Vous êtes sur la page 1sur 9

États, territoires,cultures et societés au MO

1.Geneses nationales et legitimite étatique

1.MO;une statogenèse moderne

une statogenese moderne au MO basée sur :

des régimes anti-impérialistes, antisionistes et socialement progressistesRessurgissant périodiquement


(Répu blique arabe unie regroupant, de 1959 à 1961, l'Égypte, la Syrie et le Yémen), notamment face à
l'État d'Israel proclamé en 1948

Une première phae vers l'émancipation se place dans les années 1930. Les royaumes d'Irak et d'Egypte
deviennent respectivement indépendants en 1932 et 1936: concernant laSyrie et le Liban, les promesses
de levée des mandats français faites en 1936 ne deviennent effectives qu'en 1943.

une deuxième phase d'émancipation des années 1960 , s'opère un basculement vers un progressisme anti-
impérialiste à tendance laïque, incarné par des régimes autoritaires (Égypte dès 1952 : colonel Nasser /
Irak dès 1958)

En Iran et en Turquie, le lien entre nationalisme, modernité et occidentalisation se forme de façon plus
précoce et spectaculaire.(kemalisme en turquie-l'entreprise la plus radicale d'imitation de l'Occident (en
particulier de la laïcité à la française/Iran:en 1941 Mohammed-Reza, père de la « révolutionblanche
lancée en 1963 pour sortir le pays du sous-développement: la Révolution islamique le renversera en
1979)

B. Une légitimation religieuse:constitution d'inspiration ethno-religieuse

Les États du Golfe fondent une légitimité de type traditionnel et théocratique. De fortes différences
distinguent et même opposent les pétromonarchies sunnites, au premier rang desquelles le royaume des
Saoud, à une République islamique d'Iran d'obédience chiite, issue de la révolution de 1979.

En Arabie Saoudite, royaume proclamé en 1932, les Saoud se réfèrent au Coran comme seule constitution
du pays; tout nouveau souverain doit être approuvé par les oulémas. Le pouvoir s'appuie également sur
une organisation tribale et aristocratique dominée par les quelque milliers (nombre exact inconnu...) de
membres de la famille royale.

La République islamique d'Iran est une théocratie en 1989 par l'ayatollah , le dignitaire religieux le plus
compétent, promu guide de la révolution, exerce un pouvoir d'impulsion et d'arbitrage au sein d'un
écheveau institutionnel particulièrement complexe. À la différence de l'Arabie Saoudite, la constitution
reconnaît pourtant la souveraineté populaire, même si son expression demeure très encadrée .

C. Une citoyenneté active: Israël, Liban, demain Palestine?

Dès son indépendance (1943), le Liban, historiquement cosmopolite (35 à 40% de chrétiens, 60 % à 65
% de musulmans -chiites et sunnites pesant du même poids), opte pour un nationalisme
multicommunautaire, gravé dans le marbre avec l'informel - pacte national » alors élaboré: les
différentes communautés se partagent, au prorata de leur poids démographique, les fonctions
administratives et politiques : le président de la République est maronite, le président du Conseil sunnite,
le président de la Chambre chiite. Ce système fonctionne toutefois de plus en plus difficilement, au point
d'éclater lors de la guerre civile des années 1975-1989. Le pays est aujourd'hui engagé dans un fragile
processus de stabilisation nationale; depuis 2005 et l'évacuation de l'armée syrienne, la scène politique
est polarisée par deux coalitions : celle du 8 mars, dominée par le hezbollah, plutôt proche de la Syrie;
celle du 14 mars, autour de Saad Hariri. Les répercussions de la guerre civil syrienne affectent cependant
cette très fragile stabilité

L'État d'Israël, proclamé par Ben Gourion en 1948, est l'aboutissement du sionisme theorisé à la fin du
XIXe siècle par le journaliste autrichien T. Herz) Sion renvoie à la terre biblique, où les Juifs d'Europe
persécutés sont appelés à fonder un Etat. Le sionisme s'identifie initialement à un peuple juif -les Juifs
avec une majuscule-, plus qu'à un groupe religieux (les juifs); l'identité d'Israël, seule véritable
démocratie dans la région, se construit largement en opposition aux Arabes établis entre Jourdain et
Méditerranée, à travers les épreuves de la guerre et du terrorisme, voire à traver une politiques que
certains historiens ont qualifié d'épuration ethnique (1948)

L'État palestinien, proclamé dès 1988 dans les frontières reconnues par la résolution 242 du conseil de
sécurité de l'ONU, est entré récemment dans une phase de reconnaissance internationale (admission à
l'UNESCO en 2011, puis État observateur par l'assemblée générale de l'ONU en 2012 par 135 voix).
Politiquement, le pouvoir demeure pourtant divisé, depuis le conflit intra-palestinien de 2007, entre le
Hamas, parti islamiste rattaché aux Frères Musulmans, qui administre la bande de Gaza, et le Fatah,
mouement nationaliste dont est issu Mahmoud Abbas, président depuis 2005 de l'Autorité palestinienne
issue des accords d'Oslo de 1993. Le Fatah gouverne une Cisjordanie grevée de colonies et des zones
stratégiques israéliennes.

Lancé en 2011, le processus de réconciliation entre Hamas et Fatah a débouché en juin 2014 sur la
formation d'un gouvernement d'union nationale, avec lequel Israel refuse de dialoguer. Le processus de
reconnaissance internationale d'un État palestinien semble toutefois irreversible(Adhésion à la Cour
pénale internationale en 2015).

II. Des dynamiques identitaires transnationales et centrifuges


A. L'islam, marqueur identitaire majeur

350 millions de fidèles. le Moyen-Orient ne rassemble que 20 % de l'ensemble des musulmans de la


planète. Cependant, exception faite d'Israel et du Liban, la population des Etats de la région est à plus de
90 % musulmane.

Lìslam se caractérise par un monothéisme strict; la Révélation transmise en arabe au Prophète, est
rapidement mise par écrit : à la différence de la Bible, le Coran (récitation) n'est pas un simple texte
inspiré, mais bien ceuvre de Dieu (Allah) lui-même; avec les Hadith (paroles du Prophète), il est interprété
empiriquement (fiqh) par des écoles juridiques plus ou moins rigoristes. L'appartenance à l'umma se
marque enfin vation des cinq piliers de l'islam, mais aussi de normes sociales (interdits alimentaires,
prohi par l'obser bition de l'alcool) et économiques interdiction du prêt avec intérêt, à l'origine de la
finance islamique) au demeurant inégalement incorporées aux corpus juridiques nationaux.

L'influence de la loi coranique (charia) est aujourd'hui très variable. Elle est la source principale du droit
en Arabie Saoudite, en Iran, et au sein des pétromonarchies; en Egypte (mais aussi en Israël), si le droit
pénal, laïc, est le même pour tous, le droit civil (notamment le droit du mariage et de la famille) dépend
de la religion de chacun. Plus largement, au sein de l'umma, les traits civilisationnels communs
(urbanisme traditionnel, art aniconique) et l'observation des mêmes obligations rituells masquent mal de
profonds clivages identitaires.

B. La gestion du fait minoritaire

Si aucun des États de la région n'est homogène culturellement, les configurations poli tiques du fait
minoritaire varient :

Dans la plupart des cas, les minorités sont discriminées et plus ou moins exclues du pouvoir.

Le cas inverse n'est cependant pas rare: soit un groupe, majoritaire numériquement, mais minoré
(dominé) politiquement : cas des chiites sous S. Hussein et aujourd'hui à Bahreïn ou en Oman.

La Syrie de Assad se singularise enfin par la mainmise sur le pouvoir (via les services de renseignement)
d'une étroite minorité: les Alaouites, issu du Djebel Ansarieh (montagne au Nord-Ouest prolongeant le
mont Liban).

Des minorités chrétiennes de moins en moins nombreuses et influentes

Des minorités chrétiennes de moins en moins nombreuses et influentes


Pour autant, en terre d'islam (« Dâr al-islâm »), chrétiens et Juifs, considérés comme « gens du Livre »
(Ahl al-kitab) pour avoir reçu la Révélation, ont historiquement bénéficié d'un statut (dhimmi) leur
assurant en théorie une certaine liberté de culte; a contrario, les Bahaïs, adeptes d'une religion née en
Perse à la fin du XIX siècle, partant considérés comme impies, sont traditionnellement persécutés (Égypte
et surtout Iran).

Par ailleurs, les chrétiens (arabophones) ont été actifs dans la genèse u nationalisme arabe. Au sein des
régimes progressistes, ils sont pourtant restés cantonnés à un statut subalterne, même si certains ont
exercé de hautes responsabilités, comme le Copte égyptien Boutros-Ghali (ministre des Affaires
étrangères, puis secrétaire général de l'ONU de 1992 à 1996), ou le chaldéen Tarek Aziz, ministre des
Affaires étrangères de S. Hussein, notamment lors de la Guerre du Golfe.

Les Chiites : Iran excepté, des communautés longtemps discriminées voire persécutées

Les chiites constituent une masse démographique et une force géopolitique bien plus importante que les
chrétiens.

En Arabie saoudite ils sont concentrés dans la province du Hasa, sur le Golfe, très stratégique car
pétrolière. Victimes de l'intolérance wahhabite, historiquement persécutés, ils sont de fait exclus de la
redistribution de la rente pétrolière. En 2003, 450 personnalités chiites saoudiennes ont pourtant réclamé
(derrière le slogan «< partenaires de la nation ») la fin des discriminations. Une même conjoncture se
présente au Yémen, qui figure parmi les pays les plus pauvres et les plus instables du monde.

À Bahreïn, gouverné par une dynastie et un pouvoir sunnite, les chiites forment 70% de la population :
les manifestations de mars 2011, place de la Perle, étaient destinés à obtenir la levée de discriminations
de toutes natures. Le soulèvement a été écrasé par l'intervention saoudienne (sous couvert de l'action
collective du Conseil de coopération du Golfe); unc brutale normalisation s'en est suivie.

c. islamisme , alternative à l'allégeance nationale et etatique :

Les constructions nationales ont dû relever le défi d'idéologies urbaines et modernes plus dangereuses
que les revendications des minorités : le marxisme (longtemps influent en Iran e en Egypte), et surtout
l'islamisme, idéologie de réislamisation du champ social par application de la charia, en réaction à une
occidentalisation du droit, des moeurs et des comportements vécue comme une décadence sacrilège. En
Égypte, Nasser a combattu le mouvement des Frères musulmans, fondé en 1928 par H. al-Banna (« Le
Coran est notre constitution), faisant exécuter son principal idéologue, Sayyid Qutb, en 1966; en Syrie,
Assad a écrasé à l'artillerie lourde (20 000 morts !) le soulèvement des Frères à Hamas, en 1982.
Les régimes progressistes ont aussi cherché à combattre les islamistes sur leur propre terrain. Reprenant
à leur compte certaines de leurs exigences, ils ont promu une réislami sation par le haut à même de
renforcer une légitimité défaillante; ainsi du successeur de Nasser, Sadate, affichant une piété ostenttoire
et faisant réviser (1980) la constitution pour placer la charia en source principale d'un droit égyptien
pourtant nourri d'apports occi dentaux. Après 1979, la révolution iranienne est vite confisquée par le
clergé chiite, à l'origine. d'un véritable islamisme d'État.

Parallèlement, une islamisation par le bas prospère sur l'échec des politiques de développement
d'inspiration libérale menées depuis les années 1970. Ces politiques ont suscité, chez des générations
nombreuses de jeunes de plus en pus éduquées ou de néo-citadins déracinés, un sentiment de
déclassement et de frustration dû à l'accentuation des inégalités. Le désengagement de l'État du champ
social a parallèlement permis aux mouvements islamistes d'étendre leur influence par des réseaux
d'entraide aux plus démunis (dispensaires, écoles, etc.) ; dénonçant la corruption et l'immoralité des
régimes en place, ils proposent un islam plus ou moins radical comme cadre identitaire, en lieu et place
d'un nationalisme arabe discrédité. Grâceà des financements d'origine saoudienne, une partie de la
mouvance islamiste se lance même dans la pratique du djihad, comme le Gama al-Islamiya, qui en
Égypte multiplie les attentats contre les Coptes, les intellectuels et les touristes (attentat de Louxor, 1997);
les djihadistes prennent aussi pour cible les civils israéliens (Hamas) ou les groupes irakiens pro-
américains à partir de 2003 (Al-Qaeda en Irak), se retournant même à l'occasion contre le régime
saoudien lui-même. En 2014, la lutte contre lerégime baassiste syrien tend à être transfigurée en djihad,
suscitant, comme la guerre d'Afghanistan des années 1980, l'afflux de combattants de l'ensemble de la
région et même au-delà.

III. Entre islamisation de la démocratie et démocratisation de l'islam: la recherche d'une troisième voie

A. À la veille des soulèvements de 2011 : la démocratie absente ou virtuelle

Début 2011, la région présente un important déficit démocratique, collectionnant républiques et


monarchies autoritaires. Lorsqu'ils existent, vie parlementaire et multipartisme demeurent sous étroite
surveillance, la faiblesse de la participation électorale soulignant la perte de crédibilité des régimes. S'y
ajoutent une corruption massive, une confiscation des libertés et un puritanisme intolérant (répression de
l'homosexualité, censure) dont les régimes ne sont pas les seuls responsables. Enfin, l'usure du pouvoir
affecte plus d'un dirigeant, de l'Egyptien H. Moubarak, en fonction depuis trente ans au Caire, au sultan
Qabous, qui régne sur Oman depuis... 1970.
Les rares ouvertures démocratiques concernent surtout Bahreïn, où la constitution parlementaire mort-
née de1973 a été réactivée par l'actuel souverain lors de son avènement en 2001, et le Koweit, où le
parlement dispose de réels pouvoirs, en dépit d'élections à répétition dues à l'absence de majorité
parlementaire stables, faute de partis structurés. Encore faut-il préciser qu'au sein des Etats du Golfe, les
travailleurs étrangers représentent 75 à 80 % de la population. Les autres avancées sont fragiles.

Le modèle turc suggère pourtant qu'une conciliation entre démocratie et islamisme, sur le modèle de la
démocratie-chrétienne européenne, n'a rien d'impossible. De fait, en visite à Tunis à la veille des élections
faisant suite à la déchéance de Ben Ali (octobre 2011), le Premier ministre Erdogan, dirigeant de l'AKP
(Parti de la Justice et du Développement) au pouvoir depuis 2002, affirmait qu'« Islam et démocratie ne
sont pas contradictoires. Un musulman peut gérer un Etat avec beaucoup de succès ». En depit de crises
multiples avec les généraux gardiens du dogme kémaliste et de la constitution de 1982, l'AKP a su
associer consolidation démocratique et réislamisation sociale. Cette dernière est notamment véhiculée
par le réseau confrérique de Fethullah Güllen, qui défend une laïcité positive ; « il agit à rebours de l'islam
politique traditionnel, préférant la construction d'une école à celle d'une mosquée et considérant la
question du voile comme secondaire (T. Josserand), Cet islamisme démocratique s'accompagne pourtant
de limites à la liberté d'expression: son pragmatisme est également accusé de masquer un agenda caché
d'islamisation irréversible de l'État.

B. Les « printemps arabes » : plusieurs facteurs déclencheurs

Les mouvements islamistes ont cependant tenu une place mineure dans le déclanchements des
manifestations de rue qui, par effet domino, ont embrasé le monde arabe, de la Tunisie (janvier 2011
démission forcée de Ben Ali) au sultanat d'Oman, n'épargnant quasiment aucun des régimes en place.
Au-delà des événements, d'autant plus spectaculaire que largement médiatisés et imprévus, les «
révolutions arabes » suscitent un débat quant à leurs causesprofondes et à leur réelle portée.

Deux processus de refondation politique.

L'Egypte est touchée suite aux événements tunisiens: du 25 janvier au 11 février, le manifestations
grossissent et se généralisent à l'ensemble du pays, même si la place Tahrir da Caire demeure l'épicentre
et le symbole du mouvement. Moubarak démissionne, cédant à pression de l'establishment militaire.
Candidat des Frères musulmans, M. Morsi est élu président en juin 2012.

Au Yémen, après plusieurs semaines de manifestations, auxquelles se superpose la rébellion houthiste de


chiites du Nord, le président Saleh (au pouvoir depuis 1990) finalement chassé du pouvoir; l'élection de
son successeur, en février 2012, est entachée de violence. Un dialogue national est lancé en 2013, devant
déboucher sur de nouvelles élection en 2014.

Bahrein: une répression anti-chiite avalisée par le Conseil de Coopération du Golfe. Les manifestations de
la place de la Perle (Manama) sont violemment réprimées (inte vention saoudienne légitimé par le
Conseil de coopération du Golfe-CCG) à partir du 14 mars: la normalisation est brutale; le dialogue
national », lancé en 2011, puis relancé en 2013, demeure dans l'impasse.

La Syrie : chaos et guerre civile

Bachar al-Assad réagit par la répression aux manifestations qui ont débuté le 15 mars 2011. Le conflit
s'enlise, prenant une diension internationale et se répercutant au Liban et

en Irak.

Des facteurs socio-écoomiques mais aussi politiques.

Les mouvements remettent en cause des pouvoirs sclérosés, marqués par le népotisme et la corruption.
Ils sont aussi une réaction à un chômage qui touche des jeunes de plus en plus diplômés, et au
creusement des inégalités induit par des politiques de libéralisation économique n'ayant profité qu'à une
caste d'entrepreneurs proches du pouvoir. Conjoncturellement, la hausse des prix alimentaires et le
ralentissement de la croissance dù à la crise mondiale ont également joué un rôle. En Egypte, la question
du respect des droits a cependant précédé les demandes socioéconomiques, à travers des slogans
comme « relève la tête, tu es égyptien !». Un sondage du Pew Research Center (2012) confirme de fait
l'atta chement des sociétés civiles à la démocratie (67 % en Égypte).

Cependant, la contextualisation socioéconomique ne rend pas compte à elle seule de la dynamique des
soulèvements. De fait, s'y superposent de façon décisive des fractures internes aux régimes en place, sur
la base des anlyses divergentes faites par différents groupes d'intérêt à propos des choix de politiques
économiques, ainsi qu'autour des luttes pour les bénéfices des privatisations et de la déréglementation»
(L. Louer). En Égypte, le courant technocratique économiquement liberal incarné au sein du PLD par
Gamal Moubarak. successeur désigné de son père, a rencontré l'opposition des généraux ; à Bahreïn,
l'oppo sition chiite modérée (Al-Wifaq) a été soutenue par la vieille garde du régime, opposée à
l'enrichissement ds hommes d'affaires liés au Premier ministre (Critique internationale, n°61, nov.-déc.
2013).

C. Acteurs, gagnants et perdants

Des jeunes éduqués et connectés Surfant sur internet et occupant l'espace public, ils ont été les véritables
catalyseurs des printemps arabes. Numériquement importants (50 % de la population moyen-orientale a
moins de 25 ans), les jeunes sont aussi de plus en plus éduqués: 30 % sont inscrits dans l'enseignement
supérieur (60% en Israel, 50% au Liban) selon le Rapport sur le Développement Humain 2010 du PNUD
portant sur la période 2001-2009. Plus largement, la jeunesse es au cœur d'un ensemble de mutations
socioculturelles (urbanisation, alphabéti sation, recul de l'âge du mariage, accès des femmes à
l'enseignement et au marché du travail) remettant en cause les différentes formes d'autorité. Pour les
démographes E. Todd et y Courbage (Le rendez-vous des civilisations, 2007), « le monde musulman est
entré dans la révolution démographique, culturelle et mentale qui permit autrefois le développement des
régions aujourd'hui les plus avancées ». À propos de l'Iran, T. Covile évoque une Révolution invisible
interférant avec l'héritage de la Révolution islamique, notamment marquée par la chute de l'indice de
fécondité et une montée relative de l'individualisme.

Cette révolution culturelle est amplifiée et homogénéisée à l'échelle de la région par les nouvelles
technologies de communication. Créé en 1996 par l'émir du Qatar, Al Jazzera dispose d'une audience
estimée à 50 millions de téléspectateurs, attirés par sa liberté de ton et la diversité des opinions qui s'y
expriment Les « printemps arabes » ont aussi révélé spectaculairement l'importance des médias sociaux.
La pénétration d'Internet a été rapide dans la région -40 % d'internautes en 2010, 88 % à Bahreïn-,
permettant une diversification des sources d'information et la formation d'un espace d'expression
globalisé difficilement contrôlable (30 000 blogs selon des estimations); Facebook (15 millions d'inscrits)
et Twitter (5,5 millions, dont 40 % aux EAU) se sont aussi largement diffusés. En Arabie saoudite, un des
grnds succès du web fin 2013 a été le détournement de No Woman, no Cry de Bob Marley, devenu No
Woman, no drive!

Les femmes, actrices, actives et perdantes?

La condition féminine est également en pleine mutation. Dans la famille endogame traditionnelle, le mari,
qui apporte la dot remise à son épouse ou au père de celle-ci, gère seul les contacts avec le monde
extérieur, les femmes restant enfermées dans la sphère privée, le voile leur étant imposé pour accéder à
l'espace public, même s'il ne s'agit pas d'une obligation coranique. La réislamisation rampante depuis les
années 1970 s'est traduite par un retour a un el statut, là même où il avait reculé (Égypte, Iran, Turquie).
Cas extrême, la femme saoudienne demeure une éternelle mineure, interdite de conduite automobile ou de
sortie dans l'espace public sans être accompagnée de son mari ou d'un parent proche.
D'autres évolutions sont plus encourageantes. La scolarisation des femmes et leur place dans le monde
du travail démentent l'idée reçue d'une condition figée. Promu par des femmes instruites conjuguant
modernit et attachement à l'islam, le féminisme islamiste, déjà théorisé il y a un siècle par M. Abdu,
s'affirme de façon spectaculaire. Entendant légitimer à partir de l'islam une certaine égalité entre
hommes et femmes, il a été mondia lement médiatisé lors de l'attribution des prix Nobel de la paix à
l'Iranienne Shirin Ebadi en 2003, puis à la jeune Yéménite Tawakkol Karman en 2011. En Arabie
Saoudite, où le roi Abdallah a amorcé de timides réformes (université mixte inaugurée à Djedda en
2009), le débat se cistallise sur l'enjeu symbolique du droit de conduire, surtout depuis qu'une jeune
Saoudienne, Mana el-Sharif, a courageusement posté sur youtube (2011) une vidéo la montrant au
volant ! Son geste a fait scandale, mais certains religieux ne voient plus d'objection de principe à cette
innovation. De façon différente, la Moza (comme, en Jordanie, la reine Rania), ex-première Dame
devenue reine mère du Qatar, véhicule de par le monde l'image d'une pétromonarchie éclairée. Dotée
d'un physique avantageux (!) cumulant les doctorats honoris causa, elle préside la Fondation du Qatar
pour l'éducation, la science et le développement, créée en 1995.

Vous aimerez peut-être aussi