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Le gouvernement de Faustin Soulouque et le glas de la politique de doublure

(1er Mars 1847- 15 Janvier 1859)

Son élection

Le 1er Mars 1847, le sénat se réunissait pour combler la vacance présidentielle. Deux
hommes politiques, recommandables à divers titres, les généraux Jean Paul et Alphonse
Souffrant, briguaient l'honneur de remplacer Riché. Chacun d'eux avait au Sénat des
partisans décidés. Huit tours de scrutin ne donnèrent pas de majorité. Le président du
Sénat, Beaubrun Ardouin, recommanda alors la candidature de l'homme qui, à chaque vote,
n'avait obtenu qu'une voix. Le projet réel de la bourgeoisie mulâtre en hissant Soulouque au
pouvoir fut de pérenniser la politique de doublure et de manier à sa guise, sous prétexte que
le président était un illetré privé d'expérience dans la gestion des affaires de l'État.

Son administration

Sur le plan politique

Pour calmer les esprits, il laissa à leur poste les ministres de Riché, et garda une position de
neutralité face aux dissensions internes, juste le temps de trouver une issue.

Quelques temps après, devant la persistance de la crise, Soulouque voyait la nécessité de


prendre la situation en main pour ne pas se laisser dépasser par les événements. Dans ce
contexte, il faisait arrêter et exécuter pas mal de citoyens, entre autres, Céligny Ardouin,
ministre de l'intérieur, le duc de Limbé, son ministre de la justice et de l'instruction publique,
Maximilien Augustin dit Bobo (chef des zinglins). Tous les opposants à son régime étaient
exécutés ou exilés. Des citoyens ont connu la prison, le cachot et les pires tortures. L'
espionnage et l'assassinat s'étaient érigés en système de gouvernement.

Grâce à cette politique autoritaire, Soulouque a pu mettre fin à la politique de doublure et


instaurer en ce sens l'autorité de l'État.

Sur les plans économique et financier

Il fallait redresser l'économie du pays qui était en chute libre par suite de bouleversements
de toutes sortes qui ont marqué le pays depuis Boyer. Ainsi, Soulouque nommait Lysius
Félicité Salomon comme ministre des finances.

Salomon appliquait une politique économique interventionniste (dirigisme économique) afin


de faire entrer de l'argent dans l'assiette de l'État. Ainsi, il publait :

-La loi du monopole

En vertu de cette loi, le gouvernement s'interposait entre le producteur et les exportateurs.


En un mot, désormais entre le paysan et le commerçant, l'intermédiaire c'était le
gouvernement. Ce qui permettait à ce dernier d'acheter le café (ou le coton) par exemple, à
un prix uniforme et de le vendre à un prix plus cher aux commerçants. Par-là, Salomon
s'assurait une bonne rentrée dans la caisse de l'État. Vu que ce dernier, à côté de ce rôle
d'intermédiaire qu'il s'était octroyé , percevait des taxes au moment de l'exportation.

-La loi de contingentement

Pour faire face aux commerçants qui diminuaient le volume des exportations, Salomon
venait avec la loi de contingentement, c'est-à-dire qu'on ne pouvait importer qu'une quantité
égale à l'exportation. Donc plus vous diminuez vos exportations, moins vous avez la
possibilité d'importer.

-La loi de Maximum

Salomon pour répondre aux commerçants qui recouraient au marché noir en raréfiant les
produits de première nécessité, venait avec cette loi. Ainsi, l'État fixe les prix de ces
produits. Et malheur à un commerçant qui oserait vendre à un prix plus cher sous peine
d'amende ou d'emprisonnement.

-L 'impôt du cinquième

Doté d'une lucidité remarquable, Salomon recourait, en Janvier 1850, à l'impôt du


cinquième, c'est-à-dire que sur toutes les exportations, l'État avait droit à ⅕ sous forme
d'emprunt que l'État rembourserait en bons de douane. Et au moment d'exporter les ⅘, le
commerçant n'avait qu'à utiliser ces mêmes bons pour payer les taxes. D'après Anténor
Firmin, cet impôt du cinquième fut la source des plus insolentes concussions.

Après un an d'application de cette politique économique interventionniste, la monnaie


nationale perdit de sa valeur et s'échangeait à 16 gourdes pour un dollar. Le gouvernement
dut donc capituler et libérait le commerce, en supprimant le monopole et le contingentement.

Sur le plan social

Le gouvernement de Soulouque se caractérisait par quelques actions dans le domaine de


l'instruction publique. La loi de juillet de 1852 faisait obligation aux parents d'envoyer au
moins un de leurs enfants à l'école. On pouvait dénombrer, sous Soulouque, 3 lycées et 51
écoles primaires, fréquentés par environ 9000 élèves, ce qui représentait à l'époque 0,72 %
de la population totale et 2,69 % des enfants scolarisables. La politique de l'instruction
publique a été, d'abord, confiée à J.B Francisque puis à Salomon en février 1851.

Quant aux masses, si elles ne béneficiaient pas d'une quelconque amélioration de leurs
conditions de vie, elles ne restèrent pas indifférentes aux mesures extrêmes prises par
Soulouque. Elles estimaient que ce régime anti-bourgeois leur rendait justice d'une certaine
façon pour avoir décidé de frapper très durement les tenants de la bourgeoisie traditionnelle
qui les avaient toujours refoulées dans l'ostracisme la plus total depuis environ quarante
ans.

-Soulouque et le contexte international

Haïti et la France
Avec la France , tout n'allait pas bon train, vu l'intention de l'ancienne métropole de
reconnaître l'indépendance de la République-Dominicaine, convoitée par Soulouque. Ce
dernier refusa de poursuire l'acquittement de la dette de l'indépendance. Et n'était-ce le
fair-play de Napoléon III, tout finirait mal entre Haïti et la France.

Haïti et les États-Unis

Les relations n'allaient pas bon train, à cause de la Navase (île haïtienne) , convoitée par les
États-Unis. Malheureusement, la déchéance de Soulouque ne lui a pas permis d'expulser
définitivement les Américains de cette portion de terre.

Haïti et la Rép-Dominicaine

En ce qui a trait à l'Est, il s'agissait tout simplement pour Soulouque de faire rentrer de droit
cette partie de l'île sous le giron d'Haïti. Cette initiative s'était révélée ambitieuse compte
tenu des résultats obtenus.

Il entreprenait 2 campagnes. La première (1849) s'est soldée par un échec mais la


deuxième (1855) permettait à Haïti de conserver des territoires comme Hinche ,
Lascohobas et Cerca-Carvajal

Fin de son gouvernement

Le général Geffrard, après avoir été suspecté par l'Empereur, s'embarquait clandestinement
sur un canot et se transporta aux Gonaïves où , de concert avec Aimé Legros, il proclama la
révolution. Le Nord et l'Artibonite adhérèrent au mouvement. Soulouque voulut enrayer la
révolution naissante mais son armée se dispersa au premier choc.

Avec le prestige militaire, la crainte qu'il inspirait, disparut. Réfugié au Palais, il ne put
empêcher les révolutionnaires d'occuper les postes importants de la capitale. Il se réfugia
enfin au consulat français.

Le 15 janvier 1859, le Général Geffrard, devenu président d'Haïti, entra à Port-au-Prince à la


tête de Républicaine, et Soulouque, entouré d'égards par Geffrard, fut embarqué pour la
Jamaïque.

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