent souvent des personnages ou
des oiseaux sacrés, comme les hérons. Plus récemment, on a vu apparaître de nombreuses
sculptures érotiques, leur message restant toujours mystérieux. Les tombes les plus
célèbres se situent dans la région de Morondava. Les Malgaches accordent beaucoup
d’importance aux tombes funéraires pour lesquelles ils dépensent souvent plus d’argent
que pour leur propre habitation, qui elle reste souvent précaire.
En juin, le Fisehagna est célébré dans la province de Diegó Suarez afin de conjurer les
malédictions d’un mois généralement néfaste pour l’île.
Tout l'hiver austral se place sous le signe de la circoncision, du retournement des morts,
et de l'hommage aux ancêtres. La circoncision s'appelle Famorana sur les Hautes Terres
ou Tolaza chez les Betsimisaraka du Sud. La cérémonie la plus spectaculaire est le
Sambatra de Mananjary qui a lieu tous les 7 ans en Octobre. Il s'agit d'une circoncision
collective de tous les enfants mâles de la région. La fête dure une semaine mais nécessite
un mois de préparation.
L'hiver est la période où l'on donne de nouveaux linceuls aux morts. Le Famadihana sur
les Hautes Terres, est une période durant laquelle il n'est pas rare que des familles
promènent les dépouilles de leurs disparus dans les rues. On a également le Ati-Damba
XIX
dans la province de Tamatave, toujours accompagné de l'incontournable sacrifice des
zébus.
En juillet, les Sakalava du Boenyse réunissent pour le Fanompoambe. Les alentours des
sanctuaires sont nettoyés, des offrandes de miel et d'alcool sont faites aux ancêtres, et on
procède au bain des reliques sacrées.
En Août, seulement tous les 5 ans, les Sakalava du Menabe se donnent rendez-vous à
Belo sur Tsiribihina pour le Fitampoha où l'on fait allégeance au roi coutumier tout en
demandant la bénédiction de Dieu et des ancêtres. La cérémonie qui dure une semaine
(exceptés le lundi et mercredi, jours néfastes) est marquée par des chants, des danses, des
sacrifices de zébus, ainsi que le bain des reliques royales qui en est le temps fort.
Tous les 5 ans également, le Nord vibre pour le Tsanga-tsaina ou Cérémonie du Mât,
qui est la plus grande fête Antakarana. Le mât s'identifie à la virilité et au roi, alors que le
sol où il est planté représente la fécondité et la terre-mère. Le Tsanga-Tsaina raffermit les
liens entre les descendants du roi Tsimiharo et consacre le pouvoir du souverain. Marqué
par de nombreuses festivités : pèlerinage à l'île Mitsio et dans les grottes de l'Ankarana,
choix et façonnage du bois du mât, danses, chants et salves de fusils, levée du drapeau
national et de celui à croissant et étoiles rouges du roi, cette fête traditionnelle est la plus
impressionnante de la Grande Ile.
La littérature
La littérature malgache est apparue vers 1850, lorsque l'historien Raombana a rédigé 8
000 pages racontant le règne de Ranavalona I.
La littérature et les poésies modernes se développent dans les années 30 et 40, en
particulier sous la plume de Jean-Joseph Rabearivelo (1901-1937) qui fît paraître le
premier recueil en français La coupe de cendres (1924) puis Sylves (1927) ou Presque-
Songes (1934).Charles Renel, un instituteur, publia en français des Contes de
Madagascar (1910 et 1930). Avec Jacques Rabemananjara (Antsa, 1956; Antidote, 1961)
et Flavien Ranaivo (l'Ombre et le Vent, 1947), il forme la «trilogie malgache» dont les
œuvres, puise aux racines de la pensée malgache et se dressent contre la colonisation.
Le premier roman malgache paraît en 1965: « Les Voleurs de bœufs », de Rabearison. La
XX
génération nouvelle de poètes compte notamment Esther Nirina ('Simple Voyelle', 1980),
à l'écriture pure. Les romancières Charlotte-Arrisoa Rafenomanjato, dans le 'Pétale
écarlate' (1985), et Michèle Rakotoson, dans 'Le Bain des reliques' (1988), décrivent le
conflit social entre tradition et modernité. Jean-Luc Raharimanana ('Lépreux', 'Nouvelle',
1992) vient confirmer l'originalité et la maturité de la littérature malgache.
La littérature orale
Madagascar possède, depuis des temps immémoriaux, une riche littérature orale. Elle
fournit des modèles de comportement et d'enracinement dans les valeurs austronésiennes.
Chaque mythe malgache correspond en effet à un récit de la création du monde à Bornéo,
chaque conte est une variante d’un mythe polynésien. On associe également les hain-teny
aux pantoums malais. Les hain-teny sont des poèmes en prose dont les thèmes récurrents
sont la vie, l’amour, la mort ou les ancêtres. Ces joutes oratoires sont nées dans la région
d’Imerina.
Le riz
C’est véritablement la nourriture privilégiée par les Malgaches. Servi seul ou
accompagné de légumes, d’épices, et de toutes sortes de viandes (zébu) ou poisson, c’est
l’aliment de base de tous les plats à Madagascar. Les Malgaches seraient parmi les plus
gros mangeurs de riz de la planète avec près de 135 kg consommés par année et par
habitant. Cet aliment appelé « vary » est visible dans le paysage de l’île puisque trois
quarts des terres cultivées sont occupées par des rizières.
Le zébu
Cette viande que l’on peut aujourd’hui trouver en France, est très présente sur l’île.
Dégusté en filet, en brochette, en pavé, rosbifs ou ragoût, cette viande est toujours très
tendre. Le zébu, très populaire, remplace notre steack - frites national.
Le Toaka gasy
Ce terme désigne tous les alcools locaux fabriqués artisanalement. Distillés
clandestinement, on le fabrique souvent à base de jus de canne de fruits sauvages.
XXI
Le rhum
C’est une boisson fortement consommée sur l’île. Il en existe une multitude de marques
bon marché, comme la Turbo2, la Cazanove ou la Boum-Boum.
Le Betsa bestsa
Rhum particulièrement prisé sur la côte Nord-Est de l’île, est produite à partir de la canne
à sucre et d’écorces. Peu fermentée, elle n’excède pas 5 degrés mais distillée, elle peut
être très forte. On en trouve dans toutes les petites épiceries en brousse.
Source : www.primeminister.com
XXII
ANNEXE 8 : Analyse et précision sur Boeny
Boina et Boeny
On ne devrait plus dire Boina mais Boeny. Le mot vient en effet du terme Boe qui signifie
rocaille, et auquel l’on a tout simplement ajouté le suffixe locatif – ny. Boe est un mot
swahili ; on le retrouve dans Zimbabwe (Zimba = cité, bwe = pierres)
On ne doit pas non plus écrire doany mais dohany car le mot vient de l’arabe doha qui veut
dire prière, demande, ou requête, au quel on a ajouté également le suffixe locatif – ny.
C’est dan le dohany que l’on invoque les ancêtres pour demander quelque chose.
Quand au mot fanompoa, c’est un dérivé du verbe manompo, origine du mot fanompoana que
l’on écrit fanompoa tout court en dialecte sakalava car le suffixe –ana est transformé en – a
comme par exemple :
Par contre, le mot fitampoha est écrit avec un – ha à la fin car il vient du verbe mitampoky ,
action que procède lors du fanompoa be quand on fait prendre leur bain aux reliques : on dit
mitampoky et non manompo.
Tout le monde peut respecter, croie et adorer les ancêtres et l’existence des tromba et du
Doany. Mais chacun a sa façon de prendre le sens de ces trois verbes ; il y a ceux qui ne
croient pas mais respectent, d’autres qui respectent, croient mais n’arrive pas à adorer, et
d’autres encore qui finissent par vénérer. Alors pour le bien de tout le monde, les anciens ont
opté pour le verbe « mitampoky ».
Les Sakalava occupent de vastes territoires mais la densité de la population sakalava est très
faible alors que d’autres tribus sont nombreuses.
D’après les traditions sakalava, c’est pendant les expéditions guerrières, parties de Bengy que
le nom de la tribu a été fixé ; les guerriers étant appelés par ceux qui les redoutaient « ceux
XXIII
venant du Sakalava ». Ensuite, les rois sakalava ont étendu leur domaine vers le Nord par des
conquêtes en formant plusieurs royaumes (Menabe, Boeny, Antakarana).
Les maisons sont en forme de simple rectangle avec une toiture faite en satrana. Pas de literie
mais juste un altar (autel) dans l’angle Nord-Est sur lequel sont placées les reliques. Le Doany
est rempli de vieux et les maisons sont construites avec des matériaux traditionnels.
Aucun toit en tôle métallique, ni de constructions en briques ou cimentées, aucun bar, aucune
boutique, aucun garage, pas d’électricité. La radio est autorisée mais la télévision non. Il est
aussi interdit de courir dans ce Doany. Il y a beaucoup de tabous dans cette petite ville
d’Andriamisasa concernant, notamment les jours (mardi et jeudi), les aliments (porcs,
pistaches, voanjobory) et l’habillement [pantalons, slips, chaussures, chapeaux (excepté pour
le Mpanjaka et les hommes travaillant dans le Doany), lunettes].
XXIV
ANNEXE 9 : Provenance des reliques
Andriamisara
Andriamandisoarivo
Boeny En Argent
Andriamboeniarivo
* Grands tromba :
* Tromba tandrano :
* Tromba vavy :
XXV
LISTE DES PHOTOS
Photo n° 1 ................................................................................................................................. 85
Photo n° 2 ................................................................................................................................. 85
Photo n° 3 ................................................................................................................................. 86
Photo n° 4 ................................................................................................................................. 86
Photo n° 5 ................................................................................................................................. 87
Photo n° 6 ................................................................................................................................. 87
Photo n° 7 ................................................................................................................................. 88
Photo n° 8 ................................................................................................................................. 88
Photo n° 9 ................................................................................................................................. 89
Photo n° 10 ............................................................................................................................... 89
Photo n° 11 ............................................................................................................................... 90
Photo n° 12 ............................................................................................................................... 90
Photo n° 13 ............................................................................................................................... 91
Photo n° 14 ............................................................................................................................... 91
Photo n° 15 ............................................................................................................................... 92
Photo n° 16 ............................................................................................................................... 92
Photo n° 17 ............................................................................................................................. 182
Photo n° 18 ............................................................................................................................. 182
Photo n° 19 ............................................................................................................................. 183
Photo n° 20 ............................................................................................................................. 183
Photo n° 21 ............................................................................................................................. 184
Photo n° 22 ............................................................................................................................. 184
Photo n° 23 ............................................................................................................................. 185
Photo n° 24 ............................................................................................................................. 185
Photo n° 25 ............................................................................................................................. 255
Photo n° 26 ............................................................................................................................. 255
Photo n° 27 ............................................................................................................................. 256
Photo n° 28 ............................................................................................................................. 256
Photo n° 29 ............................................................................................................................. 257
Photo n° 30 ............................................................................................................................. 257
Photo n° 31 ............................................................................................................................. 258
Photo n° 32 ............................................................................................................................. 258
Photo n° 33 ............................................................................................................................. 259
Photo n° 34 ............................................................................................................................. 259
Photo n° 35 ............................................................................................................................. 260
Photo n° 36 ............................................................................................................................. 260
XXVI
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 11:Les significations des figures sur les cartes du sikidy ....................................67
XXVII
LISTE DES FIGURES
Figure 2:Représentation des destins correspondant aux douze mois lunaires ..................70
Figure 4:Dispositif des quatre grandes divisions astrologiques lunaires sur les faces de la
maison ...............................................................................................................................77
GRAPHIQUE
XXVIII
LISTE DES ABREVIATIONS
CE : Cours Elementaire
XXIX
GLOSSAIRE
XXXI
- Doany : temple, place sacrée liée au royaume, demeure royale.
- Efadahy : les quatre grands rois de Boeny dont les reliques restent au Doany
d’Andriamisara.
- Emboko : encens.
- Fady : tabou, interdit, interdit individuel ou collectif.
- Fahatelo : Gestionnaire du Doany d’Andriamisara, frère du consultant et troisième
casier dans le sikidy.
- Fahavalo : huitième case de l’art divinatoire, elle indique les ennemis, les maladies.
- Famadihana : « le retournement des morts », réenveloppés de lambamena.
- Fanahy : âme.
- Fandroana : fête du bon loyal ; marque le début de l’année
- Fanjakana : le pouvoir, par extension, les gens du pouvoir, structure politique
monarchique, esprit des rois qui se réincarnent dans un médium.
- Fanjava : argent, monnaie, lune, mois.
- Fano : plante dont les graines sont utilisées pour l’art divinatoire.
- Fatidrà : sacrifice, lien de sang
- Fanompoa : service pour les ancêtres royaux
- Fanompoa be : bain des reliques royales sakalava, grand service célébré annuellement
- Fanompoa mafana: service sacré ; corvée, service lié aux obsèques d’un roi.
- Fatidra : frère de sang
- Faty : cadavre
- Faty lena : cadavre mouillé
- Faty maina : cadavre sec.
- Fianaha ou fienaha : l’enfant, c’est la cinquième case du sikidy.
- Fianakaviana : famille étroite
- Fiar’omby : deuxième enceinte symbolique qui entoure le doany.
- Fihavanana : le fait d’être parents ; mode de relation idéal fait de compréhension
mutuelle et de solidarité.
- Fitampoha : bain des reliques royales sakalava, grand service célébré annuellement.
- Foko : Groupe défini à la fois par la parenté et l’appartenance à un même territoire.
XXXII
- Fomba : coutume, bonne manière de faire les choses.
- Fomba : traditions, us et coutumes.
- Gorago : du miel cuit spécialement pour le Fanompoa be.
- Haky : Dieu créateur, juge, représente la douzième case du sikidy.
- Haja : Respect dignité, considération, onzième figure du sikidy qui indique ce que
l’on mange.
- Hasina : vertu efficace d’un être, d’une chose, force d’origine sacrée qui rend les actes
féconds.
- Hasin-drazana : pouvoir des ancêtres.
- Hataka : demande, prière pour demander la bénédiction.
- Hena ratsy : mauvaise viande.
- Hena tsara : bonne viande.
- Jambia faly : long sabre, orné et recourbé, de style arabe.
- Jingoa ou Jongô : clan des descendants des compagnons d’Andriamandisoarivo
- Kabary : proclamation royale ; discours.
- Koezy : du swahili koedj qui signifie gentillesse, c’est l’acte et le geste pour honner le
roi, l’esprit du tromba, c’est aussi la manière de saluer les plus âgés chez quelques
groupes en terre sakalava du Nord.
- Kolondoy : chants rituels du tromba
- Lambamena : suaire rouge, de soie sauvage, dont on enveloppe les morts, linceul.
- Lanonana : festiité.
- Manantany : Directeur Général du Doany Miarinarivo
- Masina : La personne qui possède le hasina, saint.
- Moasy : divin, devineur, guérisseur
- Mosarafa : natte sacrée, cadeau royal, don au fanompoa be
- Mpanjaka : souverain
- Mpanjaka Amina : Princesse bemihisatra qui règne au Bezavo doany .
- Mpanjaka Dezy : Prince bemihisatra, fils de Princesse Vahoaka et père du Prince
Herimisy Guy : son successeur qui règne au doany sud Miarinarivo.
- Mpanjaka Moanjy : Prince bemazava régnant au doany nord Manongarivo.
XXXIII
- Mpamosavy : sorcier
- Mpanara-bintana : astrologue spécialisé dans la détermination des jours fastes et
néfastes pour une action.
- Ndramisara : Grand devineur, l’un des fondateurs du royaume sakalava.
- Ndramandisoarivo : Fondateur du royaume sakalava du Boeny.
- Ndramboeniarivo : Fils successeur de Ndramandisoarivo.
- Ndranihanina : La quatrième relique constituant Andriamisara Efadahy, il est
considéré comme grand ancêtre du clan Zafinifotsy.
- Ndramandikavavy : épouse de Ndramandisoarivo, mère de Ndramboeniarivo.
- Ndramanilitsiarivo : le dernier fils de Ndramboeniarivo et son successeur, appelé
aussi Mbabilahimanjaka, époux d’Ankanjovola.
- Ndramandamigny : tromba de l’époque coloniale.
- Ndramiantanarivo : frère aîné de Ndramandamigny.
- Ndranikehindraza : frère du Manjaka Amina, associé de Bezavo doany et Nosy Be.
- Ody : charme
- Ombiasy : devin, conseiller politique
- Razana : ancêtres
- Ranitry : gardien du doany et conseillers du roi.
- Safary : représente la quatrième figure du sikidy, constitue le chemin, indique le
voyage.
- Saha : canal, possédé(e)
- Saha : médium possédé par l’esprit d’un roi défunt
- Sajoa : cruches en terre cuite.
- Sakalava : la grande ethnie de la côte Ouest de Madagascar dont le territoire s’étend
du Mangoky au Sud et de Sambirano au Nord.
- Sambiarivo : groupe de serviteurs royaux.
- Satrana : palmier dont les fibres servent à la confection des paniers, des nattes, des
cordes et des toitures.
- Sikidy : oracle, divination, géomancie.
- Sikidy : art et système de divination, de l’arabe schikel.
XXXIV
- Sorona : offrande ; cérémonie d’offrande
- Taha : sacrifice (oie, canard, coq, etc.) dans le but de guérison.
- Talata : mardi de l’arabe thalath, qui signifie le troisième jour.
- Tale : première figure de la divination indiquant les consultants
- Tanindrazana : terre des ancêtres, par extension : patrie
- Tantara : histoire, privilège justifié par un récit historique.
- Tanimalandy : kaolin, boule de terre blanche utilisée aux Fanompoa et tromba.
- Tanin-drazana : terre ancestrale, terre natale, patrie.
- Toaka : boisson alcoolique
- Trano : maison
- Trano manara : maison froide
- Trano masina : maison sainte
- Tromba : esprit d’un roi défunt, cérémonie de possession.
- Tsiarana : descendant d’Andriamandikavavy
- Tsimandrimandry : nuit de festivité
- Tsiny : reproche ; blâme
- Tsodrano : bénédiction
- Tsodrano : don et contre don lors de Famadihana et du Fanompoa be
- Vaka : perle utilisée pour la confection des charmes (aody).
- Valamena : clôture sacrée du doany.
- Varavara ou varavarana : porte ou portière ou portique.
- Varavara mena lio : porte sacrée réservée aux dignitaires du royaume.
- Vary : riz
- Vava : début du destin (astrologie malgache)
- Vazaha : l’étranger blanc
- Vazimba : premier occupants du sol en Imerina ; anciens chefs dont les tombeaux sont
vénérés ; esprits de la terre, de l’eau et des plantes sauvages ; forces redoutables qu’il
est dangereux de mécontenter.
- Vearara : sabre sacré avec lequel on a sacrifié Andriamandikavavy.
- Vinta : destin, système de destins dans l’astrologie sakalava.
XXXV
- Volamena : or
- Volafotsy : argent
- Vody : fin du destin (astrologie malgache)
- Vonto : milieu du destin (astrologie malgache)
- Zanahary : Dieu créateur, l’esprit des grands ancêtres.
- Zafinifotsy : clan qui a fait la 1ère conquête du Boeny, descendant de l’argent
- Zafinimena : clan fraternel des Zafinifotsy, descendant de l’or.
- Zomba be : palais
- Zomba vinda ou Zomba kely : petits palais dans le Zomba be dans lequel sont
gradées les reliques royales
- Zoro firarazana : coin des ancêtres
XXXVI
Nom et Prénoms : ASSOUMACOU Elia Béatrice
Titre : Les rites funéraires : essai d’interprétation socio anthropologique.
Cas de la région Boeny.
Rubrique : Sociologie des rites et Anthropologie culturelle
Nombres de pages : 285
Nombres de photos : 36
Nombres de tableaux : 11
Nombres de figures : 06
Abréviations :17
Annexes : 09
Bibliographies : 156
RESUME
Cet ouvrage est le fruit de la recherche sur « Les rites funéraires sakalava : essai
d’interprétation socio-anthropologique. Cas de le Région Boeny ». En effet, l’analyse sur la
société sakalava permet de dégager plusieurs facteurs pouvant expliquer les conflits entre
tradition et modernité dans une logique interculturalitaire dynamisant la relation des vivants
aux morts. On insiste sur l’identification de l’angle de compatibilité ainsi que la
complémentarité entre développement et culture. Il s’agit de rompre avec l’idée qui taxe la
culture de frein pour le développement. Le point dont on souligne dans la thèse s’inscrit dans
la dynamique où les rites funéraires permettent aux Sakalava de bien gérer la
communication tant entre les vivants qu’avec les morts. Ils constituent la base de l’histoire
sakalava et forment les éléments déterminants de la reproduction sociale car grâce à eux, la
nouvelle génération peut vivre l’époque et l’histoire de ses ancêtres. Ceci donne à la
société sakalava l’opportunité de connaître son origine, de maîtriser l’évolution de son histoire
dans le but de préserver son identité.
Mots clés :
Identité culturelle, rites funéraires, traditionalité, hasina , tabous, tromba, modernité,
culte , ancêtre , bénédiction , funéraille ,mort , divination ,astrologie , sorcellerie , royauté,
intégration , pérennisation , médium , histoire , conflit , dynastie, etc.