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Le Gouvernement de Sylvain Salnave ( 14 juin 1867 - 15 janvier 1870)

Son avènement au pouvoir


Un gouvernement provisoire fut formé à Port-au-Prince, après le départ du président
Geffrard. Mais le général Salnave, étant rentré dans le pays, fut porté en triomphe, du Cap à
la capitale, soutenu par l'acclamation populaire. C'est au point que Victorin Chevalier,
initiateur de la révolution de Saint-Marc, devant laquelle l'ex-chef d'État avait abdiqué et le
gouvernement provisoire lui-même, sentirent la nécessité de s'effacer. Bientôt Salnave eut
les rênes du pouvoir. sous le titre révolutionnaire de Grand protecteur. Une nouvelle
Constitution fut votée et il fut enfin régulièrement élu Président d'Haïti pour une période de
quatre années.

Son administration

A) La Constitution de 1867, une tentative anti-présidentialiste


Le successeur de Geffrard, le général Sylvain Salnave, prêta serment le 14 juin 1867, après
qu'une assemblée constituante eut voté une nouvelle Constitution qui réduisait à quatre ans
la durée du mandat présidentiel et dotait le parlement d'un fort pouvoir. On s'était rendu
compte que la présidence à vie ou une trop longue durée du mandat constituait en Haïti une
erreur dangereuse pour la paix publique. Quatre ans, c'est tout ce que l'ambition des uns ou
l'impatience des autres pouvait accorder à un gouvernement, bon ou mauvais.

B) Sur le plan politique


Salnave qui avait été élu pour quatre années non renouvelables, suivant la lettre de la
Constitution de 1867, non seulement demandait le pouvoir pour 10 ans, mais décidait au
second semestre de 1869 de se déclarer président à vie. En outre, Salnave commettait la
faute impardonnable des populistes qui consistait à confondre popularité, d'une part,
légitimité et légalité de l'autre. Ayant éliminé les institutions, il rentrait dans la spirale
vertigineuse du vide du pouvoir absolu qui l'aspirait en premier lieu. "Quand les voies
politiques de contestation pacifique du pouvoir n'existent pas, il ne reste plus que la violence
avec son cortège de destruction et de mort".

C) Sur les plans économique et financier


La crise politique qui ravageait le gouvernement de Salnave avait des répercussions graves
sur l'économie nationale. La production agricole se dégradait et la main-d'oeuvre se faisait
de plus en plus rare dans les champs. Les paysans sont mobilisés dans la partie nord du
pays par l'oligarchie traditionnelle sous le nom des Cacos. Les armes remplaçaient les outils
agricoles . Dans le sud, c'étaient les piquets qui défraient la chronique. Les exportations
baissaient considérablement et la crise financière héritée du gouvernement de Geffrard
s'aggravait. Pour remédier à ce problème, le gouvernement de Salnave émettait des
papiers-monnaies. En 1868, il fallait 1000 gourdes pour un dollar américain.

Les différentes conspirations contre Salnave

A)L'affaire Léon Montas ou crise parlementaire


Le général Léon Montas était un officier distingué et instruit. Geffrard l'avait nommé
commandant du département du Nord, on louait sa droiture et sa générosité. Mais parce
qu'il avait combattu Salnave en 1865, il fut arrêté en mai 1867 et gardé en prison cinq ans
sans être jugé ni interrogé.

Le 11 octobre, le député Armand Thoby parla à la chambre en faveur du prisonnier. Le 14


octobre, une populace effrayante, composée surtout de femmes armées de pierres et de
coutelas parcourut la capitale en criant : " Vive Salnave à bas la chambre ". Cette populace
envahit le palais législatif et chassa les députés. La chambre fut dissoute .

B)Les conspirations de Saint-Marc, Cayes, Jacmel et Port-au-Prince


Les insurgés bénéficiaient de l'appui des Anglais et des Français, et Salnave qui voulait
protéger son gouvernement à la fois des ennemis intérieurs et extérieurs décidait en août
1868 à consentir en faveur des USA la cession du Môle Saint-Nicolas. Un projet rejeté par le
gouvernement américain parce que cette politique était contraire à la politique traditionnelle
des Américains qui ne prévoyaient pas l'établissement de territoires militaires.

C)Le soulèvement de Victorin Chevalier


L'un des coups les plus durs reçus par Salnave était sans conteste la trahison de Victorin
Chevalier, son ministre de la guerre. Ce dernier avait donc ses problèmes personnels avec
Salnave qui l'avait évincé. De plus, il avait critiqué le chef de l'État de n'avoir pas respecté la
fortune des particuliers. " La propriété privée, cette base de tout état social, disait Chevalier,
vous l'avez mis en péril ".

D)Le Cacoïsme bourgeois contre Salnave et la Scission du en trois Républiques


Une alliance se dessina autour d'un axe formé par la bourgeoisie de Port-au-Prince, les
intellectuels libéraux et l'oligarchie militaire de l'époque. Cet axe a tout fait pour renverser le
président. On alimentait beaucoup de discorde à travers la société de l'époque. Les paysans
du Nord ont été armés sans comprendre les vraies raisons de leurs prises d'armes. Une
guerre civile qui dura deux ans bouleversa le pays. Les oligarques ont réparti le territoire
national en zones d'influences ( La République du Nord / La République de l'ouest / La
République du sud) et contribuèrent à la ruine de l'économie nationale. Beaucoup
d'exactions ont été commises des deux côtés.

La fin du gouvernement de Salnave


En novembre 1869, les jours du Chef de l'État étaient comptés. Affaibli et désespéré, il
commit une gaffe majeure, en violant la Constitution de 1867 pour se faire proclamer
président à vie le 16 novembre 1869.

Salnave connut une fin tragique. Après avoir fait sauter le Palais National, ses adversaires
se saisirent de lui à Pédernales où il s'était réfugié et de là, il fut conduit à Port-au-Prince
pour être fusillé sommairement le 15 janvier 1870 sur les ruines encore fumantes su palais
National. Le principal chef d'accusation contre Salnave était, sans conteste, la violation
flagrante de la Constitution de 1867.

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