Vous êtes sur la page 1sur 56

Esquisse d'une histoire de la Haute Mesopotamie

au dobut de PAge du Bronze

par Marc Lebeau — Bruxelles

Cet article consiste en un essai de synthese historique globale du developpement


de la civilisation urbaine en Mesopotamie septentrionale et des conditions generales
qui ont permis ce doveloppement dans un cadre historique compris entre la poriode
d'Uruk et le contröle de la Haute Mesopotamie par Sargon d'Akkad. II va de soi que
ce survol historique ambitieux sera juge tres subjectif. Chacun des paragraphes le
composant est sujet a critiques et nocessiterait des doveloppements plus impor-
tante. II est egalement evident que nous n'avons pu tenir compte dans les limites de
ce travail que d'un apparat critique modeste au regard des questions soulevoes.
Conscient de ce fait, nous demandons au lecteur de faire preuve de beaucoup d'in-
dulgence et peut-etre tout simplement d'entrer dans le jeu. Nous rendant compte de
la fragilit£ de certaines associations de pensee ou de certains liens de causalito, nous
avons cependant, pour des raisons de style, ovite l'emploi constant du conditionnel,
du point d'interrogation et des formules usuelles de roserve. Nous osons esporer
qu'il nous sera beaucoup pardonno.

1. L'expansion urukoenne
1.1 Les sites
L'un des resultats majeurs de la Campagne internationale de
sauvetage des sites archeologiques de la grande boucle de l'Eu-
phrate ou allait se former le lac Assad en Syrie fut, sans conteste, la
mise au jour d'etablissements de type urukoen dont le centre
majeur fut sans doute l'agglomoration ancienne englobant Habüba1
et Tall Qannäs, Tacropole2. Ce grand centre urbain otait double
d'etablissements secondaires situos a proximito immodiate, öabal
'Arüda3, Tall al-Hagg4, et Tall Öeh Hasan5, pour en mentionner les
plus importants.

Fouilles ailemandes dirig^es par E. Heinrich, puis par E. Strommenger, cf.


Strommenger 1980.
Fouilles beiges dirigoes par A. Finet, cf. Finet 1975, 157-174.
Fouilles n^erlandaises dirigoes par G. van Driel, cf. van Driel 1983, 1-26.
Fouilles suisses dirigees par R. Stucky, cf. Stucky 1974.
Les fouilles y ont ete dirigees par J. Cauvin, puis reprises par J. Boese qui y a
recemment mis en ovidence des niveaux de cette opoque. Boese m'a aimable-

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
242 Marc Lebeau

Cette revelation majeure n'allait pas rester sans suite. Le regain


d'interet affiche par les archeologues pour le cours superieur de
TEuphrate allait dans les annoes '70 permettre de mettre en
lumiere une occupation systematique des rives du fleuve a Tepoque
d'Uruk. Ces sites se repartissent sur l'Euphrate entre Nor§untepe6
et Malatya (Arslantepe)7 au nord et Tall Ramädi au sud (un site
dans le voisinage immediat de Mari, a ne pas confondre avec l'ac-
tuelle ville de Ramädi en Iraq)8. Les recherches de l'equipe dirigee
par Jacques Cauvin revelerent egalement dans la region d'al-
Qawm (al-Qawm 2 — Caracol), dans le desert Syrien, une cera-
mique de type Uruk bien que les niveaux architecturaux contempo-
rains semblent avoir ete considerablement erodes9.
Entre Malatya et Tall Ramädi, la presence de sites urukeens sur
le cours de l'Euphrate est actuellement bien documentee. Dans la
region de Terqa, une partie de Tequipe dirigoe par G. Buccellati
s'est attelee a la fouüle de Tall Qrayya, Tun de ces etablisse-
ments10. Vers le nord, en Turquie, le cours de l'Euphrate a servi
d'axe de penetration vers le coeur de TAnatolie (Hassek Höyük11
et les sites du voisinage12, Arslantepe13, Tepecik14, Nor§untepe15).
En Haute Mesopotamie, dans la öazira, ce sont egalement des
fouilles recentes qui ont mis en valeur l'occupation de la region a
cette epoque. Les fouilles de l'equipe du Prof. van Loon a
Hammäm al-Turkmän, sur le Balih, ont exhume des niveaux d'oc-
cupation urukeens et plus important encore, les vestiges partiels
d'un bätiment officiel a niches et redans16. Les sondages profonds
realises a Tall Lelän ont assure la presence de niveaux archeologi-
ques dont la ceramique presente quelques types voisins de la cera-

ment communiquo les copies des rapports de 1984 et de 1985, cf. Boese 1985,
Boese 1986.
6
Hauptniaiin l'JTi'. W7(i. l!)7i) et 1982.
7
Palmieri 1981 et 1985.
8
Monchambert 1987 a, 304 et 317, flg. 8.
" Cauvin 1985.
10
J'ai pu voir sur place, gräce a l'obligeance des fouilleurs, une partie du matoriel
de ce site.
11
Behm-Blancke 1981.
12
Dont Hayaz, Kurban Höyük, Samsat, Gritille et Karatut Mevkii, voir Schwartz
1988, 5-8.
1{
Palmieri 1981 et 1985.
14
Esin 1982 a et b.
15
Hauptmann 1972, 1976, 1979 et 1982.
16
Van Loon 1983.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze 243

mique sud-mesopotamienne et ces niveaux, semble-t-il, precedent


immediatement les premiers niveaux Ninive 5, dont la caracteri-
stique materielle majeure est l'apparition de la ceramique Ninive 5
peinte17.
Tall Brak, Tun des sites majeurs de la region, est egalement
occupe a l'epoque d'Uruk, epoque a laquelle son importance parait
manifeste18. II n'est pas inutile de rappeler ici que ce site temoigne
d'une veritable epaisseur chronologique des niveaux reliables a
l'epoque d'Uruk, une epaisseur assez rare semble-t-il sur les sites
de nature «coloniale» tels que Habüba/Qannäs. L'on y a en efiet
retrouve des niveaux assimiles a une periode «early Uruk» dont la
ceramique presente des analogies avec celles de Grai Re§ et du
niveau XI de Tepe Gawra19.
Pres de la frontiere syro-iraqienne, le site de Tall Hamükär,
repere par Eva Strommenger et etudie dans la suite par Harvey
Weiss20, semble un etablissement de toute premiere importance.
Weiss lui attribue une taille de 90 hectares avec des niveaux d'oc-
cupation tres etendus a l'epoque d'Uruk et au Bronze ancien. Visi-
tant ce site en automne 1987, j'ai pour ma part ete frappe par la
densite de la ceramique urukoenne, dispersee sur une aire tres
vaste a la surface meme du site. Tall Hamükär a certainement
constitue a l'epoque d'Uruk un centre administratif de premiere
ampleur, voire un puissant point d'appui ou de relais sur la voie
commerciale est-ouest traversant la region des tributaires du Hä-
bür.
Pour en venir a la region du Haut Tigre, les recentes fouilles de
sauvetage de la region d'Eski Mö§ul, pres de Mosul et donc au nord
de Ninive, ont permis de revoler des etablissements occupes a
l'epoque finale d'Uruk, entre autres Muhammad 'Arab21 et
Karrana 22 , non loin du site de Tulül at-Taläta, fouille auparavant
par une equipe japonaise, site qui lui aussi livra de la ceramique de
cette epoque23.

Weiss 1985 a, 19-23, Schwartz 1983, 182 et 245.


Fielden 1981, 157-166; Gates J. 1985, 175-188.
Gates J. 1985, 177—179. Ce matoriel «early Uruk» est noanmoins tres difierent,
semble-t-il, de celui du sud mesopotamien.
Notamment Weiss 1985 b, 270 et 272.
Roaf 1984.
Fouilles dirigees par M. Fales (rapport sous presse, cito par Schwartz 1988,
5-6).
Egami 1959.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
Marc Lebeau

Les recentes fouilles de sauvetage dans la region du Häbür (au


nord de Hasaka, sur leWädi (Aweg et au sud de Hasaka, sur le
cours moyen du Häbür) commencent egalement a livrer, sur
certains des sites fouilles, des niveaux de l'epoque finale d'Uruk
sous-jacents a des occupations Ninive 5 ou, tout au moins, dont la
ceramique commune präsente de nombreuses analogies avec celle
des sites Ninive 524.
Cette revue des sites urukeens ou ayant livre un materiel de
nature urukeenne n'est evidemment que tres sommaire et ne
pretend pas du tout a l'exhaustivite25. Nous laisserons de cöte le
cas semble-t-il particulier de Tepe Gawra ou les niveaux contempo-
rains de l'epoque d'Uruk sont evidemment manifestes mais ou le
materiel ceramique presente certainement des traits particuliers
assez marginaux26.

1.2 La nature des sites


II ne conviendrait pas de simplifier par trop la question de l'im-
plantation urukeenne en Haute Mesopotamie et dans les regions
adjacentes en imaginant que les pouvoirs sud-mosopotamiens ont
cree ou coloniso tous ces otablissements27. La Situation est en effet
loin d'etre aussi claire. L'etude comparative des corpus ceramiques
retrouvos sur ces sites a l'opoque finale d'Uruk pennet de nous
rendre compte de plusieurs cas de figure tres diflerents.
G. Schwartz s'est tout rocemment attele a cette question tres deli-
cate au depart de l'etude des composantes coramiques, isolant les
coramiques d'origine locale et la coramique dont les types formels
et la nature physique semblent clairement ä associer a ceux de la
coramique d'Uruk, donc d'origine sud-mesopotamienne28. Si

24
C'est notamment le cas a Tall QaöqaSuq, a Tall MaSnaqa (Monchambert 1987 b:
le fouilleur n'y a atteint pour le moment que le niveau 5 [Brony.c ancien 2] mais
mentionne la prosence indubitable sur le site de tessons de l'epo(|ue d'Uruk) et a
Umm Qsir (Monchambert 1984, 2, 6—7) ou F. Hole a choisi d'efTectuer rocem-
ment des sondages.
25
Pour un inventaire plus complet, se reportera ä Schwartz 1988, passim.
26
Cf. Sürenhagen 1986 b, 17.
27
II va de soi que Texpansion de cette culture urukoenne s'est Egalement produite
vers Test, en Iran, vers l'Afghanistan et le Pakistan, par rintermodiaire de Suse,
mais traiter de ce sujet nous ferait dopasser largement le cadre reservo a cet
article.
28
Schwartz 1988, 5—8. Cette otude remarquable privilogie l'examen de la c^ra-
mique et des lors, certaines limites s'imposent (cf. notre n. 34). Si nous accep-

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 245

certains etablissements paraissent fondes par les Urukeens ou tout


au moins semblent largement developpes volontairement a cette
epoque, d'autres sites semblent d'origine locale et n'ont livre
comme ceramique reliee a celle d'Uruk que quelques types bien
caracteristiques. Dans d'autres cas, aurait une Situation assez
mixte comparable a celle d'un kärum sud-mesopotamien etabli
dans un site dont le developpement premier est d'origine endo-
gene.
Dans le premier cas, celui des etablissements crees par les
Urukeens, sites ayant livre une ceramique d'allure sud-mesopota-
mienne, Schwartz cite Habüba/Qannäs, öabal 'Arüda, Tall al-
Hagg, soit la serie des sites urukeens de la grande boucle de
l'Euphrate, a l'emplacement de l'actuel lac Assad ( pourrait y
ajouter Tall Seh Hasan), Tall Qrayya et Tall Ramädi, deux sites
de l'Euphrate dans le voisinage respectif de Terqa et de Mari, peut-
etre aussi KarkemiS et Samsat, un site du Haut Euphrate, dans le
bassin de Karababa, en Turquie29. Plus a Test ou dans la region
meme du Haut Tigre, Ninive, Tall Hamükär et Grai Re§ pourraient
etre des sites dont la nature est d'essence «coloniale»30. Le site
d'al-Qawm-Caracol, dans une oasis dudesert de Syrie, pourrait lui
aussi avoir ete volontairement implante31.
Dans un deuxieme cas, celui comprenant les sites dont la cera-
mique et d'autres traits de culture materielle sont tres voisins des
modeles sud-mesopotamiens mais ou existent egalement des traits
culturels locaux assez discrets, Schwartz mentionne les etablisse-
ments suivants: Arslantepe (niveau VIA), Hassek Höyük et
Tepecik, sites anatoliens de l'Euphrate, Tall Brak, site majeur du

tons volontiers les principales conclusions de l'auteur, surtout lorsqu'il souligne


les disparites entre des sites parfois tres voisins, nous emettrons toutefois une
lagere resei*\re quant a la prise en considoration commune des epoques d'Uruk et
de öamdat Nasr. Nous estimons en eflet qu'il faudrait soparer ces deux tranches
chronologiques pour un examen du reseau commercial et du contröle des regions
de Haute Mesopotamie. Des traits fondamentaux du Systeme otabli par les
Urukeens nous semblent avoir ete modifies a l'epoque de öamdat Nasr en raison
de Femergence de cultures locales. En ce qui concerne les difTerences relatives
des assemblages archeologiques, consultera ogalement Sürenhagen 1986 b
10-15.
Schwartz 1988, 7-8.
Schwartz 1988, 7.
Schwartz 1988, 7.
16 ZA 80
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
246 Marc Lebeau

triangle du Häbür et Umm Qsir, site du Moyen Häbür, au sud de


Hasaka32.
La troisieme categorie define par Schwartz comprendrait des sites
ou la culture materielle serait essentiellement locale mais oü se
glisseraient quelques elements urukeens du sud. Sont compris dans
cette categorie les etablissements de la region de l'Amuq (Amuq
F et G) et Hama (niveaux K8—6) dans la zone culturelle syrienne,
Hayaz, Karatut Mevkii et Kurban Höyük, en Anatolie, Tall Lelän IV,
dans les plaines du JJäbür, Muhammad <Arab et Karrana 3, sur
le Haut Tigre, Bäsmusiän et des sites voisins au Kurdistan, et
Yorgän Tepe, pres de Kirkuk33.
Enfin, les sites totalement prives de ceramique urukeenne mais
occupes a cette epoque formeraient le quatrieme groupe. Tepe
Gawra et Tulül at-Taläta, Karrana l et 2, MiSrifa et Rifan, dans la
region d'Eski Mösul, Qaling Agä, pres d'Erbil, Hammäm al-Turk-
män34, sur le Balih, Arslantepe VII, Nor§untepe, Kurban Höyük,
en Anatolie et enfin Tall Lelän, au niveau V35.

1.3 Les voies de penetration


Du point de vue geographique, la presence urukeenne est, nous
le constatons, tres bien attestee en Haute Mesopotamie, dans ces
plaines du Balih et du Jläbür qui representent Tarc nord du
Croissant fertile, sur cette voie majeure est-ouest de liaison entre le
Tigre et TEuphrate. Le cours de l'Euphrate, entre Malatya et la
region de Mari (Tall Ramädi), est pour sä part regulierement balise
par ces etablissements umkeens et donc rigoureusement controle.
Ils sont certainement etablis pour durer a des points precis sur le
fleuve leur permettant de rosister aux crues exceptionnelles et au
deplacement des meandres36.
Dans la region de la öazira, le developpement sans doute sur
une grande echelle de l'agriculture seche permet a ces sites une
autarcie agricole et la constitution de Stocks alimentaires suffi-
sants pour que les populations soient en mesure de pallier les aleas

Schwartz 1988, 6-7.


Schwartz 1988, 6.
Nous pouvons nous otonner de retrouver dans cette derniere categorie ce site de
Hammäm al-Turkmän qui nous a pourtant livre un bei odifice officiel a niches et
redans d'allure tres urukeenne (van Loon 1983).
Schwartz 1988, 5-6.
C'est du moins le cas pour Tall Qrayya et Tall Ramädi (Geyer 1987, 304).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au delmt de l'Age du Bronze 247

climatiques eventuels. Sur le cours de l'Euphrate, la rogion de Mari


(qui n'existe pas encore) constitue geographiquement la premiere
alveole au sud veritablement exploitable sur un plan agricole
(avant le resserrement de la vallee a Bägüz, soit a Tactuelle fron-
ti&re entre la Syrie et l'Iraq)37.
Si eile ne suffira pas a alimenter la grande ville de Mari (qui
importera constamment du grain et des lors sera tres dependante
de ses satellites du Häbür et des marchands de Pouest), cette
alveole goographique peut sans problöme apparent suffire aux
besoins alimentaires d'un site de la taille de Tall Ramädi.
L'explication traditionnelle des voies de penetration generant
les contacts entre Uruk et le Moyen Euphrate fait la part belle a la
route de l'Euphrate, cette «voie royale» qui aurait tout au long de
Thistoire mesopotamienne ete le lien majeur entre le Pays de
Sumer d'une part, la Haute Mesopotamie et la Syrie d'autre part.
La navigation sur ce fleuve, lit-on frequemment, aurait permis -
portation des matieres premieres indispensables dans un pays
sumerien depourvu de bois et de pierre. Les frequentes allusions
des grands souverains a la «Montagne des Cedres» seraient une
preuve evidente du contröle du grand fleuve a diverses epoques de
l'histoire mesopotamienne. Nous nous permettons de relativiser
quelque peu ces assertions. Si nous ne contestons pas que cette
route ait et£ choisie en certaines occasions pour acheminer des
biens du nord vers le sud et reciproquement, souvent meme a
Tepoque paleobabylonienne38, nous estimons vraisemblable que
Taxe commercial majeur n'etait pas la route de l'Euphrate.
A Tepoque d'Uruk, les architectes geniaux des grands edifices de
l'Eanna ont certes un besoin constant de pierre mais ils pouvaient
la trouver tres pres d'Uruk, a proximite de Samäwa oü subsistaient
encore rocemment des cimenteries prosperes, comme Ta recem-
ment demontre Boehmer39. Quant au bois de construction, n'etait-
il pas plus aise de le querir sur les piomonts du Zagros ou en
Elam40 a supposer qu'a cette opoque n'aient point existe des
sources d'approvisionnement dans la vallee alluviale meme,

Geyer 1985, 27-39 et Sanlaville 1985, 21.


Voir notamment Finet 1985, 41-44.
Boehmer 1984, 141—148; Samäwa est situo sur l'Euphrate, a environ cinquante
kilometres a l'ouest d'Uruk.
II est vrai que les textes ne sont guere loquaces a ce propos; n'oublions pas
cependant qu'il existe egalement une «Montagne des Cedres» olamite
(Michalowski 1986, 143).
16*
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
248 Marc Lebeau

soumise ä un climat plus clement et en tout cas irriguee de


maitresse fa^on? Le transport de bois de cedre de l'Amanus ou du
Liban n'aurait 6te qu'exceptionnel, realise ä des fins plus symboli-
ques qu'utilitaires.
Pour en revenir ä l'Euphrate, les fouilles de sauvetage de la
vallee de Hadita et les nombreuses prospections qui les ont prece-
dees n'ont a ce jour et ä ma connaissance revele aucun site majeur
datable soit de Tepoque d'Uruk, soit de l'opoque des dynasties
archaiques41. Bien plus, la portion du cours de l'Euphrate entre
Mari et la region de Ki§ semble depourvue de sites marquants
appartenant ä ces epoques. Aucun point de relais, aucun point
d'appui sur une aussi longue distance42. Le fait est troublant d'au-
tant plus que ne peut supposer que tous les sites attendus sur
cet axe aient disparu, victimes de l'erosion fluviale, puisque
sait precisement qu'au nord de la region de Mari, ils sont etablis en
des points geographiques soigneusement etudies et reconnus. Nous
avons donc quelque peine ä admettre l'importance capitale de
l'Euphrate, du moins ä ces epoques, comme jonction evidente et
naturelle entre Sumer et la region de Mari.
S'il est eflectivement navigable sur une grande partie de son
cours, surtout ä partir d'Emar, ce fleuve ne Test pas sans aleas:
les meandres importants et marques sont peu propices au chemine-
ment rapide, les tourbillons y sont nombreux. Certains mois de
l'annoe, en periode de hautes eaux ou en cas d'etiage accentue, la
navigation doit y etre tres delicate, voire perilleuse43. Les routes
qui le longent n'offrent evidemment pas tous ces inconvenients
mais sont regulierement coupees en periode de crues ou en cas de
fort/es pluies, au debut du printemps et de l'hiver.
Au sud de la region de Mari, la valloe de TEuphrate se resserre
considerablement. Les possibilitos de mise en valeur agricole des
terres des terrasses basses et moyennes y sont sensiblement plus
reduites. Un etablissement de quelque importance y serait con-
stamment dependant quant ä ses ressources alimentaires.
De plus, il est vraisemblable que cette region entre Mari et Ki§
ait constituo la voie de ponetration majeure des nomades ou semi-
nomades en provenance de la peninsule arabique, veritable fleau
pour les sedentaires mesopotamiens regroupes ä Tabri de

41
Hormis le site de Suwär, occupo a l'opoque dynastique archaique.
42
Ce point est ogalement souligne par Sürenhagen (1986b, 15).
43
Sanlaville 1985, 24-25.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze 249

puissantes fortifications. II est sense de penser que cette region ait


longtemps ete controlee par ces nomades.
La route de l'Euphrate ne fut probablement contrölee par les
royaumes sedentaires que lors des periodes de grande stabilite
d'un pouvoir central hegemonique, certainement a l'epoque de
Hammurabi et de ses successeurs directs44, voire a l'epoque d'Ur
III. A Tepoque d'Uruk, l'absence totale d'etablissements rend
eminemment suspects le contröle et la maitrise de cet axe par les
citos de Basse Mesopotamie.
La vraie penetration, voire la colonisation meme si ce terme
parait un peu fort, s'est faite par une autre voie, celle du Tigre, ou
plus precisement par la route associee a ce fleuve et aux piemonts
du Zagros, cette route qui passe par les grands sites de la vallee de
la Diyälä et, plus au nord, par la region du öabal Hamrin pour
aboutir a Ninive ou du moins dans cette region. A partir de ce
point, la route principale bifurque, suit un axe est-ouest, passe
semble-t-il au nord du öabal Singär, vraisemblablement pres du
grand site de Hamükär, puis se poursuit vers Touest a travers les
plaines du Häbür, traverse le Balih, pour mener enfin a la grande
boucle de l'Euphrate, soit a Karkemi§, soit dans la region de
Habüba/Qannäs. A partir de ces grands centres urbains, eile longe
l'Euphrate soit vers le nord, menant jusqu'ä Malatya, soit vers le
sud, jusqu'ä la region de Mari.
Les sites de cette epoque, pour peu qu'ils aient ete fouillos de
maniere extensive, nous renvoient l'image de centres urbanises
dont la culture materielle est, quoiqu'a une plus petite echelle, le
reflet assez fidele de celle des grands centres du sud: une
architecture pratiquement identique dans un urbanisme similaire,
la presence de bätiments officiels a niches et redans etablis sur des
terrasses, une ceramique qu'on aurait beaucoup de mal a distin-
guer de celle des etablissements du Pays de Sumer, la preuve d'une
administration sophistiquee (tablettes numeriques, calculi, sceaux

Le cas du site de JJirbat al-Diniya est interessant a cet egard; il s'agit de Tan-
cienne $aradum, a 90 km en aval de Mari, Etablissement assez restreint mais
puissamment dofendu par des murailles imposantes et dont les textes mention-
nent le kärum. FondE probablement au XVIIIe siecle, cet Etablissement volon-
tairement etabli en un point sensible perdure certainement jusqu'ä la fin du
XVIIe siecle (avec une rooccupation importante aux Epoques medio- et neo-
assyriennes). L'on y a retrouvE des tablettes datees des regnes de Abi-e§uh,
Ammi-ditana et Ammi-saduqa. La presence babylonienne y semble manifeste
(Kepinski 1985, 615-621).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
250 Marc Lebeau

ou empreintes de sceaux dont Ticonographie renvoie ä celles


d'Uruk et de Suse).
Les Urukeens ont du occuper la region sans coup ferir, la capter
ä des communautos obeidiennes en retard par rapport au develop-
pement technologique du sud (absence en Haute Mesopotamie des
phases «early» et «middle Uruk» si bien attestees dans le sud, sauf
peut-etre ä Tall Brak, mais dans ce cas avec des diflerences
morphologiques fondamentales). Que ces centres urukoens du nord
aient constitue un pole d'attraction majeur et un point d'agglomo-
ration des populations locales nous semble probable. Neanmoins,
l'image dominante que ces sites nous laissent est celle de pöles
implantes dans le nord mais reproduisant fidelement les Schemas
culturels du sud, sans apport apparent du Substrat local, du moins
sur le plan de l'infrastructure.

1.4 Le commerce
Qu'allaient chercher, aussi loin de leurs bases, ces gens du sud?
Sans mettre de cöte la possible incidence d'une demographie en
plein essor dans le sud mosopotamien, fait qui aurait pousse natu-
rellement au contröle de nouveaux territoires aptes ä assurer les
besoins de populations en pleine expansion, le commerce nous
semble Tun des olements moteurs de cette colonisation du nord.
Nous avons dejä mis en doute plus haut l'importance relative de
deux grandes categories de matieres premieres, le bois et la pierre,
dont on pensait naguere qu'elles avaient constitue la principale
raison de la mise en oeuvre de ce gigantesque effort d'expansion. Le
Schema d'Implantation goographique de ces centres urukeens
etablis dans le nord est a cet egard tres revelateur: les lignes de
communication etablies permettent des percees significatives
essentiellement vers deux regions: TAnatolie et la Syrie.
Le lien avec l'Anatolie s'expliquerait aisement par le nocessaire
contröle de Tapprovisionnement en metal, ce metal dosormais
devenu indispensable aux technologies nouvellement creees ou
doveloppees dans le sud mosopotamien et en Elam. Le motal
d'Anatolie et celui du plateau iranien ont permis le voritable essor
technique de ces sociotos en voie rapide de hierarchisation
sociale. Si exclut, du moins ä titre prioritaire, le besoin absolu
du cedre comme bois de construction, nous devons envisager
d'autres types de produits dont la valeur dans le sud aurait pu
justifier cette grande quete. Outre les produits manufactures en

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze 251

metal et surtout la laine et les textiles, qui ont peut-etre constitue


des une haute epoque les produits majeurs d'exportation des cites
syriennes45, nous pensons a des produits de haute valeur ajoutoe,
de faibles poids ou encombrement, susceptibles d'etre transportes
aisement par voie de caravane sur des routes essentiellement
terrestres. Ces produits fmis ou ces ressources brutes etaient
Importes dans le sud afin de satisfaire les nouveaux besoins d'elites
sociales recemment constituees. Ces classes superieures elaborent
une nouvelle Ideologie, un nouveau code de reconnaissance sociale
et ont besoin, en consequence, de signes evidents, de marques
distinctives dofinissant leur etat. La notion de prestige individuel
ou corporatif prend certainement une importance jamais egalee
auparavant.
Les produits ou objets manufactures de lointaine origine et donc
coüteux, prestigieux, conviendraient excellemment a materialiser
le sens nouvellement acquis ou tout au moins en plein doveloppe-
ment de la proprieto privee. Ce sens de la propriote privee n'exclut
pas le sens de la propriete collective debouchant sur une rivalite de
prestige entre cites soucieuses d'otaler leurs richesses, temoi-
gnages de leur dynamisme. Les bätiments officiels se groupent en
complexes impressionnants, tel celui de PEanna a Uruk. Cette
rivalite de prestige entre cites se refletera dans la composition du
pantheon sumerien, conjonction de divinites poliades.
Quant a la Syrie, qu'avait-elle a offrir au sud mesopotamien,
quels sont ces produits qui ont pu attirer la convoitise des
Urukeens? Nous pouvons peut-etre citer l'ivoire de lOronte mais a

45
A cet egard, I. J. Gelb est frappo par les difierences fundamentales des bases de
l'oconomie d'Ebla, fondee sur l'oviculture, et de celle de Lagaö, fondoe sur l'agri-
culture, a la fin de l'epoque dynastique archa'ique. «Sheep raising was the
mainstay of the local economy (of Ebla); thousands of sheep were raised,
supplying the wool for the production of textiles, the main export product of
Ebla. Thus wool was the basis of Ebla's commercial prosperity and political
power (. . .)· This important point, that the political growth of a state may
depend on wool, has not received the attention it deserves from political scien-
tists: most have assumed that grain alone could nourish the growth of higher
forms of civilization. But Ebla, äs these extraordinary tablets make clear, was an
empire built on the backs of simple shepherds»(Gelb 1986, 158). Cette Opposi-
tion entre un Pays de Sumer tres riche en surplus agricoles et des regions adja-
centes dont le pouvoir oconomique est fondo largement sur le pastoralisme est-
elle doja afilrmoe un millonaire plus tot, a Topoque d'Uruk? Nous serions tente
de le croire car ces fondements economiques n'apparaissent pas comme des
choix volontaires mais sont le plus souvent imposos par la geographie.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
252 Marc Lebeau

vrai dire aucun produit ne s'impose clairement. C'est ici qu'il faut
songer aux biens perissables dont nous n'avons evidemment garde
aucune trace archeologique et dans ce cas, Thorizon s'elargit consi-
derablement: huiles delicates, parfums, bois aromatiques, denrees
alimentaires de nature exotique et de longue conservation, tissus,
cuirs, colorants ...

1.5 Les contacts avec TEgypte


Nous devons egalement revenir sur une question longuement
debattue dans le passe, mais apparemment ne constituant plus de
nos jours Tun des themes majeurs de la recherche historique, celle
des rapports entre la Mesopotamie et l'Egypte. Ces rapports ont
toujours paru evidents dans des domaines aussi varies que ceux
des techniques, de l'architecture, de l'iconographie, de la
glyptique46 mais la tendance actuelle des chercheurs est de laisser
ce dossier un peu a l'ecart en raison de rinsuffisance d'indices
concrets de ces echanges sur le littoral du Levant et en Palestine.
Les sites majeurs de ces regions ne presentent-ils pas dans la
plupart des cas une permanence de l'occupation peu propice a l'ex-
ploration aisee des niveaux archeologiques d'aussi lointaines
epoques, scelles par des epaisseurs considerables de niveaux d'oc-
cupation plus recents?
En fait, point n'est besoin de nombreux etablissements interme-
diaires. L'Egypte pouvait acheminer directement ses produits
d'exportation vers les ports de la cöte mediterraneenne. Byblos
semble a cet egard idealement disposee pour jouer le röle de comp-
toir commercial important des Tepoque d'Uruk d'autant plus que
y a retrouve des objets manufactures d'origine egyptienne, des
Fragments de vases en albätre portant les serekhs de pharaons de
la He dynastie47. Ces contacts manifestes au debut du troisieme
millenaire, ofiiciels puisqu'attestes par des objets issus de manu-
factures royales, seraient-ils inconcevables a Byblos quelques
siecles plus tot, a Tepoque gerzeenne?48 Si des contacts aussi

46
Est-il besoin de rappeler ici les coläbres palettes dOxford et de Narmer, le
couteau de Gabal al-'Arak oü apparaissent les fauves aux longs cous entrelaces
et des personnages vraisemblablement asiatiques? A propos de la glyptique,
consultera l'article recent de B. Teissier (Teissier 1987).
47
Culican 1967, 18: Tun de ces Fragments porte le nom de Khasekhemoui.
48
La repräsentation de bateaux semble omnipresente dans l'iconographie de cette
epoque: par exemple sur une peinture murale d'une tombe gerzoenne de Hiera-

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 253

anciens etaient admis, la decouverte d'ecuelles grossieres a levre


biseautee (beveUed rim bowls) au niveau K de Hama prendrait toute
sä signification49. Hama et probablement les sites de la region de
Homs et de Qatna, de par leur Situation geographique privilegiee
(contrölant la trouee geographique vers le littoral), pourraient
avoir servi de plaques tournantes commerciales de premiere
ampleur50.
D'autres voies de contact entre TEuphrate et la cöte ont pu etre
etablies plus au nord, entre d'une part la region de KarkemiS et
d'autre part les sites de la region de TAmuq ou des ports tels
qu'Ugarit, mais la presence sur de tels sites d'objets manufactures
egyptiens a d'aussi hautes epoques reste encore a etablir.
Si admet la possibilite d'un contact direct ou soumis a un
minimum d'intermediaires entre la Mesopotamie de l'epoque
d'Uruk et TEgypte gerzeenne, outre l'albätre et le lapis-lazuli, une
matiere premiere a tres haute valeur ajoutee, susceptible d'attirer
la convoitise des Mesopotamiens, vient a Tesprit: Tor.

2. L'epoque de Gamdat Na$r

2.1. La fin des colonies


La fixation precise dans le temps de la periode de grande expan-
sion de la culture urukeenne en Anatolie et en Syrie est une
question assez delicate et il n'est pas certain que nous disposions
dejä des donnees necessaires et süffisantes pour la resoudre.

konpolis (Aldred 1967, 33, flg. 22), sur le couteau de öabal al-'Araq ou figurent,
sous des rangoes de bateaux d'allure ogyptienne, des bateaux de provenance
inconnue (Aldred 1967, 37, flg. 23—24), dans les decors des ceramiques (Aldred
1967, 39, fig. 25; 41, flg. 29), sur des Fragments de toile peinte d'un tombeau de
Gebelein (Aldred 1967, 40, fig. 27). Rappeions en outre que des ceramiques
egyptiennes portant le nom de Narmer ont et£ retrouvocs cn Palestine sur le site
de Tall &e\\ al-'Areni, a proximite de LachiS (Xogev 1972, 288).
Fugmann 1958, 35, fig. 37, 5B840; 39, flg. 40. 4A882; 42, fig. 49, 7A617; 46, fig.
54, 4B785-4B786; ecuelles provenant des niveaux K8, K5, K4 et K2 de Hama.
A noter aussi, au niveau K10, une amulrttr en pierre tres proche de celles de Tall
Brak (Temple aux Yeux) (Fugmann 1958. 31, fig. 30, 5B23) et au niveau K3, un
sceau dont le docor evoque ceux du style öamdat Nasr des sceaux en stoatite
brülee des piemonts du Zagros (Fugmann 1958, 42, fig. 49, 6A192).
La prosence mentionnee plus haut de ceramiques urukoennes dans la region
d'al-Qawm, sur Fune des voies qui mcnaient de TEuphrate a la Syrie de
FOronte, s'explique beaucoup mieux dans ce cadre.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
254 Marc Lebeau

La majorite des chercheurs propose une date recente a l'inte-


rieur de la sequence d'Uruk, soit une epoque late Uruk assez floue
mais comprise generalement entre Uruk V et Uruk III (en refe-
rence a la soquence de l'Eanna du site eponyme). Les sceaux et
empreintes de sceaux de Habüba51 et de Tall Qannäs52 renvoient
en eflet a l'iconographie bien connue des sceaux d'Uruk IV et III53.
La presence notamment de sceaux de style schematique, graves a
la bouterolle semblait conforter cette datation. Or, ces sceaux sche-
matiques longtemps consideres comme typiques de epoque de
Öamdat Nasr (Uruk III)54, nous savons a present qu'ils peuvent
avoir 6te graves a une epoque anterieure55.
Assez recemment, D. Sürenhagen, grand specialiste de la cera-
mique de epoque d'Uruk56, a propose une nouvelle estimation de
la date de la ceramique umkeenne de Habüba; selon lui, cette cera-
mique devrait etre contemporaine d'Uruk VII/VI57, soit d'une
phase relativement ancienne de l'Uruk recent, phase que les
fouilles de l'Eanna n'ont atteinte qu'en sondages. Cette datation
relativement ancienne n'a pas encore ete unanimement admise
mais il n'y a pas de raison majeure de la mettre en doute. Si eile est
confirmee, eile peut paraitre assez surprenante car eile remet en
question bon nombre d'idees re9ues. Nous verrons bientot que le
reexamen des donnoes archeologiques du sud mesopotamien a
Tepoque suivante, celle de öamdat Nasr, apporte probablement
des arguments supplementaires a cette proposition chronologique.
Une question evidemment liee a la precodente est Tevaluation de
la duroe de ces etablissements de type colonial repartis sur TEu-
phrate. Tant a öabal (Arüda qu'ä ilabüba/Tall Qannäs, le niveau
Uruk ne semble guere avoir de roelle profondeur stratigraphique.
Nous avons un peu Timpression que ces otablissements creos en
des points choisis avec le plus grand soin, nous l'avons vu plus
haut, n'ont eu en dofinitive qu'une courte duroe de vie, bien
entendu trfes difficile a estimer, peut-etre une centaine d'annoes
sinon moins. Sur TEuphrate ou en Haute Mesopotamie, les sites
qui sont reoccupos aprfes la poriode d'Uruk attestent une culture
1
S trommenger 1980, 62-64.
* Lebeau 1982, 92-95.
!
Mais aussi de Suse.
4
Amiet 1961, 33-34.
5
Amiet 1972, 110-111.
Sürenhagen 1975.
Sürenhagen 1986b, 32.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au debut de l'Age du Bronze 255

materielle essentiellement locale ou n'ayant plus que des rapports


tres eloignes avec le sud mosopotamien58.
Les raisons procises du declin de ces etablissements et de la im
du tres vaste reseau commercial et politique qui en etait le moteur
sont encore a definir mais nous pensons d'ores et dojä qu'il est
possible d'en entrevoir quelques-unes. Nous proposerons plus loin,
avec d'autres, quelques voies de recherche, mais il est indispen-
sable au prealable de mieux cerner l'opoque de öamdat Na§r, long-
temps consideree comme une epoque mineure, mal dofinie et guere
enthousiasmante, comme une continuation peu individualisoe de
l'epoque d'Uruk.

2.2 La Situation dans le sud


Lors d'une conforence reunie a Bagdad en 1930, les archeologues
de terrain travaillant en Iraq docidörent de baptiser du nom de
öamdat Na§r l'epoque suivant celle d'Uruk. A vrai dire, les
indices de culture materielle individualisant sur le terrain cette
epoque otaient assez tenus: evolution de certains types de briques
crues et surtout prosence d'une ceramique de qualite, polychrome,
qui allait etre unanimement donommee «ceramique öamdat
Nasr»59.
L'aire de diffusion de cette coramique caracteristique, peut-etre
apparue des l'extreme fin de l'opoque d'Uruk (Umk IV), couvre
une vaate zone comprenant le sud mesopotamien, c'est-a-dire le
Pays de Sumer proprement dit, la Babylonie, la vallee de la Diyälä
ou eile (ist certainement le mieux attestee, la rogion du Hamrin60 et
la rogion de Kirkuk61. II ne faudrait pas omettre de mentionner
egalem<;nt la presence d'exemplaires de cette ceramique poly-
chrome dans des tombes-tumuli du Öabal Hafit, dans l'omirat
d'Abu Dabi, a une grande distance des cötes sumeriennes62.

08
La presence occasionnelle de bevelled rim bowls ou de conical cups au sein d'as-
sembliges locaux ne suffit pas a prouver la persistance de liens etroits entre les
sites lies rogions en question et le sud mosopotamien.
59
Vertesalji 1985, 54-55.
60
A Tal Gubba, au niveau VII (Fujiil981, 33-34, flg. 11-12, pl. 12:1-2).
hl
Abu al-Soof mentionne la presence de tessons de surface polychromes de type
öamdat Nasr a Tall al-MuJifiya, Rasim Baldag et Merbat Abu ^Janägir, sites de
la prcvince de Kirkuk (Abu al-Soof 1968, 81); Tun de ses correspondants lui
aurail rapporte la prosence de tels tessons de surface a proximite de S am Sara
(Abu il-Soof 1968, 81, n. 20).
62
' Frifel·. 1970, 374-383.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
256 Marc Lebeau

Quoique vaste, cette aire de diffusion n'a rien de comparable avec


celle de la ceramique urukeenne de Tepoque anterieure63.
La sequence la plus complete des niveaux archeologiques a asso-
cier a epoque de öamdat Nasr (ou Protoliterate d) reste encore
actuellement celle des sites de la valloe de la Diyälä (Tall Asmar et
Hafaga notamment), fouilles dans les annees '30 par lOriental
Institute of Chicago64. Behnam Abu al-Soof s'est attelo a la
comparer avec celles des sites sud-mosopotamiens en mettant Pac-
cent sur la continuite de la culture materielle entre d'une part
epoque d'Uruk et Tepoque de öamdat Nasr et d'autre part entre
cette derniere et le Dynastique archaique I65.
Sans entrer dans trop de details, car un article recent retrace
remarquablement l'historique de la question66, cette continuite
materielle apparente, notamment dans les domaines de l'architec-
ture, de la glyptique et de la ceramique67 — mais suspecte sur le
plan de la stratigraphie comparee — a conduit la grande majorite
des commentateurs a postuler une evolution sans heurt de la civili-
sation de Mesopotamie du sud; ces chercheurs raisonnant, au
depart, sur des donnees materielles, ont ete conduits a inferer une
continuite sociale et politique.
Ainsi, pour Frankfort, la periode de Öamdat Nasr se caracterise
le mieux par cette continuite culturelle; c'est une epoque de conso-
lidation, d'elaboration et d'expansion68. Selon C. L. Redman, c'est
a cette epoque que la ville archaique mesopotamienne a stabiliso
les facteurs de son Organisation; l'absence de fortifications lui
semble etre le signe d'une epoque relativement paisible69. C. C.
Lamberg-Karlovsky considere que la periode de öamdat Na§r ne

6
Pour plus de precisions sur la ropartition spatiale des sites ayant livre ce type de
ceramique polychrome, se reportera a Abu al-Soof 1968.
64
Delougaz 1947.
fi5
Abu al-Soof 1967.
66
Vortesalji 1985.
h7
Dans le domaine de la ceramique, le terme c o n t i n u i t o est ovidemment tres
goneral; bien entendu, il ne signifie pas i d e n t i t e ou encore p e r m a n e n c e .
Certains types formels apparaissent (le plus celebre 6tant constituo des conical
cups), d'autres disparaissent. L'impression d'ensemble reste pourtant celle d'une
lente evolution, hormis l'apparition de la celebre ceramique polychrome
öamdat Nasr. Voir cependant Kolbus 1985 a propos des disparitos regionales et
d'un accent mis sur la continuito öamdat Nasr/Dynastique archaique I au d^tri-
ment de la continuite Uruk/öamdat Nasr.
68
Frankfort 1968, chapitre XII.
69
Redman 1978.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 257

dififöre pas fondamentalement de celle d'Uruk, si ce n'est l'appari-


tion de la ceramique peinte qu'il estime influencee par Uran70.
Ces considerations ont amene les chercheurs a remettre en
cause la nocessite de Texistence meme du terme «epoque de
öamdat Na§r». Ce pas a deja 6te largement franchi par bon nombre
d'archeologues travaillant en Mosopotamie du nord, archeologues
qui ont popularise l'expression late Uruk recouvrant a la fois la fin
de epoque d'Uruk proprement dite et Pequivalent nordique de
celle de Öamdat Nasr. II est vrai qu'en Haute Mesopotamie, les
criteres de reconnaissance des niveaux öamdat Nasr sont tenus,
obliteres par les cultures materielles locales, Tall Brak etant le seul
site reconnu pour l'heure ayant garde des liens sensibles avec le
sud. Mais ce pas qu'ont franchi les archeologues «nordistes», ne
tenterait-il pas egalement les «sudistes»? Le titre meme d'un recent
colloque tenu a Tübingen, «Öemdet Na§r: Period or Regional
Style?» semble faire echo a cette interrogation71.
Tous les commentateurs ne partagent pas l'idee, voire le prin-
cipe de la continuite entre l'epoque d'Uruk et celle de öamdat
Na§r. Usant d'une terminologie quelque peu complexe, W. Nagel
considere que s'il y a continuite, eile est a situer entre
l'epoque de öamdat Nasr (quel que soit le nom que lui
attribue) et le Dynastique archaique I et non entre les epoques
d'Uruk et de öamdat Nasr, l'epoque de öamdat Nasr etant a consi-
derer comme une sorte de Dynastique archaique O72. A la suite
d'un reexamen tres pousse du materiel, cette terminologie et ces
conceptions sont reprises par P. P. Vertesalji et S. Kolbus dans une
importante otude de Synthese sur cette epoque73.

Lamberg-Karlovsky 1979, 151 sqq.


Finkbeiner - Röllig (ed.) 1986.
Nagel 1964,178sqq. («Early Sumerian I» « Uruk VI—IV, «Early Sumerian II» ~
Uruk III « Protoliterate c et d ancien, «Protodynastic Style A» ~ Protoliterate
d recent, «Protodynastic Style B» ~ «transitional period to ED I», «Protody-
nastic Style C» « Dynastique archaique I).
Vortesalji et Kolbus, manifestement influences par les idees de Nagel, prönent
a leur tour l'utilisation du terme de Protodynastique en remplacement de Tappel-
lation epoque de öamdat Na$r ou encore Protoliterate c et d (Vertesalji 1985,
74—75; Kolbus 1985, passim). Ce Protodynastique que Vortesalji date tres haut,
ca. 3500 — ca. 3100, serait contemporain de la seconde partie du Protodyna-
stique ogyptien (Sereq, Ka, Narmer, Aha,-Menes) et de la majeure partie de la
premiere dynastie (Djer, Wadji, Dewen) (Vertesalji 1985, 96—97 et table chrono-
logique).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
258 Marc Lebeau

La plus importante contribution nouvelle a ces theses nous vient


de Postgate74. II nous semble important ici d'en reprendre les
points principaux. Cet auteur constate tout d'abord que les
sequences stratigraphiques de la plupart des sites de Sumer, de
Babylonie et de la region de la Diyälä semblent rovoler des
discontinuites aux alentours de 3000 av. n.e.; c'est notamment le
cas a Abu $aläbü>, Uruk, Ur, Hafaga et Tall Asmar, soit les sites
majeurs de Tepoque75. A Ur, Tall Asmar et iJafaga, les construc-
tions de Pepoque de öamdat Nasr semblent edifiees sur les depöts
d'ordures de Tepoque anterieure. Postgate suppose deux
explications possibles a cet 6tat de fait: soit ces sites, ou des
parties de ces sites, furent ruinos et temporairement desertes, de
teile sorte que la continuite de l'architecture n'est pas assuree par
la permanence de Toccupation, soit ces sites restörent occupos,
mais les pressions croissantes sur Fespace urbain conduisirent a
une occupation du sol beaucoup plus dense, investissant des
espaces laisses libres a l'epoque anterieure. Postgate conclut a une
intensification de l'occupation urbaine au debut d'une epoque de
öamdat Na§r, consideree, a la maniere de Nagel et de Vertesalji,
comme le prelude au Dynastique archaique I76.
Rappelant les resultats des grandes prospections menoes par
Adams, Nissen et Wright, Postgate est frappo par le fait que, tant
dans la valloe de la Diyälä que dans le region d'Ur et d'Eridu, la
plupart des nombreux sites ruraux de l'epoque d'Uruk semblent
desertes a la fin ou juste avant la fin de cette epoque alors que
presque chaque site occupe a Tepoque de öamdat Na§r le reste au
Dynastique archaique I (ce qui n'empeche pas l'apparition de
nouveaux sites a cette derniere poriode). En fait, la plupart des
sites occupos en permanence de TUruk au Dynastique archaique I
sont les sites les plus importants, les citos77. Postgate est conduit a
estimer qu'entre l'opoque d'Uruk et celle de öamdat Na§r, s'est
produite une rupture sociale majeure (a major social disruptiori),
envisageant meme que les populations rurales aient ete massa-
crees, chassees ou confinees dans les cites avec pour consequence la
fin des occupations de nature villageoise. II compare cette Situation
avec celles qui provalurent au temps de Tinvasion des Amorrites, a

74
Postgate 1986, 90-106.
75
Postgate 1986, 91-92.
76
Postgate 1986, 92.
77
Postgate 1986, 93.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au debut de l'Age du Bronze 259

la im de l'epoque d'Ur III, ou encore ä epoque de l'arrivee des


Kassites, ä la fm de l'epoque paleobabylonienne78. Les conse-
quences de ce bouleversement furent l'abandon de la campagne, la
concentration des populations dans les grands sites urbains ^t une
transmission de la culture par une population reduite. Cette trans-
formation radicale du paysage de la societo fut suivie par une reco-
lonisation graduelle quand la paix et la stabilite furent reinstau-
rees79. Par contre, entre les epoques de öamdat Nasr et du
Dynastique archaique , ne peut parier d'un tel bouleverse-
ment; il s'agit tout au plus d'une transition dans la paix et la stabi-
litö80.
Postgate se garde pourtant de proposer les raisons, les motifs
des evenements assez cataclysmiques qu'il suppose.
Continuite ou rupture majeure entre les epoques d'Uruk et de
Öamdat Na§r dans le sud de la Mesopotamie? Nous le voyons, le
debat est vif et contraste. Nous pencherons personnellement pour
la deuxieme Hypothese, tout en gardant ä Tesprit que cette rupture
supposee a pu se produire soit au debut de l'epoque de öamdat Nasr,
soit ä l'extreme fm de l'epoque d'Uruk. Nous envisagerons plus
loin que l'emergence progressive des cultures locales dans le
nord de la Mesopotamie mais aussi le developpement spectaculaire
des cites de la vallee de la Diyälä peuvent rosulter de faiblesses
apparues dans les rouages du pouvoir central urukeen.

2.3. La vallee de la Diyälä


Les sequences les plus longues de niveaux archoologiques asso-
cies ä l'epoque de öamdat Na§r nous viennent des sites de la vallee
de la Diyälä. Occupes ä Tepoque d'Uruk, Tall Asmar et JJafaga (les
anciennes Eämmna et Tutub) semblent se developper en cites
importantes precisement ä cette epoque, et ce developpement ira
croissant ä la fin de l'epoque et au Dynastique archäique I.
Pour Vertesalji, la ceramique polychrome Öamdat Na^r n'est
representee sur une longue sequence chronologique que dans cette
vallee. En efiet, apparue des la fin de TUruk IV, eile semble dispa-
raitre peu apres le milieu de cette epoque en Babylonie centrale81

78
Postgate 1986, 93.
79
Postgate 1986, 96.
80
Postgate 1986, 92-93.
81
Vortesalji 1985, 55.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
260 Marc Lebeau

alors qu'elle continue ä etre florissante sur les sites de la vallee de


la Diyälä.
Eänunna et Tutub sont des cites en formation idoalement situees
pour contröler la route qui menait vers la Haute Mesopotamie mais
aussi pour assurer l'approvisionnement en metal en provenance du
plateau iranien. Pour peu qu'elles s'affranchissent d'un controle
meridional, elles seraient ä meme d'acquerir rapidement prospe-
rite et puissance. Cela semble s'etre passe vers la fin de l'epoque de
öamdat Nasr, lorsque nous voyons ces ESnunneens fonder des
comptoirs au nord82, dans la rogion du Hamrin, comptoirs semble-
t-il defendus par des sortes de donjons83, comme Tont revele les
fouilles de sauvetage realisees dans la region ä la fin des annees
'70. A Tall Gubba notamment, l'edifice dejä celebre ä murs circu-
laires concentriques est edifie et agrandi au niveau VII84, un niveau
archeologique caracteriso par du materiel tres voisin de celui de la
vallee de la Diyälä: meme type de ceramique polychrome öamdat
Nasr85 et dans le domaine de la glyptique, predominance du style
piemont geometrique öamdat Nasr86. Le nombre de ces etablisse-
ments croit considerablement au Dynastique archaique I87 toujours
sous contröle e§nunneen88. Ce contröle de la region du Hamrin
mettait les Eänunneens dans une tres bonne position non seule-
ment pour Tacheminement des matieres premieres en provenance
du plateau iranien, mais aussi ä mi-chemin des gisements de
bitume de la region de Kirkuk, un bitume indispensable au calfa-
tage des bateaux qui, dejä ä l'epoque de Öamdat Nasr et a fortiori ä
l'epoque des dynasties archäiques, devaient constituer Tun des

82
Gibson 1981, 160.
8<
C'est le cas notamment a Tall Gubba et ä Tall Razuk (un peu plus tard) mais
aussi sur d'autres sites de la region du Hamrin.
84
Fujii 1981, 22-23 (fig. 6-7), 141-146, pl. l, 5-10, 16, flg. 64, 126.
85
Fujii 1981, 33-34 (fig. 11-12).
86
Fujii 1981, 46, fig. 22, pl. 13:5-8, 161.
87
Voir le volume spocial de Sumer consacro aux fouilles du Hamrin (Sumer 40,
1984) et les articles de cette revue consacres aux fouilles de Tall Ahmad
al-Hattu (Sürenhagen), Tepe (McGuire Gibson, avec notamment des
illustrations de l'odifice ä plan circulaire, 201—203, pl. 4—6, mais a ce propos
consultera surtout la publication definitive, Gibson 1981), Het Qäsim (J.-D.
Forest), Tall Sabra (L. De Meyer et H. Gasche), Tall Madhür (M. Roaf). La
scarlet wäre remplace dosormais la ceramique Öamdat Nasr de Topoque proco-
dente.
88
Pour employer un terme gonorique dosignant les habitants de ces cit£s de la
valloe de la Diyälä.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 261

moyens de transport les plus commodes dans la hasse plaine allu-


viale du Pays de Sumer ou le reseau des canaux apparait d'ores et
deja bien constitue89. Cette mainmise sur des voies commerciales
vitales a probablement ete Tun des facteurs les plus importants du
developpement social et politique des cites de la valloe de la
Diyälä, ayant acquis les moyens de faire pression sur les cites de
Babylonie et de Sumer quand le besoin s'en faisait sentir,par leur
position d'intermediaires obligatoires dans Timportation de
matieres premieres necessaires aux cites-etats du sud. Nous envi-
sagerons plus loin un autre axe de penetration possible des ESnun-
neens vers le nord, plus inattendu, et apparemment contrölo plus
tard, vers la fln du Dynastique archaique I.
Desormais, a partir de la fin de l'epoque de öamdat Na§r, les
cites d'ESnunna et de Tutub, sans doute egalement en contact avec
l'Elam tout proche, acquierent une puissance qui n'allait cesser de
s'affirmer tout au long de Tepoque des dynasties archaiques.

2.4 Les contacts avec l'Oman


Nous avons dejä fait allusion plus haut aux tombes du öabal
Hafit, dans Tactuel emirat d'Abu Dabi, pres du site de Hili, soit a la
frontiere entre les Emirats Arabes Unis et le Sultanat d'Oman. II
n'est pas dans notre intention de developper ici les questions rela-
tives a l'essor culturel de cette region du Golfe, un essor qui se
manifeste vers le debut du troisieme millenaire par le debut de la
civilisation dite d'Umm al-När. Mais ces tombes ont livre un mate-
riel ceramique comprenant des exemplaires manifestes de cera-
mique polychrome d'epoque Öamdat Nasr90. Sans envisager un
instant un eventuel contröle (au sens «urukeen» du terme) des
regions menant au cuivre de lOman, il est neanmoins tout a fait
plausible d'envisager que les premiers reels contacts commerciaux
entre la Mesopotamie du sud et lOman aient dobute a Tepoque de
öamdat Nasr, contacts qui atteindront leur apogee plus tard, a
Tepoque des dynasties archaiques91. Cette Ouvertüre d'une
nouvelle voie commerciale n'est pas sans interet, purement
gratuite. Cette constatation s'explique peut-etre par le souci qu'ont
eu les occupants de Basse Mesopotamie, prives des sources d'ap-
provisionnement anatoliennes et iraniennes par de nouvelles
89
Adams 1972, 14-15.
90
Frifelt 1970, 374-383.
91
Voir a ce sujet Potts 1986, 133-134.
17 ZA 80
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
262 Märe Lebeau

donnes geostrategiques, de se creer de nouveaux debouchos


commerciaux. Coupes du nord et de Test, ils n'avaient plus que le
sud a investiguer. La quete de Magan pourrait ainsi etre une
reponse apportee a une Situation caractorisee par un horizon
commercial singulierement obscurci par l'emergence de cultures
locales en Haute Mesopotamie et la montee en puissance des cites
de la vallee de la Diyälä.

2.5. Le cas particulier de Tall Brak


A ce point de l'expose, il nous aurait fallu parier du nord, de la
Situation qui a suivi la chute du reseau commercial urukeen, la fin
des colonies et par consequent traiter de Temergence des cultures
locales, essentiellement le Ninivite 5. Mais il nous a paru neces-
saire pour la clarte du propos d'eviter de scinder le chapitre que
nous avons consacre a Tepoque de öamdat Nasr et au debut de la
periode Dynastique archaique I en Haute Mesopotamie. Nous abor-
derons donc cette question plus loin.
II est cependant utile d'evoquer brievement l'exception que
semble constituer Tall Brak, a supposer que la Situation qui semble
y prevaloir soit singuliere; n'oublions pas que le hasard des fouilles
et sur un meme site, la nature des quartiers mis a jour influencent
dans une mesure considerable le jugement et les inforences que
nous estimons etre en mesure d'induire et qu'il n'est donc nulle-
ment prouve que les echantillons souvent derisoires a partir
desquels nous fondons notre raisonnement soient reprosentatifs de
la realite globale.
L'on a depuis longtemps souligne la tres grande similarite du
matoriel retrouve au Temple aux Yeux de Tall Brak avec celui des
sites mosopotamiens plus moridionaux a Topoque de öamdat
Na^r92. Rappeions que ce Temple aux Yeux est le dernier d'une
sorie de quatre edifices superposos dont nous ne connaissons pas le
plan mais dont le premier peut remonter a Topoque d'Uruk93. Cette
succession de temples est, pour le fouilleur, contemporaine des
quatre premiers temples de Sin a IJafaga, le dernier Temple aux
Yeux, a vrai dire le seul reellement fouille, correspondant chronolo-
giquement au Temple de Sin IV du site de la vallee de la Diyälä,

92
Mallowan 1947, 31.
·" Mallowan 1947, 38.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 263

avec lequel il partage de nombreux traits architecturaux94.


Mallowan n'oublie pas de rappeler que ce type de plan (et particu-
lierement Taile Orientale du Temple aux Yeux) trouve ses racines
dans la tradition plus ancienne de la fin de l'opoque d"Ubaid95,
point que reprend Joan Gates pour qui le Temple aux Yeux est une
adaptation du plan cruciforme tripartite de l'opoque d"Ubaid96.
Le materiel varie et de qualite qui y a ete retrouvo est evidem-
ment tres voisin de celui des sites de la valloe de la Diyälä, de
Babylonie et du sud mesopotamien (mosaiques de cönes, rosettes
en pierre, sceaux et cachets, amulettes . . .)97 & tel point que Tall
Brak semble conserver des liens etroits avec le sud mesopotamien
a une epoque oü le roseau colonial urukeen n'est dejä plus qu'un
souvenir. Malgre l'absence de ceramique polychrome öamdat Na§r
et dans une region oü la culture dominante est d'origine locale
(la culture Ninive 5), Tall Brak, qu'il ne faut pas assimiler a une
colonie de l'epoque anterieure quoique ce centre soit sans doute
passe sous contröle urukeen au moment de la grande expansion de
cette culture meridionale, apparait comme un site local et dejä
ancien qui se distingue par de constants liens etroits avec le sud
des l'opoque d'TTbaid, liens conserves d'une maniöre surprenante
a Tepoque de öamdat Nasr dans un environnement geographique
desormais monopolise par une culture Ninive 5 qui n'a plus que des
liens tres tönus avec la Mosopotamie meridionale98
Ce caractere particulier de Tall Brak n'a pas manque d'etre
releve par les chercheurs; P. P. Vertesalji, rappelant que ce site est
le seul etablissement de Haute Mesopotamie ayant livre un mate-
riel öamdat Nasr d'allure meridionale, estime qu'il est possible d'y
voir un comptoir commercial instauro par les Mosopotamiens du
sud aux epoques d'Uruk et de öamdat Nasr mais s'interroge sur
son apparente unicite".

2.6. Synthese d'une epoque


L'epoque de Öamdat Nasr, sans doute longue et multiforme, doit
etre reconsideree dans sä specificite et non plus comme la con-

Mallowan 1947, 38-39, 60-61.


Mallowan 1947, 60-61.
Oates J. 1986, 252.
Mallowan 1947, pl. IV-XXI.
Oates J. 1986, 252, Oates J. 1985, 179.
Vertesalji 1985, 56.
17*
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
264 Marc Lebeau

tinuation mal individualisee de l'epoque precedente. Vers la fin de


l'epoque d'Uruk, si suit Postgate100 et nous serions tente de le
faire, de profonds bouleversements semblent avoir transforme
durablement le paysage socio-politique en Basse Mesopotamie.
Disparition de la presque totalite des sites ruraux et concentration
de l'habitat urbain dans les grandes cites, perte des colonies et
declin rapide des reseaux commerciaux en direction du nord,
autant de signes d'une transformation fondamentale des grandes
priorites de developpement etablies par les Urukeens. Cette
rupture manifeste n'a probablement pas ete deliberee, voulue,
choisie par les occupants de la basse plaine alluviale. Ceux-ci ont
semble-t-il ete amenes a evoluer en raison de contraintes internes
ou externes qu'il est delicat de definir a notre stade de la
recherche. Nous sommes enclins a penser que les deux manifesta-
tions tangibles, perte du reseau commercial et concentration
urbaine, sont des phenomenes lies et concomitants se traduisant
par un severe repli sur soi, ce repli s'etant produit soit a la fin de
l'epoque d'Uruk, soit au debut de celle de öamdat Nasr.
Sans envisager pour autant une Invasion violente du territoire
constituant l'espace vital des cites sud-mesopotamiennes, invasion
que semble suggerer entre les lignes Postgate lorsqu'il compare
cette epoque a celle de l'arrivee des Amorrites et celle de l'installa-
tion des Kassites, mais sans omettre apres tout cette eventualite, il
est possible que de fortes pressions externes aient ete Tun des
elements conduisant a ebranler la stabilite du Systeme urukeen.
Sürenhagen et Schwartz signalent que des changements de Ten-
vironnement politique en Anatolie Orientale et Taccession au
pouvoir de cultures caracterisoes par Tusage d'une ceramique polie
noire et rouge (associee a de la coramique de type urukoen sur les
sites de Tepecik et de Hassek Höyük) ont pu constituer Tun de ces
facteurs d'instabilite101. Nous ajouterons a ce propos l'importance
de l'omergence sur le Haut Tigre d'abord, en Haute Mosopotamie
ensuite, des cultures locales, principalement la culture Ninive 5
dont le coeur semble etre la rogion assyrienne autour des citos de
Ninive, d'Erbil et de Kirkuk. Cette culture Ninive 5 contröla d^s
l'epoque de öamdat Na$r une grande portion de la voie commer-
ciale privilogioe qui menait, par la route du Tigre et du piomont et
Taxe est-ouest traversant le triangle du IJäbür, a la grande boucle

100
Postgate 1986.
101
Sürenhagen 1986b et Schwartz 1988, 12.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze 265

de l'Euphrate et aux colonies urukeennes majeures, coupant ainsi


l'acces a la Syrie et a l'Anatolie.
Nous devons egalement revenir sur la question dolicate des
contacts avec l'Egypte. En fait, les exemples dejä citos plus haut
d'iconographie et d'architecture egyptiennes manifestement in-
fluencees par la civilisation urukeenne datent pour la plupart de
Tepoque de öamdat Na§r, si admet les synchronismes
proposes par Vertesalji102. Or nous n'avons pas encore mentionne
le caractere ostensiblement triomphateur de cette iconographie
egyptienne. Sur la palette de Narmer, les fauves au long cou sont
domptes par des personnages manifestement egyptiens; Narmer y
est represent/ ceint de la couronne rouge de Basse Egypte sur
l'avers et de la couronne blanche de Haute Egypte sur le revers ou
il s'apprete a sacrifier Tennemi agenouille; les palettes «aux deux
gazelles» et «au taureau» relatent des episodes guerriers sans qu'il
y soit possible de reconnaitre de maniere formelle le caractere asia-
tique des ennemis de TEgypte103. Est-il interdit de penser qu'entre
la fm de l'epoque d'Uruk et le debut de celle de Öamdat Nasr, les
Egyptiens aient pu se degager d'une certaine tuteile urukeenne
dont il reste bien sür a preciser la nature et aient ressenti le besoin
d'exprimer cette victoire en la glorifiant dans une iconographie qui,
bien que fortement influencee par celle d'Uruk, comporte dejä les
premiers ferments de ce qui deviendra l'iconographie officielle de
Tart egyptien de TAncien Empire? Cette «liberation» peut avoir ete
Tun des facteurs conduisant a Tunification de la Haute et de la
Basse Egypte et aux premieres conquetes territoriales d'une civili-
sation naissante. Le commerce a longue distance entre TEgypte
gerzeenne et la civilisation urukeenne avait cesse d'etre contröle
par les Urukoens.
A la possibilite de ces contraintes externes, il faut sans doute
ajouter des contraintes internes ayant eu pour efiet de mettre en
danger Tequilibre du Systeme social urukeen. L'on est en effet en
droit de se demander si les changements sociaux profonds de
l'epoque d'Uruk, rosultant de la creation d'une economie
d'etat, de la transformation des bases de la production, de la
102
Vortesalji 1985, 94—96 et tableau chronologique: Narmer y est considero
comme contemporain du debut de l'epoque de öamdat Nasr et la premiere
dynastie egyptienne equivaut chronologiquement a l'ensemble de cette meme
opoque.
IOH
Aldred 1967, 42, 44, flg. 30-31, 32-35; de Cenival 1978, 12, flg. 9; 52-53, flg.
58-59.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
266 Marc Lebeau

constitution d'elites, de la naissance de nouveaux groupes sociaux


en un temps apparemment bref n'ont pas altere les relations
sociales entre les membres d'une population naguere organisee
sur la base d'un Systeme plus ogalitaire. Les fondements sociaux
appeles a se transformer, les Schemas de pensee et les rapports
relationnels n'ont peut-etre pas pu evoluer au rythme souhaito
et pu s'adapter au decollage d'une economie en pleine muta-
tion. Le social n'a peut-etre pas pu suivre l'economique. D'un
autre cöte, peut supposer que l'expansion economique conside-
rable reposant sur un Systeme complexe de reseaux commerciaux
nouveaux s'est realisee en un temps trop court pour que les
Urukeens, peut-etre trop confiants en leurs moyens, aient pu
assurer l'oquilibre interne de cette expansion et pu garder la
maitrise des lignes de communication. La balance n'a peut-etre pu
etre realisee entre les imperatifs de la securite, de la consommation
et des investissements. Lorsque certaines contraintes politiques,
sociales ou militaires se sont manifestees, la bulle a eclate car eile
avait gonfle trop vite.
Le choc fut sans doute rüde dans le Pays de Sumer, la roorgani-
sation dut etre lente et penible. Apparemment, les grandes citos
concentrent desormais, a l'epoque de öamdat Na§r, la majorite de
la population, les villages ayant payo le plus lourd tribut a la crise.
Certaines cites ont pu surmonter cette crise avec plus d'effica-
cite, c'est peut-etre le cas de Tutub et d'ESnunna qui, vers la fin de
cette epoque, prennent pied dans la region du Hamrin, ameliorant
ainsi leur position stratogique, cötoyant la frontiere meridionale
de la culture Ninive 5, a mi-distance environ entre Kirkuk et l'ac-
tuelle Hanäqin.
Tall Brak jouit d'une Situation privilegiee mais il nous semble
que cette cito doit a elle-meme, a son propre developpement, ses
contacts conservos avec le sud ou avec la vallee de la Diyälä.
Les citos du sud, privees de leurs sources d'approvisionnement
en motal, tentent l'aventure vers le sud, inaugurant par la la quete
de Magan dont la littorature garda quelques Souvenirs; elles se
reorganisent a un rythme peut-etre plus lent mais plus sur et c'est
semble-t-il avec une sorenito retrouvee qu'elles connaitront a
nouveau une croissance qui les conduira, sans trouble majeur, a
l'aube des Dynasties archaiques.
En Haute Mosopotamie, la rupture semble totale, un hiatus est
meme possible et la breche beante laissoe par les Umkoens en repli
permet l'emergence et le developpement de cultures locales.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 267

3. De Fepoque de Gamdat Na$r au Dynastique archaique


L'emergence des cultures locales en Haute Mesopotamie

3.1. La culture Ninive 5


3.1.1. L'apparition de la culture Ninivc 5
En Haute Mesopotamie et sur le Haut Tigre, les Urukeens en
repli cedent la place aux representants d'une culture dont tout
porte a croire qu'elle est locale malgre ses origines quelque peu
obscures, la culture Ninive 5. L'on ne connait pas encore avec certi-
tude le laps de temps qui a separe la fin des niveaux urukeens et
l'apparition dans les niveaux suivants des premiers exemplaires de
ceramique de type Ninive 5. II semble en tout cas que rares soient
les sites ayant livre des niveaux oü se cötoient coramique
urukeenne et ceramique Ninive 5. Un hiatus est donc tres possible
entre ces cultures materielles distinctes101. Les «Ninivites» ont
certainement profite de l'eflbndrement du reseau urukeen dans
le nord et se sont installes, sans doute au depart de la region du
Haut Tigre, dans une vaste aire goographique, une grande partie
de 1'arc nord du Croissant fertile, entre la region au sud de Kirkuk,
et la region du Moyen Häbür, voire jusqu'a Mari. Une certitude,
cette culture est dojä florissante a Ninive a l'epoque de Öamdat
Nasr.

3.1.2. Les sites


Nous aborderons plus loin la question de la distinction entre les
assemblages ceramiques caracterises par une ceramique fine, de

Pour Schwartz, la prosence concomitante a Tall Brak, a la base du sondage ST,


de tessons de ceramique Ninive 5 incisee et de bevelled rim bowls indiquerait
l'existence d'une phase de transition Uruk-Ninive 5; cette prise de position nous
parait pour le moment imprudente. A Muhammad 'Arab, dans la rogion d'Eski
Mö^ul, Roaf suggere un hiatus de trois cents ans entre les niveaux Uruk et
Ninive 5 (Roaf 1984, 141), opinion reprise par Killick (1986, 230) qui insiste sur
la discontinuite entre les niveaux ayant livro de la ceramique late Uruk locale et
les premiers niveaux a ceramique Ninive 5 (Killick 1986, 231). A Ninive, le
niveau 5 succöde au niveau 4 caracteriso par la prosence de bevelled rim bowls
(Campbell Thompson — Mallowan 1933). La Situation semble ogalement assez
nette a Tall Lelän, avec une poriode IV dont la culture materielle semble etre
locale mais agr^mentoe de quelques types formels urukoens et une periode III
principalement caracterisee par la coramique Ninive 5 (Schwartz 1983, 122—
155). Voir toutefois Abu al-Soof 1968, 75-76.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
268 Marc Lebeau

table ou funeraire, peinte et les assemblages oü cette meme cera-


mique fine est principalement constituee de ceramiques incisees,
excisees ou encore decorees de cordons, distinction delicate car a
envisager a la fois sur le plan geographique et sur le plan chronolo-
gique.
Quoi qu'il en soit et compte non tenu de cette distinction cera-
mique peinte/ceramique incisee-excisee, les premiers sites ayant
livre du materiel Ninive 5 en Iraq sont Ninive, le site eponyme105 et
Tall BUla106. Les fouilles japonaises de Tulül al-Taläta (Tall V) reve-
lerent plus tard des niveaux archeologiques egalement caracterises
par cette culture materielle107. B. Abu al-Soof entreprit une tres
vaste prospection dans le nord de l'Iraq et etablit que les nombreux
sites Ninive 5 sont repartis sur une tres vaste aire, principalement
dans les provinces actuelles de Mosul et d'Erbil, dans la region a
Test du öabal Singär et dans celle de Tall ( Afar, ils sont plus rares
dans les provinces de Kirkuk et de Sulaimäniya108. L'on peut
egalement y ajouter les piemonts du Zagros dans le Kurdistan
iraqien109. Recemment, les fouilles de la region d'Eski Mösul ont
signale de nombreux sites de cette culture (Karrana, Kutan,
Muhammad 'Arab, ...). Sur le territoire de l'actuelle Syrie, la
culture Ninive 5 est le mieux representee dans le «bec de canard» et
la partie Orientale du triangle du Häbür (Sagir Bäzär110, Tall
Barri111, Tall Brak112, Tall Lelänm, Tall (Ailün114, Tall Mözän115).
Elle semble tres presente tout autour de Hasaka comme le revelent
les fouilles de sauvetage au nord-ouest de cette ville (Tall
Qa§qa§uq116) et dans la region du Moyen Häbür, au sud de Hasaka

105
Campbell-Thompson 1931 et 1932, Campbell-Thompson - Mallowan 1933.
106
Speiser 1933.
107
Fukai 1974.
108
Abu al-Soof 1968, 75-76, Abu al-Soof 1972, 8.
109
Schwartz 1985, 60.
110
Mallowan 1936, 1937 et 1947.
111
Biscione 1982.
112
Mallowan 1947.
113
Schwartz 1983.
114
Moortgat 1959, 15-31.
1|
M. Kelly-Buccellati m'a rocemment montre quelques exemplaires de la tres belle
coramique Ninive 5 de ce site.
116
Fouilles dirigoes par A. Suleiman. Le fouilleur a eu la gentillesse de me faire voir
un ochantillon de la coramique Ninive 5 de ce site.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au debut de l'Age du Bronze 269

(Tall Karma117, Tall 'Atig118, Tall Bderi119, Tall Raqä'i120, Tall


Maänaqa121). La ceramique fme Ninive 5 est egalement attestee,
quoiqu'en quantites tres limitees et sous ses formes incisees et exci-
sees ä Tall JJuera 122 et a Mari123. Sans pretendre a l'exhaustivite,
cette liste de sites est donc assez impressionnante et de nouvelles
fouilles accroissent quasi annuellement le nombre de sites Ninive 5
recenses. Un point assez etonnant, la ceramique Ninive 5 ne
semble pas atteindre la grande boucle de TEuphrate; se serait
par exemple attendu ä en retrouver au moins quelques tessons ä
Haläwa, mais cela ne semble pas etre le cas124.

3.1.3. Ceramique Ninive 5 peinte


et ceramiques Ninive 5 incisee ou excisee
La ceramique de la culture Ninive 5 est evidemment en grande
majorite commune. Les commentateurs ont pourtant, des le debut
des recherches sur ce domaine, surtout ete attires par les variantes
fmes de cette ceramique qui se manifestent d'une part par une
ceramique peinte souvent constituee de calices de forme elegante
et d'autre part, par des exemplaires de ceramiques incisees, exci-
sees ou encore decorees de cordons. Bon nombre de bols ä base
pointue et de fins flacons parfois munis de trous de Suspension sont
ainsi decores de motifs varies excises ou incises.
Tres vite s'est pose le probleme de la Chronologie relative de ces
diverses variantes de ceramique fine125. A Tall Billa, la ceramique
peinte, surtout presente au niveau 7 semble proceder la ceramique
incisee, attestee majoritairement au niveau 6 126 . Le mode d'enre-
gistrement des donnees de fouilles ä Ninive ne permet guere
d'aborder pour le niveau 5 ces questions chronologiques.
A Muhammad ( Arab, la sequence Ninive 5, assez longue, incite

117
Fouilles libanaises dirigees par M. Saghio.
118
Fouilles canadiennes dirigoes par M. Fortin.
119
Fouilles allemandes sous la responsabilito de P. Pfälzner.
120
Fouilles neerlandaises dirigees par H. Curvers, voir aussi Curvers 1987.
121
Fouilles fran^aises dirigees par J.-Y. Monchambert.
122
Kühne 1976.
m
Lebeau 1985a et 1987 a.
124
Lüth 1981.
125
A ce sujet, consultera l'artick' important de Schwartz (1985, 55—58).
12f)
Speiser 1932, 264-268.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
270 Marc Lebeau

M. Roaf ä affirmer de maniere nette Tantoriorite de la ceramique


peinte (niveaux Z—S) par rapport aux coramiques incisees et exci-
soes (niveaux R—N) alors que les variantes ä cordons semblent
occuper une position chronologique modiane, contemporaines en
partie de la coramique peinte, en partie des ceramiques incisees et
excisoes (niveaux X—R) 127 .
Cependant ä Tulül al-Taläta128 ainsi qu'ä Tall Lelän129, les cera-
miques peintes, excisees et incisees Ninive 5 semblent contempo-
raines.
Aux questions chronologiques, viennent s'associer des
problemes d'ordre geographique. Si la zone de production de la
ceramique Ninive 5 peinte semble etre clairement le Haut Tigre, la
future Assyrie, ä Tepoque de öamdat Nasr, 1'aire de distribution de
cette coramique peinte est assez precisement circonscrite au nord
du territoire de Tactuel Iraq (Ninive, Kirkuk, Erbil, piemonts du
Kurdistan, est du öabal Singär et region de Tall 'Afar 1 ™); cette
ceramique peinte apparait egalement ä Tall Lelän, ä Sagir Bäzär et
ä Tall Brak mais en quantites faibles ou infimes131. Les fouilleurs
n'en ont retrouve aucun exemple ä Tall Barri, Tall (Ailün et Tall
Huera, ni, ä ma connaissance, dans la region de Hasaka. La
mention la plus meridionale de cette ceramique nous vient de
la region de Hanäqin, ä Tulül al-Hadid, pres de la frontiere
iranienne132; un seul tesson Importe de Ninivite 5 peinte fut
egalement retrouve a Tall Asmar, dans le sondage H18:14133.
Afin de resoudre Tapparent paradoxe de la presence contempo-
raine d'exemplaires de coramiques peintes et incisoes ä Tall Lelän
(niveaux lila et Illb) et a Tulül al-Taläta, alors qu'ä Muhammad

127
Roaf 1984, 150-154.
128
Fukai 1974, passim.
129
Schwartz 1983, passim, Schwartz 1985, 58.
no
Abu al-Soof 1972, 8.
HI
A Sagir Bäzär, les deux exemplaires peints du niveau 4 retrouvos par Mallowan
sont conside>6s comme des importations en provenance de la region du Tigre
(Mallowan 1937,149, fig. 25: l, 3). Schwartz mentionne que la ceramique Ninive
5 peinte du niveau III de Tall Lelän est relativement rare, en tout cas bien moins
attestoe que la Variante incisoe (Schwartz 1985, 60). A Tall Brak, quelques rares
tessons de surface (chantier TW) ou non stratifios (chantiers ST, CH et ER)
prouvent que la c^ramique Ninive 5 peinte n'est pas completement absente du
site mais sans doute en quantites minimes, non repräsentatives (Oates 1986,
251).
1:12
Abu al-Soof 1968, 76.
m
Delougaz 1947, 141, pl. 64:16.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 271

'Arab et a Tall Billa, la sequence stratigraphique semble assurer


l'anteriorito de la ceramique peinte par rapport aux autres
variantes de Ninive 5 fine, M. Roaf suggere que ne possederait
ni a Tall Lelän, ni a Muhammad 'Arab la sequence complete de la
culture Ninive 5 et suppose que pourrait subdiviser l'evolution
de la culture materielle Ninive 5 en trois grandes phases: la plus
ancienne ne serait caracterisoe que par la presence de c£ramiques
peintes (Muhammad 'Arab, niveaux Z—S; Tall Billa, niveau 7), la
phase modiane verrait se cötoyer ceramiques peintes et cerami-
ques incisoes (Tulül al-Taläta, Kutan et la sequence complete de
Tall Lelän, periodes III a, b, c) et la phase la plus recente ne
connaitrait que les variantes incisees et excisees (Muhammad
(
Arab, niveaux R-N; Tall Billa, niveau 6)134. Pour M. Roaf, la
longue sequence de Tall Lelän (qui, rappelons-le, est constituee de
pas moins de vingt-cinq strates difforentes sur une epaisseur de
cinq metres) ne serait repräsentative que de la phase mediane de la
culture Ninive 5; en suivant le meme raisonnement, Muhammad
'Arab ne serait occupe qu'aux phases anciennes et rocentes de
cette meme culture.
Schwartz semble sceptique vis-a-vis de ce raisonnement, mais
egalement trouble par cette apparente contradiction, il met desor-
mais Taccent sur la possibilite de variations rogionales135.
La proposition de Roaf, si eile a le merite d'aborder la question
chronologique, postule une soquence complete thoorique demesu-
rement longue, les cinq metres de depöts archeologiques de Tall
Lelän ne reprosentant que la phase modiane du Ninive 5 et les
onze niveaux Ninive 5 caracterisos par des transformations archi-
tecturales a Muhammad (Arab n'otant representatifs que de la
premiere et de la troisieme phases de cette culture136.
Schwartz a raison de proposer la possibilite de variations rogio-
nales mais il ne semble pas mener son raisonnement plus loin et
tirer les consequences de cette Suggestion.
Pour notre part, sans entrer dans trop de details, nous propose-
rions le schoma suivant qui tient compte a la fois des questions
goographiques et des problemes chronologiques.
La ceramique Ninive 5 peinte, contemporaine pour une tr£s
large part de Tepoque de öamdat Na^r, serait une ceramique

114
Roaf 1984, 154.
i:i5
Schwartz 1985, 58.
1:46
Roaf 1984, 152.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
272 Marc Lebeau

typique de la region du Tigre et en vogue dans les regions adja-


centes de l'actuel Iraq au debut du developpement de la culture
Ninive 5. A une phase ulterieure, que pourrait situer au Dynas-
tique archaique I, et dans les memes rogions, eile est graduelle-
ment remplacee par les variantes incisees et excisoes. Dans la
region des tributaires du ^Jäbür, donc en Syrie, la culture Ninive 5
se serait peut-etre installee avec un tres leger retard, vraisembla-
blement au milieu de Tepoque de öamdat Nasr mais les potiers
locaux, tout aussi createurs que leurs voisins du Tigre, auraient
elabore plus tot que dans la region de Ninive des ceramiques fines
incisees, les ceramiques peintes du Tigre etant toutefois connues,
importoes mais non elaboroes sur place. Ce Schema de raisonne-
ment expliquerait le fait qu'ä Tall Lelän, par exemple, les premiers
niveaux Ninive 5 (periode IIIa), d'epoque Öamdat Nasr, livrent
deja dans une forte proportion des exemplaires de ceramique
incisee. Cette proposition, ayant pour corollaire une datation rela-
tivement haute des debuts de la ceramique incisee Ninive 5 du
Häbür, eclairerait aussi la mention a Tall Brak dans de memes
niveaux de bevelled rim bowls et de ceramiques Ninive 5 incisees137.
La vogue de cette ceramique incisee et de ses variantes excisees et
a cordons aurait ensuite gagne le Haut Tigre et les regions adja-
centes au detriment de la ceramique peinte, tombee en desuetude
au debut du Dynastique archaique I.
Dans la partie Orientale du triangle du Häbür et en Iraq, ces
ceramiques Ninive 5 incisees et excisees resteront en usage au
Dynastique archaique II, voire jusqu'au dobut du Dynastique
archaique III138 alors que dans la partie occidentale du triangle du
iJäbür, en Syrie, elles cedent la place a la coramique dite metal-
lique des le Dynastique archaique II.

3.1.4. Les autres traits culturels


L'architecture de la culture Ninive 5 est malheureusement tros
mal connue. Les fouilles de sauvetage de la region d'Eski Mö^ul
n'ont pas permis la reconnaissance sur une grande surface de

Oates J. 1986, 252.


La coramique Ninive 5 incisoe reste, pour la plupart des commentateurs, en
usage dans les regions orientales de Haute Mosopotamie au Dynastique
archaique III, mais nous hositons pour notre part a considerer comme roelle-
ment de type Ninive 5 les c^ramiques incisoes d^couvertes a Tall Taya au niveau
IX (voir Reade 1982, pl. 5).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au debut de l'Age du Bronze 273

vestiges d'habitat. II semble que les fouilles de sauvetage de la


region de Hasaka en Syrie soient plus prometteuses mais n'en
est encore qu'aux premiers resultats et la rogion en question
apparait un peu excentrique par rapport au cceur geographique de
cette culture. Les premiers resultats des fouilles des sites ayant
livre des niveaux a associer a la culture Ninive 5 ne sont pas encore
publies; il faut donc encore rester tres prudent, mais il semble que
sur trois sites au moins de la region, Thabitat prive se caracterise
par des unites architecturales relativement petites, composees
d'un nombre limite de pieces et dont certains murs sont renforces
par des piliers interieurs139, une architecture donc qui n'aurait que
peu de rapports avec celle beaucoup mieux connue du Dynastique
archaique III140. Nous noterons egalement Texistence de vastes
greniers, preuve de soucis de centralisation et de redistribution de
la production cerealiere dans une region propice a Tagriculture
seche (dry-farming)141.
La glyptique est dans sä tres large majorite constituoe de sceaux
ou d'empreintes de style piemont geometrique öamdat Na§r142, ce
style tres largement diffuse de Suse a la region du Haut Tigre et au
triangle du ^Jäbür, c'est-a-dire tout au long de la voie de ponetra-
tion majeure vers la Haute Mosopotamie143. Des sceaux de ce type,
retrouves en grand nombre dans les niveaux associes au Temple de
Sin IV a Hafaga, remontent clairement a Tepoque de öamdat Na§r.
Ce style de glyptique est neanmoins encore en faveur au Dynas-
tique archaique I, cotoyant principalement dans la rogion de la
Diyälä un style qui en est issu, le style «brocard», atteste surtout
dans les niveaux associos au Temple de Sin V—VIII (Dynastique
archaique I—II) 144 .
Si Schwartz adopte a propos de cette gl^tique piemont goome-
trique, majoritaire sur les sites Ninive 5, une position relativement

Cela semble etre le cas a Tall QaäqaSuq et a Tall Raqä'i, Communications


personnelles d'A. Suleiman et de H. Curvers.
140
Je pense principalement a Tall Taya et a Tall Melebiya.
141
Des greniers importants ont ete notamment docouverts a Tulül al-Taläta et a
Tall (Atig (communication personnelle de M. Fortin).
142
Voir par exemple Schwartz 1985, 58.
14<
Voir notamment Amiet 1972, pl. 114-125, Amiet 1961, pl. 27-31, Frankfort 1955,
pl. 11-23.
144
Frankfort 1955, pl. 21: 220-222; pl. 22: 224, 225, 226, 229, 230; pl. 23: 232,
233, 235-237; pl. 24: 242, 243; pl. 26: 257; pl. 29: 289, 291, 292, tous sceaux ou
empreintes en provenance de Qafaga.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
274 Marc Lebeau

mod6r6e sur le plan de la Chronologie145, nous sommes un peu


etonne du fait que bon nombre de fouilleurs de Haute Mesopotamie
proposent actuellement pour cette glyptique une date systomati-
quement basse (Dynastique archaique I—III). Nous estimons pour
notre pari que la majorite des empreintes et sceaux de ce style
dans le nord est bei et bien attribuable a l'epoque de öamdat
Nasr tout en admettant qu'une datation Dynastique archaique I
d'une partie de ce corpus est tout a fait envisageable; mais que
prenne garde de dater ce style de periodes trop basses, ce qui
aurait pour effet d'insinuer un decalage «provincial» de la Haute
Mesopotamie vis-a-vis de l'Elam, de la rogion du Hamrin et de la
vallee de la Diyälä, un decalage que rien ne semble justifier a ce
jour.
Le doveloppement de la motallurgie est sensible sur les sites
de culture Ninive 5 en Haute Mosopotamie. L'accroissement de
l'usage du cuivre et de l'argent, souligne par Mallowan, signale la
presence d'individus aises. Adams estime d'ailleurs que le metal
pourrait constituer un indicateur de prosperite relative, mais
Schwartz nous rappeile que ne peut comparer la frequence des
objets en motal nord-mesopotamiens a celle des roalisations de
Mesopotamie du sud146. Ce doveloppement du traitement des
motaux est tres logique a si peu de distance des sources d'appro-
visionnement de TAnatolie. II est aussi une consoquence possible
du doveloppement de l'artisanat spocialise, Tun des trait con-
stitutifs des societos en voie de hiorarchisation. A ce propos, nous
avons pu voir recemment des armes en cuivre de qualito tout a fait
exceptionnelle, issues des fouilles d'A. Suleiman a Tall Qa§qa§uq
(niveaux Ninive 5), au nord de Hasaka147.

3.1.5. La societe
Apparue apres la fin des otablissements urukeens du nord, la
culture Ninive 5 est encore malheureusement peu connue et, a ce
titre, toutes les inforences que les archoologues pourraient etre

145
Schwartz 1985, 58: selon l'auteur, la prosence de sceaux et empreintes Gamdat
Nasr dans des contextes relativement tardifs Ninive 5 n'implique pas neces-
sairement une date ftamdat Nasr pour de tels contextes. Suit un decompte des
mentions de ce style dans la vallee de la Diyälä oü Schwartz estime que 25%
environ des exemplaires pourraient etre dates du Dynastique archaique.
146
Schwartz 1985, 62.
147
Grace a l'obligeance de Suleiman.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au d^but de FAge du Bronze 275

amenes ä tirer de la nature profonde des fondements de la societe


doivent etre evaluees avec beaucoup de prudence148.
H. Weiss a bien souligne Timportance du Systeme agricole,
l'agriculture seche, de ces regions de Haute Mesopotamie jouissant
d'une pluviometrie abondante et d'une bonne qualito des terres
arables149, cette region qui deviendra Tun des greniers ä b!6 de
TEmpire romain. Schwartz estime que la periode Ninive 5 est une
phase cruciale de transition dans le developpement de la sociote
urbaine dans le nord de la Mesopotamie et que, si les grandes cites
y apparaissent au Dynastique archaique III150, la poriode Ninive 5
vit l'etablissement de changements significatifs menant ä Tetablis-
sement de la societe urbaine stratifiee151. Ce stade «proto-urbain»
n'implique cependant pas l'absence de centres importants tels
qu'ont dejä pu l'etre Ninive, Kirkuk ou encore Erbil. II est enfin
probable que cette culture a participo pour une part peut-etre non
negligeable au developpement de certaines techniques et contribue
ainsi au progres technologique de la Mesopotamie tout entiere.

3.2. La culture «a ceramique metallique»


Probablement vers le milieu ou la phase finale de l'epoque
Dynastique archaique I, dans une region proche de Tactuelle
frontiere syro-turque, entre la vallee du Balih et la region des tribu-
taire occidentaux du ^Jäbür, omerge une culture nouvelle, caracte-
risee le mieux par l'usage abondant d'un type de ceramique fine
connu principalement sous le nom de «ceramique metallique»152.

3.2.1. La ceramique metallique


L'etude fondamentale portant sur cette ceramique est la publica-
tion de la ceramique de Tall ^Juera, des soins de H. Kühne 15 ^. En
148
Une prudence louable que retrouve notamment dans l'etude de Schwartz
consacree aux pratiques funoraires (Schwartz 1986).
14<)
Weiss 1983, 39-52 et 1985, carte, 26 et 31 et surtout Weiss 1986, 71-87 oü l'au-
teur analyse les conditions necessaires et süffisantes a la pratique de ce mode
d'agriculture (pluviomotrie suporieure ä 250 mm par an mais aussi importance
de la variabilit/ annuelle) et compare la productivite des cultures de Haute
Mosopotamie ä celles du Pays de Sumer et des ptemonts du Zagros.
150
Schwartz mentionne Tall Huera, Tall HoSi, et Tall Lelän.
151
Schwartz 1985, 61.
152
A propos des autres dosignations de cette ceramique (schwarze Ware, black/grey
burnished wäre, Basalt wäre, Stoneware), voir Kühne 1976, 33.
15:1
Kühne 1976.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
276 Marc Lebeau

fait, cette etude dopasse largement le cadre scientifique que laissait


presager son titre; il s'agit d'une these portant principalement sur
l'etude de la ceramique motallique, de ses caracteristiques techni-
ques et morphologiques, de son apparition, de sä Chronologie, de
son aire de distribution, des comparaisons que peut en tirer
avec Tensemble des cultures materielles du Proche Orient antique
et de son implication dans le monde historico-culturel de Tepoque
dynastique archaique. Dans les lignes qui suivent, le lecteur nous
pardonnera les constantes references a cette publication majeure.
Cette ceramique metallique154 est une ceramique de luxe, se
caracterisant par une argile tres fine, sans degraissant visible,
cuite a haute temperature (env. 1000°), presentant une surface
mate souvent de couleur foncee (grise ou noire) mais parfois
orange, elaboree par des potiers maitrisant les techniques d'oxydo-
reduction. Les surfaces externes sont souvent striees, parfois ä des
fins decoratives155. Le repertoire des types morphologiques est
bien caracterise, presque canonique, ä tel point qu'il est souvent
tres difficile d'etudier l'evolution morphologique de cette cera-
mique au cours des quelques centaines d'annees de son existence
(de la fin du Dynastique archaique I ä Pepoque de Sargon)156.
La ceramique motallique apparait a la phase mediane ou ä la fin
du Dynastique archaique I ä Tall JJuera (Steinbau l, Schicht 7) 157 .
Sur certains sites de la rogion occidentale des tributaires du JJäbür,
eile cötoie des exemplaires sans doute tardifs de ceramique Ninive
5 incis6e-excis6e158. Malgro cette simultanoite partielle, la cera-
mique metallique semble globalement plus recente que la cora-

154
De nombreuses coramiques difforentes ont ogalement 6te designoes par ce terme
(Kühne 1976, 34); nous prociserons donc qu'il s'agit ici de la «coramique m^tAl-
lique de Haute Mesopotamie au Bronze ancien».
155
Kühne 1976, 34.
156
Kühne 1976, 35—38. Cette permanence morphologique est tout a fait remar-
quable; nous avons eu l'occasion de v^rifier ce fait lors des fouilles de Tall Mele-
biya.
157
Kühne 1976, 32—33. A propos de la datation des niveaux archoologiques de Tall
Huera, voir Kühne 1976, 30—33 et tableau 1; la datation proposoe est tres tribu-
taire de la glyptique. Voir aussi Orthmann 1986, 61—70.
158
Notamment ä Tall 'Ailün, oü les niveaux profonds Ninive 5 (sans coramique
motallique) sont suivis de niveaux caractorisos par la presence simultanoe
de tessons de ceramique Ninive 5 et de coramique motallique (Moortgat 1957,
23—24), et a Tall 'Atig (communication personnelle de Fortin); c'est aussi le cas
a Tall ^Juera mais les tessons de type Ninive 5 y sont tres rares, vraisemblable-
ment Importes (Kühne 1976, 103-104).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au debut de l'Age du Bronze 277

mique Ninive 5 dans les regions ou eile est frequemment attestee


(c'est-ä-dire en Anatolie du sud, dans la region de Mardin et au sud
du Tür 'Abdin, dans le triangle du ijäbür, tout particulierement
dans sä moitie occidentale, et dans la vallee du Balih). Dans ces
memes regions, eile supplante au Dynastique archaique II la cera-
mique Ninive 5 et c'est d'ailleurs de cette epoque procise que
semble dater Pexpansion de la «culture a coramique motallique»
(CCM); une expansion qui ira croissant jusqu'ä l'arrivee des
dynastes akkadiens en Haute Mesopotamie.
Kühne analyse longuement la litterature archeologique des
regions de Syrie, d'Anatolie et d'Iraq159, ce qui lui permet de con-
siderer que cette culture a comme aire de distribution les regions
comprises entre Harran160, Mardin, le Tür 'Abdin au nord, le
triangle du PJäbür et la moitie superieure de son cours inforieur, et
l'Euphrate a l'ouest161. Nous ajouterons, en ce qui concerne les
fouilles posterieures a la publication de cette etude, qu'il existe une
tres forte concentration de sites CCM au sud de Hasaka162 et
qu'elle est attestee de maniere tres nette a Haläwa (Teil B)163 et a
Tawi164. Nous noterons egalement que la ceramique metallique est
plutot rare en Iraq du nord, objet vraisemblablement d'importa-
tions. A Tall Taya par exemple, la stoneware locale (niveaux IX—
VI) ne presente que peu d'affinites morphologiques avec la cera-
mique metallique de Tall IJuera165; a Tall Billa, il ne semble pas y
avoir de liens directs166. Dans la vallee de la Diyälä, en Babylonie
et dans le Pays de Sumer, si des ceramiques grises existent bei et
bien, la ceramique metallique nord-mesopotamienne n'y est pas
representee ou tres exceptionnellement167. Kühne estime que la
ceramique metallique nord-mesopotamienne atteint la region de
Mari et de Terqa168, nous preciserons que c'est seulement sous des

Kühne 1976, 38-56.


Kühne 1976, 46.
Kühne 1976, 107, carte 4.
Notamment ä Tall 'Ati£, Tall Raqä'i, Tall Bderi, Ma^nacja (Communications de
Fortin, Curvers, Pfälzner et Monchambert) et Tall Melebiya (Lebeau 19851),
1986, 1987b et 1989).
Lüth 1981, 46 et pl. 56.
Kampschulte 1984.
Reade 1968, 245, 251.
Speiser 1933.
Kühne 1976, 53-56.
Kühne 1976, 43-44.
18 ZA 80

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
278 Marc Lebeau

formes locales169 hormis Tun ou l'autre exemplaires caract^risti-


ques170. En Anatolie, des exportations de ceramique metallique
atteignent les sites de Troie, Tarse, Ali§ar, Kültepe171.
Kühne date resolument cette ceramique metallique du Dynas-
tique archaique, en depit de la presence de cette ceramique dans
les Sargonid levels de Tall Brak172, l'horizon culturel de Tall
Huera s'inscrivant dans celui plus genoral de la Mesopotamie de
Topoque dynastique archaique173. En conclusion, l'auteur definit
une aire de culture materielle propre a la Syrie du nord-est, ou la
culture a ceramique metallique s'epanouit au Dynastique archaique
II et III et devient une puissance commerciale, voire politique de
par sä position modiane entre la Mosopotamie et l'Anatolie. Les
campagnes militaires akkadiennes mettront un terme au develop-
pement de cette culture locale174.
Douze ans apres la parution de son etude, les analyses et les
conclusions de Kühne restent encore largement valables et sont
meme confirmees par Ouvertüre de nouveaux chantiers archeolo-
giques en Syrie. II est a souligner que l'etude interdisciplinaire
de cette ceramique motallique est toujours a l'honneur en
Allemagne175.
Certains commentateurs ont pourtant tenu a preciser ou a
remettre en question quelques points de l'etude de Kühne.
Schwartz repose notamment le problöme chronologique de la data-
tion des «niveaux sargoniques» de Tall Brak ou ont ete retrouves de
nombreux exemplaires de coramique motallique176. II estime que
le reexamen de la datation de ces niveaux par Kühne n'est guere
convaincant et que la ceramique motallique, apparue vers 2500 av.
. . est restee en usage a Tall Taya, a Sagir Bäzär et a Tall Lelän
jusque vers la fin du troisteme millonaire. Cette datation lui pennet
de confirmer la place de la Eine Cliriky wäre (correspondant a Tall

1<)!l
Kelly-Buccellati 1979, 72; Lebeau 1985a et 1987a.
170
Notamment des bols decouverts dans le tombeau 300 (sous le Temple d'IStar),
en compagnie de deux vases de scarlet wäre (Parrot 1956, 10—11; Lebeau 1990,
une scarlet wäre ogalement attestee a Terqa au Dynastique archa'ique I (Kelly-
Buccellati 1979, 72).
171
Kühne 1976, 58.
172
Voir la longue discussion sur la Chronologie de Tall Brak (Kühne, 1976, 59—63).
173
Kühne 1976, 58-59.
174
Kühne 1976, 118-119.
175
Je pense aux travaux de G. Preuss et de D. G. Ullrich.
176
Schwartz 1983, 201-207.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 279

Lelän partiellement ä la ceramique metallique) a l'intorieur de la


periode II177. Joan Oates date la stoneware de Tall Brak de Tepoque
dynastique archaique mais aussi de l'opoque akkadienne (Agade
stone wäre)17*, remettant donc implicitement en question les
propositions chronologiques de Kühne. Nous avons dejä eu l'occa-
sion d'aborder ce probleme ä propos de la ceramique du chantier B
de Tall Melebiya179.
Sans vouloir entrer dans des discussions trop techniques, nous
pensons pour notre part que ce probteme est de la confusion
de deux types ceramiques distincts quoique d'apparence assez
proche, une ceramique metallique «de type Huera» et une cera-
mique metallique plus tardive que pourrait denommer cera-
mique metallique «akkadienne*. La päte, le traitement de la
surface ainsi que le ropertoire morphologique de ces deux variantes
sont differents. La ceramique metallique «akkadienne» serait
apparue d^s la fin de l'epoque dynastique archaique III en Haute
Mosopotamie et serait bien attestee ä Tall Brak (Sargonid levels,
late ED Z//?180, ä Sagir Bäzär181, ä Tall Taya182, a Tall Lelän183 et
ä Tall Melebiya (chantier B, ou eile est attestoe en compagnie de la
coramique motallique plus archaique de type $uera)184. II est a
noter que cette coramique metallique akkadienne a une aire de
distribution legerement decaloe vers Test par rapport a celle de la
coramique motallique de type JJuera. Les rocents travaux de Gerti
Preuss ont egalement pour but de bien sorier les diverses variantes
connues sous le terme generique mais un peu imprecis de cera-
mique metallique185. II semble dosormais possible de bien identifier
physiquement et chimiquement le type plus ancien de cette cora-
mique, celui de type ^Juera186. Des progrös dans la deflnition de
ces coramiques motalliques sont donc probables dans un proche
avenir.

177
Schwartz 1983, 207.
178
Oates J. 1982, 205-207.
179
Lebeau 1986, 11-13.
180
Mallowan 1947, Fielden 1977, Oates 1982.
181
Mallowan 1936 et 1937.
182
Reade 1968.
I8i
Schwartz 1983.
184
Lebeau 1985, 1986, 1987 et 1988.
185
Communication personnelle de G. Preuss.
186
Communication personnelle de D. G. Ullrich.
18»
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
280 Marc Lebeau

Pour nous resumer, nous daterions la ceramique metallique de


type Huera de l'opoque dynastique archaique I a III alors que la
ceramique motallique «akkadienne» serait attestee de la fin du
Dynastique archaique III a la fin du troisieme millonaire.
Nous avons dejä mentionne la difficulte de reconnaitre une
ovolution morphologique de la ceramique motallique dynastique
archaique; cette permanence des formes touche aussi la coramique
de cuisine dont le type majeur au Dynastique archaique II et III est
la marmite globulaire a tenons triangulaires accoles a la levre
(Ware mit dreieckigen Lappengrifferi)1*7, type formel repandu sur
une tres vaste aire de distribution (de Erzurum, au nord, a Mari, au
sud, d'Ugarit, a l'ouest, au triangle du Häbür, a Test)188 et succo-
dant a la marmite sans encolure a tenons arques, un type formel
associe aux cultures Ninive 5 et assez typique du Dynastique
archaique I, bien qu'egalement atteste — mais dans une moindre
mesure — au Dynastique archaique II. Cette ovolution mor-
phologique est plus perceptible lorsque etudie la ceramique
commune. Ainsi, dans la rogion au sud de Hasaka oü sont actuelle-
ment concentrees de nombreuses fouilles de sauvetage, il semble
que puisse reconnaitre une certaine evolution de la ceramique
commune entre le Dynastique archaique II et le Dynastique
archaique III, a Tall Bderi (sondage stratigraphique sur le flanc sud
du teil) et a Tall Melebiya notamment (chantier C)189. Dans cette
meine rogion, il faut mentionner un fait qui n'est peut-etre pas sans
importance du point de vue des incidences sociales: sur les sites
d'allure rurale ou lies a des lieux de stockage de coroales (Tall

Aii£ et Tall Raqä*i notamment), coramiques metalliques et Ni-
nive 5 sont attestoes simultanement pendant une certaine poriode
alors que sur les sites plus urbanisos (Tall Melebiya), les niveaux oü
apparaissent la coramique motallique sont completement exempts
de tout fragment de ceramique Ninive 5, une coramique Ninive 5
pourtant attestoe dans les niveaux les plus anciens du site, comme
a demontre un recent sondage stratigraphique.

187
Kühne 1976, 99-103, pl. 38.
188
Kühne 1976, 100, carte 3.
189
Les bols en coramique commune d'une phase ancienne de la culture a ceramique
motallique (Dynastique archaique II vraisemblablement) ont une forme gon6-
rale plus hemispherique que ceux du Dynastique archa'ique III, a parois plus
droites; de m^me, nous notons la disparition ou l'apparition de certains types de
levres (communication personnelle de Pfälzner et Lebeau 1985 b, 1986 et 1987 b).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 281

3.2.2. Le developpement urbain


A. Poidebard, J. Lauflray et U. Moortgat-Correns190 ont ete
manifestement tres interessos par la presence en Haute Mosopo-
tamie de sites circulaires a enceintes circulaires ou polygonales
(Kranzhügel), dont les exemples les plus representatifs sont Tall
Huera, Tall Bedar, Tall Bati et Tall Mucazzar191. Ces tres nombreux
sites, dont l'occupation principale remonte manifestement aux
deuxieme et troisi6me quarts du troisieme millenaire, jalonnent la
totalite de la Haute Mesopotamie selon des axes est-ouest qu'il est
raisonnable d'assimiler aux principales routes de Topoque192.
Appeles par Poidebard teils «de type mitannien» plus sans doute
en reference a la region qu'ä Tepoque d'occupation, U. Moortgat-
Correns les date de l'epoque de Mesilim, soit du Dynastique
archa'ique II. II faut ajouter que l'implantation de ces sites corres-
pond assez exactement a l'aire de distribution de la ceramique
metallique («de type ^Juera»). II est donc tres tentant d'y voir les
sites majeurs de la culture a ceramique metallique; le plus impor-
tant de ceux-ci, Tall IJuera, occupe une superficie d'environ cent
hectares. Ils sont regulierement disposes sur les rives des divers
tributaires du yäbür et a proximite du Balih; la distance moyenne
qui les separe pourrait correspondre en termes de deplacement a
une otape quotidienne. Leur taille semble sans commune mesure
avec celle des etablissements anterieurs; pour la premiere fois en
efTet, il est permis de parier de veritables cites, dont la morpho-
logie canonique est fondee sur le trace de cercles concentriques.
L'exemple peut-etre le plus typique de ces sites est Tall Bedar, site
d'environ trente hectares dispose sur la rive droite duWadi (Aweg,
au nord-ouest de Hasaka193. II s'agit d'un site compose de quatre
zones concentriques: une enceinte extorieure, une ville basse, une
ville haute peut-etre elle-meme defendue par un rempart et enfin,
une acropole. Ces traces regulateurs uniformes sont le signe non
seulement d'une meme culture mais aussi peut-etre de Texistence,
a un certain degre, d'un pouvoir central, sans qu'il soit sans doute
possible de Tassimiler a un Etat centralisateur194. C'est egalement

190
Poidebard 1934, LaufTray 1955, Moortgat-Correns 1972.
191
Poidebard 1934, pl. CXXXIII, CXXXIV (Tall Mu'azzar), CXXXV (Tall Bedar),
CXXXIX (Tall Bati).
192
Voir la carte de repartition de ces sites proposee par Moortgat-Correns 1972.
19
·' Poidebard 1934, pl. CXXXV.
194
Voir Orthmann 1986, 62.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
282 Marc Lebeau

ä cette meme epoque, voire un peu plus tard (au Dynastique


archaique III) que se doveloppent sur une ampleur considorable
Tall Lelän et Tall Taya (qui ne partagent cependant pas toutes les
caractoristiques morphologiques des Kranzhügel)195.
II est pour l'heure malaise d'essayer de doterminer une ovolution
notable dans le domaine de Tarchitecture et de l'urbanisme, les
plans ä notre disposition otant trop limites, mis ä part ä Tall Taya
mais ce dernier site est poriphorique par rapport ä 1'aire de distri-
bution de la culture ä ceramique metallique (de type IJuera). II
semble cependant que les maisons d'habitation d'une phase relati-
vement ancienne de la CCM ä Tall Huera (Kl. Antentempel,
niveaux 5 — 2/3)196 soient assez limitoes quant ä leur taille et ä leur
complexite. Toutes proportions gardoes, il serait tentant de les
comparer aux maisons actuellement en cours de degagement au
chantier C de Tall Melebiya (niveau C3, vraisemblablement de
datation Dynastique archaique II)197. A Tall Melebiya, vers la fin
du Dynastique archaique III (chantier B), l'architecture privoe
semble evoluer assez rapidement dans un sens de sophistication
croissante des installations. Les maisons deviennent des unitos
plus complexes et leur taille croit; le principe directeur du plan
desormais adopte est celui de Tassociation entre un espace central
(unique ou multiple) et des pieces de dimensions plus petites grou-
poes autour de ce nceud de circulation198. Les partis architecturaux
et urbanistiques deviennent tres voisins de ceux de la vallee de la
Diyälä (Tall Asmar et IJafaga) et de ceux de Tall Taya, ä Test du
öabal Singär199. Cette similarito de rurbanisme et de l'architecture
privoe entre les sites de la valloe de la Diyälä, Tall Taya et Tall
Melebiya est tr£s forte vers la fin de l'opoque dynastique archaique
et signale sans doute d'intenses contacts entre ces diverses
rogions.
Sur le plan de Tarchitecture religieuse, nous devons pourtant
souligner Tapparition en Haute Mosopotamie au Dynastique
archaique du temple in antis (Tall ^Juera, Tall Taya200) qui corres-
pond ä une formulation architecturale tres difforente de celles
195
Weiss 1985, 22-32; Reade 1968, 1971, 1973 et 1982.
196
Moortgat 1965, plan V (niveaux 2/3), Moortgat 1967, plan IV (niveau 4),
Moortgat 1976, plan III (niveau 5).
197
Lebeau 1987 b, 3-4, 55, pl. IV.
198
Lebeau 1989, 2-13, pl. 4-5, 30-31.
199
Lebeau 1989, 11-13, 32-33 (pl. 6-7), 34-36 (pl. 8-10).
200
Margueron 1985, fig. 8, a-b-c; Reade 1973, pl. LVIII.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze 283

adoptees pour les temples mesopotamiens. Ce temple in antis sera


promis a un bei avenir puisqu'il deviendra le temple typique du
monde Syrien201. Son apparition a une epoque aussi ancienne en
Haute Mesopotamie ne manque pas de susciter des questions
importantes a propos des conceptions religieuses peut-etre origi-
nales, distinctes des preoccupations mesopotamiennes, de cette
culture a ceramique metallique pourtant traversee de courants
culturels d'origine meridionale202.

4. Mari au dobut de Popoque Dynastique archaique

4.1. La documentation ceramique


La naissance de Mari est a fixer dans les premieres decennies du
troisieme millenaire, soit vers 3000—2900 av. n.e. Cette datation de
la ceramique des premiers niveaux de Mari, pour la premiere fois
identifies au chantier B, a 6te recemment confirmee par une data-
tion de thermoluminescence203. II semble vraisemblable que la
nouvelle cite ait ete le fruit d'une Implantation volontaire et non le
resultat de l'evolution progressive d'une bourgade s'elevant au
rang de cito204. La sequence dynastique archaique I y est tres
longue et continue; aucun hiatus materialise par des niveaux de
destruction ou d'abandon n'y est pour le moment discernable205.
Un examen plus approfondi de la coramique, actuellement en
cours, permet de distinguer trois grandes phases a Tinterieur de
cette sequence: une phase ancienne (niveaux 18—14), une phase
moyenne (niveaux 13—11) et une phase rocente (niveaux 10—
9 20i) ) 207 . Ces phases sont determinees par des assemblages de cora-
mique commune de nature dififerente, surtout matorialisos par une
evolution sensible des types de bols mais aussi par la disparition ou
l'apparition d'autres types morphologiques. Un seul type formel y
subsiste sans evolution reperable, celui des marmites globulaires

201
Margueron 1985.
202
Est-il besoin de rappeler ici la statuaire dynastique archaique de Tall PJuera,
tres voisine de celle de la vallee de la Diyälä?
201
Lebeau 1987 a, 418-419.
204
Lebeau 1987 a, 419.
205
Lebeau 1985 a et 1987 a.
206
Le niveau 9 otant datable soit de l'extreme fm du Dyn. arch. I soit du debut du
Dyn. arch. II.
207
Lebeau 1990b (a paraitre).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
284 Marc Lebeau

sans encolure et ä tenons arquos, un type de ceramique de cuisine


associe en Haute Mosopotamie a la culture Ninive 5. La rupture
ceramique la plus sensible est discernable entre la couche 11 et la
couche 10. Les rares tessons de ceramique fme Ninive 5 (incisee ou
excisoe) ne sont attestes pour l'heure que dans les couches 14,12 et
10 du chantier B, soit ä chacune de ces trois phases208.
La phase ancienne (couches 18—14) se caracterise par une cera-
mique commune tres voisine de celle presente sur les sites Ninive
5: bien que les bols ne presentent pas la finesse des bols Ninive 5,
leur forme generale (carene haute et rentrante, base arrondie,
parfois legerement pointue209) est voisine; les levres tres typees de
certaines jarres210 evoquent irresistiblement des types reconnus
ä Tulül al-Taläta ou encore ä Tall Raqä'i21!; un flacon muni de trous
de Suspension212 est identique ä des exemplaires de Ninive ou de
Muhammad (Arab et les comparaisons ne s'arretent pas la. Pour
nous resumer, quoique privee d'une proportion significative de
ceramiques fines Ninive 5, le corpus ceramique representatif de la
phase ancienne de la sequence dynastique archaique I ä Mari est
d'ambiance ninivite 5. La phase mediane (couches 13—11) est un
peu plus banale ou plus difficile a definir sur le plan de la cera-
mique. C'est surtout de ces couches que proviennent les quelques
tessons presentant des afiinites physiques ou morphologiques
notoires avec la ceramique metallique archaique de Haute Me-
sopotamie, mais sans pour autant en etre des echantillons
manifestes213. Pour ce qxii concerne la ceramique commune, les
bols perdent leur carene haute et leurs parois deviennent verticales
ou legerement eversees214. L'on peut comme ä Tall Lelän y distin-
guer une ceramique commune normale et une ceramique commune
plus fine. La phase dynastique archaique I la plus recente (couches
10—9), se materialise par Tirruption dans la ceramique commune
de formes nouvelles: coupes ä pied haut, bols ä goulot et surtout
petits bols hemispheriques ä base plate dont la forme est iden-

208
Lebeau 1987a, 435, pl. IV, 15-16; Lebeau 1985a, 122, pl. XXVII, 10, 123, pl.
XXVIII, 12, 119, pl. XXIV, 23.
209
Types formels BL 4 et BL 5 ä associer aux bases BAD l et BAD 3 (Lebeau
1991).
210
Type Formel JR 16 (Lebeau 1991).
211
H. Curvers m'a soumis quelques planches coramiques encore inedites.
212
Lebeau 1987 a, 433, pl. III, 9.
213
Lebeau 1987a, 438, pl. I, 2-3; Lebeau 1985a, 122, pl. XXVII, 26.
214
Types formels BL 5, BL 6, BL 8, BL K) (Lebeau 1991).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au debut de l'Age du Bronze 285

tiqueä celles de types bien attestes dans la vallee de la Diyälä et


dans la region du Hamrin 21 '. C'est egalement de ces couches que
proviennent des exemplaires d'une ceramique noire a bandes
polies dont Torigine est probablement a situer dans la vallee de la
Diyälä216. Pour memoire, le seul tesson de scarlet wäre mis au
jour au chantier B provient de la couche 9 217 . Signalons toutefois
l'absence du type formel constitue par les solid-foot goblets de la
vallee de la Diyälä.
Pour conclure la discussion sur cette sequence ceramique du
chantier B, il semble que les ruptures entre les trois phases s'ac-
compagnent d'influences diverses dans le choix des assemblages.
La ceramique de la phase ancienne est d'ambiance Ninive 5, celle
de la phase mediane est delicate a definir mais pourrait se
traduire par certaines afiinites avec la culture a ceramique metal-
lique de Haute Mesopotamie, la phase recente enfin marque les
premiers liens tres sensibles avec la culture materielle des sites de
la vallee de la Diyälä et de la region du Hamrin. Cette parente avec
la ceramique de la Diyälä se renforcera au Dynastique archaique II
et au Dynastique archaique III, si bien que la ceramique de Mari,
malgre quelques particularismes locaux, sera a partir de ces
epoques une ceramique essentiellement mesopotamienne. Elle le
restera tout au long de Thistoire du site jusqu'ä l'epoque paleoba-
bylonienne.
II serait tres tentant de pousser plus loin notre raisonnement en
transterant ces donnoes materielles en termes d'influences poli-
tiques. Nous nous interrogeons notamment sur le fait d'inclure ou
non Mari dans la zone de culture materielle Ninive 5,
en raison de la nature un peu provinciale de la ceramique commune
des couches 18 a 14 du chantier B. II serait premature d'essayer de
porter im jugement defmitif sur la phase mediane du Dynastique
archaique I de Mari, bien qu'il ne semble pas deraisonnable d'envi-
sager des rapports soutenus avec le nord, ou la culture a ceramique
metallique supplante la culture Ninive 5. En revanche, la phase
recente (couches 10—9) semble caracterisee par l'etablissement de
liens puissants et tangibles entre Mari et les sites de la vallee de la
Diyälä. Nous reviendrons sur ce point.

>
* Types formels CP l -l- BPA l, 2, 3 et 4; BG l, 2 et 3; BL 7, 9 + BPL 2, 4, 5 (Lebeau
1991).
21
" Lebeau 1985 a, 120, pl. XXV, 40, 119, pl. XXIV, 22, 24.
217
Lebeau 1985 a, pl. XXI, 5.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
286 Marc Lebeau

Un roexamen du mat£riel coramique retrouve dans le tombeau


300 de Mari (secteur du Temple d'Iätar) permet d'apporter des
donnees complementaires a ces interrogations d'ordre
historique218. Le corpus ceramique en question est constitue de
quelque trente-sept pieces et est sans aucun doute possible contem-
porain de la couche 10 du chantier B, une couche datee de la phase
recente du Dynastique archaique I de Mari. Nous y reconnaissons
une majorite de ceramiques communes (coupes, bols dont un a
goulot, jattes, Supports hauts, bouteilles), une douzaine de cerami-
ques grises (bols, flacons et bouteilles) parmi lesquelles quelques
exemplaires seulement semblent relever de la ceramique metal-
lique de type archaique de Haute Mesopotamie, et deux jarres
peintes du type scarlet wäre119. Le tombeau 300, de meine que les
tombeaux jumelos 241 et 242 voisins, est entierement construit en
belles et massives dalles de gypse. II est voüte en encorbellement.
Anterieur au niveau c du Temple d'IStar, il s'agit d'une sepulture
imposante, princiere ou royale220. L'association dans ce tombeau
de ceramiques communes doja influencees par la ceramique de la
Diyälä, de deux vases de scarlet wäre et, outre quelques cerami-
ques metalliques, de ceramiques grises denotant peut-etre une
adaptation locale de cette ceramique metallique est tres eloquente.
Ce tombeau est precisement contemporain du moment ou a Mari,
les liens avec le nord sont sur le point d'etre remplaces par des
contacts croissants avec les sites de la vallee de la Diyälä. S'il est
possible de tirer parti sur un plan politique des donnees mate-
rielles, ce tombeau a et£ orige au moment ou Mari, de syrienne
qu'elle otait, passe sous forte influence mosopotamienne. Ces liens
entre la culture materielle de Mari et celle de la vallee de la Diyälä
sont tres sensibles pendant toute la duroe du Dynastique archaique
II et III. Ayant doja mis en doute Timportance de l'Euphrate
comme voie de communication essentielle a ces epoques, il nous
reste a chercher par quelle voie se sont exerces ces liens privilegies.
4.2. Mari, et ESnunna
D'apres ce que nous connaissons des sites majeurs de la vallee
de la Diyälä, la puissance d'Eänunna ou de Tutub s'est renforcee
au Dynastique archaique I. Contrölant dosormais la region du

218
Lebeau 1990.
219
Lebeau 1990.
220
Parrot 1956, 10-11.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au dobut de l'Age du Bronze 287

Hamrm, les Eänunnoens se sont peut-etre enhardis dans la


recherche de dobouchos nouveaux. Liant tres certainement des
relations commerciales avec la culture Ninive 5 du Haut Tigre et de
Haute Mesopotamie, puis avec les reprosentants de la culture a
coramique motallique, contacts enrichissants pour les diverses
parties mais qui ont du a Poccasion tourner a Taigre et provoquer
des conflits sans doute limites, il ne semble cependant pas que les
ESnunneens aient reussi a installer des comptoirs commerciaux de
premiere importance dans ces rogions. Aucun site du nord ne
presente en eflet une coramique du type de celle de la Diyälä au
Dynastique archaique I. Ce n'est donc pas par cet axe de penetra-
tion que se sont vraisemblablement etablis les contacts privilogies
avec Mari. La puissance sans doute grandissante de KiS, cite
voisine de TEuphrate, a sans doute 6t£ une gene supplementaire
pour les ESnunneens221.
Reste a envisager une autre voie, la plus directe, une route qui
des environs de Pactuelle Tikrit, sur le Tigre, menerait dans les
environs de (Ana, sur TEuphrate. Le contröle de cette voie directe
aurait permis aux ESnunnoens d'acceder directement a la rogion
de Mari sans entrer en conflit avec de puissants voisins ou sans
passer par des intermodiaires souvent tres interessos par les
profits a tirer de produits en transit. Cette route, traversee par le
Wädi Tartär, nous savons qu'elle a pu a Toccasion servir aux
armees d'Eänunna en route vers la region de Mari, Fondant ainsi
sur la cito par le sud. La region semble de plus avoir 6t£ au debut
du deuxräme millonaire sous contröle eSnunnoen puisqu'elle aurait
6t6 regulierement froquentoe par les troupeaux de la cite en quete
de pätures222. Cette route 6tait-elle d6ja en activito au dobut du
troisiöme millonaire? Nous pensons qu'il n'est pas doraisonnable
de l'envisager. Rappeions aussi que les gisements de bitume de la
rogion de Hit sur l'Euphrate ont pu constituer pour les Eänunneens
un attrait supplomentaire223.

'2<n II y aurait beaucoup a dire sur le röle de KiS a l'opoque dynastique archaique,
cito au pouvoir clairement semite et en relation parfois tres tendue avec les citos
de Basse Mosopotamie; c'est de KiS qu'est issu Sargon et ce fait n'est peut-etre
pas sans importance.
'2'2'2 Selon J.-M. Durand et D. Charpin.
' L'existence d'une teile route expliquerait aussi le röle tenu par les ESnunnoens
dans les incessantes lüttes pour le contröle de la Haute Mosopotamie et de la
rögion de Mari a l'epoque troubloe de l'invasion et de l'Installation des Amor-
rites.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
288 Marc Lebeau

5. Conclusion

Nous avons obauche dans les pages qui prec^dent une esquisse
de l'histoire de la Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze,
evoquant quand le besoin s'en faisait sentir le doveloppement de
regions adjacentes (Diy l , Babylonie, Sumer, Mari).
Nous avons essaye d'insister surtout sur les discontinuites,
discontinuites inovitables dans le cadre de la duree de la periode
traitee, pres de mille ans. Ces discontinuites sont seules en me-
sure d'expliquer le developpement en dents de scie de cette vaste
region.
Tout au long d'un expose que Γόη jugera certainement temeraire
et dont nous revendiquons la subjectivite, nous appuyant sur
certaines etudes plus que sur d'autres, nous avons essayo de traiter
la Haute Mesopotamie non comme un ensemble clos, mais comme
une region en etroit rapport avec les regions voisines, un pays en
constante mutation, au doveloppement local ayant permis des
realisations brillantes mais parcouru par les influences culturelles
d'un monde plus large qui est celui de Tensemble du Proche Orient
ancien.
L'une des grandes inconnues reste le r le des nomades ou des
semi-nomades sur une terre ou les fondements economiques de la
societe ont pu a certaines epoques reposer sur un Systeme mixte
alliant agriculture et pastoralisme, un Systeme tres particulier,
difierent de celui du Pays de Sumer, dont Γόη pourrait retrouver
certaines traces dans les Archives d'epoque amorrite.
Trop soumise aux appetits de ses puissants voisins, la Haute
Mesopotamie n'a peut-etre pas connu ces longues periodes de paix
qui lui auraient permis d'acceder, dans la seronite et la continuito,
au splendide niveau culturel de ses voisines meridionales. Les cites
majeures n'y depasseront pas les cent hectares, une taille impo-
sante certes, mais de loin inferieure a celles des grandes cites de
Sumer, de Babylonie ou de la Diy l .
Terre de passage, plaque tournante entre la Mesopotamie du
sud, TAnatolie et la Syrie, la Haute Mesopotamie a du subir bien
des vicissitudes que nous ne connaitrons sans doute jamais.
Sargon mit un terme durable a son developpement. Les Akkadiens
allaient privilegier deux sites, Tall Brak et sans doute Mari, au
detriment de tous les autres. Leurs campagnes en Haute Mesopo-
tamie ont amene la destruction et Tabandon de la plupart de ces
sites si nombreux a la fin du Dynastique archaique III et dont le

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au debut de l'Age du Bronze 289

developpement s'annon9ait tres prometteur. Ce docollage culturel


et politique du nord, les gens du sud ne pouvaient le laisser se
realiser. Ils y mirent fln avec toute la determination requise, trans-
formant vraisemblablement cette rogion en un desert et la livrant
aux pasteurs nomades.

Bibliographie
Abu al-Soof 1967 B. Abu al-Soof, The Relevance of the Diyala Sequence to
South Mesopotamian Sites, in: Iraq 29, 133—142.
Abu al-Soof 1968 id., Distribution of Uruk, Jamdat Nasr and Ninevite V
Pottery äs revealed by Field Survey Work in Iraq, in:
Iraq 30, 74-86.
Abu al-Soof 1972 id., Notes on the Late Prehistoric pottery of Mesopo-
tamia, in: Sumer 28, 3—8.
Adams 1972 R. McC. Adams/H. J. Nissen, The Uruk Countryside.
The Natural Setting of Urban Societies.
Aldred 1967 C. Aldred, Les origines de l'Egypte ancienne (Edition
francaise de id., London, 1965).
Amiet 1961 P. Amiet, La glyptique mosopotamienne archa'ique.
Amiet 1972 id., Glyptique susienne, des origines a l'opoque des
Perses achemenides. Cachets, sceaux-cylindres et
empreintes antiques decouverts a Suse de 1913 a 1967
(=MDAI43).
Behm-Blancke 1981 M. R. Behm-Blancke et alii, Hassek Höyük, Vorläufiger
Bericht über die Ausgrabungen der Jahre 1978—1980,
in: IstMitt. 31, 5-82.
Biscione 1982 R. Biscione, La ceramica del III. Millennio, in: P. E. Pe-
corella/M. Salvini, Teil Barri/Kahat 1. Relazione pre-
liminare sulle Campagne 1980 e 1981 a Teil Barri/
Kahat nel bacino del Habur, 45—54.
Boehmer 1984 R. M. Boehmer, Kalkstein für das urukzeitliche Uruk,
in: BagMitt. 15, 141-148.
Boese 1985 J. Boese, Excavations at Teil Sheikh Hassan. Pre-
liminary Report on the 1984 Campaign in the Euphrates
Valley (pre-publication).
Boese 1986 id., Teil Sheikh Hassan 1985. Vorläufiger Bericht über
eine Grabungskampagne am Euphrat-Stausee, (pre-
publication).
Campbell Thompson 1931 R. Campbell Thompson/R. W. Hutchinson, The Site of
the Palace of Ashurnasirpal at Nineveh, in: AAA 18,
79-112.
Campbell Thompson 1932 R. Campbell Thompson, The British Museum Excava-
tions on the Temple of Ishtar at Nineveh, 1930—31,
in: AAA 19, 55-116.
Campbell Thompson — R. Campbell Thompson/M. E. L. Mallowan, The British
Mallowan 1933 Museum Excavations at Nineveh, 1931—32, in: AAA 20,
71-186.
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
290 Marc Lebeau

Cauvin 1985 J. Cauvin/D. Stordeur, Une occupation d'opoque Uruk


en Palmyrene: le niveau suporieur d'el Kowm-Caracol,
in: Cahiers de l'Euphrate 4, 191—206.
Culican 1967 W. Culican, Le Levant et la Mer. Histoire et Commerce,
Sequoia-Elsevier (Edition francaise de id., London,
1965).
Curvers, 1987 H. Curvers, The Middle Habur Salvage Operation: Exca-
vation at Teil al-Raqai, 1986, in: Akkadica 55, 1-29.
de Cenival 1978 J.-L. de Cenival, Protohistoire, in: C. Aldred/J.-L. de
Cenival/F. Debono/Chr. Desroches-Noblecourt/J.-Ph.
Lauer/J. Leclant/J. Vercoutter, Le Temps des Pyra-
mides, Coll. L'Univers des Formes, 41—57.
Delougaz 1947 P. Delougaz, Pottery from the Diyala Region (= OIP
63).
Egami 1959 Namio Egami, Telul eth-Thalathat I.
Esin 1982 a U. Esin, Die kulturellen Beziehungen zwischen Ostana-
tolien und Mesopotamien sowie Syrien anhand einiger
Grabungs- und Oberflächenfunde aus dem oberen Eu-
phrattal im 4. Jt. v.Chr., in H. Nissen/J. Renger, Me-
sopotamien und seine Nachbarn (= BBVO 1) 13—21.
Esin 1982 b id., Tepecik Excavations 1974, in: Middle East Techni-
cal University Keban Project Publications I, 7 (Ankara)
95-118.
Fielden 1977 K. Fielden, Teil Brak 1976: the Pottery, in: Iraq 39,
245-256.
Fielden 1981 id., A Late Uruk Pottery Group from Teil Brak, 1978,
in: Iraq 43, 157-166.
Finet1975 A. Finet, Les temples sumoriens du Teil Kannäs, in:
Syria 52, 157-174.
Finet1985 id., Mari dans son contexte goographique, in MARI 4,
41-44.
Finkbeiner - Röllig 1986 U. Finkbeiner/W. Röllig (ed.) Öamdat Nasr. Period or
Regional Style?
Frankfort 1955 H. Frankfort, Stratified Cylinder Seals from the Diyala
Region (= OIP 72).
Frankfort 1968 id., The Late Predynastic Period in Babylonia, CAH I
Chapter XII.
Frifelt 1970 K. Frifelt, Jemdet Nasr Graves in Oman, in: KUML
(1970) 374-383.
Fugmann 1958 E. Fugmann, Hama. Fouilles et recherches de la Fonda-
tion Carlsberg 1931—1938, L'architecture des peüodes
pr6-hell6nistiques.
Fujü 1981 H. Fujü (od.), Preliminary Report of Excavations at
Gubba and Songor, al-Rafidan II, The Institute for Cul-
tural Studies of Ancient Iraq, Kokushikan University,
Tokyo.
Fukai 1974 Sh. Fukai/K. Horiuchi/T. Matsutani, Telul eth Thala-
that, The Excavation of Teil V. The fourth Season
(1965), volume III (Tokyo).

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au dobut de l'Age du Bronze 291

Gelb 1986 I. J. Gelb, Ebla and Lagash. Environmental Contrast,


in H. Weise (6d.), The Origins of Cities in dry-farming
Syria and Mesopotamia in the third Millennium B.C.,
157-167.
Geyer 1985 B. Geyer, Geomorphologie et occupation du sol de la
moyenne vall^e de l'Euphrate dans la rögion de Mari,
in: MARI 4, 27-39.
Geyer1987 B. Geyer/J.-Y. Monchambert, Prospection de la
moyenne valloe de l'Euphrate: rapport proliminaire:
1982-1985, in: MARI 5, 293-344.
Gibson 1981 McGuire Gibson (od.), Uch Tepe I, Teil Razuk, Teil
Ahmed al-Mughir, Teil Ajamat.
Hauptmann 1972 H. Hauptmann, Die Grabungen auf dem Nor§un-Tepe
1970, in: Middle East Technical University Keban Pro-
ject Publications (Ankara) 103-117.
Hauptmann 1976 id., Die Grabungen auf dem Nor§un-Tepe 1972, in:
Middle East . . . (Ankara) 71-90.
Hauptmann 1979 id., Die Grabungen auf dem Nor§un-Tepe 1973, in:
Middle East . . . (Ankara) 61-78.
Hauptmann 1982 id., Die Grabungen auf dem Norsun-Tepe 1974, in:
Middle East . . . (Ankara) 13-70.
Kampschulte 1984 I. Kampschulte/W. Orthmann, Gräber des 3. Jahrtau-
sends v.Chr. im syrischen Euphrattal. 1. Ausgrabungen
bei Tawi 1975 und 1978 (= Saarbrücker Beiträge zur
Altertumskunde 38).
Kelly-Buccellati 1979 M. Kelly-Buccellati, in G. Buccellati (ed.), Terqa Pre-
liminary Reports n° 10. The fourth Season: Introduction
and the Strati^raphie Record 71—75.
Kepinski 1985 Chr. Kepinski/0. Lecomte, Mari et Haradum, in:
MARI 4, 615-621.
Killick 1986 R. Killick, The Eski Mosul Region, in: Finkbeiner —
Röllig 1986, 229-244.
Kolbus 1985 S. Kolbus, Observations to the comparative Strati-
graphy of Babylonia and its neighbouring Regions, in:
Mesopotamia 20, 75—91.
Kühne 1976 H. Kühne, Die Keramik vom Teil Chuera und ihre Be-
ziehungen zu Funden aus Syrien-Palästina, der Türkei
und dem Iraq.
Lamberg-Karlovsky 1979 C. C. Lamberg-Karlovsky, SablofT, Ancient Civiliza-
tions. The Near East and Mesoamerica.
Lauffray 1955 J. Lauffray/W. J. Van Liere, Nouvelle prospection
archoologique dans la Haute Jezireh syrienne, in: An-
nales archoologiques arabes syriennes 4/5, 129 sqq.
Lebeau 1982 M. Lebeau, Les empreintes de sceaux-cylindres de Teil
Kannäs. in A. Finet (ed.), Teil Kannäs. Dix ans de re-
cherches archoologiques sur l'Euphrate en Syrie,
92-95.
Lebeau 1985 a id., Rapport präliminaire sur la soquence ce>amique du
chantier B de Mari (Ille Miltenaire), in: MARI 4,
93-126.
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
292 Marc Lebeau

Lebeau 1985 b id./E. Gubel/J.-Y. Monchambert, Rapport preliminaire


sur la premiere campagne de fouilles ä Teil Melebiya
(Moyen Khabour — printemps 1984), in: Akkadica 45,
1-31.
Lebeau 1986 id. et alii, Rapport preliminaire sur la deuxieme cam-
pagne de fouilles a Teil Melebiya (Moyen Khabour -
printemps 1985), in: Akkadica 46, 1-49.
Lebeau 1987 a id., Rapport preliminaire sur la ce>amique des pre-
miers niveaux de Mari (chantier B — 1984), in: MARI 5,
415-442.
Lebeau 1987 b id. et alii, Rapport preliminaire sur la troisieme cam-
pagne de fouilles ä Teil Melebiya (Moyen Khabour -
automne 1986), in: Akkadica 51, 1-74.
Lebeau 1989 id. et alii, Rapport preliminaire sur la quatrieme cam-
pagne de fouilles a Teil Melebiya (Moyen Khabour —
printemps 1987), in: Akkadica 61, 1—31.
Lebeau 1990 id., La ceramique du tombeau 300 de Mari (Temple
d'Ishtar), in: MARI 6, 349-374.
Lebeau 1991 id., La coramique du chantier B de Mari (titre provi-
soire, en proparation).
Lüth 1981 F. Lüth, Grabungen auf dem Teil B, in W. Orthmann
(od.), Halawa 1977 bis 1979. Vorläufiger Bericht über die
1. bis 3. Grabungskampagne (= Saarbrücker Beiträge
zur Altertumskunde 31) 39-66.
Mallowan 1936 M. E. L. Mallowan, The Excavations at Tall Chagar
Bazar, and an archaeological Survey of the Habur
Region, 1934-5, in: Iraq 3, 1-86.
Mallowan 1937 id., The Excavations at Tall Chagar Bazar, and an
archaeological Survey of the Habur Region, Second
Campaign, 1936, in: Iraq 4, 91-177.
Mallowan 1947 id., Excavations at Brak and Chagar Bazar (= Iraq 9,
1-266).
Margueron 1985 J. Margueron, A propos des temples de Syrie du Nord,
in: Sanctuaires et Clerges, 11—38.
Michalowski 1986 P. Michalowski, Mental Maps and Ideology: Refiections
on Subartu, in H. Weiss (ed.), The Origins of Cities
in dry-farming Syria and Mesopotamia in the third
Millennium B.C., 129-156.
Monchambert 1984 J.-Y. Monchambert, Prospection archoologique sur
Templacement du futur lac du Moyen Khabour, in:
Akkadica 39, 1-7.
Monchambert 1985 id., Mashnaqa 1985. Rapport preliminaire sur la pre-
miere campagne de fouilles, in: Syria 62, 219—250.
Monchambert 1987 a voir Geyer 1987.
Monchambert 1987 b id., Mashnaqa 1986. Rapport preliminaire sur la
deuxieme campagne de fouilles, in: Syria 64, 47—78.
Moortgat 1959 A. Moortgat, Archäologische Forschungen der Max
Freiherr von Oppenheim-Stiftung im nördlichen Me-
sopotamien 1956.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mesopotamie au dobut de l'Age du Bronze 293

Moortgat 1965 id., Teil Chuera in Nordost-Syrien. Bericht über die


vierte Grabungskampagne 1963.
Moortgat 1967 id., Teil Chuera in Nordost-Syrien. Vorläufiger Bericht
über die fünfte Grabungskampagne 1964.
Moortgat 1976 id./U. Moortgat-Correns, Teil Chuera in Nordost-
Syrien. Vorläufiger Bericht über die siebente Grabungs-
kampagne 1974.
Moortgat-Correns 1972 U. Moortgat-Correns, Die Bildwerke vom Djebelet el-
Beda in ihrer räumlichen und zeitlichen Umwelt.
Nagel 1964 W. Nagel, Djamdat Nasr-Kulturen und Frühdy-
nastische Buntkeramiker (= Berliner Beiträge zur Vor-
und Frühgeschichte 8).
Ncgev 1972 A. Negev (ed.), Archaeological EncyclopediaoftheHoly
Land.
Gates D. 1985 D. Oates, Walled Cities in northern Mesopotamia in
the Mari Period, in: MARI 4, 585-594.
Oates J. 1982 J. Oates, Some late Early Dynastie III Pottery from
Teil Brak, in: Iraq 44, 205-219.
Gates J. 1985 id., Teil Brak: Uruk Pottery from the 1984 Season,
in: Iraq 47, 175-186.
Oates J. 1986 id., Teil Brak: The Uruk/Early Dynastie Sequence, in:
Finkbeiner-Röllig 1986, 245-273.
Orthmann 1986 W. Orthmann, The Origin of Teil Chuera, in H. Weiss
(ed.), The Origins of Cities in dry-farming Syria and
Mesopotamia in the third Millennium B.C.
Palmieri 1981 A. Palmieri, Excavations at Arslantepe (Malatya), in:
AnSt. 31, 101-117.
Palmieri 1985 id., 1984 Excavations at Arslantepe, VII. Kazi So-
nunclari Toplantisi (Ankara) 29—36.
Parrot 1956 A. Parrot, Le Temple d'Ishtar (= MAM I, = BAH 65).
Poidebard 1934 A. Poidebard, La trace de Rome dans le dosert de Syrie.
Le limes de Trajan a la conqu&te arabe. Recherches
aeriennes (1925-1932) (= BAH 18).
Postgate 1986 J. N. Postgate, The Transition from Uruk to Early
Dynastie: Continuities and Discontinuities in the
Record of Settlement, in: Finkbeiner — Röllig 1986,
90-106.
Potts 1986 D. T. Potts, Eastern Arabia and the Oman Peninsula
during the Late Fourth and Early Third Millennium
B.C., in: Finkbeiner - Röllig 1986, 121-170.
Reade 1968 J. E. Reade, Teil Taya (1967): Summary Report, in:
Iraq 30, 234-264.
Reade 1971 id., Teil Taya (1968-9): Summary Report, in: Iraq 33,
87-100.
Reade 1973 id., Teil Taya (1972-73): Summary Report, in: Iraq 35,
155-188.
Reade 1982 id., Teil Taya in: J. Curtis (ed.), Fifty Years of Meso-
potamian Discovery. The Work of the British School
of Archaeology in Iraq 1932-1982, 72-78, pl. 5.
19 ZA80
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
294 Marc Lebeau

Redman 1978 C. L. Redman, The Rise of Civilization.


Roaf 1984 M. Roaf, Excavations at Teil Mohammed 'Arab in the
Eski Mosul Dam Salvage Project, in: Iraq 46, 141-156.
Roaf 1987 id., Robert Külick, A mysterious AfTair of Styles: the
Ninevite 5 Pottery of northern Mesopotamia, in: Iraq 49,
199-230.
Sanlaville 1985 P. Sanlaville, L'espace goographique de Mari, in
MARI 4, 15-26.
Schwartz 1983 G. M. Schwartz, From Prehistory to History on the
Habur Plains: the Operation l Ceramic Periodization
from Teil Leilan (University Microfilms International,
Ann Arbor).
Schwartz 1985 id., The Ninevite V Period and current Research, in:
Paleorient 11/1, 53-70.
Schwartz 1986 id., Mortuary Evidence and Social Stratification in the
Ninevite V Period, in H. Weiss (od.), The Origins of
Cities in dry-farming Syria and Mesopotamia in the
third MUlennium B.C., 45-60.
Schwartz 1988 id., Excavation at Karatut Mevkii and Perspectives on
the Uruk / Jemdet Nasr Expansion, in: Akkadica 56,
1-41.
Speiser 1933 E. A. Speiser, The Pottery of Teil Billa, A Preliminary
Account, in: Museum Journal 23 (1932-33), 249-308.
Speiser 1935 id., Excavations at Tepe Gawra, vol. I. Levels I—VIII.
Strommenger 1980 E. Strommenger, Habuba Kabira. Eine Stadt vor 5000
Jahren.
Stucky 1974 R. A. Stucky, Teil el Hajj in Syrien. Zweiter Vorläu-
figer Bericht Grabungskampagne 1972 (Archäologi-
sches Institut, Bern).
Sürenhagen 1975 D. Sürenhagen, Untersuchungen zur Keramikproduk-
tion innerhalb der spät-urukzeitlichen Siedlung
Habuba Kabira-Süd in Nordsyrien, Acta Praehistorica
et Archaeologica 5/6, 43-164.
Sürenhagen 1986a id., Archaische Keramik aus Uruk-Warka, in: BagMitt.
17, 7-95.
Sürenhagen 1986 b id., The dry-farming Belt: the Uruk Period and sub-
sequent Developments, in H. Weiss (od.), The Origins
of Cities in dry-farming Syria and Mesopotamia in the
third Millennium B.C., 7-43.
Teissier 1987 B. Teissier, Glyptic Evidence for a connection between
Iran, Syro-Palestine and Egypt in the Fourth and Third
Millennia, in: Iran 25, 27-53.
Thuesen 1981 I. Thuesen, Early Dynastie Pottery from Teil Razuk,
in: McGuire Gibson (ed.), Uch Tepe I, Teil Razuk,
Teil Ahmed al-Mughir, Teil Ajamat, 99-143.
van Driel 1983 G. van Driel/C. van Driel-Murray, Jebel Aruda, the 1982
Season of Excavation, Interim Report, in: Akkadica 33,
1-26.

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
La Haute Mosopotamie au d£but de l'Age du Bronze 295

van Loon 1983 M. N. van Loon, Hammam et-Turkman on the Balikh:


First Resulte of the University of Amsterdam's 1982
Excavations. in: Akkadica 35, 1—23.
Vertesalji 1985 P. P. Vertesalji, Review of Protodynastic Development
in Babylonia, in: Mesopotamia 20, 53—75, 91—105.
Weise 1983 H. Weiss, Excavations at Teil Leilan and the Origins
of Northern Mesopotamian Cities in the Third Millen-
nium B.C., in: Paleorient 9, 39-52.
Weise 1985 a id., Teil Leilan on the Habur Plains of Syria, in:
BiblArch. 48, 5-34.
Weiss 1985 b id., Teil Leilan and Shubat Enlil, in: MARI 4, 269-
292.
Weise 1986 id. (6d), The Origins of Cities in dry-farming Syria and
Mesopotamia in the third Millennium B.C.

19*
Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services
Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM
296 Marc Lebeau

ERZURUM

^xT
TEPECIKNOHSUNTEPE

Brought to you by | New York University Bobst Library Technical Services


Authenticated
Download Date | 5/29/15 3:28 PM

Vous aimerez peut-être aussi