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COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78F

16ème chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 NOVEMBRE 2013

R.G. N° 12/07008

AFFAIRE :

Maria MENDES-GRACA

C/

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS et d'ILE DE


FRANCE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Septembre 2012 par le Juge de l'exécution de
PONTOISE

N° chambre :

N° Section :

N° RG : 12/01539

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à:

Me Pascal KOERFER, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU, avocat au barreau de VERSAILLES

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

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LE VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE TREIZE,

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Madame Maria MENDES-GRACA

née le 02 Août 1954 à ATALAIA (PORTUGAL)

de nationalité Française

5 Chemin du Muguet Hameau de Lesseville

95510 AINCOURT

Représentant : Me Pascal KOERFER, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES,


vestiaire : 31 - N° du dossier 12109251

APPELANTE

****************

CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS et d'ILE DE


FRANCE

N° SIRET : 775 66 5 6 15

26 Quai de la Rapée - 75012 PARIS

Représentant : Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES


- N° du dossier 000701

Représentant : Me Jean-françois JOSSERAND, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire :


A0944 -

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

L'affaire a été débattue à l'audience publique du 09 Octobre 2013, Madame Anne LELIEVRE,
conseiller, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Baptiste AVEL, Président,

Madame Marie-Christine MASSUET, Conseiller,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Bernadette RUIZ DE CONEJO

FAITS ET PROCEDURE,

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Suivant acte passé en la forme authentique le 21 juillet 1998 devant Maître René HUCHET, notaire à
CERGY (Val d'Oise) la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL de PARIS et
D'ILE DE FRANCE (ci-après le CREDIT AGRICOLE) a consenti deux prêts hypothécaires à Pascal
Jean PELLE et à Maria Hélèna MENDES-GRACA, l'un d'un montant de 667.000 francs (101.683,49
€) au taux de 5,70% l'an remboursable en 180 mois, l'autre d'un montant de 133.000 francs
(20.275,72 €) au taux de 5,70% l'an remboursable en 204 mois, destinés à financer l'acquisition d'un
bien immobilier.

Par jugement du 18 octobre 1999, le tribunal de commerce de PONTOISE ouvrait une procédure de
redressement judiciaire à l'encontre de Pascal Jean PELLE, convertie en liquidation judiciaire le 10
décembre 1999. Les emprunteurs ont cessé le remboursement des échéances des prêts .

Le CREDIT AGRICOLE a déclaré régulièrement sa créance entre les mains du mandataire


judiciaire, par courrier recommandé avec AR du 3 décembre 1999, à titre privilégié pour 116.534,24
€.

Par ordonnance du 12 mars 2002, le juge commissaire a admis la créance duCREDIT AGRICOLE
pour la somme de 97.264,92 € à titre privilégié et pour 19.089,32 € à titre hypothécaire et par
ordonnance du 22 mars 2011, il a autorisé la vente de gré à gré du bien immobilier acquis au moyen
des prêts. Celle-ci a été réalisée au prix de 220.000 € ; la part revenant à Pascal Jean PELLE a été
remise au liquidateur aux fins de distribution . A ce jour le CREDIT AGRICOLE n'a pas été
colloqué sur la part revenant à Pascal Jean PELLE, l'état de collocation dressé par Maître CANET,
liquidateur judiciaire, faisant l'objet d'une contestation devant le tribunal de grande instance de
PONTOISE qui, par jugement du 18 décembre 2012, a sursis à statuer dans l'attente du présent arrêt .

Agissant en vertu de l' acte notarié contenant les prêts ci-dessus mentionnés, le CREDIT
AGRICOLE a fait pratiquer le 16 janvier 2012, une saisie-attribution à l'encontre de Maria Hélèna
MENDES-GRACA, entre les mains de la SCP MATEU- MATEU et SANCHEZ, notaires associés,
en leur qualité de séquestre du prix de vente du bien immobilier situé 56 bis rue Belles Hâtres à
ERAGNY, ce afin d'obtenir le paiement d'une somme totale de 236 234,28 € .

Maria Hélèna MENDES-GRACA à qui cette saisie-attribution a été dénoncée par acte d'huissier du
23 janvier 2012, a, par acte d'huissier du 15 février 2012, fait assigner le CREDIT AGRICOLE
devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de PONTOISE, afin de voir annuler et
ordonner la mainlevée de la saisie-attribution aux motifs de la prescription de la créance du CREDIT
AGRICOLE et de voir répartir le produit de la vente, et à titre subsidiaire, afin qu'il soit sursis à
statuer tant que la banque n'aura pas produit un décompte détaillé poste par poste de la créance
poursuivie, faisant notamment ressortir les intérêts des deux prêts entre le 31 août 2006 et le 31 août
2011 et demande de limiter l'effet attributif de la saisie litigieuse au principal des deux prêts majorés
des seuls intérêts calculés sur cette période.

Vu l'appel interjeté le 11 octobre 2012 par Maria Hélèna MENDES- GRACA du jugement
rendu le 28 septembre 2012 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de

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PONTOISE qui l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes, a constaté la validité de la
saisie-attribution effectuée le 16 janvier 2012 à l'initiative du CREDIT AGRICOLE, l'a condamnée à
payer à celui-ci la somme de 1.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 26 avril 2013 par lesquelles Maria Hélèna MENDES-
GRACA, appelante, demande à la cour :

- à titre de principal, déclarer nulle la saisie-attribution du 16 janvier 2012 et en ordonner la


mainlevée,

-subsidiairement, limiter les effets de la saisie-attribution au principal et aux intérêts non prescrits
après réduction des intérêts de retard en totalité ou en partie,

-à titre infiniment subsidiaire, condamner le CREDIT AGRICOLE à lui payer la somme de


118.201,24 € et à défaut celle de 100.000 € à titre de dommages et intérêts,

- en tout état de cause, en cas de condamnations réciproques ordonner la compensation,

- condamner le CREDIT AGRICOLE à lui payer la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice
moral, celle de 8.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux
entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 30 juillet 2013 par lesquelles la CAISSE


RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DE PARIS ET D'ILE DE FRANCE,
intimée, conclut à la confirmation du jugement déféré et demande à la cour de débouter
Maria-Héléna MENDES-GRACA de l'ensemble de ses demandes, la condamner à lui payer la
somme de 4.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers
dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture du 10 septembre 2013 ;

SUR QUOI, LA COUR

Sur la nullité de la saisie-attribution

Considérant que Maria Héléna MENDES-GRACA invoque la nullité de la saisie-attribution


pratiquée le 16 janvier 2012, sur le fondement de l'article 56 du décret n°92-755 du 31 juillet 1992
dans sa rédaction alors en vigueur, selon lequel l'acte d'huissier par lequel le créancier fait procéder à
la saisie, doit contenir à peine de nullité, notamment, le décompte distinct des sommes réclamées en
principal, frais et intérêts échus, majorées d'une provision pour les intérêts à échoir dans le délai d'un
mois ;

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Que l'acte de saisie litigieux distingue dans un tableau figurant en première page les causes de la
créance en mentionnant que la créance admise à la liquidation judiciaire de M.PELLE est de
97.264,92 € et de 19.089,32 € ( sommes correspondant à chacun des prêts consentis) tandis que les
intérêts , courus du 10 décembre 1999 au 11 août 2011 s'élèvent respectivement à 98.808,90€ et à
19.392,24 € ; qu'il est constant qu'aucune disposition légale n'impose au créancier de faire figurer sur
l'acte de saisie le détail des intérêts dont seul le montant total est exigé dès lors que le débiteur
connaît le montant du taux des intérêts dus et leur point de départ, précisé en l'espèce ;

Qu'il en résulte que l'acte de saisie litigieux en ce qu'il mentionne le montant des sommes dues au
titre des intérêts en précisant la période durant laquelle ils ont couru, satisfait aux exigences du texte
susvisé ; que Maria Héléna MENDES-GRACA doit être déboutée de sa demande de nullité de l'acte
de saisie-attribution ;

Sur l'existence d'un titre exécutoire et sur la prescription de la créance

Considérant que Maria Héléna MENDES-GRACA reproche au premier juge d'avoir rejeté le moyen
tiré de la prescription de la créance de la banque ; qu'elle soutient qu'en vertu des dispositions de
l'article 161 de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 modifié par la loi n° 94-475 du 10 juin 1994 les
créanciers titulaires d'un privilège spécial ou d'une hypothèque peuvent dès qu'ils ont déclaré leur
créance, même s'ils ne sont pas encore admis, exercer leur droit de poursuite individuelle si le
liquidateur n'a pas entrepris la liquidation des biens grevés dans le délai de trois mois à compter du
jugement qui ouvre la procédure collective ; qu'elle fait ainsi grief à la banque de ne pas avoir
procédé selon les voies de droit commun à son égard ; qu'elle prétend encore que l'admission de la
créance de la banque n'est pas assimilable à un titre exécutoire ; qu'en application des articles 2244 et
2249 du code civil, la créance de la banque est prescrite, en l'absence de délivrance d'un
commandement de droit commun ou d'une assignation en justice ; qu'elle soutient que la déclaration
de créance n'était pas exclusive de toute autre voie de droit à son égard et que ce seul acte n'a pas
rendu exigible la créance, faute d'accomplissement des poursuites de droit commun la concernant ;

Mais considérant d'une part que conformément à l'article 3 de la loi du 9 juillet 1991 devenu l'article
L111-3 du code des procédures civiles d'exécution, les actes notariés revêtus de la formule
exécutoire constituent des titres exécutoires permettant de poursuivre l'exécution forcée à tout
moment sur les biens du débiteur ;

Que la créance est exigible par le seul fait du jugement ayant ouvert la procédure de redressement
judiciaire en vertu de l'article L 622-22 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi sur
la sauvegarde, applicable à l'espèce, sans que le créancier ait à requérir une décision à l'encontre du
codébiteur, comme le soutient à tort Maria Héléna MENDES-GRACA ;

Considérant d'autre part, s'agissant de la prescription, que Maria Héléna MENDES-GRACA ne peut
se prévaloir de la prescription acquise selon elle depuis le mois de novembre 1999, soit dix ans après
le premier impayé ;

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Considérant en effet que selon l'article 1206 du code civil les poursuites faites contre l'un des
débiteurs solidaires interrompent la prescription à l'égard de tous et selon l'article 2245 du code civil
que l'interpellation faite à l'un des débiteurs solidaires par une demande en justice ou par un acte
d'exécution forcée, interrompt le délai de prescription contre tous les autres ;

Que la déclaration de créance en matière de redressement judiciaire équivaut à une demande en


justice ; qu'elle est en effet l'acte par lequel le créancier manifeste son intention d'obtenir, dans le
cadre de la procédure collective, paiement de ce qui lui est dû par le débiteur ; qu'elle en produit tous
les effets ; qu'elle est ainsi interruptive de prescription et que cet effet s'étend non seulement jusqu'à
l'admission de la créance au passif mais jusqu'à la clôture de la procédure collective ; que l'effet
interruptif de prescription attaché à la déclaration de créance joue même pour les créances
hypothécaires et même si le créancier hypothécaire a retrouvé son droit d'agir aux fins de saisie
immobilière ; que cet effet interruptif joue, en vertu des textes précités, à l'égard de tous les débiteurs
solidairement tenus à la dette ;

Considérant en l'espèce, que le CREDIT AGRICOLE a régulièrement déclaré sa créance auprès du


mandataire judiciaire à la procédure collective de M.PELLE le 3 décembre 1999 ; que le juge
commissaire a prononcé l'admission des créances déclarées par deux ordonnances du 12 mars 2002 à
hauteur de 97.264,92 € à titre privilégié et pour 19.089,32 € à titre hypothécaire ;

Que la procédure collective n'est pas clôturée puisque suite à la vente de gré à gré autorisée par le
juge commissaire, du bien immobilier appartenant indivisément à M.PELLE et à Maria Héléna
MENDES-GRACA dont la moitié du prix a été versée entre les mains de Me CANET ès qualités de
liquidateur , un litige portant sur le montant de la collocation du CREDIT AGRICOLE est pendant
devant le tribunal de grande instance de PONTOISE, suite à la contestation formée par le CREDIT
AGRICOLE sur l'état de collocation notifié par le liquidateur ;

Qu'il en résulte que la prescription de la créance dont l'interruption perdure, n'est pas acquise;

Sur les intérêts de la créance

Considérant que Maria Héléna MENDES-GRACA fait valoir que selon l'article 2777 ancien du code
civil, les intérêts se prescrivaient par 5 ans ;

Que par ailleurs, les intérêts de retard non prescrits ne sont pas exigibles, faute pour la banque de lui
avoir notifié la déchéance du terme ou dès lors que constituant une clause pénale, ils doivent être
annulés en ce qu'ils constituent une clause abusive ou doivent être réduits ;

Mais considérant que la discussion sur ce point est vaine dès lors que la saisie-attribution litigieuse,
dont la contestation seule est soumise à la cour, n'est fructueuse qu'à hauteur de 107.359 €, somme
qui se trouve être inférieure au montant d'admission de la créance par le juge commissaire, à hauteur
de 116.354,24 € ( 97.264,92 € + 19.089,32 €) ; que Maria Héléna MENDES-GRACA n'ayant pas
contesté en tant que 'personne intéressée' selon la faculté qui lui en était ouverte par l'article 103

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alinea 1er de la loi du 25 janvier 1985 devenu l'article R 624-8 du code de commerce, l'ordonnance
d'admission du juge commissaire, celle-ci est devenue définitive à son égard ;

Qu'il y a lieu dans ces conditions, de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a validé la
saisie-attribution pratiquée le 16 janvier 2012 entre les mains de Maître MATEU, notaire associé;
qu'il n'y a pas lieu d'en limiter les effets puisque le montant saisi correspond au montant des créances
principales définitivement admises au titre des deux prêts consentis par le CREDIT AGRICOLE ;

Considérant que la demande de dommages et intérêts à hauteur de 100.000 € formée par Maria
Héléna MENDES-GRACA ne repose sur aucun moyen juridique sérieux ; que Maria Héléna
MENDES-GRACA doit en être déboutée ;

Que Maria Héléna MENDES-GRACA forme une autre demande de dommages et intérêts de 5.000 €
en réparation de son préjudicie moral ;

Qu'elle ne caractérise cependant aucune faute de la banque en relation avec le préjudice qu'elle
allègue, lequel résulte en réalité de sa défaillance dans le remboursement des prêts ; qu'elle doit être
également déboutée de cette demande ;

Considérant que le tribunal a exactement statué sur les dépens et sur l'application de l'article 700 du
code de procédure civile ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions ;

Considérant que Maria Héléna MENDES-GRACA qui succombe en son recours sera condamnée
aux dépens d'appel ; qu'il n'y a pas lieu, en cause d'appel, à allocation d'une somme complémentaire
au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; que le CREDIT AGRICOLE sera déboutée de
sa demande de ce chef ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant, rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

Condamne Maria Héléna MENDES-GRACA aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés
conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement
avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur AVEL et par Madame RUIZ DE CONEJO, greffier, auquel la minute de la
décision a été remise par le magistrat signataire.

7
Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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