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LES MOYENS DE REGLEMENT

Pour exercer leurs activités commerciales, les commerçants ont souvent recours à
des techniques spécifiques de paiement et de crédit. Sont instruments de paiement les
modes opératoires permettant d'aboutir à la délivrance, par une personne à une autre,
d'une quantité déterminée d'unités monétaires. On comprend par là que l'instrument de
paiement est un produit de la monnaie scripturale. Celle-ci étant par hypothèse
dématérialisée et, au surplus, stockée dans des comptes tenus exclusivement par les
établissements de crédit.

Section 1 : Le chèque
Régi par le code de commerce (art.239 à 328), le chèque peut être défini comme un
titre de propriété monétaire permettant au bénéficiaire de se faire servir, jusqu'à due
concurrence, les avoirs portés au crédit d'un compte du tireur auprès d'un dépositaire
déterminé. C'est un écrit par lequel, le tireur donne l'ordre au tiré (le banquier) de
payer, à sa présentation une somme déterminée au profit de lui-même ou d'un
bénéficiaire.
Le chèque est obligatoirement tiré sur un banquier, un agent de change ou un bureau
de chèques postaux. C'est un acte civil ou commercial suivant qu'il se rapporte à une
opération civile ou commerciale. Il n'est jamais un acte de commerce par la forme.
Le chèque est un moyen de paiement à vue.

I- L'existence juridique du chèque :

Elle s'ordonne autour de deux thèmes principaux : la création et l'émission du


chèque.
A- La création du chèque :
1- Conditions de validité :

Outre la condition générale de capacité requise de tout signataire d'un chèque, la


création de cet effet est soumise à des conditions de forme très strictes. Le chèque doit
contenir :
- La désignation : le mot "chèque" doit être inséré dans le texte même et dans la
langue de rédaction du titre ;
- Le mandat pur et simple de payer une somme déterminée ; en cas de désaccord
entre la somme en chiffres et la somme en lettres, le chèque vaut pour la
somme en lettres ; si la somme a été inscrite deux fois en chiffres ou en lettres,
en cas de différence, il vaut pour la somme la moins forte ;
- Le nom du tiré ;
- La domiciliation : indication du lieu où le paiement doit s'effectuer ;
- L'indication de la date et du lieu où le chèque est tiré ;
- La signature du tireur

Le chèque ne peut être tiré que sur un établissement bancaire ayant, au moment de
la création du titre, des fonds à la disposition du tireur conformément à une
convention expresse ou tacite d' après laquelle le tireur a droit de disposer de ces
fonds par chèque.

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Le titre dans lequel manque une de ces énonciations ne vaut pas comme chèque.
D'autre part, le banquier qui délivre des formules de chèque à ses clients doit
obligatoirement y imprimer le nom du destinataire ainsi que les coordonnées d'adresse
et de téléphone de l'agence qui gère son compte, sous peine d'une amende de 100 dh
par contravention.

2- Mentions non obligatoires :

Il s'agit de la désignation du bénéficiaire : le chèque peut être à un personne


dénommée non endossable, à ordre ou au porteur ; il peut même être à l'ordre du
tireur. S'il ne porte aucune mention de bénéficiaire, il vaut comme chèque au porteur.
Le chèque peut être avalisé comme la lettre de change, mais l'aval est très rare dans
la pratique et il ne peut être donné par le tiré. Toutefois, ce dernier peut viser ou
certifier un chèque (voir infra).

B- L'émission du chèque :

L'émission est l'acte par lequel le tireur se dessaisit du chèque en le remettant au


bénéficiaire. Le chèque est payable dès son émission qui emporte le transfert de la
propriété de la provision. Celle-ci suppose donc l'existence concomitante d'une
provision même si le chèque est susceptible de circuler avant sa présentation au
paiement.

1- La provision du chèque :

La provision est constituée par la créance de somme d'argent, exigible, dont le tireur
est titulaire à l'encontre du tiré. Le plus souvent, cette créance résulte d'un dépôt
préalable de fonds en compte et dont les parties sont convenus qu'ils pourraient être
mobilisés par voie de chèques. Mais, elle peut également résulter d'un contrat
d'ouverture de crédit par lequel le tiré aurait pris l'engagement ferme d'honorer l'ordre
de paiement du tireur.
Ainsi définie, la provision doit exister au moment même d'émission du chèque et se
révéler, à cette date, suffisante et disponible.
Pour renforcer la crédibilité du chèque à l'égard des porteurs, deux techniques
peuvent être utilisées : le visa et la certification en plus de l’aval (garantie
personnelle).

a- Le visa du chèque :
C'est l'attestation faite par le tiré que la provision existe. Mais, cette mesure ne
confère aucune sécurité réelle, car le visa ne vaut que pour le moment où il est donné
et rien n'empêche le tireur de disposer de la provision avant la présentation du chèque
au paiement ; aussi n'est plus reconduite par le code de commerce de 1996.

b- La certification :
Elle résulte de l'apposition sur le chèque, par le tiré au moyen d'un procédé
d'écriture indélébile, d'une formule comportant sa signature, la mention de
certification, la date de celle-ci, le montant du chèque et le désignation du tiré.
La mention de certification consiste elle- même en une attestation de l'existence de
la provision. A l'inverse du visa, elle procure une grande sécurité puisqu'elle oblige le

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tiré à bloquer la provision au profit du porteur, pendant le cours du délai légal de
présentation.

c- L’aval

Le paiement d'un chèque peut être garanti pour tout ou partie de son montant par un
aval.
Cette garantie est fournie par un tiers, sauf le tiré, ou même par un signataire du
chèque.
L'aval est donné soit sur le chèque ou sur une allonge soit par un acte séparé
indiquant le lieu où il est intervenu.
Il est exprimé par les mots « bon pour aval » ou par toute autre forme équivalente;
il est signé par le donneur d'aval.
Il est considéré comme résultant de la seule signature du donneur d'aval apposée au
recto du chèque, sauf quand il s'agit de la signature du tireur.
L'aval doit indiquer pour le compte de qui il est donné. A défaut de cette indication,
il est réputé donné pour le tireur.
Le donneur d'aval est tenu de la même manière que celui dont il s'est porté garant.
Son engagement est valable, alors même que l' obligation qu'il a garantie serait nulle
pour toute cause autre qu'un vice de forme.
Quand il paye le chèque, le donneur d'aval acquiert les droits résultant du chèque
contre le garanti et contre ceux qui sont tenus envers ce dernier en vertu du chèque.

2- La circulation du chèque :

Si le chèque circule peu, rien n'interdit qu'il soit transmis à des porteurs successifs
jusqu'à sa présentation au paiement.
Lorsque le chèque est à ordre ou à une personne dénommée, sans clause "non à
ordre", il se transmet par endossement comme la lettre de change. Il s’agit d’une
mention apposée au verso, suivie de la signature de son auteur et d’une remise
matérielle du titre.
Toutefois, le tiré ne peut pas réendosser le chèque. L'endossement peut être fait à
titre de procuration mais non à titre de nantissement, puisque le chèque ne peut servir
d'instrument de crédit. Si le chèque a été crée au porteur, il se transmet de la main à la
main sans aucune formalité.
L'endossement transmet tous les droits résultant du chèque et notamment, la
propriété de la provision.
Si l'endossement est en blanc, le porteur peut:
- remplir le blanc, soit de son nom, soit du nom d'une autre personne;
- endosser le chèque de nouveau en blanc ou à une autre personne;
- remettre le chèque à un tiers, sans remplir le blanc et sans l'endosser.

L'endossement ou la remise d'un chèque au porteur transmet au bénéficiaire la


propriété de la provision, et les tribunaux en tirent la conclusion qu'une banque qui a
la connaissance de l'émission d'un chèque doit immobiliser la provision au profit du
porteur.
L'endosseur est, sauf clause contraire, garant du paiement. Toutefois, il peut
interdire, par la mention "non à ordre" ou "non endossable", un nouvel endossement
du titre ; auquel cas il n'est pas tenu à garantie envers les personnes auxquelles le
chèque a été endossé ultérieurement.

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L'endossement fait après le protêt ou après l' expiration du délai de présentation ne
produit que les effets d' une cession ordinaire.
Sauf preuve contraire, l'endossement sans date est présumé avoir été fait avant le
protêt ou avant l'expiration du délai de présentation.
Il est défendu d'antidater les ordres à peine de faux.

II- L’efficience du chèque :

Elle se mesure à la vocation que le chèque crée à son bénéficiaire d'en obtenir le
paiement ou d'en poursuivre le recouvrement.
Le tireur est garant du paiement. Toute clause par laquelle le tireur s'exonère de cette
garantie est réputée non écrite. Toute personne qui remet un chèque en paiement doit
justifier, de son identité au moyen d' un document officiel portant sa photographie
(CIN, passeport, carte séjour pour les étrangers).
A- Le paiement du chèque :
1- Délai de présentation :

Le chèque est payable à vue et toute clause contraire est réputée nulle. Si, pour
tourner la loi, le tireur l'avait postdaté, non seulement il serait passible de sanctions,
mais encore le porteur pourrait le présenter immédiatement au paiement et le tiré
serait obligé de le payer s'il avait provision..
Le chèque doit être présenté au paiement dans un délai de vingt (20) jour s'il est
émis et payable au Maroc et dans soixante (60) jours s'il est émis hors du Maroc.
Toutefois, si un chèque est présenté après l'expiration du délai de ces délais, le tiré
peut le payer s'il a provision et tant qu'il n'est pas prescrit. La présentation tardive peut
seulement empêcher le porteur d'exercer ses recours, si le chèque n'est pas payé.
Ni le décès, ni l'incapacité survenant après l'émission ne peuvent empêcher le
paiement du chèque.

2- Modalités de paiement :
a- Paiement en espèces :
Le porteur du chèque se présente à la banque du tireur (agence indiquée sur le
chèque) pour se faire payé.
Le banquier doit, avant de payer, s’assurer de la régularité du titre, vérifier la
signature du tireur en la comparent au spécimen de signature tenu par la banque et
prendre l’identité du bénéficiaire.
Le porteur ne peut pas refuser un paiement partiel.
Si la provision est inférieure au montant du chèque, l'établissement bancaire tiré est
tenu de proposer le paiement jusqu'à concurrence de la provision disponible. Le tiré
ne peut refuser ce paiement partiel.
En cas de paiement partiel, le tiré peut exiger que mention de ce paiement soit faite
sur le chèque et qu'une quittance lui en soit donnée.
b- Paiement en compensation :
Le porteur d’un chèque, titulaire d’un compte bancaire, peut le remettre à sa propre
banque pour l’encaisser.
Les représentants des banques se réunissent, chaque jour, constituant une chambre
de compensation. Ils y compensent les créances qu’elles ont les une envers les autres.
3- Le barrement :

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Pour limiter les risques en cas de perte ou de vol, le chèque peut être barré. Le
barrement s'effectue au moyen de deux barres parallèles apposées au recto du chèque
par le tireur ou un porteur quelconque. Le barrement peut être général ou spécial :

Barrement général Barrement spécial

Si entre les deux barres, ne figure aucune mention, le barrement est général. Le
barrement est spécial si le nom d'un banquier est inscrit entre les deux barres.
Le chèque à barrement général ne peut être payé que par un établissement bancaire
ou le CCP. Un chèque à barrement spécial ne peut être payé qu'au banquier désigné.
Le tiré qui ne se conformerait pas à ces règles serait responsable du préjudice causé
jusqu'à concurrence du montant du chèque. Un banquier ne peut recevoir un chèque
barré à l'encaissement que par l'un de ses clients.

4- Opposition au paiement :

Le tireur ne peut s’opposer au paiement d’un chèque émis sauf dans les quatre cas
admis par la loi : perte, vol ou utilisation frauduleuse du chèque et redressement ou
liquidation judiciaire du tireur. Le cas échéant, l’opposition doit être établie par écrit
et justifiée par tout document utile.
Si l’opposition, motivée par l’une des causes permises, se révèle non sincère et faite
avec l’intention de porter atteinte aux droits d’autrui, l’opposant encourt un peine
d’emprisonnement de un à cinq ans et/ ou une amende de 2 000 à 10 000 dirhams.
Tout établissement bancaire est tenu de mentionner sur les formules de chèques
délivrées aux titulaires de comptes, les sanctions encourues en cas d'opposition fondée
sur une autre cause que celles prévues ci-.dessus.
Si le tireur fait opposition pour d'autres causes, le président du tribunal, même dans
le cas où une instance au principal est engagée, doit sur la demande du porteur
ordonner la mainlevée de cette opposition.

B- Le recouvrement du chèque :

Au cas de non paiement du chèque à sa présentation, le porteur peut tenter d’en


poursuivre le recouvrement forcé tant que du moins les recours prévus à cet effet ne
sont pas prescrits.

1- Le chèque sans provision :


Un chèque qui ne peut être payé faute de provision ou de dépôt suffisant est dit
chèque sans provision ou chèque en bois.
Dans tel cas, la banque envoie au tireur une lettre d’injonction. Il s’agit d’une
injonction de restitution du chèque avec interdiction d’utilisation pendant 10 ans mais
avec des possibilités de régularisation dans les conditions prévues par la loi. La
banque délivre ensuite un certificat de refus de paiement de chèque. Ce certificat
comporte les indications suivantes : N° du chèque, le lieu, la date d’émission, le

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montant du chèque, les éléments d’identification du titulaire du compte, le ou les
motifs de rejet. Ce certificat servira au bénéficiaire à dresser un protêt et à conserver
des informations précises sur le titulaire de compte et sur l’incident pour intenter une
action judiciaire.
Le tireur peut retrouver la possibilité d’émettre des chèques s’il règle le montant du
chèque ou constitue la provision suffisante pour le règlement et s’il s’acquitte de
l’amende fiscale. Celle- ci est fixée à :
- 5 % du montant du chèque en cas de premier incident ;
- 10 % du montant du chèque en cas de second incident ;
- 20 % du montant du chèque en cas de troisième incident et suivants.

2- Le protêt :
Le protêt est un écrit établi par les agents du secrétariat- greffe du tribunal. Il est
destiné à fournir une preuve de défaillance du tireur. Toutefois, si le chèque comporte
la mention « retour sans frais » ou « retour sans protêt », le porteur est dispensé de
dresser un protêt.

3- L’exercice de recours :
a- le porteur est diligent :

Le porteur peut exercer ses recours contre le tireur, les endosseurs et les autres
obligés si le délai de présentation du chèque au paiement est respecté et si le refus du
paiement est constaté par un protêt dressé au plus tard le lendemain de l’expiration du
délai légal de paiement.
Le porteur doit donner avis à son endosseur et au tireur dans les 8 jours qui suivent
l’établissement du protêt. En cas de clause de retour sans frais, le jour de la
présentation. Cette notification faite au tireur vaut pour un commandement de payer.
Chaque endosseur doit dans les 4 jours ouvrables qui suivent le jour où il a reçu
l’avis, faire connaître à son endosseur l’avis qu’il a reçu. Celui qui ne transmet pas
l’avis est responsable du préjudice causé par sa négligence.

b- Le porteur est négligent :

Le porteur est dit négligent lorsqu’il ne respecte pas le délai légal de présentation
du chèque au paiement ou ne fait pas dresser un protêt. Dans tel cas, le porteur n’a
recours que contre le tireur.
Le porteur ou celui qui a payé le chèque peut réclamer : le montant du chèque, les
intérêts de retard et les frais du protêt.

4- La prescription des recours :

Lorsque les recours ont été sauvegardés, à la diligence du porteur, ils se prescrivent
néanmoins comme suit :
- 6 mois à partir de l’expiration du délai de présentation pour les actions du
porteur contre les endosseurs, le tireur et les autres obligés ;
- 6 mois également à partir du jour où un signataire a remboursé le chèque ou du
jour ;
- 1 an à partir de l’expiration du délai de présentation pour l’action du porteur
contre le tiré.

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En cas de prescription, il subsiste néanmoins une action de droit commun contre le
tireur qui n’a pas fait provision ou les autres obligés qui se seraient enrichis
injustement.
Section II- Les titres de créance :

Ils correspondent à une nécessité de l’activité commerciale et, plus généralement, de


la vie des affaires. En effet, le mouvement des affaires génère une quantité
considérable de créances payables à terme que leurs titulaires sont souvent contraints
de céder soit à fin de règlement de leurs propres dettes, soit à fin de garantie du crédit
qu’ils sollicitent en contrepartie. Or, la cession de créance en droit commun,
impliquant une signification au débiteur par exploit d’huissier de justice, est
manifestement inadaptée à la cession massive et réitérée des créances. D’où la
conception d’instruments de transmission simplifiée consistant en des titres
représentatifs des créances qu’ils constatent et déclarés cessibles par simple remise,
éventuellement assortie d’un endossement s’ils sont nominatifs. La lettre de change
et le billet à ordre constituent les plus universels de ces instruments de mobilisation de
créance.

I- La lettre de change (L.C) :


A- Définition :

La lettre de change ou traite est un écrit, par lequel, une personne dénommée tireur
(créancier) donne l’ordre à une autre personne appelée tiré (débiteur) de payer une
somme déterminée à une échéance donnée, au profit d’une troisième personne appelée
bénéficiaire.
B- Conditions de forme :

1- Mentions obligatoires :

- La dénomination de la lettre de change insérée dans son texte même ;


- L’ordre de payer ;
- La somme en chiffres et en lettres ;
- L’échéance (date de paiement). A défaut, la lettre de change est payable à vue ;
- Le nom du tireur et ses références ;
- Le nom du tiré et ses références ;
- Le nom du bénéficiaire. A défaut, la lettre est au porteur
- La date de création : indispensable pour apprécier la capacité juridique et les
pouvoirs du tireur ;
- La signature du tireur et l’acceptation du tiré.
Le titre dans lequel l’une des mentions précitées ferait défaut ne vaut pas comme
lettre de change mais au mieux comme un titre établissant la créance qu’il constate.

2- Mentions facultatives :
- La domiciliation : La banque désignée par le tiré pour le paiement de la traite. A
défaut de désignation de la domiciliation, la traite est payée au domicile du tiré ;
- Clause « retour sans frais » ou « sans protêt » : cette clause signifie que le
porteur est dispensé d’établir un protêt en cas de refus de paiement ;
- Le lieu de création : s’il n’est pas indiqué expressément, la lettre de change est
considérée comme souscrite dans le lieu désigné à côté du nom du tireur.
C- Conditions de fond :

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1- La capacité des signataires :
Toute personne capable juridiquement peut tirer une lettre de change même s’elle
n’est pas commerçante. Toutefois, la lettre de change est un acte de commerce par la
forme.
La lettre de change souscrite par un mineur non commerçant est nulle à son égard,
sauf les droits des parties conformément au droit commun.
Si la lettre de change porte des signatures de personnes incapables de s'obliger par
lettres de change, des signatures fausses ou des signatures de personnes imaginaires
ou des signatures qui, pour toute autre raison, ne sauraient obliger les personnes qui
ont signé la lettre de change, ou du nom desquelles elle a été signée, les obligations
des autres signataires n'en sont pas moins valables.

2- L’objet et la cause :

C’est La provision ; C’est la créance du tireur sur le tiré ; elle correspond à la


somme indiquée sur la L.C. Elle est l’objet de la L.C parce que à l’échéance, la traite
permet le transfert de la propriété de la provision du tiré au porteur. Elle représente
également la cause puisqu’elle constitue le but recherché par tous les signataires. Il
n’est pas nécessaire que la provision soit constituée le jour de l’émission mais elle
doit exister au plus tard le jour de l’échéance.

3- Le consentement :
C’est la signature du tireur et l’acceptation du tiré de payer la traite au porteur le
jour de l’échéance.
L'acceptation est écrite sur la lettre de change. Elle est exprimée par le mot accepté
ou tout autre mot équivalent; elle est signée du tiré. La simple signature du tiré
apposée au recto de la lettre vaut acceptation.
Lorsque la lettre de change est créée en exécution d'une convention relative à des
fournitures de marchandises et passée entre commerçants et que le tireur a satisfait
aux obligations résultant pour lui du contrat, le tiré ne peut se refuser à donner son
acceptation dès l'expiration d'un délai conforme aux usages normaux du commerce en
matière de reconnaissance de marchandises.
Le refus d'acceptation entraîne de plein droit la déchéance du terme aux frais et
dépens du tiré.
L' acceptation est pure et simple; mais le tiré peut la restreindre à une partie de la
somme.
Toute autre modification apportée par l'acceptation aux énonciations de la lettre de
change équivaut àun refus d' acceptation. Toutefois l' accepteur est tenu dans les
termes de son acceptation.
Quand le tireur a indiqué dans la lettre de change un lieu de paiement autre que celui
dudomicile du tiré, sans désigner un tiers chez qui le paiement doit être effectué, le
tiré peut l'indiquer lors de l acceptation. A défaut de cette indication, l' accepteur est
réputé s'être obligé à payer lui-même au lieu du paiement.
Si la lettre est payable au domicile du tiré, celui-ci peut, dans l' acceptation, indiquer
une adresse du même lieu où le paiement doit être effectué.
Par l' acceptation, le tiré s'oblige à payer la lettre de change à l' échéance.

4- L’aval :
Le paiement d’une lettre de change peut être garanti pour tout ou partie de son
montant par un aval. L’aval est un engagement de caution pris par un tiers appelé

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avaliseur, avaliste ou donneur d’aval. Ce dernier doit indiquer pour le compte de qui il
est donné. Cette garantie est donnée soit sur la lettre de change, soit dans un acte
séparé indiquant le lieu où il est intervenu. Sur la lettre de change, l’aval s’exprime
par les mots « bon pour aval » ou toute autre formule équivalente, suivie de la
signature de l’avaliste.
L’aval n’est qu’une modalité du contrat de cautionnement. Ce qui entraîne
notamment deux conséquences à savoir : 1) que le donneur d’aval est tenu de la
même manière que le signataire dont il s’est porté garant ; 2) que s’il a été contraint
payer le titre, il peut agir en remboursement contre le signataire et tous ceux qui le
précèdent dans la chaîne des signataires.

5- L’échéance :

Il s’agit de l’époque à laquelle la L.C. doit être payée. Quatre possibilités :


- A vue : si l’échéance n’est pas indiquée. La L.C est considérée comme payable à
vue. Elle doit être présentée au paiement dans le délai d' un an à partir de sa date. Le
tireur peut abréger ce délai ou en stipuler un plus long. Ces délais peuvent être
abrégés par les endosseurs.
- A un certain délai de date : dans 1, 2 mois après la date d’émission. L'échéance
d' une lettre de change tirée à un ou plusieurs mois de date ou de vue a lieu à la date
correspondante du mois où le paiement doit être effectué; à défaut de date
correspondante, l'échéance a lieu le dernier jour de ce mois.
Quand une lettre de change est tirée à un ou plusieurs mois et demi de date ou de vue,
on compte d'abord les mois entiers
- A échéance fixe : le 30 mars
- A un certain délai de vue : à partir de la date d’acceptation ou du protêt.

D- Transmission de la lettre de change :


La L.C est un titre à ordre. Elle est transmise par endossement. On distingue trois
sortes d’endossement :
- Endossement à titre de propriété ou translatif de propriété : par cet
endossement, l’endosseur transmet à l’endossataire la propriété de la traite et le
bénéfice des droits y rattachés ;
- Endossement de procuration ou à titre de mandat : L’endosseur donne
seulement mandat à l’endossataire d’encaisser le montant de l’effet. L’endossataire
est généralement un banquier. Cet endossement s’exprime par la mention « valeur en
recouvrement » ou « pour encaissement » ou « par procuration ». Le porteur peut
exercer tous les droits dérivant de la lettre de change, mais il ne peut endosser celle-ci
qu'à titre de procuration.
- L’endossement de garantie ou endossement pignoratif : l’endosseur remet
l’effet en gage à un prêteur, généralement un banquier, en garantie du remboursement.
Il s’exprime par la formule « valeur en garantie » ou « valeur en gage ».

Quelle que soit sa variété, l’endossement est possible même si la lettre de change
n’a pas été tirée expressément à ordre. Mais, si le tireur ne veut pas qu’elle soit
endossable, il doit insérer dans le texte la formule « non à ordre » ou « non
endossable » ; le titre n’est alors transmissible que selon les formalités du DOC (Dahir
des obligations et des contrats). Dans ce cas, la transmission est effectuée par un acte
enregistré et signifié par huissier au tiré ou cession accepté par lui dans un acte
notarié.

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Il faut également souligner que la traite peut être au porteur. Autrement dit, le tireur
ne désigne pas le nom du bénéficiaire. Dans ce cas, on parle d’endossement en blanc.

E- Paiement de la lettre de change :


1- Présentation au paiement :
L’obligation est imposée au porteur de présenter l’effet en paiement à l’échéance au
domicile du tiré à moins que l’effet n’ait été domicilié.
➢ La L.C à vue est payable à sa présentation. Elle doit être présentée au paiement
dans le délai d’un an à partir de sa date, mais le tireur peut abréger ce délai ou en
stipuler un plus long. Les endosseurs peuvent seulement abréger ce délai.
➢ La L.C payable à jour fixe ou à certain délai de date ou de vue doit être
présentée au paiement, soit le jour où elle est payable, soit l’un des cinq jours
ouvrables qui suivent.
➢ L’échéance d’une L.C à un certain délai de vue est déterminée, soit par la date
d’acceptation, soit par celle du protêt. En cas de refus d’acceptation, le porteur peut
faire dresser un protêt qui fait courir ce délai.
L'endossement postérieur à l'échéance produit les mêmes effets qu'un endossement
antérieur. Toutefois, l'endossement postérieur au protêt faute de paiement, ou fait
après l'expiration du délai fixé pour dresser le protêt, ne produit que les effets d'une
cession ordinaire.
Sauf preuve contraire, l'endossement sans date est censé avoir été fait avant
l'expiration du délai fixé pour dresser le protêt.
Il est défendu d'antidater les ordres à peine de faux.

2- Modalités de paiement :

Le tiré qui paie la L.C peut demander qu’elle soit acquittée par le porteur. Celui-ci
ne peut d’ailleurs pas refuser un paiement partiel : il en donne quittance et fait dresser
un protêt pour le surplus ; le tiré pouvant exiger que mention du paiement partiel soit
faite sur l’effet. En revanche, le tiré ne peut obliger le porteur à accepter un paiement
avant l’échéance ; mais si a L.C ne lui est pas présentée le jour de l’échéance ou l’un
des cinq jours ouvrables qui suivent, il peut en consigner e montant au secrétariat
greffe du tribunal de son domicile aux frais, risques et périls du porteur.
L’opposition au paiement n’est admise qu’en cas de redressement ou de liquidation
judiciaire du porteur ou de vol ou de perte de la L.C. En cas de perte d’une L.C, à
défaut d’accord amiable avec le tiré, celui qui l’a perdue peut obtenir le paiement sur
ordonnance du juge en justifiant de sa propriété par ses livres et en fournissant une
caution qui reste engagée pendant trois ans.

F- Recouvrement de la lettre de change :

Lorsqu’elle n’est pas payée spontanément, la L.C doit être recouvrée par voie
forcée. Une telle procédure qui s’exprime par la mise en œuvre de recours est
préparée par l’établissement de protêts.

1- Les protêts :
On appelle protêt un acte authentique dressé par un agent du secrétariat- greffe du
tribunal, pour constater le refus du tiré d’accepter une lettre de change ou d’en
effectuer le paiement. Il y a donc deux sortes de protêts : le protêt faute d’acceptation
et le protêt faute de paiement. Dans les deux cas, l’acte de protêt contient la

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transcription littérale de la L.C avec toutes les mentions comme l’acceptation et les
endossements, et la sommation d’accepter ou de payer selon le cas. Il énonce les
motifs du refus.
Le protêt faute d’acceptation doit être dressé dans les délais fixés pour la
présentation à l’acceptation. Ce protêt dispense de la présentation au paiement et du
protêt faute de paiement ; de même en cas de cessation de paiements du tiré, la
production du jugement déclaratif peut remplacer le protêt.

Le protêt faute de paiement doit être établi dans les délais fixés pour la présentation
au paiement s’il s’agit d’une L.C à vue. Pour les L.C payables à jour fixe ou à un
certain délai de date ou de vue, le protêt doit être dressé l’un des cinq jours ouvrables
qui suivent le jour où la L.C est payable.
Le tireur, un endosseur ou un avaliseur, peut par la clause « retour sans frais » ou
« sans protêt » ou toute autre clause équivalente inscrite sur la lettre de change et
signée, dispenser le porteur de dresser un protêt faute d’acceptation ou faute de
paiement, mais cette clause ne dispense pas le protêt de la présentation de la L.C dans
les délais prescrits.
En cas de cessation de paiement du tiré, accepteur ou non, ou en cas de saisie de ses
biens demeurée infructueuse, le porteur ne peut exercer ses recours qu'après
présentation de la lettre au tiré pour le paiement et après confection d'un protêt.
En cas de redressement ou de liquidation judiciaire du tiré, accepteur ou non, ainsi
qu'en cas de redressement ou de liquidation judiciaire du tireur d'une lettre non
acceptable, la production du jugement de redressement ou de liquidation judiciaire
suffit pour permettre au porteur d'exercer ses recours.
2- Les recours :
Tous ceux qui ont tiré, accepté endossé ou avalisé une L.C sont tenus solidairement
envers le porteur, c’est-à-dire qu’il a le droit d’agir contre toutes ces personnes,
individuellement ou collectivement, mais sans être astreint à observer l’ordre dans
lequel elles se sont obligées. Celui qui a été contraint de payer une traite a les mêmes
droits contre ceux qui se sont engagés avant lui.
Le porteur doit donner avis du défaut d’acceptation ou de paiement à son endosseur
dans les six jours ouvrables qui suivent celui du protêt ou celui de la présentation en
cas de clause de retour sans frais. Chaque endosseur doit, lui- même, dans les trois
jours ouvrables qui suivent le jour où il a reçu l’avis, faire connaître à son endosseur
l’avis qu’il a reçu en indiquant les noms et adresses de ceux qui ont donné les avis
précédents et ainsi de suite en remontant jusqu’au tireur. Les avaliseurs sont avisés en
même temps que ceux dont ils ont garanti la signature. Le signataire ayant provoqué
un retard de transmission d’avis est responsable des conséquences de son retard.
Le porteur peut réclamer à celui contre qui il exerce son recours : le montant de la
lettre de change, les intérêts au taux légal à partir de l’échéance, les frais du protêt,
ceux des avis donnés et les autres frais. Celui qui rembourse la L.C. peut réclamer, à
son tour : La somme intégrale qu’il a payée, les intérêts de la dite somme calculés à
partir du jour où il a payé et les frais qu’il a supportés.

a- Les droits du porteur diligent :


Le porteur diligent est celui qui a respecté le délai de présentation de la L.C au
paiement ainsi que le délai légal d’établissement du protêt. Ce porteur a un recours
contre chacun des signataires de la L.C, soit parce que le tiré a refusé purement et
simplement de payer, soit parce que le tiré a été déclaré en faillite
b- Situation du porteur négligent :

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Ce porteur perd ses recours contre les signataires, mais il conserve son recours
contre le tireur qui n’a pas fourni de provision, ainsi que contre le tiré accepteur. Par
ailleurs, le porteur négligent conserve la créance personnelle qu’il a contre son
endosseur compensée par le montant de la lettre de change.

3- La prescription des recours :


- Les actions résultant de la L.C contre le tiré se prescrivent par 3 ans à
compter de la date de l’échéance.
- Les actions du porteur contre les endosseurs et contre le tireur se
prescrivent par un an à compter du protêt dressé en temps utile ou de celle de
l'échéance, en cas de clause de retour sans frais.
- Les actions des endosseurs les uns contre les autres et contre le tireur se
prescrivent par six mois à partir du jour où l' endosseur a remboursé la lettre ou
du jour où il a été lui-même actionné.

III- Le billet à ordre :


A- Mentions obligatoires :
Le billet à ordre contient:
➢ la clause à ordre ou la dénomination du titre insérée dans le texte même et
exprimée dans la langue employée pour la rédaction de ce titre;
➢ la promesse pure et simple de payer une somme déterminée;
➢ l'indication de l' échéance;
➢ celle du lieu où le paiement doit s'effectuer;
➢ le nom de celui auquel ou à l'ordre duquel le paiement doit être fait;
➢ l indication de la date et du lieu où le billet est souscrit;
➢ le nom et la signature de celui qui émet le titre (souscripteur).

B- Forme :

Casablanca, le 05 janvier 2008 B.P. //25 000// DH

Echéance 31/ 01/2008


Nous payerons, contre ce billet à ordre, sans frais, à l’ordre de
la Compagnie Marocaine des Hydrocarbures

La somme de : ==vingt cinq mille dirhams=========

Valeur en paiement de la facture n° 7654 du 02/01/08

N° Signature du
08/06 Maroc Oxygène souscripteur
Casablanca ,Zola bd Emile 45

Domiciliation

Timbre
fiscal

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C- Mentions obligatoires :
Pour valoir comme billet à ordre, le titre doit obligatoirement contenir les mentions
suivantes :
➢ La clause à ordre ou les mots « billet à ordre » insérés dans le texte ;
➢ La promesse pure et simple de payer une somme déterminée ;
➢ L’indication de l’échéance ; si une échéance n’est pas indiquée, le billet est
payable à vue ;
➢ Le nom de celui auquel ou à ordre duquel le paiement doit être effectué ;
➢ L’indication de la date et du lieu de création ;
➢ Le nom et la signature du souscripteur.

D- Ressemblances avec la lettre de change :


Sont applicables au billet à ordre les règles, en matière de lettre de change, relatives
à l’endossement, à la garantie solidaire des endosseurs, à l’aval, au paiement, à
l’exercice de recours et aux prescriptions.

E- Différences avec la lettre de change :

En matière de billet à ordre, le tireur est lui-même tiré, donc :


➢ Il n’y a pas d’acceptation puisque la signature équivaut à l’acceptation ;
➢ L’aval, lorsqu’il existe et n’indique pas pour le compte de qui il est donné est
réputé avoir été fait pour le compte du souscripteur ;
➢ Le problème de la provision ne se pose pas ; comme c’est le souscripteur lui-
même qui doit payer, il n’a pas à faire la provision chez un tiers au sens juridique du
mot ; il aura simplement à verser chez son banquier les fonds nécessaires au paiement
si le billet est domicilié chez un banquier.

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