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Réalités et enjeux actuels dans la société

Figure 1.4 Le profil de la France en matière d’entrepreneuriat 1


Profils de pays Indice composé

FRANCE Indice de l'esprit entrepreneurial


Valeur
-0,30
Rang/54
46

1389
Auto-perception sur l’entrepreneuriat
Valeur % Rang/54
Opportunités perçues

4941
34,1 41
Capacités perçues 36,3 48
Crainte de l’échec 39,1 25
Intentions entrepreneuriales 17,6 24T

.8:16
Activité
Valeur % Rang
Total des activités entrepreneuriales à un stade

.3
précoce (TAE) TAE 2017
3,9 53/54

6.92
TAE 2016 5,3 60/65
TAE 2015 N/A N/A
Taux de propriété des entreprises établies 3,6 45/54

4:19
Activité entrepreneuriale des employés 3,9 20/54
FRANCE
Indice de motivation

198
Valeur Rang/54
Opportunité entraînée par l’amélioration/ Motif de nécessité 3,0 20T

8887
Égalité des sexes
Population : 66.8 millions (2017) Rang/54
Valeur
PIB : $2421.6 milliards (2015) Ratio femmes/hommes du TAE 0,44 50T

046:
PIB par habitant : $40580 (2017) Ratio femmes/hommes des opportunités 0,69 50T
Contribution des PME au PIB : 58% (2015)
Indice de la Banque mondiale sur la Impact de l’entrepreneuriat
0641
facilité de faire des affaires (2017) : Valeur % Rang/54
Rang : 29/190 Attentes en matière d'emploi (6+) 27,9 13
Indice de la Banque mondiale Innovation 48,6 3
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

sur la création des entreprises


:211

Industrie (% secteur des services commerciaux) 26,5 14


(2017) : Rang : 27/190
Indice de compétitivité mondiale établi
parle Forum économique mondial : Valeur sociétale de l’entrepreneuriat
None

(2015) : 5.2/7 ; Rang 21/138 Valeur % Rang/52


Statut élevé des entrepreneurs 74,2 18
Stade de développement économique :
axée sur l'innovation L’entrepreneuriat comme un bon choix de carrière 59,1 32
com:

Source : GEM [2017]


rvox.
chola
s
univ.

101
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Même du point de vue politique, la création d’entreprise domine le dis-


cours. Une illustration de ce paradoxe se retrouve dans la loi PACTE1,
qui ne déroge pas à cette façon de penser. Le premier volet porte sur la
création d’entreprise avec cinq mesures pour la simplifier.

1389
Plan d’action pour la croissance
et la transformation des entreprises

4941
Le projet de loi PACTE porté par le ministre de l’Économie et des Fi-
nances, Bruno Le Maire, a pour objectif de « donner aux entreprises

.8:16
les moyens d’innover, de se transformer, de grandir et de créer des
emplois ». Le projet de loi comporte vingt-trois mesures réparties en

.3
six volets :

6.92
• cinq mesures qui vont simplifier la création d’entreprise ;
• quatre mesures qui vont simplifier la vie des PME et des ETI ;

4:19
• trois changements à attendre du côté des épargnes et du finance-
ment des entreprises ;

198
• six mesures qui vont dynamiser l’innovation en France ;
• trois mesures qui vont récompenser le travail des salariés ;

8887
• deux mesures pour redéfinir la raison d’être des entreprises.
S’agissant des cinq mesures de la loi portant sur la simplification de
la création d’entreprise, elles concernent la simplification de la créa- 046:
tion d’entreprise par Internet, la centralisation des informations sur
0641

un seul registre dématérialisé, l’habilitation des services de presse en


ligne pour publier les annonces judiciaires de la création d’entreprise,
:211

la suppression de l’obligation de compte bancaire professionnel pour


les micro-entreprises, la suppression de l’obligation de stage de pré-
None

paration à l’installation pour les entreprises artisanales.

Certes, nous pouvons nous réjouir de cette volonté politique. Toutefois,


com:

nous pouvons nous poser la question suivante  : ne sommes-nous pas


comme l’aveugle qui cherche ses clés sous le lampadaire car c’est le seul
rvox.

endroit où il y a la lumière ? En agissant de la sorte, nous ne faisons qu’ai-


der les personnes désireuses de créer une entreprise. Cette façon de pro-
chola

céder exclut de facto tout individu pour qui la création d’entreprise n’est
pas une finalité.
s
univ.

1.  Loi votée en février 2019.

102
Réalités et enjeux actuels dans la société

Ne pouvons-nous pas donc aider ceux qui n’envisagent pas, voire n’osent 1
pas envisager la création d’entreprise comme une finalité à part entière ?
En fait, nous pouvons nous réjouir de l’engouement actuel au sein de
notre société pour tout ce qui touche l’entrepreneuriat, tout en constatant

1389
cependant que cela n’accroît pas durablement les chiffres de la création
d’entreprise. Plus encore, nous pouvons avancer que la création d’entre-
prise n’est pas un objectif en tant que tel pour ceux qui se lancent dans

4941
l’entrepreneuriat. Dit autrement, nous sommes face à un paradoxe : les
futurs entrepreneurs ne sont pas nécessairement intéressés par la création

.8:16
d’entreprise !

.3
1.3  Vers une ubérisation de la société

6.92
L’évolution de la création d’entreprise telle que décrite pose des questions

4:19
et, notamment, la question de l’ubérisation de la société récurrente dans
les médias. Elle véhicule une autre idée de la société, en l’occurrence à

198
travers les nouvelles technologies, et une autre idée de l’organisation du
travail. L’ubérisation de la société est aussi liée à l’idée d’une concurrence

8887
déloyale. Sans aller vers cette dernière, intéressons-nous à l’aspect entre-
preneurial de l’ubérisation de la société.
046:
L’arrivée des nouvelles technologies a apporté de nouvelles possibilités
0641

qui ne pouvaient être couvertes précédemment. On retrouve ici classique-


ment la notion d’innovation chère aux économistes comme Schumpeter.
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

Uber
None

L’ubérisation de la société correspond à un phénomène qui a vu


le jour en 2015 avec l’arrivée en France et, particulièrement, à Paris de
com:

l’entreprise américaine Uber. Cette entreprise, souvent considérée à


tort comme une entreprise de VTC (véhicule de transport avec chauf-
feur), est une entreprise technologique qui développe et exploite une
rvox.

application mettant en relation des utilisateurs et des conducteurs de


véhicule. L’entreprise basée en Californie, à San Francisco, a été créée
chola

par trois hommes, Garrett  Camp, Oscar  Salazar et Travis  Kalanick


en 2009. Sa capitalisation boursière est aujourd’hui de plus de 50 mil-
s

liards de dollars et ses applications sont commercialisées dans plus de


univ.

300 pays dans le monde.

103
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Auparavant, la logique qui dominait au niveau des entreprises était


essentiellement de facture concurrentielle. La chaîne de valeur de Porter
(figure 1.5) dans les années 1980 vient résumer cette logique : la maîtrise
des coûts, la perception du concurrent comme un ennemi et la réduction

1389
des coûts. Un des piliers majeurs qui va de pair avec la logique concurren-
tielle est le salariat.

4941
Figure 1.5  La chaîne de valeur de Porter

.8:16
Infrastructure de l’entreprise
Activités de

Gestion des ressources humaines


soutien

.3
Développement technologique

6.92
Achats

4:19
Opérations

Logistique

Marketing
Logistique

Services

198
entrante

sortante

Ventes

8887
Activités de base Marge 046:
0641

Face à cette logique d’économie et de société, a émergé avec les nouvelles


technologies une autre logique, en l’occurrence partenariale. Cette nou-
:211

velle logique désigne essentiellement une organisation en réseau : l’autre


entreprise est vue comme un partenaire et non plus comme un concur-
None

rent. Les entreprises qui relèvent de ce modèle comme Uber, Amazon,


Booking sont avant tout des assembleurs permettant de faire du lien entre
com:

A qui détient un produit ou un service et B qui souhaite acquérir ce bien


ou ce service.
rvox.
chola
s
univ.

104
Réalités et enjeux actuels dans la société

Figure 1.6  L’ubérisation : le morcellement de l’organisation du travail 1


E4
E1 E3

1389
E6
Entreprise dont le E2
E7
projet nécessite E5

4941
d’autres entreprises EN E8

.8:16
E9 E 10
E 13
E 12

.3
E 11

6.92
On peut y voir une nouvelle division des tâches où cette fois celle-ci ne

4:19
se fait au sein d’une entreprise donnée, mais en développant le nombre
d’entreprises (figure 1.6). L’ubérisation de la société renvoie à l’idée que

198
chacun est responsable de sa partie dans le tout. Cette responsabilité va

8887
jusqu’à être entrepreneur. Les chauffeurs, dans le cas d’Uber, sont pro-
priétaires de leur véhicule. Ils sont entrepreneurs du point de vue de leur
statut. Ils ne sont pas salariés de l’entreprise Uber. Il en va de même dans 046:
la livraison de repas à domicile ou encore dans le bâtiment, où l’artisan
0641

est invité à créer son entreprise plutôt qu’à être salarié d’une entreprise.
Cette façon de faire permet notamment de pallier le manque de clients
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

pour l’entreprise qui serait amenée à salarier des personnes. En favorisant


l’entrepreneuriat, cela permet de donner une flexibilité plus importante
None

au marché. Si le salariat est le pilier de la logique concurrentielle, l’en-


trepreneuriat est le pilier de la logique partenariale. La difficulté de notre
com:

époque est bien là : La confrontation entre ces deux logiques, non seule-
ment avec des fonctionnements différents, mais aussi, et surtout, avec des
rvox.

règles différentes et une organisation du travail différente.


Derrière cette idée d’ubérisation, il s’agit de voir, comme évoqué précédem-
chola

ment, une évolution importante de la société. Déjà, au début des années 1990,


cette évolution vers l’entrepreneuriat prenait corps dans les réflexions. Plus
s

précisément, plus que l’entrepreneuriat, c’est l’idée d’une société à projet qui
univ.

était évoquée. L’entrepreneuriat n’est dans ces conditions qu’un aspect en

105
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

tant que projet particulier. Boltanski et Chiapello [1991] parlaient de cité par
projets par rapport aux cités plus traditionnelles, comme la cité domestique
(famille, tradition…), la cité marchande (concurrence, rivalité) ou encore la
cité industrielle (efficacité, développement scientifique). La cité par projets

1389
renvoie pour les deux auteurs à la notion de réseau, de projets, à l’autonomie
ou encore à la collaboration. Le projet est partout : du projet personnel au
projet professionnel en passant par le projet entrepreneurial. L’ubérisation

4941
n’en est que le prolongement. Le projet structure la société et participe à la
démocratisation de l’entrepreneuriat au sein de la société.

.8:16
Il n’est pas possible de dire si l’ubérisation de la société est bonne ou mau-

.3
vaise. Il est juste possible de constater qu’elle est. Tout simplement. Et,

6.92
comme dans le cadre de tout changement au sein de la société, il risque d’y
avoir des individus qui sauront profiter de la situation et d’autres moins.

4:19
L’ubérisation de la société appelle à des changements organisationnels de

198
fond, de structure auxquels il conviendra de s’adapter autour du projet
entrepreneurial. La question que nous pouvons nous poser du point de

8887
vue entrepreneurial est la suivante : comment accompagner l’ubérisation
de la société ? En effet, le risque est grand dans la société qui se dessine
que les entrepreneurs ne soient pas assez armés car l’entrepreneuriat est 046:
avant tout vécu comme une contrainte. Il convient donc de les préparer
0641

au mieux à travers le développement d’une culture entrepreneuriale.


:211

2  Enjeux
None

L’objectif de la présentation de l’évolution de l’entrepreneuriat, menée dans


la première partie de cet ouvrage, est de comprendre les enjeux de l’entre-
com:

preneuriat d’aujourd’hui. Pour cela, la grille de lecture mobilisée est celle de


l’agir entrepreneurial. Ainsi, trois enjeux sont envisagés dans la suite de la
rvox.

réflexion :
ff Le premier enjeu est relatif au fait de considérer l’entrepreneuriat
chola

uniquement sous l’angle de la création d’entreprise. Comme nous


avons pu le constater, c’est loin d’être la motivation première des
s

entrepreneurs.
univ.

106
Réalités et enjeux actuels dans la société

ff Le deuxième enjeu est la conséquence du premier. L’amont de l’entre- 1


preneuriat, longtemps négligé, devient un élément important. C’est là
que beaucoup de choses se jouent en matière d’entrepreneuriat.
ff Le troisième et dernier enjeu revient sur la nécessité de développer une

1389
culture entrepreneuriale très en amont pour apporter une représenta-
tion différente de celle qui considère de façon réductrice l’entrepre-

4941
neuriat sous l’unique angle de la création d’entreprise.

2.1  Ne pas limiter l’entrepreneuriat

.8:16
à la création d’entreprise

.3
Maintes fois, l’expérience a été menée dans les quatre coins de la France :

6.92
les activités en lien avec la création d’entreprise attirent du monde certes,
mais principalement des gens qui ont globalement l’envie de créer. On

4:19
entend même les acteurs de l’accompagnement se plaindre que ce sont
souvent les mêmes personnes que l’on voit dans ces activités.

198
Comment expliquer ce constat ? Tout simplement par le fait que la création

8887
d’entreprise n’est pas la finalité des individus de façon générale. En parlant
de création d’entreprise, seules certaines personnes se sentent concernées.
Les autres n’apparaissent pas à l’avant-scène. Or, il serait intéressant de 046:
pouvoir toucher un grand nombre d’individus pour leur épargner d’être
0641

dans une forme d’autocensure face à l’entrepreneuriat. C’est là le grand


malentendu français [Schmitt, 2018].
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

Parler d’entrepreneuriat se réduit trop souvent à la création d’entreprise.


None

Or, pour créer une entreprise, il faut un projet entrepreneurial porté par un
entrepreneur en lien avec son écosystème. Si on se référait donc à la défini-
tion de l’agir entrepreneurial, plutôt que de parler de création d’entreprise,
com:

il conviendrait de permettre l’expression des projets entrepreneuriaux des


uns et des autres et de voir comment il est possible d’aider les individus à se
rvox.

faire une expérience.


chola

En se positionnant essentiellement sur la partie avale de l’entrepreneu-


riat, c’est-à-dire la création d’entreprise, on se rend à l’évidence que ne
pourront être aidés que ceux qui souhaitent créer une entreprise. En
s
univ.

fait, pour amener des individus à entreprendre alors qu’ils ne pensaient

107
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

pas forcément créer une entreprise, il convient d’agir sur la partie


amont de l’entrepreneuriat en les amenant à se faire une expérience de
l’entrepreneuriat.
Dans une certaine mesure, les actions et les moyens mis en place appa-

1389
raissent comme tautologiques. Ils ne servent qu’à ceux qui avaient de
toute façon l’envie de créer. Dans cette perspective, l’entrepreneuriat est

4941
envisagé comme un résultat et non comme un projet « chemin faisant ».
Cette logique de résultat est confortée à certains niveaux dans la mesure

.8:16
où certaines collectivités territoriales vont octroyer des financements en
fonction du nombre de créations d’entreprises. Cela peut engendrer des

.3
situations ubuesques où on amène des personnes à créer une entreprise à

6.92
force de persuasion sans que cela ne corresponde à une situation mature
pour le faire. Dans cette logique de résultat, on trouve, dans cette phase,

4:19
pléthore d’acteurs rendant des fois illisibles l’action des uns et des autres
auprès des entrepreneurs. De plus, les moyens humains, techniques et

198
financiers y sont concentrés (figure 1.7).

8887
046:
0641
:211
None
com:
rvox.
chola
s
univ.

108
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Figure 1.7  La perception des structures entrepreneuriales en France : évaluation des experts
du cadre entrepreneurial national (classé parmi 54)

Europe France 1 : Très insuffisant, 9 : Très suffisant

Financement des entreprises


4,48 4,62 19/54
Politiques gouvernementales :
Normes culturelles et sociales
Soutien et pertinence
4,54 4,34 37/54
4,18 5,56 6/54
Politiques gouvernementales :
Infrastructures physiques
Taxes et bureaucratie
6,65 7,16 9/54
3,98 5,00 8/54

Contraintes du marché Programmes


interne ou réglements gouvernementaux
d’entrée 4,43 4,06 34/54 sur l’entrepreneuriat
4,59 5,36 9/54
univ.
s cDynamiques
holar du marché Éducation entrepreneuriale
interne 4,80
vox4,48
.co40/54 à l’école 3,37 3,02 28/54
m:No
ne:2
Infrastructure 1106 Éducation entrepreneuriale
commerciale et juridique 4104 postscolaire
5,24 5,20 13/54
6 :888 4,76 5,44 11/54
7 1
Transfert R&D 4,20 4,86 5/54984:1
96.9
2.3.8
:164

109
Réalités et enjeux actuels dans la société

9411Source : GEM (2017)


389
1
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Sans doute, en France, on sait fort bien aider des créateurs d’entreprise
qui ont décidé de créer ; cependant, amener les personnes à entreprendre
reste encore chose à faire. Il n’est jusque-là possible d’aider que ceux qui
ont décidé d’entreprendre. Par conséquent, la question à se poser est

1389
simple : comment aider les personnes et toute personne à entreprendre ?
Cette question renvoie, à nouveau, au développement de la culture entre-
preneuriale sur le territoire.

4941
Beaucoup de choses se passent lors de la création d’entreprise. À l’inverse,

.8:16
force est de constater qu’il n’en va pas de même en ce qui concerne la
phase amont de l’entrepreneuriat. Cela peut se comprendre notamment

.3
par le fait du manque de prise de conscience au niveau national de l’im-

6.92
portance de cette phase par rapport à la phase avale où la majorité des
ressources sont engagées.

4:19
2.2  Prendre en considération la phase amont

198
de l’entrepreneuriat

8887
L’intérêt porté à la phase amont de l’entrepreneuriat permet de com-
prendre le paradoxe évoqué précédemment autour du manque d’intérêt
par rapport à la création d’entreprise en France. Il est possible de faire 046:
le constat régulièrement que les personnes ne sont pas intéressées par la
0641

création d’entreprise.
La distance est grande entre un projet entrepreneurial et la création d’en-
:211

treprise. Si on part de la définition de l’agir entrepreneurial, on verra bien


que la motivation première des entrepreneurs se situe dans leur posture
None

au monde, c’est-à-dire dans le désir de développer un projet, de partici-


per à la société à leur façon. Ce projet est la traduction de leur vision du
com:

monde et de leurs valeurs propres. Deux constats importants sont à faire


ici :
rvox.

ff La création d’entreprise est rarement présente dans le discours des


entrepreneurs [Schmitt, 2017].
chola

ff Quand ils sont interrogés sur la place de la création d’entreprise, on


se rend bien souvent à l’évidence que l’idée de création d’entreprise
s
univ.

paraît très éloignée par rapport à leur idée de départ.

110
Réalités et enjeux actuels dans la société

De ces deux constats, il est possible de considérer que la création d’en- 1


treprise est plus un des résultats possibles d’un parcours qu’un objectif
en tant que tel. Et, cependant, les actions des politiques à destination
de l’entrepreneuriat tout autant que les actions d’accompagnement à

1389
l’entrepreneuriat, relèvent de la même finalité  : favoriser la création
d’entreprise. Or, il serait opportun dans une société qui s’ouvre large-
ment à la notion de startup d’axer les moyens sur l’émergence du projet

4941
entrepreneurial.

.8:16
Dans une perspective d’agir entrepreneurial, il s’agit de reconsidérer l’en-
trepreneuriat non plus comme un résultat, mais comme une expérience

.3
en continu. Certes, il n’est pas évident d’identifier l’impact des moyens

6.92
mis en amont sur une création d’entreprise à venir. Là aussi, il convient
de faire évoluer les indicateurs pour ne pas se limiter à des indicateurs de

4:19
résultats, mais aussi avoir des indicateurs de processus et de contexte. En
amont, il est donc nécessaire de mesurer le développement de la culture

198
entrepreneuriale.

8887
Pour cela, il faut décloisonner les phases amont et avale de l’entrepreneu-
riat1. La phase amont ne peut pas être identifiée à l’objectif de la phase
avale : la création d’entreprise. En effet, la phase amont a pour objectif le 046:
développement de la culture entrepreneuriale et c’est cela qu’il convient
0641

de mesurer. Les futures réussites se trouvent dans la phase amont. Si nous


voulons les voir advenir, il est nécessaire de mettre des moyens sur cette
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

phase amont.
None
com:
rvox.
chola
s
univ.

1.  Sur ce point voir le chapitre suivant.

111
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Quels sont les besoins dans cette phase ?


Il est possible d’envisager trois types de besoin à ce niveau [Schmitt,
2018] :
• des besoins relatifs aux porteurs de projet. Ils se situent essentielle-

1389
ment dans les aspects suivants : la confiance en soi et l’estime de soi ;
• des besoins relatifs au projet entrepreneurial. Ils se situent dans
la cohérence du projet développé et la connaissance des valeurs

4941
défendues par le porteur de projet ;
• des besoins relatifs aux acteurs de l’écosystème. Les porteurs de

.8:16
projet ont besoin non seulement d’identifier les acteurs de l’éco-
système qu’ils pourraient rencontrer, mais aussi d’amener les ac-

.3
teurs de l’écosystème à s’engager dans leur projet.

6.92
Si l’on convenait de ces besoins, on s’intéresserait dès lors non seule-
ment à la phase amont de l’entrepreneuriat, mais aussi à la manière

4:19
de permettre la transformation de l’idée en concrétisation du projet,
autrement dit, le passage de la phase amont à la phase avale.

198
Les acteurs de la phase amont ne sont pas nécessairement les mêmes que

8887
ceux la phase avale. En effet, si les besoins ne sont pas les mêmes, cela
signifie que les compétences requises pour aborder la phase amont ne
sont pas celles en lien avec la phase avale. 046:
Dans cette perspective, à travers le programme PEPITE1, les universités
0641

françaises se sont largement positionnées comme des acteurs territoriaux


de la phase amont. C’est dans cet esprit que dernièrement a vu le jour un
:211

réseau national au niveau de la CPU (conférence des présidents d’univer-


sités) à l’initiative de l’université de Lorraine et de l’université de Lyon 3,
None

autour d’une ambition à développer, celle d’une « université entrepreneu-


riale ». D’autres acteurs leur ont emboîté le pas avec la volonté de sensibi-
com:

liser lycéens et collégiens, afin de développer la culture entrepreneuriale


auprès des plus jeunes encore.
rvox.

À l’heure actuelle, il semble important, voire indispensable, que le regard


porté sur l’entrepreneuriat évolue notablement pour se positionner sur la
chola

manière dont nous pouvons aider les individus à porter leur projet et non
simplement à s’intéresser à la création d’entreprise. C’est bien là l’enjeu
s

d’une nécessaire évolution culturelle au sein de notre pays.


univ.

1.  Pôles étudiants pour l’innovation, le transfert et l’entrepreneuriat.

112
Réalités et enjeux actuels dans la société

2.3 la nécessité de développer une culture 1


entrepreneuriale dans la société
L’étude évoquée précédemment montre bien que l’intérêt initial n’est pas
de créer une entreprise mais de porter un projet entrepreneurial pour par-

1389
ticiper à la société (figure 1.8). Ainsi, le projet entrepreneurial agit comme
un vecteur de la culture entrepreneuriale.

4941
Figure 1.8 Les motivations des entrepreneurs

.8:16
53% ne

.3
souhaitent pas

6.92
créer
d’entreprise

4:19
198
8887
046:
1er intérêt :
0641

porter une idée


© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211
None

2e intérêt :
participer à la
com:

société
rvox.
chola

3e intérêt :
se faire une
expérience
s
univ.

Source : V&O ME (2018)

113
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

À partir de ce constat, l’entrepreneuriat se comprend non comme une


motivation intrinsèque de l’entrepreneur mais comme la résultante d’un
processus dont la création d’entreprise serait éventuellement la consé-
quence. Dans ces conditions, on voit bien qu’il faut faire évoluer le dis-

1389
cours ambiant pour ne pas se focaliser sur la création d’entreprise, mais
plus sur le projet entrepreneurial.

4941
En d’autres termes, il faut développer avant tout la culture entrepreneu-
riale. Car il s’agit bien d’être entreprenant avant d’être entrepreneur.

.8:16
Le concept de l’agir entrepreneurial, présenté initialement, va bien
dans le sens de développer la culture entrepreneuriale en permettant à

.3
l’entrepreneur de se faire une expérience à travers son projet entrepre-

6.92
neurial. L’objectif est double au niveau de la culture entrepreneuriale à
développer :

4:19
ff donner confiance aux individus afin qu’il puisse exprimer leur idée
sans qu’on ait anticipé leur volonté de créer une entreprise ;

198
ff permettre à ceux qui ont des idées de pouvoir être accompagnés pour

8887
les développer et non dans le but de créer une entreprise.

046:
0641
:211
None
com:
rvox.
chola
s
univ.

114
Réalités et enjeux actuels dans la société

La culture entrepreneuriale 1
La culture entrepreneuriale se définit comme l’ensemble des va-
leurs, des façons de penser et d’agir, conscientes ou inconscientes
qui orientent le comportement des personnes, des organisations, des

1389
politiques à l’égard de l’entrepreneuriat. Habituellement, la culture
entrepreneuriale est envisagée à travers six dimensions.

4941
Figure 1.9  La culture entrepreneuriale

.8:16
Capacités à
entreprendre

.3
6.92
Prise de
responsabilités

4:19
198
Peur d’entreprendre

8887
Culture
entrepreneuriale
Traits
entrepreneuriaux 046:
0641

Recherche
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

d’opportunités
:211
None

Motivation
entrepreneuriale
com:

Source : Stephan [2007]


rvox.

L’idée souvent entendue ces dernières années de faire de la France une


« startup nation » passe par le développement de la culture entrepreneu-
chola

riale plus que par les créations d’entreprises. Paradoxalement, il est pos-
sible d’avancer que moins on parlera de création d’entreprise auprès des
s

individus, plus il y en aura.


univ.

115
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Cette culture entrepreneuriale passe par l’ensemble des sphères de la


société, notamment la cellule familiale, les enseignements et ainsi que les
entreprises elles-mêmes. Beaucoup de travaux ont montré l’importance
du rôle de la famille et, notamment, lorsqu’il y a des entrepreneurs dans

1389
la famille [Krueger, 2007 et Léger-Jarniou, 2008]. Le rôle des enseignants
n’est pas neutre non plus : trop souvent, le modèle de la grande entreprise
est le modèle implicite dans l’enseignement et, plus largement, dans la

4941
société [Schmitt, 2017]. L’enseignement sous toutes ses formes a un rôle à
jouer en matière de culture entrepreneuriale vu le nombre d’années qu’un

.8:16
jeune passe en formation.

.3
De plus, la culture entrepreneuriale ne peut se limiter à la création d’en-

6.92
treprise comme on le voit encore trop souvent dans les programmes de
sensibilisation et de formation. Il s’agit avant tout de développer le goût

4:19
d’entreprendre et d’être entreprenant qui pourra être mobilisé dans dif-
férentes circonstances, y compris en dehors de la création d’entreprise.

198
Pour développer cette culture, il convient de permettre à ceux qui le
souhaitent de se retrouver en situation entrepreneuriale. Trop souvent,

8887
ce sont des organismes extérieurs qui décident de la vie ou de la mort
d’un projet entrepreneurial. Étant donné que personne ne connaît l’ave-
nir, c’est potentiellement mettre de côté des projets qui, chemin faisant, 046:
peuvent être de belles réussites entrepreneuriales.
0641

S’il convient de donner le plus de chance possible aux projets entrepre-


:211

neuriaux, il faut donner la possibilité à un grand nombre de s’essayer à


l’entrepreneuriat. Toutefois, il ne faut pas les accompagner de façon tra-
None

ditionnelle autour de la création d’entreprise, mais mobiliser d’autres


façons de faire, comme nous le montrerons dans le dernier chapitre de
com:

cette partie. Pour aller plus loin, il conviendrait de détacher la culture


entrepreneuriale de la création d’entreprise.
rvox.

On peut résumer les approches sur l’entrepreneuriat autour de la ques-


tion «  que fait l’entrepreneur  ?  », la réponse apportée actuellement est
chola

la suivante : « il crée une entreprise ! ». Or, du point de vue de la culture


entrepreneuriale, la création d’entreprise n’est pas la seule perspective.
s

Cela peut déboucher sur d’autres formes d’organisation comme les asso-
univ.

ciations, les ONG… ou encore se traduire dans un emploi salarié.

116
Réalités et enjeux actuels dans la société

Pour faire le lien avec l’approche du comportement entrepreneurial pré- 1


senté dans la partie précédente, autant l’intentionnalité de l’entrepreneur
est une thématique à creuser pour comprendre l’entrepreneuriat autant
l’intention entrepreneuriale ne semble pas être une bonne mesure pour

1389
comprendre l’entrepreneuriat. Plus globalement, il est possible d’entre-
prendre sans intention entrepreneuriale ; néanmoins, sans intentionnalité
il n’y a pas d’entrepreneuriat.

4941
.8:16
Synthèse

.3
ff La fabrique de l’entrepreneuriat permet d’envisager l’entrepreneuriat

6.92
sous l’angle de l’action et non uniquement de la décision.
ff Le projet entrepreneurial est un élément important dans la fabrique

4:19
de l’entrepreneuriat.
ff L’entrepreneuriat est constitué de l’état gazeux et de l’état de cristal-

198
lisation. Les deux états sont complémentaires et reflètent des situa-
tions différentes.

8887
ff Pour comprendre l’entrepreneuriat aujourd’hui, il faut prendre en
considération à la fois l’entrepreneur, le projet entrepreneurial et les
acteurs de l’écosystème. C’est le modèle des 3M.
046:
0641
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211
None
com:
rvox.
chola
s
univ.

117
univ.
schola
rvox.
com:
None
:211
0641
046:
8887
198 4:19
6.92
.3 .8:16
4941
1389
2 La fabrique
de l’entrepreneuriat
pour aborder

1389
l’entrepreneuriat

4941
aujourd’hui

.8:16
.3
6.92
Mots-clés

4:19
Fabrique de l’entrepreneuriat, projet entrepreneurial, pertinence, robus-

198
tesse, cohérence, état gazeux, état de cristallisation, modèle des 3M, sys-
témique

8887
Introduction
046:
Dans la lignée de l’agir entrepreneurial, centré sur l’action de l’entre-
0641

preneur, il convient de sortir de la logique axée sur la décision de créer


une entreprise pour considérer l’entrepreneuriat dans sa globalité  : il
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

s’agit d’aller de l’idée à la création d’entreprise. Dans cette perspective, la


fabrique de l’entrepreneuriat renvoie à cette idée d’action et de globalité.
None

La première section de ce chapitre présente ce qu’il faut comprendre der-


rière l’idée de fabrique de l’entrepreneuriat. Le point essentiel consiste à
com:

opter pour une approche plus sophistiquée, afin de prendre en compte les
différentes facettes de l’entrepreneuriat.
rvox.

Dans la seconde section, l’introduction de la distinction entre l’état


gazeux et l’état de cristallisation vient caractériser cette représentation
chola

plus sophistiquée de l’entrepreneuriat. En se focalisant de très près sur cet


état gazeux, on voit émerger trois dimensions à prendre en considération
s
univ.

du point de vue systémique :

119
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

•• l’intentionnalité de l’entrepreneur ;
•• son rapport au monde ;
•• le projet entrepreneurial comme traduction de cette intentionnalité et
les acteurs de l’écosystème pour confronter le projet entrepreneurial

1389
de l’entrepreneur.

4941
Ce triptyque, qui caractérise le modèle des 3M, peut être considéré comme
élément structurant de la fabrique de l’entrepreneuriat.

.8:16
1  Comprendre la fabrique

.3
de l’entrepreneuriat

6.92
4:19
La fabrique de l’entrepreneuriat est une réponse aux enjeux actuels de
l’entrepreneuriat. Elle permet de ne pas considérer la création d’entreprise

198
comme une finalité attendue par les entrepreneurs. La fabrique de l’en-
trepreneuriat favorise aussi la prise en considération de la phase amont

8887
de l’entrepreneuriat. Le développement d’une culture entrepreneuriale
passe l’imprégnation de l’entrepreneuriat sous ses différentes coutures et,
notamment, cette phase amont autour du projet entrepreneurial. 046:
0641

1.1  Définition et caractéristiques


de la fabrique de l’entrepreneuriat
:211

Le développement de la culture entrepreneuriale passe par une question


None

essentielle : comment se fabrique l’entrepreneuriat ? En effet, il convient


de comprendre la phase amont de l’entrepreneuriat afin de mettre en
com:

place des actions en cohérence avec l’agir entrepreneurial.


rvox.
chola
s
univ.

120
La fabrique de l’entrepreneuriat pour aborder l’entrepreneuriat aujourd’hui

Illustration

2
Pour définir la fabrique de l’entrepreneuriat, faisons un parallèle
sportif. En effet, l’entrepreneur dans la phase amont est pareil à l’in-
dividu qui débute un sport. Il existe des règles qu’il ne connaît pas

1389
forcément, tout au plus en maîtrise-t-il les grandes lignes. Il doit
jouer avec d’autres personnes sans savoir particulièrement leur rôle
et leur fonction. Des objets existent comme des balles, des raquettes,

4941
des battes, qu’il faut utiliser à bon escient. Dans les tribunes, des spec-
tateurs sont présents et peuvent jouer un rôle en fonction de la phy-

.8:16
sionomie de la partie.
L’individu qui se retrouve sur un terrain de sport ne peut pas se li-

.3
miter à regarder l’action. Il est aussi sujet de l’action. Il découvre en

6.92
agissant. Cela l’amène à tirer des conclusions sur la situation et à
prendre des décisions. Certaines de ses conclusions seront peut-être

4:19
erronées, il les réactualisera en fonction des informations récupérées
en situation.

198
Dans une large mesure ce qui arrive à l’individu qui va s’engager
dans un sport est la même chose que ce qui va arriver à l’entre-

8887
preneur quand il s’engage dans l’entrepreneuriat. La fabrique de
l’entrepreneuriat met en relation l’entrepreneur, son projet et les
acteurs de l’écosystème.
046:
La fabrique de l’entrepreneuriat est la conception d’un projet entrepre-
0641

neurial par l’entrepreneur à destination des acteurs de l’écosystème.


L’interaction entre ces trois éléments, l’entrepreneur, le projet entrepre-
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

neurial et les acteurs de l’écosystème, constitue ce qu’il convient d’appeler


une situation entrepreneuriale.
None

Pour fabriquer l’entrepreneuriat, il est donc nécessaire dans un pre-


com:

mier temps de concevoir un projet entrepreneurial. Sans revenir sur la


notion de projet entrepreneurial1, il convient de s’intéresser à une com-
rvox.

pétence importante et pourtant peu présente dans les référentiels 2 : la


conception.
chola

1.  Sur ce point voir le point D de la partie 1


s
univ.

2.  Pour une présentation d’un référentiel de compétences en entrepreneuriat : enpc.


fr/download/152954

121
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Pourquoi la notion de conception est-elle restée


hors du champ de l’entrepreneuriat ?
La notion de conception est demeurée longtemps en dehors du
champ de l’entrepreneuriat pour deux raisons :

1389
• La conception est avant tout une œuvre divine. Dans l’approche
chrétienne, seul Dieu est capable de concevoir. Dans cette pers-
pective, prévaut «  une création du monde à partir du néant par

4941
l’action du seul et unique Dieu créateur » [Joas, 1996]. On parlera
de création ex nihilo. Cette tradition chrétienne se retrouve aussi

.8:16
dans la tradition grecque. Les mythes grecs n’ont pas de lien avec
la création  ; ils ne sont que le résultat de l’action divine. Il faut

.3
attendre le protestantisme pour donner à l’homme la possibilité de

6.92
concevoir. L’idée est de pouvoir montrer qu’on est digne du Créa-
teur comme les deux serviteurs récompensés par le maître dans la

4:19
parabole évangélique des talents.
• Dans une perception plus moderne de la conception, sans négliger

198
toutefois les liens pouvant exister avec la culture religieuse dans la
société, l’organisation du travail prônée par Taylor et Ford dans les

8887
années  1900, conception et réalisation, sont deux activités sépa-
rées. La conception renvoie à ce qu’on appelle la recherche et le dé-
veloppement (R & D). Ce sont souvent des postes qui renvoient à
des connaissances essentiellement techniques pour développer de
046:
0641
nouveaux produits, de nouvelles applications ou encore une nou-
velle ligne de production. La conception se différencie de l’activité
productive permettant de générer de la valeur. En d’autres termes,
:211

l’idée répandue est que la conception ne crée pas de valeur.


None

À l’opposé de l’approche classique, la conception peut être envisagée


comme une compétence mise en œuvre au quotidien. Par exemple,
com:

une personne qui souhaite partir en vacances met en place une activité
de conception. Même à court terme, elle est amenée à concevoir, ne
rvox.

serait-ce que pour savoir où aller au restaurant à la fin de la semaine.


Pour cela, elle est amenée à formuler des hypothèses au niveau du
chola

nombre de participants et du type de restaurant en fonction des per-


sonnes qui seront présentes. Si chacun paie sa part ou si la personne
invite tout le monde, l’hypothèse concernant le choix du restaurant ne
s
univ.

sera pas forcément la même.

122
La fabrique de l’entrepreneuriat pour aborder l’entrepreneuriat aujourd’hui

À  travers ces exemples, il est possible de considérer la conception


comme une activité quotidienne exercée par tout un chacun. Ainsi,
concevoir n’est pas l’apanage de l’entrepreneur bien, au contraire.
Toutefois, il convient d’amener l’entrepreneur à prendre conscience de
2

1389
cette compétence et de façon plus générale, de pouvoir la travailler,
notamment autour de formations dans le domaine de la culture entre-
preneuriale. La conception a pour intérêt de donner naissance à un

4941
artefact provenant de la représentation que se fait l’entrepreneur par
rapport à son écosystème.

.8:16
1.2  L’importance du projet entrepreneurial

.3
dans la fabrique de l’entrepreneuriat

6.92
À travers ce point, il s’agit de s’intéresser à la manière dont la fabrique

4:19
de l’entrepreneuriat se met en action. Le point central de la fabrique de
l’entrepreneuriat est la construction du projet entrepreneurial comme

198
artefact en lien avec les acteurs de l’écosystème.

8887
Le projet entrepreneurial ne doit pas être vu comme un objectif figé et
immuable. Bien au contraire, il est évolutif en fonction de l’expérience
que se fait l’entrepreneur sur le terrain. Régulièrement, l’entrepreneur est 046:
amené à confronter son projet entrepreneurial auprès des acteurs de l’éco-
0641

système avec pour objectif de les faire adhérer, pour reprendre la notion
introduite par Sarasvathy [2008], afin de passer une étape, comme faire
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

:211

un prototype, proposer une offre commerciale, avoir un premier client,


rencontrer des personnes pour faire avancer le projet…
None

Le projet entrepreneurial envisagé peut être revisité, voire abandonné en


fonction des remarques et/ou besoins des acteurs de l’écosystème. C’est
com:

pour cela qu’on parle d’entreprendre « chemin faisant ». Ce projet entre-


preneurial est composé de différentes questions portant sur le modèle
rvox.

d’affaires envisagé, c’est-à-dire comme créer de la valeur, sur les fournis-


seurs, sur les partenaires, sur les clients…
chola

Le projet entrepreneurial n’est pas une vérité immuable. Il n’est qu’une


représentation construite par l’entrepreneur. Pour rappel, le projet entre-
s
univ.

preneurial n’est que la traduction du rapport au monde de l’entrepreneur.

123
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

Il est l’histoire à raconter aux acteurs de l’écosystème, histoire est basée


sur l’intentionnalité de l’entrepreneur. Dans ce sillage, elle va permettre la
traduction de cette intentionnalité et va constituer le projet entrepreneu-
rial à part entière.

1389
Exemple de projet entrepreneurial : le cas Sthore

4941
Lisa, Mathias et Sandro ont une idée qu’ils partagent depuis quelque
temps  : une box-découverte de produits internationaux sans
gluten. Le projet entrepreneurial est construit de la façon suivante :

.8:16
une plateforme type site web pour présenter les produits sélection-
nés, des fournisseurs labélisés sans gluten, des boxes en fonction des

.3
pays, un modèle économique basé pour moitié sur des abonnements

6.92
mensuels et pour l’autre moitié sur la vente de produits au choix, des
clients ciblés par rapport aux réseaux sociaux « sans gluten », un par-

4:19
tenariat avec un livreur reconnu… Chaque élément du projet entre-
preneurial est une hypothèse plausible à valider auprès des acteurs de

198
l’écosystème. Au niveau projet entrepreneurial, l’objectif est donc de
tester le projet entrepreneurial.

8887
Pour construire son projet entrepreneurial, l’entrepreneur est amené à
se poser différentes questions et à développer un certain nombre d’hy- 046:
pothèses plausibles. Le projet entrepreneurial est une projection dans un
0641

futur souhaité. Celui-ci va lui permettre d’orienter son action pour faire
advenir son projet entrepreneurial. À ce niveau, il n’est pas intéressant
:211

de faire faire un plan d’affaires, ou une étude de marché. Connaître les


concurrents en les recherchant sur Internet par exemple est amplement
None

suffisant dans un premier temps pour se positionner.


Aux entrepreneurs de faire la démonstration qu’il y a de la place pour
com:

eux ; il ne revient cependant pas aux acteurs de l’écosystème d’arrêter


le projet. L’entrepreneur se doit d’être proactif par rapport aux acteurs
rvox.

de l’écosystème. C’est à lui de faire la démonstration que son projet


entrepreneurial comme traduction de sa représentation est acceptable
chola

ou, mieux encore, est la bienvenue auprès des acteurs de l’écosystème.


Les acteurs de l’écosystème peuvent à tout moment évaluer la qualité du
s

projet entrepreneurial proposé. Pour cela, ils sont amenés à évaluer trois
univ.

dimensions (figure 2.1).

124
La fabrique de l’entrepreneuriat pour aborder l’entrepreneuriat aujourd’hui

Figure 2.1  Les différentes dimensions d’évaluation


d’un projet entrepreneurial

La pertinence 2

1389
4941
.8:16
L’évaluation

.3
d’un projet

6.92
entrepreneurial

4:19
La cohérence La robustesse

198
ff La première dimension est la pertinence du projet entrepreneurial,

8887
c’est-à-dire la logique du sens de celui-ci. En d’autres termes, il s’agit
de voir si le projet entrepreneurial, plus particulièrement le sens du
projet entrepreneurial, est ancré dans le contexte actuel. Le projet
entrepreneurial proposé peut être dépassé. Aujourd’hui, il semble
046:
illusoire de développer une application fonctionnant sur iPhone  3,
0641

par exemple. Le projet peut être aussi illogique. L’exemple le plus par-
© Dunod. Toute reproduction non autorisée est un délit

lant est de se lancer dans un projet entrepreneurial si le porteur n’a


:211

aucune connaissance dans le domaine. Autre exemple, vouloir mon-


ter un magasin, un restaurant sans le moindre argent et sans vouloir
None

s’associer avec qui que ce soit. En revanche, si le projet entrepreneu-


rial consiste à trouver un partenaire, dans ce cas, son sens pourra être
com:

considéré comme pertinent. On voit ici que la pertinence du projet


entrepreneurial est complètement relative.
rvox.

ff La deuxième dimension est la cohérence du projet entrepreneurial.


Trop souvent le projet entrepreneurial est évalué à l’aune de sa faisabi-
chola

lité. À ce stade, personne n’est encore capable de connaître l’avenir ni


de prédire si le projet est voué à la réussite ou à l’échec. En revanche,
s

à ce stade du développement, il est possible d’évaluer la cohérence


univ.

du projet de l’entrepreneur, évaluation qui revient à regarder si les

125
B L’entrepreneuriat aujourd’hui

hypothèses plausibles s’accordent bien entre elles. Par exemple, le prix


est-il en cohérence avec la cible envisagée ? Le réseau de distribution
est-il en adéquation avec les besoins ? Les fournisseurs identifiés cor-
respondent-ils au niveau de qualité envisagée ? Etc.

1389
ff La troisième et dernière dimension correspond à la robustesse du pro-
jet entrepreneurial, c’est-à-dire à sa stabilité dans le temps. La confron-

4941
tation à différentes reprises de ce projet avec les différentes postures
des acteurs de l’écosystème va permettre d’en tester la robustesse. En

.8:16
effet, plus le projet entrepreneurial est pertinent et cohérent, et moins
l’entrepreneur sera amené à le faire évoluer. Cela signifie qu’il doit
avoir intégré les principales questions qui peuvent être posées concer-

.3
6.92
nant toutes ses dimensions. De façon générale, la robustesse du projet
entrepreneurial va dépendre non seulement du projet, mais aussi de

4:19
la capacité de l’entrepreneur à intégrer les remarques des acteurs de
son écosystème. L’intérêt de la robustesse du projet entrepreneurial

198
est d’amener de la confiance en soi et une meilleure estime de soi par
rapport au projet.

8887
2  La fabrique de l’entrepreneuriat 046:
en action
0641

Le fait de considérer le projet entrepreneurial comme un point essentiel


:211

de la fabrique de l’entrepreneuriat renvoie bien à l’idée que ce n’est pas la


création d’entreprise qui est le moteur de l’entrepreneuriat. En précisant
None

cette idée dans le point suivant, il est possible de considérer deux états au
niveau de la fabrique de l’entrepreneuriat :
com:

•• l’état gazeux, correspondant à celui où les choses se construisent ;


•• l’état de cristallisation où l’objectif est de réaliser le projet entrepreneu-
rvox.

rial notamment sous forme d’entreprise.


chola

Dans cette perspective, l’articulation entre l’entrepreneur, son projet


entrepreneurial et les acteurs de l’écosystème devient le pilier à prendre
en considération ensemble pour aborder l’entrepreneuriat.
s
univ.

126

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