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Nous n’avons jamais été autant confrontés à nos environnements domestiques, et de manière aussi
soudaine et inattendue. Il aura fallu une pandémie pour nous rendre compte de l’importance des
espaces de transition qui ouvrent nos intérieurs vers l’extérieur. Cette introspection subie fait appel à
un regard différent, une compréhension plus accrue des usages possibles au sein du logement et des
conditions de résilience à anticiper dès les phases de conception. Certes, mais par qui ?
Les architectes ont-ils un rôle important à jouer dans la conception de nos habitats et de nos dispositifs
domestiques ? Ou ce rôle revient-il plutôt aux promoteurs privés ? Ne serait-il pas le moment de
La vie en confinement a déclenché plus d’activité dans les copropriétés et l’émergence d’un
imaginaire de projets au sein de l’espace privé des immeubles : jardinage, compostage collectif, cour
d’école improvisée, ... Ceci met en évidence l’investissement des usagers dans la conception. Comme
une preuve directe et non négligeable, révélant un potentiel qu’il serait dommage de ne pas en porter
vers une réflexion plus globale sur la place de l’habitant dans le processus de conception. Quels
dispositifs pour impliquer les habitants durablement dans l’évolutivité de leurs espaces ?
Allons plus loin que ces espaces extérieurs privés. Visionnaire, Yona Friedman réfléchissait déjà, en
1976, au rôle des êtres humains dans la conception des villes : « le but est d’amener le lecteur à
contexte de pénurie ou de crise durable ou temporaire, à des solutions de survie de son espèce » [1].
l’habitant. La concertation publique a pris sa place dans la scène de l’aménagement urbain au début
des années 2000. Ainsi les habitants peuvent participer à la réflexion sur l’avenir de leur ville. Il a été
prouvé qu’une concertation bien menée peut se montrer très bénéfique pour un projet. Néanmoins, son
association à la prise de décision dans la conception de l’habitat privé en France est encore loin d’être
individuels et cette tendance se poursuit : en 2019, on comptait 19,8 millions de logements collectifs
contre 15,8 millions de maisons individuels [2]. L’habitat participatif, les coopératives ou les volumes
capables représentent un pourcentage faible dans ce décompte et ne sont toujours pas des opérations
faciles à mener [3]. Ce sont pourtant ces initiatives qui permettent d’intégrer l’habitant, même si la
plupart du temps, ces projets sont impulsés par les habitants eux-mêmes. Quels nouveaux produits
logements encourager ?
Alors si en France, la majorité des ménages habitent dans des bâtiments collectifs, ne serait-il légitime
de leur donner davantage la parole dans la conception de leurs espaces de vie ? Pourrait-on, par
exemple, consulter les habitants sur le nombre de mètres carrés d’espace collectif par habitant et sur
les usages potentiels de cet espace ? ou alors sur l’introduction de locaux à usage collectif ? Ne serait-
il pas venu le temps d’inclure les citoyens dans la conception et la distribution des espaces propres aux
logements ?
Aujourd’hui les PLU sont soumis à enquête publique, mais cela est une voie un peu détournée pour
accéder aux outils qui encadrent la conception. Quels peuvent être les outils réglementaires pour
inclure les habitants dans le processus ? De plus, certains types d’opérations d’aménagement, sont
exclus des règlements publics, nous sommes encore loin de donner accès aux citoyens à la réflexion de
l’habitat de demain.
Un nouveau positionnement politique s’impose. Une reprise du système à l’identique serait regrettable
après la démonstration de l’implication des habitants et les initiatives qui sont nées en temps de
pandémie.
[3] Nathalie Stey, Le monde, novembre 2019 : A Strasbourg, l’habitat participatif fait florès