Dossier L’endométriose

La sage-femme face
à une suspicion d’endométriose
Sophie Professionnelles de premier recours, fortes de la reconnaissance de leurs compétences
Dupuis-François élargies, les sages-femmes sont de plus en plus nombreuses à proposer des consulta-
Sage-femme libérale tions gynécologiques à des femmes de tout âge, sans pathologies avérées. Face à des
7 bis avenue Gambetta, douleurs évoquant une endométriose, il est recommandé de pratiquer un examen cli-
83400 Hyères-les-Palmiers, nique et de prescrire une échographie pelvienne.
France
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Mots clés – échographie pelvienne ; endométriose ; examen clinique ; recommandation ; sage-femme ; soin primaire

The midwife’s approach to a suspected case of endometriosis. As primary care pro-

fessionals, with the recognition of their extended skills, more and more midwives are
offering gynaecological consultations to women of all ages, without any proven patho-
logies. When faced with pain suggesting endometriosis, it is recommended to carry out
a clinical examination and to prescribe a pelvic ultrasound.
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Keywords – clinical examination; endometriosis; midwife; pelvic ultrasound; primary care; recommendation

D epuis la parution de la loi “Hôpital, patients,

santé et territoires”, les sages-femmes
peuvent réaliser des consultations de suivi
gynécologique de prévention [1]. Elles sont, de ce fait,
régulièrement confrontées à des femmes rapportant
une symptomatologie douloureuse pouvant évo-
quer une endométriose ou des difficultés à concevoir.
Leur rôle dans le repérage de l’endométriose et
l’orientation des patientes vers un spécialiste est
majeur. Cette intervention doit être le plus précoce
possible pour éviter tout retard de diagnostic.
Signes évocateurs de l’endométriose
  La prévalence de l’endométriose attein-
drait 10 % dans la population féminine en âge
de procréer  [2]. Il s’agit d’une maladie complexe,
multifactorielle et très polymorphe, dont la sympto-
matologie, très variée, regroupe des dysménorrhées,
des dyspareunies profondes, caractérisées par des
douleurs ressenties au niveau du bas-ventre dues au
contact entre la verge du partenaire et le fond vagi-
nal, mais aussi des douleurs pelviennes chroniques
(10 % des consultations de gynécologie).
L’endométriose peut aussi entraîner des troubles
digestifs, comme des diarrhées ou une constipa-
tion, qui sont exacerbés pendant les règles, ainsi que
des problèmes urinaires.
Elle peut également être à l’origine de troubles de
Adresse e-mail :
sophiesflib@gmail.com la fertilité puisque 30 % à 50 % des patientes endo-
(S. Dupuis-François). métriosiques sont infertiles.
  Les dysménorrhées, qui représentent le pre-
mier motif de consultation en gynécologie, sont
retrouvées dans 60 % des cas d’endométriose  [3].
Elles s’aggravent avec le temps, peuvent être inva-
lidantes, à type de douleur aiguë, entraînant des
nausées, des vomissements, voire des malaises, et
avoir un impact extrêmement négatif sur la qualité
de vie de la personne dans toutes ses dimensions.
Elles entraînent souvent un absentéisme scolaire
et professionnel, et nuisent à la sexualité.
Repérage et orientation
  L’interrogatoire d’une femme se plaignant de
dysménorrhées en consultation gynécologique est
primordial. Il se décompose en cinq questions qui
permettront à la sage-femme de distinguer une dys-
ménorrhée essentielle d’une dysménorrhée secon-
daire à l’endométriose :
• la survenue : primaire, dès les premiers cycles,
ou secondaire ;
• la durée : dysménorrhée de précession et/ou
protoméniale (trente-six   heures maximum)
ou dysménorrhée téléméniale (parfois plus de
trente-six heures) ;
• l’intensité : soit modérée à importante, soit d’em-
blée importante ; elle est mesurée par autoévalua-
tion grâce à l’échelle verbale simple (score de 0 à 4) ;
• l’évolution : stable ou aggravation progressive ;
• les symptômes associés : signes neurotoniques
(céphalées, nausées, vomissements, etc.), digestifs

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http://dx.doi.org/10.1016/j.sagf.2021.03.007 Sages-femmes ● mai-juin 2021 ● n° 3

© HAS
Figure 1. Examens de première intention à la recherche d’une endométriose.
ou urinaires, dyspareunies profondes et douleurs
pelviennes non cycliques.
  Face à une suspicion d’endométriose, la sage-
femme pratiquera un examen clinique [4,5], sauf
chez l’adolescente chez qui il sera souvent “pauvre”,
ne révélant rien ; il n’est de toute façon pas réalisable
si la jeune fille est vierge.
Une inspection incluant l’examen du cul-de-sac
vaginal postérieur permettra la visualisation éven-
tuelle de nodules bleutés, signe pathognomo-
nique d’une endométriose profonde. L’examen
recherchera aussi l’induration de la cloison recto-
vaginale et un utérus fixé et/ou douloureux à la
mobilisation.
  En première intention, il est également recom-
mandé de prescrire une échographie endovaginale
de dépistage à la recherche d’endométriomes
ovariens (kystes endométriosiques de l’ovaire) et
d’adénomyose. La femme doit être adressée à un
gynécologue spécialisé [4,5].
  Prendre en charge les symptômes et en
particulier les dysménorrhées est capital dans
l’endométriose. Cette démarche implique de lut-
ter contre la douleur grâce à l’administration
d’antalgiques et de provoquer une aménorrhée
thérapeutique. En l’absence de contre-indication,
il est donc recommandé de proposer une contra-
ception estroprogestative en continu ou micro-
progestative ou un dispositif intra-utérin libérant
du lévonorgestrel à 52 mg.
Recommandations
et pratique professionnelle
  Dans ses recommandations pour la prise en
charge de l’endométriose, parues en 2018, la Haute
Autorité de santé (HAS) et le Collège national des
Sages-femmes ● mai-juin 2021 ● n° 3
L’endométriose Dossier
gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) pré-
sentent la sage-femme comme un acteur de soins
primaires, au même titre que le médecin généraliste
et le gynécologue (figure 1) [4,5].
Toutefois, son rôle n’est pas clairement défini
et concerne surtout la suspicion de la maladie et
l’orientation des femmes vers des spécialistes.
  La HAS et le CNGOF recommandent de
prendre en charge précocement les douleurs
intenses évocatrices d’endométriose et préconisent
d’associer un traitement antalgique de palier 1 aux
contraceptifs  [4,5]. Cependant, les sages-femmes
ne sont pas autorisées, actuellement, à prescrire
en primo-prescription des anti-inflammatoires
non stéroïdiens dans le traitement des dysménor-
rhées ; elles ne peuvent que renouveler la prescrip-
tion d’un médecin.
Conclusion
La sage-femme joue un rôle clé dans le dépistage pré-
coce de l’endométriose et l’orientation des femmes
atteintes vers un spécialiste. Devant le nombre crois-
sant de professionnelles assurant aujourd’hui des
consultations de gynécologie, il semble important
de les sensibiliser à l’importance d’un interrogatoire
et d’un examen clinique minutieux des femmes,
et de rappeler que les dysménorrhées ne doivent
jamais être banalisées, malgré leur fréquence et leur
caractère le plus souvent bénin.
Le rôle de la sage-femme dans la prise en charge des
symptômes douloureux liés à l’endométriose devrait
cependant être précisé. •
Références
[1] Loi n° 2009-879
du 21 juillet 2009 portant réforme
de l’hôpital et relative aux patients,
à la santé et aux territoires.
www.legifrance.gouv.fr/eli/
loi/2009/7/21/2009-879/jo/texte.
[2] Ministère des Solidarités
et de la Santé. Endométriose.
Prendre en charge l’endométriose :
le ministère s’engage. 12 février 2020.
https://solidarites-sante.
gouv.fr/soins-et-maladies/
prises-en-charge-specialisees/
endometriose.
[3] Fritel X, Fauconnier A, Chapron C.
Algies pelviennes chroniques
de la femme. Orientation
diagnostique et conduite à tenir.
EMC Gynecol 2006 [Article
162-A-10].
[4] Haute Autorité de santé,
Collège national des gynécologues
et obstétriciens français. Prise
en charge de l’endométriose.
Recommandation de bonne
pratique. 2018. www.has-
sante.fr/jcms/c_2819733/fr/
prise-en-charge-de-l-endometriose.
[5] Haute Autorité de santé,
Collège national des gynécologues 25
et obstétriciens français. Prise
en charge de l’endométriose.
Démarche diagnostique
et traitement médical. Synthèse
de la recommandation de bonne
pratique. 2018. www.has-sante.
fr/upload/docs/application/
pdf/2018-01/prise_en_charge_
de_lendiometriose_-_demarche_
diagnostique_et_traitement_
medical_-_fiche_de_synthese.pdf.
Déclaration de liens d’intérêts
L’auteur déclare ne pas avoir
de liens d’intérêts.