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Théorie de l'acquisition du langage chez l’enfant - Chomsky, cristal, Aitchison &

Piaget

Noam Chomsky estime que les enfants naissent avec une capacité héritée d'apprendre
n'importe quelle langue humaine. Il affirme que certaines structures linguistiques qu’utilisent les
enfants avec autant de précision doivent être déjà imprimées sur l'esprit de l'enfant. Chomsky
estime que chaque enfant dispose d'un «dispositif acquisition d'une langue» ou LAD qui code les
grands principes d'une langue et ses structures grammaticales dans le cerveau de l'enfant. Les
enfants ont alors seulement d'apprendre un nouveau vocabulaire et d'appliquer les structures
syntaxiques de la LAD à des peines de forme. Chomsky souligne qu'un enfant ne pouvait pas
apprendre une langue à travers l'imitation seule, parce que la langue parlée autour d'eux est très
irrégulière - le discours des adultes est souvent brisé et même parfois agrammaticale. La théorie de
Chomsky s'applique à toutes les langues car elles contiennent toutes des noms, verbes, des
consonnes et des voyelles et les enfants semblent être «câblés» pour acquérir la grammaire. Chaque
langue est extrêmement complexe, souvent avec de subtiles distinctions qui même les locuteurs
natifs ne sont pas au courant. Cependant, tous les enfants, indépendamment de leur capacité
intellectuelle, sont à l'aise dans leur langue maternelle dans les cinq ou six ans.

Preuves à l'appui de la théorie Chomskyenne :

 Les enfants qui apprennent à parler commencent à le faire souvent avec des erreurs
grammaticales telles que mettre leurs sujets, verbes et objets, etc. dans le mauvais ordre.
 Si un adulte dit délibérément une phrase grammaticalement incorrecte, l'enfant ne le
remarquerait faute de méconnaissance de la norme grammaticale.
 Les enfants disent souvent des choses qui sont agrammaticales comme «mama balle», dont
ils ne peuvent pas avoir appris de manière passive.
 Les erreurs telles que «Je gigantesques dessins tracés» plutôt que «j'ai dessiné» montrent
qu'ils ne font pas de l'apprentissage par la seule imitation.
 Chomsky a utilisé la phrase «incolores idées vertes dorment furieusement», qui est
grammaticale mais qui n'a pas de sens, pour prouver sa théorie: il a dit qu'elle montre que les
peines peuvent être grammaticales sans avoir un sens, que nous pouvons faire la différence
entre une phrase grammaticale et une phrase agrammaticale sans jamais avoir entendu la
phrase avant, et que nous pouvons produire et comprendre des phrases toutes nouvelles que
personne n'a jamais dit avant.

David Cristal
Le professeur Cristal est surtout connu pour ses deux encyclopédies : L’Encyclopédie
Cambridge de la langue et l'Encyclopédie de Cambridge de la langue anglaise. Alors qu'est-ce que
cela a à voir avec l'acquisition du langage des enfants?
David Cristal a la théorie que les enfants apprennent la langue en cinq étapes, qui ne sont
pas clairement définies. Ces étapes sont les suivantes:
-Première étape:
C'est là que les enfants disent des choses pour trois raisons:

1. Pour obtenir quelque chose qu'ils veulent.


2. Pour attirer l'attention de quelqu'un.
3. Pour attirer l'attention sur quelque chose.

Puis ils commencent à faire des déclarations telles que «voiture papa».
Durant cette phase, les enfants commencent à nommer les choses par des mots simples et de passer
ensuite à des objets ayant trait à d'autres choses, des lieux et des personnes. Elles portent également
sur des objets liés à des événements, par exemple, «l'oiseau a disparu».
À ce stade précoce, ils n'ont pas le vocabulaire nécessaire si bien qu'ils utilisent l'intonation
de poser une question par exemple. Les enfants utilisent des mots comme: «là-bas, non, pasque,
etc.» pour exprimer une phrase complète. Cette étape est dite holophrastique.
-Deuxième étape:
C'est lorsque les enfants sont, en général, en mesure de poser des questions , ou lorsque ces
questions viennent en premier. Leurs questions commencent souvent avec les pronoms interrogatifs
(quoi, où, pourquoi…) suivi d'un nom ou un verbe comme «où aller ?"
Les enfants commencent à avoir le souci de nommer et classer les choses. Ils peuvent aussi
commencer à parler des caractéristiques des choses, par exemple "tel objet: Grand / petit / joli. Leur
entourage leur apprend de classer les choses en paires opposées de sorte : haut / bas, chaud / froid.
-Troisième étape:
A ce stade là, les enfants commencent à formuler des questions différentes, mais souvent
signalées par l'intonation seule, par exemple: "Sally jouer dans le jardin des voisins " Cette assertion
est transformée en une question par le simple changement du timbre ou la tonalité de la voix.
Et, progressivement, les enfants commenceront bientôt à exprimer d’une façon de plus en plus
complexe leur idées en utilisant un langage plus correct grammaticalement, par exemple: «Je veux
maman de prendre au marché aussi", signifiant "Je veux que maman m’emmène avec elle au
marché".
Des verbes tels que «écouter» et «savoir» sont également utilisés. Les enfants se réfèrent à
des événements dans le passé et moins souvent à l'avenir. Ils parlent généralement de poursuivre
une action: "elle est encore au lit» et poser des questions sur l'état des actions (si quelque chose est
fini ou non).
La structure de la phrase de base a s’amplifier, tels que: [objet] + [verbe] + [l'objet] +
[adverbe ou tout autre élément utilisé] des phrases comme: «Vous les mains sèches" et "Un homme
creuser là-bas" commencent à apparaître et auxiliaires verbes sont utilisés dans des phrases telles
que "je vais" et des phrases comme "sur la table» [préposition] + [article] + [nom].
-Quatrième étape:
C'est quand des enfants utilisent des structures de phrases de plus en plus complexes,
cohérentes et de commencer à:

 Expliquer les choses


 Demander des explications à l'aide du mot: "pourquoi?"
 Faire un large éventail de demandes: «vais-je le faire?"

Maintenant, ils sont capables d'utiliser des structures de phrases complexes, ils disposent
d'outils linguistiques flexibles pour exprimer un large éventail de significations. Probablement
l'évolution la plus remarquable est leur compréhension de la langue et l'utilisation de verbes
abstraits, par exemple «savoir» pour exprimer les opérations mentales. Ils commencent à
communiquer un sens indirectement par le remplacement des impératifs tels que «donne-moi" avec
des questions; «je peux avoir?", formules jugées plus courtoises.
Ainsi que dire ce qu'ils veulent dire. Ils ont désormais la compréhension pragmatique et
réfèrent leurs énoncés au contexte et à la situation. Mise en œuvre de la négation (négation /
contradiction), par exemple: "il n'en veut pas!" Ils ne reposent pas seulement sur l'intonation et les
signaux, ils enchaînent leurs idées et ils expliquent plus en détail.
Ils sont maintenant en mesure d'utiliser et de reproduire les verbes modaux (pouvoir,
devoir…) "s'il vous plaît, pourrais-je, permettez-moi", les verbes d’opinion (croire, pense,
estimer…) ‘ Cela pourrait être de montrer que «peut» est nécessaire pour toute courtoisie comme
pour indiquer être en mesure de faire quelque chose.
Et pour finir ...
-Cinquième étape: À ce stade, les enfants utilisent régulièrement la langue pour faire toutes les
choses qu'ils en ont besoin pour. Ils donnent des informations, poser et de répondre aux questions,
en demandant directement et indirectement, ce qui suggère, propose, en précisant et en exprimant.
Les enfants sont maintenant en mesure de parler de choses hypothétique et conditionnelle,
par exemple: «Si j'étais vous, je le ferais ..."
Ils sont maintenant en mesure d'expliquer les conditions requises pour que quelque chose
arrive: «Vous avez ouvert le robinet en premier lieu pour se laver les mains"
En plus de références générales au passé et au futur, les enfants maintenant parlent des
moments particuliers tels que: "après le thé" et "avant de se coucher"
À ce stade, les enfants sont très à l'aise avec toutes les questions qui commencent par des
mots comme: «Qu'est-ce que?" et "Quand est-ce que?", Où le sujet et le verbe sont inversés, comme
n’as-tu pas assez de bagage ?
Développement du savoir grammatical :
L'apprentissage de l’expression grammaticale est un processus invisible et il arrive très
rapidement. Les enfants mettent plus de trois ou quatre ans à maîtriser la grammaire de la langue.
Quand ils assistent à leur première école, ils donnent l'impression d'avoir assimilé au moins 3/4 de
la grammaire qu'il y a à apprendre.
Etapes de la croissance grammaticale:
· La première étape est à peine comme la grammaire du tout, car elle se compose d'énoncés
d'un seul mot, par exemple, «dada» ou «salut». Environ 60% de ces mots ont une fonction
dénominative et 20% pour exprimer l'action. La plupart des enfants d'environ 12-18 mois
passent par cette étape, connue par l'étape holophrastique où ils mettent l'équivalent d'une
phrase entière en un seul mot.
· Cette prochaine étape est plus avancée en matière de grammaire ; à partir de 18 mois à 2 ans.
A ce stade, les enfants mettent 2 mots ensemble pour faire une structure phrastique. Par
exemple, «chat saute » qui est sujet + verbe, ou « porte fermée », qui est nom + adj. À la
fin de cette étape on se retrouve avec l'impression que les enfants ont appris plusieurs leçons
de base sur l'ordre des mots.
· Cette prochaine étape consiste à remplir les modèles de phrases simples en ajoutant des
éléments supplémentaires de la structure la rendant plus complexe. 3 éléments par exemple:
«Papa en voiture » puis 4 éléments «Vous allez lire maintenant ", montrent ce progrès. Où
les enfants commencent à poser des questions comme «où papa remettre le véhicule?». Cela
prend une grande partie de la troisième année et est connu comme le stade télégraphique.
Des mots simples comme les déterminants par exemple l', sont laissés de côté ; la phrase est
portant comprise.
· A 3 ans, les soucis sont beaucoup plus que les clauses des enfants à être ensemble pour
exprimer une pensée plus complexe et à raconter des histoires simples. Les enfants, à ce
stade, utilisent couramment et/ou, d'autres mots de liaison tels que «parce que», des «si»,
des 'puis' etc.
· A 4 ans, les enfants font «tri» leur grammaire. Par exemple la plupart des enfants à l'âge de 3
½ ont tendance à dire «lui donner le fromage aux souris». Cependant, à 4 ans et demi, ils
diraient "il a donné le fromage aux souris». C'est ce qui explique ce qu'ils ont appris les
formes de : "souris" le substantif et le verbe irrégulier 'a', et le pronom «il».
· Après 4 ans et demi, il y a encore des caractéristiques de la grammaire à être utilisées telles
que les phrases de liaison. Ce processus se poursuivra jusqu'au début de l'adolescence
lorsque l'apprentissage de la grammaire devient plus indiscernable.
Actif Passif.
Cristal a effectué un test d'expérience pour vérifier si les enfants, à un certain âge utilisent
des phrases actives ou passives. Son étude a montré que, à environ 3 ans, aucun des enfants n’a
produit une phrase passive. Cependant, comme il a été testé, les enfants plus âgés ont commencé à
utiliser de plus en plus des phrases passives. A 7 ans, la possibilité d'utiliser le passif augmente de
façon spectaculaire.
Année de la Fondation
Cristal estime que l'acquisition du langage ne se résume pas seulement dans « produire des
sons », mais aussi d'être capable de percevoir des sons et de comprendre le sens des énoncés que les
gens produisent.
· Il dit que les bébés peuvent répondre à différents types de sons étant capable de distinguer
entre les différentes voix. Avant que les bébés ne soient âgés de 1 jour, ils peuvent
distinguer la voix de leur mère de la voix d'autrui. Ainsi que les contrastes dans l'intonation
et le rythme.
· Les bébés montrent aussi des signes de compréhension entre 2 et 4 mois. Ils font cela en
répondant à des tons différents de la voix des adultes tels que la voix de la colère ou de la
voix apaisante.
Entre 6 et 9 mois, l'enfant apprend à reconnaître les énoncés différents dans des situations
pour taper des mains par exemple ou dire un mot tel que « bye-bye ».
Vers la fin de la première année, les enfants montrent un signe de l'apprentissage verbal s’il
s'agit des noms de personnes ou d'objets. Par conséquent, ils peuvent reconnaître la
signification d'au moins 20 mots à la fin de la première année, avant même de prononcer
certains d’entre eux.
La théorie de Cristal était, en général, que les enfants apprennent par étapes amorphes, par
essais et erreurs pour réussir à apprendre la langue. Ils apprennent par étapes la grammaire, les
différents types de questions par exemple, l'intonation et la reconnaissance des rythmes de voix.

Jean Aitchison

Jean Aitchison est un professeur de Rupert Murdoch de la langue et de la Communication à la


Faculté de langue et littérature anglaise à l'Université d'Oxford.

Elle a développé l’idée que «la langue a un horaire biologiquement organisé".


Partout, les enfants suivent un schéma similaire. Dans leurs premières semaines, les bébés
pleurent surtout. Les bébés crient pour rappeler aux parents que leur progéniture existe mais ils
peuvent le faire pour d’autres raisons.

En 1987, elle a identifié trois étapes par lesquelles passe l’acquisition du vocabulaire chez
l’enfant : la construction d'étiquetage, d'emballage et du réseau.

1. Étiquetage - La première étape consiste à faire et le lien entre les sons des mots particuliers et les
objets auxquels ils se réfèrent par exemple la compréhension que «maman» se réfère à la mère de
l'enfant. En d'autres termes, d'associer un nom à quelque chose.

2 Emballage -. Cela implique la compréhension de gamme d'un mot de sens. C'est à ce moment
que l’extension peut devenir un obstacle dans le développement de la langue.

3. Network Building - Il s'agit de saisir les connexions entre les mots, de comprendre que certains
mots sont à l'opposé dans le sens. Aitchison a fait valoir qu'il n'y a pas de dates exactes où un enfant
atteint un certain stade de l'apprentissage des langues - certains enfants apprennent plus vite que
d'autres. Elle croyait que la vitesse d'apprentissage est dépend de deux choses : les capacités innées
et l'environnement. La langue est en partie apprise par imitation. Les parents, les frères et les sœurs
jouent un rôle dans l'accélération de l'apprentissage de la langue. Le bébé parle tout en apprenant à
parler. Un calendrier d’acquisition est créé à partir de la naissance jusqu’à dix ans.

Naturellement, le processus d'acquisition du langage chez les enfants peut varier


individuellement quand ils atteignent chaque étape, mais il y a peu de variation dans la phase de
l'apprentissage des langues. À la fin, la langue d'un enfant est en place et il a un lexique de base de
plusieurs milliers de mots. A partir de maintenant, ce qui est appris est retenu et de plus en plus
dépendant de l'expérience et de l'environnement - sur les possibilités d'utiliser le langage-, pour un
large éventail de buts et publics dans un large éventail de contextes.

Piaget, quant à lui, a distingué les grandes étapes suivantes :

1- étape Sensori-motrice (0 - 2 ans)


le bébé peut différencier soi-même des objets et localiser les objets, par exemple, par rapport à
l’endroit où il se trouve.

2- stade Pré-opérationnel (2 - 7 ans)


Peut classer des objets ayant une caractéristique unique et peut désormais donc procéder par
distinction de certains objets de ce qui les entoure.

Et...Pense encore égocentrique (qui tend à considérer sa personne comme le centre du monde).
C1: Dolly est triste
C2: Non! Dolly est heureuse!
C1: Non!
C2: Oui!
C1: Non!

3- stade opérationnel (7 - 11 ans)


Peut penser logiquement sur les objets et les événements et parvenir à la conservation du numéro.
C: Demain je commence le ballet, et puis je vais y aller chaque semaine.
Enseignant: Oh! C’est intéressant! Quel âge avez vous maintenant?
C: 7 ans!

4- stade opératoire Formel (11 ans +)


Devient concernés par l'hypothétique, l'avenir, et les problèmes idéologiques.
C: Quand je serai grand je veux être un médecin
P: Et comment allez-vous y parvenir?
C: Je vais travailler très très dur à l'école et puis obtenir beaucoup, beaucoup d'argent, puis se
marier, et avoir des enfants, et vivre heureux pour toujours!

Conclusion

Au cours du développement humain, le langage est précédé par des modes de


communication non-verbaux (jeux d'imitations réciproques entre la mère et le bébé par exemple).
En effet dès la naissance (c'est-à-dire à partir de quelques minutes après la naissance) le bébé
détecte si les personnes qui l'entourent sont en train d'interagir avec lui ou non. Si c'est le cas, le
bébé répond et est stimulé par cette interaction : il s'agit alors de communication préverbale. Par la
suite, cette communication non-verbale reste présente lors de la communication verbale : par
exemple on discute en se comprenant d'autant mieux qu'on se regarde l'un l'autre.

La possibilité de manipuler des signes linguistiques n'apparaît pas brusquement mais est
préparée par un travail qui commence très tôt. Ainsi, l'accent de la langue maternelle se fait
entendre dès les premiers babillages de l'enfant avant qu'il ne sache parler véritablement ni même
prononcer un son ayant une quelconque signification.

L'acquisition du langage se fait par le biais des cinq sens : ouïe, vue, toucher, odorat, et goût,
qui aident à la structuration du cerveau afin de reconnaître les stimuli extérieurs.
2. L'ACQUISITION DU LANGAGE: ETAPES ET THEORIES
Josie Bernicot
Université de Poitiers, Département de Psychologie
Laboratoire PsyDé, Université de Paris 5 – CNRS

Bernicot, J. (1998b). L’acquisition du langage : Etapes et théories. In R. Ghiglione & J.F. Richard
(Eds.), Développement et intégration des fonctions cognitives. Cours de Psychologie. Vol. 3 (pp.
420-439). Paris : Dunod. (2e édition, 1ere édition, 1994).

Il s'agit de présenter ici les étapes de l'acquisition du langage et les théories qui tentent
d'expliquer son évolution avec l'âge.

Il existe un nombre important de théories concernant l'acquisition du langage. Nous ne


pouvons ici en présenter qu'un nombre restreint que nous avons choisi parmi les plus importantes.
Leur présentation est centrée sur un aspect particulier: la place faite à la situation de
communication, par ces théories, lors de l'acquisition du langage par l'enfant.

Nous distinguons quatre grandes étapes: la période prélinguistique, celle des énoncés d'un
seul mot, celle des énoncés de deux mots, et enfin la période de la phrase avec son évolution longue
et complexe qui se poursuit jusqu'à l'âge adulte et parfois au-delà. Les âges indiqués pour chaque
étape correspondent bien sûr plus à des repères qu'à des normes absolues d'évolution.

2.1. La période prélinguistique (0-1 an)

Ces dernières années un nombre important de recherches se sont concentrées sur cette
période aussi bien dans le domaine de la production que dans celui de la réception. Ces recherches
ont changé l'image que l'on avait du bébé. Sur le plan de la production, les comportements
communicatifs, vocaux et gestuels, du jeune enfant par certains aspects obéissent aux mêmes règles
que ses comportements communicatifs linguistiques ultérieurs. Sur le plan de la réception des
productions linguistiques de son entourage, le bébé dès la naissance possède des mécanismes
perceptifs lui permettant de distinguer les sons de la parole. Il existe donc une spécialisation des
acquisitions, et certaines conduites apparaissent de façon beaucoup plus précoces qu'on ne le croyait
dans les années 1960 et 1970.

2.1.1. La production

L'activité vocale évolue considérablement au cours de la première année depuis les cris et les
pleurs du nouveau né jusqu'au début de contrôle articulatoire (5-6 mois) observable dans le
babillage de l'enfant qui s'apprête à prononcer ses premiers mots. En français cette activité vocale
est désignée par une terminologie variée: gazouillis, babil, vocalises ou lallations; dans les
recherches les plus récentes on utilise surtout les termes de babillage et de vocalisations.

Jusqu'à 6 mois l'enfant émet une gamme très étendue de phonèmes (unités de sons) qui
dépasse largement celle de sa langue maternelle. A partir de cet âge ses productions sonores
commencent à se rapprocher des phonèmes de sa langue maternelle (Boysson-Bardies, 1996).

Pendant cette période, l'enfant passe progressivement d'une forme globale de


communication mettant en jeu le corps tout entier à une forme plus différenciée qui fait appel à
l'activité vocale et à un début de compréhension verbale. Outre l'apprentissage de sons de sa langue
maternelle, un aspect important de cette phase, est l'entrée de l'enfant dans les mécanismes de base
de la communication (Bruner, 1983; 1991). Par exemple, certaines règles liées à la référence dans le
dialogue ou à l'action conjointe (coopération) sont acquises entre 9 et 18 mois. De plus, à la fin de
cette période prélinguistique, l'enfant adapte ses messages non verbaux à l'interlocuteur et à la
situation de communication selon des règles analogues à celles utilisées pendant la période
linguistique (Bernicot et Marcos, 1992). Deleau (1990) s'intéresse aussi au lien entre
communication prélinguistique et linguistique.

2.1.2. La réception

L'enfant nouveau-né n'est plus considéré comme un être totalement dépourvu de capacités
spécifiques d'adaptation, il semble posséder certaines dispositions lui permettant d'entreprendre très
précocement une relation active avec son environnement visuel ou sonore.

L'enfant montre une habileté surprenante sur le plan de la réception linguistique. Dès l'âge
de 1 mois, il se montre capable de distinguer la voix humaine des autres sons et avant d'atteindre
deux mois, il répond différemment selon qu'il s'agit de la voix de sa mère ou d'une étrangère
(Melher, 1978). Plus étonnant encore les bébés âgés de quelques jours peuvent être entraînés à
répondre de manière différente à la présentation de l'un des deux stimuli artificiels tels que "ba" et
"ga". Ces expériences utilisent la réponse dite de succion non nutritive. Le principe consiste à
habituer le bébé à une stimulation auditive répétitive (une même syllabe, par exemple "pa"). Le
bébé est installé avec une tétine relié à un dispositif électronique qui permet de compter le nombre
de succion grâce à la variation de la pression de l'air dans le tuyau. Le rythme de succion est un
indice de l'état général du bébé. Quand il est habitué à son environnement (c'est à dire au son "pa")
ce rythme se stabilise. On change alors brusquement le son en présentant "ga". On considère que si
l'enfant réagit au nouveau son en suçant plus énergiquement sa tétine cela signifie qu'il est capable
de le distinguer du précédent. D'un point de vue théorique, cela suppose qu'à l'état initial l'enfant ait
un système perceptif lui permettant de distinguer les sons de la parole sur la plupart des dimensions
phonétiques.

2.2. Les énoncés d'un seul mot (1 an)

A partir de l'âge de 1 an (entre 9 et 18 mois) l'enfant commence à produire ses premiers


mots. La caractéristique de cette phase est la production de mots isolés, c'est-à-dire d'énoncés ne
comportant qu'un seul mot: par exemple "papa", "mama", "a'voir" (pour au revoir), "pati" (pour
parti).

Depuis le début du siècle de nombreux auteurs se sont penchés sur les énoncés à un seul mot
des très jeunes enfants. Pour certains, l'enfant commence par nommer des objet concrets animés ou
inanimés. Cependant, d'après les observations de Bloom (1973), les noms concrets joueraient un
rôle relativement mineur dans une première phase. A 16 mois ce sont plutôt des prépositions,
négations, adverbes et verbes qui sont employés. Si l'on en croit Nelson (1973), les enfants ne
parleraient pas tous pour dire la même chose. Chez certains enfants, les énoncés sont plutôt
référentiels c'est-à-dire orientés vers les objets. Chez d'autres, au contraire ces premiers énoncés
sont plutôt expressifs c'est-à-dire orientés vers la communication: demande, refus, appel, etc.
Bloom (1973) a aussi étudié l'usage des noms de personne. Dans un premier temps, les
enfants les utilisent pour nommer quelqu'un qui entre en scène, pour saluer quelqu'un, et pour
l'appeler. Puis il les utilise pour désigner des objets appartenant à la personne nommée. Enfin, on
note l'utilisation des noms de personne pour nommer l'agent d'une action prévue et imminente.

D'une façon générale, ces mots isolés produits sont interprétés par son entourage familial
comme ayant des significations relativement complexes comparables à celles d'une phrase.
Théoriquement les mots produits par les enfants ont une signification indéterminée ou ambiguë: en
effet, en produisant "papa" l'enfant peut vouloir dire: "voilà papa", "papa, viens m'aider", papa a un
nouveau pull", etc... Dans la pratique, ces énoncés sont interprétés sans problème à partir de la
situation de communication et permettent des interactions satisfaisantes entre l'enfant et son
entourage. Les mots de l'enfant ne prennent donc une signification et parfois une signification
complexe que par l'interprétation qu'en font les adultes. L'existence même de ces mots ayant valeur
de phrases est le témoin de l'importance de l'interprétation par l'adulte du langage de l'enfant dans le
processus du fonctionnement du langage mais aussi certainement dans son processus d'acquisition.

2.3. Les énoncés de deux mots (2 ans)

Dès que plusieurs mots peuvent être combinés au sein d'un même énoncé se pose le problème
de leur organisation selon la fonction c'est-à-dire le problème de la syntaxe. En français, en anglais,
mais aussi dans de nombreuses autres langues il est important d'ordonner correctement les énoncés
de façon à assurer le succès de la communication.

A partir de l'âge de deux ans, l'enfant produit des énoncés de deux mots qui son organisés
selon une grammaire, que l'on appelle grammaire-pivot, mise en évidence par Braine (1963) à partir
de corpus d'enfants anglophones. On distingue selon cette grammaire deux classes de mots: la
classe pivot (P) et la classe ouverte(O). Les énoncés possibles de deux mots sont de la forme: O + P
ou P + O. Les mots-pivots sont peu nombreux. Pour un enfant donné, chacun à une place fixée dans
l'énoncé qui peut être soit la première, soit la seconde. Les mots ouverts sont plus nombreux. Pour
un enfant donné, ils n'ont pas de place fixe dans l'énoncé. La grammaire-pivot est une réponse
originale au problème de l'ordre des mots dans la mesure où elle est fondée sur des règles n'existant
pas dans la grammaire adulte.

Pour cette raison cette grammaire, bien que fonctionnelle jusqu'à l'âge de deux ans, est une
sorte d'impasse linguistique rapidement abandonné par l'enfant. Les modalités de passage des
énoncés de deux mots à la phrase n'ont jamais été totalement éclaircies et les hypothèses émises
n'ont jamais fait l'objet de vérification systématique: il semblerait qu'une grammaire plus complexe
puisse s'élaborer à partir d'une différenciation des classes P et O en sous-classes.

Dans les énoncés de deux mots produits par les enfants le mot-pivot et le mot-ouvert
entretiennent différentes catégories de relations sémantiques: l'existence, la disparition, la
récurrence, l'attribution, la localisation, la possession, le bénéfice, l'instrumentation, la relation
agent-action, et la relation action-patient. Ceci montre une certaine spécialisation et aussi une
complexité de l'utilisation du langage chez l'enfant dès l'âge de deux ans.

2.4. La phrase (3 ans)

La phrase est définie comme un énoncé de plus de deux mots contenant un syntagme
nominal(SN) correspondant au groupe du nom, et un syntagme verbal (SV) correspondant au
groupe du verbe. Par exemple: le terrible dinosaure(SN) court à folle allure dans la forêt(SV).
2.4.1. Le syntagme nominal et le syntagme verbal

L'évolution du syntagme nominal est marquée par l'évolution de ces différents éléments:
nom, pronom, article adjectif préposition et adverbe. L’acquisition des principaux éléments du
syntagme nominal est réalisée entre deux et six ans.

L'évolution du syntagme verbal est essentiellement marquée par l'utilisation des différents
temps et mode du verbe (passé, présent, futur). L'ensemble des formes est produits entre quatre et
six ans. En sachant qu'il existe des différences interindividuelles fortes on peut cependant donner
les tendances d'un ordre général d'acquisition.

La forme la plus précocement utilisée est la copule "est" (le gâteau est bon) souvent avant
deux ans et demi. Ensuite les auxiliaires être et avoir, Les formes de l'infinitif, de l'indicatif présent
et du passé indéfini sont acquises entre deux ans et demi et quatre ans.

Les premières formes du futur apparaissent vers 4 ans: il s'agit du futur périphrastique (ex: il
va venir, ça va être mon anniversaire). Le futur simple apparaît plus tard.

Les formes de l'imparfait et du conditionnel sont les plus tardives et n'apparaissent qu'entre
cinq et six ans.

A cinq ans l'enfant utilise la plupart des formes du verbe. Il est cependant important de noter
qu'il ne les utilise pas essentiellement pour marquer la place de l'action dans le temps (passé-
présent-futur). En cela, le comportement de l'enfant diffère clairement de celui de l'adulte. En effet,
dans les productions de l'enfant jusqu'à l'âge de six ans, les différentes formes du verbe désignent
surtout l'aspect de l'action, c'est à dire des caractéristiques indépendantes de sa chronologie
(Bronckart, 1976). Quelques exemples de caractéristiques aspectuelles de l'action sont indiqués ci-
dessous.

- La distinction action en cours/action intemporelle: "elle est en train de prendre sa leçon de


piano"/"elle prend des leçons de piano".

- La distinction déroulement de l'action/résultat de l'action: "il mangeait du caviar"/"il a


mangé du caviar".

- La convention dans l'imaginaire: "j'étais le gendarme et toi le voleur".

- L'expression du souhait: "ça va être mon anniversaire bientôt".

2.4.2. Les stratégies

L'enfant qui apprend sa langue adopte une attitude face aux messages verbaux de son
entourage différente de celle qu'aurait un adulte maîtrisant parfaitement sa langue. Ces attitudes de
l'enfant reposent sur certaines régularités que l'on appelle stratégies. Les stratégies sont définies par
Oléron (1979) comme des procédés employés par les enfants pour interpréter des énoncés, souvent
complexes, en utilisant certains indices syntaxiques. Il est important de souligner qu'il ne s'agit pas
de procédés mis en œuvre délibérément, consciemment par les enfants mais de régularités dans la
manière d'aborder les énoncés.

Dans cette perspective la compréhension des phrases passives, des pronoms et des relatives en
"que" et en "qui" a été étudiée (cf par exemple Ségui et Léveillé, 1977). C'est ce dernier exemple
que nous allons développer ici.
Exemple de relative en "qui"
Le président qui salue la foule (renversable)
La foule qui salue le président (renversable)
Le chat qui mange la souris (non renversable)

Exemple de relative en "que"


Le président que salue la foule (renversable)
La foule que salue le président (renversable)
La souris que mange le chat (non renversable)

Les relatives en "qui" n'altèrent pas l'ordre canonique agent-action-patient: celui qui fait
l'action apparaît en premier, puis vient l'action réalisée, et enfin celui sur lequel porte l'action. Les
relatives en "que" modifient cet ordre canonique: celui sur lequel porte l'action apparaît en premier,
puis vient l'action, et enfin celui qui la réalise. Les relatives peuvent être renversables lorsque
l'inversion de l'agent et du patient correspond à une phrase sémantiquement acceptable. Elles sont
dites non renversables lorsque cette inversion est impossible sur le plan sémantique.
La compréhension des relatives en "qui" (qu'elles soient renversables ou non) ne pose pas plus
de problème que celle des phrases actives: on obtient entre 3 ans 7 mois et 4 ans 8 mois 100% de
bonnes réponses.

La compréhension des relatives en "que" n'apparaît pas au même âge pour les phrases non
renversables (3 ans 7 mois) et renversables (10 ans 6 mois). Il apparaît donc que pour les relatives
en "que" non renversables les enfants utilisent une stratégie basée sur les informations sémantiques.
Pour les relatives en "que" renversables n'amène pas à une interprétation unique, les enfants
utilisent une stratégie basée sur l'ordre canonique qui les conduit à une interprétation erronée jusqu'à
un âge (10-11 ans) relativement tardif.
Après avoir fait une présentation des étapes de l'acquisition du langage, il maintenant
nécessaire de faire appel aux théories qui tentent d'expliquer cette évolution.

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