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Université Paris 13 – Villetaneuse


 
U.F.R de Sciences Economiques
 

 
N° attribué par la bibliothèque
 

  REGIMES DE CHANGE, TAUX DE CHANGE D’ÉQUILIBRE


  ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE
 

  THESE POUR LE DOCTORAT DE SCIENCES ECONOMIQUES


  Présentée et soutenue publiquement le 09 Novembre 2012

  Par

 
Aflouk Nabil
 

 
  Sous la direction de
Jacques Mazier, professeur, Université Paris 13

Membres du jury

Virginie Coudert, Conseillère scientifique à la Banque de France,


Professeur associée, Université Paris 10 (rapporteur)
Alain Sand-Zantman, professeur, Université Lyon 2 (rapporteur)
Dominique Plihon, professeur, Université Paris 13
Jean-Pierre Cling, professeur, Université Paris 13
Jacques Mazier, professeur, Université Paris 13

 
1
 
 
 

L’université Paris 13 n’entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions


émises dans cette thèse : ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur.

2
 
 
 

REMERCIEMENTS

La réalisation de cette thèse est redevable du soutien et de l’amitié témoignés par


plusieurs personnes et sans lesquelles ce travail n’aurait pu se réaliser. J’ai éprouvé du plaisir
à réaliser ce travail doctoral avec ces personnes, qui par leur générosité, leur disponibilité,
leurs précieux conseils et l’intérêt manifesté par rapport à ma recherche ont significativement
contribué à l’amélioration et la réalisation de ce travail.

Je remercie mon directeur de thèse, le professeur Jacques Mazier qui m’a accordé sa
confiance en acceptant d’encadrer ce travail. Durant ces années, j’ai particulièrement apprécié
ses qualités humaines et son encadrement. Ses compétences et sa générosité m’ont beaucoup
aidé dans l’élaboration de ce travail. Je le remercie d’avoir répondu à mes innombrables mails
et pris la peine de relire et corriger tous les chapitres que je lui ai adressés, ceci en dépit de ses
multiples occupations. J’ai perçu sa grande disponibilité et son soutien à toutes les étapes de
cette thèse comme une grande marque de confiance et je tiens à lui exprimer mes
remerciements les plus sincères.

J’aimerais également remercier Virginie Coudert, Alain Sand-Zantman,  Jean-Pierre


Cling et Dominique Plihon qui ont accepté d’être membres de mon jury.

Je remercie Fransisco Serranito, Mickael Clévenot et Christopher Lantenois, Antonia


Lopez, dont les aides et les conseils ont été des plus précieux.

Mes remerciements vont également à mes collègues et amis pour leur soutien. Merci à
Vincent Duwicquet, Khalil Nattahi, Ahmed Hammadache, Alimi Nabil, Karima Soussou,
Jeong Se-Eun, Hafrad Idir, Hamdi Badreddine, Medfai Iteb, Karama Tlil, Meryem
Bouchoucha, Yousra Zarka, Amina Ben Yahia, Bouallague Atef, Bouallague Sonia, Ramzi
Hadji, Myoung-keun On, Ibrahim Meryem, Bakary Djezahou, Omar Ould-Slimane.

Enfin, je tiens à exprimer toute ma gratitude à ma famille, en particulier mes parents


qui ont toujours été présents pour moi. Je pense également à mes belles sœurs, mes sœurs,
mes frères, mes cousins et cousines, oncles et tantes …

Qu’ils soient tous assurés de ma reconnaissance.

3
 
 
 

Sommaire

INTRODUCTION GENERALE................................................................................................ 5

PARTIE I REGIMES DE CHANGE ET CROISSANCE ECONOMIQUE ................... 18

Chapitre 1 Régimes de change: typologie, classifications et évolution ................................... 19

Chapitre2 Etude théorique et empirique du lien entre régime de change et croissance


économique .............................................................................................................................. 42

PARTIE II DÉTERMINATION DU TAUX DE CHANGE REEL D’ÉQUILIBRE.... 113

Chapitre 3 Les méthodologies des taux de change réels d'équilibre ...................................... 114

Chapitre 4 Estimations des taux de change réel d'équilibre ................................................... 143

Chapitre 5 Tests de sensibilités et comparaison avec d’autres estimations de taux de changes


d’équilibre .............................................................................................................................. 224

PARTIE III DÉSAJUSTEMENT DE CHANGE ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE


................................................................................................................................................ 239

Chapitre 6 Désajustement et Croissance Économique : Revue de la Littérature ................... 240

Chapitre 7 Désajustements et croissance économique : étude empirique ............................. 270

CONCLUSION GENERALE ................................................................................................ 306

ANNEXES ............................................................................................................................. 330

4
 
 
 

INTRODUCTION GENERALE 
 

En 1971, le système de Bretton Woods fut abandonné par les Etats-Unis. L’une des
principales explications de l'abandon du système de changes fixes réside dans l'opposition
entre l'objectif interne et externe, c'est à dire le plein-emploi des facteurs de production et
l'équilibre de la balance des paiements. Les opinions dans les pays industrialisés étaient de
plus en plus hostiles au sacrifice de l'équilibre interne au profit de celui de la balance des
paiements. Le plein-emploi, objectif principal des politiques économiques domestiques
nécessite de pouvoir recourir à la politique de change comme instrument d'ajustement et donc
d'abandonner le régime de change fixe. L'adoption d'un taux de change flexible doit permettre
de faire face à des perturbations de l'économie sans nuire à l'objectif de plein emploi des
facteurs de production (thèse de Friedman sur l'équilibre automatique des balances des
paiements en change flottant). Plus généralement, le paradoxe de Triffin posait un problème
au développement du commerce mondial et à la stabilité de l'économie américaine. Le dollar,
monnaie de référence est émis suffisamment par les Etats-Unis pour permettre
l'accompagnement de l'essor du commerce international. Mais trop de dollars sont en
circulation pour permettre aux Etats-Unis de contrôler leur équilibre extérieur qui est
lourdement impacté par la guerre du Viet-Nam et la montée de la concurrence de l'Allemagne
et du Japon.

Friedman (1953) et Johnson (1969) font partie des principaux défenseurs des
systèmes de change flexibles. Leurs travaux et ceux d'autres auteurs tels que Mundell (1963)
ont montré qu'avec une mobilité de plus en plus forte des capitaux financiers, la fixité du taux
de change contraignait fortement l'autonomie des politiques économiques et la capacité
d'ajustement de l'économie aux perturbations survenant sur les marchés des biens et services.
C’est dans ce contexte qu’à partir de 1973, les grands pays industrialisés (États-Unis, Japon et
Royaume-Unis) ont adopté des régimes de change flottants. En Europe, il y a eu par la suite
l’établissement d’une coopération monétaire et de change qui a conduit finalement à
l’adoption de l’euro. La réduction des coûts de transaction liée à la stabilité des taux de
change permet de favoriser les échanges intra-européens.

5
 
 

Dans les pays en développement, l'évolution de la politique de change a été beaucoup


plus hétérogène. Depuis le milieu des années 1980, souvent sous la pression du FMI, de
nombreux pays en développement se sont ralliés à l’idée de l’ouverture de leurs économies,
afin d’augmenter et de diversifier leurs exportations, en biens manufacturées en particulier.
Au début des années 1990, l’expérience du développement des pays d’Asie du Sud-Est était
érigée en exemple à suivre par la Banque Mondiale et le FMI. C’est avec l’adoption des
stratégies économiques axées sur une plus grande ouverture aux flux commerciaux et
financiers et avec l’importance croissante du rôle du marché dans la détermination des taux de
change et des taux d’intérêt, que les pays en développement ont donc accru leur adhésion à
des régimes plus flexibles. La transition des régimes de change était censée répondre à
certaines attentes au niveau des performances économiques. Tous les pays ayant adopté des
taux flottants dans les années 1980 l’ont fait dans le cadre des programmes des réformes
d’ajustement macroéconomique soutenus par le FMI et partant d’une position d’extrême
faiblesse (Polak 1988), comme des sévères difficultés de paiement. Dans ces circonstances,
l’adoption d’un flottement libre a donné aux autorités une opportunité de libéraliser le
système restrictif et d’abandonner en même temps la responsabilité politique dans
l’ajustement du taux de change (Quirk et al. 1987). Le FMI (1997) a conclu que le change
flottant est une option viable pour tout pays en développement. Certains pays ont adopté des
régimes de change flexibles et d’autres ont choisi de fixer le taux de change de leur monnaie
par rapport à une ou plusieurs devises étrangères. Entre les deux extrêmes, une large variété
de régimes intermédiaires est apparue et de nombreux pays ont changé à plusieurs reprises de
régimes de change en Amérique Latine, en Afrique ou en Asie.

La diversité des régimes de change de l'après Bretton Woods a relancé le débat sur
l'optimalité du régime de change. Dans ce contexte, il est pertinent de s’interroger sur le choix
qui est fait en matière de régime de change par les pays étudiés. Des caractéristiques
nationales spécifiques introduisent des dimensions supplémentaires dans ce choix
stratégique : vulnérabilité aux chocs externes, concentration géographique des échanges,
engagements libellés en devises étrangères, taux d’inflation parfois élevé ou faible crédibilité
monétaire doivent être prise en compte dans la définition d'un régime de change afin
d'améliorer les conditions d'insertion internationale des économies nationales.

La diversité des situations structurelles, macroéconomiques suggère l’absence de


régime de change optimal pour l’ensemble des pays. Au contraire, la politique de change doit
s’inscrire dans un cadre de politique globale adaptée aux réalités économiques nationales

6
 
 

(Blinder, 1999): ainsi un processus de développement économique nécessite une adaptation


régulière du régime de change en fonction de l’étape de développement atteinte par chaque
économie1.

L’évidence empirique montre cependant qu’il devient de plus en plus difficile de


maintenir un régime de change fixe à long terme dans un pays qui s’intègre dans les systèmes
de commerce et de finance internationaux. Ainsi, selon le FMI (2003), il serait judicieux de
passer à un système de change flexible, l’autre extrémité du spectre des politiques de change.
Le débat entre parités fixes et flottantes a donné naissance à une abondante littérature. Il
semble que les régimes flottants offrent une meilleure protection en cas de chocs réels sur
l’économie. La flexibilité est également censée autoriser une politique monétaire plus
autonome, afin de gérer au mieux l’évolution de la conjoncture propre à chaque pays. Les
parités fixes sont censées faciliter le commerce extérieur en réduisant les coûts de transaction
et en limitant l’incertitude de change. Plus encore, elles procurent un ancrage nominal bien
défini, qui atténue les anticipations inflationnistes, et donc les taux d’intérêt. Tels sont les
arguments traditionnels utilisés pour défendre les taux de change fixes (voir Garber et
Svensson (1995)).

Le flottement libre rendrait les économies sujettes à d’importantes fluctuations.


D’ailleurs Calvo et Reinhart, (2002) montrent que la plupart des pays émergents, dont les
régimes de change sont décrits comme flottants, sont soumis à plus de volatilité que les
régimes fixes. Ils révèlent également que peu, parmi les économies émergentes qui définissent
leur régime de change comme flottant, se contentent de laisser leurs taux flotter aussi
librement que les États-Unis ou le Japon. Au contraire, ils utilisent souvent des interventions
directes ou indirectes de leurs banques centrales pour limiter les fluctuations des taux de
change (Velasco, 2000).

Les experts du FMI recommandent le choix des politiques de change extrémistes, dites
«en coin», soit fixes (rigides) soit flexibles, et établissent que le nombre de pays qui
s’orientent vers des politiques de change davantage flexibles est en constante augmentation
(Bubula et Otker-Robe, 2004; Fisher, 2001). McCallum, (1989) souligne qu’il est difficile de
présenter un argument concernant le choix entre un change fixe ou flexible. Toutefois,
d’autres économistes, comme Williamson, (2000) pensent que les politiques intermédiaires
sont viables et plus efficaces que les solutions en coin défendues par le FMI.
                                                            
1
 Pour un exposé détaillé des théories de choix du régime de change, voir Frankel (2003).

7
 
 

Ces différentes théories proposent des critères de choix du régime de change qui
peuvent souvent entrer en contradiction les uns avec les autres. Par exemple, un système de
change flexible paraît plus adapté à un pays qui subit des chocs réels fréquents. Mais, si ce
pays rencontre également des problèmes de crédibilité dans la conduite de ses politiques
monétaire et budgétaire, alors un régime fixe lui conviendrait mieux. De façon générale, les
opinions varient beaucoup sur le régime de change optimal. Dans l’immédiat après Bretton
Woods, la faveur est allée aux régimes de change flottants, puis aux régimes intermédiaires ou
fixes conventionnels. Par la suite, les régimes extrêmes de flexibilité ou de fixité ont été
perçus comme les plus viables dans un monde marqué par une forte mobilité des capitaux
(voir Fischer, 2001 et, Obstfeld et Rogoff 1995). En 2001, en Argentine après l’abandon de la
caisse d'émission, un consensus semble émerger sur le fait qu'aucun régime de change ne
puisse être recommandé à tous les pays, ni tout le temps pour un même pays (voir Levy
Yeyati, Sturzenegger et Regio, 2002).

L’intérêt de la littérature économique pour le régime de change reflète son importance


dans les économies ouvertes. En effet, le système de change d'un pays définit le cadre dans
lequel s'effectuent les échanges commerciaux, financiers et économiques avec le reste du
monde. Le taux de change entre dans les arbitrages qui guident les décisions des agents
économiques dans leurs transactions sur les biens et services ou le placement de leur épargne.
Le système de change influence à la fois les performances extérieures et domestiques des
pays. Les effets du système de change sur l'inflation, le commerce, l'investissement, la
croissance, la politique budgétaire et monétaire, etc. ont été analysés par une vaste littérature
théorique et empirique. Très souvent, les conclusions sont contradictoires. Mais quelques
points de consensus semblent néanmoins émerger. Il en va ainsi de l'impact favorable des
systèmes de change fixes sur l'inflation moyenne, notamment dans les pays en
développement. Mais l'évolution économique récente montre que l'inflation a
significativement baissé dans toutes les régions du monde, indépendamment du système de
change (Chang et Velasco, 2000).

Un consensus apparaît sur l'absence d'un régime universellement optimal pour tous les
pays et tout le temps. Par contre, la question du choix du régime de change optimal, des
critères de choix du régime de change restent ouverte si bien qu'il s'avère toujours nécessaire
d'approfondir les études sur les régimes de change. Cette analyse doit permettre de former des
recommandations visant à accroître les bénéfices des régimes de change et de réduire les
coûts qu'ils imposent à l'économie lorsqu’ils sont inadéquats. Toutefois, notre thèse ne va pas

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chercher dire quel est le meilleur régime de change pour un pays mais plus simplement tenter
d'évaluer les effets économiques des régimes de change tels qu'ils sont choisis par les pays.

L’apport de ce travail réside dans l'étude d'un large panel de pays émergents. Des
avancées vont être conduites sur trois régions du monde: les pays asiatiques, les pays
d’Amérique latine et quelques pays méditerranéens. En outre, nous introduisons à titre
comparatif un échantillon des pays de l’OCDE. Le choix de ces trois régions est motivé par
plusieurs facteurs.

1. Le principal est que ces pays ont été parmi les premiers à entreprendre d'importantes
réformes 2 , dans lesquels le choix du régime de change et l’ajustement du taux de
change étaient parmi les instruments de la libéralisation économique. Le recul
historique offert par ces pays peut permettre de tirer des leçons intéressantes sur
l’efficience des politiques cambiaires et l’évaluation des régimes de change.

2. En outre, l’intégration régionale et mondiale de ces pays au système commercial et


financier international s’est traduite par des nombreux accords bilatéraux de libre-
échange (avec l’Union Européenne et les États-Unis) et des accords multilatéraux
négociés au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Cette intégration
a nécessité un assouplissement de leurs régimes de change afin de répondre aux
exigences des marchés internationaux, et surtout pour faire face aux chocs extérieurs.
Ces transformations des modalités d'insertion internationale sont d'autant plus
intéressantes à étudier.

3. Enfin, ces pays sont intéressants à étudier car ils permettent de prendre en compte à la
fois les disparités de performances économiques entre les régions, des phénomènes
endémiques, tel que l’hyperinflation et les questions d’ancrage des monnaies.

Dans notre travail nous essaierons de comprendre comment le régime de change


affecte la croissance. En outre, nous chercherons à savoir si l'impact du régime de change sur
la croissance peut dépendre des caractéristiques des pays telles que le niveau de
développement financier (Rogoff et al., 2004) et le degré d’ouverture commercial. Pour tester

                                                            
2
Dans le cadre des Programmes d’Ajustements Structurels (PAS) ou le Washington Consensus (WC)
recommandés par le FMI aux pays en développement à partir des années 1980.

9
 
 

cette hypothèse, nous chercherons à savoir si le l’ouverture commerciale et le développement


du système financier domestique modifient l'impact du régime de change sur la croissance.

Un autre apport de notre étude consistera à utiliser des régimes de change de jure
classés par le FMI et les régimes de change de facto proposés par Reinhart et Rogoff (2003).
Cette démarche nous permettra de vérifier la robustesse de nos résultats à la classification des
régimes de change utilisée. Les approches de facto ont été développées pour corriger les
limites de la classification officielle des régimes de change proposée par le FMI. Elles
décrivent les pratiques de change des pays et permettent de mettre en évidence les écarts entre
les déclarations des pays et leurs pratiques. Néanmoins, les classifications de facto présentent
aussi des limites. Par exemple, elles ne permettent pas de distinguer si un régime de change
fixe observé dans les faits résulte d'une décision politique du pays ou tout simplement de
l'absence de chocs. Le développement de ces nouvelles classifications a conduit au réexamen
des relations entre la politique de change et les performances des économies.

Toutefois, le débat ne semble pas aussi tranché qu’il le paraît. Rien n’indique qu’un
pays connaîtrait une croissance plus rapide en passant à un régime flexible, s’interroge Collins
(1996) qui s’appuie sur l’expérience des pays de l’Amérique Latine de 1987 à 1992. La
stabilité du taux de change réel serait associée à une croissance économique plus rapide, et le
passage à la flexibilité serait associé à une plus grande volatilité des taux de change. La
question du désajustement3 et du niveau approprié du taux de change est ainsi posée. Il s’agira
de montrer les limites des relations entre les régimes de changes les performances
économiques et de dépasser cette approche en élargissant le débat à ce qui nous paraît
nécessaire à la réalisation de meilleures performances, à savoir un niveau de change approprié
pour un pays émergent. En effet, étant donné le rôle que joue un ”bon” taux de change dans
l’orientation de la politique macroéconomique et la croissance à long terme, les interventions
des autorités monétaires, au niveau national ou régional, s’organisent autour de l’affirmation
implicite ou explicite qu’il existe un taux de change d’équilibre.

Cependant, le foisonnement de travaux dans ce domaine est tel qu’il est devenu
fastidieux de distinguer les divers apports et d’en déterminer une grille de lecture claire et
intelligible. C’est d’autant plus difficile que tout modèle a tendance à se présenter comme une
                                                            
3
Expression due à Couharde et Mazier (2000b) et Davanne et Jacquet (2000) désignant l’écart par rapport aux
bons niveaux de taux de change. Il s’agit en fait du phénomène communément connu sous le terme anglo-saxon
de «Misalignment » qui, n’ayant pas d’équivalent en Français, est souvent repris sous le terme «Mésalignement»
comme chez Sekkat et Varoudakis (1998). D’autres termes sont aussi utilisés, «Désalignement» (Devarajan
1996) et mésajustement (Égert et Lahrèche-Révil 2003).

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approche à part entière. La parité des pouvoirs d’achat (PPA) demeure la théorie de référence
en matière de détermination du taux de change d’équilibre. Toutefois, plusieurs approches4
alternatives ont été développées ces dernières années, en particulier, l’approche dite du taux
de change d’équilibre fondamental, FEER (Fundamental Equilibrium Exchange Rate), qui se
focalise sur la réalisation simultanée de l’équilibre interne et externe. Cette approche a été
popularisée par les travaux de Williamson (1985 et 1994). D’autres travaux calculent le taux
de change d’équilibre par des équations réduites. Elles s’appuient sur les relations de long
terme qui existent entre le taux de change réel et des variables économiques fondamentales
agissant sur les équilibres internes et externes. On peut citer les travaux de Stein et Allen
(1997) qui ont développé une théorie du Taux de Change Réel Naturel (le NATREX: Natural
Real Exchange Rate), Clark et MacDonald (1999) qui ont proposé un modèle composite
nommé BEER (Behavioral Equilibrium Exchange Rate) et le modèle d’Edwards (1988). Dans
notre étude, nous allons nous appuyer sur l’approche FEER, qui est considérée comme
l’approche le plus appropriée pour le moyen terme. Cette approche part du principe qu’il
existe un taux de change d’équilibre qui reflète, d’une part, une balance courante en équilibre
(l’équilibre externe) et, d’autre part, un équilibre interne, atteint lorsque l’output gap (mesuré
par la différence entre le PIB réel et le PIB potentiel) est nul. Si ces deux conditions ne sont
pas satisfaites, une correction cambiaire se prépare: une appréciation si un excédent courant
est continuellement enregistré et si la croissance augmente plus rapidement que la croissance
potentielle sous-jacente, et une dépréciation dans le cas inverse.

Les désajustements sont utilisés comme un outil pour prédire les futurs changements
du taux de change flottant ou d'évaluer la nécessité d'ajuster le taux de change entre les pays
ayant des régimes moins flexibles. Dans ce cadre, le maintien d'un taux de change réel
surévalué peut constituer un indicateur d'alerte précoce des effondrements de devises
(Krugman, 1979; Frankel et Rose, 1996). Il peut aussi conduire à un ajustement drastique des
prix relatifs et à une baisse du taux de croissance global de l'économie. D'autre part, et étant
donné que les mouvements du taux de change déterminent les choix de production et de
consommation entre les biens nationaux et internationaux, certains pays essayent de maintenir
leurs monnaies sous-évaluées en vue de stimuler la performance du secteur des exportations
et, par conséquent, l'activité économique globale.

                                                            
4
Pour une étude approfondie, voir Driver et Westaway (2004).

11
 
 

Plusieurs travaux ont suggéré que les contrôles de capitaux et les taux de change sous-
évalués ont été des éléments clés d'une stratégie de développement orientée vers l'exportation
pour le Japon et l'Allemagne après la Seconde Guerre mondiale et, plus récemment, la Chine
et d'autres économies d'Asie (Dooley et al. 2005). La littérature fait valoir que les
désajustements importants du taux de change peuvent affecter la croissance et le bien-être
(Edwards, 1989). Maintenir les taux de change à des niveaux éloignés des taux d'équilibre
peut créer des distorsions entre les prix relatifs des biens échangeables par rapport aux biens
non-échangeables, générer des signaux incorrects aux agents économiques et, donc, conduire
à une allocation sous-optimale des ressources entre les secteurs), et donc à une plus grande
instabilité économique. D'autres auteurs ont soutenu que les effets des désajustements sur la
croissance pourraient différer si le taux de change est surévalué ou s’il est sous-évalué. On
s'attend à ce que la sous-évaluation soit attribuée à des dévaluations compétitives, ce qui peut
conduire le taux de change à un niveau qui encourage les exportations et favorise la
croissance. D'autre part, les surévaluations peuvent refléter des politiques macroéconomiques
incohérentes, qui sont susceptibles de décourager la croissance (Razin et Collins, 1997). Sachs
(1985) affirme que les différentes expériences de développement en Asie, en Amérique latine
et en Afrique peuvent être attribuées à leurs régimes commerciaux et à des pratiques
différentes de gestion du taux de change. D'une part, un taux de change instable et surévalué
fournit de faibles incitations pour les exportations, tandis que la persistance des
désajustements en Afrique a provoqué une forte chute de la production agricole (Banque
mondiale, 1984). D'autre part, il a été soutenu que les politiques d'orientation vers l'extérieur
et les niveaux du taux de change qui encouragent la croissance des exportations dans les pays
d'Asie ont favorisé la croissance (Dollar, 1992) .Toutes ces conclusions nous ont amené à
penser que les désajustements du taux de change peuvent influencer la performance
économique d'un pays.

En dépit de la conscience grandissante des conséquences néfastes des désajustements


du taux de change pour la performance économique, peu d'études empiriques ont directement
tenté de répondre à cette question. Edwards (1988) a attribué ce manque aux difficultés
inhérentes à la construction de mesures de désajustements adéquates. La littérature sur les
effets des désajustements du taux de change sur de la croissance reste limitée et laisse de
nombreuses questions ouvertes auxquelles nous tenterons de répondre. Dans la même veine
que le travail de Béreau et al. (2009), notre travail complètera la littérature sur les points
suivants:

12
 
 

 Tout d'abord, nous utiliserons un modèle du taux du taux de change fondamental,


développé par Williamson (1985, 1994). La plupart des études récentes sur cette
question se basent sur des approches de type (BEER) pour estimer les désajustements
du taux de change (Magyari (2008); Béreau et al, 2009 ; Sallenave, 2010). Néanmoins,
les approches de type FEER peuvent aussi être utilisées car elles permettent de mieux
assurer la cohérence des désajustements de change entre les différents pays en utilisant
un modèle du commerce mondial. L’analyse de la relation « désajustements-
croissance », à partir de l’approche FEER est plus adaptée pour identifier les
défaillances dans les modèles de croissance adoptés par chaque pays.

 Deuxièmement, la plupart des travaux antérieurs utilisent les modèles d’économétrie


linéaire (OLS, 2SLS, 3SLS et GMM…) comme techniques d’estimations de la relation
entre désajustements du taux de change et taux de croissance économique. Notre
travail exploite une nouvelle technique économétrique, à savoir les modèles PSTR
(Panel Smooth Transition Régression) utilisés par Béreau et al. (2009) dans le même
contexte. L’utilisation des modèles à changements de régimes en données de panel
permet à la fois de conjuguer les avantages de travailler sur données de panel et de
résoudre simultanément les problèmes de non-linéarité, d’hétérogénéité et d’instabilité
temporelle de la relation au cours du temps (Colletaz et Hurlin, 2006 ; Bessec et
Fouquau, 2008). Nous examinerons si la surévaluation du taux de change et la sous-
évaluation ont un impact différent sur la croissance et si cet impact dépend de la taille
de l'écart par rapport à l'équilibre. Nous répondrons aux questions suivantes: est-ce
que la surévaluation du taux de change entrave la croissance? Est-ce que la sous-
évaluation l'améliore? Est-ce que l'effet sur la croissance dépend de l’ampleur de la sur
ou sous-évaluation?

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Plan de la thèse

Cette thèse est divisée en trois parties complémentaires.

Dans la première, nous cherchons, à travers la confrontation des faits et des arguments
théoriques et empiriques, à analyser la solidité de la relation entre régimes de change et
performances économiques. Nous débutons par un premier chapitre dans lequel nous
précisons les concepts de régimes de change que nous utilisons pour conduire notre recherche.
Nous définissons le régime de change et présentons les principales catégories de systèmes de
change.

Ensuite, nous décrivons l’évolution de ces régimes de change et leur adaptation aux les
changements économiques et financiers affectant les pays. Cette description cherche à donner
une représentation des modifications en matière de change que les pays émergents ont
connues depuis le début des 1980 et qui nous paraissent indispensables à la compréhension de
l’analyse menée par la suite.

Enfin, nous exposons les deux principales catégories de classification des régimes de
change, à savoir la classification de jure ou officielle proposée par le FMI et les classifications
de facto développées par Levy Yeyati et Sturzenegger (2005) et Reinhart et Rogoff (2003),
tout en présentant également les écarts entre ces classifications.

Le chapitre 2 examine les caractéristiques des politiques et les déterminants de choix


des régimes de changes des pays étudiés et propose un panorama des études empiriques
antérieures sur la relation entre régimes de change et performances économiques. Le second
thème de ce chapitre porte sur une étude empirique des effets du système de change sur la
croissance. Pour ce faire, nous utilisons une procédure économétrique des données de panel
dynamiques basée sur le système de moments généralisées GMM (Arellano et Bover, 1995) et
(Blundell et Bond, 1997). Avec cette approche, nous isolons l’effet des changements
exogènes dans les déterminants économiques de la croissance économique, ceci dans le but de
contrôler l’endogèneité.

Dans la deuxième partie, nous traitons la question du taux de change d’équilibre. Sa


réalisation exige l'établissement de «bonnes parités» et sa définition possède des implications
importantes pour les performances économiques qui intéressent les décideurs économiques.
La chute du système de Bretton Woods, l’instabilité et la volatilité des taux de change qui lui
ont été consécutives et les crises de change survenues depuis lors n’ont fait qu’exacerber une

14
 
 

telle exigence. Le désajustement croissant du taux du change réel est de loin l’élément qui
préoccupe le plus les économies émergentes en raison du déséquilibre macroéconomique qu’il
génère. Pour Harberger (1986), les pays émergents qui ont les performances économiques les
plus élevées sont ceux qui ont su maintenir un taux de change réel à un niveau approprié.
Mais qu’est-ce qu’un niveau approprié ? Comment le détermine-t-on ? Est-il différent en
fonction du niveau de développement?

Pour répondre à ces questions, nous articulons cette partie autour de trois chapitres.

Le troisième chapitre on présente un cadrage théorique de la détermination des taux de


change réels d’équilibre en rappelant les différentes approches. Après avoir mis en avant les
insuffisances de la parité des pouvoirs d’achat, et de l’effet Balassa, nous présenterons les
principales approches du taux de change d’équilibre. On évoquera ainsi le taux de change réel
d’équilibre fondamental (FEER), désiré (DEER), naturel (NATREX), comportemental
(BEER) etc.

Dans le quatrième chapitre, nous étudions la question des désajustements de change.


Depuis les années 1980, cette question est devenue cruciale avec la libéralisation du compte
de capital, l’accélération des mouvements de capitaux et la survenue de nombreuses crises
financières. Cette instabilité a souvent été attribuée à la mise en place d'un régime de change
fixe interdisant les ajustements nécessaires à la volatilité de l'environnement international.
Nous présenterons en premier lieu, le modèle multinational fondée sur l’approche FEER
(Borowski et Couharde 1999. Jeong, Mazier .2003 et Jeong, Mazier et Saadaoui. 2010) et la
méthode d'inversion de matrice symétrique (SMIM) proposée par Cline (2008). Nous
présenterons ensuite le modèle national simplifié, qui décrit les échanges commerciaux et qui
sert pour calculer les taux de change d'équilibre des petits pays. Ces modèles servent de base à
l’analyse conduite dans l’application empirique de ce chapitre de la thèse. Dans l’approche
FEER, le taux de change d’équilibre réel correspond au taux de change effectif réel
permettant aux économies d’atteindre simultanément leurs équilibres interne et externe à
moyen terme. L’équilibre interne est défini comme le plein emploi non inflationniste des
ressources d’un pays. Son calcul repose sur le niveau de la production potentielle. L’équilibre
externe correspond à une balance courante soutenable déterminée en fonction de l’évolution
des paramètres structurels. Pour le calcul des cibles de balances courantes5, nous réalisons une
                                                            
5
Dans une perspective de la balance épargne-investissement, la cible de balance courante n’a pas besoin d’être
nulle. En effet, les déséquilibres entre capacités d’épargne et besoins d’investissement nationaux se traduisent
par des positions extérieures nettes qui peuvent être soit créditrices, soit d´débitrices

15
 
 

estimation des déterminants à moyen terme de la balance courante (Isard et Faruqee (2001),
Chinn et Prasad (2003) et FMI (2007)).

Dans le prolongement des résultats du chapitre quatre, le chapitre cinq propose une
étude comparative des résultats des estimations de taux de change d'équilibre obtenu par la
méthode du BEER 6 par rapport à celles obtenues avec nos propres estimations d'un taux
change suivant la méthode du FEER. En outre, une comparaison est également faite avec les
estimations de Cline.

Dans la troisième partie, nous abordons l'étude de l’impact du niveau du taux de


change sur la croissance économique. Depuis le début des années 1990, l'impact des
désajustements du taux de change sur la croissance est devenu un sujet de recherches
économétriques important. Après plusieurs études de la Banque mondiale sur les vertus de
l'orientation vers l'extérieur et la compétitivité des monnaies pour la croissance (Dollar (1992)
et Cavallo (1990)), de nombreuses études économétriques ont mesuré, en incluant d’autres
variables, les effets de la surévaluation du taux de change sur la croissance (Easterly, (2001)
et Fajnzylber et al., (2004)). Une importante littérature politique est de plus en plus orientée
vers le rôle des politiques de change dans le succès du développement asiatique. Les
monnaies compétitives stimulent le revenu et l’investissement régional (Bresser-Pereira,
2004a, Dooley, 2005), tandis que les surévaluations sont parmi les principales causes des
crises et de la stagnation en Amérique latine au cours des années 1990 (Frenkel, 2004). Le
sixième chapitre de notre thèse dresse une revue de littérature empirique détaillée sur les
effets des désajustements de change, mesurés par des différentes approches du taux de change
réel d’équilibre, sur la croissance.

Nous proposons dans le septième et dernier chapitre de réexaminer les performances


économiques des pays étudiés en s’appuyant sur les désajustements obtenus dans le chapitre
quatre. Nous explorons les effets des désajustements de change, combinés avec d’autres
variables, sur la croissance économique. Ils peuvent être plus ou moins prononcés en fonction
de la présence de certaines catégories de variables qui sont utilisées comme variables de
contrôles (degré d’ouverture, taux d’investissement, taux d’inflation, indicateur de
développement humain, etc.…). Un taux de change réel «faible» permet d’accroître les
exportations par effet de compétitivité. Le développement des exportations desserre la

                                                            
6
Les résultats du BEER sont extraits d'un travail antérieur sur le taux de change d'équilibre sur un large
échantillon de pays développés et émergents (Béreau et Lopez et Mignon, 2009).

16
 
 

contrainte extérieure et permet d’importer du capital non produit localement, ce qui favorise
la croissance. À l’inverse, un taux de change réel élevé favorise le secteur traditionnel, pour
les pays émergents, ou le secteur abrité, pour les pays développés. Domaç et Shabsigh (1999)
soutiennent que la croissance est affectée défavorablement par toutes les mesures du
désajustement du taux de change réel, confirmant les effets contraignants de la mauvaise
gestion du taux de change sur la croissance.

Enfin la conclusion générale de cette étude rassemblera les principaux résultats et


enseignements de cette thèse. Elle en souligne certaines limites et proposent quelques voies de
recherches complémentaires.

17
 
 
 

PARTIE I 
 
REGIMES DE CHANGE 
ET 
CROISSANCE ECONOMIQUE 

18
 
 
 

Chapitre 1 
Régimes de change: typologie, 
classifications et évolution 

Introduction  

La mondialisation et le changement d’orientation des politiques économiques ont


entraîné un resserrement des relations commerciales et financières internationales dans les
années 1980 et 1990. De nombreux pays en développement ont vu leurs résultats
économiques et leurs perspectives de croissance s’améliorer très sensiblement. L’adoption des
stratégies d’ouverture sur l’extérieur et la libéralisation concomitante des échanges et des
paiements internationaux se sont révélées déterminantes pour la réussite du développement
économique (Krueger, 1997). Les pressions qu’exerce la mondialisation amplifient les
retombées bénéfiques d’une bonne gestion économique en même temps qu’elles aggravent le
coût des politiques inadaptées à ce nouvel environnement. La bonne gestion économique
passe par le choix et le maintien d’un taux de change approprié. Ainsi, il est acquis depuis
longtemps qu’il faut «bien choisir» son taux de change pour que la stabilité macroéconomique
soit durable. Par ailleurs, comme il a été démontré par les crises monétaires récentes, qui ont
frappé les économies de marché émergent, ainsi que la mobilité croissante des capitaux au
niveau international, les problèmes rencontrés par les divers pays peuvent varier au fil du
temps. Il faut donc adapter les régimes de change aux situations et à leurs évolutions. Ceci a
conduit à envisager une réévaluation du rôle que les accords de taux de change peuvent jouer
dans la réduction de la vulnérabilité aux crises économiques.

Les politiques de change ont profondément évolué dans le temps. Mohamed Daty
(2007) a analysé l’évolution de régimes de change dans une perspective historique. Elle note
qu’au début des années 1970, la plupart des économies avaient privilégié la mise en
flottement de leurs monnaies afin de mettre fin aux désajustements de grande ampleur et aux
ajustements brusques et trop souvent coûteux qui s’en suivaient. Au début des années 1980,
un revirement des opinions a fait que la plupart des économies aussi bien industrialisées qu’en

19
 
 

développement ont commencé à arrimer leurs monnaies les une aux autres. Cet état de fait,
peut s’expliquer par les larges fluctuations dans les taux de change des principales devises
suite à l’abandon du système de Bretton Woods. L’éclatement des crises de change, au milieu
des années 1990, a par la suite nécessité une remise en question et une réforme imminente du
système monétaire international dans son ensemble. Les pays avancés, à l'exception notable
de ceux de la zone Euro (et des pays candidats), ont alors opté pour des taux de change
flottants. Les pays en développement tentent ou sont incités à imiter les pays avancés. Une
caractéristique majeure de la situation actuelle est qu'entre les systèmes de flottement libre et
ceux de fixité extrême se sont développés des régimes intermédiaires très variés. Une branche
dynamique de la littérature économique aborde le choix du régime de change optimal
(Frankel, 1999).

La classification officielle est publiée chaque année par le Fonds Monétaire


International (FMI). Elle recense les régimes déclarés par les pays membres du Fonds. Mais
les incohérences entre les régimes déclarés par les pays et ceux qu'ils poursuivent ont conduit
à l'élaboration de nouveaux schémas de catégorisation basés sur les pratiques de change des
pays. Le développement de ce second type d'approches, dénommées classifications de facto, a
donné lieu à un regain de la littérature empirique et théorique portant sur les politiques de
change7. Reinhart et Rogoff (2003) suggèrent que la neutralité du système de change vis-à-vis
de l'économie réelle mise en évidence par des auteurs comme Baxter et Stockman (1989)
pourrait être la conséquence d'une mauvaise description des politiques de change par la
classification officielle.

Dans ce premier chapitre on se propose de passer en revue les différents régimes de


change, leurs évolutions dans le temps, les facteurs déterminants leurs adoption ainsi que les
arguments théoriques avancés pour ce fait. Mais dans un premier temps, il est indispensable
de définir le marché de change, de donner une idée sur son fonctionnement et sur les
différentes mesures des cours et des taux de change. Nous présenterons deux des principales
classifications de facto qui sont utilisées dans la littérature, à savoir l'approche de Levy-Yeyati
et Sturzenegger et celle de Reinhart et Rogoff. Nous exposerons le principe de ces schémas
ainsi que leurs avantages et limites. Nous aborderons aussi les différences qu'ils induisent
entre eux et en comparaison avec les régimes officiels. Nous conclurons ce chapitre en

                                                            
7
Voir, entre autres, les exemples cités par Levy-Yeyati et Sturzenegger (2005).

20
 
 

précisant les bases de régimes de change que nous avons retenues pour mener à bien notre
travail.

1. Régimes et politiques de change 

Le système de change désigne l'ensemble des principes et règles qui organisent le


cadre dans lequel la valeur nominale de la monnaie domestique est déterminée. Cette valeur
appelée taux de change nominal peut être déterminée par rapport à une ou plusieurs monnaies
étrangères ou par rapport à une marchandise comme l'or ou l'argent. Dès lors que la monnaie
est convertible, le taux de change s’ajuste en principe librement en fonction de l’offre et de la
demande. Les autorités peuvent cependant choisir de restreindre cette liberté. Tous les
gouvernements attachent donc un intérêt particulier à l’évolution du taux de change et
cherchent parfois à en stabiliser les mouvements. Un régime de change est l'ensemble des
règles qui déterminent l'intervention des autorités monétaires sur le marché des changes, et
donc le comportement du taux de change (Lahrèche-Revil, 1999).

La gamme de régimes de change s'est fortement enrichie au fil du temps. En effet, il


existe un continuum de régimes de change, allant du libre flottement à la fixité extrême. Ces
régimes sont généralement regroupés en trois grandes catégories 8 : les régimes de change
fixes, les régimes intermédiaires et les régimes de flottement. La séparation entre ces trois
groupes n'est pas toujours évidente (Obstfeld et Rogoff, 1995) dans la mesure où, par
exemple, un même régime intermédiaire peut être considéré suffisamment flexible pour être
classé dans les régimes flexibles ou assez rigide pour être classé comme fixe (Frankel, 2003).
Outre les fluctuations du taux de change nominal, les systèmes de change se distinguent entre
eux également par le degré d'autonomie qu'ils confèrent à la politique monétaire (Bailliu et al.,
2002). En fait, les régimes fixes imposent un régime monétaire compatible avec la parité de
change alors que les systèmes de flottement peuvent opérer avec divers ancrages nominaux
tels qu'une cible d'inflation, une cible de croissance de masse monétaire ou une cible de taux
d'intérêt (Reinhart et Rogoff, 2003). En pratique, la difficulté à identifier les régimes
monétaires des systèmes de change flexibles amène la plupart des auteurs à ne pas les prendre
en compte pour classer les régimes de change (Tavlas et al., 2008). Il existe une très grande

                                                            
8
 En réalité, les régimes de change sont regroupés en un nombre de grandes catégories qui varie dans la
littérature.

21
 
 

variété de régimes de change, qui se distribuent entre deux extrêmes (Lahrèche-Revil, 1999):
changes fixes et changes flexibles (solutions en coin).

Un régime de change fixe suppose la définition d’une parité de référence entre la


monnaie du pays considéré et une devise (ou un panier de devises), par laquelle la banque
centrale s’engage à échanger sa monnaie (Lahrèche-Revil, 1999). C’est un régime dans lequel
les autorités fixent (unilatéralement ou non) le taux de change nominal de référence et
s'engagent à vendre ou acheter toute quantité de monnaie domestique demandée ou offerte par
le public aux cours annoncés (Obstfeld et Rogoff, 1995).En adoptant un tel régime, les
autorités s'engagent également à défendre la parité de change par des interventions sur le
marché des changes ou par la politique monétaire. Les régimes fixes comprennent les unions
monétaires, les systèmes de dollarisation, les caisses d'émission et les systèmes
conventionnels de change fixes mais ajustables. Les trois premiers – dans lesquels la fixité est
institutionnelle – sont généralement connus sous le nom de hard pegs dans la littérature. Dans
une union monétaire, plusieurs pays adoptent une monnaie commune ainsi qu'une banque
centrale commune qui met en œuvre la politique monétaire commune et gère les réserves de
change de l'union (la zone euro). Quand un pays adopte unilatéralement la monnaie d'un autre
comme sa propre monnaie, on parle de dollarisation. Dans ce cas, la politique monétaire
domestique est abandonnée aux autorités monétaires du pays de rattachement de la monnaie
(Panama et l'Equateur). Dans une caisse d'émission, la banque centrale crée de la monnaie
domestique à la parité en vigueur, uniquement en contrepartie de la devise étrangère de
rattachement. La monnaie centrale est entièrement couverte par les réserves de change de la
banque centrale dans la devise de rattachement de la monnaie9 (Frankel, 1999; Tavlas et al.,
2008). En réalité, la politique monétaire discrétionnaire est quasiment éliminée et les
variations de la base monétaire sont tributaires des performances extérieures (commerciales et
financières) du pays qui, elles-mêmes, déterminent les variations de réserves de change
(l’Argentine de 1991 à 2001, la Bulgarie et Hong Kong). Dans les systèmes conventionnels de
change fixes mais ajustables, le taux de change, défini par rapport à une ou plusieurs devises,
peut varier dans des marges étroites autour d'une parité centrale fixée par les autorités. Ces
régimes autorisent une modification discrétionnaire et exceptionnelle de la parité fixe de la
monnaie domestique en cas de «déséquilibre fondamental» (Johnson, 1969 et Goldstein,
2002).

                                                            
9
Dans la pratique, le taux de couverture légal est très élevé mais pas toujours à 100 % (Goldstein, 2002).

22
 
 

Une caractéristique partagée par tous les régimes de change fixes est qu'ils
subordonnent la politique monétaire à la défense de la parité de change (Frankel, 1999 et
2003). Cette réduction de l'autonomie de la politique monétaire croît avec la fixité du taux de
change nominal. Elle est accentuée par la libéralisation des opérations de change et l'ouverture
financière.

Dans un régime de change flexible, à l’inverse, aucun engagement n’est pris au sujet
du taux de change, qui flotte librement (flottement pur). La politique monétaire retrouve ainsi
son autonomie, et amène la banque centrale à abandonner le contrôle du taux de change
nominal lequel se trouve déterminé sur le marché (Lahrèche-Revil, 1999). Les régimes de
flottement sont ceux dans lesquels le taux de change est déterminé par l'offre et la demande de
la monnaie domestique sur le marché des changes 10 . Les autorités monétaires peuvent
intervenir sur ces marchés ou se servir de la politique monétaire pour influencer l'évolution de
la parité de change mais pas dans le but de défendre une parité donnée. Dans le cas où les
autorités interviennent pour atténuer des fluctuations jugées excessives du taux de change, le
système de change est qualifié de flottement administré. En l'absence d'intervention, on parle
de flottement indépendant, libre ou pur (Frankel, 1999 et Edwards et Savastano, 1999). Le
Japon, le Canada, l'Afrique du Sud, les Etats-Unis, la Grande Bretagne, l'Australie sont des
exemples actuels de pays avec un taux de change flottant.

Entre les systèmes de change fixes et flottants se trouve un continuum de régimes


intermédiaires. Appartiennent à cette catégorie11, les crawling pegs et les crawlings bands.
Dans les premiers, les autorités ciblent une trajectoire fixe d'évolution du taux de change
nominal (Obstfeld et Rogoff, 1996), permettant ainsi un ajustement graduel du taux de change
par dévaluation. Dans un système de crawling bands, la banque centrale annonce une bande
large 12 de fluctuation du taux de change autour d'une parité centrale qui est elle-même
modifiée périodiquement. Ces modifications sont d'ampleur relativement faible et visent à
éviter ou à réduire le désajustement du taux de change (Williamson, 1998) qu'induirait une
accumulation des différentiels d'inflation positifs avec le pays d'arrimage. Les autorités

                                                            
10
Le taux de change est déterminé de manière continuelle sur les marchés (Johnson, 1969).
11
Frankel (1999) inclut également dans les régimes de change intermédiaires, les pegs ajustables, les systèmes de
fixité par rapport à un panier de devises et les zones ou bandes cibles. Mais Obstfeld et Rogoff (1995)
considèrent que les pegs ajustables sont des systèmes de change fixes si les modifications de parité ne sont pas
fréquentes. Se référer à Frenkel et Goldstein (1989) et Obstfeld et Rogoff (1995) pour les zones cibles.
12
Les bandes de fluctuations sont plus larges que celles des taux de change fixes conventionnels. Selon
Williamson (1998), les bandes doivent être larges de 5% au moins.

23
 
 

s'engagent également à intervenir pour maintenir le taux de change à l'intérieur de la bande de


fluctuation. Les modifications de la parité ou des bandes peuvent se faire ex ante ou ex post.
À des degrés variables, les régimes intermédiaires combinent la présence d'un ancrage de taux
de change nominal à une relative flexibilité du taux de change. En effet, la parité centrale de
change par rapport à une ou plusieurs devises, la pondération du panier ou les marges de
fluctuations autour de la parité centrale peuvent être modifiées. Cela confère une autonomie
plus grande à la politique monétaire en comparaison avec les systèmes de change fixes. Des
régimes de change intermédiaires ont été mis en œuvre dans le passé dans plusieurs pays
d'Amérique Latine tels que l'Argentine, le Mexique, le Chili, la Bolivie. Un autre exemple
bien connu de bandes est le système de change monétaire européen qui a été mis en œuvre en
1979 et dont la largeur de bandes de fluctuations autour d'une parité centrale par rapport au
deutsche mark a été substantiellement élargie après les crises de change de 1992-1993 dans
plusieurs pays membres (Obstfeld et Rogoff, 1995 et Edwards et Savastano, 1999).

2. Classifications des systèmes de change 
 

Deux grandes approches ont été utilisées pour classer les régimes de change: l'approche de
jure qui se fonde sur les déclarations des pays et les classifications de facto qui se basent sur
les pratiques des pays. Nous exposons tour à tour ces classifications, leurs avantages et leurs
limites.

2.1 .Régimes de change de jure


 

Si on raisonne souvent en termes d’une alternative entre changes fixes et changes


flexibles, la réalité des régimes de change montre en fait un continuum des régimes
intermédiaires allant de la fixité forte vers le flottement (Eichengreen et al. ,1999 ; Frankel,
1999). Une telle diversité des régimes de change résulte de la crise du système des changes
fixes mais ajustables de Bretton Woods. Ainsi, depuis les accords de la Jamaïque en 1976, le
Fonds Monétaire International (FMI) reconnaît la diversité des régimes de change.

Depuis 1950, le rapport « Exchange Arrangements and Exchange Restrictions » publié


annuellement par le FMI a constitué la principale source d'information sur les régimes de
change. Le rapport recense les déclarations de politique de change et de paiements

24
 
 

internationaux des pays membres. La classification du FMI est connue sous le nom de
classification officielle ou classification de jure. Elle demande aux pays de notifier le régime
de change qu'ils mettent en œuvre comme appartenant à l'une des catégories préalablement
définies par le FMI. En fait, les catégories de systèmes de change proposées par le FMI ont
évolué au cours du temps. De deux catégories de régimes de change jusqu'en 1982, on est
passé à 4 à partir de 1983 puis à 8 à partir de 1999 (Voir Annexe 1). Pour décrire la méthode
de détermination des différents régimes, considérons le regroupement en quatre grands
systèmes utilisé en 1997 et 1998. Les régimes de change fixes regroupent les unions
monétaires, la dollarisation, les caisses d'émission et les systèmes de change fixes
conventionnels. Dans ces derniers, les marges de fluctuation du taux de change nominal
autour de la parité de référence (par rapport à une devise ou à un panier de devises) sont très
étroites, inférieures à 1%. Une seconde possibilité est que les valeurs maximale et minimale
du taux de change doivent demeurer dans des bandes étroites de 2 % pendant au moins trois
mois (Bubula et Ötker-Robe, 2002). La flexibilité limitée englobe tous les régimes se situant
entre la catégorie fixe et le flottement administré. Les marges de fluctuations sont plus
grandes que celles des systèmes fixes. La flexibilité limitée regroupe les systèmes de bandes
horizontales de fluctuations autour d'une parité centrale, les crawling pegs et les crawling
bands. Les deux catégories restantes sont le flottement administré et le flottement
indépendant.

Les régimes officiels dévoilent les intentions ou promesses des autorités nationales ou
internationales en matière de politique de change et parfois de politique monétaire. En effet,
en annonçant un régime de change donné, les autorités s'engagent à éventuellement se servir
de la politique monétaire si cela s'avère nécessaire pour délivrer le régime promis. Par
conséquent, la classification de jure est importante dans les domaines où les anticipations
jouent un rôle crucial 13 . Par exemple, l'effectivité de la politique monétaire dépend des
anticipations des agents sur son évolution future et sur les autres décisions du gouvernement.

Bien que conscients de ce fait, les autorités décident quelques fois, de ne pas annoncer
publiquement le régime de change qu'elles mettent en œuvre. Cette décision peut conférer une
relative marge de manœuvre aux autorités car elle peut leur permettre de modifier le taux de
change, de limiter ses fluctuations ou de le laisser fluctuer (Frankel et Wei, 2008), sans renier
                                                            
13
 De plus, la classification officielle couvre un grand nombre de pays, sur une période de temps relativement
longue et elle a été régulièrement mise à jour jusqu'en 1998 (Bubula et Ötker-Robe, 2002).

25
 
 

un engagement. Cette latitude s'avère particulièrement utile quand la défense du taux de


change devient très couteuse (Frenkel et Goldstein, 1989). Dans l'évolution récente de sa
politique de change, la Chine a opté pour une bande de fluctuations du yuan par rapport à
onze devises sans dévoiler la pondération du panier de rattachement (Frankel et Wei, 2008).
Il a été constaté que, dans plusieurs pays, à différentes périodes, le régime de change observé
était différent de celui initialement promis. En effet, Calvo et Reinhart (2002) ont mis en
évidence une épidémie de «peur du flottement» qui traduit le fait que de nombreux pays
déclarant officiellement un système de change flottant mettent en œuvre, de fait, un régime
fixe (Calvo et Reinhart, 2000). Ces pays interviennent massivement pour limiter
substantiellement les fluctuations de leur taux de change, le transformant ainsi en un taux fixe.
En outre, des pays qui annoncent des systèmes de change fixes modifient si fréquemment la
parité de leur monnaie que le régime devient flexible de facto (Levy-Yeyati et Sturzenegger,
2005; Reinhart et Rogoff, 2002; Frankel et Wei, 2008 et Frankel, 2003).

Les divergences entre les promesses de change et les faits réduisent la transparence des
politiques de change et par conséquent compliquent la surveillance des politiques des pays
membres par le FMI. En outre, elles peuvent remettre en cause les résultats ainsi que les
implications de politiques basés sur les régimes de jure (Bubula et Ötker-Robe, 2002). Ces
divergences ont finalement contraint le FMI à amender sa classification à partir de 1997 en
complétant les déclarations des pays par d'autres informations14 sur leurs pratiques de change.
Néanmoins, comme le soulignent Reinhart et Rogoff (2002), le taux de change nominal
officiel demeure la variable principale utilisée par le FMI pour identifier les systèmes de
change. En dehors de l'approche modifiée du FMI, d'autres schémas ont été développés pour
classer les régimes de change mis en œuvre par les pays. Ces schémas sont connus sous le
nom de classifications de facto. Parmi les plus célèbres se trouvent la classification proposée
par Levy-Yeyati et Sturzenegger (2003; 2005) et celle développée par Reinhart et Rogoff
(2003; 2008). Nous aborderons le principe, les avantages et les limites de ces deux démarches
de facto dans la section suivante.

                                                            
14
Ces informations portent sur le cadre de la politique monétaire, les intentions implicites ou explicites des
autorités, les variations du taux de change et des réserves de change (Rogoff et al., 2004). La publication de
l'ancienne classification a cessé en 1999 (Tavlas, Dellas et Stockman, 2008; Rogoff et al., 2004). La nouvelle
classification a été utilisée et actualisée par Bubula et Ötker-Robe (2002) pour couvrir les autres années de la
décennie 1990.

26
 
 

2.2. Les classifications de facto

Dans la littérature, plusieurs classifications de facto ont été élaborées. Plusieurs de ces
approches utilisent en complément d'information le comportement d'autres agrégats
économiques comme les réserves de change ou le taux d'intérêt nominal. Ghosh et al. ,(1997)
partent de la classification du FMI pour ensuite distinguer parmi les pays à régime de change
officiel fixe les «ajusteurs fréquents» – i.e., ceux qui modifient la parité au moins deux fois
dans l'année – des autres pays qui modifient moins souvent leur parité de change. Bailliu et al.
(2002) distinguent d'une part les régimes de change fixes des systèmes intermédiaires et
flexibles et d'autre part, ils identifient la présence d'un ancrage nominal guidant la conduite de
la politique monétaire dans les régimes non fixes. À l'aide d'un modèle de choix multinomial,
Dubas et al. (2005) décomposent le taux de change officiel de plus de 170 pays, de 1971 à
2002, en une composante systématique correspondant au régime de change de facto et un
résidu mesurant l'écart entre le régime officiel et le régime de facto. Leurs variables
indépendantes sont la volatilité du taux de change nominal effectif, le taux de change bilatéral
(par rapport à une monnaie de référence pertinente) et les réserves de change.

Frankel et Wei (2008) essaient de réconcilier les approches classant les régimes de
change à l'aide du degré de flexibilité du taux de change et celles servant à identifier les
devises des paniers d'ancrage et leur pondération implicite 15 . Ils appliquent ensuite cette
méthodologie à quinze pays, sur la période 1980-2007. D'autres classifications de facto non
exhaustives16 ont été développées par Coudert et Dubert (2005), Bénassy-Quéré, Coeuré et
Mignon (2006), Bubula et Ötker-Robe (2002), Shambaugh (2004).

Contrairement aux régimes de jure qui recensent les engagements des autorités, les
régimes de facto suivent une démarche rétrospective basée sur les données et les
comportements observés pour classer les régimes de change. Le taux de change nominal est
en général la principale variable de classification, à laquelle sont jointes d'autres variables
telles que les réserves de change ou les taux d'intérêt.

                                                            
15
Les droits de tirage spéciaux (SDR) servent de numéraire pour identifier les paniers de rattachement.
16
Tavlas, Dellas et Stockman (2008) décrivent plusieurs classifications de facto. Voir aussi Rogoff et al. (2004).

27
 
 

Nous présentons les deux classifications les plus utilisées dans la littérature
économique qui sont la base de Levy-Yeyati et Sturzenegger (2005) et celle compilée par
Reinhart et Rogoff (2003) et actualisée jusqu’en 2010.

2.1.1. La classification de Levy-Yeyati et Sturzenegger (LYS)

Levy-Yeyati et Sturzenegger (1999) ont procédé par une méthode statistique pour un
classement annuel des régimes de change de 183 pays de 1974 à 2000. Les auteurs ont recours
à des révisions dans l'objectif d'améliorer leur classification des systèmes de change. Chaque
pays est assigné chaque année à un régime de change donné, dans cette perspective, afin
d’identifier les régimes de facto, Levy-Yeyati et Sturzenegger considèrent l’évolution de trois
variables (Annexe 2):

 la volatilité du taux de change nominal (VC).


 la volatilité de la variation du taux de change (VVC).
 la volatilité des réserves de change (VR).

Selon les régimes de change, ces trois variables doivent se conduire de la manière
suivante (Tableau 1).

Tableau 1: Critères de classification des régimes de change par LYS

Régime de change VC VVC VR

Flexible Elevée Elevée Faible


Flottement contrôlé Moyenne Moyenne Moyenne
Parité glissante Moyenne / Elevée Faible Moyenne / Elevée
Fixité Faible Faible Elevée
Non concluant Faible Faible Faible
Source : Levy-Yeyati et Sturzenegger (2005).

Selon la stratégie de catégorisation, les régimes de change fixes se caractérisent par


une stabilité du taux de change nominal dont la contrepartie est une forte volatilité des
réserves de change. Par contre, un taux de change nominal volatile et des réserves de change
stables sont associés aux systèmes de change flottants17. Entre ces deux extrêmes, les crawling
                                                            
17
La forte variabilité des réserves de change reflète l'activisme des autorités monétaires sur le marché de change
pour défendre la parité fixe de la monnaie domestique. Quand le taux de change flotte librement, les autorités

28
 
 

pegs sont identifiés par une faible volatilité des variations du taux de change nominal et une
variabilité relativement forte des réserves. Les régimes de flottement administré présentent un
taux de change nominal et des réserves volatiles ainsi que des fluctuations du taux de change
relativement modérées. La monnaie de référence servant au calcul du taux de change nominal
est la monnaie officielle de rattachement déclarée par les pays à système de change fixe. Pour
les pays ne révélant pas leur monnaie d'ancrage, Levy-Yeyati et Sturzenegger retiennent la
devise vis-à-vis de laquelle la monnaie nationale présente la plus faible volatilité.

Levy-Yeyati et Sturzenegger ont ensuite comparé leurs régimes de facto18 aux régimes
officiels déclarés au FMI par les pays membres. Il ressort qu'environ deux tiers des
observations de leur échantillon sont classés identiquement par les deux méthodes. Cette
évidence est relativement rassurante puisqu'elle signale qu'une majorité des pays a déclaré le
régime effectivement pratiqué ou a été en mesure de délivrer le régime promis. Au-delà de ce
sous échantillon consensuel, des évolutions divergentes apparaissent entre les deux
classifications. En effet, la base de LYS indique que le nombre de régimes fixes a diminué
dans les années 1970 et 1980 puis s'est stabilisé en 1990 alors que le nombre de systèmes de
change fixes officiels a continuellement diminué dans le temps.

Tableau 2: Classification de LYS et comparaison avec les régimes de jure


 
Régime LYS FMI
Flottant 662 513
Intermédiaire 600 937

Fixe 2073 1885


Total 3335 3335
Source : Levy-Yeyati et Sturzenegger (2005)

Ce phénomène suggère selon les auteurs que beaucoup de régimes fixes de fait n'ont
pas été déclarés au cours des années 1990. Le tableau 2 ci-dessus révèle également plusieurs
aspects intéressants dans la composition des régimes de change. En effet, les régimes de
change fixes restent la catégorie dominante, représentant plus de la moitié des observations
dans les deux classifications. Par contre, les régimes flottants constituent la seconde catégorie
                                                                                                                                                                                          
monétaires interviennent peu sur les marchés de change, d'où une stabilité relativement forte des réserves de
change.
18
La démarche de LYS est indépendante des régimes officiels.

29
 
 

la plus importante selon la base de LYS alors que cette position est occupée par les régimes
intermédiaires dans la classification du FMI. En outre, LYS assignent un nombre nettement
plus élevé d'observations aux régimes fixes et flottants par rapport aux régimes déclarés par
les pays au FMI. Le nombre total d'observations appartenant aux régimes intermédiaires est
nettement moins élevé chez LYS. Ainsi, le tableau fait ressortir des écarts substantiels entre
les régimes déclarés par les pays et ceux qu'ils ont pratiqués de fait. Les auteurs affinent leurs
caractérisations de ces divergences. Ils mettent en évidence une «peur de la fixité»,
phénomène désignant les pays qui opèrent un régime de change fixe sans l'annoncer. Par
exemple, bien qu'en 1990 et en 2000, 58 % des observations soient fixes de facto, seulement
56 % et 49 % sont déclarées comme régimes fixes ces mêmes années. De même, en 1980, les
régimes fixes représentaient 79 % des observations classées par LYS alors qu'ils ne
représentaient que 68 % dans la base du FMI19. Un second phénomène qui apparaît lorsque
les régimes de change de jure et de facto sont comparés est la « peur du flottement ». Enfin,
un accroissement des régimes extrêmes de fixité et de flottement libre du taux de change au
détriment des systèmes intermédiaires apparait au cours du temps selon les deux
classifications. Cependant, cette évolution n'apparait dans la base de LYS qu'au niveau des
pays industrialisés et émergents qui sont relativement plus intégrés à la finance mondiale que
les autres pays en développement. Les divergences entre régimes officiels et de facto invitent
donc à beaucoup de précautions lorsque les régimes officiels de change sont utilisés pour
évaluer les effets économiques de la politique de change.

L'approche proposée par Levy-Yeyati et Sturzenegger ouvre ainsi la possibilité d'une


meilleure compréhension des relations entre le système de change et l'économie (Yougbareé,
2011). Néanmoins, la démarche présente quelques limites. Il en est ainsi quand, par exemple,
un pays change de régime. Dans ce cas, la classification de LYS ne semble pas toujours
logique. Les auteurs citent l'Argentine qui a adopté sa caisse d'émission en avril 1991. Sur les
trois derniers trimestres de 1991, le taux de change nominal était incontestablement fixe, à un
dollar pour un peso. Mais, les fluctuations du taux de change nominal au cours du premier
trimestre de cette année conduisent à classer l'Argentine comme un système de flottement
administré en 1991. Le même problème survient pour l'Equateur qui a adopté le dollar
américain en février 2000 mais dont le système de change est identifié cette année comme un
flottement administré par LYS (Yougbareé, 2011). Les auteurs imputent cette limite en partie
                                                            
19
En 1974, les proportions de régimes fixes s’établissaient à environ 75% dans les deux schémas de
classification.

30
 
 

au découpage calendaire qu'ils utilisent. D'autres cas controversés surviennent dans la base de
LYS. Parmi les autres limites évoquées par les auteurs, figurent l'absence d'une prise en
compte du rôle des mouvements de capitaux et des systèmes de change multiples ainsi que
l'exclusion des pays qui fixent leur taux de change à des paniers de monnaies non dévoilés.
Par ailleurs, la stabilité du taux de change peut résulter d'un environnement stable ou d'une
défense réussie de la parité qui n'est pas forcément visible dans les changements des réserves
de change. Enfin, le schéma adopté par LYS ne leur permet pas dans certains cas extrêmes
d'assigner un régime de change à certains pays en développement sur toute la période
considérée (Reinhart et Rogoff, 2003).

2.1.2. La classification de Reinhart et Rogoff

Reinhart et Rogoff (2003) ont proposé une classification de facto basée sur les
systèmes de taux de change multiples et le taux de change de marché ou le taux parallèle. Les
auteurs trouvent que le taux de change parallèle ou de marché dans un système de change
multiple est plus pertinent, en particulier quand sa couverture est large20. Selon eux, ce taux
constitue un bon indicateur de la politique monétaire et de change car il se déprécie lorsque la
politique monétaire est incompatible avec la fixité du taux de change. En fait, les auteurs
montrent que, dans les pays en développement, la dépréciation du taux parallèle précède et
prédit relativement bien la dévaluation de la parité officielle. Le taux parallèle évolue aussi
plus étroitement avec l'inflation que le taux officiel. Reinhart et Rogoff classent les régimes
de 153 pays, de 1946 à 2001, de façon plus détaillée que LYS. D'une part, ils offrent une
classification fine comportant jusqu'à quinze catégories de régimes de change et une
classification agrégée comportant cinq types de régimes (voir tableau en Annexe 3). D'autre
part, des régimes de change mensuels sont proposés ainsi que des régimes annuels 21 . La
méthodologie de Reinhart et Rogoff repose sur une analyse descriptive très documentée qui
combine le taux de change du marché, le taux de change parallèle et une chronologie détaillée
de l'histoire de change de chaque pays. La chronologie retrace, entre autres, les réformes
monétaires et de change telles que les changements de monnaie, les dates d'adoption d'un

                                                            
20
Hormis le monde développé et la zone CFA, la prime du marché parallèle dépasse 10% ailleurs.
Naturellement, le taux du marché parallèle est inadapté s'il sert surtout à des transactions illégales (commerce de
drogue, etc.).
21
LYS se servent aussi de données mensuelles dans leur approche mais ils ne proposent pas de régimes
mensuels.

31
 
 

régime de change, les dates de changement de monnaie d'ancrage, les dates d'unification des
taux de change ainsi que les contrôles de change, la couverture du marché parallèle, etc.

Reinhart et Rogoff ont procédé en plusieurs étapes22 (Voir Annexe 4). Les auteurs
commencent par séparer les pays avec des taux de change multiples officiels ou parallèles des
autres pays dont le système de change est unifié. Dans une seconde étape, considérant
uniquement le groupe à taux de change unifié, ils distinguent les pays qui ont déclaré
officiellement un régime de change de ceux qui n'en déclarent pas. Ensuite, la correspondance
du système promis à celui mis en œuvre est vérifiée à l'aide de statistiques descriptives.
Quand les deux concordent, le système de change du pays est classé de fait comme tel au
cours de la période considérée. Lorsque les deux diffèrent, Reinhart et Rogoff regroupent ces
observations avec celles sans régime officiel annoncé et déterminent le régime de facto à
partir de la volatilité et une analyse graphique du taux de change nominal. La volatilité est
mesurée sur cinq années mobiles pour réduire l'influence d'événements relativement
exceptionnels sur la classification des régimes. Auparavant, les cas d'inflation annuelle
excédant 40% sont séparés et regroupés dans une catégorie appelée freely falling incluant
elle-même les régimes d'«hyper-flottement» dans lesquels l'inflation dépasse 50% par mois.
Toutefois, quand un crawling peg ou crawling bands avec des bandes étroites est annoncé et
délivré, les observations correspondantes ne pas sont incluses dans les freely falling.

En revanche, quand un régime de flottement administré ou libre est adopté à la suite


d'une crise de change, Reinhart et Rogoff classent les six premiers mois d'après crise comme
freely falling. À ce stade, tous les cas non encore classifiés dans les étapes précédentes sont
répartis entre le flottement administré et le libre flottement en fonction des variations du taux
de change et la probabilité que ces variations demeurent dans une bande inférieure à 1%.
Finalement, dans le groupe des taux de change multiples ou parallèles, l'assignation se fait
selon les étapes précédentes sur la base du taux de marché ou parallèle lorsque les primes du
marché parallèle atteignent au moins 10%. Pour des primes inférieures, l'assignation par le
taux de change officiel est similaire à celle obtenue avec le taux du marché ou parallèle selon
les auteurs.

                                                            
22
Voir les documents de Reinhart et Rogoff pour plus de détails sur leur schéma de classification.

32
 
 

La comparaison des régimes de facto de Reinhart et Rogoff avec les régimes officiels
recensés par le FMI fait ressortir certains aspects consensuels mais aussi plusieurs points de
divergence. Globalement, les régimes identifiés par les deux schémas diffèrent dans plus d'un
cas sur deux sur la période 1970-2001. En outre, un régime officiel de fixité ou de flottement
libre n'est identifié identiquement par RR que la moitié du temps, de 1970 à 2001. De même,
les régimes officiels de rattachement à des paniers de devises non dévoilés s'avèrent être en
grande partie des régimes de fait très flexibles (flottement administré et libre, freely falling).
La comparaison révèle aussi une évolution contradictoire des régimes intermédiaires. Ils sont
très fréquents et représentent (avec le quart des régimes) la seconde catégorie de facto de la
période 1991-2001 après la fixité (un tiers des régimes) tandis que la classification de jure
indique qu'ils diminuent au fil des années. La peur du flottement se manifeste, en partie23, par
une baisse du flottement de facto dont la prévalence (10%) ne représente que le tiers de celle
du flottement officiel de 1991 à 2001.

La démarche de Reinhart et Rogoff présente des limites dont certaines sont évoquées
par les auteurs. En effet, le taux de change nominal demeure la principale variable
d'identification de Reinhart et Rogoff, bien que l'inflation soit accessoirement utilisée
également. La méthode exclut les réserves de change contrairement à la procédure statistique
employée par LYS. Reinhart et Rogoff défendent leur choix par le fait que l'évolution des
réserves de change ne traduit pas toujours adéquatement les interventions des autorités
monétaires sur les marchés de change. Ils citent l'exemple du Brésil où les interventions se
font avec des titres libellés en dollars. Une autre limite est que l'influence des contrôles de
capitaux sur la politique de change n'entre pas directement dans la classification même si elle
est captée indirectement par la prime du marché parallèle. Une troisième limite réside dans le
fait que la stabilité du taux de change nominal peut résulter de l'absence de chocs ou d'une
défense réussie de la parité de change. En comparant la volatilité des variations du taux de
change à l'incidence de chocs réels24, Reinhart et Rogoff réfutent l'idée que les régimes fixes
de leur schéma soient le fait d'une absence de chocs réels.

La concordance des régimes de facto, entre 1990 et 1999, tels qu'ils sont identifiés par
RR et LYS est relativement faible, se situant légèrement en dessous de 50% de l'échantillon
(Tavlas et al. ; 2008). En excluant les observations manquantes, la base de RR est la plus
                                                            
23
De 1974 à 2001, 36% des cas de freely falling correspondaient à un libre flottement officiel. 
24
Les chocs des termes de l'échange et la volatilité du PIB réel sont considérés et l'Australie sert de référence.

33
 
 

proche de celle du FMI avec une identification identique des trois quarts des régimes alors
que la base de LYS concorde dans moins de 50% des cas avec celle du FMI. Par contre,
l'inclusion des observations manquantes inverse le classement et surtout réduit fortement la
proportion des régimes de RR coïncidant avec ceux du FMI. Désormais, plus de la moitié (55
% environ) des régimes sont classés de manière identique par LYS et le FMI alors que cette
proportion devient inférieure à 50% avec la base de RR. Bleaney et Francisco (2007) trouvent
que les classifications de LYS, RR et Shambaugh divergent substantiellement entre elles et
avec la classification officielle dans un échantillon de pays en développement, hors pays en
transition25, sur la période 1985-2000. Ils notent aussi que ces divergences ne s'amenuisent
pas dans le temps (Yougbareé, 2011).

3. Évolution des régimes de change 

Quelles sont les principales évolutions des régimes de change depuis le milieu des
années 70 ? À première vue, les divers pays du monde, à l’exception notable des économies
européennes, se dirigent vers l’adoption de régimes de taux de change flottants. D’après le
Fonds Monétaire International (FMI), 97% des pays membres en 1970 avaient un régime de
change fixe. Cette proportion était descendue à 68 % en 1980 et elle n’était plus que de 49 %
en 2000. Avec la création de l’euro, la part des régimes de change fixes a baissé pour se
stabiliser à 47 % en 2010.

Une première description des régimes de change suivis dans le monde est fournie par
le FMI. Il classe les différents pays membres en fonction du degré de flexibilité de leur
monnaie. Sur cette base, comme l’a remarqué Eichengreen (1999), depuis les années 1970, la
part des pays en développement et à marché émergent en régime de change fixe a
régulièrement diminué de 90 % en 1974 à 40% en 2000, puis une légère augmentation en
2010 pour atteindre 47 %, alors que, dans le même temps, la proportion de pays en régime de
change flexible augmentait de 10 % en 1974 à 60 % en 2000 pour se stabiliser à environ 53 %
en 2010 . La figure 1 ci-après étend ce diagnostic à l’ensemble des monnaies des pays
membres du FMI sur la période 1974-2010. Il montre par ailleurs que la transformation du
SMI s’est faite pour l’essentiel au tournant de la décennie 1990, la part relative des deux
groupes de régimes s’étant stabilisée depuis lors, malgré la fusion des 16 monnaies de la zone
                                                            
25
Von Hagen et Zhou (2005) comparent les régimes de jure et ceux de LYS dans 25 pays en transition dans les
années 1990.

34
 
 

euro (qui a mécaniquement réduit le nombre de monnaies en régime de flexibilité limitée), et


malgré la crise financière des pays émergents (qui a réduit les ancrages fixes).

Ce diagnostic ne peut pas cependant suffire car, d’une part, chacune des deux
catégories de régimes recouvre en réalité des systèmes forts différents, et d’autre part, aucune
information n’est donnée à ce stade sur l’évolution relative des différentes monnaies
d’ancrage.

Figure 1. Répartition des régimes fixe et flexible au sein des pays membres du FMI

80%
70%
% des pays membres

60%
50%
40%
30%
20%
10%
0%
1974 1980 1990 2000 2010

Parité fixe ou flexibilté limitée Parité glissante ou flottement administré ou libre

Sources : calculs de l’auteur, Annual Report on Exchange Arrangements and Exchange Restriction, divers
numéros ; FMI (2010), Statistiques financières internationales.

Le tableau 1 fournit quelques détails sur les évolutions synthétisées par la figure 1. Ce
tableau confirme la progression saisissante des régimes de flottement libre (définis par
l’absence d’interventions répétées des autorités monétaires sur le marché des changes) au
détriment principalement des régimes d’ancrage sur des paniers des monnaies. Les ancrages
fixes sur une seule monnaie ont relativement mieux résisté, grâce au maintien de la zone franc
et à la mise en place de plusieurs caisses d’émission dans les années 1990. Mais il est
intéressant de noter que la part des régimes d’ancrage glissant et de flottement administré n’a
pas diminué et a même légèrement augmenté entre 1994 et 1999.

35
 
 

Si on considère les données du FMI, les pays en développement et les nouveaux


membres du fonds - les pays de l’Est européen et de l’ex-URSS- occupent une place
déterminante dans cette tendance vers la flexibilité. Pour les premiers, il apparaît nettement un
recul de l’accrochage à une devise ou à un panier. Ainsi 52.1 % des pays en développement
avaient accroché leur monnaie à une devise en 1979, en 1994 la proportion est tombée à 26 %.
Néanmoins, cette proportion a augmenté en 2008 pour atteindre 46 %.

Tableau 3: Part des différents régimes de change, en proportion des monnaies des pays en
développement membres du FMI en fin d’années.

Régimes de change 1983 1988 1994 1999 2008


Ancrage fixe sur une monnaie, 35.6 38.2 26 29.9 46
y compris caisses d’émission….

Dollar…………………………... 23.3 25.7 13.8 12.3 29.2

Franc français, deutschemark, 8.9 9.2 8.3 12.3 13.3


euro……… …………………….
Autres………………………….. 3.4 3.3 3.9 2.7 3.5
Ancrage fixe sur un panier de
monnaies……………………... 27.4 25.7 13.3 9.6 4.1
DTS………………………………. 8.9 5.3 1.7 3.2 -
Ecu……………………………...... 0.7 0.7 0.6 - -
Autres paniers…………………. 17.8 19.7 11 6.4 -
Flexibilité limitée…..………… 11 7.2 7.2 5.9 6.6
Mécanisme de change européen. 4.8 4.6 5 1.1 -
Autres arrangements avec 6.2 2.6 2.2 4.8 -
bandes…………………………..

Ancrage glissant ou flottement


administré…………………….. 19.9 17.8 19.9 23 22.6
Flottement libre……….……… 6.2 11.2 33.7 31.6 20.5
Total…………………………… 100 100 100 100 100
Nombre de monnaies………….. 146 152 181 187 195
Source : calculs de l’auteur, Annual Report on Exchange Arrangements and Exchange Restrictions, divers
numéros ; FMI (2010), Statistiques financières internationales.

36
 
 

Le dollar est particulièrement affecté par ce processus : sa part comme monnaie


d’ancrage passe de 29 % à 13.8 % puis à 29 % sur la même période. L’accrochage à un panier
composite recule de 27.4 % en 1983 à 13.3 % en 1994 pour chuter à 4.1% en 2008. A
contrario, le régime de changes flexibles est choisi par 45 % et 47 % des pays en
développement et émergents respectivement en 1990 et 2008 alors qu’ils n’étaient que 9 % à
avoir fait ce choix en 1974. Le glissement apparaît encore plus net si l’on tient compte du
poids relatif des économies concernées.

Le léger recul des ancrages fixes par rapport à une monnaie est entièrement attribuable
au dollar bien qu’il n’ait profité que modestement à l’euro. Au total, l’effet de ciseaux illustré
par la figure (2) apparaît donc comme une substitution de régimes de flottement pur ou
administré aux régimes d’ancrage sur le dollar américain et sur des paniers de devises. Le
tableau ne fait pas apparaître d’évolution vers un SMI «multipolaire».

Le mouvement en faveur de régimes plus flexibles a touché toutes les régions du


monde. En 1976, les pays en développement déterminant leur taux de change par référence à
une monnaie prédominaient dans les quatre groupements régionaux utilisés dans les
Perspectives de l’économie mondiale pour les pays en développement: Afrique, Asie, Moyen
Orient et Europe, Hémisphère occidental. C’était toujours vrai en 1986 surtout en Afrique et
dans la région Moyen-Orient et Europe. À partir de 1994, en revanche, les taux de change
flexibles l’emportaient dans toutes les régions.

Plusieurs facteurs expliquent cette tendance : les pressions inflationnistes dans ces
économies, les fluctuations des principales devises, mais aussi une volonté plus grande de
laisser jouer les mécanismes du marché dans un contexte d’intégration financière
internationale. Cette orientation des pays en développement et des économies en transition
vers des régimes plus flexible s’est accentuée depuis 1994.

La vison bipolaire des régimes de change (Fischer, 2001) distingue trois principaux
régimes de change : L’ancrage dur qui regroupe les pays sans monnaie indépendante et les
caisses d’émission. Les régimes intermédiaires dans lesquels on trouve les ancrages fixes
traditionnels, les régimes à bandes horizontales et les différents systèmes de parties
glissantes. Le flottement qui fait référence au flottement géré sans parité centrale prédéfinie et
au flottement libre.

37
 
 

Le concept d’approche bipolaire des taux de change est fondé sur un principe : les
régimes de change intermédiaires, c’est-à-dire, qui mettent en jeu une fixation provisoire du
taux de change ne sont pas viables. Les fixations de type intermédiaires sont incohérentes car
les autorités fixent le taux de change pour réduire le taux d’inflation, tout en ayant des
objectifs de politique économique (emploi, croissance) qui induisent un biais inflationniste à
la politique monétaire. Cette incohérence se traduit par une appréciation du taux de change
réel et, en conséquence, une perte de devises.

Une telle incohérence peut subsister s’il existe un contrôle des capitaux assez efficace
pour éviter la perte de réserves de change ou si la capacité d’endettement des autorités est assez
importante pour leur permettre de reconstituer celles-ci. La libéralisation générale des flux de
capitaux a accru les conséquences de l’incohérence des régimes intermédiaires et donc a
contribué à leur effondrement, le plus souvent au terme de crise spéculative (Crise mexicaine,
1994, la crise asiatique de 1998). Au cours des années 1990, trois faits stylisés ont été mis en
lumière par l’approche bipolaire : la baisse du nombre des régimes de change incluant une
stabilisation du taux de change en faveur de régimes plus flexibles, la réduction des régimes de
type intermédiaires en faveur des régimes extrêmes (fixes et flottants) et une crainte du
flottement libre (Calvo et Reinhart, 2002). Le premier et le deuxième fait stylisé s’expliquent
par la chute des régimes intermédiaires consécutive à l’accroissement de la mobilité des
capitaux. Le troisième provient de la réticence des autorités à laisser flotter le taux de change.

Le libre flottement du taux de change est cohérent avec une politique dévouée à la
réalisation d’objectifs locaux. Une telle orientation politique est sujette à un biais
inflationniste fondé sur des arbitrages à court terme entre activité et inflation. Ce type de
stratégie n’est pas dénué de coûts qui peuvent dissuader certains gouvernements de laisser
flotter le taux de change.

Sur la base de cette distinction, on observe un net mouvement des régimes de change
vers les solutions en coin (régime de change fixe et régime de change flexible) : 49 % ont
choisi le flottement en 2010 contre 14 % en 1990 ; 46 % ont adopté des ancrages durs en
2008 contre 30 % auparavant. La part des régimes intermédiaires passe de 27 % en 1990 à 3
% en 2010. (Figure 2).

38
 
 

Bénssy-Quéré et Coeuré (2000), en utilisant la méthode des moments généralisés,


estiment la stabilité du taux de change effectif d’un certain nombre de monnaies par rapport
aux trois principales devises susceptibles de servir d’ancrage. Les résultats de leur étude
offrent une vision du SMI très différente de la vision la plus souvent décrite. On n’observe pas
de mouvement vers d’avantage de flottement au détriment des ancrages sur le dollar. Ces
résultats sont cohérents avec ceux de Levy-Yeyati et Struzenegger (1999).

Figure 2. Distribution des régimes de change selon la classification du FMI (1974-2010) pour
tous les pays
 

80%

70%

60%
% des pays membres

50%

40%

30%

20%

10%

0%
1974 1980 1990 2000 2010

Fixe Intermédiaire Flexible

Source : calculs de l’auteur, Annual Report on Exchange Arrangements and Exchange Restrictions, divers
numéros ; FMI (2010), Statistiques financières internationales.

En effet, de nombreux pays choisissent d’accrocher leur monnaie à une devise. Ainsi
la moitié des pays membres du FMI a leur monnaie de fait ancrée sur le dollar alors que les
régimes de change déclarés suggèrent que cette proportion soit de 15 % ; d’autant plus que la
crise asiatique ne semble pas avoir modifié de manière significative la situation.

Masson (2000), dont l’analyse dynamique des transitions entre régimes, considère que
les régimes de change ne sont pas nécessairement stables au cours du temps. On observe ainsi
pour chaque économie l’alternance des différents régimes de change en fonction de
l’évolution des objectifs des autorités. La transition entre les régimes de change est

39
 
 

représentée comme un processus stochastique. Avec une telle approche, Masson remet
également en cause la thèse de l’«extinction» des régimes intermédiaires et confirme ainsi,
que l’hypothèse de la prééminence des solutions en coin n’est pas vérifiée empiriquement.

Conclusion  

Le système de change occupe une place importante dans la littérature économique


théorique et empirique. Mais, son identification n'est pas encore consensuelle. Pendant
longtemps, les déclarations des pays membres au FMI ont servi à élaborer la classification de
jure qui a ensuite été utilisée pour étudier le choix des régimes de change, leurs évolutions et
leurs effets économiques. Cependant, cette classification présente de sérieuses incohérences
dans la mesure où ce que les pays déclarent ne traduit pas toujours leurs pratiques. Or, les
effets macroéconomiques des systèmes de change alternatifs mis en évidence par la littérature
empirique dépendent étroitement de la façon dont les régimes sont classés (Goldstein, 2002;
Frankel, 2003; Tavlas et al., 2008). Cela implique donc que, si les régimes de change ne sont
pas correctement identifiés, les implications ou les recommandations de politiques tirées des
études basées sur ces régimes peuvent être trompeuses 26 . Une mauvaise identification
complique également la surveillance des politiques de change par le FMI en diminuant la
transparence des politiques de pays membres (Bubula et Ötker-Robe, 2002).

Les incohérences entre les régimes annoncés et ceux pratiqués ont contraint le FMI à
modifier son approche de sorte à intégrer les pratiques de change. Elles ont aussi conduit au
développement de nouveaux schémas d'identification appelés classifications de facto. Celles-
ci identifient de façon rétrospective les systèmes de change à l'aide des comportements
observés. La démarche de Reinhart et Rogoff utilise l'analyse statistique avec une information
factuelle historique permettant d'éviter des cas de classification controversés. En outre, la
proportion d'observations manquantes est relativement moins élevée dans la base de Reinhart
et Rogoff que dans celle de Levy-Yeyati et Sturzenegger.

Au demeurant, bien que les recherches empiriques effectuées à ce jour montrent que la
popularité des régimes intermédiaires a diminué dans les années 1990, nous ne pouvons pas

                                                            
26
L'hypothèse avancée par Obstfeld et Rogoff (1995) et Fischer (2001) selon laquelle les pays tendront vers les
régimes de change extrêmes est de plus en plus remise en cause (Frankel, 2003), notamment dans les pays en
développement.

40
 
 

en conclure que ces régimes soient en voie de disparition. L’hypothèse bipolaire paraît le
mieux fondée dans le cas des pays industrialisés, dont la plupart ont adopté un régime se
situant à l’un des deux extrêmes. Les régimes intermédiaires ont toujours la faveur des
économies émergentes, mais dans une moindre mesure qu’auparavant. En fait, la peur du
flottement est très répandue et touche même certains pays développés. Le classement
apparemment erroné d’une proportion des pays dans la catégorie des pays à régime de
changes flottants explique peut-être pourquoi certaines études menées antérieurement à partir
de la typologie officielle des régimes de change n’ont pas permis de détecter de différences
importantes, au chapitre de la croissance du PIB et de l’inflation, entre les régimes de changes
fixes et flottants.

41
 
 
 

Chapitre2 
Etude théorique et empirique du lien 
entre régime de change et croissance 
économique 

Introduction  

L’importance de la nature du régime de change émane du fait qu’il est susceptible


d’influer sur le comportement des variables économiques surtout l’inflation et la croissance
économique. Cependant, bien que les implications concernant l’inflation et la crédibilité
politique aient suscité une attention considérable, l’impact des régimes de change sur la
croissance a été l’objet de peu de travaux, probablement en raison du fait que la théorie
économique considère que le type de régime de change ne doit pas avoir d’incidence sur les
valeurs d’équilibre à long terme des variables réelles, mais sur le processus d’ajustement27.

Comme il a été souligné, la détermination adéquate des coûts et des bénéfices des
régimes de change est l’un des sujets les plus controversés. La littérature théorique s’est
concentrée sur le compromis entre l’indépendance et la crédibilité monétaire impliquées dans
les différents régimes de change, de même que sur les propriétés d’isolement de chaque
arrangement face aux chocs monétaires et réels.

Les récents épisodes de la crise financière ont renforcé la question, en s’interrogeant


sur le meilleur régime de change qui pourrait convenir face l’accroissement global et instable
des marchés internationaux de capitaux. Ainsi, en donnant une importance croissante aux flux
internationaux de capitaux et à la prédominance des chocs extérieurs sur les chocs monétaires
domestiques, le traditionnel compris s’est réduit au dilemme de stabilité des prix-croissance
suivant lequel la rigidité améliore la crédibilité de politique monétaire non inflationniste, en
                                                            
27
Par exemple, Helpman (1981) et Lucas (1982) ont montré, à partir de modèles supposant une clairvoyance
parfaite des agents, que le type de régime n’influe pas sur l’affectation optimale des ressources à long terme.
D’autres, comme Mundell (1968), ont souligné que, même si la situation d’équilibre à long terme est la même
dans les deux cas, le processus d’ajustement sera différent selon que te taux de change est fixe ou flottant.

42
 
 

réduisant l’inflation, et la volatilité des variables nominales, tandis que le flottement semble
permettre les ajustements nécessaires des prix aux chocs extérieurs (réels ou financiers), pour
réduire les fluctuations de la production et améliorer la croissance.

À une époque où les pays sont liés de plus en plus étroitement les uns aux autres par
les flux commerciaux et financiers, le fonctionnement du régime de change devient une
dimension essentielle de la politique économique. La question est de savoir dans quelle
mesure les résultats économiques d’un pays et la manière dont les politiques monétaires et
budgétaires influent la croissance dépendent du régime de change.

En pratique, le choix entre taux de change flottant et taux de change fixe n’est pas
toujours très clair. Il existe ainsi une abondante littérature théorique sur ce sujet et de
nombreux tests empiriques ont été effectués également. Les études empiriques ont surtout
essayé d’expliquer pourquoi dans l’histoire du Système Monétaire International (SMI), les
pays sont passés d’un régime de taux de change fixe à un système de change flottant. C’est le
cas par exemple d’Eichengreen (1995) qui s’est attaché à faire la lumière sur les changements
intervenus dans le temps sur le régime du taux de change dominant. Certains autres auteurs
ont plutôt cherché à élucider les attentes et les réalisations relatives aux régimes de taux de
change flottants institués dès le début des années 70 (Frankel et Dornbush, 1993) en mettant
l’accent sur les hypothèses qui régissent son fonctionnement et aussi sur les résultats observés
dans la pratique.

Le développement de cette section comprend principalement les hypothèses théoriques


avancées par les partisans des différents régimes du taux de change. La question fondamentale
est évidemment celle du meilleur régime de taux de change, surtout pour les pays en
développement. Cette question a donné naissance à plusieurs courants de pensées
controversées. Les principaux termes de désaccord sont de trois ordres :

 La stabilité ou l’instabilité des prix et des marchés.


 L’indépendance ou la coopération.
 L’ajustement macroéconomique : les objectifs en termes réels ou nominaux.

43
 
 

1. Régimes de change et performance économique : cadre théorique 

1.1. Régimes de change et performance en termes d’inflation


 

Un bref aperçu de la littérature suggère que l’association typique des régimes du taux
de change fixe à des faibles taux d’inflation est basée premièrement sur la conviction que le
rattachement (ancrage) va jouer le rôle d’un mécanisme d’engagement pour les autorités
monétaires. D’autant plus qu’une politique monétaire expansionniste est à long terme
incompatible avec un taux de change fixe et que le fait de déroger à cet engagement est
préjudiciable politiquement pour les autorités28.

À cet effet, qui s’exerce entièrement à travers les agrégats monétaires, la littérature
ajoute l’impact potentiel d’un arrimage crédible sur les anticipations inflationnistes qui peut
stabiliser la vitesse de circulation de la monnaie et réduire la sensibilité des prix à des
expansions monétaires temporaires. De cette façon, le régime de taux de change fixe est
supposé affecter le lien entre monnaie et prix. De la même manière, particulièrement dans les
cas où l’indexation au dollar est large, un rattachement crédible peut aider à réduire l’inertie
inflationniste en plaçant une limite aux anticipations de dévaluation.

La stabilité des prix est l’un des premiers arguments avancés par les défenseurs des
taux de change fixes. Tandis que ces derniers mettent en avant l’hypothèse d’une instabilité
des prix et des marchés sous un régime de taux flottants, les partisans des régimes de change
flottants soutiennent quant à eux que la spéculation aurait des effets stabilisants (Friedman,
1953).

Les partisans des régimes de taux de change fixes s’inquiètent surtout des effets que la
spéculation pourrait engendrer sur un système de taux de change flottants. Nurske (1945) a été
le premier à souligner l’instabilité potentielle des régimes de taux de change flottants. En
effet, il estime que la spéculation engendrerait d’importantes fluctuations de la valeur des
monnaies locales, causées par des perturbations excessives des marchés des taux de change.
Par ailleurs l’incertitude née du flottement des taux de change pourrait freiner le commerce
extérieur ainsi que les investissements directs étrangers (IDE).

                                                            
28
Voir Romer. D (1993) et Quirk. P (1994).

44
 
 

Cet argument semble être vérifié pour les pays en développement. Frankel (1995) et
Calvo et Reinhart (2000) montrent que la variabilité des taux de change exerce un impact
négatif sur les échanges extérieurs de ces pays. Pour contrer cet argument, les partisans des
régimes de taux de change flottants proposent trois mécanismes à travers lesquels la
variabilité des taux de change ne constituerait pas un inconvénient (Friedman, 1953 ; Frankel
et Dornbush, 1993).

Premièrement, la spéculation aurait un effet stabilisateur plutôt que déstabilisateur, car


les variations des taux de change seraient moins accentuées que ce qu’elles auraient été en
l’absence de la spéculation. Deuxièmement, ils estiment que les anticipations sont
rationnelles. En d’autres termes, les taux de change ne s’envoleraient pas de façon
discontinue. Troisièmement, les taux de change devraient être aussi stables que les
fondamentaux macroéconomiques, puisque le taux de change est lié à la politique monétaire.

Enfin de compte, il règne une forte conviction que le taux de change de long terme
serait déterminé par le niveau des prix relatifs, c’est à dire, la parité des pouvoirs d’achat.
Cependant les défenseurs des régimes de taux de change fixes répliquent en avançant que les
prix répondent extrêmement lentement aux conditions d’excès d’offre. Le retour du taux de
change réel à son niveau d’équilibre de long terme ne serait ainsi pas rapide. En ce qui
concerne l’argument fondé sur les anticipations rationnelles, les défenseurs des changes fixes
soutiennent que les régimes politiques en place seraient de nature à influencer la manière dont
le secteur privé détermine les prix et les salaires. Le résultat final des anticipations
rationnelles serait un taux d’inflation élevé que l’économie observerait en permanence, sans
aucune garantie d’atteindre ses objectifs réels. Dès lors, les régimes de taux de change fixes
paraissent supérieurs aux autres, car il n’y aurait ni spéculation ni anticipation.

1.2. L’indépendance ou la coopération

L’indépendance est une question cruciale pour les défenseurs des régimes de taux de
change flottants. La logique qui se trouve dernière cette idée repose principalement sur le
désir de souveraineté, tant économique que politique.

Selon Mussa (1995), toutes les nations du monde expriment leur autorité souveraine
en entretenant une monnaie distincte et en protégeant son utilisation à l’intérieur de leur

45
 
 

juridiction. Ce dernier estime qu’une monnaie est comparable à un drapeau, chaque pays
devrait avoir la sienne. Dans un cadre purement économique, cette souveraineté se traduit par
une liberté d’actions individuelles et pour des intérêts personnels, de sorte que les politiques
économiques et les taux d’inflation divergent à travers les pays.

Le résultat économique de l’ensemble serait meilleur qu’en les mettant tous sous le
contrôle d’un même processus politique centralisé. L’alignement du niveau des prix et de la
politique macroéconomique sanctionne les pays par des déficits budgétaires s’ils mènent une
politique plus expansionniste que leurs voisins. Cette pénalité est supposée être minimum
sous un régime de taux de change flottants. De plus, la transmission internationale des
perturbations est moindre et les pays ont un besoin moindre d’une coordination de politiques
divergentes.

Un régime de change fixe ne serait désirable que si les pays considérés constituent une
zone monétaire optimale 29 (ZMO), c'est-à-dire si la flexibilité des prix et la mobilité des
facteurs sont en mesure d'absorber les perturbations économiques sans qu'il soit nécessaire de
recourir à un ajustement du taux de change nominal (Lahrèche-Revil, 1999).

Mundell (1961) présente le degré de mobilité des facteurs de production comme


principal déterminant d’une zone monétaire optimale. Selon Mundell (1961), la mobilité des
facteurs de productions, et plus précisément du facteur travail, constitue un mécanisme naturel
permettant un retour à l’équilibre initial suite à un choc perturbateur. Ainsi, si un choc
asymétrique (interne ou externe) affecte deux économies liées par un processus d’intégration,
et en l’absence du mécanisme correcteur qu’est le taux de change, l’ajustement ne s’effectuera
qu’en présence d’une forte mobilité des capitaux et de la main d’œuvre et/ou une forte
flexibilité des prix et des salaires. Dans le cas contraire, où la mobilité des facteurs est faible
et la rigidité des salaires est faible les pays auront beaucoup plus de difficulté à faire face aux
chocs macroéconomiques, la perte de l’instrument du taux de change par une constitution
d’une zone monétaire sera alors fortement préjudiciable (Mohamed Daly, 2007).

                                                            
29
 Mundell (1961) et Mckinnon (1963) sont à l’origine de l’idée d’une zone monétaire optimale (ZMO). Par
définition, une ZMO est une région composée de plusieurs pays utilisant une monnaie unique et régie par un
système de taux de change fixe qui en garantit la convertibilité. Naturellement, l’optimalité de la zone dépend
d’un certain nombre de conditions relatives à l’emploi, aux paiements extérieurs ainsi qu’au niveau des prix
internationaux.

46
 
 

McKinnon (1963), a développé par la suite la deuxième contribution majeure des


zones monétaires optimales en introduisant le critère de l’ouverture économique d’un pays ou,
formulé autrement, le ratio des échangeables sur les non échangeables. Selon McKinnon, les
coûts liés à l’abandon du taux de change comme instrument de politique économique
diminuent en fonction du degré d’ouverture des économies et de l’importance de leurs
échanges réciproques. L’auteur fait ainsi valoir qu’une économie ouverte à intérêt à participer
à un régime de taux de changes fixes, afin d’éviter les fluctuations des prix relatifs entre biens
échangeables et non échangeables, pour deux principales raisons (Mohamed Daly, 2007).
D’abord, les variations de change affectent fortement le rapport du prix des échangeables à
celui des non échangeables. Ainsi, plus grand sera le degré d’ouverture de l’économie et plus
grandes seront les répercussions des variations du taux de change sur les prix domestiques, la
fixité du taux de change entre monnaies permet alors de réduire ou de faire disparaître ce qu’il
appelle l’illusion monétaire. McKinnon souligne ensuite que la politique de change a tendance
à perdre de son efficacité avec le degré d’ouverture de l’économie puisque les effets attendus
d’une dévaluation (baisse des importations, hausse des exportations) seront plus limités si
l’économie est plus ouverte.

Il ressort de l’analyse de Kenen (1969) que des pays aux productions diversifiées
peuvent plus facilement adopter des changes fixes ou s’intégrer à une zone monétaire
optimale. Inversement, les économies plus spécialisées auraient plus intérêt à laisser flotter
leurs monnaies pour être capables de faire face à un choc à la demande par une stimulation
des exportations au moyen d’un ajustement du taux de change.

1.3. Ajustement macroéconomique

L’ajustement macroéconomique s’opère à deux niveaux : un ajustement externe et un


ajustement interne.

1.3.1. Au niveau extérieur: stabilité ou équilibre

L’ajustement externe invoque l’équilibre de la balance courante et la stabilité de


l’environnement macroéconomique, deux phénomènes qui ne sont pas toujours compatibles.
La question qui demeure est celle de savoir quoi privilégier de la stabilité ou de l’équilibre.
Au niveau macroéconomique, trois avantages principaux sont attendus d’un régime de taux de
change flottant. Ce sont:
47
 
 

 l’équilibre de la balance des comptes courants.


 l’inutilité de détenir des réserves de change extérieures.
 enfin, un équilibre macroéconomique tant au niveau intérieur qu’extérieur.

Le premier avantage découle du fait que le taux de change flottant n’autorise qu’un
minimum de déficit commercial. On suppose, en effet, que la non-intervention de la banque
centrale sur le marché de change extérieur engendre une balance courante équilibrée, par un
ajustement automatique des taux de change au niveau qui égalise l’offre et la demande.

En deuxième lieu, le pays n’a ni besoin de garder des réserves, ni de les utiliser étant
donné l’engagement de la banque centrale de ne pas intervenir sur le marché des changes
extérieurs. Les réserves extérieures dans ces conditions sont inutiles à la banque centrale.

Quant au troisième avantage, il traduit simplement le fait que, sous un régime de taux
de change flexible, il n’y a pas de conflit entre l’équilibre de la balance courante et les
objectifs de la politique intérieure. L’ajustement automatique du taux de change (pour égaliser
l’offre et la demande de change) devait conduire à une balance courante sans contraintes sur
les instruments de la politique intérieure.

Pour contrecarrer ces arguments, les avocats des régimes de taux de change fixes
avancent que la rigidité des taux de change crée un environnement plus stable pour la
croissance du commerce mondial ainsi que de l’investissement international. Dans le cas d’un
pays spécifique, ceci se traduirait par un volume plus important d’échanges extérieurs et aussi
des flux d’investissements étrangers. L’argument principal qui soutient cette hypothèse repose
sur la certitude des rendements de l’investissement face à l’absence des fluctuations du taux
de change.

En ce qui concerne le conflit entre l’équilibre interne et l’équilibre externe, les


défenseurs des régimes de taux de change fixes estiment que les contraintes que la balance
courante impose sur l’équilibre interne doivent être considérées comme un acquis du système.
En fait, la discipline imposée par la balance courante aux décideurs politiques devrait agir
comme un autre contrepoids vis-à-vis des tendances inflationnistes des gouvernements.

48
 
 

1.3.2. Au niveau intérieur: des objectifs réels ou nominaux

La question qui se pose ici est celle de savoir lequel des deux indicateurs du taux de
change effectif réel et nominal choisir comme cible ou instrument de la politique économique
pour la réalisation de l’équilibre interne.

Les économistes libéraux estiment que les taux de change flottants permettent d’isoler
le pays des chocs extérieurs. Supposons un pays et une situation où la balance des opérations
courantes est en équilibre, une récession économique à l’étranger (ou une baisse du revenu à
l’extérieur) engendrerait nécessairement un déclin de la demande d’exportations du pays. La
diminution résultante de l’offre d’exportations engendrera une balance des comptes courants
déficitaire si ce pays entretient un régime de change fixe. Il connaîtra en outre une diminution
de son revenu intérieur causée par l’effet de la variation des exportations sur le multiplicateur
du revenu. L’économie nationale sombrera elle aussi dans une récession économique. Si au
contraire, le taux de change est déterminé par le marché, son niveau s’élèvera de manière à
égaler les offres et les demandes sur le marché de change extérieur et enrayer le déficit. Ceci
adoucirait l’impact de la perturbation extérieure sur les exportations et la demande agrégée.

Quant aux défenseurs des régimes des taux fixes ils estiment qu’en réalité, les prix
intérieurs sont parfois rigides à la hausse comme à la baisse, c’est la raison pour laquelle ils ne
font pas confiance à l’environnement macroéconomique pour entrainer la variation du taux de
change requise après un choc sur le système. En plus, les adeptes des changes fixes
considèrent qu’une telle protection n’est pas suffisante car le pays ne sera préservé que des
chocs de la demande par ce mécanisme et non pas des chocs d’offre. La meilleure politique,
selon les partisans des changes fixes serait de réduire ou de modifier la nature des dépenses
pour maintenir l’équilibre de la balance courante. L’équilibre interne et externe peut être ainsi
réalisé par la politique fiscale.

Cette dernière comprend la réduction des dépenses et des investissements publics et


aussi du secteur privé, par une augmentation des taxes et des restrictions sur les salaires et sur
les crédits bancaires. Selon Krugman (1989), la dévaluation et la politique fiscale peuvent être
combinées toutes les deux, parce que la politique fiscale visant à baisser le niveau des
dépenses n’est pas toujours supportable socialement.

49
 
 

Par ailleurs, la réduction des dépenses est susceptible d’engendrer une récession
économique interne, parce qu’elle peut provoquer le déclin du PIB et par ricochet l’apparition
du chômage. Au contraire, une dévaluation de la monnaie nationale aboutirait à un coût social
et économique moindre grâce à une réallocation des dépenses. Une telle politique peut avoir
comme résultats une expansion des exportations et des industries de substitution aux
importations. Puisque les prix et les salaires sont supposés croître, la politique fiscale est par
conséquent nécessaire pour empêcher toute appréciation du taux de change réel et éviter que
le pays ne tombe dans un cercle vicieux. Ce mécanisme d’ajustement est décrit comme étant
l’approche par les objectifs réels (real target approach, Corden, 1990), par opposition à
l’approche par les objectifs nominaux (nominal target approach) qui intéresse principalement
les supporters des régimes de taux de change flottants.

Ces derniers rejettent la supposée efficacité de l’ajustement par le taux de change


nominal. Ils critiquent l’effectivité d’une dévaluation du taux de change nominal sur la
dépréciation du taux de change réel. Ils estiment qu’une telle politique peut être efficace à
court ou à moyen terme, mais que les coûts de l’inflation à long terme seront plus élevés que
les gains économiques de la dévaluation. La meilleure solution pour passer des fluctuations du
taux de change aux prix intérieurs résiderait dans l’ouverture commerciale et l’indexation
effective des prix des biens intérieurs sur la valeur de la monnaie.

En ce qui concerne les régimes de change intermédiaires ou de marges de fluctuation,


ils tentent de préserver un certain degré de flexibilité du taux de change pour promouvoir
l’ajustement de prix relatif en conservant le rôle du taux de change comme ancrage nominal.
Plus spécifiquement :

 Par rapport aux régimes de change fixe ou de rattachement du taux de change, les
régimes intermédiaires permettent au taux de change de s’ajuster aux variations
temporaires des prix relatifs et préservent un certain degré d’autonomie monétaire,
dont l’importance dépend positivement de la largeur de la marge.

 Par rapport aux régimes de taux de change flexible, les régimes de change
intermédiaires, en contraignant la marge de fluctuation du taux de change nominal,
continuent de fournir un certain ancrage nominal au niveau des prix intérieurs, lequel
dépend maintenant négativement de l’étendue de la marge.
50
 
 

Un autre avantage du régime de marge de fluctuation est qu’il tendrait à stabiliser le


taux d’inflation intérieur par rapport à ce qu’on aurait observé sous un régime de taux de
change fixes si l’inflation des pays partenaires est fortement instable. La mesure dans laquelle
un régime intermédiaire ou de marges de fluctuation réussit à stabiliser le taux de change
nominal dépend de sa crédibilité.

Comme l’a démontré Krugman (1991), dans un régime de marges de fluctuation


parfaitement crédible où l’intervention n’a lieu qu’aux bornes extrêmes de la marge, le taux
de change nominal sera plus proche du taux pivot que celui qu’il l’aurait été sous les taux de
changes flexibles, même sans intervention. Par conséquent, la simple présence d’une marge
de fluctuation annoncée peut être stabilisante. Cependant, il est important de souligner que la
mesure dans laquelle les autres avantages présumés se concrétiseront ou non dépend de façon
cruciale de la manière dont la marge est gérée.

 Si la banque centrale intervient de façon à conserver le taux de change très proche du


taux pivot, ou lui permettre de demeurer continuellement à la borne supérieurs ou
inférieure de la marge, le régime de marge se comportera comme un régime de taux
de change fixe, ne fournissant donc pas de possibilité aux ajustements de prix relatifs
et pas d’autonomie monétaire.

 Si la parité du taux pivot est déterminée pour maintenir par exemple, le taux de change
réel constant, l’ancrage nominal de l’économie devra être fourni par l’offre de
monnaie, comme dans le cas des taux flexibles.

Ainsi les régimes intermédiaires ou de marges de fluctuation auraient concilié les


avantages des deux régimes extrêmes, à savoir la crédibilité et la flexibilité ou l’ajustement.
Mais il est établi depuis longtemps qu’un pays résolu à garantir la liberté des mouvements de
capitaux (ou incapable de contrôler efficacement ces mouvements) ne peut pas à la fois fixer
son taux de change (à une valeur précise ou dans une fourchette étroite) et avoir une politique
monétaire indépendante (c’est la trinité impossible). Tôt ou tard, il se trouvera dans des
situations inextricables qui le contraindront à abandonner l’un de ces deux objectifs. Une des
solutions consisterait à fixer définitivement la parité, en mettant en place une caisse
d’émission ou en adoptant la dollarisation au détriment de l’autonomie monétaire. L’autre

51
 
 

serait d’adapter un flottement intégral du taux de change, si bien que la politique monétaire
n’aurait plus à se soucier de défendre telle ou telle parité.

On considère que l’effondrement du système de parités ajustables de Bretton Woods,


la crise 1992-1993 du mécanisme de change du Système Monétaire Européen et les récentes
crises des pays émergents (Mexique, la Thaïlande, l’Indonésie, la République de Corée, la
Fédération de Russie et le Brésil) sont dus au fait qu’on ne peut pas simultanément libéraliser
le compte capital, avoir un objectif de taux de change et mener une politique monétaire
indépendante.

Le fait que ces pays aient par la suite adopté un régime de taux de change flottants
confirmerait que les régimes intermédiaires ne sont pas viables pour des pays très intégrés
dans le système financier mondial. Telle est l’opinion prédominante dont se prévalent les
défenseurs de l’hypothèse bipolaire dont Obstfeld et Rogoff (1995) et Eichengreen (1998)
ainsi que Fisher (2001). En résumé chacun de ces régimes de change présente des avantages
et des limites et comme l’a affirmé Frankel (1999), il n’existe pas un régime de change
valable à tout moment pour tous les pays. Tout dépend des caractéristiques particulières à
chaque pays.

52
 
 

Tableau 4: Déterminants du choix d’un régime de change


 
Caractéristique de l’économie Implication pour la flexibilité souhaitée du taux de
change
*Dimension de l’économie Plus l’économie est grande, plus un taux flexible se justifie.
*Ouverture Plus l’économie est ouverte, moins un taux flexible est
attrayant.
*Diversification de la production et des Plus l’économie est diversifiée plus un taux flexible est
exportations pratique.
*Concentration géographique des échanges Plus la proportion des échanges d’une économie avec un
grand pays est forte, plus il est intéressant de déterminer le
taux de change par rapport à la monnaie de ce pays.
*Ecart entre l’inflation intérieure et l’inflation Plus l’écart entre l’inflation d’un pays et celle de ses
mondiale principaux commerciaux est élevée, plus il est nécessaire
d’ajuster fréquemment le taux de change. (Mais en cas
d’inflation extrêmement élevée. Un taux de change fixe
peut conduire à une plus grande rigueur économique et
renforcer la crédibilité d’un programme de stabilisation.)
*Développement économique et financier Plus le degré de développement économique et financier est
élevé, plus il est pratique d’appliquer un régime de taux
flexible.
*Mobilité de la main-d’œuvre Plus la main-d’œuvre est mobile, lorsque les salaires et les
prix sont rigides à la baisse, moins il est difficile (et
coûteux) de s’ajuster à des chocs extérieurs à l’aide d’un
taux fixe.
*Mobilité du capital Plus le capital est mobile, plus il est difficile de maintenir
un régime de taux fixe mais ajustable.
*Chocs nominaux extérieurs Plus les chocs nominaux extérieurs sont fréquents, plus il
est souhaitable d’appliquer un taux flexible.
*Chocs nominaux intérieurs Plus les chocs nominaux intérieurs sont fréquents, plus il est
intéressant d’appliquer un taux fixe.
*Chocs réels Plus une économie est vulnérable aux chocs réels, extérieurs
ou intérieurs, plus un taux flexible est avantageux.
*Crédibilité des autorités Moins la politique anti-inflationniste des autorités est
crédible, plus il est intéressant d’utiliser un taux fixe comme
point d’ancrage nominal.
Source : Perspectives de l’économie mondiales 1997.

53
 
 

1.4. Régimes de change et croissance économique

Bien que la théorie économique indique que le choix du régime de change a un effet
sur la croissance, elle ne permet pas d’établir clairement quel régime lui est le plus favorable.
Les quelques études théoriques qui ont abordé jusqu’ici la question ont porté sur des concepts
indirectement liés à la croissance, comme la croissance des exportations ou les crises de
change.

Certains font valoir qu’un régime de changes flottants peut favoriser la croissance en
permettant à une économie caractérisée par une rigidité des prix et des salaires nominaux
d’amortir les chocs économiques et de s’y ajuster plus facilement, grâce au rôle de tampon
joué par les fluctuations du taux de change. De plus, un taux de change flottant permet à un
pays de mener une politique monétaire indépendante, ce qui lui laisse un autre moyen pour
absorber plus facilement les chocs internes et externes. Une économie qui s’ajuste plus
facilement aux chocs devrait jouir d’une croissance de la productivité plus élevée, compte
tenu du fait qu’elle tourne en moyenne plus près des limites de sa capacité.

D’autres soutiennent qu’en régime de changes flottants, les chocs de taux de change
sont plus nombreux, ce qui peut freiner la croissance économique. De plus, selon certains
auteurs, nombre d’économies en développement et à marchés émergents ne peuvent appliquer
une politique monétaire indépendante en raison de l’adoption de politiques
macroéconomiques discutables. Ils auraient avantage à arrimer leur taux de change à une
monnaie forte.

L’effet du type de régime de change sur la croissance d’un pays peut dépendre du
degré d’ouverture d’une économie à l’égard des marchés internationaux de capitaux et au
commerce international. Selon la théorie de la croissance endogène, les pays qui s’ouvrent le
plus sur l’extérieur connaissent une plus forte croissance de la productivité totale des facteurs
que ceux qui refusent la compétition internationale parce qu’ils absorbent plus vite et avec
d’avantage d’efficience les innovations technologiques développés à l’étranger et tire
avantage de l’élargissement des marchés (Edwards, 1993).Bien que le lien entre le commerce
international et la croissance ait davantage retenu l’attention des chercheurs, l’ouverture aux
flux de capitaux internationaux peut aussi favoriser la croissance en suscitant une hausse du
rythme des investissements intérieurs et de l’intermédiation financière dans le pays et en

54
 
 

générant des investissements qui ont des retombées positives. Par conséquent, le type de
régime de change pourrait influer sur la croissance par l’entremise de ses effets sur le niveau
des échanges extérieurs et des flux de capitaux internationaux.

La littérature consacrée au sujet donne à penser que le niveau des échanges extérieurs
est influencé par le type le régime de change, mais elle n’établit pas clairement quel régime
favorise le plus le commerce international. Certains auteurs sont d’avis que le niveau des
échanges extérieurs tend à être plus élevé en régime de changes fixes car la plus faible
volatilité du taux de change réduit l’incertitude, ce qui diminue les coûts liés aux échanges et
augmente donc leur niveau. D’autre avancent que les régimes de changes flottants favorisent
davantage les exportations en réduisant la probabilité de déséquilibres durables du taux de
change.

Concernant le lien entre le type de régime de change, le degré d’ouverture à l’égard


des marchés financiers internationaux et la croissance, plusieurs économistes avancent que les
flux de capitaux pourraient favoriser la croissance en régime de changes flottants, du fait
qu’un régime de change plus rigide entraînerait une augmentation des flux de capitaux
spéculatifs.

Les effets du régime de change sur la volatilité de la production sont tout aussi
ambigus. Certains auteurs comme Baxter et Stockman (1989) ou Flood et Rose (1995)
concluent à l'absence d'un impact systématique et différencié du régime de change, alors que
d'autres à l'instar de Ghosh et al. (1995) soutiennent le contraire. Les taux de change flexibles,
parce qu’ils facilitent les ajustements des prix et des salaires réels, sont généralement
supposés engendrer des volatilités inférieurs sur les quantités. Mais attendu que les forces
spéculatives font du taux de change nominal une source indépendante de volatilité, un taux de
change flexible peut également exacerber les variations de la production et de l’emploi.

2. Analyse empirique du lien entre régimes de change et croissance 

A partir des années 1970 et surtout durant les années 1980, le nombre et la diversité
des expériences ont permis aux chercheurs d’utiliser de larges échantillons pour évaluer la
performance économique sous différents systèmes de taux de change.

55
 
 

Edwards (1993) a utilisé un échantillon de 52 pays, pour s’assurer si le régime de


change fixe conduit vraiment à des taux d’inflation plus faibles que le régime de change
flexible. Le problème est que seuls les pays qui ont bien défendu leurs arrimages sont inclus
dans la catégorie des régimes de change fixes. D’un autre côté, les pays qui ont adopté un
régime de change fixe mais n’ont pas pu le soutenir sont toujours classés dans la catégorie des
pays ayant un régime de change flexible. Ceci signifie que les taux d’inflations élevés générés
par les « crashes » de taux de change sont incorrectement (ou injustement) attribués aux
systèmes de change flexibles.

Ce problème a été aussi noté par Aghevli et al (1991), qui après avoir soutenu que « la
performance en terme d’inflation des pays qui ayant opéré sous des régimes de change fixe
était, dans l’ensemble, supérieure à celle du groupe de pays ayant opté pour des
arrangements plus flexibles», ont ajouté que ce type de conclusion « néglige l’expérience des
pays qui ont adopté initialement un système de rattachement, mais étaient forcés de
l’abandonner». Edwards (1993), a abordé ce problème en examinant si, après le contrôle
d’autres variables, les pays qui ont fixé leur taux de change durant la première année 1980 de
la décennie, avaient un faible taux moyen d’inflation pour la période dans sa totalité. Il
affirme ainsi que les pays adoptant un régime de taux de change fixe ont connu un faible taux
moyen d’inflation (le coefficient de la régression de la variable dummy associée au taux de
change fixe en 1980 était – 0.7).

Little, Corden, Cooper et Rajapatriana (1993) ont procédé à des recherches au sein
d’un groupe de 18 pays émergents pour vérifier si les régimes de change fixes limitaient
l’inflation. Après avoir observé les données sous différents angles, ils sont arrivés à une
conclusion, qui malgré sa clarté, reste sans valeur et ne peut être en aucun cas généralisée.
Ainsi, il a été établi que dans certains pays le taux de change fixe est associé à de faible taux
d’inflation alors que dans d’autres, ce taux était clairement un « point d’ancrage nominal »
non effectif. De plus, ils affirment que toutes les analyses sur le lien présumé entre régime de
change et performance doivent tenir compte du rôle de la mobilité du capital. Ils suggèrent
que leur conclusion serait plus pertinente pour les pays où la mobilité du capital revêt un
caractère un peu limité.

Une des études multi-pays les plus importantes a été conduite par Ghosh et al (1997).
Elle examine les effets des régimes de change sur l’inflation et la croissance en utilisant des

56
 
 

données de 140 pays durant la période 1960-1990. De l’étude il résulte que le taux d’inflation
est, en effet, significativement faible et moins volatile dans les pays où les taux de change
sont fixes que dans les pays avec régimes de change plus flexibles, même après avoir contrôlé
les effets de l’accroissement monétaire et des taux d’intérêt.

Concernant la croissance de la production, cependant, l’étude trouve peu de


différences systématiques entre les régimes de change, excepté le fait que l’accroissement de
la production (et de l’emploi) est plus volatile sous les régimes de changes fixes que sous les
régimes flexibles. Le résultat qu’ils suggèrent est que la corrélation positive entre flexibilité
du taux de change et inflation, détectée dans cette étude, ne peut pas être ni déterminante ni
généralisée.

Une étude plus récente du FMI, qui prolonge la période d’analyse jusqu’au milieu des
années 1990 arrive à des conclusions similaires. Mais il n’y a pas de différence claire en
terme de performance de croissance (FMI, 1997). Quoique ces conclusions soient basées
plutôt sur des simples comparaisons de l’évolution des taux moyens de l’inflation et de la
croissance de la production dans les pays avec régimes de change flexibles et fixes de 1975 à
1996, cette étude suggère que les importants résultats trouvés par Ghosh et al (1997) ne sont
pas largement affectés par l’accès croissant aux marchés internationaux de capitaux des pays
en développement dans les années 1990. En effet, il apparaît que les écarts en matière de
performance macroéconomique entre les régimes de change des pays en développement
continuent à se superposer avec les différences en termes d’inflation des pays dans chaque
groupe et que ces écarts semblent être moins importants à travers le temps.

La plupart des travaux empiriques réalisés jusqu’ici se sont intéressés aux


répercussions potentielles du choix du régime de change sur l’inflation et la variabilité de la
production30. Dans ce qui suit, nous allons procéder à une revue des études consacrées à la
question portant aussi bien sur un seul pays que sur plusieurs. En second lieu, nous allons
présenter les différentes étapes des études qui ont examiné les effets de ce choix sur la
croissance économique d’une part et leurs résultats d’autre part.

                                                            
30
Voir Edwards et Savastrano (1999).

57
 
 

Après le rappel des résultats empiriques antérieurs et la motivation de notre travail,


nous présentons les modelés qui serviront à notre analyse économétrique. A la suite de cette
étape, la méthodologie d'estimation sera introduite et les résultats obtenus seront discutés.

2.1. L’étude de Ghosh et al (1997)

Dans une importante étude sur les performances macroéconomiques des différents
régimes de change, Ghosh et al (1997) ont utilisé une classification basée à la fois sur les
déclarations de jure et l’observation du comportement des taux de change. Les auteurs
soulignent que même si la classification de facto par l’analyse des données statistiques
présente l’avantage de détecter le comportement effectif des taux de change, elle ne permet à
elle seule de distinguer la stabilité des taux de change qui proviendrait de l’absence de chocs
notables de celle qui résulterait de réponses de politiques monétaires adéquates, de bonnes
performances macroéconomiques ou encore d’une confiance accrue31 de la part des marchés.
Par ailleurs, et comme l’ont montré Calvo et Reinhart (2000), les classifications de jure
contiennent souvent des régimes « déguisés ».

Ghosh et al (1997), ont classé les régimes de change en trois catégories: fixes,
intermédiaires et flexibles. Les régimes de change fixes incluent les rattachements à une
devise, aux DTS, à un panier de devises (publié) et à un panier secret, d’un côté. D’un autre
côté, la catégorie des régimes intermédiaires comprend les régimes coopératifs, les
flottements inclassables et les flottements avec bande prédéterminée. Tandis que celle des
régimes flottants englobent les flottements sans bande prédéterminée et les flottements purs.

Ghosh et al (1997) ont utilisé un échantillon couvrant 140 pays pour la période 1960-
1990 et, au-delà de la simple dichotomie entre régimes fixes et flexibles, ont combiné la
classification de jure du FMI avec une analyse statistique du comportement des taux de
change et des fréquences de changement dans les parités pour distinguer entre les régimes où
les interventions sont fréquentes (plus d’une modification par an) et les régimes où elles sont
peu fréquentes. La classification de Ghosh et al (1997) a fait ressortir 25 catégories de
régimes de change puis elle a été affinée pour ensuite, ne distinguer que 9 rubriques allant de
l’ancrage par rapport à une seule monnaie au flottement pur tout en passant par de nouvelles
                                                            
31
Voir aussi Bénassy-Quéré et Coeuré (2000) ou Bailliu, La france et Perrault (2002)

58
 
 

catégories telles que les arrimages par rapport à un panier non divulgué «Secret Basket Pegs»
ou les «systèmes coopératifs». Il importe de souligner que le contenu informationnel de cette
classification «hybride» a pour une grande part, contribué dans la construction de la
nomenclature de la classification actuelle de facto du FMI. La classification de Ghosh et al
(1997) présente cependant certaines limites dont la plus importante est sans doute qu’elle ne
distingue pas entre les arrimages souples et des formes d’ancrages plus rigides et qu’elle place
certains pays dans une rubrique «non classifié».

Les auteurs ont aussi testé la relation entre le choix du régime de change et la volatilité
macroéconomique mesurée par la variance du taux de croissance du PIB et par la variance du
niveau de l’emploi. Les auteurs ont neutralisé les effets possibles de l’incidence de chocs en
introduisant dans leurs régressions des variables de contrôle reflétant le niveau du
développement des pays, la volatilité des termes de l’échange, des dépenses publiques, de
l’investissement et du taux de croissance du commerce extérieur pour montrer que le produit
et l’emploi ont été plus variables pour les régimes fixes que sous les régimes intermédiaires
ou de flottement et que cette forte variabilité n’est en aucune manière liée aux chocs
susceptibles de toucher l’économie.

L’analyse montre que les pays avec un régime intermédiaire affichent une meilleure
performance en terme de croissance comparée à celle des pays avec régime de change fixes,
ce qui peut être attribuée à la rigidité des taux de change qui ne peuvent pas être utilisés pour
amortir les chocs subis par l’économie et empêche l’allocation efficiente des ressources entre
les secteurs.

En termes d’inflation, les pays avec des changes fixes ont connu des taux d’inflation
plus modérés que ceux qui ont opté pour un régime plus flexible. Ceci est cohérent avec ce
qu’a prédit la théorie économique concernant l’association typique d’une plus faible inflation
avec les régimes de changes fixes. On explique cela par la discipline plus stricte imposée par
ce type de régime. Pour que le taux de change constitue un point d’ancrage nominal efficace,
la politique monétaire doit être subordonnée à la défense de la parité fixée dans ce cadre. Ce
type de régime limite la capacité des autorités à financer les déficits budgétaires par le
seigneuriage. Aussi ces déficits doivent-ils être financés par l’émission d’obligations, ou
ajustés en conjuguant un relèvement des impôts et une compression des dépenses. Etant
donné que le financement obligataire influe sur les taux d’intérêt, qui pèsent à leur tour sur la

59
 
 

parité fixée en modifiant les flux de capitaux, et que les possibilités de relèvement des impôts
sont limitées, du moins à court terme, la politique budgétaire doit elle aussi être compatible
avec la parité. Ce qui se traduit normalement par une performance meilleure en matière de
politique fiscale pour les pays ayant des changes fixes par rapport à ceux optant pour des
régimes plus flexibles. Cependant dans cet échantillon la performance fiscale des pays avec
régimes de change fixes n’est pas nettement meilleure que celle des régimes intermédiaires.

Les pays avec régime de changes fixes semblent avoir un déficit plus important du
compte courant que ceux avec régimes plus flexibles. Ceci peut s’expliquer par divers
facteurs, notamment le fait que les régimes flexibles, en permettant au taux de change de
s’ajuster aux variations temporaires des prix relatifs, autorisent ainsi un déficit commercial
plus faible par rapport à celui des pays optant pour des régimes fixes. Depuis le début des
années 1980, les pays qui ont opté pour un taux fixe ont vu leur compétitivité s’effriter par
rapport à celle des pays qui, officiellement, appliquaient un régime plus flexible.

Ghosh et al (2000) ont aussi comparé les performances des régimes fixes rigides
(Currency Board) et des régimes intermédiaires ou flexibles. Ils montrent, en utilisant la
classification de jure du FMI, que les niveaux d’inflation sont de loin plus faibles dans les
premiers (inférieurs de 4%) et attribuent cela à une plus grande confiance dans ce type de
régime (effet de crédibilité) et à une croissance monétaire moins forte (effet de discipline).
Dans une étude récente pour le FMI, Ghosh et al (2003), ont non seulement confirmé la
corrélation positive entre flexibilité du taux de change et niveaux d’inflation mais ils ont au
même moment investi le problème de la direction de la causalité pour montrer que les
performances inflationnistes dépendent de façon cruciale du régime de change en place.

Mais il ne faut pas en déduire pour autant qu’il existe une relation nécessaire entre
régime de change et performances économiques. On ne peut pas dire, en particulier, que les
taux flexibles s’accompagnent forcement d’une inflation élevée, car un certain nombre de
pays en développement qui appliquent un taux de change flexible ont connu une inflation
relativement faible (et une croissance robuste). On ne peut pas dire non plus que les régimes
de change fixe soient forcément synonymes de faible croissance.

60
 
 

2.2. L’étude de Rizzo. J.M (2000)

En s’inscrivant dans la lignée méthodologique de l’étude du FMI (menée par Ghosh et


al. 1997), qui a affirmé que des liens existent bien entre régime de change et croissance,
l’auteur a vérifié dans quelle mesure au sein d’une région donnée la nature du régime de
change pouvait importer en matière de croissance. Afin de mettre en perspective les résultats
obtenus, il a choisi d’établir une comparaison entre trois régions, l’Amérique Latine, la
Méditerranée et l’Asie du Sud-Est, qui connaissent des rythmes de développement et réalisent
des performances économiques forts différents, mais dont les expériences en matière de
change sont tout aussi diversifiées.

L’étude porte sur la période 1980-1995 et sur un échantillon de 29 pays répartis de la


façon suivante: 10 pays Méditerranées, 11 d’Amérique Latine et 8 d’Asie de Sud-Est. Pour
classer les régimes de change, l’auteur a choisi de se fonder sur les régimes de change
officiels des pays étudiés (classification de jure) disponibles dans les Statistiques Financières
Internationales de FMI. Il distingue 4 types de régimes de change :

1- L’ancrage uni-monétaire.
2- L’ancrage pluri-monétaire (ou rattachement à un panier de devises).
3- La flexibilité limitée, qui assemble les dispositifs recensés par le FMI sous les termes de
flexibilité limitée par rapport à une seule monnaie, taux de change modulés en fonction d’un
ensemble d’indicateurs, et d’autres régimes de flottement dirigé.
4- Le flottement libre.

  Toutefois, dans un premier temps, les données ont été systématiquement étudiées
selon le clivage classique fixité / flexibilité – construit par regroupement d’une part des deux
formes d’ancrage, d’autre part de la flexibilité limitée et du flottement -, seul niveau possible
d’analyse commun.

Après avoir établi des comparaisons statistiques, l’auteur a conduit une analyse
économétrique afin d’évaluer dans quelle mesure le régime de change constitue un facteur
explicatif de la croissance. Il a régressé, sur la totalité de l’échantillon, la croissance du PIB
réel par tête sur la variabilité des termes de l’échange - assimilée à l’écart type glissant sur
trois ans des termes de l’échange - ; la croissance décalée de la consommation publique, en

61
 
 

guise d’approximation de l’impulsion budgétaire ; l’indice de développement de la Banque


Mondiale, destiné à capter un éventuel effet de convergence ; une variable muette prenant la
valeur 1 pour les régimes de changes fixes. Le taux d’investissement et le taux de croissance
du commerce extérieur ont été introduits séparément, afin de distinguer leurs effets éventuels.

En second lieu, l’auteur a contrôlé l’endogéneité du régime de change pour s’assurer


que les résultats obtenus précédemment ne sont pas biaisés. Bien que la littérature spécialisée
n’ait à ce jour pas mis en relief une quelconque influence des performances en termes de
croissance sur le choix d’un régime de change32, il a préféré s’en assurer en testant un modèle
à équations simultanées.

Enfin, il a étudié le lien entre la volatilité de la production (mesurée comme l’écart


type glissant sur trois ans de la croissance du PIB réel) et le régime de change pour vérifier
l’hypothèse selon laquelle les variations adoptées des taux de change nominaux réajustent les
prix relatifs, ce qui contribue à réduire les fluctuations de la production. Pour cela, l’auteur a
régressé la volatilité de la production sur celles des termes de l’échange, de la croissance, de
la consommation publique et du taux d’investissement et le taux de croissance du commerce
extérieure.

La conclusion qui ressort de cet article est que l’étude ne suggère pas l’existence d’un
lien global fort entre le régime de change et la croissance du PIB par tête. Le choix d’un
régime de change n’apparaît certes pas neutre, mais son influence semble être relativement
limitée. Lorsqu’elle s’exerce, c’est par des effets sur l’investissement (rarement) et sur le
commerce extérieur (souvent).

Comparativement aux pays à changes flexibles, les pays à changes fixes ont en
moyenne, connu au cours de la période étudiée une croissance par tête moins élevée, malgré
un taux d’investissement supérieur. Un fait qui s’explique vraisemblablement pour partie par
une croissance moins forte du commerce extérieur (notoirement pourvoyeur de gains de
productivité) et pour partie par l’existence d’une productivité résiduelle dans les pays à

                                                            
32
Seul Edwards (1996) établit un lien significatif mais dans la mesure où il étudie la possibilité qu’une croissance
historique faible puisse conduire à se « lier les mains » afin de ne pas céder à la tentation d’accélérer le rythme 
en recourant à l’inflation, la variable retenue est en réalité une valeur moyenne sur une dizaine d’années, de
surcroît décalée d’une d’économie afin d’éviter le problème d’endogéneité du régime de change

62
 
 

changes flexibles – notamment en Méditerranée surtout, relativement aux pays rattachant leur
monnaie à un panier de dévies.

Par ailleurs, abstraction faite du régime de change, les déterminants de la croissance


semblent quelque peu varier d’une région à l’autre. Si la croissance du commerce extérieur
exerce partout un effet positif très significatif, et notamment en Amérique Latine et en Asie de
Sud-est, celle de la consommation publique agit surtout en Méditerranée et le taux
d’investissement uniquement en Asie.

Enfin, si le régime de change ne paraît exercer qu’un effet limité sur la croissance, il
joue par contre de façon significative sur sa volatilité : c’est en changes fixes, et tout
particulièrement dans la région Méditerranée, que les variations de la croissance sont le moins
bien contenues.

2.3. L’étude de Levy-Yeyati et Sturzenegger (2001)

Dans ce travail les auteurs étudient l’impact des régimes de change sur l’inflation,
l’accroissement monétaire, les taux d’intérêt réels et la performance en matière de croissance,
en utilisant une importante base de données de 154 pays et en couvrant la période post Bretton
Woods, caractérisée par une intégration financière croissante. Plusieurs nouveaux aspects sont
introduits dans cette analyse :

 Les auteurs utilisent une classification de facto (classification LYS), qui définit les régimes
de change suivant le comportement de trois variables importantes, à savoir les
changements dans le taux de change nominal, la volatilité de ces changements et la
volatilité des réserves internationales. En effet, la théorie suggère que les régimes de
changes fixes sont associés à des changements dans les réserves internationales qui
réduisent la volatilité du taux de change nominal tandis que les régimes flexibles sont
caractérisés par une volatilité substantielle des taux nominaux et une stabilité relative des
réserves internationales. La nouvelle classification fait une distinction entre forte et faible
volatilité des économies ce qui permet de distinguer l’impact d’un régime de change au
cours d’une période « tranquille » et en cours d’une période de turbulence.

63
 
 

 Ils distinguent entre les «longs» et «courts» rattachements où les «longs» (courts)
rattachements sont définis comme ceux qui sont en place depuis cinq années consécutives
ou plus (moins de 5 ans). Cette distinction est utile dans la mesure où elle permet de
déterminer si l’impact sur les variables macroéconomiques est dû au régime en place ou à
l’effet de court terme du changement de régime, d’un côté. D’un autre côté, leur
concentration sur les « longs » rattachements provient du souci que la mauvaise
performance de plusieurs rattachements conventionnels peut être attribuable aux pays
avec des fondamentaux macroéconomiques faibles qui sont forcés de mettre en place
finalement des régimes de change fixes insoutenables.

 En plus du compromis inflation-croissance, cet article examine, l’impact du régime de


change sur le coût du capital, mesuré par le taux d’intérêt réel, quelque chose qui n’a
jamais été abordé auparavant. L’étude a des implications importantes en matière de
politique économique, vu que les faibles taux d’intérêt sont typiquement invoqués comme
argument clé en faveur des régimes fixes.

 Les auteurs conduisent une comparaison «actes-paroles» (deeds vs. words) qui utilise les
deux classifications de régimes de change LYS-FMI, mettant ainsi en lumière de
nombreux autres résultats. Par exemple, l’étude permet de tester le degré avec laquelle la
performance macroéconomique est influencée par l’actuelle politique de change.

 Finalement, ils testent si les arrangements de changes fixes, qui impliquent un ferme
engagement (caisse d’émission (Currency board), Union monétaire) sont différents et
meilleurs des autres régimes (conventionnels et autres). Ceci s’explique par l’émergence
de l’hypothèse bipolaire qui avance que les fermes rattachements réduisent la vulnérabilité
du régime face aux attaques spéculatives (ce qui améliore la croissance) en lui permettant
de tirer profit de tous les bénéfices en termes de faible inflation.

En premier lieu, les auteurs vérifient l’hypothèse selon laquelle les régimes de change
fixes imposent une discipline sur la dynamique de création monétaire ce qui va se traduire par
des faibles taux d’inflation.

Comme il est mentionné précédemment, le régime de change peut affecter l’inflation


indirectement à travers son effet disciplinaire sur le taux d’accroissement de la base

64
 
 

monétaire, de même qu’indirectement à travers son effet de faibles anticipations


inflationnistes. Bien qu’il ne soit pas très clair, comment ce dernier canal peut être modélisé,
la première évaluation de l’effet de « crédibilité » peut être obtenue en incluant une variable
dummy associée au régime de change dans l’équation de demande de monnaie.

Enfin, les auteurs évaluent l’effet d’une adaptation d’un régime de change particulier
en terme de performance de croissance et ce à la lumière de l’argument qui stipule que les
systèmes de rattachement sont plus vulnérables aux chocs extérieurs et aux attaques
spéculatives, ce qui à la fin nuit à la croissance. Ils examinent ensuite si la performance de
croissance négative associée aux régimes de changes fixes demeure après une concentration
au sein du groupe des pays à arrimage ferme, par rapport aux régimes fixes conventionnels.
Tout cela découle des résultats trouvés de l’étude de Levy-Yeyati et Sturzenegger (2000) dans
laquelle ils cherchent à établir le lien entre régime de change et croissance en utilisant des
données annuelles couvrant la période 1974-1999. De cette étude, il en découle la conclusion
suivante :

 Pour le pays industrialisés, ils n’ont pas trouvé de lien significatif entre régime de change
et performance économique.

 Pour les économies non-industrialisées, on observe une forte association entre régime de
change fixe et faible taux d’inflation, seulement lorsqu’ils se focalisent sur les «longs»
rattachements. Ce lien semble agir par son influence sur l’accroissement monétaire, de
même que par son impact sur les anticipations. De plus les «faits» (deeds) importent plus
que les «mots» (words) en termes d’inflation : l’annonce d’un régime de changes fixes a
un impact sur l’inflation seulement dans le cas de « longs » rattachements.

 Les taux d’intérêt réels paraissent plus faibles sous un régime de change fixes plus que
sous un régime de change flottants, seulement selon la classification de jure, suggérant
ainsi que ce résultat est dû en grande partie au rôle des dévaluations non anticipées.

 Pour ce qui est des rattachements de facto, ils ont trouvé que l’annonce d’un régime de
change fixes a un effet négatif sur les taux d’intérêt réels, seulement pour les «courts»
rattachements, probablement dû au fait que les «courts» rattachements, s’ils sont

65
 
 

efficaces pour réduire les anticipations inflationnistes (et ainsi les taux d’intérêt
nominaux), ils ne réduisent pas l’inflation actuelle.

 Dans le groupe des pays non industrialisés, les rattachements (longs et courts) sont
significativement et négativement liés à l’accroissement de la production par tête. Ainsi
le compromis inflation-croissance, implicite dans le choix entre régime de change fixe et
flottant, semble porter seulement sur les «longs» rattachements, à l’opposé les «courts»
rattachements ont de moins bonnes performances que les régimes flexibles, puisqu’ils
permettent une croissance économique lente sans prouver des grains significatifs en
termes d’inflation.

 Les arrimages fermes délivrent de meilleurs résultats en termes d’inflation que les
arrimages plus souples ou conventionnels, mais n’éliminent pas pour autant le compromis
inflation- croissance, manifestant toujours ainsi des faibles taux de croissance par rapport
aux régimes de change flottants.

2.4. L’étude de Bailliu, Lafrance et Perrault (2002)

L’objet de cette étude est d’analyser empiriquement l’effet du type de régime de


change sur la croissance économique en utilisant deux modes de classification de régimes de
change: la typologie officielle et une typologie de facto basée essentiellement sur le degré de
flexibilité observée du taux de change tout en tenant compte des chocs externes (supposés être
essentiellement constitués de chocs de termes de l’échange)33. Pour une année donnée, la
volatilité du taux de change est mesurée par l’écart type des taux de variation mensuels du
taux de change nominal par rapport au dollar américain. Cette classification identifie les
régimes intermédiaires et flexibles sans prendre en compte la variabilité des réserves
internationales.

Cette étude se distingue aussi par le fait que les auteurs examinent l’effet du régime de
change sur la croissance à moyen terme, en utilisant des moyennes sur cinq ans plutôt que des
données annuelles (car il est généralement admis qu’une telle période est suffisamment

                                                            
33
BLP (2002) soulignent que les parités fixes peuvent faire l’objet de fortes réévaluations en présences de chocs
externes tandis que les devises flottantes peuvent n’afficher qu’une faible volatilité si les chocs externes sont de
faible ampleur.

66
 
 

longue pour éliminer les effets des cycles économiques, mais suffisamment courte pour tenir
compte des changements importants survenant dans un pays donné).

Une autre particularité de cette étude est que les auteurs permettent à l’effet du régime
de change sur la croissance de dépendre du degré d’ouverture du pays au commerce et aux
flux de capitaux internationaux ainsi que du degré du développement de son secteur financier.
Les hypothèses qui seront testées peuvent être formulées ainsi :

 La première hypothèse est que le type de régime de change influe sur la croissance
économique.

 La deuxième hypothèse est qu’un changement de régime entraîne une croissance


économique moindre.

 La troisième hypothèse concerne le lien entre le type de régime de change, le degré


d’ouverture à l’égard des marchés financiers internationaux et la croissance.

 La dernière l’hypothèse stipule qu’un pays doit être doté de marchés financiers
suffisamment développés pour tirer davantage d’un régime de change flottants.

Pour cela, les auteurs estiment une équation de la croissance au moyen de données
longitudinales pourtant sur 25 pays à marché émergent et couvrant la période 1973-199834. Ils
ont choisi les pays de façon à ce qu’ils offrent un vaste éventail de régimes de change tout en
présentant des degrés de développement qui ne soient pas dissemblables au point de remettre
en question l’hypothèse de paramètres communs. C’est pourquoi ils ont choisi seulement des
pays à marchés émergents d’Amérique latine et d’Asie.

En plus de des variables explicatives habituelles, l’équation comprend une variable


muette qui représente le type de régime de change, qui est la variable la plus importante.
Comme il a été mentionné précédemment, les auteurs utilisent deux méthodes de
classification pour les régimes de change : la typologie officielle du FMI et la règle

                                                            
34
L’estimation par régression d’une équation de la croissance portant sur plusieurs pays est la méthode
habituellement employée pour analyser empiriquement les déterminants des taux de croissances de divers pays.
Cette méthode se fonde sur les travaux de Kormendi et Méguire (1985) ainsi que sur ceux de Barro (1991).

67
 
 

mécanique hybride. Pour chacune de ces deux méthodes, la variable muette prend les valeurs
zéro, un et deux selon qu'il s'agit respectivement d'un régime de changes fixes, d'un régime
intermédiaire ou d'un régime de changes flottants. Enfin, ils ont ajouté une variable muette
pour prendre en compte l'incidence des changements de régime de change à l'intérieur des
périodes de cinq ans.

Les auteurs concluent que le type de régime de change aurait des effets sur la
croissance économique. Deux de leurs résultats sont particulièrement robustes; premièrement,
lorsque les régimes de change sont classés selon la règle mécanique hybride, un régime de
changes flottants est associé à une croissance plus forte seulement dans le cas des pays
relativement ouverts au commerce et aux flux de capitaux internationaux; deuxièmement, un
changement de régime de change s’accompagne d'une réduction de la croissance économique.
Le modèle indique aussi qu’un pays doit être doté de marchés financiers bien développés pour
tirer avantage d’un régime de changes flottants, bien que ce dernier résultat soit moins robuste
que les deux précédents.

Le fait qu’ils ont obtenu des résultats étayant l’existence d’une relation entre le régime
de change et la croissance — ce que les travaux antérieurs ne sont pas parvenus à faire — et
que leurs résultats diffèrent selon la typologie utilisée montre qu’il importe de disposer d’un
système de classification adéquat des régimes de change. En effet, leur capacité à obtenir des
réponses concluantes à des questions comme celles soulevées dans cette étude est fortement
tributaire de l'élaboration de méthodes appropriées pour classer les régimes de change.

Ces résultats donnent à penser que, les marchés émergents étant de plus en plus
intégrés aux marchés internationaux de capitaux, un nombre croissant de pays pourraient
s’orienter vers un régime de changes flottants en raison de la croissance plus élevée que ce
type de régime favoriserait. Or, il ne semble pas que les régimes de change des 25 pays de cet
échantillon retenus tendent à devenir plus flexibles, du moins selon les typologies des régimes
de change. Bien entendu, comme leur étude le confirme, la flexibilité du taux de change n'est
pas suffisante en soi pour favoriser la croissance à moyen terme. Les pays à marché émergent
peuvent également être réticents à adopter un régime de change flottant si les outils dont ils
disposent pour mener une politique monétaire indépendante et compatible avec la volatilité du
taux de change sont limités. Laidler (1999) a souligné qu’un régime de changes flottants doit

68
 
 

être assorti d’un point d'ancrage nominal crédible afin d’assurer la «cohérence» du régime
monétaire du pays.

2.5. L’étude de Dieudonné Ella (2004)

Dans cette étude, l’auteur cherche à vérifier deux hypothèses: la première suppose que
le régime de change affecte la variabilité de la production dans les pays en développement
tandis que la seconde stipule que les régimes de change «non fixes» réduisent cette variabilité.

Elle se distingue des études antérieures sur plusieurs points dont l’analyse du régime
de change et de la volatilité d’une part et la méthodologie d’autre part. Contrairement aux
études basées sur une combinaison des méthodes de jure et de facto, l’auteur utilise la
différence entre les deux options comme un test de robustesse. En ce qui concerne la volatilité
de la production, en plus de la variance du taux de croissance, il estime la variance
conditionnelle à partir d’un modèle hétéroscédastique autorégressif conditionnel généralisé
(HACG). Sur le plan méthodologique, l’auteur identifie les effets réels du régime de change
en estimant un modèle «global» dans lequel le régime est représenté par une variable
«composite» et trois de ses variantes qui captent les effets spécifiques de chaque type de
régime.

Concernant la classification des régimes de change, l’auteur a adopté une classification


en trois catégories qui distingue les régimes de change fixes, intermédiaires et flottants. En ce
qui concerne particulièrement l’application économétrique, il se réfère à la classification de
LYS (2002) d’une part et aux arrangements de change des pays (FMI).

Dans la spécification générale du modèle, l’auteur a introduit une mesure de la


volatilité de la production par tête du pays, un effet propre au pays, cet effet saisi l’impact
d’autres sources de volatilité spécifiques au pays et qui ne sont pas prises en compte par
les autres variables explicatives. Généralement, on suppose que ces caractéristiques
propres ne varient pas dans le temps. Un vecteur de variables muettes qui capte les effets
des chocs externes. Il s’agit par exemple de l’effondrement des cours du pétrole, la crise
d’endettement ou la crise financière des pays d’Asie du Sud-Est.

69
 
 

Parmi les variables explicatives, l’auteur mesure le type de régime de change par une
variable muette. Comme il est mentionné auparavant, l’auteur utilise deux typologies de
classification: celle basée sur l’étude de LYS (2002) et celle du FMI. Dans le cas particulier
où la volatilité de la production est définie par la moyenne mobile de sa variance sur trois ans,
le régime correspondant à un intervalle donné est celui qui a été en place le plus longtemps
possible. Pour éviter des erreurs de mesure du régime de change, il régresse les types de
régimes un à un pour induire leurs effets sur les fluctuations de la production. Toutefois, il
semble intuitivement correct d’utiliser une variable «composite» qui capte les trois régimes de
change lorsque l’on cherche à vérifier si le régime de taux de change affecte la volatilité.

Il a donc identifié comme sources potentielles des fluctuations du PIB: les termes de
l’échange; le taux d’investissement, la consommation publique rapportée au PIB, le degré
d’ouverture au commerce international et le degré de développement du secteur financier. Au
lieu du niveau de développement économique (indice de la Banque Mondiale), l’auteur utilise
la masse monétaire M2 qui peut être un instrument important pour les autorités chargées de la
politique économique. Les données sont définies par des moyennes de 3 ans.

L’auteur teste principalement deux hypothèses: il s’agit de vérifier si le régime de


change influe sur la volatilité de la production d'une part et si les régimes «non fixes»
induisent moins de volatilité dans la production des pays en développement d’autre part. Il a
donc estimé l’équation par les moindres carrés (effets fixes) et les moindres carrés généralisés
(effets aléatoires).

Quelques travaux ont essayé d'établir un lien entre régimes de change et volatilité des
variables macroéconomiques réelles aussi bien dans les pays développés que ceux en
développement. Si certains affirment que ce lien existe sous certaines conditions (Bleaney et
Fielding, 2002), d’autres trouvent qu’il n’est pas significatif.

Cette étude s’inscrit dans ce courant mais affirme plutôt que les types de régime de
change affectent la volatilité de la production. Aussi, il en découle que les régimes «non
fixes» sont préférables lorsque l’objectif des autorités est de réduire les fluctuations des
agrégats macroéconomiques, notamment le PIB.

70
 
 

La tendance au flottement observée dans la dernière décennie peut donc trouver son
fondement dans cet objectif. Toutefois, la volatilité du PIB ne saurait être le seul critère
d’optimalité du régime de change. Cette optimalité suppose la minimisation des fluctuations
d’un certain nombre de variables macroéconomiques clefs telles que l’output, l’inflation,
l’investissement et la consommation.

2.6. L’étude de Coudert et Dubert (2005)

Dans leur article, Coudert et Dubert (2005) étudient l’impact du régime de changes sur
la croissance et l’inflation, en utilisant une base de données de 10 pays Asiatique sur une
période de 1990 et 2001. Le régime de change adopté pour cette étude est celui résultant de
leur classification de facto pour le même échantillon et sur la même période.

Dans leur classification, les auteurs reposent sur les principes communément admis de
caractérisation des régimes de change. Les Caractéristiques des régimes de change retenus se
résument dans le tableau suivant :

Tableau 5: Critères de classification des régimes de change par Coudert et Dubert


 

Régime de change Evolution du taux de Variance trimestrielle Variance de réserves


change nominal du taux de change de change
nominal
Flottant - Forte Faible
Flottement géré - Moyenne/Forte Forte
Fixe trend  Faible -

Crawling peg trend > Faible -


Dévaluation trend trimestriel> - -
Source : Coudert et Dubert (2005). Le taux de change est coté au certain, pris en logarithme, les tendances sont
calculées à partir des séries hebdomadaires, , sont des seuils donnés positifs, dans leur échantillon, = 2%
et = 6%.

Plusieurs hypothèses sont introduites dans cette analyse :

 Le dollar est la monnaie d’ancrage pour tout l’échantillon. Cette hypothèse est étayée par
différentes études.

71
 
 

 Le problème de la détermination des «faibles» et «fortes» variances est résolu en


considérant qu’il existe un groupe de monnaies flottantes : l’USD/DEM, USD/JPY,
USD/BRP, pour lequel la volatilité du taux de change est considérée comme forte et la
volatilité des réserves faible.

 Les auteurs adoptent un classement trimestriel basé sur des calculs sur données
hebdomadaires pour les taux de change et sur des données mensuelles sur les réserves.

Les résultats de leur classification qui, à leur avis, appariaient plus précis que le
classement LYS dans la mesure où les observations trimestrielles permettent d’observer les
changements de régime en cours d’année. De plus, la forme du test employé pour discriminer
flottement et peg permet de classer les régimes de change des pays sur l’ensemble des
périodes. Les régimes qualifiés «d’inconclusifs» dans le classement LYS sont donc qualifiés
avec leur méthode de classification. Leurs résultats indiquent également que la classification
officielle du FMI, basée sur les déclarations des pays membres, s’écartent notablement des
classifications de facto

Pour étudier l’impact sur la croissance, les auteurs ont introduit dans les régressions
des variables de contrôles. Ces variables sont inspirées des modèles de croissance endogène.
Les dépenses publiques d’éducation, le taux de croissance de la population totale, le degré
d’ouverture, le taux d’investissement et le PIB par tête en niveau sur la période initiale,
destiné à représenter le rattrapage des pays par rapport aux Etats -Unis sont censés jouer sur la
croissance de long terme. Quant à l’étude de l’impact sur l’inflation, ils ont utilisé des
données et des variables indicatrices trimestrielles.

À l’issue de cette étude, ils observent une augmentation de la croissance moyenne à


mesure qu’augmente la flexibilité du régime de change et une variation inverse concernant
l’inflation (si l’on exclut les régimes de flottement purs). Ainsi, les régimes de flottement géré
et de crawling peg semblent avoir induit la meilleure croissance sur la période. Concernant
l’inflation, les régimes ancrés (pegs et crawling pegs) ont généré les meilleures performances
avec une inflation moyenne de 4.8 % pour les pegs et de 7.1% pour les crawling pegs. Les
régimes intermédiaires (flottements gérés et crawling pegs) semblent avoir induit les
meilleures performances globales en maintenant l’inflation à un niveau acceptable, au regard
de l’échantillon, et en permettant une croissance annuelle moyenne élevée. Les pays ayant
72
 
 

connu une dévaluation enregistrent les plus faibles taux de croissance ainsi que l’inflation la
plus élevée.

Des travaux existants, il ressort que l'évidence empirique reste quelque peu contrastée
quant aux effets du régime de change sur la croissance, même si la flexibilité du taux de
change nominal semble contribuer plus à la croissance. Bien que la littérature sur les effets
économiques des régimes de change soit très riche et continuellement réexaminée et enrichie,
les travaux empiriques sont assez limités. En outre, aucun consensus ne se dégage sur les
relations entre le système de change et la croissance. Ainsi, quelques aspects de la littérature
empirique méritent une discussion.

La théorie économique ne permet pas de prédire clairement l'impact du régime de


change sur la croissance. Après l'abandon du système de change fixe généralisé de Bretton
Woods dans les années 1970, il n'y a pas eu d'évolution significative vers un type donné de
régime de change. Et l'impression qui se dégage des diverses expériences est que l'impact du
système de change sur les performances économiques devraient être explorés au niveau
empirique. C'est pourquoi, dans la section suivante, nous présenterons brièvement le modèle
ainsi que les déterminants de la croissance avant de procéder à notre analyse économétrique.

3. Le modèle de croissance 

Selon le modèle néoclassique, à l'état d'équilibre stable, l'augmentation du produit total


résulte uniquement du progrès technique et du taux naturel de croissance de la population,
variables considérées comme exogènes dans le modèle de Solow (1956) 35 . Le progrès
technique et l'accroissement des investissements peuvent contribuer à l'augmentation du
produit total en courte période. En supposant que les rendements d'échelle sont constants,
l'output total en longue période s'accroît à un taux exogène, étant donné le progrès technique.
Ainsi, la politique économique n'affecte pas le taux de croissance dans le modèle
néoclassique. Elle peut simplement influencer le niveau de production ou son taux de
croissance pendant la transition vers l'état d'équilibre stationnaire. Dans ce sens, le taux de
croissance économique de chaque pays est supposé déterminer par le taux de croissance
naturel de sa population d'une part, et d'autre part, par son taux d'investissement. Par
                                                            
35
Solow,R., (1956); «A contribution to the theory of Economic Growth», Quarterly Journal of Economic.70; p.
65-94

73
 
 

conséquent, le taux de croissance de la population totale, de même que le taux de variation du


capital intérieur, sont supposés influencer positivement le taux de croissance du produit total.

Pour ce qui est du niveau de développement représenté par le revenu par habitant, il
augmente lorsque 1e taux d'investissement s'élève et diminue avec l'accroissement de la
population totale. On suppose en outre que, si des pays différents utilisent des technologies
identiques, les niveaux de leurs produits convergent vers un niveau donné en situation
d'équilibre stable (Barro, 1984)36. En d'autres termes, les taux de croissance du produit des
pays les moins développés sont supposés converger vers ceux des pays les plus avancés. C'est
l'hypothèse des rendements marginaux décroissants qui sous-tend une telle analyse. Le
produit marginal du capital décroît avec son accumulation. Les pays pauvres disposent d'un
niveau de capital par tête relativement bas, comparé à celui des pays riches. Par conséquent, la
productivité marginale du capital dans les pays les plus pauvres est présumée être plus élevée
que dans les pays riches. Par conséquent, des rendements plus élevés du capital dans les pays
en développement devraient attirer des capitaux en provenance des pays industrialisés,
accélérant ainsi leur croissance économique. Finalement, le niveau de revenu par tête initial
dans chaque pays détermine négativement le taux de croissance tant du produit total que du
produit par tête.
Dans cette section, nous tentons d’expliquer la performance de la croissance
économique des pays émergents et avancés en utilisant une analyse en données du panel.
Cette analyse économétrique est appliquée aux données d'un échantillon composé de 26 pays
en développement et 13 pays développés sur une période de 1982 à 2011. Nous suivons dans
nos travaux empiriques la littérature sur la croissance endogène, qui cherche à lier le taux la
croissance économique d'un pays à des variables économiques, politiques et sociales en
utilisant un large échantillon de pays et sur une période donnée. Le modèle estimé est utilisé
pour examiner les changements du taux de croissance pour un ensemble de pays.

3.1. Les déterminants de la croissance


 

Il y a une grande variété de variables économiques et sociales qui peuvent être


proposés comme des déterminants de la croissance économique. Nous nous concentrons sur
les variables qui ont reçu plus d'attention dans la littérature académique et les milieux

                                                            
36
Barro.R.J (1984): “Macroeconomics”. New York, Wiley.

74
 
 

politiques. Ainsi, pour mener notre investigation, nous avons retenu les déterminants de la
croissance qui apparaissent fréquemment significatifs dans la littérature empirique. Les
travaux empiriques sur lesquels nous nous basons incluent Loayza, Fajnzylber et Calderón
(2004), Toulaboe (2004), Auguirre et Calderon (2005), Gala et Lucinda (2006), Rodrik
(2008), Magyari (2008), Béreau et al. (2009). Les variables peuvent être divisées en cinq
groupes: la convergence transitionnelle, les effets cycliques, les politiques structurelles et
institutionnelles, les politiques de stabilisation, et les conditions extérieures.

La convergence transitionnelle : Une des principales conséquences du modèle de croissance


néoclassique, et même de tous les modèles présentant une dynamique de transition, est que le
37
taux de croissance dépend de la position initiale de l'économie . L'hypothèse de
«convergence conditionnelle» soutient que, ceteris paribus, les pays pauvres devraient avoir
une croissance plus élevée par rapport aux pays riches en raison des rendements décroissants
de l’accumulation des facteurs de production. La position initiale de l'économie est souvent
contrôlée en incluant le niveau initial du PIB réel par habitant en log dans l'ensemble de
variables explicatives.

Les effets cycliques: Bien que l’objectif principal soit de rendre compte des tendances de la
croissance économique à long terme, en pratique, tant pour l'estimation économétrique que
pour les prévisions – la plupart des études se base sur des périodes de temps relativement
courtes (des moyennes de 5 ou 10 ans). A ces fréquences, les effets cycliques sont appelés à
jouer un rôle. Cet effet est pris en compte en incluant l'écart de production (l’output gap) en
début de période comme un facteur déterminant de la croissance. L’inclusion de l’output gap
initial permet d’éviter de surestimer la vitesse de convergence de transition. L'output gap est
donné par la différence logarithmique entre le PIB potentiel et le PIB réel par habitant autour
du début de période. Le Hodrick-Prescott est généralement utilisé pour décomposer la série
annuelle potentielle (la tendance) et la composante de la production pour chaque pays dans
l'échantillon des pays émergents38.

Politiques structurelles et institutionnelles: Le thème sous-jacent de toute la littérature de la


croissance endogène est que le taux de croissance économique peut être affecté par les
politiques publiques et institutionnelles. Bien qu'il puisse y avoir des désaccords sur le
                                                            
37
Voir Barro et Sala-i-Martin (1995) et Turnovsky (2000)
38
Pour les pays avancés, les valeurs sont estimées à l'aide d’une fonction de production par l'OCDE.

75
 
 

contenu des politiques les plus propices à la croissance ou la séquence dans laquelle les
changements de politique doivent être entrepris, il n'y a aucun doute que les gouvernements
peuvent influencer la croissance de long terme dans leur pays. Alors que les travaux
théoriques ont souvent étudié une ou la combinaison d'un ensemble de politiques, les travaux
empiriques ont tendance à être exhaustif et à considérer un large éventail de politiques et des
déterminants institutionnels de la croissance39. Il apparait dans une certaine mesure que la
séparation entre les politiques structurelles et les politiques de stabilisation est arbitraire.
Toutefois, la division permet de distinguer le rôle des politiques qui orientent la croissance de
long terme, de celui des politiques cycliques.

 La première composante des politiques structurelles est l'éducation, et le capital humain


en général. L'un des travaux fondateurs de la littérature sur la croissance endogène, Lucas
(1988), est axé sur le rôle crucial du capital humain sur la croissance de long terme. Il a
montré comment les effets du capital humain pourraient contrecarrer les forces des
rendements décroissants dans les autres facteurs de production -comme le capital
physique- et soutenir la croissance de long terme40. Outre le rôle direct du capital humain
comme facteur de production, l'éducation et le capital humain peuvent servir comme un
complément à d'autres facteurs tels que le capital physique et les ressources naturelles (De
Gregorio et Bravo-Ortega, 2002). Cette variable détermine la part de la technologique de
l’innovation dans les pays qui produisent des technologies et facilite l'absorption
technologique dans les pays qui les imitent (Olofsdotter, 1998). Théoriquement, il est
attendu que chaque niveau de scolarité génère une croissance plus élevée. Mais la plupart
des études retiennent plutôt le niveau d'éducation secondaire comme variable tendant à
saisir l'impact du capital humain41.

 La deuxième composante à caractère structurel est la population totale ou le taux de


croissance de la population. Certains économistes considèrent que la population est un
indicateur de la taille de l'économie et qu'une population nombreuse est un indicateur de
disponibilité de la main d'œuvre et aussi des fortes possibilités de spécialisation de la force
de travail. La population totale peut par conséquent influencer la structure de la

                                                            
39
Voir Lucas (1988), Barro. (1991), Romer (1989), Bencivenga et Smith (1991), Easterly et Rebelo (1993),
Turnovsky (2000), Levine, Loayza et Beck (2000), et Dollar et Kraay (2002).
40
Voir Mincer (1984), Otani et Villanueva (1990), Barro (1989) et Romer (1989).
41
Il s'agit de la variable utilisée comme proxy pour le capital humain de Barro (1991), Mankiw, Romer et Weil
(1992), Easterly (2001) et Barro et Lee (2010).

76
 
 

production par sa forte participation dans la production industrielle et engendrer


finalement des taux d'épargne plus élevés (Guillaumont et al. ,1999). Il peut s'en suivre un
taux de croissance économique plus élevé. Inversement, la population totale, comme son
taux de croissance, a un impact négatif sur le taux de croissance du produit par tête, étant
donné qu'elle croît plus vite que la production en dehors du sentier d'équilibre stable.

 Le troisième domaine est lié à la profondeur financière. Le bon fonctionnement des


systèmes financiers favorisent la croissance à long terme. Ils influencent l'efficacité
économique et la croissance économique à travers différents canaux. Les marchés
financiers peuvent faciliter la diversification des risques par les échanges, la mutualisation
et des instruments financiers de couverture. Ils peuvent aider à identifier les projets
d'investissement rentables et leurs mobiliser de l'épargne42.

Le ratio au PIB du crédit bancaire au secteur privé est souvent utilisé comme mesure
de la profondeur financière43. Il est également significativement corrélé avec d'autres proxys
tels que M2/PIB, la mesure traditionnelle de la profondeur financière, et les indicateurs
d'autres aspects des marchés financiers, telles que la taille et l'activité des marchés boursiers44.
Cette mesure du développement financier est fréquemment utilisée dans la littérature
empirique (Levine, Loayza et Beck, 2000; Hnatkovska et Loayza, 2004; Aghion et al. 2006).
Un secteur financier développé peut renforcer la capacité d'ajustement de l'économie en
contribuant à la mobilisation et à l'allocation efficiente des ressources productives et en
offrant des mécanismes de gestion des risques (Levine, Loayza et Beck, 2000). Il contribue
ainsi à rendre la croissance plus stable. Mais le développement financier s'accompagne
également de risques d'instabilité accrus de la croissance économique (apparition de bulles
financières par exemple). Par ailleurs, il est fort probable que la relation entre le
développement financier et le taux de croissance soit soumise à des effets de seuil (Easterly et
al. , 2000).

                                                            
42
Voir Levine (1997) pour une revue des fondements théoriques pour le rôle du développement financier et une
synthèse des preuves empiriques.
43
Voir Beck, Demirguc-Kunt et Levine (2000), et Levine, Loayza et Beck (2000).
44
Selon Loayza et al. (2004), la corrélation entre le crédit domestique privé par le secteur financier privé / PIB
avec M2/PIB est de 0,72 et sa corrélation avec la capitalisation boursière / PIB et le ratio du chiffre d'affaires
est, respectivement 0,52 et 0,30.

77
 
 

 Le domaine suivant de la politique économique est l'ouverture commerciale. La littérature


souligne cinq canaux par lesquels le commerce affecte la croissance économique 45 .
Premièrement, le commerce conduit à une spécialisation plus élevée, et par conséquent,
des gains de productivité totale des facteurs (PTF) en permettant aux pays d'exploiter leurs
domaines d'avantage comparatif. Deuxièmement, il élargit les marchés potentiels, ce qui
permet aux entreprises nationales d’en tirer avantage des économies d'échelles et
d'accroître leur productivité. Troisièmement, le commerce répand à la fois les innovations
technologiques et l'amélioration des pratiques managériales par le renforcement des
interactions avec des entreprises étrangères et les marchés. Quatrièmement, la
libéralisation des échanges commerciaux tend à diminuer les pratiques
anticoncurrentielles des entreprises nationales. Enfin, la libéralisation du commerce réduit
les incitations des entreprises à mener des activités de rente qui sont la plupart du temps
improductives. La majeure partie des résultats empiriques indiquent que la relation entre
la croissance économique et l'ouverture commerciale est positive. En effet, cette relation
reflète un «cercle vertueux» par lequel une plus grande ouverture commerciale conduit à
une amélioration de la croissance économique, qui à son tour génère plus de commerce.

L’ouverture commerciale est mesurée par le volume des échanges (exportations plus
importations) par rapport au PIB. Certains travaux ajustent cette mesure par la taille
(superficie et population) du pays, par le degré d’enclavement (sans accès à la mer), et par le
poids des exportations de pétrole 46 . Ces ajustements permettent d’éviter l'attribution à la
politique commerciale de ce qui est simplement le résultat de caractéristiques structurelles des
pays (par exemple, les petits pays sont plus dépendants du commerce international que les
grands; les exportateurs de pétrole peuvent avoir des volumes assez importants des échanges
commerciaux et en même temps imposer des tarifs douaniers élevés, et les pays enclavés ont
tendance à faire face plus aux coûts de transports, et par conséquent, leurs échanges sont
moins importants que les autres pays).

 Le déterminant suivant est lié à la politique budgétaire. Bien que le gouvernement puisse
jouer un rôle bénéfique pour l'économie, il peut aussi être une charge. C’est notamment le
cas selon certains auteurs (Fischer, 1993 et Engen et Skinner, 1996), si le gouvernement
impose des taxes très élevées, utilise ces revenus pour maintenir des programmes publics
                                                            
45
Voir Lederman (1996).
46
Voir Pritchett (1996) pour un ajustement similaire.

78
 
 

inefficaces et une bureaucratie pléthorique, déforme les incitations des marchés, et


interfère négativement dans l'économie en assumant des rôles qui seraient plus appropriés
pour le secteur privé 47 . Un accroissement des dépenses publiques peut participer à la
stabilisation de la croissance en période de recul des dépenses privées. Les variations des
dépenses publiques sont dans ce cas liées positivement à la croissance. Mais, elles peuvent
rendre la croissance plus volatile lorsqu'elles génèrent des distorsions dans l'économie.
Cela provient par exemple du besoin de financer les hausses de dépenses ou des
distorsions des prix des biens non échangeables qu'elles peuvent occasionner (Levy-
Yeyati et Sturzenegger, 2003).

 Un autre élément important de la politique implique la disponibilité des services publics et


les infrastructures. L'importance de la productivité des services publics pour générer de la
croissance à long terme a été mise en évidence dans les travaux analytiques de Barro et
Sala-i-Martin (1995). Ces études ont souligné les canaux par lesquels les services publics
et les infrastructures influent sur la croissance économique. Les services publics et les
infrastructures peuvent affecter la croissance en entrant directement comme input de la
fonction de production, en servant à améliorer la productivité totale des facteurs, et en
encourageant l'investissement privé par le biais des droits de protection de propriété. En
tout cas, leur importance théorique a été bien établie, et des études empiriques récentes
confirment cette conclusion48.

 Le dernier facteur est lié à la gouvernance. Cette vaste zone comprend plusieurs aspects de
la qualité institutionnelle du gouvernement, y compris le respect des droits civils et
politiques, l'efficacité bureaucratique, l’absence de la corruption, l'application des accords
contractuels, et la prévalence de la loi et de l'ordre. Après les travaux fondateurs de Mauro
(1995) et Knack et Keefer (1995), la gouvernance a reçu une attention croissante en tant
que déterminant de la croissance économique 49 . Souvent, la première composante
principale des quatre indicateurs rapportés par Political Risk Services dans leur
publication «International Country Risk Guide» (ICRG) est utilisée. Ce sont des
indicateurs sur la prévalence de la loi et l'ordre, la qualité de la bureaucratie, l’absence de
la corruption, et la responsabilité des fonctionnaires publics.

                                                            
47
Voir Corden (1990), Fischer (1993), et Engen et Skinner (1996).
48
Voir Loayza (1996) et Calderón et Servén (2003, 2004).
49
Voir, par exemple, Barro (1996), et les conclusions en Przeworski et Limongi (1993).

79
 
 

Politiques de stabilisation : Comme indiqué auparavant, le fait de travailler, le plus souvent,


avec des périodes relativement courtes pour l'estimation économétrique et les prévisions incite
à considérer des politiques qui sont normalement associées à la stabilisation économique et
aux crises. En les contrôlant, on évite de produire des estimations biaisées pour les effets liés
à la convergence conditionnelle et les politiques structurelles. Les politiques fiscales,
monétaires et financières qui contribuent à un environnement macroéconomique stable et qui
évitent les crises financières et de la balance de paiements sont importantes pour la croissance
à long terme. En réduisant l'incertitude, ces politiques encouragent l'investissement des
entreprises, réduisent les conflits sociaux pour la distribution des rentes ex-post et permettent
aux agents économiques de s’orienter vers les activités productives (plutôt que d'essayer de
gérer un risque élevé).

 Le premier déterminant dans cette catégorie est lié aux politiques de stabilisation
macroéconomique. Deux effets interdépendants des politiques budgétaires et monétaires
sont considérés. La première est l’instabilité des prix qui est mesurée par le taux
d'inflation moyen. Ceci peut être considéré comme mesure de la qualité des politiques
budgétaire et monétaire. En effet, cette mesure est positivement corrélée avec d'autres
indicateurs de mauvaises politiques macroéconomiques tels que le déficit budgétaire
chronique et la prime du marché noir sur les devises étrangères. Le taux d'inflation est un
indicateur de la stabilité macroéconomique dans de nombreuses études de croissance entre
les pays, y compris Fischer (1993) et Easterly, Loayza et Montiel (1997). Le deuxième
aspect est la volatilité cyclique du PIB, qui reflète le manque de stabilité de la production.
Elle est mesurée par l'écart-type de l'output gap pour un pays et une période donnés.

 Le deuxième déterminant est lié aux déséquilibres extérieurs et au risque de crises de la


balance de paiements qui est mesuré par un indice de désajustement du taux de change
réel. La Surévaluation du taux de change réel par exemple, capte l'impact des politiques
monétaire et du taux de change qui altèrent l'allocation des ressources entre les secteurs
exportateurs et domestiques. Cette mauvaise répartition conduit à d’importants
déséquilibres externes, dont la correction est souvent accompagnée par des crises de la
balance de paiements et suivies par des récessions fortes.

80
 
 

Certaines études empiriques ont montré que, l'influence du taux nominal sur la
croissance n'est pas décelée qu’en présence du taux de change effectif réel (Guillaumont et al.
,1995). Ceci semble traduire le fait qu'un régime de taux de change fixe peut être équivalent à
un régime de taux de change flottant lorsque le taux de change effectif réel du premier
(régime fixe) est régulièrement ajusté pour tenir compte de sa valeur d'équilibre. De cette
façon, l'effet spécifique du choix du régime de taux de change ne peut être mieux saisi
qu'après le contrôle de la variation du taux de change effectif réel. Dans ce chapitre, nous
nous concentrons sur l’impact des régimes de change sur la croissance, l’impact des
désajustements de change sera traité plus en détail dans la troisième partie.

Le régime de change est dans ce chapitre la principale variable de notre étude


économétrique. Il est représentée par trois variables muettes Fixe, Interm et Flex qui prennent
la valeur un si le système de change du pays considéré est respectivement fixe, intermédiaire
ou flexible au cours de l'année considérée et, zéro sinon50. Les données des régimes officiels
viennent du FMI et les régimes de facto proviennent de la base de Reinhart et Rogoff (2003).

 Le troisième élément concerne l’apparition des crises bancaires systémiques qui a un effet
délétère sur l'activité économique, en particulier sur des horizons à court et moyen terme.
Les crises bancaires peuvent être le produit d'un cadre réglementaire inadéquat pour les
transactions financières, conduisant à l'explosion des prêts et à une consommation
excessive et insoutenable. La survenue des crises bancaires est mesurée par la fraction
d'années que le pays subit une crise bancaire systémique pour la période correspondante,
comme indiqué dans Caprio et Klingebiel (1999).

Conditions extérieures : L'activité économique et la croissance d'un pays ne sont pas


seulement déterminées par des facteurs internes, mais aussi par les conditions extérieures.
Celles-ci ont une influence sur l'économie nationale aussi bien dans le court et le long terme.
Il y a de nombreuses preuves de la transmission des cycles entre les pays par le biais du
commerce international, des flux financiers extérieurs, et des perceptions des investisseurs sur
la rentabilité attendue de l'économie globale51. En outre, les changements dans les tendances à
long terme peuvent aussi être répartis entre les pays. Ceci est réalisé à travers, par exemple,

                                                            
50
Une mesure similaire est utilisée par Edwards et Levy-Yeyati (2003).
51
Voir Baileau (1996), Eicher (1999), Miller et Upadhyay (2000), et Alcala et Ciccone (2001).

81
 
 

l'effet de la démonstration des réformes économiques et de la diffusion du progrès


technologique52.

Les conditions externes sont prises en compte en incluant deux variables


supplémentaires dans les régressions de la croissance. Ce sont les chocs des termes de
l’échange, affectant chaque pays individuellement, et le changement spécifique à chaque
période, affectant tous les pays de l'échantillon. Les termes de l'échange captent à la fois les
changements dans la demande mondiale des exportations d'un pays et les coûts des intrants
de la production et de la consommation 53 . Les effets spécifiques par période (ou l’effet
temporel) résument les conditions mondiales qui prévalent à une période donnée et reflètent
les périodes de récession et de boom dans le monde entier, les changements dans l'allocation
et les coûts des flux de capitaux internationaux, et les innovations technologiques. Easterly
(2001) constate que les facteurs, tels que l'augmentation des taux d'intérêt internationaux, le
ralentissement de la croissance des pays industrialisés, la hausse de la charge de la dette des
économies en développement et le développement des compétences-biaisées des innovations
techniques, expliquent la diminution marquée du taux de croissance des pays en
développement dans les années 1980 et 1990 par rapport aux deux décennies précédentes.

Toutefois, l'impact de la variation des termes d'échange sur le taux de croissance


économique reste assez ambigu dans la théorie économique. Une amélioration des termes de
l'échange pourrait élever ou abaisser le taux de croissance en courte période. Premièrement,
une amélioration des termes de l'échange peut réduire les prix des intrants par rapport aux prix
des biens. Les quantités offertes devraient augmenter en conséquence dans le court terme.
Deuxièmement, une amélioration des termes de l'échange peut baisser le taux de croissance de
courte période par une appréciation du niveau d'équilibre du taux de change effectif réel,
induisant une baisse des profits sur les biens échangeables. De façon similaire, une
détérioration des termes de l'échange peut causer une dépréciation du niveau d'équilibre du
taux de change effectif réel. Toutefois, l'impact d'une variation des termes de l'échange sur le
taux de change effectif réel reste lui-même ambiguë.

                                                            
52
Voir Helliwell et Chung (1990), Dohse (1996), Ben-David et Loewy (1997), et Keller (2002).
53
Le choc des termes de l’échange est une variable importante dans plusieurs études empiriques sur la
croissance, comme Easterly et al. (1993), Fischer (1993), Barro et Sala-i-Martin (1995), et Easterly, Loayza et
Montiel (1997).

82
 
 

3.2. Le modèle retenu et choix des variables

La spécification générale de notre modèle est la suivante :

                                           µ                                 2.1

Où est le taux de croissance du PIB réel par habitant du pays à la période , est le
logarithme du PIB réel par habitant décalé d’une période, µ est l’effet spécifique du
pays  ,visant à saisir l’incidence des déterminants du taux de croissance du pays qui n’est pas
déjà prise en compte par les autres variables explicatives. Il représente les facteurs non
observables qui varient selon les pays.   est l’effet spécifique temporel, permet de contrôler
les conditions internationales qui changent au fil du temps et affectent les performances de la
croissance des pays de l'échantillon. est un vecteur ligne de l’ensemble des variables
explicatives sur la période t pour chaque pays  . L'inclusion de l’output gap comme variable
explicative permet de contrôler les mouvements cycliques de la production, et par conséquent,
la distinction entre la convergence de transition et le retour cyclique. La comptabilisation des
facteurs conjoncturels est importante dans le cas où les périodes sont relativement courtes.
 représente le régime de change adopté 54 et le terme d’erreur,     représentent
respectivement l’indice pays et l’indice temporel.

Nous procédons à l'estimation de la relation de croissance (équation (2.1)), en utilisant


le taux de croissance du PIB réel par habitant comme variable dépendante. Comme mentionné
précédemment, pour les variables explicatives nous considérons la valeur décalée du PIB par
habitant (en logarithme), l'investissement (en pourcentage du PIB), une mesure de l'ouverture
commerciale (en pourcentage du PIB), l'inflation en moyenne annuelle de l'IPC, la
consommation des administrations publiques (en pourcentage du PIB), le taux brut de
scolarisation secondaire, la croissance démographique, de même qu’une mesure du degré de
développement du secteur financier55 et le régime du taux de change adopté.

                                                            
54
Nous avons retenu les mêmes classifications de 2010 (de jure et de facto) pour 2011, puisque l’évolution des
systèmes de change semble relativement stable.
55
Nous avons essayé trois mesures différentes du degré de développement du secteur financier (M2/PIB, crédit
au secteur privé/PIB et crédit intérieur accordé par les banques /PIB). Nous ne présentons pas ici les résultats
obtenus pour toutes ces mesures.

83
 
 

Pour contrôler les mouvements cycliques de la production dans l'équation de


croissance, une approche possible consiste à utiliser des données en moyenne (exp : moyenne
de 5 ans). Bien que cette méthode ait l'avantage d'éliminer les effets des cycles économiques
du taux de croissance, elle réduit considérablement le nombre de degrés de liberté en
diminuant le nombre d'observations disponibles pour chaque pays. Ceci est bien sûr
particulièrement vrai lorsque la période est courte ou lorsque la fréquence des données
d'origine est faible. Certes, ce type de découpage élimine l’effet des cycles économiques,
néanmoins, il peut entraîner une perte d’information ce qui est susceptible d’affecter les
résultats obtenus. Pour éviter ces inconvénients, nous considérons ici l'ensemble de données
avec des observations annuelles gagnant ainsi un nombre d'observations plus important.

Les variables retenues comme déterminants de la croissance sont celles couramment


utilisées dans la littérature empirique sur la croissance56, notamment dans Levine et Renelt
(1992) et Barro et Sala-i-Martin (1995) et d’autres (Voir l'annexe 6 pour plus de détails sur les
définitions et les sources des variables).

 le PIB par tête décalé ( ) : il est destiné à capter l'effet de convergence conditionnelle
qui prédit que, toutes choses égales, les pays qui ont un PIB réel par tête initialement
faible tendront à croitre relativement plus vite. Barro et Sala-i-Martin (1995) postulent
que, plus le PIB réel par tête initial d'un pays est élevé, plus son stock initial de capital
physique par tête est élevé pour un stock de capital humain donné. Le rendement factoriel
du capital étant décroissant, il s'ensuit que le PIB réel par tête initial est négativement lié à
la croissance du produit (Levine et Renelt, 1992; Hnatkovska et Loayza, 2004).

 Le développement financier (FD) : il est représenté par le ratio du crédit bancaire accordé
au secteur privé rapporté au PIB. Plus le système financier est développé, plus la
croissance est élevée. Le développement du système financier est bénéfique à la
croissance car il favorise une meilleure allocation des ressources productives, la réduction
des contraintes de crédit auxquelles font face les entreprises (Aghion et al., 2005), une
meilleure gestion des risques, le financement des perturbations transitoires (Dornbusch,
                                                            
56
La liste des déterminants potentiels de la croissance est très longue (voir e.g. Sala-i-Martin, 1997). Pour une
lecture critique des analyses de croissance en coupes transversales, se référer à Levine et Zervos (1993) qui
trouvent une corrélation robuste entre le développement financier et la croissance. Temple (1999) discute
plusieurs problèmes de définition et de mesure du PIB et de sa croissance ainsi que les techniques
économétriques utilisées dans les études de croissance. Il aborde aussi diverses questions méthodologiques.

84
 
 

2001). La littérature empirique tend à corroborer l'impact favorable du développement


financier sur la croissance (Hnatkovska et Loayza, 2004; Levine, Loayza et Beck, 2000).

 L'ouverture commerciale (OPEN) : nous la mesurons par la somme des exportations et des
importations au PIB, suivant ainsi des auteurs tels que Rogoff et al. (2004), Aizenman et
Marion, (1999), Hnatkovska et Loayza (2004) et Kose et al. (2005a). L'ouverture
commerciale peut être favorable ou défavorable à la croissance selon que l'effet négatif de
l'ouverture dû à des facteurs géographiques ou structurelles domine l'impact positif
potentiel de l'ouverture commerciale venant d'une politique commerciale favorable 57 .
Nous introduisons la variable d'ouverture commerciale pour contrôler tous ses effets
possibles sur la croissance. En effet, pour répondre aux questions posées dans ce chapitre,
il est nécessaire de prendre en compte tous ces effets, indépendamment de leurs natures ou
de leurs causes.

 L'investissement (I) : représenté par la formation brute du capital fixe rapporté au PIB, il
permet de produire plus dans le futur. Donc, un investissement élevé s'accompagne d'une
croissance plus forte (Levine et Renelt, 1992; Barro, 2001).

 Le capital humain58: ceteris paribus, le stock de capital humain, approximé par le taux de
scolarisation secondaire (IDH), agit favorablement sur la croissance en offrant par
exemple des possibilités plus grandes de diffusion des nouvelles technologies. Le capital
humain peut également être appréhendé comme un facteur de production au même titre
que le capital physique (Barro, 2001). L'utilisation du taux de scolarisation secondaire
comme mesure du capital humain présente certaines faiblesses. En effet, le capital humain
recouvre une notion plus large que le taux de scolarisation secondaire formelle qui, de
surcroit, n'intègre pas la qualité de l'enseignement. La croissance du PIB réel par tête
augmente avec le niveau de capital humain (Hnatkovska et Loayza, 2004; Barro, 2001).

                                                            
57
Temple (1999) expose les conditions dans lesquelles une politique d'ouverture commerciale affecte la
croissance et discute le problème de causalité entre la croissance et l'ouverture commerciale. Sala-i-Martin qui a
évalué la robustesse des effets de plusieurs mesures d'ouverture commerciale sur la croissance conclut que toutes
ces variables à l'exception de la mesure de Sachs et Warner (1996) ne sont pas des facteurs explicatifs robustes
de la croissance économique. Voir aussi Edwards (1993).
58
Pour avoir des données annuelles, nous avons procédé par une interpolation linéaire des données fournies par
la base de données de Barro et Lee 2010.

85
 
 

 Les dépenses de consommation gouvernementales (GOUV): elles visent à capter


l'influence de la politique gouvernementale sur la croissance. L'impact des dépenses
publiques de consommation est quelque peu ambigu (voir Temple, 1999). À des niveaux
faibles ou modérés, il est possible que la dépense publique de consommation agisse
favorablement sur la croissance, notamment lorsqu'elle est financée par des taxes qui ne
sont pas génératrices de distorsions ou lorsque leur hausse survient en période de
ralentissement de l'activité économique. À des niveaux élevés, ces dépenses peuvent
générer suffisamment de distorsions de sorte qu'elles nuisent à la croissance (Barro et
Sala-i-Martin, ibid; Barro, 2001).

 La croissance de la population (POP) : selon la structure de la population, une croissance


de la population totale tend à freiner ou accélérer la croissance du produit. Le signe
attendu du coefficient est donc indéterminé59.

 Le régime de change (ERR): Le régime de change de chaque pays est classé, chaque
année, comme fixe, intermédiaire ou flexible. Chaque catégorie de système de change est
désignée par une variable muette qui prend la valeur un si le système de change du pays
considéré est respectivement fixe, intermédiaire ou flexible au cours de l'année considérée
et zéro sinon.

Les catégories de régimes de change dans les rapports annuels du FMI ont changé
dans le temps (voir chapitre 1). En regroupant les régimes de change officiels en régimes
fixes, intermédiaires et flottants, nous avons essayé de tenir compte de cette évolution. Les
régimes dans lesquels le taux de change nominal est maintenu dans des bandes relativement
étroites par rapport à une ou à plusieurs monnaies sont classés dans les régimes de change
fixes. Les régimes de flexibilité limitée par rapport à une monnaie, la flexibilité limitée dans
le cadre d'un système coopératif et les régimes dans lesquels le taux de change nominal est
ajusté en fonction d'un ensemble d'indicateurs sont classés dans les régimes intermédiaires. En
particulier, les crawling pegs et les crawling bands sont inclus dans les régimes
intermédiaires. Les autres régimes dans lesquels le taux de change n'est pas maintenu dans des
bandes relativement étroites sont classés comme des régimes flexibles. Ils contiennent
notamment les régimes de flottement administré et ceux de flottement libre.
                                                            
59
Voir Barro et Sala-i-Martin (ibid) pour un impact estimé positif et Levine et Renelt (1992) pour un résultat
contraire.

86
 
 

Les données de régimes de change de facto proviennent de la base de Reinhart et


Rogoff (2003)60 dans laquelle les régimes sont classés en fonction des pratiques en matière de
politique de change. Nous avons regroupé les régimes de facto en régimes fixes,
intermédiaires et flexibles à partir des codes de la classification fine de Reinhart et Rogoff.
Ainsi, les régimes de change fixes de facto regroupent le code 1 (régime de dollarisation
intégrale et union monétaire), le code 2 (caisse d'émission et arrimage ou peg préannoncé), le
code 3 (bandes de fluctuations horizontales pré-annoncées inférieures ou égales à +/- 2%) et
le code 4 (les pegs de facto). Les régimes intermédiaires sont composés du code 5 (crawling
peg préannonce), du code 6 (bandes glissantes pré-annoncées inférieures ou égales à +/- 2%),
du code 7 (crawling peg de facto), du code 8 (bandes glissantes de facto inférieures ou égales
à +/- 2%), du code 9 (bandes glissantes pré-annoncées supérieures ou égales à +/- 2%), du
code 10 (bandes glissantes de facto inférieures ou égales à +/- 5%) et du code 11 (bandes
mobiles inférieures ou égales à +/- 2%). Les systèmes de flottement regroupent le code 12
(flottement administré), le code 13 (flottement libre) et le code 14 (freely falling). Notre
catégorie de régimes de change fixes de facto est identique à celle de la classification agrégée
de Reinhart et Rogoff (2003). La catégorie de régimes intermédiaires regroupe les régimes
intermédiaires de Reinhart et Rogoff à l'exception des régimes de flottement administré que
nous incluons dans les régimes flottants.

La littérature récente a révélé des disparités substantielles entre les régimes de change
que les pays déclarent au FMI et ceux qu'ils mettent en œuvre 61 , de sorte qu'un travail
empirique qui reposerait uniquement sur la classification de jure mènerait à des résultats
inconsistants. Par exemple, l’avantage anti-inflationniste des régimes de change fixes profite
relativement plus aux pays qui tiennent leurs engagements (Ghosh et al., 1997). La
classification de Reinhart et Rogoff utilise les taux de marché. Ces taux sont pertinents
puisque, après la fin du système de changes fixes généralisé de Bretton Woods, plusieurs pays
ont maintenu durant de nombreuses années des contrôles ou des restrictions de change
(Reinhart et Rogoff, 2003). Ces pratiques ont contribué à éloigner la parité du marché
parallèle de la parité officielle de la monnaie. Cela implique que les politiques effectivement
mises en œuvre sont plus à même de nous informer sur les effets de la politique change sur les
                                                            
60
Les auteurs ont actualisé les données jusqu’au 2010.
61
Ce phénomène est illustré par des auteurs comme Ghosh et al. (1995), Levy Yeyati et Sturzenegger (2002) et
Dubas et al. (2005). Reinhart et Rogoff (2003) trouvent que sur la période 1973-1999, environ la moitié des
observations de leur échantillon est associée à des pratiques de change qui ont différé de la politique initialement
annoncée. Les données de la période 1965-1972 sont utilisées comme valeurs retardées pour la période 1973-
1979.

87
 
 

performances de croissance. Néanmoins, cette implication n'exclut pas que les régimes
officiels soient importants pour l'évaluation d'autres performances économiques. Genberg et
Swoboda (2005) soutiennent ce point de vue et affirment que les systèmes de change de jure
sont appropriés pour étudier les phénomènes économiques dans lesquels les signaux transmis
par les déclarations des autorités monétaires se révèlent cruciaux. On est alors dans une
approche d'anticipation par opposition aux méthodes de facto qui classent les régimes de
change a posteriori.

4. Méthodologie d'estimation 

L’équation de croissance proposée pose des défis pour l'estimation. La première est la
présence des effets spécifiques temporel et individuel non observés. Bien que l'inclusion de
variables muettes spécifiques puisse tenir compte de ces effets, les méthodes en panel
traditionnelles (les estimateurs «within» ou «en différence») sont inappropriées lorsque les
spécifications intègrent des effets spécifiques aux pays, du fait de la nature dynamique de la
régression. Le deuxième défi réside dans le fait que certaines variables explicatives seraient
susceptibles d'être conjointement endogènes avec la variable expliquée (croissance
économique). Donc, nous avons besoin de contrôler les biais résultant de la causalité
simultanée ou inversée. Dans la section suivante, nous présentons la méthodologie
économétrique que nous utilisons pour tenir compte de la présence d’effets spécifiques pays et
de l’endogénéité des variables dans un modèle dynamique en données de panel.

Nous utilisons la méthode des Moments généralisée (GMM) développée pour des
modèles dynamiques sur les données de panel. Ces méthodes ont été introduites par Holtz-
Eakin, Newey et Rosen (1990), Arellano et Bond (1991), et Arellano et Bover (1995). Les
estimateurs GMM sont basés, tout d’abord, sur des régressions en différence et/ou des
instruments de contrôle pour les effets non observés, et deuxièmement, utilisent les
observations passées des variables explicatives et de la variable dépendante comme variables
instrumentales (instruments «internes»). Nous pouvons écrire l’équation comme suit,

                                   , , 1 , , ,                               2.2

88
 
 

Où , représente le logarithme du PIB par tête réel, représente les variables


explicatives du modèle, l’effet spécifique pays, l’effet spécifique temporel et le terme
d’erreur,  est l’indice pays, et  l’indice temporel.

L’équation (2.2) qui est équivalente à une équation de croissance, peut être réécrite de
la façon suivante :

                                                    , , , ,                                          2.3

Il existe deux types d’estimateur: (a) l’estimateur d’Arellano et Bond (1991) ou GMM
en différences et (b) l’estimateur des GMM en système. Notons que l’utilisation de ces deux
estimateurs présuppose la quasi-stationnarité des variables de l’équation en niveau, et
l’absence d’auto-corrélation des résidus.

En ce qui concerne l’estimateur d’Arellano et Bond (1991), la stratégie pour répondre


à un éventuel biais des variables omises et les effets spécifiques est de différencier l’équation
(2.3) en niveau.

On obtient l’équation :

     , , ,   , , , , ,      2.4

La différence première élimine l’effet spécifique pays et par conséquent le biais de


variables omises invariantes dans le temps. Par construction le terme d’erreur , ,

est corrélé avec la variable retardée en différence  ,   , ). Les différences premières


des variables explicatives du modèle sont instrumentées par les valeurs retardées (en niveau)
de ces mêmes variables. Le but est de réduire les biais de simultanéité et le biais introduit par
la présence de la variable dépendante retardée en différence dans le membre de gauche.

Sous l’hypothèse que les variables explicatives du modèle sont faiblement exogènes
(elles peuvent être influencées par les valeurs passées du taux de croissance, mais restent non
corrélées aux réalisations futures du terme d’erreur) et que les termes d’erreur ne sont pas

89
 
 

auto-corrélés, les conditions de moments suivantes s’appliquent pour l’équation en première


différence.
                               ,  , , ,         0    2; 3, … ,                               2.5  

                              ,  , , ,         0    2; 3, … ,                               2.6

En fonction de ces conditions, l’estimateur des GMM est connu comme l'estimateur en
différence. Malgré ces avantages par rapport aux simples estimateurs en données de panel, il
existe d’importantes lacunes statistiques. Le problème avec cet estimateur est qu’il souffre de
la faiblesse des instruments, qui entraîne des biais considérables dans les échantillons finis, et
sa précision est asymptotiquement faible. Plus précisément, les valeurs retardées des variables
explicatives sont de faibles instruments de l’équation en différence première. Par ailleurs, la
différentiation de l‘équation en niveau élimine les variations inter-pays et ne prend en compte
que les variations intra-pays. Alonso-Borrego et Arellano (1996) et Blundell et Bond (1997)
montrent que lorsque les variables explicatives sont persistantes dans le temps, les niveaux
décalés de ces variables sont des instruments faibles pour l'équation de régression en
différences.62.

Afin de réduire les biais potentiels et l’imprécision associée à l’estimateur usuel en


différence, nous utilisons l’estimateur en système développé en Arellano et Bover, (1995) et
Blundell et Bond, (1997). L’estimateur GMM en système permet de lever cette limite. Il
combine l’équation en différence avec celle en niveau. L’équation en différence première
(Equation 2.4) est estimée simultanément avec l’équation en niveau (Equation 2.3) par les
GMM. Dans l’équation en niveau, les variables sont instrumentées par leurs différences
premières 63 . Blundell et Bond (1998) ont testé cette méthode à l’aide des simulations de
Monte Carlo. Ces auteurs ont montré que l’estimateur GMM en système est plus efficient que
l’estimateur des GMM en différence. Ce dernier produit des coefficients biaisés sur les petits
échantillons. Le biais est d’autant plus important que les variables sont persistantes dans le
temps, que les effets spécifiques sont importants et que la dimension temporelle du panel est
faible.

                                                            
62
Un autre problème avec l'estimateur en simple différence se rapporte à une erreur de mesure: la différenciation
peut exacerber le biais dû à des erreurs dans les variables en diminuant le rapport signal-bruit (voir Griliches et
Hausman, 1986).
63
Seule la différence première la plus récente est utilisée, l’utilisation d’autres différences premières retardées
entrainerait une redondance des conditions de moments (Arellano et Bover (1995))

90
 
 

Pour l’équation en niveau, on utilise des conditions additionnelles de moments en


supposant que les variables explicatives sont stationnaires64.

                                    ,   , . ,   0      1                                  2.9

                                   ,   , . ,   0      1                               2.10

Les conditions de moments ci-dessus (2.5 à 2.9) combinées avec la Méthode des
Moments Généralisées permettent d’estimer les coefficients du modèle. Pour tester la validité
des variables retardées comme instruments, Arellano et Bond (1991), Arellano et Bover
(1995), et Blundel et Bond (1998) suggèrent le test de suridentification de Sargan/Hansen. Par
construction le terme d’erreur en différence première est corrélé au premier ordre, mais il ne
doit pas l’être au second ordre. Pour tester cette hypothèse, ces mêmes auteurs suggèrent un
test d’autocorrélation de second ordre.

5. Résultats et interprétation 

5.1. Résultats avec les régimes officiels

Les résultats de régressions de la croissance utilisant les régimes de change officiels


sont présentés dans les tableaux ci-dessous. On examine successivement l’ensemble des pays
émergents (tableau 6), ensuite les pays de l’OCDE (tableau7), les pays asiatiques (tableau 8)
et enfin les pays d’Amérique latine (tableau 9). Dans notre modèle, nous retenons la version
de l'estimateur des moments généralisés recommandée par Arellano et Bond (1991). Elle est
appliquée en spécifiant l'option des GMM en différence et la procédure des GMM en système
(voir Annexe 5).

Plusieurs régressions ont été effectuées pour les pays émergents, avec ou sans
l’inflation (INF) et la variable du développement financier (FD). Chaque régression inclut des
variables muettes désignant chacune le régime de change adopté. Les résultats des estimations
figurent dans le tableau 6. La lecture du tableau fait ressortir que le régime de change fixe
                                                            
64
Étant donné que les niveaux décalés sont utilisés comme instruments dans la spécification en différences, que
la différence la plus récente est utilisée comme instrument dans la spécification en niveaux. L'utilisation d'autres
différences retardées entraînerait des conditions de moments redondants (voir Arellano et Bover, 1995).

91
 
 

n’exerce pas un effet sur la croissance. Ce résultat est en désaccord avec celui mis en lumière
par Dubas et al. (2005) et par Frankel et Wei (2008) dans les pays en développement. Une fois
l'impact de l'inflation et de la variable représentant le développement financier pris en compte
et conditionnel à toutes les autres variables incluses dans les régressions, l’effet des systèmes
de change fixes ne tend pas à renforcer la croissance, en dépit d’un impact positif. Nos
résultats montrent aussi que les systèmes de change flexibles n’ont pas d’effet sur la
croissance avec un coefficient négatif mais statistiquement non significatif. Ainsi, céteris
paribus, les régimes du taux de change ne sont pas un facteur déterminant pour la croissance
économique pour les économies émergentes. Cette conclusion est en désaccord avec les
résultats de Ghosh et al. (1997), Coudert et Dubert, (2005) et d’autres.

En général, les autres variables explicatives apparaissent avec les signes attendus.
Néanmoins, le développement financier n’apparait pas comme un déterminant de la
croissance, avec une élasticité associée qui est entre -0.0003 et -0.0007 selon l'équation
retenue. Ce résultat tend à confirmer les hypothèses sur les effets négatifs attendus du
développement financier. Mais, l'effet estimé n'est pas significatif aux seuils critiques
habituels, comme dans Sala-i-Martin (1997). Les pays n'enregistrent les bénéfices du
développement financier sur la croissance économique que quand les marchés financiers
deviennent matures et que la régulation et la supervision financières s'améliorent. Prasad et al.
(2004) avancent un argument similaire. Notre résultat pourrait aider à comprendre pourquoi
certains pays émergents ont des systèmes financiers développés comparativement aux autres
pays en développement (voir Frankel et Wei, 2008) mais continuent d'enregistrer une
croissance relativement faible65. L'explication théorique est fournie par Aghion, Bacchetta et
Banerjee (2004). Ils développent un modèle dans lequel l'investissement des firmes est soumis
a des contraintes de crédit. Le développement financier réduit ces contraintes. Dans les pays
dont le système financier est très développé, l'investissement des firmes n'est pas contraint par
la liquidité de sorte que les chocs de liquidité ou de cash-flow n'affectent pas l'investissement.
Dans les pays dont le système financier est faiblement développé, l'accès des firmes au crédit
est limité de sorte que l'impact des chocs de liquidité est également limité. En revanche, dans
les pays à développement financier intermédiaire, les firmes dépendent plus de l'accès au
crédit pour financer leurs investissements.

                                                            
65
Obstfeld (2004b) abonde dans le même sens pour les pays émergents.

92
 
 

Ceteris paribus, une hausse de l'investissement augmente le taux de croissance du PIB,


corroborant les résultats empiriques antérieurs tels que ceux de Barro et Sala-i-Martin (1995),
ou Levine et Renelt (1992). L'impact de l'investissement est très significatif statistiquement et
économiquement. Une hausse de 1% de la croissance du taux d'investissement s'accompagne
d'une augmentation de la croissance de 0.80 % en moyenne par rapport à toutes les
spécifications. Les résultats révèlent aussi que le capital humain 66 , mesuré par le taux
d'éducation secondaire, est un facteur de croissance pour les pays émergents. En effet,
l'élasticité du taux de scolarisation est comprise entre 0.29 et 0.31 selon le tableau (6). La
convergence conditionnelle est vérifiée également dans notre échantillon. Ceteris paribus, les
pays qui ont un PIB réel par tête décalé élevé croissent relativement moins vite. Le coefficient
relatif au PIB réel par tête est compris entre 0.70 à 0.72 selon la spécification. Selon nos
résultats, l'ouverture commerciale améliore significativement la croissance, une hausse de 1%
de l'ouverture commerciale entrainant une augmentation de la croissance de 0.49% à 0.54%.
Le coefficient estimé dans toutes les régressions mesure l'impact net de l'ouverture
commerciale sur la croissance. L'impact positif de l'ouverture commerciale semble donc
dominer ses effets négatifs sur la croissance. Notre objectif n'est pas d'évaluer l'impact des
politiques commerciales mais de prendre en compte tous les effets liés à l'ouverture
commerciale de sorte qu'ils ne soient pas captés par d'autres variables du modèle. En ce sens,
notre analyse se distingue des travaux qui cherchent à isoler l'impact de la politique
commerciale de celui d'une ouverture qui serait expliquée par des facteurs géographiques
(Loayza, Fajnzylber et Calderón, 2004) ou structurelles (Aghion et al., 2006). En outre, les
effets des politiques commerciales sur la croissance économique dépendront étroitement de la
structure de spécialisation de chaque pays, une spécialisation dans les produits primaires
(manufacturiers) induisant un impact négatif (positif) sur la croissance (Temple, 1999).

Le tableau 6 indique aussi que la croissance démographique freine la croissance


économique comme l'ont également établi Levine et Renelt (1992). Lorsque le taux de
croissance de la population s’accroit de 1%, le taux de croissance du PIB par tête ralentit de
0.54% à 0.68% et sa significativité est relativement faible. Toutefois, la significativité
statistique de la croissance démographique n'est pas toujours robuste. Enfin, la croissance
diminue avec la consommation gouvernementale et sa significativité reste très importante au
seuil de 1%.
                                                            
66
Le taux d'éducation secondaire n'est pas toujours robuste dans les régressions de croissance (Sala-i-Martin,
1997).

93
 
 
Tableau 6: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays émergents selon la classification de jure
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.70 -0.70 -0.70 -0.70 -0.70 -0.70 -0.72 -0.72 -0.72
(-27.59)*** (-26.97)*** (-26.93)*** (-26.77)*** (-27.67) (-27.07)*** (-27.63)*** (-27.48)*** (-27.98)***
Crédit domestique accordé au -0.0003 -0.0007 -0.0006 -0.0002 -0.0003 -0.0006
secteur privé/PIB (-0.24) (-0.43) (-0.39) (-0.17) (-0.21) (-0.91)
Investissement direct étranger 0.0026 0.0026 0.0025 0.0028 0.0026 0.0025 0.0025 0.0027 0.0025
(3.21)*** (3.20)*** (3.18)*** (3.50)*** (3.21)*** (3.19)*** (2.96)*** (3.25)*** (2.97)***
Consommation du secteur -0.0090 -0.0089 -0.0089 -0.0091 -0.0089 -0.0088 -0.0088 -0.0091 -0.0089
public/PIB (-6.10)*** (-5.94)*** (-5.97)*** (-6.12)*** (-5.99)*** (-5.90)*** (-5.67)*** (-5.83)*** (-5.71)***
Indicateur du développement 0.29 0.29 0.29 0.30 0.29 0.29 0.30 0.31 0.30
Humain (20.01)*** (20.068)*** (20.00)*** (22.78)*** (20.09)*** (20.07)*** (20.81)*** (23.97)*** (20.85)***
Inflation -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003
(-1.42) (-1.53) (-1.53) (-1.54) (-1.46) (-1.55) (-1.53)
Investissement /PIB 0.0078 0.0079 0.0079 0.0083 0.0079 0.0079 0.0082 0.0086 0.0082
(13.99)*** (13.98)*** (14.15)*** (14.80)*** (13.92)*** (14.03)*** (14.24)*** (15.14)*** (14.34)***
Degré d’ouverture / PIB 0.0051 0.0051 0.0050 0.005 0.0049 0.0054 0.0054
(2.42)** (2.39)** (2.39)** (2.41)** (2.35)** (2.50)** (2.51)**
Taux de croissance de la population -0.0068 -0.0068 -0.069 -0.0054 -0.0068 -0.0068 -0.0068 -0.0056 -0.0068
(-1.70)* (-1.67)* (-1.71)* (-1.34) (-1.67)* (-1.67)* (-1.68)* (-1.36) (-1.68)*
Régime de change fixe 0.0060 0.0048
(1.07) (0.84)
Régime de change intermédiaire -0.0012
(-0.74)
Régime de change flottant -0.0029
(-0.52)
Change fixe* inflation -0.00012
(-0.67)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0001
(0.21)
Crédit domestique accordé au 0.0004
secteur privé/PIB *change fixe (0.45)
Degré d’ouverture * change flottant 0.0003
(0.50)
Crédit domestique accordé au -0.0002
secteur privé/PIB *change flottant (-0.16)
Observations 724 724 724 724 724 724 724 724 724
Number of id 25 25 25 25 25 25 25 25 25
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
94
 
 

Quant à la vérification de l’hypothèse concernant le lien entre le type de régime de


change, l’ouverture à l’égard du commerce international et la croissance, les résultats de
l’estimation du coefficient de la variable croisée entre le régime de change (fixe et flexible) et
le degré d’ouverture, sont représentés respectivement dans les colonnes 4 et 8 tableau 6. Nous
avons conclu aux résultats que l’hypothèse d’interaction entre le degré d’ouverture et les
régimes de change n’est pas vérifiée dans le cas des pays émergents. En dépit du signe positif,
le coefficient relatif à cette variable reste statistiquement non significatif.

Enfin nous avons essayé de tester la validité du résultat d’Aizenman et Hausmann


(2000) quant à l’interaction entre le régime de change et les indicateurs du développement du
secteur financier. Nous avons mené la régression pour trois indicateurs à savoir la masse de
monnaie et quasi-monnaie (M2) par rapport au PIB et les crédits domestiques accordés par le
secteur bancaire par rapport au PIB et les crédits domestiques accordés au secteur privé par
rapport au PIB. Les résultats présentés dans le tableau 6; colonnes 5 et 9, montrent que le
coefficient du terme d’interaction entre le régime de change flottant (fixe) et les crédits
domestiques accordés au secteur privé est négatif (positif) mais statistiquement non
significatif. Dans le tableau 6, il ne figure qu’une seule régression pour les crédits
domestiques accordés au secteur privé par rapport au PIB. Les résultats des autres régressions
aboutissent presque au même résultat.

Nous avons évalué la robustesse de nos résultats en procédant à un certain nombre


d'exercices. Nous avons ré-estimé les équations de croissance en se basant sur un échantillon
des pays de l’OCDE. Les résultats contenus dans les équations 1 à 9 du tableau 7 sont
qualitativement similaires à ceux du tableau 6. Comme aux pays émergents les régimes de
changes ne semblent pas avoir un effet sur la croissance. L'impact du régime de change fixe
ne semble pas contribuer à la croissance dans les pays avancés. La fixité du taux de change y
est associée à un impact négatif mais statistiquement non significatif. L’inclusion dans les
régressions la variable FD (développement financier) et l’inflation, n’améliore pas l'effet du
régime de change fixe sur la croissance (colonne 2), attestant que l'effet capturé par le
coefficient de Fixe dans les régressions reste très limité. En outre, le régime de change
flexible ne semble pas avoir un effet sur la croissance, avec un coefficient positif mais non
significatif. Au total, l’effet des régimes de change demeure un effet très limité et non
significatif. Identiquement au pays émergents, nous ne pouvons pas par conséquent considérer
les régimes de change comme un déterminant de la croissance pour les pays avancés.

95
 
 
Tableau 7: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays avancés selon la classification de jure
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.54 -0.52 -0.53 -0.53 -0.49 -0.52 -0.52 -0.48 -0.53
(-24.98)*** (-23.4)*** (-23.2)*** (-24.81)*** (-20.75)*** (-24.9)*** (-22.5)*** (-20.58)*** (-25.05)***
Crédit domestique accordé au -0.0006 -0.0006 -0.0003 -0.0006 -0 .0006 -0.0003
secteur privé/PIB (-0.88) (-0.79) (-0.41) (-0.83) (-0.84) (-0.47)
Investissement direct étranger 0.0009 -0.001 -0.0006 0.0004 0.001 0.0004 0.0004 0.0015 0.0004
(0.50) (-0.97) (-0.37) (0.28) (0.95) (0.28) (0.29) (0.88) (0.30)
Consommation du secteur -0.011 -0.012 -0.012 -0.012 -0.015 -0.012 -0.012 -0.015 -0.012
public/PIB (-10.52)*** (-10.1)*** (-10.4)*** (-10.78)*** (-12.90)*** (-10.6)*** (-10.6)*** (-12.6)*** (-10.8)***
Indicateur du développement 0.045 0.040 0.044 0.039 0.061 0.039 0.038 0.057 0.039
Humain (11.02)*** (9.64)*** (10.68)*** (9.56)*** (14.13)*** (9.56)*** (9.32)*** (13.14)*** (9.40)***
Inflation -0.0014 -0.0014 -0.0013 -0.0014 -0.0015 -0.0013 -0.0014
(-3.85)*** (-3.99)*** (-3.25)*** (-3.83)*** (-3.86)* (-3.34)*** (-3.58)***
Investissement /PIB 0.0064 0.0065 0.0065 0.0064 0.0065 0.0064 0.0065 0.0066 0.0064
(9.61)*** (9.56)*** (9.46)*** (9.76)*** (9.21)*** (9.54)*** (9.57)*** (9.04)*** (9.76)***
Degré d’ouverture / PIB 0.0016 0.0017 0.0016 0.0017 0.0017 0.0017 0.0017
(9.77)*** (10.5)*** (10.10)*** (10.26)*** (10.5)*** (10.4)*** (10.50)***
Taux de croissance de la population -0.0015 -0.0013 -0.0012 -0.0011 -0.0013 -0.0013 -0.0012 -0.0013 -0.0012
(-3.59)*** (-2.97)*** (-3.72)*** (-2.75)** (-3.04)*** (-2.91)*** (-2.81)*** (-3.03)*** (-2.73)***
Régime de change fixe -0.00018 -0.00028
(-0.50) (-0.66)
Régime de change intermédiaire -0.0039
(-1.05)
Régime de change flottant 0.0057
(1.30)
Change fixe* inflation -0.0057
(-1.37)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0004
(1.08)
Crédit domestique accordé au 0.0008
secteur privé/PIB *change fixe (0.22)
Degré d’ouverture * change flottant 0.0017
(2.25)**
Crédit domestique accordé au 0.0002
secteur privé/PIB *change flottant (0.41)
Observations 522 522 522 522 522 522 522 522 522
Number of id 18 18 18 18 18 18 18 18 18
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
96
 
 

Toutefois, le coefficient de la variable de l’ouverture commerciale associée au régime


de change flexible semble avoir un effet significatif et de signe positif sur la croissance. Ce
résultat suggère que, toutes choses égales, le régime de change flexible permet d’atténuer
l'impact défavorable de l'instabilité des termes de l'échange sur la croissance via le commerce
(par rapport aux régimes plus fixes) dans les économies avancées. Cet effet corrobore
l'argument selon lequel les taux de change flexibles permettent un meilleur ajustement aux
chocs des termes de l'échange et par conséquence l’amélioration du commerce. Il confirme
aussi l'évidence empirique de Broda (2004). Dans une étude empirique, Broda (2004)
confirment que les régimes de change fixes amplifient l'impact des chocs des termes de
l'échange sur la croissance, en particulier celui des chocs défavorables. Edwards et Levy
Yeyati (2003) prouvent que cette réponse asymétrique plus marquée de la croissance aux
chocs des termes de l'échange dans les régimes de change fixes conduit à une réduction plus
forte de la croissance moyenne. De même, Aghion et al. (2006) trouvent que les systèmes de
change fixes amplifient l'impact négatif de la volatilité des termes de l'échange sur la
croissance de la productivité alors que les régimes de change flottants l'annulent
pratiquement.

Dans l’équation 3 du tableau 7, la variable croisée du régime de change fixe et de


l’inflation est introduite. Elle apparait avec un coefficient négatif mais non significatif. Ceci
remet en cause l’hypothèse de la crédibilité, selon laquelle les régimes de changes fixes
permettent une bonne maitrise de l’inflation.

L’introduction de la variable explicative représentant le degré d’ouverture


commerciale a amélioré les résultats des estimations. Le coefficient associé à cette variable
est positif, varie entre 0.0016 et 0.0017, et statistiquement significative. L’effet positif obtenu
du degré d’ouverture commerciale, signifie que les taux d’ouverture commerciale importants
qui ont marqué ces économies ont favorisé la croissance économique de ces dernières. Un tel
effet peut être rendu, entre outre, à l’adoption des régimes de changes flottants. En effet, une
ouverture commerciale importante peut être bénéfique quant à la croissance économique en
présence d’un régime de change flottant. Tel régime peut jouer le rôle d’amortisseur de tous
les chocs exogènes défavorables. Alors qu’une ouverture importante sur les marchés
internationaux couplée d’un régime de change fixe peut rendre les économies sous les fouets
des chocs exogènes défavorables sans être couvertes par un régime de change flottant. Ainsi,
elle aura un effet négatif sur la croissance économique.

97
 
 

La régression révèle par ailleurs un effet positif fortement significatif du taux


d'investissement et de l’indicateur du développement humain (tableau 7) ainsi qu'un effet
négatif significatif (fortement) du PIB réel par habitant décalé, et de la consommation
publique. En revanche le développement financier et l’investissement direct étranger
n’apparaissent pas comme des variables significatives dans le modèle. Reste à signaler que le
coefficient du taux de croissance de la population est de signe négatif et statistiquement
significatif. Enfin, nous avons ajouté une variable désignant les régimes de change
intermédiaires dans l’équation 6 du tableau 7. On constate que cette dernière variable n'est pas
significative et ne modifie pas les conclusions précédentes concernant l'impact des autres
variables de contrôle.

Dans un dernier exercice, nous avons aussi évalué la robustesse de nos résultats en
procédant au découpage de l’échantillon des pays émergents en deux régions. L'analyse par
régions relativise très largement ces tendances (tableau 8 et 9). Si l'on s'intéresse en premier
lieu aux pays asiatiques, la régression sans l’indicateur du développement financier et
l’inflation laisse apparaître pour le régime de changes fixes un coefficient positif (de 0,0044)
mais non significatif. En revanche, avec l’introduction de la variable inflation et le
développement financier dans la régression l’effet du change fixe sur la croissance devient
négatif, quoiqu’il reste non significatif (Fixe présente un coefficient de -0,0024 mais non
significatif). L’intégration d’un régime intermédiaire dans la régression, semble améliorer les
résultats. Les régimes intermédiaires apparaissent plus adapter au besoin de croissance
économique des pays asiatiques. Les régimes de changes intermédiaires ont un impact positif
avec un coefficient de 0,0042 et significatif au seuil de 5%. Il s'avère du reste que l’ouverture
commerciale a joué de façon positive et significative sur la croissance économique de la
région au cours de la période étudiée. Par contre la consommation des administrations
publiques et l’inflation ont des signes négatifs et statistiquement très significatifs au seuil de
1%.

98
 
 
Tableau 8: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays asiatiques selon la classification de jure
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.55 -0.47 -0.51 -0.43 -0.48 -0.35 -0.36 -0.35 -0.38
(-16.65)*** (-14.62)*** (-15.14)*** (-13.14)*** (-15.29)*** (-11.94)*** (-11.93)*** (-11.62)*** (-12.83)***
Crédit domestique accordé au -0.0054 -0.008 -0.009 -0.008 -0.007 -0.007
secteur privé/PIB (-2.79)** (-3.55)** (-4.34)*** (-3.80)*** (-3.12)*** (-3.30)***
Investissement direct étranger 0.0039 0.0038 0.0037 0.0040 0.0038 0.0034 0.0034 0.0036 0.0035
(4.46)*** (4.63)*** (4.23)*** (4.80)*** (4.56)*** (4.22)*** (4.18)*** (4.47)*** (4.38)***
Consommation du secteur -0.011 -0.012 -0.011 -0.013 -0.012 -0.012 -0.012 -0.013 -0.013
public/PIB (-4.64)*** (-5.41)*** (-4.64)*** (-5.53)*** (-5.38)*** (-5.49)*** (-5.44)*** (-5.62)*** (-5.54)***
Indicateur du développement 0.28 0.24 0.28 0.26 0.23 0.19 0.19 0.21 0.19
Humain (12.22)*** (10.56)*** (12.48)*** (12.20)*** (10.40)*** (9.48)*** (9.39)*** (10.85)*** (9.43)***
Inflation -0.0016 -0.0013 -0.0015 -0.0012 -0.0011 -0.0009 -0.0011
(-5.46)*** (-4.68)*** (-5.23)*** (-3.84)*** (-3.74)*** (-3.12)*** (-3.68)***
Investissement /PIB 0.0066 0.0058 0.0070 0.0067 0.0056 0.0064 0.0060 0.0067 0.0056
(9.93)*** (9.68)*** (10.71)*** (10.65)*** (8.94)*** (10.04)*** (9.57)*** (10.78)*** (10.78)***
Degré d’ouverture / PIB 0.0055 0.0068 0.0048 0.008 0.0057 0.0056 0.0062
(2.59)** (3.32)*** (2.26)** (4.02)*** (2.72)*** (2.66)*** (2.92)***
Taux de croissance de la population -0.0082 -0.0104 -0.0086 -0.0079 -0.010 -0.014 -0.0105 -0.013 -0.013
(-2.26)** (-3.06)*** (-2.40)** (-2.39)** (-2.89)** (-4.12)*** (-3.11)*** (-3.64)*** (-3.85)***
Régime de change fixe 0.0044 -0.0024
(0.59) (-0.33)
Régime de change intermédiaire 0.0042
(2.46)**
Régime de change flottant -0.00044
(-0.59)
Change fixe * inflation -0.0001
(-0.12)
Degré d’ouverture * change fixe 0.00035
(0.60)
Crédit domestique accordé au 0.00010
secteur privé/PIB * change fixe (1.29)
Degré d’ouverture * change flottant 0.0001
(0.16)
Crédit domestique accordé au -0.0021
secteur privé/PIB * change flottant (-2.48)**
Observations 289 289 289 289 289 289 289 289 289
Number of id 10 10 10 10 10 10 10 10 10
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
99
 
 

Cependant, le développement financier n’est pas favorable à la croissance, avec une


élasticité entre -0.0054 et -0.009 selon l'équation retenue. Ce résultat tend à confirmer les
hypothèses sur les effets négatifs attendus du développement financier. Un tel état de chose
peut être rendu au sous-développement des marchés financiers de ces économies, au mauvais
fonctionnement du système bancaire et une politique de crédit inadéquate et que les crédits
sont parfois investis dans des projets improductifs (secteur d’immobilier, consommation
finale, etc.…). Les autres déterminants de la croissance apparaissent avec des signes attendus.

Le résultat d’Aizenman et Hausmann (2000) quant à l’interaction entre le régime de


change et les indicateurs du développement du secteur financier semble être validé dans le cas
des pays asiatiques. D’une part, ce résultat confirme partiellement celui d’Aizenman et
Hausmann, (2000). Ainsi, les auteurs stipulent que les gains découlant de l’adoption d’un
régime de changes fixe peuvent être supérieurs pour les économies émergentes que pour les
pays industrialisés, à cause du degré de développement de leurs marchés financiers respectifs.
Cependant, Chang et Velasco (2000) mettent en garde contre la conjonction d’un secteur
financier sous-développé et d’un taux de change fixe. En effet, selon ces auteurs, l’adoption
d’un régime fixe diminue la probabilité des déséquilibres de la balance des paiements mais
augmente celle des crises bancaires. Par contraste, un régime de change flottant peut aider à
éviter ces crises, dans la mesure où les dépôts bancaires sont libellés dans la monnaie du pays
et où la banque centrale est disposée à jouer le rôle de prêteur de dernier ressort (Aloui et
Sassi, (2005)).

En Amérique latine, le régime de change fixe apparaît comme une variable explicative
de la croissance, avec un effet positif et statistiquement significatif au seuil de 5%. Un effet
qui pourrait indiquer l'existence d'une productivité résiduelle plus importante en régimes de
change fixes. Avec l’inclusion des variables inflation et indicateur de développement
financier, les régimes de change fixes préservent leur impact positif et significatif sur la
croissance dans la régression. Toutes choses égales par ailleurs, un pays qui a eu un système
de change fixe toutes les années enregistre un taux annuel de croissance d'environ 2.0 % à 2.2
% en moyenne. En revanche, le taux auquel décroit l'économie d'un pays ayant un régime de
change flexible est de 0.12% (voir tableau 9, colonnes 1, 2 et 7). Néanmoins, le désavantage
de croissance que procure la flexibilité du taux de change nominal n’est pas significatif
statistiquement. Notre résultat est, dans une certaine mesure, en accord avec celui d’Aghion et

100
 
 

al. (2006) qui montrent que les régimes de change flexibles (par rapport aux régimes fixes)
sont associés à une croissance plus faible de la productivité.

Comme aux pays asiatiques, l’hypothèse d’Aizenman et Hausmann (2000) quant à


l’interaction entre le régime de change fixe et les indicateurs du développement du secteur
financier semble également être vérifiée. En effet, le coefficient associé à cette variable est
positif et statistiquement significatif au seuil de 5%. Nos résultats montrent aussi, que la
variable degré d’ouverture associée aux régimes de change fixe est positif avec un coefficient
statistiquement significatif dans le cas des pays d’Amérique latine.  Les régimes de change à
ancrage souple ou rigide permettent en général d’encourager le commerce et l’investissement
entre pays en réduisant les coûts des transactions et les risques provenant de la volatilité du
taux de change. Toutefois, notre résultat est contraire à celui de Ghosh et al. (1997) qui, de
surcroît, avancent que l'investissement croit plus vite dans les régimes de change fixes que
dans les systèmes flexibles, ces derniers étant associés à une croissance plus forte du
commerce et de la productivité. Toutefois, le régime de change fixe fournit indiscutablement
une stabilité très utile à la prise de décisions économiques. Le régime de change flottant
engendre au contraire une incertitude qui nuit au commerce et à l’investissement, et qui oblige
à des opérations coûteuses de couverture.

Pour ce qui concerne les autres facteurs, outre la consommation des administrations
publiques, qui s'avère dans cette région sans influence sur la croissance, le taux
d'investissement joue positivement sur la croissance du PIB, avec une forte significativité au
seuil de 1%. Le niveau de croissance de PIB par tête décalé semble également revêtir une
grande importance. Par ailleurs, il agit dans le sens d'une convergence des pays les moins
développés vers les plus développés.

101
 
 
Tableau 9: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays Amérique Latine selon la classification de jure
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.81 -0.81 -0.81 -0.81 -0.81 -0.81 -0.81 -0.82 -0.81
(-20.91)*** (-20.48)*** (-19.70)*** (-19.92)*** (-20.14)*** (-20.42)*** (-20.40)*** (-20.52)*** (-20.39)***
Crédit domestique accordé au 0.00017 0.00014 0.00016 0.00021 0.00014 0.00014
secteur privé/PIB (0.84) (0.70) (0.78) (1.02) (0.71) (0.70)
Investissement direct étranger 0.0006 0.00062 0.00048 0.00092 0.00076 0.00017 0.0004 0.0006 0.00025
(0.42) (0.41) (0.31) (0.61) (0.52) (0.11) (0.26) (0.41) (0.16)
Consommation du secteur -0.0031 -0.00308 -0.0031 -0.0032 -0.0029 -0.003 -0.003 -0.003 -0.003
public/PIB (-1.60) (-1.56) (-1.58) (-1.61) (-1.51) (-1.45) (-1.46) (-1.58) (-1.38)
Indicateur du développement 0.16 0.16 0.16 0.17 0.16 0.17 0.17 0.18 0.17
Humain (7.86)*** (7.95)*** (7.67)*** (9.17)*** (7.89)*** (8.39)*** (8.36)*** (9.72)*** (8.28)***
Inflation -0.0002 -0.0003 -0.0002 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003
(-1.28) (-1.48) (-1.34) (-1.72)* (-1.44) (-1.65)* (-1.70)*
Investissement /PIB 0.0108 0.0108 0.0107 0.0113 0.0105 0.011 0.011 0.012 0.011
(10.40)*** (10.50)*** (10.17)*** (11.67)*** (10.10)*** (10.41)*** (10.45)*** (11.98)*** (10.53)***
Degré d’ouverture / PIB 0.0093 0.0093 0.010 0.0095 0.0090 0.0090 0.0092
(1.79)* (1.65)* (1.92)* (1.83)* (1.71)* (1.70)* (1.72)*
Taux de croissance de la population -0.018 -0.015 -0.012 -0.021 -0.019 -0.011 -0.010 -0.017 -0.010
(-0.71) (-0.57) (-0.47) (0.82) (-0.73) (-0.41) (-0.36) (-0.62) (-0.37)
Régime de change fixe 0.022 0.020
(2.55)** (2.22)**
Régime de change intermédiaire -0.00034
(-1.45)
Régime de change flottant -0.0012
(-1.33)
Change fixe * inflation -0.0001
(-0.67)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0050
(2.65)**
Crédit domestique accordé au 0.00106
secteur privé/PIB * change fixe (2.58)**
Degré d’ouverture * change flottant -0.00015
(-0.79)
Crédit domestique accordé au 0.0008
secteur privé/PIB * change flottant (0.45)
Observations 319 319 319 319 319 319 319 319 319
Number of id 11 11 11 11 11 11 11 11 11
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
102
 
 

Une nouvelle génération d’études attribue cette incapacité des travaux empiriques, à
démontrer l’existence d’un lien (direct) robuste entre le choix du régime de change et la
croissance, aux erreurs de mesure dans la classification des régimes de change. En effet, la
plupart des études sont fondées sur la typologie officielle (dite de jure). Cette hypothèse a
donné naissance à plusieurs nouveaux systèmes de classification des régimes de change
(classification de facto). Ces derniers ont confirmé la divergence entre l’évolution des régimes
de facto et celle de jure. Ce qui implique que les résultats des études relatives à la relation
entre régime de change et croissance, dégagés à partir de la classification officielle, peuvent
être peu crédibles. Dans ce qui suit nous nous basant sur la classification de facto pour vérifier
cette hypothèse.

5.2. Résultats avec les régimes de facto

Il est maintenant admis que les régimes de change déclarés par plusieurs pays ne
correspondent pas à ceux qu'ils mettent en œuvre (voir, Calvo et Reinhart, 2002; Levy Yeyati
et Sturzenegger, 2002, Reinhart et Rogoff, 2003, ainsi que le chapitre précédent). Les
déviations des pratiques de change des déclarations soulèvent la question de savoir si les
régimes de jure et les régimes de change de facto exercent des effets différents sur la
croissance économique.

Nous essayons de répondre à cette question en estimant à nouveau les équations de la


croissance mais en utilisant les régimes de facto classés par Reinhart et Rogoff (2003). Les
observations se rapportant à des taux de change multiples (officiels ou non) dont les données
manquantes sont exclues de l'échantillon.

Les résultats utilisant les régimes de change de facto seront présentés en préservant la
même décomposition que dans les cas des régimes de change officiels: premièrement, les
pays émergents (tableau 10), deuxièmement les les pays de l’OCDE (tableau 11),
troisièmement les pays d'Asie (tableau 12) et en derniers les pays d'Amérique Latine (tableau
13). Les tableaux ci-dessous montrent les résultats de régressions de la croissance utilisant les
régimes de change de facto.

103
 
 
Tableau 10: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays émergents selon la classification de facto
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.70 -0.70 -0.70 -0.70 -0.69 -0.68 -0.70 -0.69 -0.70
(-27.74)*** (-27.05)*** (-27.12)*** (-27.89)*** (-26.81)*** (-26.32)*** (-27.07)*** (-25.76)*** (-27.69)***
Crédit domestique accordé au -0.0006 -0.0008 -0.0009 -0.0005 -0.0006 -0.0008
secteur privé/PIB (-0.37) (-0.50) (-0.59) (-0.34) (-0.34) (-0.54)
Investissement direct étranger 0.0026 0.0026 0.0025 0.0026 0.0028 0.0025 0.0025 0.0027 0.0025
(3.23)*** (3.22)*** (3.20)*** (3.26)*** (3.51)*** (3.16)*** (3.12)*** (3.46)*** (3.12)***
Consommation du secteur -0.009 -0.0088 -0.0089 -0.0088 -0.0091 -0.0-0871 -0.0087 -0.0092 -0.0087
public/PIB (-6.09)*** (-5.93)*** (-6.03)*** (-5.96)*** (-6.13)*** (-5.88)*** (-5.88)*** (-6.18)*** (-5.90)***
Indicateur du développement 0.29 0.29 0.29 0.29 0.30 0.29 0.29 0.30 0.29
Humain (20.01)*** (20.06)*** (20.12)*** (20.14)*** (22.58)*** (20.17)*** (20.07)*** (22.92)*** (20.55)***
Inflation -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003
(-1.52) (-1.55) (-1.53) (-1.54) (-1.48) (-1.53) (-1.50)
Investissement /PIB 0.0078 0.0079 0.0079 0.0078 0.0081 0.0079 0.0077 0.0081 0.0077
(14.03)*** (14.04)*** (14.15)*** (13.84)*** (14.77)*** (13.97)*** (13.57)*** (14.35)*** (13.01)***
Degré d’ouverture / PIB 0.005 0.0049 0.0053 0.0050 0.0051 0.0052 0.0053
(2.35)** (2.34)** (2.44)** (2.38)** (2.43)** (2.40)** (2.43)**
Taux de croissance de la population -0.0068 -0.0068 -0.0069 -0.0067 -0.0053 -0.0068 -0.0068 -0.0050 -0.0068
(-1.67)* (-1.73)* (-1.78)* (1.69)* (-1.34) (-1.75)* (-1.74)* (-1.32) (-1.74)*
Régime de change fixe 0.0067 0.0068
(0.98) (0.98)
Régime de change intermédiaire 0.0066
(1.14)
Régime de change flottant -0.0097
(-1.84)*
Change fixe* inflation -0.001
(-2.54)**
Degré d’ouverture * change fixe 0.0018
(2.30)**
Crédit domestique accordé au 0.0013
secteur privé/PIB *change fixe (1.39)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0001
(-1.59)
Crédit domestique accordé au -0.00012
secteur privé/PIB *change flottant (-1.46)
Observations 725 725 725 725 725 725 725 725 725
Number of id 25 25 25 25 25 25 25 25 25
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
104
 
 

L'image qui émerge de ces tableaux confirme les résultats obtenus auparavant,
concernant l’absence d’un consensus sur le «bon choix» du régime de change pour la
croissance. En effet, quelle que soit sa typologie, le système de change adopté dans les pays
émergents et développés n’est pas un déterminant pour la croissance. L'impact du régime de
change fixe de facto sur la croissance est comparable à celui du régime fixe officiel. Le
coefficient de cette variable est positif mais non significatif au plan statistique pour les deux
groupes de pays. En revanche, dans les pays émergents, le régime de change flexible apparait
avec un effet négatif résiduel sur la croissance, en dépit d’une significativité très limitée au
seuil de 10%. Les effets des autres déterminants de la croissance sont en général proches de
ceux obtenus précédemment.

Contrairement aux autres régions, les régimes de changes de facto semblent avoir un
effet sur la croissance pour les pays asiatiques. L'impact du régime de change fixe parait plus
important dans cette région. La fixité du taux de change est associée à un impact positif et
statistiquement significatif par rapport à celui obtenu dans les autres échantillons. En outre, le
régime de change flexible apparaît comme un déterminant significatif de la croissance. Le
coefficient associé au régime flexible a un effet significatif et de signe négatif. Toutefois, du
fait de l’inclusion dans la régression l’inflation et le développement financier, le coefficient
du régime de change fixe inclut également les effets qui passent par ces deux facteurs
(colonnes 1 et 2 tableau 12). Lorsqu'on exclut la variable FD (développement financier) et
l’inflation, l'effet du régime de change fixe disparait, attestant qu'une grande partie de l'effet
capturé par le coefficient de Fixe dans la régression précédente s'explique par l’effet négatif et
très significatif au seuil de 1% de l’inflation et de l’indicateur du développement financier

105
 
 
Tableau 11 : Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays avancés selon la classification de facto
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
PIB réel par habitant décalé -0.54 -0.52 -0.53 -0.53 -0.50 -0.53 -0.52 -0.50 -0.53 -0.53
(-25.40)*** (-22.90)*** (-23.72)*** (-25.13)*** (-21.34)*** (-23.72)*** (-23.68)*** (-22.70)*** (-25.83)*** (-23.51)***
Crédit domestique accordé au -0.0005 -0.0005 -0.00037 -0.0006 -0 .0006 -0.0001
secteur privé/PIB (-0.77) (-0.87) (-0.47) (-0.87) (-0.88) (-0.22)
Investissement direct étranger 0.0008 0.0004 0.00012 0.00045 0.00016 0.00012 -0.0001 0.0015 -0.0001 -0.0002
(0.50) (0.37) (0.07) (0.28) (0.93) (0.07) (-0.05) (0.86) (-0.14) (-0.14)
Consommation du secteur -0.0118 -0.012 -0.0118 -0.012 -0.014 -0.012 -0.012 -0.015 -0.012
public/PIB (-10.54)*** (-10.65)*** (-10.37)*** (-10.73)*** (-12.94)*** (-10.69)*** (-10.63)*** (-12.85)*** (-10.71)***
Indicateur du développement 0.0448 0.038 0.045 0.038 0.055 0.039 0.039 0.060 0.039 0.040
Humain (10.79)*** (9.29)*** (11.19)*** (9.33)*** (12.98)*** (9. 96)*** (9.41)*** (14.00)*** (9.58)*** (9.11)***
Inflation -0.0015 -0.0014 -0.0013 -0.0014 -0.0014 -0.0012 -0.0014
(-4.10)*** (-4.01)*** (-3.52)*** (-3.89)*** (-3.84)*** (-3.11)*** (-3.80)***
Investissement /PIB 0.0063 0.0064 0.0065 0.0064 0.0063 0.0065 0.0065 0.0065 0.0064 0.0086
(9.56)*** (9.73)*** (9.47)*** (9.74)*** (9.14)*** (9.57)*** (9.57)*** (8.89)*** (9.52)*** (11.77)***
Degré d’ouverture / PIB 0.00167 0.0017 0.0017 0.0017 0.0017 0.0017 0.0017 0.0023
(9.69)*** (10.42)*** (9.83)*** (10.11)*** (10.33)*** (10.48)*** (10.52)*** (12.64)***
Taux de croissance de la population -0.0151 -0.012 -0.015 -0.0115 -0.014 -0.013 -0.013 -0.014 -0.012 -0.012
(-3.60)*** (-2.93)*** (-3.69)*** (-2.75)** (-3.17)*** (-2.95)*** (-2.97)*** (-3.18)*** (-2.88)*** (-4.27)***
Régime de change fixe 0.0034 0.0047
(0.70) (0.99)
Régime de change intermédiaire -0.031
(-0.78)
Régime de change flottant -0.02
(-0.30)
Change fixe* inflation -0.00028
(-0.55)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0030
(4.18)***
Crédit domestique accordé au 0.0002
secteur privé/PIB *change fixe (0.51)
Degré d’ouverture * change flottant 0.0005
(1.05)
Crédit domestique accordé au 0.0002 0.0054
secteur privé/PIB *change flottant (0.45) (1.89)*
Observations 522 522 522 522 522 522 522 522 522 522
Number of id 18 18 18 18 18 18 18 18 18 18
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
106
 
 

L'addition de la variable du régime de change de facto croisée avec celle de


l’ouverture commerciale, dans tous les échantillons étudiés, confirme les conclusions
avancées auparavant concernant l’effet positif de la stabilité des régimes de change fixes sur
le commerce. Les systèmes de change fixes de facto améliorent l'impact positif de commerce
international dans toutes les régions étudiées.  En effet, les régimes de change sont
susceptibles d’affecter la croissance économique par les effets sur le volume du commerce
international. Rizzo (1998) considère que plus la part du commerce dans la production est
élevée, plus les coûts de la volatilité du taux de change sont élevés, par conséquent les petites
économies très ouvertes devraient opter pour un régime de rattachement. Selon la
classification de facto, nous concluons que la stabilité associée aux régimes de change fixes
semble l’emporter sur la facilité d’ajustement associée aux régimes flexibles, en matière de
commerce international.

L’impact de la variable croisée du régime de change de facto et du développement


financier est également vérifié, suggérant une fois de plus que parmi les pays à régimes de
change flexibles, ceux qui possèdent un système financier moins développé enregistrent un
effet négatif sur la croissance que ceux plus développés financièrement. Dans une autre
optique, le régime optimal pourrait être choisi par les autorités monétaires sur la base du
développement financier. Pour les pays dont les marchés financiers sont étroitement et
faiblement développés, un régime de change flexible peut entrainer de larges fluctuations du
taux de change dues au nombre limité des transactions sur le marché de change, d’où le
régime de change fixe sera dans ce cas optimal. Dans le cas des pays asiatiques, le régime de
change fixe de facto (flexible) associé à l’indicateur du développement financier apparait avec
un effet positif (négatif) et statistiquement significatif. En revanche, pour les pays de l’OCDE,
seul le régime du flottement associé au développement financier contribue positivement à la
croissance. En effet, le coefficient de cette variable est positif et significatif au seuil de 10%.

107
 
 
Tableau 12: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays asiatiques selon la classification de facto
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.55 -0.42 -0.51 -0.48 -0.42 -0.44 -0.43 -0.42 -0.45
(-17.08)*** (-13.38)*** (-15.39)*** (-15.67)*** (-12.99)*** (-13.68)*** (-13.35)*** (-12.92)*** (-15.02)***
Crédit domestique accordé au -0.009 -0.008 -0.0109 -0.008 -0.009 -0.009
secteur privé/PIB (-4.22)*** (-3.28)** (-4.97)*** (-3.82)*** (-4.07)*** (-4.37)***
Investissement direct étranger 0.0040 0.0036 0.0037 0.0039 0.0039 0.0035 0.0035 0.0039 0.0036
(4.50)*** (4.34)*** (4.21)*** (4.63)*** (4.80)*** (4.27)*** (4.23)*** (4.74)*** (4.33)***
Consommation du secteur -0.011 -0.012 -0.011 -0.012 -0.012 -0.012 -0.011 -0.012 -0.011
public/PIB (-4.58)*** (-5.03)*** (-4.35)*** (-5.20)*** (-5.51)*** (-5.16)*** (-4.73)*** (-5.31)*** (-4.73)***
Indicateur du développement 0.29 0.22 0.28 0.24 0.25 0.23 0.22 0.26 0.22
Humain (12.59)*** (10.41)*** (12.83)*** (10.62)*** (12.13)*** (10.56)*** (10.49)*** (12.72)*** (10.49)***
Inflation -0.0016 -0.0015 -0.0014 -0.0016 -0.0015 -0.0013 -0.0014
(-5.61)*** (-5.19)*** (-4.84)*** (-5.54)*** (-5.10)*** (-4.32)*** (-5.05)***
Investissement /PIB 0.0065 0.0058 0.0069 0.0055 0.0063 0.0064 0.0060 0.0065 0.0047
(9.88)*** (9.65)*** (10.82)*** (8.81)*** (10.45)*** (10.04)*** (9.21)*** (9.60)*** (7.06)***
Degré d’ouverture / PIB 0.0054 0.0071 0.0046 0.0080 0.0078 0.0077 0.0086
(2.51)** (3.73)*** (2.35)** (3.97)*** (3.78)*** (3.78)*** (4.21)***
Taux de croissance de la population -0.0080 -0.0102 -0.0083 -0.0099 -0.0078 -0.0105 -0.0126 -0.0074 -0.0097
(-2.22)** (-3.09)*** (-2.36)** (-2.87)** (-2.39)** (-3.15)*** (-3.09)*** (-2.21)** (-2.93)***
Régime de change fixe 0.0111 0.0189
(1.28) (2.37)**
Régime de change intermédiaire -0.0038
(-0.50)
Régime de change flottant -0.013
(-1.84)*
Change fixe * inflation 0.007
(1.13)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0021
(3.12)***
Crédit domestique accordé au 0.0016
secteur privé/PIB * change fixe (1.93)*
Degré d’ouverture * change flottant -0.0011
(-1.78)*
Crédit domestique accordé au -0.0031
secteur privé/PIB * change flottant (-3.46)***
Observations 290 290 290 290 290 290 290 290
Number of id 10 10 10 10 10 10 10 10
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
108
 
 
Tableau 13: Résultats des estimations des GMM en différence pour les pays Amérique Latine selon la classification de facto
 
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8 9
PIB réel par habitant décalé -0.81 -0.81 -0.80 -0.81 -0.80 -0.84 -0.84 -0.84 -0.84
(-19.79)*** (-20.29)*** (-20.31)*** (-19.96)*** (-19.86)*** (-20.34)*** (-20.38)*** (-20.58)*** (-20.38)***
Crédit domestique accordé au 0.00016 0.00012 0.00015 0.00016 0.00015 0.00013
secteur privé/PIB (0.79) (0.59) (0.73) (0.78) (0.77) (0.66)
Investissement direct étranger 0.00053 0.0005 0.00029 0.0006 0.0009 0.00028 0.00018 0.00029 0.0003
(0.35) (0.21) (0.19) (0.40) (0.64) (0.18) (0.12) (0.19) (0.20)
Consommation du secteur -0.0031 -0.003 -0.003 -0.0028 -0.0035 -0.003 -0.0029 -0.0035 -0.0027
public/PIB (-1.57) (-1.45) (-1.57) (-1.45) (-1.79)* (-1.42) (-1.45) (-1.73)* (-1.35)
Indicateur du développement 0.15 0.16 0.16 0.15 0.16 0.17 0.16 0.18 0.16
Humain (7.50)*** (8.13)*** (8.21)*** (7.57)*** (8.81)*** (8.35)*** (8.24)*** (9.61)*** (8.27)***
Inflation -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003 -0.0003
(-1.69)* (-1.67)* (-1.72)* (-1.68)* (-1.66)* (-1.72)* (-1.66)*
Investissement /PIB 0.0108 0.0108 0.0106 0.0108 0.0113 0.0107 0.011 0.012 0.011
(10.24)*** (10.37)*** (10.30)*** (10.20)*** (11.61)*** (10.30)*** (10.28)*** (11.90)*** (10.53)***
Degré d’ouverture / PIB 0.0099 0.0091 0.010 0.009 0.0090 0.0090 0.0091
(1.87)* (1.72)* (1.90)* (1.80)* (1.85)* (1.84)* (1.85)*
Taux de croissance de la population -0.016 -0.01 -0.018 -0.016 -0.0244 -0.0099 -0.013 -0.016 -0.011
(-0.59) (-035) (-0.44) (-0.62) (-0.93) (-0.37) (-0.30) (-0.62) (-0.41)
Régime de change fixe 0.0056 0.0056
(0.52) (0.51)
Régime de change intermédiaire 0.0066
(0.81)
Régime de change flottant -0.0067
(-0.98)
Change fixe * inflation -0.001
(-2.37)**
Degré d’ouverture * change fixe 0.0053
(2.49)**
Crédit domestique accordé au 0.00028
secteur privé/PIB * change fixe (0.83)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0027
(-1.89)*
Crédit domestique accordé au 0.0001
secteur privé/PIB * change flottant (0.08)
Observations 319 319 319 319 319 319 319 319 319
Number of id 11 11 11 11 11 11 11 11 11
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
109
 
 

L'hypothèse de la crédibilité, selon laquelle l’effet de l’inflation sur le niveau de


croissance économique diminue dans les pays à régimes de change fixes n’est pas confirmée à
nouveau pour tous les pays. En effet, le coefficient de cette variable est effectivement négatif
et statistiquement significatif au seuil de 5% dans le cas de l’ensemble des pays émergents et
l’échantillon des pays d’Amérique latine. Williamson (2000) et Benassy-Quéré et Cœuré
(2002) considèrent que le régime de change fixe ne permet pas d’améliorer la crédibilité
puisqu’elle peut être générée du fort engagement institutionnel induit par la fixité. Dans ce
cas, la crédibilité résulte essentiellement des rigidités institutionnelles et non de la
transparence et l’engagement de la banque centrale d’atteindre ses objectifs annoncés.

En résumé, quelle que soit la spécification et l’échantillon retenu outre les pays
asiatiques, la classification de facto confirme que les régimes de changes ne sont pas un
déterminant direct de la croissance économique. Cet effet limité des régimes de change est
généralement robuste à la spécification du modèle. Les canaux par lesquels le système de
change affecte la croissance sont similaires à ceux mis en évidence avec les régimes officiels.
De manière générale, les effets estimés des autres variables de contrôle sont similaires à ceux
mis en évidence auparavant.

Conclusion 

Ce chapitre a analysé la relation entre les régimes de change et la croissance


économique. Après avoir présenté une synthèse de l’état de la littérature théorique et
empirique, il a examiné les différentes méthodes de classification des régimes de change
servant de cadre opératoire aux études empiriques consacrées à la question. Pour vérifier
l’hypothèse selon laquelle le type de régime de change affecte la croissance économique, nous
avons analysé les effets du système de change sur la croissance en prenant en compte d'autres
déterminants de la croissance identifiés dans la littérature. Notre étude utilise les régimes de
change de jure et les régimes de facto afin de comparer leurs effets respectifs sur la
croissance.

Les résultats obtenus sur un large échantillon de pays émergents et développés pour
une période allant de 1982 à 2011 ont permis de tirer l’enseignement suivant: Notre
investigation révèle que la croissance n’est pas sensible directement au régime de change. En
effet, nos résultats montrent que les systèmes de change fixes n’exercent pas d’effet direct
110 
 
 

significatif sur la croissance dans les pays émergents. Cette interprétation contredit l'idée
selon laquelle les pays émergents et/ou peu développés devraient adopter des régimes de
change fixes étant donné qu'il leur est difficile d'opérer correctement un système de change
flexible.

Nos conclusions semblent indiquer que la neutralité du régime de change prévaut


principalement dans l’échantillon des pays étudiés. Dans les pays émergents et avancés, les
systèmes de change fixes et flexibles n'exercent pas d’effets statistiquement distincts, quel que
soit la typologie adoptée (jure ou facto), et même lorsqu’il existe, il reste limités. Nos
résultats suggèrent aussi que, les canaux de l'ouverture commerciale, de l'investissement et du
capital humain semblent les plus importants comme déterminants de la croissance. Notre
modèle a indiqué aussi que l’impact des marchés financiers demeure assez limité pour la
croissance économique de ces pays. Les effets positifs probables du développement financier
ne sont pas renforcés dans les systèmes de change flexible. Cependant, les bénéfices des
mesures destinées à promouvoir le système financier n'apparaissent qu'au-delà d'un certain
seuil, à partir duquel, la régulation et la supervision financières deviennent probablement
adéquates.

Les résultats relatifs au découpage mettent en évidence une influence résiduelle


positive (significative) du régime de change intermédiaire de jure en Asie. Autrement dit,
l'existence d'une productivité résiduelle dans les pays à changes intermédiaires que dévoile la
régression globale pourrait surtout avoir un sens comparativement aux pays ayant opté pour
des solutions en coin (fixe ou flexible). Dans la même région, nous trouvons aussi que le
régime de change fixe de facto est favorable à la croissance avec un coefficient positif et
statistiquement significatif. Les régimes de taux de change fixes semblent avoir un léger
avantage sur les régimes de change flexibles en matière de croissance dans cette région.

Enfin, la variable croisée du régime de change et du développement financier semble


être vérifié dans la plupart des cas étudiés. La variable d’interaction entre régime de change et
ouverture commerciale, dans tous les échantillons étudiés, confirme la supériorité de l’effet de
la stabilité des régimes de change fixes sur le commerce par rapport à la facilité d’ajustement
associée aux régimes flexibles dans les pays émergents.

111 
 
 

À l’issue de cette étude nous concluons que la présence d’un cadre de politique
monétaire solide, plutôt que le régime en soi, constitue un facteur déterminant de la
performance économique des pays émergents et ceux en développement. Cette conclusion
corrobore le point de vue de Laidler (1999) qui insiste sur l’importance de l’ancrage nominal
adopté par la banque centrale pour mieux apprécier l’impact des régimes de change sur les
résultats macroéconomiques. Notons ici que, dans le cadre de la politique de change, d’autres
facteurs, tels que les désajustements monétaires, peuvent jouer un rôle important en matière
de performance économique. En effet, certains pays de l’échantillon, comme le Japon, la
Corée de sud ou la chine jusqu’à aujourd’hui, ont connu des périodes de sous-évaluation qui
ont contribué à soutenir la croissance. Il est très difficile à l’heure actuelle de se prononcer en
faveur d’un régime de change plutôt qu’un autre. Au vu des résultats obtenus dans le cadre de
ce chapitre, la prise en compte du cadre de politique monétaire accompagnant le régime de
change devrait aider à élaborer de meilleurs conseils en matière de politique de change.

112 
 
 
 

PARTIE II 
 
DÉTERMINATION DU TAUX DE 
CHANGE REEL D’ÉQUILIBRE 

113 
 
 
 

Chapitre 3 
Les méthodologies des taux de change 
réels d'équilibre 

Introduction 
 

Pour illustrer le débat sur les taux de change d’équilibre, nous partons de la définition
du taux de change réel. Alors que le taux de change nominal exprime le prix relatif de deux
monnaies, le taux de change réel mesure quant à lui le prix relatif de deux paniers de biens en
monnaie nationale. Le taux de change réel correspond au rapport de deux pouvoirs d’achat.
C’est donc un indicateur de la compétitivité-prix d’un pays.

Il est aujourd’hui bien établi que les désajustements (ou sur/sous évaluations) des taux
de change, c’est-à-dire les écarts entre le taux de change courant et sa valeur d’équilibre de
moyen/long terme, génèrent des effets perturbateurs, à la fois sur les équilibres internes
(transferts de ressources entre secteurs, variations des investissements…), et sur les équilibres
externes (ajustements des flux commerciaux et des investissements directs étrangers…) (Rey,
2009). Si l’on se fixe comme objectif d’analyser ces effets, il est donc nécessaire de définir la
valeur d’équilibre du taux de change. En d’autres termes, il convient de préciser quels en sont
ses déterminants fondamentaux.

Plusieurs travaux théoriques et empiriques se sont attachés à analyser le taux de


change réels d’équilibre dans les pays développés et ceux en développement. Certains d’entre
eux se fondent uniquement sur les différentiels de prix pour expliquer le niveau d’équilibre du
taux de change. C’est la théorie de la Parité de Pouvoirs d’Achat (PPA par la suite), théorie de
référence en matière de détermination du taux de change d’équilibre. D’un point de vue
statistique, le taux de change réel serait stationnaire. D’un point de vue économique, il n’y
aurait pas lieu de se soucier d’élaborer une théorie du taux de change réels d’équilibre
puisqu’il est constant. C’est cette approche simplificatrice qui va être critiquée et dépassée par
plusieurs recherches importantes à la fin des années 1980 et au début des années 1990.

114 
 
 

Le débat controversé sur la pertinence de la PPA comme valeur d’équilibre est fortement
enrichi par les réflexions de Balassa-Samuelson (1964). Par ailleurs, différentes approches ont
également cherché à modéliser les comportements (de courte et moyenne période) des taux de
change. En outre, depuis le début des années 1990, plusieurs modèles importants ont vu le
jour :

 le modèle FEER (Fundamental Equilibrium Exchange Rate) de Williamson.


 le modèle DEER (Desired Equilibrium ExchangeRate) d’Artis et Taylor.
 le modèle BEER (Behavioural Equilibrium Exchange Rate) de MacDonald.
 le modèle NATREX (NATural Real EXchange rate) de Stein et d’autres.

Ces modèles ont pour objectif de déterminer le taux de change réel d’équilibre
compatible avec un équilibre macroéconomique interne et externe. Ils se situent dans la
continuité des travaux de Nurkse (1945) et d’Artus (1977), ainsi que différentes études
menées par le FMI durant les années 1970. Ce chapitre propose donc une taxonomie des
différentes approches du taux de change d’équilibre et tente de mettre en évidence leurs
similitudes et leurs différences.

1. L’approche de la Parité des Pouvoirs d’Achat (PPA) 
 

La paternité du principe de PPA revient à Cassel (1921, 1922), économiste suédois,


qui le rend opérationnel. Une question se pose alors à l’époque : «à quel taux stabiliser une
monnaie fortement touchée par l'inflation ?». À la sortie de la première guerre mondiale, le
système étalon-or n’est plus viable. Cassel propose alors que la PPA soit un outil pour asseoir
de nouvelles parités.

Il propose de calculer des taux d’inflation (indices des prix à la consommation)


cumulatifs depuis le début de l’année 1914. Les différentiels serviront à déterminer les
variations de taux de change nécessaires au maintien de la PPA. Pour Cassel, il existe un taux
de change exprimant le pouvoir d’achat interne d’un pays contre un autre. Il mesure la
quantité d’unités des biens achetés avec une unité de chaque monnaie. Il définit ainsi le taux
de change nominal (nombre d’unités de monnaie nationale par une unité de monnaie

115 
 
 

étrangère), en l’absence des déséquilibres commerciaux, de spéculation, d’intervention de


banque centrale et d’entraves au commerce.

La PPA est fondée sur la loi du prix unique. Le taux de change est lié aux prix de biens
homogènes. En l’absence de coûts de transaction ou d’entraves au commerce (droits de
douane, contingentements…), la loi du prix unique établit, une fois les prix convertis dans une
monnaie commune, que le prix d’un bien doit être le même quelque soit le pays. Si pour un
bien (i) on désigne par son prix domestique et son prix étranger, et par E le taux de
change nominal, alors la loi de prix unique peut être exprimée ainsi :

                                                                          3.1

L’équation (3.2), appelée forme absolue de la PPA, est une généralisation de la loi du
prix unique. Exprimé dans la même monnaie, le coût d’un même panier de biens et de
services doit être le même, quelque soit le pays. D’évidence, si la loi du prix unique se vérifie
pour chaque bien pris individuellement, il devrait en être de même pour la PPA absolue. À la
différence qu’il suffit que la relation de parité soit vérifiée en moyenne pour tous les biens, et
non pas pour chaque bien pris séparément. Ici, le taux de change est relié à l’ensemble des
prix. Si nous désignons par le taux de change nominal et par (P et ( ) les deux indices des
prix nationaux et étrangers, la version absolue s’exprime comme suit :

                                                                                                                                               3.2  

La PPA absolue est à l’origine du concept d’équilibre spécifique du taux de change


nominal. Le taux de change de la PPA est le taux égalisant le prix du même panier de
marchandises dans deux pays. Les divergences entre le cours du marché et le taux de change
PPA sont considérées comme provisoires. Elles doivent se résorber en raison du
comportement des arbitragistes. Un écart de prix trop important inciterait en effet à acheter les
marchandises dans les pays où elles sont les moins couteuses pour les revendre dans les pays
où leurs prix sont les plus élevés. Cet arbitrage devrait finir par égaliser les prix d’un pays à
l’autre. Mais les indices des prix ne nous renseignent pas sur l’importance des variations de la
PPA absolue par rapport à une période de base. Comme le recommande Cassel, la PPA
absolue est supposée fonctionner « en moyenne » sur une certaine période de base. Sinon,
c’est une PPA relative, c’est à dire des indices de prix relatifs, qu’il faut considérer.
116 
 
 

Ceci dit, la version absolue de la PPA correspond à un taux de change réel  égal à l’unité,
puisque :

                                                                 1                                                     3.3

La version relative de la PPA suppose que le taux de change entre deux pays finit par
s’ajuster pour tenir compte de l’écart entre leurs taux d’inflation. Ainsi, des pays dont les
politiques monétaires poursuivent des objectifs d’inflation différents doivent s’attendre à ce
que cette différence se répercute sur le taux de change. Si nous partons de l’équation de la
PPA absolue en y intégrant ( les obstacles au commerce international, nous obtenons :

                                                                                  3.4

En différenciant l'équation (4) et en utilisant une approche logarithme linéaire, nous


obtenons :
                                                                                      3.5

Au fil du temps, le taux de change entre deux pays s’ajustera pour contrebalancer
l’effet lié à l’écart de taux d’inflation. La PPA relative pourra donc expliquer la majeure partie
de la variation du taux de change entre deux pays, à la condition que la plupart des chocs qui
influent celui-ci soient de nature monétaire plutôt que réelle (car les chocs monétaires
influencent uniquement le taux de change réel à court terme). Il est important de noter,
qu’utilisée sous cette dernière forme, la PPA n’est plus directement fondée sur la loi du prix
unique. En effet, les taux d’inflation sont généralement calculés à partir d’indices de prix
nationaux. En d’autres termes, les paniers de références ne sont plus nécessairement
identiques. Dans ce cas, même si la loi du prix unique est vérifiée pour chaque bien, il se peut
qu’elle ne le soit plus au niveau agrégé en raison des pondérations différentes des biens dans
les deux paniers (Froot et Rogoff, 1994 ; 1995).

La méthode de la PPA dans son ensemble montre une certaine simplicité. De façon
générale, bien qu’elle puisse être utile pour évaluer les parités de long terme entre pays à
niveau de développement similaire, elle fait abstraction de toute considération d’équilibre

117 
 
 

macroéconomique. En d’autres termes, elle ne permet pas de relier le taux de change réel à la
situation économique d’un pays, et notamment à sa position extérieure (niveau
d’endettement). En plus, elle ne tient pas compte des chocs liés aux termes de l’échange67
(Khan et Ostry, 1992). De façon générale, la théorie de la PPA souffre de plusieurs
inconvénients majeurs, tant au niveau théorique qu’au niveau empirique.

Au niveau théorique, la PPA absolue peut ne pas être vérifiée dans la pratique, ce qui en
réduit l’utilité en tant que théorie de détermination du taux de change. Plusieurs facteurs
peuvent être avancés:

 L’existence de biens et services non échangeables pour lesquels l’arbitrage ne


s’applique pas.

 Les coûts de transaction considérables qui accompagnent l’échange de biens,


notamment les coûts de transport et l’obtention d’information, des droits de douane,
les taxes et les autres obstacles non tarifaires au commerce qui rendent l’arbitrage
couteux.

 La composition différente, d’un pays à l’autre, du panier de biens et services visé par
les mesures des niveaux nationaux des prix, en particulier dans le cas des indices
établis en fonction de la production plutôt que de la consommation.

 Le fait que le taux de change réel ne soit pas constant, ni en courte période à cause de
la rigidité des niveaux généraux des prix et de l’incidence sur le taux de change des
chocs monétaires ou de chocs relatifs aux marchés d’actifs, ni en longue période (en
raison des chocs réels persistants que subit l’économie).

Au niveau empirique, les difficultés sont nombreuses. En particulier, la PPA suppose


la constance du taux de change réel, ce qui semble difficilement compatible avec les
importantes fluctuations observées des parités réelles. Les partisans de la PPA ont dès lors mis
en avant la validité de cette théorie, mais uniquement sur le long terme, en raison notamment
de l’existence de diverses rigidités rendant le processus d’ajustement très lent.

                                                            
67
Voir sur ce point le modèle de Devarajan, Lewis et Robinson (1993).

118 
 
 

Empiriquement, les études ont alors eu pour objet de tester la stationnarité du taux de change
réel. A nouveau, les résultats apparaissent décevants, même à long terme. Ainsi, Roll (1979)
et Huizinga (1987) mettent en avant le fait que le taux de change réel suit une marche
aléatoire. D’autres auteurs (Taylor, 1988; Mark, 1990) acceptent quant à eux l’hypothèse
d’absence de relation de cointègration entre le taux de change nominal et les prix relatifs. Il en
découle donc l’existence d’écarts permanents à la PPA. Signalons néanmoins, à la suite de
Coudert (1999), que certains travaux ont cherché à réhabiliter la version relative de la PPA à
long terme en concluant à la stationnarité des taux de change réels d’un grand nombre de pays
contre le Dollar ou le Mark. Ces insuffisances liées à la PPA ont conduit à retenir d’autres
approches afin de définir le taux de change d’équilibre.

2. Le modèle à productivité différenciée : L’effet Balassa­Samuelson 
 

C’est à la suite des travaux de Balassa (1964) et Samuelson (1964) qu’on en est venu à
parler du biais de productivité de Balassa/Samuelson (B/S par la suite). Ce biais peut être
expliqué par le fait que le taux de change entre les monnaies de deux pays s’écarte
durablement du taux PPA dès lors que coexistent avec des biens échangés internationalement
confrontés à la concurrence internationale, des biens abrités ou non échangés. Cet effet est lié
aux différences de productivité entre les secteurs abrité et exposé. En effet, au cours du
processus de développement, la productivité du secteur exposé a tendance à se développer
plus vite que celle du secteur abrité; l'effet Balassa en évolution explique l'appréciation
tendancielle du taux de change réel mesuré par les prix à la consommation (Coudert, 1999).

Ces écarts de productivité seront d’autant plus importants que les écarts de niveaux de
revenus des pays seront notables. Puisque chaque économie est composée de deux secteurs
(biens échangés et non échangés), le niveau général des prix de chacun des pays peut être
décomposé comme une moyenne des prix de chacun des secteurs. Désormais, les indices des
prix nationaux ( ) et étrangers ) sont considérés comme deux moyennes pondérées des
prix des échangeables  et des non échangeables ( ), d’où les équations des prix en log:

                                                                 1                                                           3.6


1

119 
 
 

 et  représentent les parts de non échangeables dans les indices des prix (en log). Le taux
de change réel ( ) est le taux de change nominal ( ) pondéré par le rapport de prix étrangers

et nationaux,    . Il peut s’exprimer en différence logarithmique comme suit:

                                                                                                                                       3.7

Le taux de change réel peut donc s’écrire comme suit :

                                                                           3.8

Cette équation indique que le taux de change réel mesuré au niveau de l’ensemble de
l’économie est fonction du prix relatif des biens échangeables entre pays et des différences
pondérées de prix relatif des biens non échangeables par rapport à ceux échangeables dans
chaque pays.

L’effet B/S vise à expliquer pourquoi les pays en développement à forte croissance ont
connu des taux de change réels qui tendaient à s’apprécier continuellement, contrairement aux
conclusions de la théorie de la PPA. Selon les deux auteurs, cette dynamique est liée à des
différences dans l’évolution de la productivité du travail entre le secteur exposé à la
concurrence internationale (secteur des biens échangeables) et le secteur abrité (biens non
échangeable). Un pays pauvre à forte croissance se caractérise en effet par une progression de
la productivité du travail du secteur exposé plus vigoureuse que dans le pays riche à faible
croissance. En revanche, on peut estimer que la productivité du secteur abrité progresse à des
rythmes voisins (et plus faibles) dans les deux pays. Ceci tient au fait qu’il s’agit d’activités
où l’impact du progrès technique est plus limité et où l’accumulation du capital est plus faible.

Selon B/S, la loi du prix unique est valide pour les biens du secteur exposé en raison
de la concurrence internationale (au moins dans sa forme relative). En revanche, elle n’a
aucune raison de l’être pour les biens non échangeables dont les prix doivent au contraire
croître plus vite dans le pays pauvre. Ce mécanisme tient au fait que les hausses de salaires du
secteur exposé tendent à se diffuser dans le secteur abrité. Par conséquent, les coûts salariaux
unitaires du secteur abrité seront plus élevés dans les pays pauvres (où les hausses de salaires

120 
 
 

vont être fortes en raison des gains de productivité dans les secteurs exposés) que dans les
pays riches. Et il en sera de même des hausses de prix.

D’une façon générale, le modèle de B/S permet des comparaisons internationales.


Balassa trouve que si la productivité est plus importante dans le secteur échangeable, la
monnaie du pays à faible productivité sera sous-évaluée par rapport à la PPA.

Rey (2009) souligne que cette approche pose deux problèmes. En premier lieu, la
distinction entre biens échangeables et bien non échangeables n’est plus aussi tranchée
aujourd’hui. En second lieu, si on considère les économies en transition (Pays d’Europe
Centrale et Orientale en particulier) et certains pays émergents, pour lesquels cette
interprétation a été largement avancée, la croissance de la productivité ne garantit pas un
accroissement des revenus, des salaires et des prix. Les difficultés auxquelles doivent faire
face les firmes de ces pays pour vendre sur les marchés mondiaux les conduisent souvent à
rester positionnées sur des productions à faible coût et à faible contenu technologique.

Sans aller jusqu’à rejeter totalement l’hypothèse du biais de B/S, on peut considérer
que ce dernier explique au mieux une partie de la tendance des taux de change réels (Coudert,
2004), l’autre partie résultant du comportement des déterminants fondamentaux du taux de
change réel. L’effet B/S est purement un « effet d’offre ». La demande ne joue aucun rôle
dans la formation des prix relatifs 68 . Or les prix relatifs peuvent aussi augmenter sous la
pression de la demande. On attribut aussi souvent l’effet B/S à l’impact des variations de la
productivité sur les taux de change. Or les chocs de productivité peuvent aussi affecter le taux
de change réel par d’autres canaux, comme la demande d’investissement. En effet, une hausse
de la productivité peut susciter une augmentation de l’investissement, et donc une hausse du
taux d’intérêt réel pour attirer les capitaux nécessaires à le financer, entraînant ainsi une
appréciation du taux de change réel. Par ailleurs, l’effet B/S n’est pas la principale explication
théorique de la déviation du taux de change par rapport à la PPA. D’autres facteurs liés à la
politique économique du gouvernement doivent être pris en compte dans le calcul du taux de
change réel d’équilibre.

                                                            
68
Comme cela est visible dans la plupart des modèles qui étudient cet effet.

121 
 
 

3. Le modèle du taux de change d’équilibre d’Edwards 
 

Edwards (1989), définit «le taux de change d’équilibre» comme «le prix relatif des
biens échangeables par rapport aux biens non échangeables permettant d’atteindre
simultanément les équilibres interne et externe». Les équilibres interne et externe simultanés
se réalisent à partir des valeurs soutenables de variables pertinentes, comme les termes de
l’échange internationaux, la politique commerciale, ainsi que les flux de capitaux. Edwards
développe un modèle de détermination du taux de change réel où les facteurs réels et
monétaires affectent le taux de change réel d’équilibre à court terme. Dans le long terme,
seuls les facteurs réels (ou fondamentaux) influencent le taux de change réel d’équilibre. Le
modèle prend en compte également l’impact de certaines politiques économiques comme les
contrôles de change, les barrières commerciales, l’existence d’un marché parallèle.

Le modèle décrit la situation d’une petite économie ouverte avec trois secteurs de
production : des biens importables , des biens exportables et des biens non
échangeables  . Tous ces types de biens sont produits par un grand nombre de firmes
compétitives. Les trois facteurs de production sont le travail, les ressources naturelles et le
capital. Les consommateurs dans cette économie consomment les trois types de biens.
Edwards ajoute l’existence d’un système de change dual et la possibilité pour le
gouvernement de se financer par création monétaire (introduction de la sphère monétaire).
Dans un premier temps, Edwards suppose que le gouvernement et le secteur privé ne peuvent
pas emprunter à l’étranger et qu’il n’y a pas de dette publique. Le système de taux de change
dual est caractérisé par un taux de change nominal pour les transactions commerciales 69

et un taux de change nominal pour les transactions financières.

Le modèle suppose également l’existence de taxes sur les importations. Le prix des
exportations libellé en monnaie étrangère est fixe et égal à l’unité70 1). Les anticipations
des agents sont supposées parfaites. Edwards suppose également l’existence de contrôles sur
les mouvements de capitaux. Il suppose ici que le gouvernement, comme le secteur privé, ne
peuvent pas emprunter de l’étranger. En outre, il suppose qu'il n’y a aucune dette publique

                                                            
69
Le taux de change nominal ( ) est défini à l’incertain. Il représente le nombre d’unité de monnaie nationale
nécessaire pour acquérir une unité de monnaie étrangère.
70
Une économie est qualifiée de petite, si elle n’arrive pas à influencer le prix international au moyen d’une
variation de son offre ou de sa demande. Elle agirait ainsi en tant que preneur de prix.

122 
 
 

domestique. Pour simplifier nous présentons uniquement les relations liées au secteur
externe :

                                        ,                                                  3.9

                                                                     0                                                                3.10

                                                                                                                                      (3.11)

1
                                1                                   3.12

Les équations (3.9) et (3.10) représentent le secteur externe. L’équation (3.9) définit le
compte courant en monnaie étrangère où et sont les prix relatifs des exportations et des
importations par rapport aux biens non échangeables, représente les actifs nets détenus
par le pays en monnaie nationale. L’équation (3.10) spécifie que la balance de paiements ( )
est identique au compte courant à chaque période dans la mesure où il y a contrôle sur
les mouvements de capitaux. L’équation (3.11) met l’accent sur le lien entre la variation des
réserves et la variation du crédit domestique . Le gouvernement consomme des biens
importables et des biens non échangeables. Il utilise les impôts et le crédit domestique pour
financer ses dépenses. Enfin l’équation (3.12) définit le taux de change réel.

Selon Edwards (1989), le taux de change d’équilibre, pour des valeurs données et
soutenables d’un certain nombre de variables fondamentales (comme les impôts, les termes de
l’échange, la politique commerciale, les flux de capitaux et la technologie) se traduit par la
réalisation simultanée des équilibres interne et externe. Par équilibre interne, il faut entendre
ici l’équilibre réalisé dans le présent et attendu dans le futur sur le marché domestique des
biens non échangeables. L’équilibre externe prévaut lorsque le solde présent et futur du
compte courant est compatible avec les mouvements de fondamentaux soutenables à long
terme. Il s’agit donc bien d’un taux de change réel d’équilibre à long terme vers lequel devrait
converger le taux de change réel courant, moyennant la mise en place d’une politique
économique (dimension budgétaire, monétaire et de change) adéquate. Selon Edwards, les
écarts entre le taux de change réel et son niveau d’équilibre disparaîtront, ou du moins
tendront à disparaître, lentement. Une politique macroéconomique souple exerce des forces de
123 
 
 

rappel du taux change réel vers son niveau d’équilibre. Si un pays est en déséquilibre, une
dévaluation nominale de la monnaie nationale peut considérablement accélérer la
convergence de taux de change réel vers son niveau d’équilibre de long terme. Au niveau
empirique, il montre que les pays qui maintiennent leurs taux de change réels tout près des
niveaux d’équilibre se caractérisent par de meilleures performances que les pays sujets à des
désajustements.

Le modèle d’Edwards aboutit à une équation réduite du taux de change réel.


L’équilibre à long terme est atteint si les quatre conditions suivantes sont simultanément
vérifiées :

1. Le marché des biens non échangeables est en équilibre.


2. Le secteur externe est en équilibre (variation des réserves nulle, de même que celle du
compte courant).
3. La politique fiscale du gouvernement est soutenable.
4. L’équilibre de portefeuille est atteint.

Le taux de change réel qui prévaut sous ces conditions est le taux de change réel
d’équilibre de long terme . En résolvant son modèle, Edwards aboutit au résultat
suivant :

                                                         , , ,                                         3.13

Cette équation, traduit que le dépend uniquement des fondamentaux de


l’économie, c’est-à-dire des variables réelles (les actifs étrangers qui tiennent compte du
taux de change officiel et parallèle, les dépenses publiques  en % du PIB, les taxes ( ), les
prix des biens importées en monnaies étrangère) et le niveau de l'état d'équilibre des encaisses
réelles et de la prime d'équilibre du marché parallèle  . Cependant, à court terme, les
variables monétaires (crédit domestique ( )) affectent également le taux de change réel
d’équilibre. La différence entre la valeur du taux de change réel d’équilibre de long terme et
sa valeur observée mesure le désajustement. À partir de son modèle, Edwards met en
évidence un certain nombre de relations entre le taux de change réel et les fondamentaux :

124 
 
 

 Une amélioration des termes de l’échange peut apprécier ou déprécier le taux de


change réel.
 Une augmentation des droits de douane tend à apprécier le taux de change réel. Il en
est de même avec l’augmentation des taxes, des dépenses gouvernementales en biens
non échangeables.
 Une augmentation des flux de capitaux a tendance à entraîner une appréciation.
 Les politiques macroéconomiques non soutenables sont généralement associées à une
contraction des réserves de change, à un déficit du compte courant, à une
augmentation du spread de taux d’intérêt, et à un taux de change réel surévalué.

Le modèle d’Edwards souffre toutefois de plusieurs limites, comme par exemple


l’existence d’anticipations parfaites. Il n’en demeure pas moins qu’il permet de représenter de
manière synthétique les politiques macroéconomiques qui peuvent affecter le taux de change
réel d’équilibre des pays émergents. Il repose uniquement sur des éléments de demande, or il
manque un déterminant essentiel du taux de change réel identifié supra, c’est-à-dire les écarts
de productivité relative. Edwards choisit de résoudre cette difficulté en incluant l’effet B/S
dans son équation réduite du taux de change réel. De plus, la question de la soutenabilité des
flux de capitaux à intégrer dans la détermination du taux de change d’équilibre n’est pas
abordée. Ce point est pourtant essentiel pour les pays émergents qui ont reçu d’importants
flux d’investissement.

Elbadawi (1994) montre que le modèle d’Edwards assure seulement que le marché des
biens non échangeables est à l’équilibre en un point donné et ne prend pas en compte
l’évolution anticipée des fondamentaux. De même il n’offre pas un cadre qui permet
d’intégrer les valeurs soutenables des fondamentaux et le comportement dynamique du taux
de change réel d’équilibre. Il avance qu’une modélisation réussie doit définir un taux de
change réel d’équilibre en fonction des fondamentaux, qui tend à converger vers son niveau
d’équilibre, et doit prendre en compte l’influence exercée par les politiques
macroéconomiques et de change, à court et moyen termes, sur le taux de change réel.

125 
 
 

4. Le modèle du taux de change réel d’équilibre d’Elbadawi (1994) 
 

Elbadawi (1994) propose d’apporter des améliorations au modèle d’Edwards (1989).


L’approche d’Elbadawi (1994) repose sur un modèle théorique et empirique élargi du taux de
change d’équilibre. Il focalise ces travaux sur la détermination du taux de change réel des
pays émergents, notamment le Chili, l’Inde et le Ghana, dans un modèle qui n’inclut pas le
chômage mais plutôt des taux d’inflation relatifs, des flux de capitaux et des termes de
l’échange. Elbadawi montre que les conditions proposée par Edwards pour atteindre
l’équilibre de long terme ne sont pas vérifiées. Selon lui, seule la condition selon laquelle le
marché des biens non échangeables est en équilibre est vérifiée à un moment donné. En effet
la définition du taux de change d’équilibre proposée par Edwards n’explique pas l’effet dû à
l’évolution prévue des principaux fondamentaux. Elbadawi souligne que le succès d’une
modélisation du taux de change réel d’équilibre dépend de trois éléments essentiels :

1. Elle doit spécifier le taux de change d’équilibre comme une fonction tournée vers l’avenir
des fondamentaux.
2. Elle doit caractériser une dynamique d’ajustement de taux de change réel vers le taux de
change d’équilibre.
3. Elle doit permettre de caractériser l’influence exercée par les politiques
macroéconomiques et de change, à court et moyen termes, sur le taux de change réel.
A partir du modèle d’Edwards, Elbadawi développe le modèle théorique suivant :

                                                                                                                                          3.14

Où A est l’absorption domestique nominale, représente les dépenses privées domestiques,


et représente les dépenses gouvernementales (publiques), considérées comme variables
politiques et représentées en pourcentage du PIB.

Les dépenses gouvernementales sont à leur tour décomposées pour identifier la


composante en termes de biens non-échangeables exprimée en pourcentage du total des
dépenses gouvernementales :

                                                                                                         3.15

126 
 
 

Le pourcentage des dépenses du secteur privé des biens non-échangeables par rapport
au total des dépenses privées (  est une variable endogène, fonction des prix domestiques

des exportations ( ), des importations ( ), et des biens non-échangeables ( ):

     , , , ,                     3.16

Les équations (3.16) et (3.17) permettent de définir la demande pour les biens non-
échangeables comme suit :

                     , ,                    3.17

L’offre des biens non-échangeables relative au PIB est aussi une fonction de
l’ensemble des trois prix :

                                                        , ,                                                          3.18

L’équation suivante détermine la condition d’équilibre sur le marché des biens non
échangeables :

                                 , ,   , ,                              3.19

Les prix internationaux des exportations et importations (représentés en dollars) et


 sont supposés exogènes dans le cas d’un petit pays. Néanmoins, les prix domestiques
correspondants      dépendent du taux de change et des politiques commerciales, Si
est le taux de change nominal (cotation à l’incertain), et     les taxes nettes sur
l’exportation et l’importation, les prix domestiques des exportations et importations
s’écrivent :
                                                                    1                                                             3.20
1                                                          3.21

127 
 
 

La définition du taux de change réel est :

                                                                                                                              3.22

Au final l’expression du taux de change réel d’équilibre se présente ainsi :

                                                                , , , ,                                                3.23

La version log- linéarisée est exprimée par l’équation suivante :

  log   log log                                                

                                       log  log log                                     3.24

Avec :
P
 : Les termes de l’échange extérieurs définis comme .
P

 où = Dépense domestique privé (en% de PIB) et : Dépense public


(en% de PIB).

 .

 : la dépense publique globale.


 / : le rapport au PIB de l’absorption A.
 : solde de la balance courante.

Elbadawi modélise ensuite l’impact des flux nets de capitaux  ainsi que de
l’anticipation de dévaluation sur l’absorption. L’anticipation de dévaluation augmente
l’épargne et réduit l’absorption relative au revenu   –     0 :

                                                 , –                                3.25

Où :

                              log –                        3.26

128 
 
 

De l’équation (3.24) et (3.26) nous obtenons la formule dynamique de l’équation du


taux de change réel suivante :

log log log log log 

                                                                  log log                              3.27  

Où     1  

Les fondamentaux du Taux de Change Réel d’Equilibre sont :


  , , , ,             3.28

Le Taux de Change Réel d’équilibre, est la valeur qui satisfait l’équation (3.28),
sachant que les fondamentaux sont définis à partir de leurs valeurs soutenables. Nous pouvons
déduire trois implications de cette définition du taux de change réel d’équilibre :

 Le taux de change réel d’équilibre n’est pas constant. Toute modification des variables qui
affectent les équilibres externe et interne du pays affecte le taux de change réel d’équilibre
change.

 La trajectoire du taux de change réel d’équilibre est affecté non seulement par les valeurs
courantes des fondamentaux, mais aussi par leurs valeurs futures souhaitées. Tant qu’il
existe des possibilités de substitution inter-temporelle entre la consommation et le crédit
étranger, ainsi que de substitution inter-temporelle entre la production et l’investissement,
les événements futurs anticipés, comme le changement anticipé des termes de l’échange
internationaux, vont affecter les valeurs courantes et futures anticipées du taux de change
réel d’équilibre.

 Les facteurs monétaires jouent un rôle dans le comportement du taux de change réel à
court terme et à moyen terme. Les évolutions dans la création monétaire et la taxation
auront un impact sur la dynamique du taux de change réel, et peuvent entraîner des

129 
 
 

situations dans lesquelles le taux de change réel peut s’éloigner de sa valeur d’équilibre de
long terme.

5. Le Taux de Change d’Equilibre Fondamental de Williamson 
 

Confronté aux difficultés opérationnelles de la PPA (choix du «bon» indice de prix ou


de coûts, choix d’une période de base d’équilibre…), Williamson (1983) propose de
71
rechercher un taux de change réel d’équilibre fondamental appelé encore FEER
(Fundamental Equilibrium Exchange Rate) qui garantit l’égalité entre la balance courante et
les flux de capitaux sous-jacents (underlying capital flow), ou transactions sur les actifs à long
terme. Pour Williamson, les variations du taux de change effectif réel doivent conduire à
l’égalité entre la balance courante sous-jacente et la balance courante «cible» qui résulte de
l’équilibre de moyen-terme entre épargne et investissement. Le FEER doit assurer les
conditions «idéales» (désirées) d’un équilibre interne et d’un équilibre externe. Ces deux
équilibres comportent donc un caractère normatif.

L'équilibre externe correspond à une balance courante soutenable déterminé en


fonction de l’évolution des paramètres structurels. Plus précisément, il se définit, par une cible
de balance courante qui ne correspond pas nécessairement à un solde équilibré. En effet, les
déséquilibres entre capacités d'épargne et besoins d'investissement nationaux se traduisent par
des positions extérieures nettes qui peuvent être soit créditrices, soit débitrices.

L'équilibre interne est défini comme le plein emploi des ressources d'un pays sans
provoquer des pressions inflationnistes. Son calcul repose sur le niveau de la production
potentielle qui est conçu comme un indicateur d'offre.

Le taux de change effectif réel compatible avec cet équilibre macroéconomique suit
une trajectoire qui résulte des mécanismes suivants :

 Dans le cas d’un déficit qui se traduit par une dette, il faut déprécier la monnaie pour
accroître le solde de la balance commerciale et ainsi favoriser le paiement de la dette.
                                                            
71
La littérature sur le concept FEER a augmenté considérablement depuis que Williamson (1985) a popularise
l’idée. Voir par exemple, Williamson et Miller (1987), Wrens-Lewis, et al. (1991), Wren Lewis (1992), Clarck
et al. (1994, Williamson (1994), Isard et Faruqee (1998), et Wren-Lewis et Driver (1997))

130 
 
 

Dans le cas d’un surplus, il faut apprécier la monnaie en termes réels pour soutenir un
accroissement de l’absorption par rapport à la production.

 Williamson rappelle la situation où le produit de l’élasticité-revenu de la demande


d’import et le taux de croissance intérieure excède celui de l’élasticité-revenu de la
demande d’export et taux de croissance étrangère. Le compte courant tend, en
conséquence, à se détériorer (Johnson, 1958 ; Houthakker et Magee 1969). Pour y
remédier, une dépréciation continue du taux de change s’impose. Krugman (1989)
soutient qu’un effet similaire serait apparu même si les produits élasticités et taux de
croissance étaient égaux du fait de l’importance de l’écart initial dans les niveaux des
exportations et des importations.

L’équilibre externe, notamment la question de sa détermination, semble être l’élément


qui a suscité le plus de controverses. Selon Williamson (1994), l’objectif n’est pas d’obtenir
une balance courante équilibrée mais un solde des comptes courants soutenable financé par
des flux de capitaux longs. Il reste à définir de manière plus opérationnelle ce concept de
balance courante soutenable.

Pour désigner la cible, Williamson évoque trois principes de base. Le premier est
d’examiner les déséquilibres passés et leurs relations avec les disponibilités d’épargne et les
niveaux d’investissement afin de voir s’ils reflètent un comportement économique rationnel
ou une mauvaise conduite des politiques gouvernementales. Le deuxième est d’examiner dans
quelle mesure il est possible de soutenir des déséquilibres qui apparaissent rationnels. Le
troisième est de vérifier que les cibles retenues soient internationalement compatibles. Selon
les deux derniers principes, les cibles seront modifiées jusqu’au niveau nécessaire pour
amener la soutenabilité et puis accomplir la compatibilité.

Les diverses extensions apportées à l’approche FEER peuvent ainsi favoriser


l’émergence d’un modèle de détermination plus général et plus complet, capable de capter
théoriquement et empiriquement les différentes forces permettant la détermination d’un
niveau d’équilibre. En effet, Faruqee et Isard (1998), ainsi que Faruqee, Isard et Masson
(1999) ont essentiellement concentré leurs efforts à l’exploration de la relation compte
courant – taux de change, nécessaire à la détermination d’un équilibre externe et un taux de
change d’équilibre. Ils ont montré que l’équilibre du compte courant peut être considéré

131 
 
 

comme la différence entre épargne et investissement désirés au plein emploi, plutôt que
correspondant à une position déterminée du compte capital. Les niveaux de plein emploi, de
l’épargne et de l’investissement sont issus de l’estimation des fonctions de comportement
d’épargne et d’investissement dont les déterminants, en plus du taux de change réel, sont entre
autre l’écart entre production actuelle et production potentielle (ou output gap), le ratio de
dépendance et le déficit fiscal.

Selon Borowski et Couharde (1999), l’approche FEER présente deux avantages


importants. En premier lieu, elle tient compte de l’intégration économique croissante en
accordant un rôle majeur aux interdépendances entre les pays, dans la mesure où les taux de
change sont explicitement reliés les uns aux autres. En second lieu, elle retient explicitement
l’équilibre interne dans la détermination des taux de change d’équilibre. En d’autres termes,
cela signifie qu’il ne suffit pas que l’ensemble des pays considérés ait atteint des niveaux de
comptes courants soutenables, il faut en plus qu’aucun d’entre eux ne soit éloigné de son
sentier de croissance potentielle. Cette théorie est à la fois descriptive (elle vise à prévoir le
niveau d’équilibre de moyen terme) et normative (elle indique aux pays les niveaux des taux
de change sur lesquels ils pourraient s’accorder).

L’essentiel de l’approche de l’équilibre macroéconomique est d’identifier l’équation


de la balance externe en assimilant la balance du compte courant à l’équilibre du compte
de capital :

                                                                                                                                            3.29

  Compte tenu de la définition standard, le compte courant est une somme de la balance
commerciale et le rendement des avoirs extérieurs nets ( ). La balance commerciale
est supposée être dépendre positivement de la demande externe ( ) et négativement de la
demande interne  , et du taux de change effectif réel,  .Les relations clés pour
l’approche FEER peuvent donc être exprimées par les équations suivantes.

                                                                                                                                3.30

                                                                                                        3.31

132 
 
 

Où 0, 0  0

                                                                                                                                        3.32

  Plutôt que de spécifier les facteurs comportementaux affectant le taux de change,


comme nous le verrons au-dessous dans le cas du BEER, l’attention de l’approche FEER est
portée sur les déterminants du compte courant. Ce dernier est expliqué comme une fonction
de la demande interne et externe, respectivement et  , et le taux de change effectif réel,
. Dans plusieurs applications de l’approche FEER, l’équilibre du compte courant sur le
moyen terme est réalisé en tenant en compte d’un ensemble de déterminants.

                                                           , ,                                              3.33

  Le FEER est le niveau du taux de change réel déterminé à partir l’équation (3.33).
Ainsi, la dernière étape consiste à résoudre cette équation pour ( ), ce qui permet
d’atteindre un compte courant soutenable. Résoudre l’équation (3.33) pour q détermine le
FEER qui permet d’atteindre les équilibres macroéconomiques (internes et externes) comme :

                                                                 ; ;                                                      3.34

  Comme mentionné par Wren-Lewis (1992), l'équation (3.34) montre que le FEER est
une méthode de calcul de taux de change réel qui est consistante avec l'équilibre
macroéconomique de moyen terme. Etant donné les paramétrés d'un modèle du compte
courant, y compris en particulier la sensibilité des flux du compte courant par rapport au taux
de change réel, le FEER est calculé en utilisant une estimation exogène des flux de capital net
soutenable.

Une présentation simplifiée du modèle FEER est présentée ci-dessous :

Equation de la balance courante

                                                                   ;  ;                                                             3.35


 

133 
 
 

Equation de la balance du compte du capital

                                                                     .. . .                                                           3.36


 
Taux de change d'équilibre fondamental

                                                              ;  ;                                                           3.37


 
Avec   = balance courante ;     flux net du capital ;         l'écart d'épargne-
investissement ;   le taux de change effectif réel;       représentent respectivement
la demande finale domestique et celle des pays étrangers.

  Le principe de cette approche repose sur une équation d'identité égalisant le compte
courant aux flux net du capital  . La prise en compte de cette équation ne renvoie
pas à un caractère singulier des approches de l'équilibre macroéconomique, les autres
approches considèrent également cette équation comme une relation essentielle qui détermine
le taux d'équilibre. Le caractère particulier du groupe de l'équilibre macroéconomique est
d'attirer explicitement l'attention sur les déterminants du compte courant. Celui-ci est
typiquement fonction des demandes domestiques et étrangères,      respectivement, et du
taux de change effectif réel.

Le flux du capital est déterminé par l'écart (épargne investissement), qui est
fonction des facteurs économiques conjoncturels et structurels.

On considère que est le flux net de capital d'équilibre de moyen terme, déterminé
par l'écart épargne investissement d'équilibre de moyen terme . Les effets transitoires
de court terme doivent être enlevés de l'écart épargne investissement pour identifier celui de
moyen terme.

L'output gap est un facteur conjoncturel qui joue considérablement dans la


détermination de l'écart épargne investissement à la périodicité cyclique, mais qui disparait à
moyen terme, car le moyen terme est défini comme la réalisation de la production potentielle.
Le fait que le flux de capital soit déterminé par l'écart épargne investissement, ne constitue

134 
 
 

pas non plus une caractéristique singulière de cette approche. Nous retrouvons cette équation
dans le modèle de Faruquee et Stein. Une particularité du modèle macroéconomique réside
dans l'ajustement stock flux qui détermine la trajectoire vers l'équilibre de long terme dans
l'approche dynamique.

Les équations (3.35) et (3.36) sont transformées en un rapport d'équilibre entre le


compte courant et le compte du capital (3.37), où le compte courant est exprimé comme une
fonction linéaire de ses déterminants. Le taux de change d'équilibre fondamental est défini
comme étant compatible avec l'équilibre interne et l'équilibre externe.

La résolution de l'équation pour le FEER est apportée par l'équation (3.37). Une
comparaison du taux de change réel observé    avec le FEER permet d'estimer si le taux de
change actuel est surévalué      ou sous-évalué      . En se concentrant
sur le compte courant, l’approche de FEER fournit un moyen transparent et systématique pour
les décideurs politiques de baser leurs évaluations de taux de change sur leurs opinions quant
aux positions d'équilibre de la balance courante durable.

Le FEER est un modèle statique. Il s’agit d’identifier à chaque période le


Désajustement réel induit par les déséquilibres interne et externe. Cette approche ignore donc
le retour du taux de change à son niveau d’équilibre. Bryant (1983) a suggéré que l'équilibre
du taux de change effectif réel issu de l’approche FEER soit appelé «souhaitable» ou «taux de
change d’équilibre désiré» (Desired Equilibrium Exchange Rate, DEER par la suite).
Bayoumi et al (1994) montrent que le calcul du DEER est nécessaire pour parvenir à des
positions d’équilibre interne et externe «souhaitées». Les auteurs stipulent que l’horizon à
moyen terme est la période nécessaire pour le retour de la production vers son niveau
potentiel et que la compétitivité se reflète dans le volume des échanges. Comme une variante
proche du FEER, le calcul du DEER suit méthodiquement l’approche FEER. Compte tenu de
sa conception, les estimations du DEER dépendent fortement des choix des hypothèses
concernant les positions des équilibres interne et externe. Le niveau du DEER est contraint
par les choix des hypothèses ou des objectifs politiques.

Comme dans le cas du FEER, différentes estimations du DEER sont souvent calculées
pour répondre aux différentes circonstances économiques et choix politiques. Par conséquent,

135 
 
 

le DEER est une contrainte sur la trajectoire du taux de change et non un niveau donné. Les
autorités peuvent choisir la trajectoire sous cette contrainte, compte tenu de leurs objectifs.

6. La modélisation des taux de change d’équilibre comportemental 
 

Le modèle BEER (Behavioural Equilibrium Exchange Rate) a été proposé, dans sa


version originelle, par MacDonald (1997) et Clark et MacDonald (1999). Il repose sur une
approche volontairement positive du taux de change d’équilibre, en réaction notamment au
modèle normatif de Williamson (Mac Donald, 2002). L’approche BEER tente d’expliquer le
comportement du taux de change en tenant compte des origines des mouvements cycliques et
temporaires du taux de change réel. Ainsi, l’hypothèse sous-jacente de l’équilibre
macroéconomique de l’approche FEER est remarquablement absente dans l’approche BEER.
La relation de base du modèle est la condition d’équilibre financier donnée par la parité des
taux d’intérêt non couverte (PTINC).

                                                                                                                      3.38

Où représente la valeur anticipée du taux de change nominal dans la période


pour la période   1 .   est le taux de change nominal à la période (t). Il représente le
nombre d’unité de monnaie nationale nécessaire pour acquérir une unité de monnaie
étrangère. Ainsi, une hausse (e) implique une dépréciation de la monnaie locale.  et 
définissent respectivement les taux d’intérêt nominaux domestique et étranger. Si on retranche
de chaque côté de l’équation le différentiel d’inflation anticipée, P
P E ∆P   E ∆P   , on obtient pour le taux de change réel
(logarithme) l’expression suivante :

                                                                                                                    3.39

Où = taux d’intérêt réel domestique E ∆P  


= taux d’intérêt réel domestique E ∆P  
 

136 
 
 

Avec désignant le taux de change réel anticipé au période pour la


période  1 et le taux de change réel observé. et  sont respectivement les niveaux
des prix intérieurs et étrangers. ∆ ∆ mesurent
respectivement la variation dans les niveaux des prix intérieurs et étrangers.

En transformant l’équation (3.39), le taux de change réel observé peut être


représenté comme une fonction de la valeur anticipée du taux de change réel   , et le
différentiel des taux d'intérêt réels courant.

                                                                                                                3.40

Selon l’approche BEER, les anticipations inobservables du taux de change


réel, , sont supposées être déterminées uniquement par les fondamentaux
économiques 72 de long terme . L’approche BEER produit des estimations du taux de
change réel d’équilibre ( ) en intégrant à la fois les fondamentaux économiques à long
terme et le différentiel des taux d’intérêt réels à court terme.

                                                                   ;                                                3.41

Les fondamentaux retenus dans ce modèle ne différent pas de ce que l’on retrouve
dans la littérature standard. Ce seront principalement la position extérieure nette ( ) en
pourcentage de PIB   , qui reflètera les conditions d’équilibre entre épargne et
investissement, et le ratio des productivités relatives des différents secteurs (ou de l’ensemble
de l’économie) domestiques (notée ′ ) et étrangers (notée ′ )73 qui pourra rendre compte d’un
effet B/S. Les termes de l’échange (notés  ) sont également pris en compte.


                                                  ; ′
;                                                     3.42

                                                            
72
En raison de l'absence de fondement théorique concernant le choix des variables fondamentales, Stein (2002)
considère que ce modèle est purement empirique. 
73
Ce ratio peut être remplacé par le ratio des prix relatifs des biens échangés et non échangés.
 

137 
 
 

Une augmentation de la position débitrice vis-à-vis de l’étranger ( 0 ) sera


financée par des entrées de capitaux qui exigeront un rendement plus élevé des titres
domestiques. Si le taux d’intérêt nominal ne peut s’ajuster, cette hausse du rendement sera
obtenue par une dépréciation/baisse du taux de change réel. Un accroissement plus rapide de
la productivité relative domestique, c’est-à-dire de la productivité du secteur des biens
échangés relativement à celle des biens non échangés, entraînera une hausse du taux réel
conformément à l’effet B/S. Une augmentation des termes de l’échange ou du différentiel des
taux d’intérêt réels produira une appréciation réelle de la monnaie domestique. Dans la
pratique, on déduira le taux de change réel (logarithme) BEER de l’estimation d’une relation
de cointégration de la forme :


                                                 , ; ′
;                                        3.43

Selon l’approche BEER, le taux de change effectif réel courant est expliqué en termes
d’une série de variables fondamentales censées avoir des effets persistants sur la trajectoire du
taux de change. L’écart entre le taux de change et sa valeur de long terme, estimé par la
relation de cointégration, permet d’évaluer le désajustement du taux courant. Les travaux de
ce type se placent dans une perspective purement économétrique : il s’agit d’introduire des
variables fondamentales susceptibles de rendre compte des mouvements de taux de change,
sans expliciter la théorie économique sous-jacente, en ce sens la démarche est ad hoc.

Le modèle BEER conduit donc à une forme simple d’estimation du taux de change
réel d’équilibre. C’est certainement ce qui en fait la popularité et qui peut expliquer la
profusion de travaux utilisant une forme plus ou moins approchée de cette relation. Toutefois,
cette approche pose de nombreuses interrogations :

 La PTINC est plutôt mal vérifiée dans les faits (Isard, 2006). D’une part l’hypothèse
d’anticipations rationnelles pose toujours problème et le taux de change anticipé a
tendance à dévier fortement de la valeur donnée par le taux de change à terme (rejet de
l’hypothèse d’efficience).

138 
 
 

 La vérification empirique de relations de cointégration entre d’un côté le taux de change


réel, et de l’autre un ensemble de fondamentaux non stationnaires «plus ou moins bien
choisis», n’est pas un argument décisif pour retenir ce type de modèle. D’autant que
lorsqu’on procède à des estimations de relations de cointégration sur des périodes longues,
la présence de ruptures peut conduire à des relations erronées (Rey, 2009).

 Cette approche n’incorpore pas explicitement la dynamique du taux de change (Bouveret


et Sterdyniak, 2011). Certes, lors d’un désajustement, les fondamentaux de la relation de
long terme sont censés exercer une force de rappel sur le taux de change courant pour le
faire converger vers sa valeur d’équilibre, mais ce mécanisme est d’essence statistique :
c’est du modèle statistique (le modèle à correction d’erreurs) sous-jacent que provient la
propriété de convergence et non du modèle théorique. Ce modèle statistique suppose
implicitement que le taux de change réel converge de façon monotone vers sa valeur de
long terme. Or l’analyse théorique montre que cette propriété n’est obtenue que dans des
cas très particuliers (il faut qu’il n’y ait qu’une seule variable rigide dans l’économie).
Ainsi les performances empiriques du BEER sont à juger à l’aune de l’absence d’un
modèle théorique explicite, ce qui en limite la rigueur.

7. Le Taux de Change Réel Naturel (NATREX) 
 

  Stein (1994) et Stein et Allen (1997) ont développé une théorie du Taux de Change
Réel Naturel (Natural Real Exchange Rate, NATREX). Celui-ci est défini comme le taux de
change réel qui assure l’équilibre de la balance des paiements en l’absence de facteurs
cycliques (production à son potentiel), de flux de capitaux spéculatifs et de variation de
réserves de change.

Selon Gandolfo (2002), le modèle NATREX a plusieurs ambitions :

 Déterminer les NATREX qui satisfont les conditions d’équilibre de moyen terme et de
long terme.

 Expliquer la dynamique du taux de change réel et notamment le passage d’une situation


d’équilibre de moyen terme à un état stationnaire de long terme.

139 
 
 

 S’appuyer sur une construction théorique rigoureuse qui fait appel au principe
d’optimisation inter-temporel en situation d’incertitude, pour décrire le comportement des
différents agents.

Le NATREX est le taux de change réel qui prévaut lorsque les facteurs
cycliques/spéculatifs n’ont plus d’influence et que le taux de chômage est à son niveau
naturel. C’est un concept positif. L’approche originelle du NATREX développée par Stein
(1990, 1994) relie le taux de change réel entre deux grandes économies à un ensemble de
variables fondamentales, endogènes et exogènes à moyen terme, exogènes à long terme,
variables qui expliquent l’épargne, l’investissement et la balance courante. Les variations du
taux de change réel vont ainsi garantir qu’à l’équilibre de moyen terme, la balance courante
évaluée aux conditions de l’équilibre interne (output à son niveau potentiel, taux de chômage
naturel, inflation stabilisée) sera égale à l’épargne sociale désirée moins l’investissement
désiré (Stein, 2001). Le schéma distingue trois horizons de taux de change : le court, le moyen
et le long terme. A court terme, le taux de change réel dépend des fondamentaux , du stock
d’actifs nets  et de facteurs cycliques et spéculatifs de court terme . Soit :

                                                                          , ,                                                            3.44

Le NATREX de moyen terme ne dépend que des facteurs fondamentaux et du stock d’actifs
nets :

                                                                        ,                                                                  3.45

Dans l’état stationnaire, le NATREX de long terme ne dépend que des fondamentaux :

                                                                                                                                              3.46

Cela signifie que le taux de change réel observé à la date t n’est pas toujours égal à sa
valeur d’équilibre (NATREX) mais peut être décomposé en la somme de trois termes. Le
premier terme du côté droit représente les déviations du taux de change réel de court terme
affecté par des facteurs spéculatifs, du NATREX de moyen terme. Le second terme retrace les
écarts entre le NATREX de moyen terme et le NATREX de long terme, tandis que le dernier
terme est le NATREX de long terme qui ne dépend que des variables fondamentales
140 
 
 

exogènes. Cet équilibre de long terme est atteint lorsque les effets des facteurs cycliques se
sont estompés et que les fondamentaux endogènes ont convergé vers leur valeurs d’états
stationnaire. «The interaction of the medium and the long run is the contribution of the
NATREX model» (Stein, 1994). Dans la perspective d’une mesure des mésalignements des
taux de change, seuls les concepts d’équilibre de moyen terme et de long terme seront
pertinents.

L’approche du NATREX est dynamique et repose explicitement sur les déterminants


de long terme du taux de change réel d’équilibre. Contrairement au FEER, le NATREX
incorpore des effets de stock à travers la dynamique de la position extérieure nette et du stock
de capital. Il permet de calculer une trajectoire d’équilibre du moyen terme au long terme.
Néanmoins le NATREX souffre des hypothèses faites sur l’équilibre interne : le marché du
travail est supposé être à l’équilibre.

En fait, il convient de signaler que le NATREX peut être considéré comme la forme
réduite de l’équation de taux de change d’un modèle macro-économétrique (Bouveret et
Sterdyniak, 2011). Malgré les apports du NATREX à la compréhension du comportement du
taux de change réel, il semble toutefois occulter le fonctionnement de l’équilibre
macroéconomique, surtout interne.

Conclusion 
 

La PPA est la plus ancienne et la plus simple méthode pour estimer les taux de change
d'équilibre. Afin d'expliquer les mouvements des taux de change d'équilibre, cette approche
simple repose uniquement sur les prix relatifs. Elle ignore, cependant, d'autres facteurs
structurels et semble trop schématique, même en prenant en compte les améliorations par
l’effet Balassa-Samuelson. Au-delà de la théorie de la PPA, deux principales théories des taux
de change d'équilibre peuvent être distingués: a) le taux de change d'équilibre fondamental
(Williamson, 1983) et ses développements récents (Cline, 2008b) le taux de change
d'équilibre comportemental qui est une approche économétrique (Clark et MacDonald, 1999).
Le taux de change réel naturel (NATREX) essaie de donner une base théorique à une analyse
dynamique. Dans la pratique, il est proche de l'approche BEER, (Stein et Allen, 1997).

141 
 
 

L'approche BEER explique la dynamique du taux de change en se basant sur certaines


variables (généralement les avoirs extérieurs nets, les termes de l'échange, la productivité et
les prix du pétrole) qui influent sur le taux de change réel à long terme. Une équation à long
terme est d'abord estimée par la méthode de cointégration. Puis, en utilisant un modèle à
correction d'erreur, une équation à court terme est estimée. Les désajustements sont tout
simplement mesurés par l'écart entre le taux de change observé et sa valeur de long terme.
Cette approche économétrique est plutôt facile à gérer et donne des résultats utiles.
Cependant, la base théorique peut être considérée comme inexistante. Et les améliorations
récentes ont été principalement économétriques et statistiques.

Le FEER est défini comme le taux de change en vigueur lorsque l'économie atteint
simultanément l'équilibre externe (un compte courant soutenable déterminé par des
paramètres structurels) et l'équilibre interne (plein utilisation du potentiel productif). Cette
approche est basée sur un modèle structurel qui décrit principalement les relations de
commerce extérieur et relie explicitement les mouvements de taux de change à des
déséquilibres internes et externes. Il a l'avantage de se concentrer directement sur les
paramètres structurels de chaque pays, en utilisant un modèle de commerce multinational. Il
permet d'estimer les taux de change d'équilibre des différents partenaires d'une manière
cohérente, ce qui est rarement assuré dans d'autres approches. Ses liens limités avec la
littérature d’optimisation inter-temporelle sont souvent critiqués mais le FEER n'a pas la
prétention de décrire la modalité du retour à l'équilibre. Le FEER cherche seulement, pour
chaque période, à estimer le décalage réel induit par les déséquilibres internes et externes en
termes statique comparative.

Malgré le fait que chaque méthode a ses avantages et ses inconvénients, nous
préférons le modèle FEER, car il est plus explicitement articulé avec les caractéristiques
structurelles de chaque pays et il assure une plus grande cohérence des estimations entre les
pays.

142 
 
 
 

Chapitre 4 
Estimations des taux de change réel 
d'équilibre 

Introduction 
 

Depuis le milieu des années 1990, les déséquilibres mondiaux ont augmenté de
manière significative avec un important déficit courant aux États-Unis versus des excédents
asiatiques, principalement Chinois. Ces déséquilibres reflètent un déséquilibre interne dans
chaque zone, essentiellement le surendettement des ménages américains et le déclin de la
compétitivité des États-Unis d'une part, l’insuffisance de la consommation et l’excès
d’épargne des ménages chinois d’autre part. La persistance de ces déséquilibres est due, en
partie à la libéralisation financière qui a facilité leur financement. La crise financière actuelle
est la conséquence de ces déséquilibres. Depuis 2007, une réduction partielle de ces
déséquilibres est obtenue, en grande partie grâce à la baisse de la croissance, sans des grands
ajustements du taux de change. Toutefois, les excédents asiatiques sont restés importants.

Les désajustements du taux de change ont été étudiés dans la littérature en utilisant
deux principales approches: le taux de change d'équilibre comportemental (BEER) et le taux
de change d'équilibre fondamental (FEER). Ils ont conclu généralement que le dollar était
surévalué et que l'euro était sous-évalué au cours de la première moitié des années 2000. Bien
que ces déséquilibres aient été progressivement réduits, le yuan est resté sous-évalué depuis la
seconde moitié des années 1990.

Cependant moins d'attention a été accordée aux désajustements du taux de change


dans les pays émergents où des évolutions contrastées peuvent être observées. Dans la plupart
des pays asiatiques émergents des importants excédents courants ont été observés après la
crise asiatique de 1997-1998. Les pays producteurs de pétrole ont également bénéficié
d'importants excédents grâce à l'augmentation du prix du pétrole. Au contraire, de nombreux
pays d'Amérique latine et d’Afrique ont souffert des déficits courants, bien que limités. Ces

143 
 
 

évolutions divergentes entre les pays émergents reflètent des choix différents en matière de
modèle de croissance et du régime de taux de change.

L'objectif de ce chapitre est d'examiner le mécanisme de change des principaux pays


émergents en Asie, en Amérique latine et en Méditerranée depuis les années 1980, de manière
à faire la lumière sur les années 2000 par une analyse à long terme.

À cet effet, l’approche FEER est mise en œuvre. Le FEER est défini comme le niveau
du taux de change permettant à l'économie d’atteindre simultanément l’équilibre interne et
externe (Williamson, 1983). L'équilibre interne est défini comme la pleine utilisation des
ressources productives d'un pays sans générer de pressions inflationnistes. L'équilibre externe
correspond à un compte courant soutenable.

Dans une première étape, en utilisant un modèle du commerce mondial, les taux de
change d’équilibres fondamentaux sont estimés pour les principales devises (le dollar, l'euro,
le yen, le yuan et la livre sterling). Dans une deuxième étape, le taux de change d’équilibre
fondamental peut être estimé pour chaque pays émergent, en utilisant un modèle national
simple articulé par les résultats du modèle multinational pour obtenir des désajustements
bilatéraux de chaque devise.

Ce chapitre est organisé comme suit. Une première section résume le contexte
théorique et méthodologique et présente les modèles utilisés pour estimer le FEER. Une
deuxième section donne des estimations des équilibres internes et externes, mais se concentre
principalement sur les déséquilibres extérieurs. Une troisième section présente les estimations
du FEER pour les principaux pays et les pays émergents. Une quatrième section étudie les
déterminants des désajustements de change.

1. Cadre théorique et méthodologique 
 

Par définition, le désajustement du taux de change est défini comme l'écart, en


pourcentage, entre le taux de change observé et le taux de change d'équilibre. Néanmoins,
diverses méthodes peuvent être utilisées pour estimer les taux de change d'équilibre.

144 
 
 

1.1. L'approche FEER et le SMIM


 

Afin d'estimer les désajustements du taux de change, nous procédons à une analyse en
deux étapes. D'abord au niveau mondial, nous reprenons les travaux de Jeong et al. (2010)
pour les principales devises (le dollar, l'euro, le yuan, le yen et la livre sterling).Ensuite, au
niveau de chaque pays émergent nous nous basant sur un modèle simple à un pays.

Pour les principales devises, la méthodologie utilisée est une synthèse de travaux
antérieurs sur le FEER (Borowski et Couharde, 1999; Jeong et Mazier, 2003) et de la
méthode d'inversion de matrice symétrique (SMIM) proposée par Cline (2008). Un modèle
multinational décrivant le commerce extérieur des principaux pays et le reste du monde a été
utilisé pour calculer le taux de change d'équilibre des principales devises. Dans un modèle à
(n) pays, il y a seulement (n-1) indépendants taux de change bilatéraux. En effet, le taux de
change du premier pays (généralement le dollar) est le numéraire contre lequel les autres
monnaies sont comparées. Par conséquent, il y a un problème de surdétermination, car il y a
plus d'équations (cibles du compte courant) que des inconnues (taux de change).

Dans ce chapitre, le nième pays est utilisé comme un résidu afin de résoudre le problème
de surdétermination et de s’assurer de la cohérence du commerce mondial en volume et en
valeur. Les exportations et les importations du pays résiduel sont calculées comme un résidu
de l'équilibre du commerce mondial en prix constants et courant. En revanche, le taux de
change d'équilibre de la monnaie résiduelle, cohérent avec ceux des autres monnaies, ne
permet pas au pays résiduel d’atteindre son compte courant d'équilibre. À cet égard le pays
résiduel est ignoré dans l'estimation des taux de change d'équilibre des autres monnaies. Dans
la pratique, dans les travaux antérieurs, le reste du monde était généralement utilisé pour
boucler le modèle.

Pour éviter une approche asymétrique et en suivant la méthodologie du SMIM, les six
pays (Etats-Unis, la Chine, le Japon, le Royaume-Uni, la zone euro et le reste du monde) ont
été traités de façon symétrique en effectuant six estimations avec six modèles multinationaux,
où chaque pays est traité successivement comme un résidu. Une moyenne simple des résultats
pourrait être obtenue. Cependant, il existe un degré élevé de cohérence dans les estimations
alternatives du taux de change d'équilibre pour un pays donné à travers les 5 solutions dans
lesquelles la cible du compte courant du pays en question est incluse. Inversement, il y a

145 
 
 

parfois une grande différence entre la valeur moyenne et la valeur obtenue dans la résolution
où le pays ou la zone cible n'est pas inclus. Par conséquent, la solution adoptée a été d'utiliser
(comme estimation des FEER) la moyenne des taux de change d’équilibre obtenue à partir de
toutes les solutions, sauf celle pour laquelle le pays en question est considéré comme un
résidu.

Sur la base de ces résultats, pour chaque pays émergent, un taux de change d'équilibre
sera estimé en utilisant un modèle national simple du commerce extérieur. Le taux de change
d'équilibre sera défini, comme précédemment, comme le taux de change compatible avec les
équilibres internes et externes de chaque pays. Il a été démontré que, pour un pays
relativement petit, un modèle national donne des résultats très proches de ceux obtenus avec
un modèle multinational où le pays étudié serait explicitement décrit (Jeong et Mazier, 2003).

Cette méthodologie améliore les études précédentes à plusieurs niveaux. En


comparaison avec les approches qui ignorent une zone (le reste du monde dans la pratique), le
modèle de Jeong et al. (2010) donne un traitement symétrique de tous les pays, comme le
SMIM de Cline, car chaque pays est successivement traité comme un résidu. En comparaison
avec les travaux antérieurs de Williamson utilisant de grands modèles économétriques, un
modèle plus simple à gérera été construit. Cependant, le modèle du commerce extérieur prend
pleinement en compte les interdépendances entre les principales économies, y compris celui
traité comme un résidu, qui assure la cohérence des résultats à travers le monde. Un autre
avantage de cette approche est celui des petits pays qui peuvent être reliés aux résultats du
modèle multinational, comme il sera expliqué plus en détail. En ce sens, notre approche prend
systématiquement en compte les paramètres structurels de chaque économie et il est plus
facile à gérer qu'un modèle de trente-cinq pays avec une simple équation réduite entre le
compte courant et le taux de change effectif réel pour chaque pays comme dans la méthode de
Cline, (2008). En outre, le modèle intègre les effets du service de la dette extérieure et les prix
du pétrole sur le compte courant pour les pays émergents, mais ils sont traités comme une
variable exogène.

Enfin, en se basant sur les études des déterminants du compte courant à moyen terme
(Faruqee et Isard, 1998; Chinn et Prasad, 2003), le compte courant d'équilibre est déterminé
par l'estimation des déterminants structurels de la balance courante (les caractéristiques
démographiques, le stade de développement, le déficit public, les avoirs extérieurs nets, etc..)

146 
 
 

en s'appuyant sur des techniques de régression du panel. On évite d'utiliser une approche ad
hoc qui est souvent utilisée, mais qui semble moins bien fondée. Des tests de sensibilité sont
effectués afin d'évaluer la sensibilité des résultats aux objectifs adoptés (cible du compte
courant, l'équilibre interne) et à des valeurs de paramètres (élasticités-prix).

1.2. La modélisation macroéconomique

1.2.1. Le modèle multinational


 

Les taux de change d’équilibre des principales devises (dollar, yuan, euro, yen, livre
sterling) sont calculés à l’aide d’un modèle multinational décrivant les échanges extérieurs
des Etats-Unis, de la Zone Euro, de la Chine, du Royaume-Uni, du Japon et du Reste du
Monde (Jeong et al. 2010). En s’inspirant de la méthode de SMIM de Cline (2008), un
traitement symétrique est assuré pour les six pays ou zones retenus. Les cinq équations pour
chaque pays ou zone sont les quatre équations pour le bloc extérieur (exportation en volume,
importation en volume, prix à l’exportation et prix à l’importation) et une équation de la
formation du prix à la consommation. Les importations dépendent de l’indicateur de l’activité
domestique et de l’indicateur des prix relatifs qui est le rapport entre le prix des biens et
services domestiques et le prix des importations de biens et services. Les exportations sont
fonction de l’indicateur de demande mondiale et de l’indicateur de compétitivité-prix du pays
domestique qui est le rapport entre le prix des concurrents et le prix à l’exportation des pays.
Les équations des volumes et des prix prennent en compte les effets d’interdépendance
commerciale en incorporant les effets des variables des prix et des volumes des autres pays
dans la demande mondiale, le prix à l’exportation des concurrents et le prix à l’importation
mondial.

Pour une cohérence commerciale au niveau mondial, on introduit les deux équations
de l’équilibre mondial en volume et en valeur. Les équations sont construites explicitement
avec les taux de change bilatéraux. Le dollar est le numéraire, et les taux bilatéraux des
autres monnaies sont définis vis-à-vis du dollar.

Chaque pays est traité successivement comme un résidu et dans ce cas les exportations
et les importations en volumes sont déterminées comme des résidus des équations d'équilibre

147 
 
 

du commerce mondial en valeur (4.5) et en volume (4.6) alors que les prix à l’exportation et à
l'importation sont déterminés de la même manière que pour les autres partenaires
commerciaux. Cette spécification multinationale donne une description complète des effets
interdépendants du volume et du prix des exportations et des importations de tous les pays.
Une équation des prix à la consommation (4.9) est intégrée pour tenir compte de l'effet de
rétroaction entre les prix à la consommation et les prix à l'importation. Le taux de change
effectif réel est défini relativement au prix à la consommation. Les évolutions des taux de
change effectifs réels sont calculées sur la période 1982-2011 en considérant les 5 grands pays
ou zones (les Etats-Unis, la Zone Euro, la Chine, le Royaume-Uni et le Japon) comme les
principaux partenaires commerciaux.

Au total le modèle comprend trente-cinq variables endogènes. Les taux de change


effectifs réels sont ensuite calculés à l'aide des taux de change bilatéraux et les prix de la
demande intérieure. Les prix à la production sont supposés invariants à ce niveau de calcul, ce
qui revient à ne pas tenir compte du jeu de la boucle prix-salaire. Les variables exogènes sont
les écarts de la demande intérieure à l'équilibre interne et les écarts de la balance courante à la
balance d'équilibre.

La balance courante d'équilibre est estimée à partir des déterminants fondamentaux


usuels : (Solde budgétaire, ratio de dépendance des jeunes et des vieux, revenu par tête, avoir
nets extérieurs, degré d'ouverture, etc.) sur les données de panel, d'une part pour les pays
avancés et d'autre part, pour un ensemble de pays en développement. Le compte courant est
défini comme dans l'équation (4.11). Pour le pays résiduel, son compte courant peut être
calculé (équation (4.12)), mais n'est pas pris en compte.

Le modèle multinational en niveau

Les équations du commerce extérieur en volume

L’équation des exportations en volume

                                                                                                                  4.1

148 
 
 

                                                                                                                               4.2

                                                                                                                        4.3

L’équation des importations en volume

                                                        /                                                    4.4

Avec i = 1 ~ 6 { le Japon, la Chine, les Etats-Unis, la zone euro, le Royaume-Uni, le reste du


monde} = {tous les pays sauf le pays résiduel}

L'équilibre du commerce mondial en valeur et en volume

Équilibre en valeur

∑ ∑
                                                                                                                         4.5

Équilibre en volume

                                                                                                                                     4.6

Avec i = 1  6

Équations des prix

Équation des prix à l’export

                                                                                                                           4.7

Équation des prix à l’import

                                                                                                                    4.8

149 
 
 

Équation des prix à la consommation

                                                                                                                                 4.9

Taux du change effectif réel

                                                      /                                                4.10

Avec    1  6 

Balance courante

Compte courant

                                                                              4.11

                                                                                                                               4.12

Avec i = 1 ~ 6{le Japon, la Chine, les Etats-Unis, la zone euro, le Royaume-Uni, le reste du
monde} = {tous les pays sauf le pays résiduel}

Les variables du modèle multinational sont définies comme suit: = les exportations
non pétrolières en volume; = la demande mondiale en volume ; di = la demande
intérieure en volume; = la compétitivité des prix à l'exportation; = les prix à
l'exportation; = les prix à l'exportation des concurrents;   = les importations non
pétrolières en volume ; = les prix à l'importation; = les prix des importations
mondiales; = les prix à la consommation ; P = les prix à la production;    taux de
change nominal bilatéral vis-à-vis du dollar;   taux de change effectif réel; = le compte
courant; = les taux d'intérêt de la dette extérieure; = la dette extérieure nette; = les
prix du pétrole; = l'importation nette de pétrole.

150 
 
 

Nous notons que dans le modèle, le dollar joue le rôle du numéraire    1 et le


taux de change bilatéral des autres monnaies par rapport au dollar sont écrites comme 1 dollar
                          unités monétaires du reste du monde.

Dans ce cadre, le FEER est défini comme le taux de change effectif réel compatible
avec la réalisation simultanée des équilibres interne et externe à moyen terme de chaque
partenaire commercial. L'équilibre interne signifie que la production effective suit la
production potentielle et l'équilibre extérieur signifie que le compte courant observé
correspond au compte courant soutenable à moyen terme.

Le modèle est écrit en différentielle logarithmique par rapport à l'équilibre, qui calcule
directement la mesure des désajustements. Les variables en minuscules correspondent aux
différences logarithmiques de ces variables,         /        /   pour
le taux de change bilatéral et          /           /  pour les autres
variables, à l'exception du compte courant      /       /  , où la variable
représente la différence entre le compte courant observée et le compte courant d'équilibre en
pourcentage du PIB. Les valeurs des désajustements du taux de change bilatéraux  sont
données par la résolution du modèle en différentiel logarithmique.

Le modèle multinational en différentiel logarithmique

Le modèle multinational en différentiel logarithmique (x = dX / X = (X X*) / X*) est


transformé comme suit:

                                                                                          4.1

                                                                                                     4.2


 
 

                                                                   4. 3

151 
 
 

                                                                                                                    4. 4

                                                        1                                                  4. 5

                                                   1                                               4. 6

                                                           1                                                      4. 7

                                                                                                          4.8

                                                    bi = μi Ti (1 –σpetxi –σxi )(pxi + xi –pmi –mi )                                    4.9

Avec, , , , = les parts de chaque pays respectivement dans ; les exportations


mondiales en volume, les importations mondiales en volume, les exportations mondiales en
valeur et les importations mondiales en valeur;      /  = rapport des exportations
aux importations;      /  = ratio d'ouverture ;   position extérieure nette en
dollars ;  = taux d'intérêt;   /   rapport des services de la dette extérieure aux
exportations et      /  , ratio des importations nettes de pétrole sur les
exportations non pétrolières.

La façon dont l'équation 4.9 est obtenue est expliquée comme suit:

Bi Bei Bi Bi
bi = - e e =d = µi d
Pi Yi Pi Yi Pi Yi PMi Mi

PXi Xi EPpet Mpeti PXi Xi ii Ei Fi PXi Xi


bi = µi d -1 - -
PMi Mi PXi Xi PMi Mi PXi Xi PMi Mi

bi = μi Ti (1 -σpetxi - σxi )(pxi + xi - pmi - mi )

bi = μi dTi (1 - σpetxi -σxi )

152 
 
 

1.2.2. Le modèle national


 

Pour chaque pays émergent, à l'exception de la Chine qui a été étudiée dans le cadre
du modèle multinational précédent, il est possible d'estimer un taux de change d'équilibre en
utilisant un modèle simple du commerce extérieur dans lequel la demande mondiale et les
prix du commerce mondial sont exogènes. Nous n'utilisons pas un modèle multinational pour
calculer les taux de change d'équilibre. On peut supposer que les pays émergents n’ont pas un
effet très important à la fois sur le volume et les prix des échanges des grands pays, dont les
échanges influencent les échanges de ces petits pays. En se basant sur cette hypothèse, nous
utilisons un modèle simple à un pays, qui décrit les échanges commerciaux. Les travaux de
(Jeong et Mazier, 2003) montrent que les résultats obtenus avec un modèle multinational sont
très proches des résultats obtenus avec un modèle à un pays pour les petits pays.

Les résultats en termes de taux de change effectif réel des petits pays sont articulés
avec ceux du modèle multinational pour calculer les désajustements en termes de taux de
change bilatéral. Les équations suivantes spécifient les équations des échanges commerciaux
en volume et des prix pour un petit pays face à l'économie mondiale. L'équation (4.17) décrit
la formation de la balance courante.

Avec les notations habituelles, le modèle est écrit comme suit:

                                /                                   4.13


 
                              /                                     4.14

                                                                                                   4.15


                                                                                               4.16
 

                                                                              4.17  

                                                                                                                                  4.18

153 
 
 

                         / /                       4.19

Avec    1 ~ 25 {Argentine, Bolivie, Brésil, Chili, Colombie, Corée, Équateur, Égypte,
Inde, Indonésie, Malaisie, Maroc, Mexique, Pakistan, Paraguay, Pérou, Philippines,
Singapour, Sri Lanka , Thaïlande, Tunisie, Turquie, Uruguay, Venezuela et Vietnam} et
   1 ~  6 {Japon, la Chine, les Etats-Unis, la zone euro, le Royaume-Uni, le reste du
monde}74

Les variables du modèle national sont définies comme suit: = les exportations non
pétrolières en volume; = la demande mondiale en volume; = les prix mondiaux; =
prix à l'exportation; = les importations non pétrolières en volume; = la demande
intérieure en volume ;  = les prix à l'importation;  les prix à la production;  = taux de
change bilatéral par rapport au dollar; = taux de change effectif réel; = la balance
courante; = le taux d'intérêt de la dette extérieure; = la dette extérieure nette; = prix
du pétrole; = l'importation nette de pétrole.

Modèle national en différentiel logarithmique75

Le modèle national en différentiel logarithmique(x = dX / X = (X  X*) / X*) est transformé


comme suit:
                                                       1                                                   4. 13
                                                                                                          4. 14

                                                                                                                               4. 15  
 
                                                                                                                             4.16  

                                                            
74
Le Reste du Monde est calculé comme dans le modèle multinational. En outre, nous supprimons le pays pour
lequel nous calculons le désajustement des flux commerciaux mondiaux afin de calculer le Reste du Monde dans
le modèle national. La différence est négligeable, car les pays dans le modèle national sont minimes au niveau
mondial.
75 X M i j X i j  X i  j    M i  j  (Source: calculs de l’auteur, des bases de
  i  j ; µ 
ij ;  
ij ;   ij ij  
Xi M i M j  X i    M i 
données CHELEM, CEPII). Ici, nous utilisons les logarithmes naturels, afin de simplifier les calculs. Cette
approximation est acceptable au premier ordre et dans le voisinage de l'équilibre.
 

154 
 
 

                                               bi = μi Ti (1 –σpetxi –σxi )(pxi + xi –pmi –mi )                                      4. 17

La résolution de ce modèle simplifié en différentiel logarithmique donne    ,


désajustement en termes effectifs réels (          /          / :

1 σpetxi - σxi

1 σpetxi - σxi

/ 1
                                                      4.20
1

Où   la différence entre les valeurs observées et d'équilibres de la balance du compte
courant en % du PIB;  EP M  / PXX, le ratio des importations nettes de pétrole sur
les exportations non pétrolières et  / , ratio du service de la dette extérieure sur
les exportations non pétrolières ; =la demande mondiale en quantité ; la demande
interne en quantité en différentielle logarithmique par rapport au niveau de l'équilibre, =taux
de change nominal bilatéral vis-à-vis du dollar,  =taux d'intérêt dela dette extérieure,  la
dette extérieure nette;  prixdu pétrole;  = importations nettes de pétrole ;  taux
d'ouverture ; rapport des exportations aux importations ; R= taux de change effectif
réel ; R   = taux de change réel d’équilibre ; ,   élasticité-prix à exportation et à
l'importation ;  ,  les élasticités de la demande à l’export et à import ; , prix à
l'exportation et à l'importation.

L'approche FEER se concentre sur le taux de change effectif réel. Toutefois, le taux de
change nominal bilatéral par rapport au dollar de chaque monnaie peut être plus intelligible.
En utilisant l'équation (4.21), nous pouvons trouver e, le degré des désajustements en terme

155 
 
 

nominal bilatéral; les désajustements des pays partenaires sont donnés par le modèle
multinational précédent:

Comme dans le modèle multinational, nous supposons que: p 


P  P   0 i i
e

i
Pi e

                                                         ei = ri + λij pxj - ej                                                            4.21


j≠i

Nous pouvons également calculer les mésalignements du taux de change basés sur les
prix à la consommation (PD) (équation (4.22)):

                     rci 1 μ ri + pdj - ej λij pxj - ej                             4.22


j≠i j≠i

(pdj , ej , pxj obtenus grâce au modèle multinational)

Avec est le prix mondial des exportations et est le prix à la consommation.

156 
 
 

2. Les élasticités du commerce extérieur  
 

Les élasticités des équations du commerce extérieur pour les pays retenus dans notre
modèle, sont présentées dans le tableau (14). Ce type d’études empiriques a été
principalement mené pour les pays industrialisés. Néanmoins, quelques travaux ont été
développés sur les pays émergents, notamment ceux de Senhadji (1997), Barell(1998), Ito et
al. (1996) et du FMI (2000) dont nous reprenons les résultats. Pour la Corée du Sud et la
Thaïlande, nous retenons les élasticités obtenues par Barell76alors que pour l’Indonésie, sont
retenus les élasticités tirées des travaux du FMI qui apparaissent plus significatives.

Quant à l’Inde, ce sont les estimations de Senhadji qui sont prises en compte.
L’élasticité prix à l’importation  pour la Malaisie, estimée par le FMI semble trop faible
par rapport aux autres pays. Les élasticités du modèle proposé par Senhadji, pour les
Philippines, sont trop élevées par rapport à celles du FMI. Etant donné les incertitudes de ces
estimations, surtout pour les pays émergents, il serait préférable d'utiliser des valeurs plus
raisonnables. En conséquence, pour ces deux pays, nous utilisons la moyenne des m et des
m de l’ensemble des pays en développements estimée par Senhadji      1,43.   
1,14 (Jeong et Mazier, 2003).

En Amérique Latine, les élasticités de la demande sont en général significatives et


supérieure à 1. Dans le cas du Chili et du Mexique, les différentes études empiriques donnent
des résultats qui sont assez proches concernant l'élasticité de la demande. L’élasticité-prix à
l'exportation pour l'Argentine et celle à l'importation pour le Chili, semblent trop faibles pour
permettre l'ajustement de la balance courante suite aux variations importantes du taux de
change. Comme l'élasticité prix à l'importation, nous prenons 1.07, 1.81, 1.43, respectivement,
pour l'Argentine, le Brésil et le Mexique. La faible élasticité prix à importations pour le Chili,
pourrait cependant provenir du problème de manque de données et de l'existence des
contrôles sur les importations, et non d'une élasticité vraiment faible de ce pays. Pour les
simulations, nous conservons une moyenne des élasticités prix à l’importation des 48 pays en
développement dans les travaux empiriques de Senhadji (1997) (0.88).

                                                            
76
Les résultats de Barell s’avèrent très proche de ceux de Senhadji
 

157 
 
 

Pour les prix à l'exportation et à l'importation, nous adoptons l'hypothèse de "preneur


de prix" pour les exportateurs sur le marché mondial     1 et de "faiseur de prix" pour
les importateurs       1 . 

Tableau 14. Elasticités du commerce extérieur des pays émergents

Pays Source x m x m
Barell 2.20 1.20 2.00 1.20
Corée
Kim 1.11 0.10 1.29 1.59
Inde Senhadji 0.77 1.12 1.55 1.33
IMF 0.32 0.68 1.27 1.66
Indonésie
Senhadji - 1.51 - 0.98
Malaisie IMF 0.53 0.01 1.86 1.47
IMF -0.10 -0.75 1.34 1.65
Philippines
Senhadji 1.22 2.73 1.19 2.26
IMF 0.99 0.75 2.73 1.03
Thaïlande Barell 0.45 0.93 2.59 1.59
Senhadji - 1.37 - 1.69
Argentine Senhadji 0.24 1.07 1.28 1.27
Brésil Senhadji 1.60 1.81 2.10 1.25
Ito et al. 0.10 0.23 2.87 1.70
Chili
Senhadji 0.10 0.02 2.87 1.70
Colombie Senhadji 1.73 0.78 1.39 1.09
Senhadji - 0.79 - 1.32
Mexique
Ito et al. 0.77 1.43 1.55 1.60
Uruguay Senhadji 1.77 0.94 0.59 5.54

158 
 
 

3. Equilibre externe et interne 

3.1. La détermination de la balance du compte courant d’équilibre


 

L’étude de la balance courante est appréhendée ici en analysant le déséquilibre entre


investissement et épargne domestiques. Notre approche se situe dans une perspective de
moyen-long terme dans la lignée des travaux d’Isard et Faruqee (2001), Chinn et Prasad
(2003) et FMI (2007).

Ces études soulignent l’importance des déterminants structurels, comme les niveaux
du développement économique, les profils démographiques ou les stocks d’actifs étranger.
Notre travail traite en particulier des pays émergents d’Amérique latine et d’Asie, dont les
comportements d’épargne et d’investissement devraient s’avérer différents de ceux des pays
développés en raison d’une croissance de la production globalement supérieure, d’une
population plus jeune et d’un ancrage important sur le dollar.

Notre panel se compose de vingt-sept pays en développement sur la période allant de


1980 à 2011, sur données annuelles. Les données sont tirées des bases de données du CEPII
(CHELEM), de la Banque Mondiale et du Fond Monétaire International, sauf pour les avoirs
nets extérieurs que nous avons pris de la base de Lane et Milesi-Ferreti (2007).

Les pays de l'échantillon ont été sélectionnés en raison de leur importance dans le
commerce mondial au motif, d’une part qu’une économie active au niveau commercial est
plus dépendante des fluctuations de la valeur de sa monnaie. D’autre part, que des
déséquilibres commerciaux importants accentuent les variations de change.

Dans notre modèle de régression, nous considérons les variables explicatives les plus
importantes proposées par la littérature sur les déterminants de la balance du compte courant.
Nous avons travaillé avec des sous périodes calculées sur des moyennes de 4 ans, ce qui
permet de capturer la relation de moyen terme entre la balance du compte courant et les
déterminants macroéconomiques (Chin et Ito (2005), et Lee (2008)).

159 
 
 

                        4.23

Avec
: représente les facteurs spécifiques temporels
: représente les facteurs spécifiques pays
: Le terme d'erreur

Nous rappelons ici brièvement les variables explicatives utilisées dans notre modèle.

: La balance du compte courant (en % du PIB). Elle est utilisée dans notre modèle
d'estimation comme la variable dépendante.

: Les Avoirs Net Extérieurs (en % du PIB) début de période : Un pays avec des avoirs
nets extérieurs exporte du capital et bénéficie des revenus de capital. Une relation croissante
est dès lors attendue entre avoirs extérieurs nets et la balance courante.

: L’écart de production (PIB réel en % de PIB potentiel). Il est introduit comme une
variable de court terme.

: Le ratio de dépendance vis-à-vis des jeunes et des vieux : c'est le rapport entre la
population ayant moins de 15 ans et plus de 64 ans et la population active (entre 15-64 ans).
Les pays relativement jeunes et relativement vieux ont tendance à avoir des déficits du
compte courant plus important. Une part élevée de la population inactive, réduit l’épargne
nationale et diminue le solde du compte courant (Higgins 1998, et Jackson Hole 2004)

: Le solde de la balance du pétrole en % de PIB : L’augmentation des prix du pétrole


augmente le solde du compte courant des pays exportateurs de pétrole et diminue le solde des
pays importateurs de pétrole (FMI 2008).

Le groupe est composé de 27 économies émergentes (Algérie, Argentine, Bolivie,


Brésil, Chili, Chine, Colombie, la Corée, Équateur, Égypte, Inde, Indonésie, Malaisie, Maroc,
Mexique, Pakistan, Paraguay, Pérou, Philippines, Singapour, Sri Lanka , Thaïlande, Tunisie,

160 
 
 

Turquie, Uruguay, Venezuela et Vietnam), est utilisé pour déterminer la cible du compte
courant de ces pays émergents y compris la Chine77.

Les résultats des tests de racine unitaire sont présentés en Annexe 7. Comme on peut
le constater, nous rejetons l'hypothèse nulle de non-stationnarité dans toutes les séries.

Les résultats pour les pays émergents sont très concluants. Les coefficients sont dans
l'ensemble économiquement et statistiquement significatifs avec des signes attendus dans les
différentes spécifications (tableau 15). La spécification de la section transversale avec des
effets fixes par pays semble la plus pertinente et a été adoptée afin de calculer le compte
courant d'équilibre.

Tableau 15. Determinants de la balance courante pour les pays émergents (1980-2011)

MCO Effect Fixe Individual Effect Fixe Temporel


8.78*** 14.23*** 3.85***
Constante
(6.62) (7.11) (2.79)
Stock initial des 0.07*** 0.06*** 0.07***
avoirs extérieurs nets (9.88) (6.20) (11.90)
-0.11*** -0.20*** -0.03
Ratio de dépendance
(-5.45) (-6.67) (-1.60)
0.21*** 0.22*** 0.19***
Balance petrolière
(6.35) (2.65) (6.27)
-0.39** -0.37** -0.32*
Output Gap
(-2.49) (-2.49) (-1.86)
R² Adjustée 0.50 0.57 0.60
Source: estimation de l’auteur, ( ) = T statistique; *** = significatif à 1%, ** = significatif à 5%, * =
significatif à 10%)(Coefficients de robustesse de l’heterosedasticité)

Comparé aux résultats des estimations de la première et de la troisième colonne, les


estimations à effets fixes par pays (colonne du milieu du tableau 15) ont les mêmes signes
mais dans l’ensemble sont plus significatives. La croissance démographique a un effet plus

                                                            
77
La Chine fait partie du modèle multinational avec les principaux pays développés, mais son compte courant
d’équilibre est basé sur une estimation de panel de pays émergents.

161 
 
 

économique et statistique entre les pays que dans le temps, reflétant l'évolution très
progressive de la croissance de la population au fil du temps.

Le profil démographique de la population a donné des résultats significatifs et


négativement corrélés avec le compte courant, comme prévu. Les résultats indiquent aussi une
corrélation positive et très significative entre les et le comptes courant.

3.2. Les résultats des simulations des cibles de la balance courante


 

Pour simuler les balances courantes d'équilibre, nous utilisons la valeur des stocks
initiaux de l'actif net étranger au début de chaque période de quatre ans et les valeurs des
moyennes de quatre ans des ratios de dépendance et des autres variables. Néomoins, nous
excluons l’output gap afin d'éliminer les effets à court terme. Les figures 3 à 8 montrent les
valeurs observées et l'équilibre du compte courant pour les principaux pays émergents.

Dans le cadre analytique du FEER, la différence entre la balance courante observée et


d’équilibre ne peut pas être interprétée, entièrement, comme un déséquilibre externe. Les
effets retardés des variations de change qui n’ont pas encore produit leurs effets sur la balance
courante observée doivent être pris en compte pour corriger les valeurs de la balance courante
observée. Cette correction est faite en utilisant la structure dynamique des équations de
commerce extérieur78.

Ce qui donne la correction suivante sur la balance courante

  1 1

Avec rt = taux de croissance du taux de change effectif réel.

Les figures ci-dessous présentent les balances courantes observées et corrigées et


celles d'équilibre pour les l’ensemble des pays étudiés. On examine successivement les

                                                            
78
x   1 x   2 x   3 x  Et   m   1 m   2 m   3 m  

162 
 
 

grands pays asiatique (Japon, Corée), ensuite les BRIC (Chine, Inde, Brésil), les autres pays
asiatiques, les autres pays d’Amérique latine et enfin les pays méditerranéens. À titre de
comparaison les graphiques sont également donnés pour les pays avancés : USA, Zone Euro
et Japon (Jéong et al. (2010)).

La cible du compte courant américain est comprise entre -2% et -3 % du PIB sur la
période. Dans plusieurs approches sur les déséquilibres mondiaux, la cible du déficit du
compte courant américain à moyen terme est de -3% du PIB (Ahearne et al., 2007). La cible
simulée pour le déficit courant des États-Unis apparaît donc compatible avec les approches
qui définissent le déficit standard sur une base ad hoc. Le compte courant américain a connu
des périodes contrastées avec des déficits importants, comme dans le milieu des années 1980
et les années 2000, et des positions plus équilibrées au début des années 1980 et 1990 (figure
3).
La Zone Euro est dans une situation très différente. Depuis le milieu des années 1990,
le compte courant d'équilibre de la Zone Euro est proche de zéro avec une légère amélioration
au cours des années 1980, grâce à une amélioration de la position extérieure. L'amplitude des
déséquilibres actuels dans la Zone Euro (dans son ensemble) est faible par rapport à ceux
observés dans d’autres grandes économies mondiales. Cependant, cette situation «équilibrée»
de la Zone Euro masque une grande hétérogénéité entre chaque membre de la Zone Euro.

Figure 3. La balance courante observée et d'équilibre des Etats-Unis et de la Zone Euro

Etats-Unis Zone Euro


1 5

0 4
3
-1
2
-2 1
-3 0

-4 -1
-2
-5
-3
-6 -4
-7 -5
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10

Actual current account Actual current account


Equilibrium current account Equilibrium current account
Adjusted current account
Adjusted current account

Source:Jéong et al. 2010, le Fonds monétaire international (World Economic Outlook, Avril 2010) pour le
compte courant observé en% du PIB.

163 
 
 

3.2.1. Les grands pays asiatiques  

Depuis les années 1980 le Japon a connu d'énormes excédents courants, largement au-
dessus de sa valeur d'équilibre. La balance courante d'équilibre a connu des évolutions
contrastées. Le Japon a enregistré une balance courante d'équilibre constamment positive et
qui augmente jusqu’à la fin des années 1990 grâce à sa position extérieure nette et à la légère
diminution du ratio de dépendance. Pendant les années 2000, le Japon a connu une
dégradation de sa balance courante d’équilibre sous l’effet d’une forte augmentation du ratio
de dépendance de la population âgée qui réduit l’épargne nationale. L’augmentation du ratio
de dépendance augmente la part des inactifs avec un faible taux d'épargne (figure 4).

Figure 4. La balance courante observée et d'équilibre du Japon et de la Corée

Japon Corée
6 20

5
15
4
10
3

2 5

1
0
0
-5
-1

-2 -10
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Actual current account Balance courante observée


Equilibrium current account Balance courante d'équilibre
Adjusted current account Balance courante ajustée
    
Source:estimations de l’auteur, le Fonds monétaire international (World Economic Outlook, Avril 2012) pour le
compte courant observé en % du PIB, Jéong et al. 2010 pour les données du Japon.

La Corée du Sud présente une certaine similitude avec le cas du Japon avec des
importants excédents courants durant la seconde moitiée des années 1980 et après la crise
asiatique de 1997. La balance courante d’équilibre de la Corée du Sud, a connu une
amélioration considérable durant les années 1980, passant d'environ -4% du PIB à 1% dans
les années 1990, grâce à une forte hausse, surtout fin des années 1980, de sa position
extérieure nette ainsi qu’une légère baisse de son ratio de dépendance. À partir des années
1990, la balance courante d’équilibre devient positive. Durant les années 2000 le compte
courant coréen est resté proche de sa valeur d'équilibre.

164 
 
 

3.2.2. Les BRIC 
 

Les BRIC 79 , les pays émergents les plus importants, sont intéressants à comparer
ensemble parce qu'ils ont été confrontés à des évolutions contrastées (figure 5).

Premièrement, jusqu’ au début des années 1990, la balance courante d’équilibre de la


Chine était proche de 0 % du PIB, en conformité avec la volonté de la Chine d’éviter un
endettement extérieur trop important. Les reformes structurelles80, qui ont débuté en 1979 ont
permis à la Chine de s’ouvrir progressivement aux échanges extérieurs tout en transformant
son appareil productif. La poursuite des réformes dans les années 1990, a conduit à une
ouverture accrue avec un recours aux investissements étrangers. La balance courante devient
largement excédentaire tandis que son niveau d’équilibre s’améliore pour atteindre environ 2
% du PIB en 2008. Cette évolution s’explique par l’amélioration de la position extérieure
nette et la diminution de la population juvénile dépendante. les excédents chinois sont
devenus de plus en plus importants après la deuxième moitié des années 1990, en dépit de
l'impact de la crise asiatique à partir de 1998.

Deuxièmement pour l’Inde, les réformes économiques 81 mises en œuvre dans les
années 1980 ont été plus prudentes et limitées que dans le cas chinois (Chauvin et Lemoine,
2005). Toutefois, la croissance du PIB s’accélère favorisant les importations et l’aggravation
du déficit courant. Jusqu’aux années 2000, la balance courante indienne bien qu’elle ait connu
des phases de léger redressement est restée déficitaire ce qui illustre une différence profonde
de stratégie économique par rapport à la Chine. Au début des années 2000, la balance
courante s’améliore et se situe au-dessus de son niveau d’équilibre mais cette tendance
s’explique par le recul des importations lié au ralentissement de la croissance et par la hausse
des prix des biens agricoles destinés à l’exportation. Après 2003, la forte croissance de la
production domestique (environ 8% en moyenne de 2003 à 2008) et la hausse des prix de
pétrole entrainent une dégradation du solde courant qui redevient déficitaire avec un déficit

                                                            
79
Parmi les BRIC, la Russie n'est pas examinée dans ce travail en raison de la forte spécialisation dans les
produits de base et à des problèmes statistiques au cours de la période de transition.
80
Réforme du système de gestion microéconomique : réforme agricole (le système de propriété collective a été
remplacé par celui de responsabilité des ménages) et Réforme des entreprises (accroître l'autonomie des
entreprises).
81
Assouplissement du système de licences réglementant l’activité industrielle, libéralisation des importations de
biens d’équipement et de biens intermédiaires destinés aux industries exportatrices, baisse de certains taux
d’imposition

165 
 
 

record enregistré en 2008. La chute des importations en 2009 a conduit à une légère
résorption du déficit courant.

Figure 5. La balance courante observée et d'équilibre de la Chine, l’Inde et le Brésil


 
Chine Inde
12 2

10
1
8
0
6

4 -1

2
-2
0
-3
-2

-4 -4
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Actual current account Balance courante observée


Equilibrium current account Balance courante d'équilibre
Adjusted current account Balance courante ajustée
    

Brazil
4

-2

-4

-6

-8

-10
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée


Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée
 
Source:estimations de l’auteur, le Fonds monétaire international (World Economic Outlook, Avril 2012) pour le
compte courant observé en % du PIB, Jéong et al. 2010 pour les données la Chine.

La balance courante d’équilibre, largement négative durant les années 1980, a


augmenté progressivement pour atteindre zéro% du PIB au milieu des années 2000,
principalement grâce à l'amélioration de la position extérieure nette et du ratio de dépendance.
À la fin des années 2000, le compte courant d'équilibre diminué à -1% du PIB en raison d'une
dégradation de la position extérieure nette.

166 
 
 

Troisièmement, le Brésil est le dernier cas où les déficits courants ont été beaucoup
plus important qu'en Chine et en Inde au début des années 1980 (autour de -8% du PIB, avant
la crise de la dette) et dans la seconde moitié des années 1990 (-4% du PIB, après le succès du
Plan Real et les afflux importants des investissements directs étrangers). La balance courante
d'équilibre était très négative dans les années 1980 (-6% du PIB), ce qui reflète une stratégie
de croissance fondée sur la dette extérieure, tout à fait différente de celle des cas chinois et
même indien. Ensuite, elle s’améliore pour atteindre à la fin des années 2000 0% du PIB.
Cette amélioration s’explique par la contribution positive des avoirs nets étrangers et par la
diminution de la part de la population inactive, malgré une dégradation des exportations nettes
de pétroles.

La balance courante d’équilibre du Brésil a été plus déficitaire que celle de la Chine et
de l’Inde mais affiche une tendance haussière depuis les années 1980 pour se stabiliser dans
les années 2000. La baisse du ratio de dépendance se révèle déterminante pour expliquer
l’amélioration de la balance courante d’équilibre.

3.2.3. Les autres pays du sud­Est asiatique 

Les pays du Sud-Est asiatiques présentent certaines similitudes (figure 6). Durant les
années 1980 et surtout pendant les années 1990 avant la crise financière de 1997-1998, leurs
comptes courants étaient souvent inférieurs à leurs valeurs d'équilibre qui étaient proches de
0% du PIB. Avant la crise financière asiatique de 1997/1998, la balance courante des pays
d'Asie de l’Est était dans l’ensemble inférieure à son niveau d'équilibre. Au lendemain de la
crise asiatique, les pays en crise (Thaïlande, Malaisie, Indonésie, Philippines) ont accumulé
d'importants excédents suite au boom des exportations et au ralentissement de la croissance.
Par la suite, ces excédents courants ont baissé, à l'exception notable de la Malaisie mais tout le
long des années 2000, le solde courant est resté sensiblement plus élevé que son niveau
d'équilibre qui était proches de 0 % du PIB. Cependant, il y a une certaine divergence des
évolutions des comptes courants entre les pays de la zone. Jusqu’à récemment, la Malaisie et
les Philippines étaient marquées par une tendance excédentaire, en raison de l'amélioration de
leurs positions exterieures nettes, en particulier en Malaisie.Tandis que l'Indonésie et la
Thaïlande étaient revenues à leurs niveaux d'équilibres.

167 
 
 

Figure 6. La balance courante observée et d'équilibre des pays du Sud-Est asiatique


 

Indonesie Malaisie
10 30
8 25
6 20
4 15
2 10
0 5
-2 0
-4 -5
-6 -10
-8 -15
-10 -20
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée Balance courante observée


Balance courante d'équilibre Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée Balance courante ajustée
    

Thailande Phillippines
25 10

20 8

15 6
4
10
2
5
0
0
-2
-5 -4
-10 -6
-15 -8
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée Balance courante observée


Balance courante d'équilibre Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée Balance courante ajustée
    
Source:estimations de l’auteur, le Fonds monétaire international (World Economic Outlook, Avril 2012) pour le
compte courant observé en % du PIB.

3.2.4. Les autres pays d’Amérique Latine 
 

Les déséquilibres courants des pays d’Amérique Latine sont très importants par
rapport à ceux observés dans les pays d’Asie. Contrairement à l'expérience de l'Asie, les
tendances du compte courant sont plus homogènes avec des déficits très importants. Les
déficits courants Mexicain et colombien ont perduré dès les années 1990 et aux années 2000,
nettement en dessous des niveaux des balances courantes d’équilibre. Ces valeurs d'équilibre
ont fortement augmenté à partir de -5 % au début des années 1980 jusqu'à 0 % à la fin des
années 2000 en raison de la baisse du ratio de dépendance et de la hausse des prix pétroliers
au cours des années 2000, en particulier dans le cas du Mexique.
168 
 
 

Figure 7. La balance courante observée et d'équilibre des pays d’Amérique Latine

Mexique Colombie
6 6

4 4

2 2

0 0

-2 -2

-4 -4

-6 -6

-8 -8
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée Balance courante observée


Balance courante d'équilibre Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée Balance courante ajustée
    

Argentine Chili
20 10

15
5

10
0
5
-5
0

-10
-5

-10 -15
81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09 11 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée Balance courante observée


Balance courante d'équilibre Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée Balance courante ajustée
    

Uruguay
6

-2

-4

-6

-8
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée


Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée
 
Source: estimations de l’auteur, le Fonds monétaire international (World Economic Outlook, Avril 2012) pour le
compte courant observé en % du PIB.
.

169 
 
 

En Argentine,les années 1980 furent marquées par des évolutions chaotiques avec une
forte inflation, une dépréciation récurrente, des déficits courants et une succession de plans de
stabilisation qui ont échoué et qui ont conduit à l'adoption de la caisse d'émission en 1991. Au
cours des années 1990, les déficits courants augmentent jusqu'à -5% du PIB, ainsi sous la
valeur d'équilibre, jusqu'à la crise de 2002 et la fin de la caisse d'émission. La baisse de la
production et la forte dépréciation induient un énorme excédent courant qui a diminué par la
suite, mais il est resté au-dessus de la valeur d'équilibre proche de 0% du PIB dans les années
2000. Depuis les années 2000, la balance courante d’équilibre de l’Argentine s’est améliorée
grâce à une évolution démographique plus favorable et surtout, grâce à la hausse des
exportations nette de pétrole. Mais, cette évolution favorable a été contrecarrée par une
dégradation des  , qui a stabilisé la balance courante d’équilibre à l’entour de 0% du PIB.

Le début des années 1980 était marquée au Chili, comme dans de nombreux pays
d'Amérique latine, par une succession de plans anti-inflationnistes dans un contexte
d'incertitude après la crise mexicaine de 1982. Des déficits courants énormes (autour de -10%
du PIB) ont caractérisé cette période, mais étaient progressivement réduits au milieu des
années 1980, lorsque le Chili récupére une croissance soutenue et plus durable. Sauf pendant
le désordre provoqué par la crise asiatique et russe en 1997-1998, le compte courant s'est
amélioré et a conduit à des excédents croissants dans les années 2000. La balance courante
d’équilibre du Chili reste déficitaire durant toute la période et se stabilise autour de -2% dans
les années 2000. Cette évolution s’explique par l’amélioration de la position extérieure nette
et du ratio de dépendance.

Le compte courant de l'Uruguay présente une certaine similitude avec le cas du Chili,
bien que moins favorable sur le long terme. les déficits énormes au début des années 1980 ont
été suivis par plus de positions équilibrées à la fin de cette décennie et un déficit d'environ -
2% du PIB durant les années 1990 et 2000. L’Uruguay a connu une légère amélioration de sa
balance courante d’équilibre jusqu’à la fin des années 1990 grâce à la contribution positive
des avoirs nets étrangers et à la diminution du déficit de la balance pétrolière. Durant les
années 2000, l’Uruguay a enregistré une balance courante d’équilibre décroissante (jusqu'à -
2% du PIB) pour des raisons divers: dégradation des avoirs nets étrangers, détérioration des
exportations nettes du pétrole et augmentation du ratio de dépendance.

170 
 
 

3.2.5. Les pays méditerranéens 
 
Les figures ci-dessous présentent les valeurs des balances courantes d'équilibre pour
les pays méditerranéens étudiés: Tunisie, Turquie, Egypte et Maroc. Les déséquilibres
courants des pays Sud Méditerranéens sont comparables à ceux d’Amérique latine et sont très
importants par rapport à ceux observés dans les pays asiatique. Les comptes courants des pays
Sud Méditerranéens présentent une certaine similitude à l’exception de la Turquie dans les
années 1980 et 1990. Des déficits énormes dans les années 1980 (autour de -12% du PIB en
Tunisie, -9% du PIB en Egypte et -10% du PIB en Maroc) ont été suivis par une amélioration
à la fin de cette décennie en Tunisie et au Maroc et au début des années 1990 en Egypte.À
partir de la deuxième moitié des années 2000, le solde courant des pays méditerranéens est
resté sensiblement plus bas que son niveau d'équilibre.

La crise économique qui a ébranlé la Tunisie au début des années 1980 et la baisse des
recettes pétrolières expliquent l’énorme déficit sur la même periode.Le processus de réformes
économiques et de libéralisation de l’économie Tunisienne depuis 1986, après trois décennies
de dirigisme et de participations de l’État à l’économie, explique le redressement de la
balance courante à la fin des années 1980. Par ailleurs, la dette extérieure et la balance des
paiements sont sévèrement contrôlées, l’investissement public réduit et la consommation
soumise à des mesures restrictives par un gel des salaires et des restrictions supplémentaires à
l’importation. Pourtant, la plupart des objectifs du plan n’aboutissent pas :en 1993, la
croissance du PIB reste sous les 3 %, le déficit du compte courant s’élève à 7,9 % du PIB et la
dette extérieure s’élève à 56 % du PIB. La succession des réformes et des accords signés avec
les institutions internationales et les grandes puissances économiques (UE, USA) expliquent
la stabilisation de la balance courante de la Tunisie durant la deuxième moitié des années
1990 et au début les années 2000.

171 
 
 

Figure 8. La balance courante observée et d'équilibre des pays méditerranéens

Tunisie Turquie
2 4

0 2

-2 0

-4 -2

-6 -4

-8 -6

-10 -8

-12 -10

-14 -12
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée Balance courante observée


Balance courante d'équilibre Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée Balance courante ajustée

Egypte Maroc
10 6
8 4
6 2
4
0
2
-2
0
-4
-2
-6
-4
-6 -8
-8 -10
-10 -12
80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10

Balance courante observée Balance courante observée


Balance courante d'équilibre Balance courante d'équilibre
Balance courante ajustée Balance courante ajustée

Source: estimations de l’auteur, le Fonds monétaire international (World Economic Outlook, Avril 2012) pour le
compte courant observé en % du PIB.

Avec, à partir du janvier 2008, l’ouverture à la concurrence mondiale par l’entrée en


vigueur de l’accord de libre-échange conclu avec l’Union européenne en 1995, l’économie
tunisienne fait face à des défis de mise à niveau de pans entiers de son économie tout en
bénéficiant d’une croissance économique annuelle soutenue de l’ordre de 5 % par an. En dépit
de cette croissance, la balance courante s’est dégradée durant la deuxième moitié des années
2000 sous l’effet de la crise économique de 2007. Depuis la révolution du 17 Decembre 2010
et malgé les changements politiques radicaux, l'économie tunisienne va de mal en pis. Les
manifestations répétées, malgré les avertissements incessants de la Banque Centrale, ont
lourdement handicapé la croissance. L'instabilité du pays a, d'ailleurs, alimenté les rumeurs

172 
 
 

sur une possible délocalisation de plusieurs sociétés étrangères82 qui contribuent à employer
des milliers de personnes, notamment des jeunes. La chute des exportations et la fermetures
des entreprises étrangères ont contribué à la forte dégradation de la balance courante pour
atteindre -7.4 % en 2011.

La balance courante d'équilibre de la Tunisie a connu une baisse durant les années
1980 sous l'effet d’une dégradation des avoirs nets étrangers, de la détérioration des
exportations nettes du pétrole et de l’augmentation du ratio de dépendance. À partir de la
deuxième moitié des années 1990, une évolution opposée dans le ratio de dépendance, et une
légère amélioration des avoirs nets étrangers ont entrainé un redressement de la balance
courante d'équilibre. Durant la deuxième moitié des années 2000, la dégradation des avoirs
nets extérieurs et la détérioration de la balance pétrolière expliquent la baisse de la balance
courante d’équilibre en fin de période en dépit d’une amélioration du ratio de dépendance.

Avec la crise à la fin des années 1970, sur le plan extérieur, il devient de plus en plus
difficile pour la Turquie d’emprunter sur le marché mondial et les alliés occidentaux de la
Turquie tardent à accorder une assistance financière car ils exigent l’adoption des mesures
d’austérité préconisées par le FMI. Ce contexte économique explique les déficits de la balance
courante durant les années 1980.

L’ouverture de l’économie turque, entamée dès les années 1980, et accélérée par
l’union douanière (1996) avec l’Union européenne (UE), a été poursuivie. Les capacités
d’exportation se sont développées avec de nouveaux produits et de nouveaux marchés,
notamment au Moyen-Orient. La faiblesse des capitaux internes a été compensée par un
afflux d’investissements, en provenance d’Europe à 80 %. Il en a résulté une amélioration de
la balance courante durant les années 1990.

La croissance retrouvée, après la crise majeure qu’a connue le pays en 2001, ne s’est
pas démentie en dépit de la crise financière internationale de 2008. La Turquie reste
cependant confrontée à de grandes inégalités, concernant en premier lieu le marché du travail,

                                                            
82
Selon la présidente de l’Union Tunisienne de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat (l'UTICA), c'est 120
entreprises étrangères qui ont définitivement quitté la Tunisie jusqu’en 2011, pour d'autres cieux, laissant des
milliers de nouveaux chômeurs. La présidente de l'UTICA avait déjà lancé un avertissement concernant la
«paralysie» qui menacerait de nombreuses entreprises économiques tunisiennes, en raison des grèves,
manifestations et des revendications sociales dans les différentes régions du pays. 

173 
 
 

le tout dans un contexte de faible redistribution. Le chômage est un problème structurel en


Turquie, auquel il convient d’associer un poids important des emplois informels. La
croissance économique turque post-crise de 2001 a été particulièrement pauvre en création
d’emplois, elle s’est surtout traduite par d’importants gains de productivité (Blanc et al.,
2007). Ce contexte économique s’est traduit par une dégradation de la balance courante
durant les années 2000.

L’économie turque est entrée en récession à partir du printemps 2008, avec la chute
des investissements privés, puis de la consommation. La récession s’est approfondie à partir
de l’automne avec la crise internationale. Dans ce contexte de perte de confiance, les
turbulences financières ont joué leur rôle, mais l’appréciation systématique de la livre turque
après le choc de mai 2006, du fait de la hausse des taux d’intérêt expliquent la poursuite du
déficit de la balance courante pour atteindre -9.9% en 2011.

Depuis les années 1980 la Turquie a connu des deficits courants, mais lègèrement au-
dessus de sa valeur d'équilibre. La balance courante d'équilibre a connu des évolutions
contrastées. La Turquie a enregistré une balance courante d'équilibre constamment négative
mais qui s’améliore jusqu’au début des années 2000 grâce à sa position extérieure nette et à la
légère diminution du ratio de dépendance. Pendant les années 2000, la Turquie a connu une
dégradation de sa balance courante d’équilibre sous l’effet d’une dégradation de la balance
pétrolière et d’une légère augmentation du ratio de dépendance qui réduit l’épargne nationale
malgré une forte amélioration des avoirs nets extérieurs.

Au début des années 1980, les flux financiers extérieurs83, alimentés par les remises
des travailleurs émigrés dans les Etats pétroliers, le tourisme, l'aide économique étrangère et
les recettes du pétrole constituent près de 45 % des ressources disponibles de l'économie
égyptienne. Ces flux, qui représentent la principale source de devises pour l'économie
égyptienne, ont atteint leur apogée en 1980-1981 et ont depuis entamé une nette décrue qui
fait qu'on a commencé à parler depuis cette date de «stagnation», voire de «régression» de
l'économie égyptienne (Hussein et Roussillon, 1990).

                                                            
83
Ces flux dépendent étroitement de la situation économique et financière et de la conjoncture politique dans les
Etats arabes pétroliers, ainsi que de l'évolution des relations de l'Egypte avec les Etats occidentaux, qui sont à
l'origine de l'assistance économique et d'où proviennent les touristes qui visitent l'Egypte.

174 
 
 

Ces flux financiers extérieurs injectés se traduisent, d'une part, par une augmentation
considérable du montant des investissements et, d'autre part, par une augmentation également
considérable du volume de la consommation. En fait, une part importante de cette «
prospérité» importée est réexportée sous la forme d'une augmentation sans précédent de la
demande de marchandises importées, qu'il s'agisse de biens de consommation ou de biens
d'équipement intermédiaires 84 (Hussein et Roussillon, 1990), ce qui s’est traduit durant les
années 1980 par des déficits de la balance courante qui atteignent leur maximum en 1984,
avec un déficit de 8.7 % du PIB.

Malgré les reformes importantes entamées au début des années 1990 (Programme
d'Ajustement Structurel - PAS - en coopération avec le FMI et la BM) et malgré les quelques
résultats positifs obtenus avec une amélioration de la balance courante début des années 1990,
la situation économique de l’Egypte demeurent fragile. Il n’y a pas eu en Egypte de réformes
économiques de deuxième génération après les PAS des années 1990. Les réformes du cadre
légal sont par ailleurs restées très en retrait de la politique d’ouverture (Noll, 2002).

La croissance économique ne se traduit, ni par une progression des secteurs


technologiques, ni par la diversification des exportations, ni par un positionnement offensif
dans les secteurs dynamiques de l'économie mondiale. L’Egypte est depuis 2000 dans une
phase de décélération avec une croissance bien en deçà des performances passées et à peine
suffisante pour assurer une progression du PIB par habitant. Durant les années 2000, la
balance courante est restée instable en dépit d’une amélioration en début de période. En effet,
la balance courante se redresse, enregistrant depuis 2001/02 des excédents au fur et à mesure
de l’accroissement des exportations de services, tels que le tourisme, et des revenus du Canal
de Suez (Moisseron et Youssef, 2004).

Depuis 2004, l’Egypte progresse à grands pas dans la mise en œuvre de son
programme de réformes, ce qui lui a permis d’enregistrer des taux de croissance
impressionnants de son PIB. Cependant, les chocs externes défavorables tendent à freiner
cette croissance. Tout laisse donc croire que le pays demeure engagé dans la voie des

                                                            
84
Qu'il nous suffise de mentionner ici le fait que la « tendance moyenne à l'importation » (c'est-à-dire le rapport
du volume des importations de marchandises et de services au PIB) est passée de 19 % en 1971-1972 à 47 % en
1980. 

175 
 
 

réformes. La décision prise en janvier 2003 de laisser flotter la livre égyptienne, et d’engager
des réformes dans les domaines tarifaire, fiscal et financier, témoigne de cette orientation.

Les exportations de biens en pourcentage du PIB ont crû, passant de 8,2 % en 2001 à
17,2 % du PIB en 2005/06. Cette hausse est une conséquence de la dépréciation du taux de
change et un indicateur de la reprise progressive de l’économie mondiale. Par ailleurs, les
importations de biens ont également augmenté (en valeur) de 16,6 % du PIB en 2001/02 à
28,3 % en 2005/06, par suite de l’augmentation des prix des importations. La balance
courante s’est dégradée et devient déficitaire du fait de la hausse des paiements effectués au
titre des importations85.

La révolution de 25 Janvier 2011 a également fait naître de nouveaux défis. La


croissance économique, qui redémarrait après la crise financière mondiale de 2008, a chuté,
passant de 5.1 % sur l’exercice 2009/10 à 1.8 %, selon les estimations, en 2010/11, et devrait
ressortir à 1.7 % pour l’exercice clos en juin 2012. Les troubles ont également touché de plein
fouet le tourisme et les investissements directs étrangers (IDE), deux grandes sources de
réserves de change (Perspectives économiques en Afrique, 2012). La banque centrale n’a
presque plus assez de devises pour maintenir le taux de change de la livre égyptienne. La
balance courante est restée déficitaire et s’est stabilisée autour de -2 % depuis 2009.

La balance courante d'équilibre de l'Egypte a progressé de -4.3 % au début des années


1980 à 3.5 % du PIB au milieu des années 2000. Cela peut être expliqué par la contribution
positive d'une forte amélioration de ses avoirs nets étrangers, en dépit d’une dégradation du
solde de la balance pétrolière qui a été compensée par une moindre dépendance vis-à-vis des
jeunes et des vieux.

Au début des années 1980 les principaux indicateurs économiques du Maroc ont
témoigné d’une grave détérioration de la situation économique du pays86. Le déficit courant
de la balance des paiements a atteint un niveau record en 1985 en se situant à 9,6 % du PIB.
L’économie marocaine a subi le contre-coût de nombreux facteurs: deuxième choc pétrolier,
baisse des prix du phosphate, hausse du dollar et des taux d’intérêt, sans oublier la sécheresse
sévère qui a marqué l’année 1981 (Royaume du Maroc Haut, Commissariat au Plan ; 2005)
                                                            
85
(Égypte : document de stratégie pays 2007-2011)
86
La dette extérieure a progressé de plus de six fois entre 1975 et 1982 pour atteindre plus de 83% du PIB.

176 
 
 

Depuis 1983, et pour faire face à cette situation le gouvernement a mis en place un
programme d’ajustement structurel (PAS). C’est ainsi qu’un ensemble de mesures de
stabilisation et d’ajustement ont été élaborées par le gouvernement et appuyées par une série
d’accords de confirmation avec le FMI et de prêts d’ajustement sectoriel de la Banque
Mondiale. Ces mesures visaient la réduction de la demande intérieure, l’ouverture et la
libéralisation économique. Dans ce cadre, diverses réformes structurelles ont été lancées
depuis 1983. Elles ont touché l’ensemble des aspects de l’économie, notamment le commerce
extérieur, les dépenses budgétaires, la fiscalité, les investissements étrangers, la privatisation,
etc.87 Ces réformes ont abouti à une amélioration de solde courant durant les années 1990 et la
première moitié des années 2000.

Cependant, l’évolution de la balance courante a connu des périodes d’alternance avec


des hauts et des bas durant les années 1990 due, en partie, aux politiques restrictives adoptées
dans le cadre du programme d’ajustement structurel et aux résultats médiocres des compagnes
agricoles en 1992 et en 1993 et légère diminution du taux d’investissement. Ceci a conduit à
un recul de la contribution à la croissance économique.

La période du PAS a vu la mise en œuvre d’un ensemble de réformes structurelles


visant la stabilisation et la relance de l’économie. Cependant, les résultats en termes de
croissance ont été en deçà des attentes. Ceci a amené les autorités publiques à entamer une
deuxième génération de réformes88, au cours de la période 1994-2004, en coopération avec les
institutions internationales dans le but de renforcer le tissu productif. Malgré, les taux de
croissance encore faibles réalisés durant cette période, la balance courante a continué à
s’améliorer grâce, en grande partie, au secteur du commerce qui a réalisé une évolution
positive de 4,7% en moyenne annuelle et au secteur du tourisme qui a connu une
amélioration significative.

                                                            
87
Au cours de la période 1983-1993, la valeur ajoutée agricole a augmenté en moyenne annuelle de 3,3%.
Cependant, le secteur agricole a continué à alterner des hauts et des bas, avec les années 1987 et 1992 comme les
plus mauvaises années agricoles et 1986 et 1988 comme les meilleures. Ainsi, la dépendance de la croissance
économique globale de l’économie marocaine des performances vis-à-vis du secteur agricole est devenue
structurelle. 
88
Les grands axes de ces réformes sont :- La libéralisation du commerce extérieur, en particulier par la signature
d’accords de libre-échange avec l'Union Européenne et les Etats-Unis d'Amérique ;- La réforme de la douane, du
secteur financier ainsi que l’accélération du processus de privatisation ;- L’adoption du code du travail ;-
L’assainissement et l’amélioration de l’environnement des affaires. 

177 
 
 

En 2008, la hausse des prix a repris et le secteur du tourisme - fortement dépendant de


la conjoncture internationale - a connu une évolution en dents de scie. Ce n’est qu’en 2009
que le Maroc a commencé à vraiment ressentir les conséquences de la crise économique
internationale sur son économie réelle. Exportations, investissements directs étrangers,
tourisme, industrie ou encore transferts des marocains résidants à l’étranger … ont été touchés
progressivement par les effets du marasme économique international. Le déficit courant se
creuse pour atteindre les -7.6 % du PIB en 2011.

La balance courante d'équilibre du Maroc décroît pendant la première moitié des


années 1980, sous l'effet d'une forte dégradation des avoirs nets étrangers. Durant les années
1990, la balance courante d’équilibre s'améliore pour atteindre les 2 % en 2006. Plusieurs
facteurs ont contribué à cette tendance: une amélioration des avoirs nets étrangers, une
amélioration du solde de la balance pétrolière, et une diminution du ratio de dépendance.
Durant la deuxième moitié des années 2000, le Maroc a enregistré une balance courante
d’équilibre décroissante (jusqu'à 0.4% du PIB) pour des raisons diverses: dégradation des
avoirs nets étrangers, détérioration des exportations nettes du pétrole et légère augmentation
du ratio de dépendance.

4. L'estimation de l'équilibre interne 
 

L'équilibre interne est défini comme le plein emploi des ressources d'un pays sans
provoquer de pressions inflationnistes. Son calcul repose sur le niveau de la production
potentielle qui est conçu comme un indicateur d'offre. Cependant, l'écart de production
représente l'excès (ou l'insuffisance) de la demande. Il permet de juger de la situation dans le
cycle économique. Cette approche de l'équilibre interne semble être moins adaptée pour les
pays émergents comme la Chine ou le Brésil, où les concepts de production potentielle et de
plein emploi soulèvent de nombreux problèmes, notamment en raison de l'ampleur des
déséquilibres régionaux et de la situation du sous-emploi dissimulé dans les zones rurales
(Bouveret et al., 2006). Cette estimation de l’output gap est tout simplement considéré comme
représentative du degré de déviation de la demande interne di .

L'utilisation du concept de production potentielle s'est développée dans un grand


nombre de travaux macroéconomiques appliqués. Cet indicateur a la double ambition

178 
 
 

d'évaluer la position de l'économie dans le cycle et les perspectives de croissance à moyen


terme. Il offre ainsi de précieux signaux pour la conduite ou l'analyse de la politique
économique.

Diverses méthodes peuvent être utilisées pour calculer la production potentielle et


l'écart de production correspondant. Pour les Etats -unis, le Japon, Royaume-Unis et la Zone
Euro, les valeurs sont estimées à l'aide de la fonction de production par l'OCDE 89 . Cette
approche consiste à estimer la production potentielle en utilisant une fonction de production et
des estimations des facteurs de production disponibles dans l'économie. Pour les pays
emergents, ce genre d'estimations n'est pas disponible. Donc, nous calculons l'écart de
production en utilisant le filtre de Hodrick-Prescott sur le PIB réel au cours de la période
1970-201590. Une étude en profondeur sur cette question a révélé que les écarts de production
des pays de l'Asie estimés par plusieurs méthodes sont similaires pour la période 1975-2000
(Gerlach et Yiu, 2004). En outre, nos tests de sensibilité montrent que les erreurs dans
l'estimation des écarts de production ne perturbent pas les résultats obtenus. Ainsi, dans le cas
de la Chine, une augmentation de 1% l'écart de production conduit à une augmentation de
moins de 1% de la sous-évaluation.

La méthode de lissage de l'évolution du PIB par un filtre d'HP adapte une tendance à
l'ensemble des observations du PIB, quelles que soient les ruptures structurelles qui ont pu se
produire, en faisant varier dans le temps les coefficients de régressions eux-mêmes. Ce
résultat est obtenu en trouvant une estimation de la production tendancielle qui minimise
simultanément une moyenne pondérée de l'écart entre la production à un moment quelconque
et le taux de variation de la production tendancielle à ce moment. λ est le facteur de
pondération qui contrôle le degré de lissage de la courbe de tendance obtenue. Plus λ est
faible, plus la tendance est proche de la production effective, et plus la valeur de λest élevée,
moins la tendance est sensible aux fluctuations à court terme de la production effective, la
tendance se rapprochant alors, à la limite, de la moyenne du taux de croissance du PIB
observé sur l'ensemble de la période d'estimation.

                                                            
89
Perspectives économiques de l'OCDE, mai 2010.
90
Le filtre Hodrick-Prescott présente certains inconvénients. Il ne définit pas bien output gap au début et à la fin
des échantillons. Il tend à négliger les ruptures structurelles et les changements de régime. Pour les
ralentissements prolongés il s'écarte trop par rapport à la fonction de production. Nous utilisons le filtre de
Hodrick-Prescott avec un paramètre de lissage plus faible que celle des pays industrialisés à prendre en compte
que le cycle économique est plus court dans les pays émergents.

179 
 
 

Dans la mesure où le choix de λ demeure une décision essentielle, il existe trois
critères possibles. Le premier consisterait à adopter l'approche d'Hodrick et Prescott et à
choisir un ratio constant entre les variances de la production tendancielle et de la production
effective. Appliquée à plusieurs pays, cette approche produirait une valeur de λ différente
pour chacun d'eux et impliquerait que les pays dont la production effective enregistre les
fluctuations les plus importantes connaitraient aussi la tendance la plus instable. La seconde
approche consisterait à imposer un degré uniforme de lissage et la même variance de la
production tendancielle pour tous les pays.

Ces deux critères soulèvent une difficulté analogue: ils ignorent la possibilité que
certains pays réagissent de manière plus flexible que d'autres aux chocs économiques, ce qui
affecterait l'étroitesse de la relation entre la production tendancielle et la production effective.
Une troisième approche consiste à choisir une valeur de λ¸ qui génère une configuration de
cycles correspondant à peu prés aux images des cycles passés dans chaque pays. Un tel critère
relève du jugement et est capable d'incorporer certaines informations sur le passé mais il est
aussi moins transparent que les autres.

Pour de nombreuses applications réalisées dans la littérature (Ravn et Uhlig, 2002),


(Molinari et Martincus, 2004), λ est fixé à la valeur particulière choisie à l'origine par Hodrick
et Prescott λ  1600  pour des séries trimestrielles (100 pour des séries annuelles), ce qui
correspond à un cycle d'une durée moyenne de 6 ans. Pour notre part, nous avons donné
plusieurs valeurs à λ , les résultats se rapprochent ce qui est dû principalement aux différents
chocs qu'ont connus ces pays. Nous allons finalement retenir λ = 25 pour les pays émergents.

5. Taux de change d'équilibre et désajustements 
 

Les résultats seront présentés en cinq étapes: premièrement, le Japon et la Corée pour
les grands pays asiatique, deuxièmementles B(R)CI comme les principaux pays émergents,
troisièmement les pays d'Asie de l’Est, quatrièmentles pays d'Amérique Latine et en derniers
ceux du Méditerrané.

Pour les principaux partenaires économiques (les Etats-Unis, la Zone Euro, le


Royaume-Uni, le Japon, la Chine et le Reste du Monde) et à partir de l’équilibre interne et

180 
 
 

externe, le modèle multinational est utilisé pour produire des désajustements du taux de
change effectif réel           /      /  et du taux de change nominal
par rapport au dollar         /     / . Cela permet de déterminer les
situations de sous-évaluations  0     0 ou de surévaluations    0      0  pour
le dollar, l'euro, le yen, le yuan, la livre sterling et la monnaie du reste du monde.

Pour les pays émergents, la Corée, l'Inde, le Brésil, les autres pays d'Asie, d'Amérique
Latine et du Méditerrané, un modèle national simple est utilisé pour chaque pays et articulé
aux résultats du modèle multinational pour obtenir des désajustements du taux de change en
termes effectif réel (en utilisant les prix relatifs à la consommation) et les taux de change
nominaux par rapport au dollar. Pour tous les pays émergents examinés, les graphiques ci-
dessous montrent l'évolution du taux de change observé et d'équilibre sur la période 1982-
2011, en termes effectifs réels et nominal bilatéral vis-à-vis du dollar. Pour tous les pays, y
compris le Japon, les tableaux 16, 17, 18, 19 et 20 donnent les périodes de sous (sur)
évaluations en termes effectifs réels  et nominal bilatéral  sur la même période.

5.1. Les estimations du FEER pour le Japon et la Corée


 

Après une longue période de sous-évaluation en termes réel et nominal au cours des
années 1980, le yen devient légèrement surévalué en termes effectif réel, après le milieu des
années 1990 en raison de la forte réévaluation du yen face au dollar et à l'érosion progressive
du modèle de production japonais qui a permis une réévaluation de la valeur d'équilibre du
yen. Durant les années 2000, le yen devient largement sous-évalué par rapport au dollar, mais
aussi en termes effectif réel, grâce à la forte dépréciation du yen et à la stabilité de la parité
yen-dollar. Cela a contribué à la reprise de l'économie japonaise avec d'importants excédents
courants au cours de cette période. Cette sous-évaluation s’est réduite et disparait après
l'éclatement de la crise qui a induit une réévaluation brutale du yen.

En Corée, une période de sous-évaluation du won au cours des années 1980, liée à la
stratégie de croissance tirée par les exportations, a été suivie par une surévaluation assez
marquée, à la fois en termes nominal et réel. En opposition avec le cas japonais, cela s'est
produit après une dépréciation réelle au cours de la première moitié des années 1980 et,
ensuite, une stabilité de la parité dollar-won. Cette surévaluation du won a été considérée
comme l'un des facteurs explicatifs de la crise coréenne en 1997.
181 
 
 

Tableau 16. La sous-évaluation  0     0  et la surévaluation  0     0  pour le


Japon et la Corée (en %)

e_jpn e_cor r_jpn r_cor


82 -3.0 24.3 4.9 11.4
83 1.2 32.8 5.2 11.9
84 10.3 27.5 5.5 8.4
85 18.9 7.1 14.1 0.6
86 21.0 24.8 11.0 10.4
87 17.3 25.0 6.9 13.5
88 -2.0 12.2 1.9 11.2
89 -2.7 -11.5 4.1 -4.4
90 0.2 -15.2 4.3 -9.0
91 -4.9 -27.1 6.1 -11.8
92 -5.6 -24.3 6.5 -8.3
93 -8.8 -23.4 1.8 -6.0
94 -2.5 -7.2 -0.8 -8.6
95 -10.6 -18.2 -3.4 -7.0
96 -14.7 -23.7 -4.7 -13.1
97 -10.2 -13.6 -2.7 -4.4
98 -10.7 13.2 -2.8 14.8
99 -14.3 1.7 -8.9 2.8
00 -2.1 0.5 -5.0 -3.3
01 2.3 -0.5 -1.4 -2.9
02 9.7 5.5 2.4 -1.6
03 15.9 10.0 4.0 0.2
04 22.8 4.0 7.1 4.8
05 32.7 -1.8 9.1 -0.3
06 36.2 -3.9 10.4 -1.9
07 21.6 -6.4 9.8 1.1
08 15.6 -3.4 2.8 2.4
09 11.1 13.1 -5.4 6.0
10 23.4 9.2 3.6 1.5
11 19.3 12.3 -2.2 2.4
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur, Jéong et al. 2010 pour le Japon , les données 2010 et 2011 ont été actualisée par les auteurs.

182 
 
 

La forte dévaluation de 1998 a conduit à une sous-évaluation importante et à des


excédents courants. Cependant cette sous-évaluation n’a pas duré. Le won s'est apprécié, tant
par rapport au dollar qu’en termes effectif réel, en particulier contre les autres monnaies de
l’Est-asiatique. Le compte courant est resté en léger excédent, mais généralement en dessous
de sa valeur d'équilibre pendant la majeure partie des années 2000, avec un won surévalué en
termes réel. La sous-évaluation par rapport au dollar a été moins prononcée que dans les cas
du Japon. Après l'éclatement de la crise en 2008, l'évolution a été en opposition avec le cas
japonais, avec une forte dépréciation, à la fois vis-à-vis du dollar et en termes réel, ce qui a
permis la préservation d’une sous-évaluation nominale et réelle jusqu’à 2011 (tableau 17 et
figure 9).

Figure 9. Taux effectif réel et bilatéral observé et d’équilibre du yen et du won (2000 = 100)
 

Japon Japon
180 300
160
250
140
120 200
100
150
80
60 100
40
50
20
0 0
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10

Actual real effective exchange rate Actual bilateral exchange rate against the dollar
Equlibrium real effective exchange rate Equilibrium bilateral exchange rate against the dollar

Corée Corée
140 140

120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Source:calculs de l’auteur, Chelem pour les taux de change bilatéraux, 2012), Jéong et al. (2010) pour les
données du Japon.

183 
 
 

Enfin, la question des écarts entre les cibles du compte courant ex-ante et ex-post
peuvent être examinés. Dans une méthodologie précédente (Jeong et Mazier, 2003), les cibles
du compte courant ex-ante et ex-post sont égales pour tous les pays ou les régions du monde,
à l’exception du reste du monde puisqu'il était traité comme un résidu. Dans ce travail, nous
avons traité de façon symétrique tous les pays du modèle du commerce (Reste du Monde
inclus) comme dans Cline (2008). Tous les pays ou les régions sont traités successivement
comme un résidu. Dans cette nouvelle méthodologie, les cibles ex-ante et ex-post du compte
courant sont légèrement différentes. Néanmoins, l'écart moyen reste inférieur à 0,3% du PIB
(en valeur absolue) pour la période 2004-2009.

5.2. Les estimations du FEER pour le Brésil, l'Inde et la Chine


 

En Chine, le début des années 1980 est difficile à interpréter en raison du mode de
régulation du commerce extérieur qui a prévalu à cette époque. Cependant, le yuan apparait
surévalué dans le milieu des années 1980 avec un déficit du compte courant massif.
L'introduction d'un taux de change déterminé dans les marchés de «swap»91 conduit à une
dévaluation de facto qui a permis de renverser cette situation et le yuan a même été fortement
sous-évalué en 1991 avec un excédent courant important dans un contexte de ralentissement
économique.

Les dévaluations continues et l'utilisation croissante du taux de change des marchés de


«swap» ont permis au taux de change actuel de maintenir une dépréciation du taux de change
d'équilibre et de préserver une sous-évaluation pendant la majeure partie du temps dans un
contexte de dégradation du compte courant et d'une inflation élevée. En 1994, l'année de
l'unification du système de taux de change 92 , le yuan a même été sous-évalué en terme
nominal et réel. La seconde moitié des années 1990, en particulier depuis 1997, a marqué un
tournant. Le boom économique et le retour de l'excédent courant a illustré le succès de la
politique d'ouverture commerciale de ces dernières années. C'est ce qui explique la
réévaluation du taux de change d'équilibre du yuan au cours de la seconde moitié des années
1990, tant en termes nominal qu’en terme réel, en net contraste avec la période précédente. La
                                                            
91
Un marché du "SWAP de rétentions de devises" (rien à voir avec le marché de SWAP actuel) avec un taux
interne différent du taux de change officiel.
92
1994 : la grande réforme unifie les taux de change multiples, abolie le système de rétention de devises, met en
place un nouveau régime de change flottant contrôlé avec une étroite bande associé à un nouveau système
commercial (China Foreign Exchange Trade System). La bande de variation se réduit très fortement après la
crise asiatique et le yuan est en réalité strictement ancré sur le dollar.

184 
 
 

stabilisation du yuan contre le dollar et même l'appréciation du taux de change effectif réel du
yuan signifie en fait une sous-évaluation persistante plus grande qu'auparavant en termes
nominal et réel. Ce diagnostic pourrait aider à trouver une explication de la résistance du yuan
face à la crise asiatique de 1997-1998 au cours de laquelle le yuan a déjà été sous-évalué.
Cependant, cette sous-évaluation a été réduite temporairement après la crise asiatique et les
dévaluations importantes de la plupart des concurrents de l'Asie de l’Est. Après 2002, la sous-
évaluation du yuan a été amplifiée par rapport au dollar, jusqu'à 47% en 2006. Elle a été
réduite depuis lors, mais elle est restée élevée en 2009 (environ 22%). Bien que plus modérée
au début des années 2000, la sous-évaluation en terme effectif réel a augmenté dans la
seconde moitié des années 2000 (figure 10).

L’évolution du taux de change de la roupie indienne présente certaines analogies avec


celle du yuan (forte dévaluation jusqu’en 1994 en termes effectif réel et jusqu’à 2002 en terme
bilatéral par rapport au dollar) puis stabilisation nominale et tendance à l’appréciation en
terme réel. Mais, la politique de change indienne s’avère très différente. Durant la phase de
dépréciation les périodes de surévaluation et de sous-évaluation ont alterné comme en Chine
mais avec une tendance à la surévaluation plus durable et plus marquée. Après la stabilisation
du taux de change réel (1994), puis du taux de change nominal (2002), la surévaluation
nominale et réelle a été la règle à l’exception des années 2001-2003. L’opposition entre la
Chine et l’Inde en matière de change est particulièrement frappante depuis 2004, ce qui ne
manque pas d’avoir un fort impact sur les modèles de la croissance des deux pays.

Le Brésil a été confronté à des questions très différentes. Il a commencé la période


avec une sous-évaluation très importante durant les années 1980. Après le processus de
contagion de la crise mexicaine de 1982, une succession d'ajustements du taux de change ont
eu lieu dans le cadre des programmes orthodoxes négociés avec le FMI ou les programmes
hétérodoxes adoptée en dépit de l'hostilité des institutions de Washington. La combinaison du
système de parités mobiles ou glissantes (grawling peg) et, si nécessaire, des maxi-
dévaluations, le Brésil a maintenu une sous-évaluation importante, contribuant à un compte
courant proche de 0% du PIB, bien au-dessus de la valeur d'équilibre, tandis que l'inflation
s’est accélérée.

185 
 
 

Tableau 17. La sous-évaluation      et la surévaluation     pour la


Chine, l’Indeet le Brésil (en %)
 

e_chn e_ind e_bra r_chn r_ind r_bra


82 29,9 18,1 59,5 33,7 6,5 45,2
83 25,6 29,4 25,7 25,4 8,4 4,4
84 12,9 29,0 68,3 5,7 8,8 46,2
85 -42,6 1,3 69,5 -48,7 -5,9 60,9
86 -1,1 6,8 47,1 -15,2 -6,1 33,7
87 27,2 1,0 47,3 13,0 -6,3 38,6
88 -12,3 -16,6 35,7 -8,2 -12,1 36,8
89 -26,0 -18,7 14,0 -18,6 -11,4 18,8
90 25,2 -17,3 -5,5 27,3 -10,7 -0,3
91 15,0 -10,8 -2,7 24,9 6,3 12,4
92 -5,3 -6,1 4,2 7,4 12,6 20,8
93 -33,7 2,1 -10,6 -21,0 17,9 5,1
94 17,3 18,6 -0,1 18,6 13,7 -3,0
95 -7,4 -5,8 -35,0 0,8 3,7 -23,7
96 -9,9 -1,9 -38,9 0,7 3,1 -31,5
97 7,1 -0,1 -54,2 14,5 7,9 -42,2
98 7,4 -12,3 -61,8 16,0 -2,9 -48,8
99 1,8 3,5 -29,5 8,5 4,4 -25,5
00 8,8 4,4 -26,0 6,1 -2,4 -28,6
01 5,2 12,5 -21,7 1,0 6,3 -23,6
02 16,4 20,7 7,5 7,1 10,3 -0,9
03 23,0 19,7 14,3 8,4 7,9 4,0
04 24,7 -4,8 3,5 7,0 -1,0 5,8
05 38,6 -11,3 -1,4 12,3 -8,1 0,1
06 45,2 -6,2 -1,6 16,5 -4,0 -0,3
07 31,7 -10,0 -10,2 18,9 -1,0 -2,4
08 29,5 -17,5 -15,7 15,7 -7,4 -7,6
09 25,4 -1,7 -2,9 7,6 -4,0 -5,1
10 29,2 -3,8 -9,1 7,2 -8,3 -13,4
11 23,0 3,1 0,8 -1,1 -4,2 -6,0
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur, Jéong et al. 2010 pour la Chine , les données 2010 et 2011 ont été actualisée par les auteurs.

186 
 
 

.
Le Plan Collor93 monétariste en Mars 1990met fin à cette dynamique, mais, six mois
après l'inflation a repris, menant à de nouveaux programmes de stabilisation, y compris les
ajustements transitoires du taux de change. Par conséquent, jusqu'à l'adoption du Plan Real en
1994, le taux de change réel et nominal a continué à être sous-évalué.

Avec l'adoption du Plan Real, le Brésil s’est concentré sur la stabilisation des prix et
renonce à sa priorité pour la compétitivité, en insistant sur les flux de capitaux pour équilibrer
le déficit courant. En dépit de la réussite du Plan et de quelques ajustements d'une zone cible
indexé sur le dollar, l'inflation inertielle a entraîné une surévaluation croissante en terme réel
et nominal (-61.8% par rapport au dollar en 1998). Durant les années 1997 et 1998, le Brésil
souffre d’un déficit courant excessif dû à la surévaluation de sa monnaie. La hausse du dollar
américain, l’augmentation défavorable des cours du pétrole, la dynamique d’endettement
extérieur préoccupante et l’effet de contagion de la crise asiatique et russe ont fini par
contraindre le Brésil à décrocher le real du dollar américain en 1999. Ceci a engendré une
dépréciation réelle du real jusqu’au début des années 2000.Après une dévaluation de 50% et
certains ajustements autorisés par l'adoption d'un régime de change flottant, le taux de change
réel et nominal s’est retourné progressivement à un niveau proche de l'équilibre au début des
années 2000, tandis que la balance courante est devenue équilibrée.

De 2002 à 2007, le real est resté proche de sa valeur d'équilibre en terme réel et sous-
évalué par rapport au dollar, en dépit d'une tendance à l'appréciation. Les excédents du
compte courant ont été obtenus grâce à la hausse des prix des matières premières, à la
dynamique de la demande mondiale et l'amélioration de la compétitivité (Salama, 2009).
Cette évolution favorable s'est traduite par une appréciation de la valeur d'équilibre du real, en
conformité avec l'appréciation observée.

                                                            
93
Fernando Affonso Collor de Mello, président de la République fédérative du Brésil le 15 mars 1990, lance peu
de temps après son entrée en fonction le Plan Collor pour réduire la hausse des prix. Ce plan visait à limiter
l'offre de monnaie. Ainsi une grande partie de l'argent placée sur les comptes courants fut convertie de force en
bons du Trésor.

187 
 
 

Figure 10. Taux de change effectif réel et bilatéralobservé et l'équilibre du yuan chinois, de la
roupie indienne et du real brésilien (2000 = 100)
 

Chine Chine
180 120
160
100
140
120 80
100
60
80
60 40
40
20
20
0 0
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 10

Actual real effective exchange rate Actual bilateral exchange rate against the dollar
Equlibrium real effective exchange rate Equilibrium bilateral exchange rate against the dollar

Inde Inde
140 140

120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar 10

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Brésil Brésil
180 180
160 160
140 140
120 120
100 100
80 80
60 60
40 40
20 20
0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

90
91
92
93
94
95
96
97
98
99
00
01
02
03
04
05
06
07
08
09
10
11

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Source:calculs de l’auteur, Chelem pour le taux de change bilatéral, 2012. Jéong et al. (2010) pour les
données de la Chine.

188 
 
 

Avec la crise mondiale, l'appréciation réelle et l’ancrage avec le dollar sont devenus
plus difficile à soutenir. La surévaluation réelle et les déficits courants réapparaissent, bien
que limités par comparaison avec ceux observés précédemment. Toutefois, à la fin des années
2000, le Brésil, comme l'Inde, est beaucoup plus contraint par sa politique du taux de change,
en opposition avec la Chine qui utilise la sous-évaluation du yuan, au détriment de ses
concurrents.

5.3. Estimations du FEER pour les monnaies du Sud-Est asiatique


 

La Thaïlande, les Philippines et la Malaisie présentent certaines similitudes en ce qui


concerne la politique de change au cours des années 1980. Les années 1980 ont été marquées
par la fin du boom économique avec un déficit du compte courant et une surévaluation du
taux de change. La parité avec le dollar, dans le milieu des années 1980, a permis une
dépréciation réelle et une amélioration de leurs comptes courants. Ceci a conduit à une sous-
évaluation de leurs monnaies entre 1985 et 1988, en particulier dans les Philippines et dans
une moindre mesure en Malaisie, où le ringgit était proche de sa valeur d'équilibre. Un
renversement a eu lieu à la fin des années 1980 où la reprise économique a été liée à la
réapparition d'importants déficits courants. La parité avec le dollar a conduit à une
surévaluation importante en terme nominal, mais moins en terme effectif réel. La Thaïlande a
été la plus touché alors que le phénomène a moins marqué les Philippines, où la croissance
était plus modeste et le déficit courant plus contraint. Le ringgit malaisien est resté comme
proche de l'équilibre, alors que l'économie Malaisienne a été plus ouverte, ce qui a réduit
l'amplitude des désajustements de change (figure 11).

En 1996, à la veille de la crise asiatique, avec de plus en plus de déficits courants en


Thaïlande, le bath a été surévalué (-6.7 % en terme réel, -18.3 % par rapport au dollar). La
surévaluation était plus limitée dans les Philippines et même moins marquée en Malaisie. Sauf
pour la Thaïlande où la surévaluation est apparue significative (bien que plus modeste par
rapport au début des années 1990).La surévaluation ne semble pas avoir été la principale
cause de la crise dans ces pays d'Asie de l’Est. Les dévaluations importantes suite à la crise
ont contribué à la reconstitution d'importants excédents courants en Thaïlande et en Malaisie,
mais pas durablement dans les Philippines. Le bath et, dans une moindre mesure, le ringgit
sont devenus sous-évalués, mais pas le peso philippin puisque les Philippines étaient
confrontés à des problèmes plus structurels à cette époque.

189 
 
 

Tableau 18. La sous-évaluation  0     0 et la surévaluation  0     0 pour la


Thailande, la Malaise, les Philippines et l’Indonesie (en %)

e_tha e_mal e_phi e_indo r_tha r_mal r_phi r_indo


82 25,5 -19,7 -2,9 -38,0 10,8 -14,0 -8,9 -38,5
83 -3,3 -2,4 28,8 -31,8 -19,4 -10,3 10,7 -39,0
84 9,7 14,0 42,9 19,9 -8,1 -2,4 23,7 2,0
85 3,8 2,1 21,6 -6,7 -2,6 -2,4 13,4 -11,9
86 30,9 14,7 49,1 -16,7 14,5 1,9 32,4 -23,5
87 11,2 19,7 30,6 12,1 2,4 6,8 19,7 3,5
88 -13,3 2,7 13,4 -11,6 -6,4 3,3 12,5 -6,4
89 -23,1 -10,6 -8,2 -21,1 -10,8 -1,1 -2,8 -11,7
90 -38,3 -12,6 -14,3 -26,0 -21,9 -2,6 -8,3 -17,5
91 -41,1 -28,2 -8,9 -33,5 -17,0 -3,6 1,2 -15,5
92 -33,4 -27,0 -18,7 -22,6 -11,3 -3,7 -5,2 -5,3
93 -26,9 -24,7 -27,2 -22,0 -6,3 -2,3 -10,4 -4,4
94 -7,6 -5,0 -10,7 -0,5 -6,5 -1,0 -8,8 -3,3
95 -17,3 -16,6 -14,4 -13,8 -3,9 0,1 -4,6 -2,9
96 -18,3 -6,9 -15,3 -9,0 -6,7 0,8 -6,1 -2,1
97 0,0 -5,8 -11,3 16,2 5,1 1,1 -2,2 18,6
98 19,2 6,5 6,2 73,1 16,6 2,0 6,3 48,5
99 11,0 7,2 -9,6 -0,3 8,3 1,6 -3,8 1,9
00 12,3 9,1 1,4 9,3 3,7 0,6 -1,2 2,9
01 8,4 1,6 0,7 25,2 2,2 -0,2 -1,2 15,4
02 9,4 7,2 5,0 12,0 0,6 -0,4 -0,9 3,1
03 15,9 15,9 11,4 15,4 2,4 0,1 0,8 4,3
04 3,5 5,4 3,6 -3,9 2,8 0,6 3,2 -0,2
05 -8,1 7,3 -0,2 -7,3 -2,4 0,9 0,6 -4,5
06 -1,5 8,0 1,0 -0,5 -0,3 1,2 1,2 0,3
07 2,3 2,3 -1,9 0,4 4,9 1,8 3,4 7,7
08 0,0 9,4 -2,9 4,8 3,1 4,8 2,7 10,2
09 23,9 15,9 22,2 39,8 9,7 4,0 13,6 29,1
10 12,0 8,1 16,2 7,7 1,7 0,3 6,9 -0,5
11 13,3 10,1 11,1 5,3 1,2 0,5 2,4 -4,0
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur.

190 
 
 

Durant les années 2000, en dépit d'un mouvement général d'appréciation, les monnaies
d'Asie de l'Est sont restées sous-évaluées par rapport au dollar, mais moins en termes effectif
réel. Toutefois, par rapport au yuan chinois, elles sont apparues beaucoup moins sous-
évaluées, ce qui induit un biais dans la concurrence internationale entre les pays d’Asie de
l’Est. Depuis le début de la crise en 2007, la sous-évaluation a été conservée et a même
augmenté en terme réel, grâce à la parité avec le dollar.

L’Indonésie, en tant que pays exportateur de pétrole, présente une certaine spécificité.
Le contre-choc pétrolier de 1986 a dégradé son compte courant, conduisant à une
surévaluation de sa monnaie jusqu'au milieu des années 1990. Avec une croissance soutenue
et un compte courant bien contrôlé, la surévaluation est devenue faible et ne semble pas avoir
joué un grand rôle dans la crise de 1997. Cependant la monnaie la plus touchée par la crise
était la roupie indonésienne, ce qui pourrait être expliqué par des raisons plus politiques et
d'autres déséquilibres économiques que par des raisons strictement monétaires. La
dévaluation de la roupie indonésienne était d'amplitude la plus importante parmi les pays
d'Asie de l’Est, en terme réel et nominal. Elle a entraîné une amélioration plutôt limitée du
compte courant et une sous-évaluation de la roupie, qui pourrait être considérée comme
modeste, comparée à l'amplitude du choc. Ce résultat pourrait refléter les effets destructeurs
de la crise sur le système productif indonésien. La situation a été progressivement normalisée
par la suite, le pays ayant profité des prix élevés du pétrole durant les années 2000. La sous-
évaluation de la roupie indonésienne (environ 20 à 30% par rapport au dollar) est synchrone
avec celle des autres pays de l’Est asiatique à la fin des années 2000, mais légèrement moins
prononcée en terme réel. 2010-2011, malgré la préservation d’une faible sous-évaluation par
rapport au dollar, la roupie indonésienne s’est retrouvée avec une légère surévaluation en
termes réel.

191 
 
 

Figure 11. Taux de change effectif réel et bilatéral observé et d'équilibre pour la Thaillande, la
Malaisie, lesPhilippines et l’Indonesie (2000 = 100)
 

Thailande Thailande
120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Malaysie Malaysie
120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Philippines Philippines
140 140

120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

192 
 
 

Indonésie Indonésie
160 140

140 120
120
100
100
80
80
60
60
40
40

20 20

0 0

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Source:calculs de l’auteur, Chelem pour le taux de change bilatéral, 2012.

5.4. Estimations du FEER pour les autres monnaies latino-américaines


 

Contrairement au pays asiatiques, l’ampleur des désajustements de change dans les


pays d’Amérique latine varie davantage selon les pays étudiés à cause d’une importante
hétérogénéité et d’un plus faible degré d’intégration entre ces pays. S'ils sont tous touchés par
la crise de la dette des années 1980, le redressement financier à la suite du Plan Brady94 dans
les années 1980, les crises spéculatives de la fin des années 1990 et la dernière crise
financière, les variétés de politiques de stabilisation et du taux de change nominal déterminent
des chemins macroéconomiques et des déséquilibres très différents. Les cas argentin et
mexicain demeurent intéressants à examiner en premier lieu dans cette perspective.

En Argentine, au début des années 1980, l’accélération de l'inflation a entraîné une


surévaluation du peso et d'importants déficits courants, en dépit d’un régime du crawling peg.
Après le nouveau programme de stabilisation, le gouvernement a adopté un plan Austral
hétérodoxe en 1985 visant à briser l'inflation par une politique mixte combinant le gel des
prix, des salaires et des taux de change après une forte dévaluation. En 1988, le gouvernement
reconnaît l’échec du Plan. Le relâchement de cette politique a entraîné une reprise de
l'inflation et de la surévaluation, le gouvernement ayant retardé les ajustements du taux de
change pour combattre l'inflation.

                                                            
94
En 1989, le Plan Brady propose un échange des créances bancaires contre des titres garantis par le Trésor
américain, à condition que les banques réduisent le montant des créances et qu’elles remettent de l’argent dans le
circuit. Les pays bénéficiaires s’engageaient pour leur part à consolider une partie de leur dette et à signer... des
programmes d’ajustement structurel avec le FMI.

193 
 
 

Tableau 19. La sous-évaluation  0     0 et la surévaluation  0     0 pour


l’Argentine, le Mexique, le Chili, la Colombie et l’Uruguay (en %)
 

e_arg e_chil e_col e_mex e_uru r_arg r_chil r_col r_mex r_uru
82 13,8 -50,0 -34,3 39,2 -36,5 3,2 -48,9 -38,4 32,3 -41,6
83 9,6 9,9 -26,9 64,5 30,1 -12,9 -7,8 -40,8 51,2 8,3
84 -32,9 -36,4 16,9 51,4 17,1 -52,9 -43,3 0,1 39,4 -0,7
85 4,3 -21,2 22,2 40,6 0,4 -3,0 -22,0 14,2 33,8 -4,2
86 9,3 4,2 87,8 37,8 29,9 -4,6 -6,6 69,4 29,2 15,5
87 -29,6 17,9 65,8 42,9 19,7 -34,9 7,8 54,5 35,6 10,2
88 6,5 13,5 39,4 -1,5 17,2 9,3 12,5 37,4 -0,5 18,3
89 88,2 4,1 30,8 -5,5 10,9 89,1 6,9 31,4 -3,0 16,1
90 14,0 -4,9 40,6 -1,4 10,6 19,0 -0,4 40,1 0,3 14,1
91 -37,3 -11,2 56,6 -13,5 -17,2 -18,4 2,8 63,2 -6,2 -0,5
92 -64,7 -12,6 26,5 -27,6 -23,2 -40,9 3,3 36,3 -17,2 -2,8
93 -72,3 -27,1 -28,8 -21,9 -33,9 -50,0 -8,3 -14,2 -14,0 -12,6
94 -52,8 -0,7 -30,0 -17,7 -9,4 -50,3 -3,1 -26,9 -15,4 -11,0
95 -30,6 -3,5 -39,9 13,2 -21,9 -18,8 4,2 -26,9 12,2 -9,8
96 -28,2 -9,1 -33,8 -1,3 -11,0 -20,6 -3,0 -24,9 0,2 -4,5
97 -47,8 -13,8 -49,1 -12,1 -11,8 -34,0 -4,2 -34,1 -7,1 -1,8
98 -54,9 -18,7 -40,8 -11,5 -10,3 -39,8 -7,7 -27,4 -6,4 -0,4
99 -46,7 3,7 10,1 -10,6 -8,5 -40,5 4,0 9,3 -7,3 -6,1
00 -22,4 4,6 15,2 -8,7 -5,2 -26,2 -1,2 8,8 -7,4 -10,4
01 -7,7 2,4 -3,9 -9,5 -8,6 -12,0 -1,9 -6,5 -8,3 -11,9
02 76,0 7,5 -5,4 -6,1 28,2 58,3 -0,9 -9,9 -6,7 15,2
03 41,9 8,1 3,2 0,7 16,1 26,5 -1,8 -4,0 -2,3 3,9
04 1,8 12,8 -11,6 -2,1 -2,3 4,3 11,6 -7,2 -0,8 0,9
05 7,9 13,4 -18,6 -5,5 -4,2 7,6 10,7 -14,2 -3,6 -2,0
06 14,1 26,5 -14,3 -1,4 -8,8 12,4 20,7 -10,7 -0,6 -5,5
07 5,9 15,6 -30,3 -1,7 -3,9 11,7 16,9 -18,8 1,2 3,7
08 6,0 -12,6 -25,0 -0,4 -21,9 11,3 -3,8 -14,7 1,9 -9,6
09 16,3 18,9 -5,8 4,1 15,7 10,7 11,9 -7,2 2,1 9,0
10 3,8 17,8 -22,4 -1,9 11,3 -2,8 8,5 -23,4 -3,2 2,8
11 -0,1 9,5 -6,3 2,5 16,5 -7,3 1,4 -11,5 -0,6 5,2
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur.

194 
 
 

Une succession de plans de stabilisation a ensuite été mise en œuvre avec plus de la
politique de change accommodante, visant à préserver la compétitivité, qui a conduit à une
sous-évaluation du peso et à des excédents courants en 1988 et 1990. Mais l’accélération de
l'inflation conduit le gouvernement Menem à expérimenter de différentes mesures avant
l'adoption d'un programme plus radical basé sur une caisse d'émission en 1991. Cela a conduit
à une forte appréciation réelle, énorme déficit courant et une surévaluation importante entre
1991 et l'éclatement de la crise en 2001.

La fin de la caisse d'émission et la maxi-dévaluation ont entraîné une forte sous-


évaluation durable en termes nominal par rapport au dollar (environ 76%) en 2000 et, dans
une moindre mesure, en termes effectif réel (à partir de 50% à 5 % et jusqu'à environ 10%)
avec un excédent courant important dans un contexte favorable de la hausse des prix du
pétrole et des matières premières. Par conséquent, l’argentine a affronté la dernière crise en
position plus favorable avec un peso toujours sous-évalué et un excédent courant à la hausse
en dépit d’une faible appréciation du taux de change réel et nominal. Ceci s’explique par la
volonté des autorités de maintenir une monnaie relativement dépréciée. Toutefois, la sous-
évaluation réelle peut être surestimée dans les dernières années, vu que les statistiques
officielles des prix utilisées pour évaluer les taux de change réels sont connues comme sous-
estimer le taux réel d'inflation. En dépit du maintien d’une légère sous-évaluation nominale en
fin du période, le peso argentin a connu une légère surévaluation en termes réel en 2010-
2011(figure 12).

L’amplitude des évolutions du taux de change est plus limitée au Mexique qu'en
Argentine. La crise de la dette originaire du Mexique en 1982 a conduit à un cycle
inflationniste avec une explosion des prix et une forte dépréciation du taux de change. Les
échecs successifs des plans de stabilisation ont entraîné une poursuite dramatique entre la
hausse des prix et les ajustements du taux de change en permettant une sous-évaluation
régulière en termes nominal et réel avec un excédent courant nettement au-dessus de la valeur
d'équilibre.

Le Pacte de solidarité économique hétérodoxe de Décembre 1987 a combiné un


ajustement budgétaire, un taux de change fixe (suivi de quelques légères dépréciations), un
gel temporaire des salaires et des prix et une forte libéralisation des échanges commerciaux.
Le programme a réussi à arrêter l'inflation, mais l'inflation résiduelle a entraîné une forte

195 
 
 

appréciation réelle et une dégradation de la balance courante (-6% du PIB entre 1992 et
1994), favorisée par la libéralisation des échanges commerciaux. Une surévaluation croissante
est apparue, à la fois en termes nominal et réel.

Figure 12. Taux de change effectif réel et bilatéral observé et l'équilibre du peso argentin et
mexiquin (2000 = 100)
 

Argentine Argentine
400 450

350 400

300 350
300
250
250
200
200
150
150
100 100
50 50
0 0
90
91
92
93
94
95
96
97
98
99
00
01
02
03
04
05
06
07
08
09
10
11
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Mexique Mexique
200 160
180 140
160
120
140
120 100

100 80
80 60
60
40
40
20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Source:calculs de l’auteur, Chelem pour le taux de change bilatéral, 2012.

Jusqu'en 1992, les déséquilibres extérieurs ont été considérés comme soutenables,
grâce à des flux de capitaux, à la suite du plan Brady de 1989 et les privatisations. En dépit
des importants IDE, une grande partie de ces flux de capitaux étaient des flux
d’investissements de portefeuille plus réversible. Des attaques spéculatives successives (la
crise Tequila en 1995) ont conduit à l'abandon du régime de la zone cible du taux de change
pour le flottement avec une forte dévaluation nominale et réelle. La balance courante s'est

196 
 
 

fortement améliorée et le taux de change est devenu proche de sa valeur d'équilibre. La grande
mobilisation financière du FMI et des USA lors de l'effondrement et la réussite du programme
de stabilisation ont aidé l'économie mexicaine à restaurer la crédibilité externe et la
croissance. Toutefois, le Mexique a été touché indirectement par les crises asiatique et russe
en 1997-1998, contraignant le gouvernement à dévaluer par paliers. En dépit de cela, le peso
s'est apprécié en termes réel et devient légèrement surévalué en termes réel et par rapport au
dollar jusqu'en 2002.

Après une nouvelle dépréciation face au dollar, le peso est resté stable en termes réel
et proche de l'équilibre, avec une amélioration progressive de la balance courante. En 2008, le
ralentissement de l’activité économique mondiale, l’effondrement du commerce international,
notamment avec les Etats-Unis et les chutes des cours de pétrole expliquent la dégradation de
la balance courante et la réapparition d’une surévaluation nominale qui devient limitée
toutefois, en dépit d’une légère sous-évaluation réelle. L'économie mexicaine parait dans une
situation plus équilibrée pour faire face à la crise actuelle que dans les périodes précédentes,
mais sa politique de taux de change est plus contrainte que dans d'autres pays émergents.

Le Chili a hérité une situation déséquilibrée au début des années 1980 avec une
situation d’inflation et une augmentation du déficit courant (-15% du PIB en 1981). En dépit
d'une forte dévaluation en 1981, l'inversion des flux de capitaux a conduit à l'adoption d’un
régime de change flottant. Des importantes dépréciations nominales et réelles ont suivi, mais
une surévaluation importante est restée jusqu'en 1986 avec l'amélioration progressive du
compte courant. Dès la fin des années 1980 jusqu'à la fin des années 1990, une situation plus
équilibrée a prévalu avec une stabilité du taux de change nominal, une appréciation réelle
modérée, un déficit courant limité et une monnaie souvent sous-estimée en termes réel. Les
crises asiatique et russe ont été des facteurs de déstabilisation avec de nouveaux déséquilibres
et des surévaluations. Cependant les dépréciations nominales et réelles jusqu'au 2003 ont aidé
à recouvrer les taux de change d'équilibre et d'améliorer la balance courante. Depuis lors,
l'économie chilienne a connu une croissance assez régulière et durable avec de plus en plus
d’excédent courant (5% du PIB en 2006-2007), une appréciation de la monnaie en termes
nominal et réel tout en gardant une sous-évaluation importante. Bien que négativement affecté
par la crise mondiale de 2008, le Chili a fait face dans une position assez équilibrée en dépit
de sa marge de manœuvre réduite (figure 13).

197 
 
 

Figure 13. Taux de change effectif réel et bilatéral observé et l'équilibre pour le Chili et la
Colombie (2000 = 100)
 

Chili Chili
140 140

120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Colombie Colombie
160 160

140 140

120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Uruguay Uruguay
250 300

250
200

200
150
150
100
100

50
50

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatèral observé vis-à-vis du dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatèral d'équilibre vis-à-vis du dollar

Source: estimations de l’auteur, Chelem pour les données des taux de change bilatéraux, 2012

198 
 
 

La Colombie présente une certaine similitude avec le Chili en termes du profil du taux
de change; une longue dépréciation nominale jusqu'en 2002, une dépréciation réelle au cours
des années 1980 suivie par une évolution plus stable avec des périodes alternatives
d'appréciation et de dépréciation. Seulement, les déséquilibres ont été beaucoup plus
importants avec des déficits courants et une surévaluation au début des années 1980, une
longue période d'excédents énormes (4% du PIB en 1991) et une sous-évaluation massive
(autour de 40-60% en termes nominal et réel) jusqu'en 1992. Depuis lors, les déficits courants
et la surévaluation importante ont été la règle, à l'exception d'une brève amélioration en 1999-
2000. L'économie colombienne a affronté la crise mondiale de 2008 dans une position plus
fragile et déséquilibrée.

L’évolution du taux de change en Uruguay a, en raison de relations étroites, certaines


similitudes avec le cas argentin en termes réel, mais pas en termes nominal; une longue
dépréciation nominale est observée jusqu'en 2003, suivie par une appréciation comme au
Chili et en Colombie. Le début des années 1980 a été caractérisé par d'importants
déséquilibres, une surévaluation en termes réel et nominal et une dépréciation réelle
importante conduisant, à la fin de la décennie à une situation plus favorable avec un excédent
courant, une stabilisé du taux de change réel et une sous-évaluation. Toutefois, après une forte
appréciation réelle au début des années 1990, les déséquilibres courants réapparaissent avec
une longue période de surévaluation nominale et réelle au cours de toute la décennie. Grâce à
une forte dévaluation nominale et réelle en 2003 suivie d'une appréciation, une configuration
plus équilibrée a été observée pendant les années 2000 avec un taux de change réel proche de
sa valeur d'équilibre et d'une sous-évaluation par rapport au dollar. Cependant les contraintes
ont été renforcées face à la crise depuis 2008.

5.5. Estimations du FEER pour les pays Sud-Méditerranéens


 

L'examen de l'évolution des taux de change effectifs réels des pays Sud
Méditerranéens par rapport à leur niveau d’équilibre, au cours de la période 1982- 2011,
permet de distinguer plusieurs tendances distinctes. Une phase de surévaluation au cours des
années 1980 (à l’exception de la Turquie), puis, une phase de sous-évaluation au cours des
années 1990 (à l’exception de la Tunisie), et enfin, une phase de surévaluation durant les
années 2000 (à l’exception de la Tunisie qui se trouve en fin de période très proche de
l’équilibre).

199 
 
 

Contrairement aux pays d’Amérique latine, les évolutions des désajustements de


change dans les pays Sud méditerranéens sont très comparables en dépit d’une importante
hétérogénéité et d’un plus faible degré d’intégration entre ces pays. Dès les années 1970,
certains pays ont commencé à réformer leurs systèmes économiques pour laisser plus de place
à l’initiative privée, à un plus grand rôle pour les marchés et pour le commerce international.
Mais la dynamique majeure pour les réformes a commencé au début des années 1980. De
nombreux pays de la Région – se heurtant à des crises importantes de la balance des
paiements et à une croissance lente ou négative – ont entrepris une stabilisation
macroéconomique et des programmes de réforme structurelle visant à restaurer les équilibres
macroéconomiques et à promouvoir la croissance.

Malgré des efforts constants pour stimuler la reprise et accélérer les réformes, les pays
Méditerranéens sont restés au cours des années 1990 sur une trajectoire de croissance lente.
Le chômage augmentait et la transition démographique lente et retardée que la Région
connaissait – avec un contingent de plus en plus important de jeunes travailleurs dans la
population active – faisait pression sur les infrastructures économiques et sociales (Nabli et
al., 2007).

La perspective changea profondément au cours des années 2000. Les pays ont
poursuivi leurs réformes économiques, et parallèlement avec des prix pétroliers augmentant
fortement et un environnement global plus favorable, la performance économique de ces pays
s’est améliorée, avec une croissance du PIB se situant en moyenne au-delà de 6 pour cent par
an pour les années 2004-07, alors qu’elle était à 4,6 pour cent pour la période 2000-03 et à 3,7
pour cent dans les années 1990 (Nabli et al., 2007). Le rythme actuel de la croissance
économique a rétréci l’écart de revenu par habitant entre cette Région et les autres régions en
développement. La première constatation est que le rythme des réformes est resté faible dans
la région à l’exception de la Turquie comparé à l’ensemble des pays en développement et
particulièrement ceux ayant réalisé des succès en matière de croissance. La deuxième
constatation est que le contenu, ainsi que le rythme des réformes, ont varié considérablement
au sein de la région avec des sous-groupes de pays ayant fait des progrès plus importants que
d’autres en matière de performance du secteur privé. La troisième constatation est que la
réponse du secteur privé aux réformes qui ont été réalisées, aussi limitées soient-elles, a été
faible dans l’ensemble impliquant la continuation d’une performance faible (Nabli et al.
,2007).

200 
 
 

Durant les années 1980, le dinar tunisien a connu une succession de courtes périodes
de dépréciation et d'appréciation. La période 1981-84 a connu une demande interne forte et
des tensions inflationnistes qui ont contribué à une surévaluation réelle de la devise nationale.
La Tunisie est trop dépendante des recettes pétrolières et est pénalisée par
son endettement extérieur, grevant les finances publiques qui assuraient jusque-là la
subvention des prix. De plus, elle n’a pas de base productive suffisante pour être en mesure
d’absorber le surplus de travailleurs et d’exporter une gamme de produits diversifiée et
compétitive. Le manque d’investissement de l’État dans les infrastructures entrave encore la
croissance et dissuade les investisseurs privés (Morrisson et Talbi, 1996).

Durant la deuxième moitié des années 1980, le taux de change du dinar tunisien a
connu une forte dépréciation en termes réel et nominal, ce qui reflète la phase de sous-
évaluation de la monnaie tunisienne en termes réelle et par rapport au dollar. Cette forte
dépréciation explique l’importante amélioration de balance courante pour atteindre, pour la
première fois, un excédent courant de 1.2% du PIB en 1988. Entre 1985 et 1986, le prix du
pétrole baisse, une série de sécheresses frappe le pays et le salaire des travailleurs diminue95.
En 1986, la Tunisie connaît sa première année de croissance négative depuis son
indépendance (Morrisson et Talbi, 1996; Murphy, 1999). Pour y faire face, la Tunisie a
négocié le premier programme national d’ajustement économique ou « Plan d’ajustement
structurel96» (PAS). En 1988, on accorde à la Tunisie le recours à des fonds étendus pour une
période de trois ans. Par la suite, la période de prêt est étendue plusieurs fois jusqu’en 1992,
mettant en évidence la confiance de l’organisation en l’aptitude du gouvernement à mettre en
œuvre une réforme structurelle de l’économie (Murphy, 1999).

                                                            
95
C’est pourquoi le VIe plan de développement (qui commence en 1982) est conçu pour introduire les
ajustements économiques nécessaires pour préparer la Tunisie à une période marquée par la baisse des recettes
pétrolières. L’investissement se dirige principalement vers les industries non-pétrolières.
96
L’un des objectifs du PAS est la cession totale ou partielle de certains services publics au profit de banques ou
de groupes privés. 

201 
 
 

Tableau 20. La sous-évaluation  0     0  et la surévaluation  0     0 pour la


Tunisie, la Turquie, l’Egypte et le Maroc (en %)
 

e_tun e_tur e_egy e_mar r_tun r_tur r_egyp r_mar


82 -22.6 72.4 -16.8 5.1 -24.1 56.6 -18.6 -6.4
83 10.6 77.1 14.6 12.3 -14.3 48.1 -7.5 -11.8
84 9.7 61.0 -3.3 22.0 -13.4 33.6 -19.8 -3.0
85 23.6 45.6 11.2 -15.1 5.7 32.5 0.0 -20.1
86 19.0 45.0 33.7 21.5 -3.8 25.3 13.9 0.4
87 38.1 45.9 54.2 -8.0 17.6 32.8 39.7 -14.4
88 16.2 38.3 25.4 45.7 10.2 36.4 23.6 35.9
89 -3.9 22.3 20.7 2.9 -1.1 24.6 22.0 5.2
90 -15.1 2.1 -1.0 1.5 -7.1 7.6 3.9 4.8
91 -34.9 -8.9 7.5 -10.3 -6.4 11.5 17.5 9.9
92 -35.9 -15.8 13.5 -25.2 -3.2 8.0 22.7 2.2
93 -25.9 -35.7 6.8 -18.3 -2.6 -14.5 16.2 1.4
94 2.1 4.0 8.8 6.2 -2.0 0.4 3.7 1.3
95 -16.4 -26.1 -3.7 -31.2 -2.6 -12.8 4.1 -13.6
96 2.3 -4.7 -3.1 10.5 4.1 0.2 1.1 10.9
97 -9.2 -5.3 -9.7 -11.2 -0.9 3.1 -1.5 -1.8
98 -13.4 2.2 -27.1 -9.4 -2.2 10.0 -13.5 0.5
99 6.5 -3.0 -14.2 -4.4 4.6 -1.6 -10.0 -2.4
00 6.5 -9.2 -4.1 -9.5 -0.4 -12.9 -8.0 -11.7
01 6.9 4.5 0.5 27.0 -2.1 -2.5 -4.2 12.9
02 9.7 1.5 4.9 24.5 -3.3 -8.0 -3.8 7.9
03 14.7 -8.1 13.0 25.0 0.0 -16.2 1.5 8.1
04 -1.0 -21.8 2.0 -1.2 0.5 -14.2 3.5 0.8
05 3.1 -20.7 -3.7 -2.4 3.4 -14.4 -1.3 -0.1
06 0.2 -22.6 -8.3 2.3 2.0 -15.6 -4.7 3.2
07 -5.4 -27.1 -14.6 -17.7 -0.7 -14.5 -4.8 -7.3
08 -7.6 -25.9 -15.6 -34.6 -1.3 -13.7 -5.4 -15.8
09 6.3 -8.6 -18.7 -27.2 3.9 -8.8 -14.8 -17.7
10 4.1 -24.6 -23.0 -13.6 1.9 -23.2 -21.9 -10.0
11 0.1 -37.1 -17.6 -24.0 -0.8 -32.8 -18.2 -15.2
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur.

202 
 
 

La stratégie de libéralisation de l’économie97 (1987-1995) est mise en œuvre dans les


VIIe et VIIIe plans de développement. Le premier de ces plans est mis au point avec la
coopération du FMI et de la Banque mondiale. Il a pour but d’atteindre une stabilité macro-
économique et d’introduire les mesures initiales d’une libéralisation structurelle tout en
réduisant la dépendance à l’exportation du pétrole. Avec adhésion à l’Organisation mondiale
du commerce en 1995, l’accord d’association avec l’Union européenne en 1995, les grands
déséquilibres internes et externes sont maîtrisés, la dette extérieure reste raisonnable et une
croissance du PIB de 4,3 % en moyenne est réalisée (Murphy, 1999). Le dinar tunisien a
connu durant les années 1990, une légère appréciation qui a mené à une faible surévaluation
en ternes réels ainsi qu’une stabilité de la balance courante à des niveaux déficitaires.

La Tunisie a profité d'une inflation faible depuis le milieu des années 1990,
principalement suite à l'adoption de politiques fiscales et monétaires prudentes, et à la
réalisation d'une croissance de PIB réel voisinant 5% durant la période 1996-2001. Le
tourisme est devenu de plus en plus important, et la dépendance à l'agriculture de moins en
moins importante. Avant l'attaque terroriste de Djerba, le secteur a connu une croissance
soutenue. Le dinar tunisien a connu une courte période de sous-évaluation et une amélioration
du solde courant début des années 2000.

Cependant, au lendemain de l'attaque terroriste de Djerba, le ralentissement de


l'industrie, et la chute des revenus du tourisme combinée avec une année de morosité dans les
exportations et une sécheresse sévère a affecté la croissance. La politique d’ouverture mise en
route a permis une reprise durable de la croissance économique, contrairement à ce que
vivaient d’autres pays de la région, mais a contribué dans le même temps à déstructurer le
tissu économique. Cette politique a conduit à une modernisation des techniques de production
et des procédures de gestion des entreprises et donné un coup de fouet à l’investissement
direct étranger (Chedly, 2009). Toutefois, elle n’a pas permis d’augmenter significativement
l’investissement productif et la création d’emplois. Par ailleurs, l’absence de préparation de
plusieurs secteurs à l’ouverture a conduit au maintien d’un niveau de chômage élevé.

                                                            
97
Dès le début des années 1980, le gouvernement considère aussi la privatisation des entreprises étatiques pour
mettre fin à leur endettement. Le gouvernement ne lance cependant pas de véritables programmes avant 1987. La
privatisation se traduit dans un premier temps par la vente de petites et moyennes entreprises avec un bon
historique bancaire à des acheteurs tunisiens présélectionnés. Les secteurs concernés sont surtout le tourisme, les
matériaux de construction, les textiles, l’industrie agroalimentaire et la pêche, la mécanique et l’électrotechnique
(Murphy, 1999).

203 
 
 

La récession suite à la crise économique de 2007 et le ralentissement de la croissance


dans les pays européens, partenaires principaux de la Tunisie, ont exercé une pression
significative sur le dinar. Celui-ci a connu jusqu’en 2010 une légère sous-évaluation réelle.
Avec les événements du 17 Décembre 2010 et la poursuite des grèves ouvrières durant
l’année 2011, la situation économique de la Tunisie s’est aggravée, les exportations ont chuté
et les importations ont augmenté. Le dinar tunisien a connu en 2011, une légère surévaluation
réelle qui reflète la dégradation du déficit de la balance courante.

Figure 14. Taux de change effectif réel et bilatéral observé et l'équilibre du dinar tunisien et de
la livre turque (2000 = 100)
Tunisie Tunisie
140 120

120 100
100
80
80
60
60
40
40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatéral observé face au dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatéral d'équilibre face au dollar

Turquie Turquie
180 450
160 400
140 350
120 300
100 250
80 200
60 150
40 100
20 50
0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatéral observé face au dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatéral d'équilibre face au dollar

Source: calculs de l’auteur, Chelem pour des données des taux de change bilatéraux, 2012.

Comme la plupart des pays émergents, la Turquie a connu à la fin des années 1970 une
grave crise économique due en grande partie à la stratégie d’industrialisation par substitution

204 
 
 

aux importations (ISI) appliquée de 1960 à 1980. Le chômage dépasse les 20% et l’inflation
atteint les 100% cette même année, pendant que le taux de croissance devient négatif.
L’insertion de l’économie turque dans le commerce international à partir de 1980 et surtout
son intégration dans le marché européen à la suite de l’Union douanière (janvier 1996) a
favorisé la croissance, encouragé l’entrée d’investissements directs étrangers et incité les
entreprises à être plus compétitives, permettant à la Turquie de devenir une économie
émergente (Vérez, 2008). Durant les années 1980, la livre turque a été très sous-évaluée en
termes réels et nominaux en raison de la forte dépréciation dans un contexte de faibles déficits
courants, de baisse des importations et d’hyperinflation.

Les années 1990 ont été marquées par une croissance très instable due, pour
l’essentiel, à une inflation élevée, chronique, elle-même source d’une très forte volatilité
menant à des taux d’intérêt réel très élevés. En dépit de cela, la livre turque s'est appréciée en
termes réels et devient légèrement surévaluée en termes réels et proche de l’équilibre par
rapport au dollar jusqu'en 2000.

En 2001, à la suite de la crise financière et monétaire, le PIB s’est contracté de près de


6 % et les faillites en cascade des banques bénéficiant d’une garantie publique complète pour
les dépôts ont fait exploser la dette publique. Le sur-ajustement de la livre turque (une
dépréciation de plus de 100 %) a également contribué à cette explosion, et à la réapparition
d’une sous-évaluation par rapport au dollar qui devient limitée toutefois. À cette époque,
notamment en raison du poids que représentait le service de la dette, « l’argentinisation »98 de
la Turquie était souvent évoquée. Cependant, la Turquie n’a pas suivi la voie de l’Argentine
mais, au contraire, celle de la stabilisation. De façon surprenante, la sortie de crise s’est même
révélée relativement rapide99.

Le plan de stabilisation mis en vigueur après la crise de 2001 s’est appuyé sur trois
piliers fondamentaux. Le premier pilier a reposé sur une discipline budgétaire stricte. Le
deuxième pilier est l’indépendance de la Banque centrale dont la stratégie de désinflation
reposait sur « un ciblage d’inflation ». Cette stratégie a été acquise, avec l’appui du FMI, au

                                                            
98
Crise économique en Argentine de 1998 à 2002 qui a abouti, entre autres, à une déclaration d’insolvabilité du
pays en 2002.
99
Plusieurs facteurs l’ont rendue possible : le premier réside dans l’assainissement et la consolidation du système
bancaire, le deuxième a trait à l’indépendance de la Banque centrale et le troisième relève de l’appui massif du
FMI en contrepartie d’un plan de stabilisation et d’une forte discipline fiscale. Le plan de stabilisation mis en
vigueur après la crise de 2001 s’est appuyé sur trois piliers fondamentaux.

205 
 
 

fur et à mesure que la discipline fiscale était respectée par le Gouvernement et par une
politique monétaire restrictive. Le troisième pilier de ce plan général a été le recours à un taux
de change flottant. Lors des chocs politiques, tels que l’annonce des élections anticipées en
juillet 2002 ou la guerre en Irak, la dépréciation en termes réels de la livre turque en 2001 et
2002 a cédé la place à une appréciation en termes réels et nominaux. Après le conflit irakien,
la livre turque est devenue surévaluée sans pour autant provoquer de baisse des exportations.
Sous la contrainte du FMI, la policy mix adoptée a permis in fine de stopper les dérapages et
de remettre l’économie sur la voie de la croissance dans un cadre budgétaire et monétaire
mieux contrôlé..

En mai 2006, la livre turque s’est appréciée par rapport au dollar en une semaine de
l’ordre de 30 %. Ce choc explique largement la dégradation du solde du compte courant,
amplifié par la hausse du prix de l’énergie. La dépréciation de la livre turque par rapport au
dollar à partir de 2007 a déclenché une spirale inflationniste par les coûts, ce qui a obligé la
Banque centrale turque à réagir brusquement. En dépit de cette dépréciation nominale, la
monnaie turque est restée surévaluée en termes réels et par rapport au dollar.

L’économie turque est entrée en récession à partir du printemps 2008, avec la chute
des investissements privés, puis de la consommation. La récession s’est approfondie à partir
de l’automne avec la crise internationale. Dans ce contexte de perte de confiance, les
turbulences financières ont joué leur rôle, mais l’appréciation systématique de la livre turque
après le choc de mai 2006, du fait de la hausse des taux d’intérêt, a aussi sa part de
responsabilité.

La crise de 2008-2009 a mis fin à l’aggravation du déficit du compte courant.


Cependant la très forte reprise en 2010 a conduit de nouveau à une très forte augmentation du
déficit du compte courant avec une surévaluation importante en 2010 et 2011 en termes réels
et nominaux en dépit d’une importante dépréciation par rapport au dollar.

206 
 
 

Figure 15. Taux de change effectif réel et bilatéral observé et l'équilibre de la livre egyptienne
(2000 = 100)

Egypte Egypte
250 250

200 200

150 150

100 100

50 50

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatéral observé face au dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatéral d'équilibre face au dollar

Source: calculs de l’auteur, Chelem pour des données des taux de change bilatéraux, 2012.

Au début des années 1980, l'Egypte, comme le reste du monde, a été soumise à de
fortes pressions inflationnistes. La livre égyptienne connait une forte appréciation réelle se
traduisant par une courte surévaluation par rapport au dollar et plus prolongée en termes réels.
L'Egypte souffre structurellement d'une situation économique fragile. Entre un héritage
socialisant qui s'exprime encore par une prédominance de l'Etat et une forte vulnérabilité
envers les chocs externes, la situation macroéconomique est aggravée par une politique
conjoncturelle accroissant les déficits et une volonté de s’ouvrir commercialement à
l’économie mondiale.

Les politiques de l’Infitâh — ouverture — depuis le milieu des années 1970 et le


vigoureux boom de la construction alimenté par les remises des travailleurs émigrés, entre
1974 et 1985, ont engendré une dynamique dans tous les secteurs de l'économie. Cette période
a été caractérisée par une croissance également sans précédent des avoirs financiers détenus
par les ménages (Hussein et Roussillon, 1990). En dépit d’une appréciation réelle jusqu’à la
fin des années 1980, la monnaie égyptienne est devenue sous-évaluée en termes réels et par
rapport au dollar jusqu’au milieu des années 1990.

207 
 
 

Avec les réformes économiques100 entamées en 1989 et les accords de Camp David
consécutifs à la guerre du Golfe, l'Égypte a su mettre en place une « politique étrangère
productrice de revenus» de manière assez habile pour qu'à court terme, l'apport de fonds
extérieurs ait toujours réussi à compenser les résultats insuffisants de la politique de réforme.
Au début des années 1990, la livre égyptienne a connu une importante dépréciation réelle et
nominale, ce qui explique l’amélioration de la balance courante et la poursuite de la sous-
évaluation en termes réels et nominaux.

A partir de 1997, le taux de change égyptien est devenu sujet à de nombreux chocs
externes. La crise asiatique en 1997/1998, a provoqué une sortie de capitaux et un
ralentissement des investissements. Les dévaluations des devises asiatiques ont rendu leurs
exportations plus compétitives, ce qui a conduit à une augmentation des importations
égyptiennes à partir de ces pays, augmentant ainsi le déficit commercial. L'attaque terroriste
de Luxor en 1997 a contribué à une chute des revenus du tourisme pour plusieurs années, et à
un ralentissement de la croissance économique. En 1998, les prix mondiaux du pétrole ont
chuté, ce qui a renforcé la détérioration de la balance du compte courant. Les tensions dans le
processus de paix au Moyen Orient à la fin des années 1990 et la seconde Intifadah
palestinienne lancée en Octobre 2000 ont eu un impact négatif sur l'économie de la région
entière en général, et de l'économie égyptienne en particulier. Ceci explique la situation de
surévaluation en termes réels et nominaux de la livre égyptienne à partir 1997 et jusqu’au
début des années 2000, reflétant une forte dégradation de la balance courante durant la même
période.

Avec les réformes101du début des années 2000, l’adoption d’un taux de change flottant
renforce la compétitivité de l’économie égyptienne. Cette décision s’est accompagnée dans un
premier temps, d’une brutale dépréciation réelle et nominale du taux de change. Cette
dépréciation explique la courte période de sous-évaluation réelle et nominale de la monnaie
                                                            
100
La nouvelle loi de 1989 laisse à l'investisseur le choix d'adopter un statut conforme à cette loi ou à celle de
1981 sur les sociétés, qui avait aboli les conditions anciennes, restrictives et désavantageuses pour les entreprises
privées. Elle permet à des entreprises ayant un capital entièrement étranger de s'établir et accorde quelques
avantages supplémentaires aux investisseurs, dont l'agrément est désormais concentré dans les mains du Bureau
général pour l’investissement (GAFI). Par ailleurs, le législateur abolit certaines dérogations et exclut quelques
activités du champ des investissements.
101
En juillet 1999, l’Egypte a conclu avec les Etats-Unis d’Amérique un accord de libre échange commercial et
d’investissement (TIFA) visant à renforcer la coopération entre les deux pays et à faciliter l’accès à leurs
marchés respectifs, par la suppression des barrières non tarifaires et autres entraves au commerce et à
l’investissement. La signature en juin 2001 de l’Accord d’association UE/Egypte a constitué une évolution
majeure dont les effets ont été ressentis dans la politique de libéralisation du commerce.

208 
 
 

égyptienne jusqu’à 2004. Inquiet de cette évolution et aux fins d’empêcher la fuite des
capitaux, le gouvernement a rapidement réintroduit une certaine forme de contrôle. Dans
l’ensemble, le passage à un taux de change flottant et la dépréciation monétaire qui s’en est
suivie, ont contribué à renforcer la compétitivité de l’économie égyptienne, permettant ainsi
au pays de mieux amortir les chocs 102 extérieurs. Afin d’améliorer le fonctionnement du
marché de devises et d’assurer le succès du système, le gouvernement a ouvert en décembre
2004, un marché interbancaire de devises autorégulateur, parachevant ainsi le passage à un
système de taux de change unifié et flexible.

Le tourisme est l’un des piliers de l’économie égyptienne. Il est également très
vulnérable aux changements économiques intervenant aux niveaux régional et international.
Suite aux évènements du 11 septembre aux Etats-Unis et au déclenchement en 2003, de la
deuxième Guerre du Golfe, le nombre de touristes étrangers a baissé, entraînant une
diminution des recettes touristiques. Avec un déclin supplémentaire du tourisme et des
revenus du canal du Suez, la balance courante s’est gravement dégradée et la livre est devenue
surévaluée en termes réels et nominaux.

L’Egypte a parcouru, depuis 2004, un chemin considérable de modernisation de son


économie et d’ouverture aux échanges et aux investissements, tirant parti de son poids
démographique (marché de 83 millions d’habitants aujourd’hui, 100 millions en 2020), de son
positionnement stratégique (au carrefour de trois continents et de deux mers) et de son
influence au sein du monde arabe. Des réformes majeures ont ainsi été accomplies depuis
2004103. L’Egypte a en outre su développer ses relations économiques, tant avec l’Europe (1er
partenaire commercial, 1er investisseur, 1er bailleur d’aide), qu’avec les Etats-Unis et ses
voisins du Proche/Moyen-Orient. Néanmoins, le déclenchement de la crise économique de
2007 et la baisse de la demande mondiale expliquent la poursuite de la dégradation du solde
courant et de la surévaluation de la monnaie égyptienne durant les années 2000.

La politique de réforme a permis à l’Egypte d’atteindre des taux record de croissance


(7% par an entre 2006 et 2008) mais n’a pas tenu suffisamment compte des couches les plus
défavorisées de la population (près de 40% de la population vivent encore sous le seuil de
pauvreté). La «révolution» politique de janvier 2011 s’accompagne d’un nouveau mouvement
                                                            
102
Comme par exemple, l’imposition d’obligations de cession. Le gouvernement a publié un décret imposant
aux bénéficiaires de devises d’échanger 75 % de leurs avoirs par le biais de banques accréditées et aux
entreprises touristiques de régler les frais d’hôtel en devises.
103
Comme la refonte de la fiscalité des sociétés ou encore la restructuration et la consolidation du secteur
bancaire

209 
 
 

de réformes, vers une croissance plus inclusive, plus ré-distributive, avec de fortes exigences
sociales, sans pour autant remettre en cause l’économie de marché, ni l’ouverture aux
échanges et aux investissements. À l’issue du processus de transition démocratique, la reprise
économique devrait être progressive (1,8% de croissance en 2011-2012 selon le FMI) avant
de retrouver les niveaux précédemment atteints (Perspectives économiques en Afrique, 2012).

Figure 16. Taux de change effectif réel et bilatéral observé et l'équilibre du dirham marrocain
(2000 = 100)

Maroc Maroc
140 140

120 120

100 100

80 80

60 60

40 40

20 20

0 0
82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10

82
84
86
88
90
92
94
96
98
00
02
04
06
08
10
Taux de change effectif réel observé Taux de change bilatéral observé face au dollar

Taux de change effectif réel d'équilibre Taux de change bilatéral d'équilibre face au dollar

Source: calculs de l’auteur, Chelem pour des données des taux de change bilatéraux, 2012.

La vulnérabilité de l’économie marocaine à l’aléa climatique fait que la dynamique de


croissance économique au Maroc est étroitement liée à celle de l’agriculture. En effet, les
cycles économiques engendrés par l’activité globale et par l’activité agricole coïncident avec
des amplitudes plus importantes pour les cycles agricoles. La période1980-1990 a connu
plusieurs reformes structurelle et une libération du marché. Ceci a amené un recul des
contrôles directs et de l'intervention de l'Etat au profit du jeu du marché. Durant les
années1980, les périodes de sous-évaluation et de surévaluation du dirham marocain ont
alterné mais avec une tendance à la surévaluation plus durable et plus marquée en termes
réels.

La première phase 1980-1985 a été marquée essentiellement par des ajustements


budgétaires, une réduction des salaires, une limitation des embauches, une politique monétaire
restrictive et la réglementation du crédit. La dépréciation continue du dirham durant cette
période explique la phase de sous-évaluation par rapport au dollar de la monnaie marocaine
en dépit d’une surévaluation réelle. La phase de sous-évaluation a été interrompue par une

210 
 
 

courte période de surévaluation expliquée par l’importante appréciation en termes réels et


nominaux, suite à la 2ème phase des reformes structurelles visant à améliorer l’épargne,
encourager les investissements productifs et à mobiliser les ressources en faveur du secteur
des exportations. La croissance a ainsi pu accélérer et atteindre une moyenne de 4,7 % entre
1986 et 1989

Durant la années 1990, la monnaie marocaine a connu une longue période de


surévaluation nominale en dépit d’un taux de change proche de l’équilibre en termes réels.
Durant cette période, le Maroc a connu deux années de sécheresse avec un taux de croissance
négative, cette période a connu également des chocs externes liés à la diminution des prix du
phosphate et l’augmentation des prix du pétrole (guerre du Golf). Ceci a amené à une forte
volatilité de la croissance économique. À partir de 1996, les répercussions de l’aléa climatique
sur la croissance économique se sont sensiblement atténuées grâce au développement de
l’élevage et de la pêche et au dynamisme de certains secteurs porteurs de l’économie
nationale (électronique, commerce, bâtiment...)104 qui ont permis de soutenir la croissance du
PIB hors agricole et d’accélérer son rythme de progression. À partir de la même période, la
monnaie marocaine s’est dépréciée et la surévaluation des années 1990 a disparu, laissant la
place à une sous-évaluation réelle et nominale en début des années 2000 (27 % en 2001).

En avril 2001 les autorités marocaines ont dévalué la valeur du dirham de 5 % et ont
modifié la pondération des différentes devises qui composent le panier en donnant une plus
grande importance à l’euro au détriment du dollar, suite à l’intégration croissante du Maroc
dans l’Union Européenne, ce qui a contribué à cette sous-évaluation du dirham, qui a été
accompagnée d’une amélioration du solde courant au début des années 2000 (avec une
augmentation des transferts de l’étranger et des revenus de la privatisation).

Durant la deuxième moitié des années 2000, la surévaluation s’est aggravée en termes
réels et nominaux et persiste jusqu’en 2011. Si l’année 2007 a été un bon cru pour les
exportations de phosphate, grâce à l’envolée des cours de ce minerai sur les marchés
                                                            
104
La période du PAS a vu mettre en œuvre un ensemble de réformes structurelles visant la stabilisation et la
relance de l’économie. Cependant, les résultats en termes de croissance ont été en deçà des attentes. Ceci a
amené les autorités publiques à entamer une deuxième génération de réformes, au cours de la période 1994-
2004, en coopération avec les institutions internationales dans le but de renforcer le tissu productif. Les grands
axes de ces réformes sont : La libéralisation du commerce extérieur, en particulier par la signature d’accords de
libre-échange avec l'Union Européenne et les Etats-Unis d'Amérique ; La réforme de la douane, du secteur
financier ainsi que l’accélération du processus de privatisation; L’adoption du code du travail; L’assainissement
et l’amélioration de l’environnement des affaires.

211 
 
 

internationaux, 2008 a connu les premiers symptômes d’un retournement de situation. En


cause, un recul de la demande mondiale sur les engrais, engendré par l’assèchement des
crédits bancaires alloués aux agriculteurs. La production et les exportations de phosphates ne
sont pas les seuls secteurs stratégiques pour le royaume qui accusent des baisses à l’export. Il
en est de même pour d’autres activités industrielles, fortement touchées par la récession
économique que connaissent plusieurs pays de la zone euro. En tête de liste de ces secteurs, le
textile pour lequel les exportations ont baissé en 2008 de 10%. Cette baisse a continué
pendant les années suivantes, ce qui a poussé le gouvernement à mettre en place un traitement
de choc pour freiner la contagion de la crise mondiale105. Autre secteur fortement dépendant
de la conjoncture internationale, le tourisme. Au cours de l’année 2008, les arrivées des
touristes étrangers au Maroc ont connu une évolution en dents de scie. Un autre élément à
prendre en considération, la baisse des transferts des Marocains Résidant à l’Etranger et la
reprise de la hausse des prix à partir de 2008.

6. Les déterminants des désajustements du taux de change


 

Certains auteurs ont abordé au plan empirique les liens entre le système de change et
les désajustements du taux de change réel. Jeong et Mazier (2003) ont estimé le taux de
change réel d’équilibre du Japon, de la Chine et de la Corée sur la période 1981-2000. Ils
l'utilisent pour discuter trois options de régimes de change pouvant s'offrir à ses pays : un bloc
bâti autour du yen, un ancrage des trois monnaies à un panier commun et une union de
change. Mais, ils ne discutent pas directement les effets du système de change sur le
désajustement. Cette tâche est entreprise par Coudert et Coharde (2008) qui procèdent à des
tests de comparaison des moyennes du désajustement entre régimes de change de facto dans
un échantillon de pays émergents et en développement de 1974 à 2004. Les tests révèlent que
le taux de change réel est relativement plus surévalué dans les systèmes de change fixes. À
l'inverse, une forte sous-évaluation apparaît dans les régimes de change flexibles. De même,
les régimes intermédiaires sont associés à une sous-évaluation moins élevée que les systèmes
flexibles. Mais cette différence n'est pas statistiquement significative avec la classification de
Levy Yeyati et Sturzenegger (2005). Les conclusions restent identiques pour les systèmes de
change fixes lorsque l'inflation est modérée (inférieure à 40% par an). Les régimes

                                                            
105
Un plan de relance de l’activité industrielle s’étale de 2009 à 2015 et sera doté de 12,4 milliards de dirhams.

212 
 
 

intermédiaires ne diffèrent statistiquement des régimes flexibles qu'avec la classification de


Reinhart et Rogoff (2004) et dans les pays à forte inflation.

Dans leur étude sur la compétitivité manufacturière des pays Moyen-Orient et


d'Afrique du Nord, Nabli, Keller et Veganzones (2004) relèvent que, de 1974 à 1999, les cas
de surévaluation réelle atteignent 88% des observations dans les systèmes de change fixes et
76% dans les systèmes plus flexibles. Au cours de la même période, une surévaluation réelle
dépassant 25% apparaissait dans la moitié des observations se rapportant aux régimes fixes
contre moins de 30% pour les régimes flexibles. Alberola, López et Servén (2004) évaluent
l'impact de la caisse d'émission sur le désajustement. Selon leurs résultats, l'évolution
divergente des actifs nets étrangers et de la croissance de productivité relative entre
l'Argentine et les Etats-Unis – qui sont incompatible avec la caisse d'émission – ont participé
substantiellement à la surévaluation du peso, excepté en 1993. Après 1995, l'inadéquation du
dollar comme monnaie d'ancrage a contribué significativement à la surévaluation réelle,
particulièrement à partir de 1997 où la surévaluation du dollar a alimenté celle du peso.
Sazanami et Yoshimura (1999) identifient la dépréciation réelle du yen par rapport au dollar à
partir de 1995 comme la principale source du désajustement fortement croissant par rapport
au yen des monnaies de la Malaisie, des Philippines et de la Thaïlande. En Indonésie et en
Corée, le taux de change réel apparait sous-évalué par rapport au yen. Mais, cette sous-
évaluation diminue continuellement et fortement dans la période précédant la crise de 1997-
1998 alors même que les deux monnaies demeurent bien alignées par rapport au dollar.
Sazanami et Yoshimura déduisent que l'évolution du désajustement vis-à-vis du yen a révélé
l'inadéquation de l'ancrage des monnaies au dollar dans tous ces pays.

Ces études semblent donc corroborer un impact défavorable du régime de change fixe
sur les déséquilibres du taux de change réel. Néanmoins, elles présentent quelques limites. En
effet, la mesure du désajustement de Coudert et Coharde est plus faible dans le modèle à deux
fondamentaux que dans le modèle comprenant uniquement l'effet Balassa-Samuelson. L'ajout
d'autres déterminants couramment utilisés dans la littérature pourrait conduire à des valeurs
du désajustement encore moins élevées (voir Chinn et Johnston, 1996).

À l’issue de ces études, nous avons conduit une analyse économétrique des effets
qu'exercent les régimes de change de jure combinés avec d’autres variables sur les
déséquilibres du taux de change réel calculés précédemment. Les résultats précedents incitent

213 
 
 

à rechercher quelles sont les variables explicatives potentielles des désajustements du taux de
change. Outre les régimes de changes, un ensemble de variables apparaissent particulièrement
pertinents, le degré d'ouverture, le type de spécialisation internationale et le régime du taux de
change combiné avec le degré de libéralisation financière. Nous retenons le panel de pays
émergents précédemment étudiés et incluons des pays industrialisés sur la période 1982-2008
(Aflouk et al., 2010).

Les résultats conduisent à distinguer trois groupes de pays, les BRIC (sans la Russie)
comme les principaux pays émergents avec un faible degré d'ouverture, les pays d'Asie les
plus spécialisés dans les produits manufacturés et avec des régimes de change plus souvent
ancrés sur le dollar et, enfin, les pays d'Amérique latine avec le plus souvent des régimes de
change flexibles et une ouverture du compte de capital élevée.

Les tests de racines unitaires en panel menés sur la série des désajustements pour les
17 pays sur la période 1982-2008 montrent que ces séries suivent un processus stationnaire.
Par ailleurs, les désajustements de change, mesurés en valeur absolue, peuvent être expliqués
par trois groupes de variables.

 Tout d’abord, le degré d'ouverture mesuré par la somme des exportations et des
importations en pourcentage du PIB, a un impact négatif sur les désajustements. En effet
une ouverture commerciale plus élevée accroît l'impact d'une variation de la compétitivité
des prix sur le compte courant. Par conséquent, une faible variation du taux de change est
nécessaire pour atteindre l'équilibre externe, ce qui implique des désajustements plus
faibles.

 Ensuite, la nature de la spécialisation internationale a une forte influence sur l'amplitude


des désajustements. La description se fait à travers deux types d'indicateurs, à savoir
l'avantage comparatif dans les produits manufacturés et la spécialisation régionale. La
hausse des avantages comparatifs dans les produits manufacturés (comme dans nombreux
pays de l’Est asiatique) signifie des fortes contraintes sur les entreprises pour préserver la
compétitivité, par rapport au cas où le commerce international est plus spécialisé dans les
matières premières (comme dans nombreux pays d'Amérique Latine). Cette contrainte
externe limite l'amplitude des désajustements du taux de change qui peuvent être soutenus
à moyen terme. En conséquence, une relation négative est attendue entre l'avantage
214 
 
 

comparatif des produits manufacturés et les désalignements. La spécialisation régionale,


mesurée comme la part des exportations vers la zone régionale (Asie de l'Est, Amérique
du Sud et l’Amérique du Nord) en pourcentage des exportations totales, est une autre
variable expliquant les désajustements, avec un impact négatif. Une intégration régionale
plus forte implique une compétitivité-prix forte, ce qui limite les désajustements de
change.

 Enfin, le régime du taux de change, combiné avec le degré de libéralisation financière, est
la dernière série de variables explicatives. Dans une approche simplifiée, la classification
de jure du FMI entre les régimes de changes fixe, intermédiaire et flottant est utilisée. Le
régime du taux de change fixe conduit à des désajustements importants. À contrario, le
régime flottant limite les désajustements. Une relation positive est attendue entre
l'indicateur du régime de change (variable muette : 1 fixe ; 0  intermédiaire ; 1
flexible) et l'amplitude des désalignements de change. L’ouverture financière relative,
basée sur une mesure de jure de l'ouverture du compte de capital (l'indice Chinn-Ito,
2008), est le deuxième facteur pertinent expliquant les désajustements. Une libéralisation
financière élevée facilite les ajustements monétaires, ce qui réduit les désajustements du
taux de change, tandis que le contrôle de capitaux a un effet inverse. Une relation négative
est donc attendue entre l'indicateur de l'ouverture financière et les désalignements de
change. Enfin, les deux variables précédentes, l'indicateur du régime de change et
l'ouverture financière peuvent être combinés en un seul indicateur avec un impact positif,
leur interaction peut se renforcer mutuellement. Un régime de change flottant associé à
une libéralisation financière conduit à des faibles désajustements, tandis qu'un régime de
change fixe combiné à une libéralisation financière, comme en Argentine pendant les
années 1990, induit de grands désajustements.

Dans l'ensemble, l'équation (24) résume les différents déterminants des désajustements
du taux de change avec les variables définies comme suit: , désajustement du taux de
change en terme effectif réel en valeur absolue; , l’ouverture commerciale mesurée par
la somme des exportations et des importations en pourcentage du PIB; , l'indicateur
de l'avantage comparatif dans les produits manufacturés extrait de la base de données
CHELEM; , l’indicateur de la spécialisation régionale défini comme la part des
215 
 
 

exportations vers la région associée en pourcentage des exportations totales; , l'indicateur


de régime de change égale +1 pour un régime de change fixe, 0 pour un régime intermédiaire
et -1 pour un régime flottant, selon la classification de jure du FMI; , l'ouverture
financière relative, comparée à la moyenne mondiale pondérée et basée sur l'indice Chinn-Ito
(2008). Toutes les sources des variables sont fournies en (Annexe 6)

       
                                               4.24

L'équation est estimée en données de panel sur la période 1982-2008 pour les pays
émergents et industrialisés. Les résultats des tests de racine unitaire sont présentés dans le
tableau en (Annexe 8). L'hypothèse nulle de la présence de racine unitaire est rejetée pour
toutes les séries, sauf pour l'ouverture commerciale et l'indicateur d'avantage
comparatif  , qui doivent être stationnaire en différence première. Les coefficients
estimés de l'équation (4.24) sont donnés dans le tableau 22. Ils sont tous significatifs avec les
signes attendus.

216 
 
 

Tableau 21. Les déterminants des désajustements effectifs réels en valeur absolue
 

MCO MCO
0.24*** 0.15***
Constante
(34.93) (35.94)
-0.34***
OPEN -
(-20.11)
-0.26***
OPEN -
(-4.67)
-0.0008***
ACRMAN -
(-19.10)
-0.001***
ACRMAN -
(-6.28)
-0.09*** -0.03***
XREG
(-5.79) (-3.13)
0.04*** 0.03***
ERR
(9.36) (17.50)
-0.01*** -0.009***
RKAOPEN
(-6.80) (-6.35)
0.01*** 0.02***
ERR*RKAOPEN
(6.97) (19.50)
R² Adjustée 0.82 0.91

Test- F(Pooled vs E.-F.) 0.26 0.42

Test de White 121.63 123.32

Nombre des pays 17 17

Nombre d’observations 459 442


Source:Aflouk et al. 2010, ( ) = T statistique; *** = significatif à 1%, ** = significatif à 5%, * = significatif à
10%, Coefficients de robustesse de l’hétéroscédasticité.

Les tests de Fisher indiquent l'absence d'effets fixes par pays pour toutes les
spécifications. Ils n'améliorent pas la qualité de l'ajustement, principalement en raison de la
présence des spécificités des pays dans les variables explicatives. Comme le montre le test
d'hétéroscédasticité de White, les résidus ne sont pas homoscédastiques. Afin de corriger ce
problème, nous utilisons les estimateurs des moindres carrés pondérés. En outre, nous
utilisons les doubles MCO afin de pallier à des éventuels problèmes d'endogénéité. Les
résultats sont très similaires (tableau 23).

217 
 
 

Tableau 22. Les déterminants des désajustements effectifs réels en valeur absolue, double MCO
 

Double MCO

0.24***
Constante
(33.87)

-0.34***
OPEN
(-20.28)

-0.0008***
ACRMAN
(-20.18)

-0.09***
XREG
(-5.66)

0.04***
ERR
(7.26)

-0.01***
RKAOPEN
(-7.92)

0.01***
ERR*RKAOPEN
(6.57)

R² Adjustée 0.83

Test- F(Pooled vs E.-F.) 0.43

Test de White 134.81

Nombre des pays 17

Nombre d’observations 442


Source: Aflouk et al. (2010). Les t-statistiques sont entre parenthèse. *** indique une signification statistique au
niveau de 1 %. Les variables dépendantes sont instrumentées par leurs premières valeurs retardées.

Lorsque nous considérons nos résultats dans leur ensemble, certaines tendances
générales peuvent être dégagées.

Les résultats indiquent que le désajustement de change est affecté différemment selon
le système de change. En effet, le désajustement est plus élevé (effet positif) dans les régimes
de change les plus fixes que dans les systèmes de change les plus flexibles (effet négatif).

218 
 
 

Les régimes de change fixes accentuent les désajustements du taux de change réel. Le
désavantage de la fixité peut s'expliquer par les arguments habituels en défaveur des systèmes
de change fixes. En outre, l'intégration financière et commerciale tendrait à amplifier les couts
de la fixité du taux de change nominal notamment lors des attaques spéculatives ou des
périodes de crise financière. Par ailleurs, la tendance plus forte au désajustement dans les
systèmes de change fixes peut être expliquée par les épisodes de surévaluation plus probables
(L’Argentine dans les années 1990) et de sous-évaluation relativement moins probables dans
ces systèmes. Nos résultats confirment donc l'association des régimes de change fixes à des
désajustements plus fréquents mise en évidence par Goldfajn et Valdes (1999).

En conclusion, les systèmes fixes contraignent la capacité d'ajustement de l'économie


et par conséquent accroissent les déséquilibres du taux de change réel. Puisque le taux de
change réel guide l'allocation des ressources productives entre secteurs de production d'un
pays et entre pays, les couts économiques de ses déséquilibres peuvent s'avérer élèves. Pour
minimiser ces déséquilibres et les couts qu'ils induisent, les pays qui adoptent un régime fixe
devraient renforcer la flexibilité de leur économie. Par exemple, favoriser le développement
de marchés financiers adéquatement régulés pourrait contribuer à cet objectif. Le
renforcement des institutions peut contribuer à accroitre la capacité d'ajustement des
économies tout en améliorant le processus de décision. Dans certaines unions monétaires
(Union Monétaire Européenne), des mécanismes de solidarité (sous forme de transferts)
existent et aident les pays membres à s'ajuster aux difficultés économiques auxquelles ils sont
confrontés.

Conclusion 
 

Quelques enseignements généraux peuvent être tirés des estimations des


désajustements du taux de change et des déséquilibres du compte courant dans les pays
émergents depuis les années 1980.

Au niveau des B(R)IC, les principaux pays émergents, la politique de taux de change
demeure très contrastée. Le cas chinois est le plus révélateur. De 1980 à 1994, la stratégie
d’ouverture commerciale était basée sur la dépréciation du yuan en termes réel et nominal
avec des périodes alternatives de (sur) et de sous-évaluation, mais en préservant plus de sous-

219 
 
 

évaluation tout en évitant le recours à l'endettement extérieur. Depuis le milieu des années
1990, un tournant s'est produit avec une sous-évaluation permanente du yuan en termes réel et
nominal, en raison d'une réévaluation réelle du yuan moins importante que la réévaluation du
taux de change d'équilibre, résultant de la réussite de la stratégie d'ouverture chinoise. Cette
sous-évaluation a été temporairement atténuée par les conséquences de la crise asiatique de
1997-1998. Néanmoins, elle s’est amplifiée depuis 2002 et a perduré après la crise financière
de 2007. Les excédents chinois sont l'un des symptômes des déséquilibres mondiaux
persistants.

L'Inde a suivi une voie différente concernant l'évolution du taux de change, même s’il
y a des similitudes avec la Chine: une longue période de dépréciation réelle et nominale,
suivie à la fin des années 1990 par une appréciation réelle et une stabilisation nominale.
Cependant, au cours de la période de dépréciation, la durée de la surévaluation a été plus
longue qu’en Chine, avec des déséquilibres courants plus prononcés. Après la stabilisation, la
surévaluation a été presque la règle, avec la persistance des déficits courants, sauf pour une
courte période entre 2001 et 2003. L'Inde n'a pas profité d'une réévaluation de son taux de
change d'équilibre comme en Chine. Ce qui peut être interprété comme un échec de la
politique de libéralisation et d'ouverture commerciale. Depuis l'éclatement de la crise de 2008,
les déséquilibres courants et la surévaluation de la roupie se sont amplifiés, ce qui est plutôt
rare dans les pays émergents. Cela signifie une surévaluation considérable par rapport aux
autres partenaires asiatiques, ce qui pose des contraintes sur le potentiel de croissance future
de l'Inde.

Le Brésil est le dernier cas, où trois périodes différentes peuvent être distinguées. Dès
le début des années 1980 jusqu’à l'adoption du Plan Real en 1994, une succession de
programmes de stabilisation et d'ajustements du taux de change ont essayé de préserver la
compétitivité par le biais d’une sous-évaluation réelle et nominale permanente, mais avec de
grandes difficultés à maîtriser l'inflation. De 1994 à 2002, l'accent a été mis davantage sur la
stabilisation de l'inflation et moins sur la compétitivité. La surévaluation réelle et nominale
était permanente, mais graduellement elle a diminué après 1998. Depuis 2002, une situation
plus équilibrée a prévalu sans désajustements en termes réel, une sous-évaluation par rapport
au dollar et une appréciation du taux de change d'équilibre reflétant l'amélioration de la
compétitivité brésilienne. En revanche, l'environnement économique s’est détérioré avec

220 
 
 

l'éclatement de la crise. La sous-évaluation par rapport au dollar a disparu et la surévaluation


réelle est réapparue, bien que modérément.

Les pays d'Asie, y compris la Corée, ont à peu près suivi le même chemin en dépit de
l'inégalité dans le niveau de développement: une dépréciation réel et, souvent, nominale
jusqu'à la fin des années 1980, une stabilisation par rapport au dollar avec une appréciation
réelle au cours des années 1990, des dévaluations importantes après la crise asiatique de 1997-
1998 étaient suivies par une réévaluation par rapport au dollar et en termes réel. Il n'y a pas de
configuration générale en termes de sous ou surévaluation pour toutes les monnaies asiatiques
au cours des années 1980 et 1990. Les périodes de sous-évaluations et de surévaluations ont
alternativement prévalu. L'Indonésie occupe une position particulière en raison de son statut
de producteur de pétrole. Le won coréen et le baht thaïlandais ont été plus surévalués avant la
crise asiatique de 1997. Après les dévaluations massives de 1997-1998, la sous-évaluation
réelle n'a pas duré et les déséquilibres sont restés limités en termes réels, mais pas par rapport
au dollar. Durant les années 2000 toutes les monnaies de l'Est asiatique ont été sous-évaluées
par rapport au dollar, mais moins que le yuan et le yen. Depuis l'éclatement de la crise
financière de 2008, la sous-évaluation a été préservée par rapport au dollar et amplifiée en
termes réel avec la hausse des excédents courants, au-dessus de leurs valeurs d'équilibre.
Cette configuration, bien que moins marquée que dans le cas de la Chine, contribue à la
persistance des déséquilibres courants.

Les pays d'Amérique latine ont connu des désajustements et des déséquilibres courants
plus importants et plus dispersés. Mais une stabilisation nominale a été observée depuis les
années 2000. L'Argentine a connu trois périodes contrastées. Durant les années 1980 une
succession de plans de stabilisation essayant de combattre l'inflation a conduit à une
surévaluation suivie par des politiques plus tournées vers la compétitivité. Ceci a induit une
sous-évaluation, mais aussi une forte inflation. Au cours des années 1990, le régime de
currency board a conduit à des déficits énormes et à une surévaluation jusqu'à la crise de
2001. Après la maxi-dévaluation, la sous-évaluation par rapport au dollar a prévalu, mais
moins durables en termes réel. Toutefois, l'Argentine a affronté la crise mondiale de 2008 en
position plus favorable avec d'importants excédents et une sous-évaluation, bien que la
question de la mesure de l'inflation induise une certaine incertitude.

221 
 
 

Au Mexique trois périodes peuvent également être distinguées. La première moitié des
années 1980 a été marquée par l’échec des plans de stabilisation, mais a préservé une sous-
évaluation et des excédents courants. De 1987 à la crise de 1995, l’adoption de plans
hétérodoxes, suivis par la libéralisation du commerce ont réussi à stopper l'inflation, mais
entraînant une surévaluation importante et des déficits courants. Depuis lors, les dévaluations
successives ont limité la surévaluation et l'amplitude des déséquilibres et conduisant à une
stabilisation progressive. En dépit de cela, face à la crise de 2008, la marge de manœuvre de
l'économie mexicaine, étroitement lié aux États-Unis, semble être relativement limitée.

Le Chili et la Colombie présentent certaines similitudes dans leur évolution du taux de


change: une longue dépréciation nominale jusqu'en 2002 et une succession de dépréciation et
d'appréciation en termes réel. Au Chili, après une période de surévaluation durant la première
moitié des années 1980, une situation plus équilibrée prévalue en dépit des effets
déstabilisateurs de la crise asiatique de 1997 et de la crise financière de 2008. Sur une longue
période les déséquilibres ont été beaucoup plus importants en Colombie et la surévaluation a
eu tendance à être amplifiée au cours de la dernière crise. En revanche, l'Uruguay a réduit sa
surévaluation depuis le milieu des années 2000.

Contrairement aux pays d’Amérique latine, les évolutions des désajustements de


change dans les pays Sud méditerranéen sont très comparables en dépit d’une importante
hétérogénéité et d’un plus faible degré d’intégration entre ces pays. L'examen de l'évolution
des taux de change effectifs réels des pays Sud méditerranéen par rapport à leur niveau
d’équilibre, au cours de la période 1982- 2011, permet de distinguer plusieurs tendances
distinctes. Une phase de surévaluation au cours des années 1980, puis, une phase de sous-
évaluation au cours des années 1990, et enfin, une phase de surévaluation durant les années
2000, à l’exception de la Tunisie qui se trouve en fin de période très proche de l’équilibre.

Dans l'ensemble, en 2010, le dollar était encore surévalué par rapport à toutes les
monnaies de l'Asie de l’Est, à l'exception du yen qui était proche de l'équilibre. La sous-
évaluation du yuan était la plus importante. Le dollar était également surévalué par rapport à
certaines économies d'Amérique latine (Argentine, Chili et Uruguay) qui ont bénéficié des
monnaies sous-évaluées en termes réel. Le Brésil et le Mexique avaient des monnaies proches
de l'équilibre par rapport au dollar, mais légèrement surévaluées en termes réel, réduisant leur

222 
 
 

marge de manœuvre, en particulier pour le Mexique. Enfin, la Colombie et, surtout, l'Inde ont
souffert d’une surévaluation face au dollar et en termes réel.

Dans une économie mondiale de plus en plus intégrée, le niveau du taux de change
s’avère essentiel dans le processus d’ajustement et de croissance, en particulier pour les pays
émergents. L'influence de long terme des désajustements du taux de change sur l'activité
économique réelle reste une question ouverte. Il semble pourtant particulièrement intéressant
dans ce que suit de se pencher sur l'impact des désajustements monétaires sur la croissance
économique.

223 
 
 
 

Chapitre 5 
Tests de sensibilités et comparaison avec 
d’autres estimations de taux de changes 
d’équilibre 

Introduction 
 

Parallèlement à l'approche fondamentale qu'on a appliqué dans le chapitre 4, qui


cherche à déterminer le niveau du taux de change réel d'équilibre compatible avec les
équilibres externes et internes, dans ce chapitre, nous utilisons les résultats de l'approche
comportementale BEER106, qui insiste sur les déterminants macroéconomiques de long terme
du taux de change réel.

Clark et MacDonald (1999) ont développé un modèle théorique du taux de change réel
(BEER) et ont fourni une estimation de sa valeur d'équilibre pour un large panel de pays.
Selon les auteurs les variables les plus importantes qui affectent le niveau du taux de change
réel sont les termes de l'échange ( ), la position extérieure nette ( ) en pourcentage de
PIB et le ratio des productivités relatives des différents secteurs (ou de l’ensemble de
l’économie) domestiques ( ′
) et étrangers ( ′
)107. À la suite de ces premiers travaux, les
études appliquées ayant pour objet d'estimer des taux de change d'équilibre se sont
multipliées, que ce soit pour des pays industrialisés, ou en développement.

                                                            
106
Les résultats du BEER sont extraits d'un travail antérieur sur le taux de change d'équilibre sur un large
échantillon de pays développés et émergents (Béreau et Lopez et Mignon, 2009). 
107
Ce ratio peut être remplacé par le ratio des prix relatifs des biens échangés et non échangés.
 

224 
 
 

Il s'agit dans ce chapitre de reprendre les résultats des travaux de Béreau, Lopez et
Mignon, (2009) basés sur l’approche BEER, où le taux de change réel d'équilibre est
déterminé par l’estimation d’une relation à long terme entre le taux de change effectif réel et
ses fondamentaux. En ce sens, le taux de change d'équilibre est autorisé à changer au fil du
temps, reflétant l'évolution des fondamentaux économiques et des politiques nationales.

Basé sur des études précédentes, les auteures ont utilisé les développements récents de
l'économétrie de panel non stationnaire afin d'examiner les principaux déterminants de long
terme du taux de change réel pour les pays développés et en développement. Elles ont
examiné les déterminants du taux de change effectif réel suivants: la position extérieure nette,
une mesure de la productivité relative, et les termes de l'échange. On s’attend à un lien positif
entre le taux de change effectif réel et tous ces déterminants potentiels. En effet, le taux de
change effectif réel devrait s'apprécier si (i) la position des actifs extérieurs nets augmente, en
raison de l'accumulation des recettes d'intérêts nets ; (ii) les termes de l'échange suivent une
tendance à la hausse, conduisant à une amélioration de la balance commerciale; (iii) la
productivité dans le secteur des biens échangeables augmente par rapport au reste du monde,
selon l'effet Balassa-Samuelson.

Balassa, (1964) a montré que l'évolution de la productivité explique les variations


permanentes du taux de change réel. En effet, le prix relatif des biens non échangeables est
conditionné par la compétitivité internationale; la croissance de la productivité devrait générer
une inflation plus élevée dans le secteur des biens non-échangeables, et par conséquent les
prix relatifs auront tendance à augmenter plus dans les pays à forte croissance de productivité.

Les déficits continus du compte courant entrainent une dégradation continue du


qui devrait être amorti dans le futur par des surplus du compte courant. Une dépréciation du
taux de change réel contribuera à générer des surplus du compte courant, impliquant qu'une
détérioration de la position du  mène à une dépréciation du taux de change réel dans le
long terme.

Une comparaison est également faite avec d'autres travaux antèrieurs. Nos résultats
sont globalement convergents avec ceux de Cline et Williamson (2009, 2010 et 2011) avec
quelques divergences qui peuvent être expliquées par des différences au niveau de la balance
courante d’équilibre pour quelques pays.

225 
 
 

1. Les tests de sensibilité 
 

Compte tenu des incertitudes existantes dans l'estimation de l'équilibre externe et


interne et dans les mesures des élasticités des échanges, trois types de tests de sensibilité ont
été effectuées. Les tests de sensibilité sont effectuées afin d'évaluer la sensibilité des résultats
aux cibles retenues (cible du compte courant, l'équilibre interne) et à des valeurs de
paramètres (élasticités-prix). Les tests de sensibilité sont réalisés pour apprécier le degré de
dépendance des estimations de l'équilibre externe et interne et sur les paramètres du modèle
du commerce.

Les tests de sensibilité effectuées sont les suivants :

 une augmentation de la cible de la balance courante de 1% du PIB (bc);


 une augmentation de la production potentielle de 1% (ye);
 une augmentation de l'élasticité prix à l'exportation de 20% (εx);
 une augmentation de l'élasticité prix à l'importation de 20% (εm).

Tableau 23. Tests de sensibilité sur les taux de change effectifs réels (rc)

Bc ye εx εm
Korea 0.0066 0.0022 0.0014 0.0029
India 0.0542 0.0021 0.0004 0.0070
Indonesia 0.0140 0.0143 0.0146 0.0152
Malaysia 0.0030 0.0157 0.0162 0.0126
Philippines 0.0127 0.0052 0.0053 0.0063
Thailand 0.0120 0.0045 0.0043 0.0064
Argentina 0.0492 0.0169 0.0171 0.0203
Brazil 0.0365 0.0062 0.0060 0.0150
Chile 0.0202 0.0037 0.0001 0.0065
Colombia 0.0468 0.0100 0.0042 0.0110
Mexico 0.0113 0.0106 0.0046 0.0063
Uruguay 0.0209 0.0206 0.0072 0.0092
Source: calculs de l’auteur, moyenne absolue par rapport à l'évolution des résultats de la simulation de base.

226 
 
 

 La sensibilité à la production potentielle est limitée. Une augmentation de la production


potentielle et donc une augmentation de la sous-utilisation des capacités de production
conduit à une surévaluation réelle de la monnaie. Nos résultats des tests de sensibilité
montrent que les erreurs dans l'estimation des écarts de production ne perturbent pas les
résultats obtenus. Ainsi, dans le cas de la Chine, une augmentation de 1% de l'écart de
production conduit à une augmentation de moins de 1% de la sous-évaluation.

 La sensibilité à la cible du compte courant est modéré. Une augmentation de la cible du


courant compte , qui est une réduction de l'écart entre la balance courante et sa cible,
conduit à une surévaluation de la monnaie concernée. L'effet s'affaiblit à mesure que la
part des exportations au PIB et l'élasticité du compte courant au taux de change réel
augmentent.

 La sensibilité à l'élasticité-prix à l'exportation et à l'importation s'avère également être


faible. Dans l'ensemble, l'élasticité prix à l'exportation la plus élevé conduit à des faibles
variations des taux de change pour absorber la même quantité de déséquilibres des
comptes courants. Ce résultat est rassurant compte tenu des incertitudes existantes dans
l'estimation de ces paramètres.

Ces tests de sensibilité assurent que l'approche FEER fournit des résultats plutôt
robustes en dépit des incertitudes dans l'estimation de l'équilibre interne et externe et les
paramètres des équations du commerce.

2. La comparaison entre les approches FEER et BEER 

2.1. Les considérations méthodologiques


 

L'approche BEER est largement utilisée pour estimer les désajustements de change au
niveau mondial. Certains auteurs ont comparé les approches BEER et FEER dans le même
cadre théorique (Driver et Westaway, 2004, Bénassy-Quéré et al. 2009). Malgré les
différences conceptuelles, ces deux approches peuvent être considérées comme
complémentaires plutôt que substituables.

227 
 
 

  L'idée selon laquelle le FEER est un modèle entièrement normatif, qui correspond aux
valeurs désirables des facteurs fondamentaux, est une idée sujette à discussion. En effet, les
deux approches FEER et BEER sont d'abord des notions positives, dans la mesure où elles
souhaitent expliquer les variations du taux de change sur la base des facteurs économiques
observés. Elles peuvent s'élargir aux exercices normatifs selon l'hypothèse retenue de la
politique, notamment lors de la prévision, si l'on adopte une politique fiscale optimale ou
soutenable pour la prévision, le taux de change d'équilibre pourrait être un taux désirable.
Donc la différence principale entre les deux approches réside dans la temporalité, non pas
dans le caractère normatif ou positif.

Parallèlement à l'approche fondamentale qu'on a appliquée, qui cherche à déterminer


le niveau du taux de change réel d'équilibre compatible avec les équilibres externes et
internes, dans cette section, nous allons utiliser les résultats des estimations de l'approche
comportementale BEER (Béreau, Lopez et Mignon, 2009), qui insiste sur les déterminants
macroéconomiques de long terme du taux de change réel.

Cette approche introduite par Clark et MacDonald (1999) consiste à estimer une
relation à long terme entre le taux de change effectif réel et ses fondamentaux. En ce sens, les
changements du taux de change d'équilibre au fil du temps reflètent l'évolution des
fondamentaux économiques. Selon Béreau et al. (2009), les variables les plus importantes qui
affectent le niveau du taux de change réel sont les termes de l'échange, la position extérieure
nette et la productivité relative. Leurs résultats sont globalement similaires aux résultats
trouvés dans notre étude à l’exception du Brésil et de l’Inde. Néanmoins, l’ampleur des
désajustements trouvés avec l’approche FEER est nettement plus importante. Les différences
observées proviennent de l’aspect méthodologique de l’approche utilisée. Selon Bénassy-
Quéré et al. (2009), ces différences s’expliquent essentiellement par l’horizon temporel. À
long terme, le rattrapage technologique n’est pas achevé mais la position extérieure nette de
chaque pays doit se stabiliser à un niveau cohérent avec le niveau de développement et la
structure démographique de chacun. Dans ce cas, l’approche BEER semble la plus appropriée
pour évaluer les désajustements de change. L’approche FEER est le concept le plus pertinent
à moyen terme dans la mesure où on cherche à stabiliser la position extérieure nette. En dépit
de leurs différences, ces deux approches fournissent des perspectives complémentaires sur
l’évaluation du taux de change.

228 
 
 

Plus précisément, le FEER est un concept à moyen terme. Ce taux de change permet à
l'économie d’atteindre l'équilibre interne et externe simultanément. Le point essentiel est «la
façon de définir l'équilibre". On peut distinguer trois horizons temporels (court terme, moyen
terme et à long terme). Un taux de change d'équilibre est associé à chaque horizon temporel.
Ces différentes mesures de l'équilibre peuvent ne pas être égales. Le concept du FEER peut
être considéré comme un équilibre à moyen terme dans lequel le compte courant d'équilibre
est à un niveau compatible avec une éventuelle convergence de l’équilibre stock-flux (Driver
et Westaway, 2004).

En outre, le BEER est un concept à long terme. Quand un pays accumule des
excédents du compte courant, sa position extérieure nette augmente en pourcentage du PIB.
Afin de stabiliser sa position extérieure nette en pourcentage du PIB, sa monnaie doit
s’apprécier au-dessus de sa valeur d'équilibre et, par conséquent, semble être surévaluée. Dans
le long terme, le compte courant est égal à zéro et le taux de croissance de l'actif net l'étranger
en pourcentage du PIB est égal à zéro. Cet équilibre à long terme correspond à l'équilibre
stock-flux pour tous les agents de l'économie. Cet équilibre à long terme peut être atteint,
mais il peut prendre des années ou des décennies (Driver et Westaway, 2004).

En termes de coopération monétaire internationale, l'approche la plus pertinente


semble être le FEER, car il met l'accent sur les déséquilibres des comptes courants à moyen
terme. Dans ce contexte, le BEER semble être moins pertinente en raison de son horizon
temporel. En fait, les stocks d'actifs en pourcentage du PIB ne sont pas stabilisés à moyen
terme 108 , comme l'évolution des avoirs extérieurs nets dans les pays industrialisés et en
développement le confirme. Toutefois, une comparaison des estimations du BEER avec nos
propres estimations du FEER donne un éclairage intéressant. En outre, une comparaison est
également faite avec les estimations de Cline.

2.2. Comparaison entre les estimations FEER et BEER


 

La figure (17) compare les désajustements du FEER -extraits du document de travail


Aflouk et al. (2010)- et du BEER - extraits de l’étude de Béreau, Lopez et Mignon, (2009)-
pour les principaux pays industrialisés et émergents. À première vue, sauf pour les deux
                                                            
108
Cette déclaration reste vraie même dans le cas où le moyen terme est défini comme une période de cinq ou dix
ans.

229 
 
 

principaux pays, l'Inde et le Brésil, et certaines périodes spécifiques, des désajustements des
deux approches présentent des grandes similitudes. Dans l'ensemble, les désajustements du
BEER sont plus importants que ceux du FEER, ce qui est conforme à la nature d'équilibre à
long terme du BEER.

Ce premier diagnostic peut être précisé par deux indicateurs, l'écart absolu moyen
(égal à la différence moyenne entre FEER et BEER) et le coefficient de corrélation entre les
désajustements donnés par les deux approches. L'écart moyen absolu est égal à 16% pour tous
les pays, mais est plus faible pour les deux tiers d'entre eux. De même, le coefficient de
corrélation est supérieur à 0,5 pour les deux tiers des pays (tableau 24). Le FEER et le BEER
donnent des estimations plus divergentes pour les trois principaux pays émergents, Chine,
Brésil et l'Inde, mais ils sont plus convergents pour les pays industrialisés et aussi pour le
Mexique, le Chili, la Malaisie et l'Indonésie.

Tableau 24. Comparaison FEER et BEER

Ecart moyen en valeur Absolue

Au-dessous de la moyenne Au-dessus de la moyenne

Mexique, Corée, Indonésie, Argentine, Colombie,


Au-dessous 50 %
Malaisie, Chili Uruguay
Correlation

Au-dessus 50 % Philippines, Thaïlande Chine, Brésil, Inde

Source : Aflouk et al. (2010) pour le FEER et Béreau et al. (2009) pour le BEER.

Pour une meilleure compréhension des divergences entre le FEER et le BEER, il peut
être rappelé que le BEER est plutôt stable dans le long terme et, par conséquent, les
désajustements BEER sont principalement les écarts entre les taux de change réels et une
valeur moyenne. En règle générale, l'appréciation réelle au-dessus de cette valeur moyenne
conduit à une surévaluation et, inversement, la dépréciation réelle conduit à une sous-
évaluation. A l'inverse, le FEER est liée à un solde du compte courant plutôt stable. Les
désajustements du FEER reflètent principalement les écarts entre la balance courante observée

230 
 
 

et d’équilibre. En règle générale, la hausse du compte courant au-dessus de la valeur


d'équilibre conduit à une sous-évaluation et, inversement, un compte courant décroissant
conduit à une surévaluation. En conséquence, les désajustements FEER et BEER sont
compatibles lorsque le taux de change réel et le compte courant sont étroitement liés. À titre
d'illustration, nous calculons le coefficient de corrélation linéaire entre le compte courant et le
taux de change effectif réel. Lorsque la corrélation est forte, les désajustements calculés par le
FEER et le BEER suivent le même chemin.

Figure 17. La comparaison des désajustements BEER et FEER109

Japon Corée
80 80

60 60

40 40

20 20

0 0

-20 -20

-40 -40

-60 -60

-80 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


    

Chine Argentine
80 80

60 60

40 40

20 20

0 0

-20 -20

-40 -40

-60 -60

-80 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


    

                                                            
109
Les résultats du BEER sont extraits d'un travail antérieur sur le taux de change d'équilibre sur un large
échantillon de pays développés et émergents (Béreau et Lopez et Mignon, 2009).

231 
 
 

Brésil Chili
80 80
60 60
40 40
20
20
0
0
-20
-20
-40
-60 -40

-80 -60

-100 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


    

Colombie Inde
80 80

60 60

40 40

20 20

0 0

-20 -20

-40 -40

-60 -60

-80 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


    

Indonesie Malaisie
80 80

60 60

40 40

20 20

0 0

-20 -20

-40 -40

-60 -60

-80 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


    

232 
 
 

Mexique Uruguay
80 80

60 60

40 40

20 20

0 0

-20 -20

-40 -40

-60 -60

-80 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


    

Philippines Thailande
80 80

60 60

40 40

20 20

0 0

-20 -20

-40 -40

-60 -60

-80 -80
82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8 82 84 86 88 90 92 94 96 98 0 2 4 6 8

BEER FEER BEER FEER


  
Source : Aflouk et al. (2010) pour le FEER et Béreau et al. (2009) pour le BEER. 

Pour le Japon, la corrélation entre le compte courant et le taux de change effectif réel
est déconnectée pendant certaines périodes. Sans ces périodes, nous trouvons de fortes
corrélations (par exemple, 72% après 1984). Pour les pays en développement, on trouve une
corrélation aussi forte (supérieure à 50%) pour tous les pays, sauf pour le Brésil (32%), l'Inde
(49 %), l'Uruguay (39 %) et les Philippines (42%). Comme dans les pays industrialisés, il y a
des périodes pendant lesquelles ces deux variables semblent être déconnectées (zones d'ombre
sur la figure18). Dans ces périodes les désajustements calculés par le FEER et le BEER
suivent des tendances différentes.

Pour le Japon et la Chine, nous avons choisi de calculer la corrélation linéaire entre le
taux de change effectif réel en t et le compte courant en t+1 en raison d'une inertie dans le
compte courant de ces pays. Le compte courant semble réagir plus rapidement avec le taux de

233 
 
 

change effectif réel. Pour les pays émergents, nous calculons la corrélation linéaire entre le
taux de change effectif réel en t et le compte courant en t en raison d'une faible inertie.

Figure 18. La corrélation entre le taux de change effectif réel et le compte courant

Corrélation
0.90
0.80
0.70
0.60
0.50
0.40
0.30
0.20
0.10
0.00
United Kingdom

Uruguay
China

India

Indonesia

Philippines

Thailand
Japan

Euro area

Brazil
Argentina

Chile

Colombia

Korea
Mexico
United States

Malaysia
REER and CUR REER and CUR on a subsample

Source : Aflouk et al. 2010 (les sous échantillons sont les suivants: après 1984 pour le Japon, après 1996 pour la
Chine)

Ces questions peuvent être examinées plus en détail pour certains pays. Tout d'abord,
au Brésil la divergence entre le FEER et le BEER est particulièrement frappante. Avec
l'approche FEER la monnaie brésilienne est apparue sous-évaluée entre 1983 et 1994 en
cohérence avec la balance courante proche de 0% du PIB, mais largement au-dessus de la
valeur d'équilibre. Le BEER donne inversement une forte surévaluation entre 1987 et 1994 en
raison de la forte appréciation réelle observée de 1987 à 1990, mais qui ne semble pas avoir
un impact sur la balance courante. Cela pourrait être lié à l'amélioration structurelle de
l'économie brésilienne au cours de cette période reflétant une appréciation réelle du taux de
change d'équilibre.

À l'inverse au cours de la période 1995-2002 le FEER donne une surévaluation


croissante à la suite du Plan Real, compatible avec les déficits courants énormes. Au contraire,
le BEER donne une sous-évaluation croissante, surtout après 1998, simplement en raison de la
dépréciation réelle. Là encore, cette dépréciation semble avoir un impact positif, avec un très

234 
 
 

long retard en raison des effets de la politique de libéralisation et le recours à des capitaux
étrangers. Ces évolutions seraient reflétées dans la dépréciation réelle du taux de change
d'équilibre.

Deuxièmement, l'Inde est un autre cas de grande déconnexion entre le FEER et le


BEER. Le BEER oppose deux périodes beaucoup plus contrastées, la première de 1982 à
1990 avec une roupie surévaluée, la seconde de 1991 à 2007 avec une roupie sous-évaluée.
Ceci est simplement lié à la forte dépréciation réelle de 1988 à 1994 et qui était suivie d'une
stabilisation. Ces deux phases de suret de sous-évaluation selon le BEER semblent plutôt être
irréalistes car elles sont en déconnection avec les grandes fluctuations de la balance courante
au cours de ces périodes.

Troisièmement, la Chine est le dernier cas avec quelques similitudes avec le cas indien
en ce qui concerne le diagnostic du BEER. Selon le BEER le yuan était surévalué de 1982 à
1990 en termes réel et cette surévaluation a diminué et a été remplacé après 1992 par une
sous-évaluation importante et permanente, grâce à la dépréciation réelle opérée au cours de la
période de transition. Ce diagnostic ne semble pas être cohérent avec l'alternance des périodes
d'excédents et de déficits courants au cours des années 1980 et au début des années 1990. De
même, la sous-évaluation stable et forte ne reflète pas l'évolution contrastée de la balance
courante à partir des années 1990 aux années 2000, notablement avec les conséquences de la
crise asiatique et la hausse des excédents à la fin des années 2000.

En résumé, pour ces trois principaux pays émergents, l'approche BEER donne une
vision trop simplifiée du taux de change d'équilibre, fondée sur une simple valeur moyenne,
qui n'intègre pas suffisamment les changements structurels qui peuvent survenir. Ces
changements structurels sont plus pris en compte par l'approche FEER. En conséquence, et
pour cette raison, cette approche semble être plus appropriée.

2.3. Comparaison avec les estimations du Cline


 

En dépit de quelques différences dans la méthodologie,  nous comparons nos


estimations avec ceux de Cline et Williamson. Les auteurs utilisent une approche FEER basée
sur la méthode d’inversion des matrices symétriques (SMIM) décrite dans Cline (2008). Si
dans les deux cas le cadre du FEER est utilisé, le modèle de Cline à 35 pays est basé sur une

235 
 
 

simple analyse du commerce extérieur pour chaque pays et non une approche structurelle du
compte courant d’équilibre. Il est simplement supposé que les déséquilibres externes ne
doivent pas dépasser 3% du PIB (en valeur absolue) dans le moyen terme, ce qui permet de
construire un scénario de cibles du compte courant pour les pays non- exportateurs de pétrole. 

Tableau 25. La comparaison avec les estimations de Cline et Williamson (en %)

Taux de change Effectif Réel Taux de Change Nominal Bilatéral


Nos Résultats Résultats de Cline Nos Résultats Résultats de Cline
2009 2010 2011 2009 2010 2011 2009 2010 2011 2009 2010 2011
CHN 7.6 7.2 -1.1 21.4 13.5 16.0 25.4 29.2 23.0 40.2 24.2 28.5
IND -4.0 -8.3 -4.2 -4.9 -1.8 -1.7 -1.7 -3.8 3.1 14.2 7.7 8.2
BRA -5.1 -13.4 -6.0 -0.7 -5.9 -10.1 -2.9 -9.1 0.8 14.7 0 -3.9
JPN -5.4 3.6 -2.2 -1.2 -2 -1.8 11.1 23.4 19.3 19.2 8.8 14.6
COR 6.0 1.5 2.4 -0.3 -1.8 -1.6 13.1 9.2 12.3 21.1 9.5 11
INS 29.1 -0.5 -4.0 -0.4 -2 -1.8 39.8 7.7 5.3 22.8 14.6 10.4
MYS 4.0 0.3 0.5 18 12.5 12.4 15.9 8.1 10.1 39.6 29 28.7
PHI 13.6 6.9 2.4 -0.2 -1.7 -1.5 22.2 16.2 11.1 21.3 11.8 13.1
THA 9.7 1.7 1.2 -0.1 -2 -1.8 23.9 12.0 13.3 21.3 10.8 11.7
ARG 10.7 -2 .8 -7.3 -0.4 -2.9 -2.7 16.3 3.8 -0.1 15.3 1.8 1.4
CHI 11.9 8.5 1.4 -6.1 -2.6 -2.1 18.9 17.8 9.5 9.8 3.3 4.0
COL -7.2 -23.4 -11.5 -0.6 -2.3 -2.1 -5.8 -22.4 -6.3 10.8 1.5 1.7
MEX 2.1 -3.2 -0.6 -0.6 -0.8 -0.7 4.1 -1.9 2.5 4.4 1.3 1.5
TRK -8.8 -23.2 -32.8 -0.5 -11.7 -29.1 -8.6 -24.6 -37.1 17.4 -5.8 -23.1
Source: Cline et Williamson, 2009, 2010; 2011 calculs de l’auteur) (Un chiffre positif indique une sous-
évaluation. Inversement, un nombre négatif indique une surévaluation).

Nos résultats sont proches de ceux de Cline et Williamson, en termes effectif réel,
avec une certaine divergence par rapport au dollar en 2009 (tableau 25). La surévaluation de
la monnaie indienne en termes effectif réel est restée faible en 2009, 2010 et 2011, ce qui peut
s'expliquer par un déficit limité du compte courant, à proximité de sa valeur d'équilibre. Les
résultats concernant le peso chilien et colombien sont plus divergents en termes réels et par
rapport au dollar. Pour le Chili, nos résultats montrent une phase de sous-évaluation en 2009
et 2010 et une faible sous-évaluation en 2011. Les résultats de Cline et Williamson sur la
même période montrent des faibles surévaluations en termes réels. Nos estimations donnent
des monnaies plus surévaluées pour la Colombie relativement à ceux de Cline et Williamson.
Pour ce pays, Cline et Williamson utilise un objectif de -3% du PIB. A l'inverse, nos
estimations économétriques donnent une cible proche -1%, ce qui produit de monnaies plus

236 
 
 

surévaluées puisque la cible du compte courant est relativement plus élevée. Les écarts du
désajustement effectif réel avec les résultats de Cline et Williamson sont plus marqués en
2009.
Dans l’ensemble, les résultats des estimations de 2010 et 2011 sont très proches pour
les pays émergents. Ils sont globalement convergents, sur toute la période, à quelques
exceptions près qui peuvent être expliquées par des différences dans les cibles du compte
courant.

Conclusion 
 

Il existe une importante littérature sur les théories du taux de change d’équilibre. Dans
ce chapitre, nous avons examiné le concept de taux de change réel d'équilibre selon deux
approches FEER et BEER. Ces modèles impliquent que les taux de change réel sont
déterminés comme une variable endogène par des facteurs fondamentaux liés à l'économie
réelle. Les deux approches permettent de dégager une dynamique possible du taux de change
sur le moyen et le long terme.

Dans ce chapitre, nous nous sommes focalisées sur les deux théories les plus connues:
le BEER et le FEER. Nous avons montré que, malgré les différences conceptuelles, ces deux
approches peuvent être considérées comme complémentaires plutôt que substituables.

Le travail a souligné la distinction entre l’équilibre du taux de change du moyen et du


long terme. Il a fait valoir que le «désajustement» qui respect ces différents concepts
d'équilibre peut avoir des implications politiques très différentes. Dans ces circonstances, les
implications politiques dépendent de la source et la nature du choc perçu sur le taux de
change. Délibérément, les désajustements du taux de change peuvent être définis de
différentes façons, et pour toute définition donnée, le lien entre le désajustement et la réponse
politique n'est pas mécanique.

Dans la dernière section, une comparaison est également faite avec des estimations de
Cline. Pour les pays industrialisés, nos résultats sont proches de ceux de Cline, en termes
effectif réel, avec une certaine divergence par rapport au dollar en 2009. Pour les pays
émergents, les résultats sont globalement convergents, sur toute la période, à quelques

237 
 
 

exceptions près qui peuvent être expliquées par des différences dans les objectifs du compte
courant.

Dans tous les cas, le message essentiel ici est qu’il n’y a pas à choisir entre les
différentes approches, mais qu’on peut les imbriquer dans une perspective unique sur
l’évolution des taux de change cohérente avec les « fondamentaux ».Cette description n'est
pas destinée à fournir une recommandation de la meilleure approche. Il s'agit plutôt de
souligner que les différentes mesures du taux de change réel d'équilibre peuvent être
conceptuellement distinctes.

 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

238 
 
 
 

PARTIE III 
 
DÉSAJUSTEMENT DE CHANGE ET 
CROISSANCE ÉCONOMIQUE 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

239 
 
 
 

Chapitre 6 
Désajustement et Croissance 
Économique : Revue de la Littérature 

Introduction 
 

Les mauvaises performances économiques dans certaines régions du monde en


développement, alors que d’autres connaissent des résultats remarquables, soulèvent plusieurs
interrogations sur les origines de ces divergences. Cette hétérogénéité questionne à nouveau
sur les déterminants théoriques et empiriques de la croissance économique. Certaines études
ont souligné l’importance de la politique de change comme déterminant des performances
« impressionnantes »ces dernières années de certains pays asiatiques. En outre la politique de
change fait l’objet d’une attention considérable dans les discussions des décideurs politiques,
notamment au cours des dernières réunions du G20. Cette politique est considérée comme une
source importante des déséquilibres macroéconomiques. Elle est également une condition
cruciale pour l’amélioration des performances économiques.

Plusieurs études économétriques faites sur des économies développées et en


développement ont tenté d’identifier la relation entre la croissance économique et les
évolutions du taux de change. De nombreuses études ont mesuré les effets de la surévaluation
du change sur le taux de croissance (Collins et Razin, 1997 ; Easterly, 2001 ;Loayza et al. ,
2004 ; Magyari, 2008; Béreau et al. 2009). D’autres ont étudié le rôle des politiques de change
dans la stratégie de développement des pays Asiatiques. La plupart d’entre elles concluent à
l’existence de corrélations significatives entre les désajustements de change et la croissance.
En effet, Bresser-Pereira (2004) et Dooley et al. (2005) ont montré que les monnaies
compétitives des pays asiatiques ont stimulé l’investissement et par conséquence les taux de
croissance régionaux. En revanche, Frenkel (2004) a conclu que les surévaluations du taux de
change sont parmi les principales causes des crises et de la stagnation de la croissance en
Amérique Latine au cours des années 1980 et 1990.Ce résultat sous-tend l’existence d’une
relation importante entre la croissance économique et le niveau du taux de change réel.

240 
 
 

Pour étudier la relation « désajustements-croissance», plusieurs travaux s’appuient sur


les calculs de la PPA pour mesurer les désajustements de change (Easterly, 2001; Hausman et
al. 2004; Rodrik, 2008). D’autres études se basent sur les modèles d’équilibre général (Loayza
et al. 2004; Aguirre et Calderón, 2005). Toutefois, l’approche de la PPA ne permet pas de
prendre en compte les spécificités structurelles des pays en développement. La PPA n'est
pertinente qu’à très long terme (Rogoff (1996)) et ne donne aucune indication sur les
ajustements du taux de change qui seraient compatible avec les déséquilibres mondiaux. Le
modèle d’équilibre général est une approche complexe qui suppose la modélisation de
l’ensemble de l’économie.

La plupart des études récentes sur cette question se basent sur des approches (BEER)
pour estimer les désajustements du taux de change (Magyari (2008); Béreau et al, 2009;
Sallenave, 2010).

Ce chapitre effectue une revue de littérature empirique sur les liens entre
désajustements de change et croissance économique. Parmi les études empiriques portant sur
cette question, de nombreux articles ont trouvé un lien négatif entre les désajustements
monétaires et la croissance économique dans les pays en développement. C'est le cas de
Ghura et Grennes (1993) montrant une corrélation négative entre les désajustements du taux
de change et les performances économiques des 33 pays d’Afrique sub-saharienne. Comme
l’a remarqué Cottani et al (1990), la persistance des désajustements du taux de change a
tendance à ralentir le développement de l'agriculture dans les pays africains, conduisant à une
réduction de leur approvisionnement alimentaire. Dans la même ligné, Domac et Shabsigh
(1999), Benaroya et Janci (1999), Acemoglu et al (2002), Loayza et al. (2004), Toulaboe
(2006), ou de Gala et Lucinda (2006), ont obtenu des résultats similaires sur des panels
d’économies émergentes. Aguirre et Calderón (2005) supposent des comportements
différenciés possibles des pays en fonction de la taille et/ou du signe de leurs désajustements
monétaires. Pour tenir compte de cette possibilité, ils estiment une équation de croissance
standard sur un large panel de pays émergents. Ils introduisent des variables d'interaction pour
capturer les comportements potentiels asymétriques des pays en fonction de leur monnaie face
à une sur-ou sous-évaluation. Ils montrent que plus les désajustements du taux de change sont
importants plus l'impact sur la croissance est négatif. En revanche, les sous-évaluations de

241 
 
 

taille moyenne peuvent être propices à la croissance. Alors que les surévaluations seront
systématiquement de produire une perte du bien-être.

En plus de l'introduction, la section suivante passe en revue la littérature théorique et


empirique sur le lien entre désajustements du taux de change et croissance économique. Elle
traite les études économétriques antérieures basées sur quatre méthodes de mesure des
désajustements du taux de change: basés sur les indices de Dollar, sur l’approche de la PPA,
sur des modèles ad hoc, sur l’approche du BEER. La dernière section apporte quelques brèves
conclusions

1. Les désajustements du taux de change réel et croissance économique 
 

Très peu de travaux théoriques ont abordé la question des désajustements du taux de
change comme déterminant de la croissance économique. Les multiples études empiriques
menées ces dernières années témoignent du rôle central du comportement du taux de change
dans la performance économique, et ce essentiellement dans les économies émergentes. Les
pays en développement et les pays à marché émergent sont toujours à la recherche d’un
modèle de croissance le plus adéquat pour entamer leurs processus de rattrapage.

1.1. Les désajustements basés sur les indices de Dollar


 

La plupart des travaux sur la croissance et les désajustements du taux de change,


mesurés par les écarts à la PPA, sont basés sur la méthodologie d'estimation des déséquilibre
du taux de change de Dollar (1992) (Benaroya et Janci 1999, Easterly 2001, Fajnzylber et al
2002, Acemoglu, 2002). Dollar (1992) utilise les estimations de la PPA de Heston et
Summers110 pour calculer les niveaux relatifs des prix internationaux (NRP) pour 95 pays en
développement de 1976 jusqu'à 1985. L'auteur compare les prix locaux, mesurés en dollars
courants, en utilisant le taux de change nominal, avec les prix en dollars des États-Unis. Si les
prix sont les mêmes, le taux de change est dit être dans une position neutre. Si les prix sont
plus élevés (plus bas) il pourrait y avoir une certaine surévaluation (sous-évaluation). Comme
mentionné par Dollar, ces estimations doivent tenir compte du fait que les prix des biens non

                                                            
110
La base de données de Summers-Heston, (Penn World Table), est le fondement de la recherche empirique sur
la croissance depuis le milieu des années 1980. L'ensemble de données est discutée dans Heston et Summers
(1996), et est décrit plus en détail dans Summers et Heston (1988, 1991).

242 
 
 

échangeables dans les pays pauvres tendent à être plus bas en raison de leurs salaires plus
faibles. Ainsi, la surévaluation ou la sous-évaluation doit être analysée en termes de niveau
relatif du revenu par habitant.

Selon l’auteur, une relation positive entre le revenu par habitant et les niveaux relatifs
du prix est attendue. En augmentant les coûts de production en termes de salaires, la hausse
des prix des biens non échangeables dans les pays développés fait que les niveaux relatifs des
prix internationaux entre les pays (niveau de prix relatif) sont supérieurs dans les pays
développés.

Dollar (1992) tente de capter cette différence des prix relatifs basée sur une analyse
des dotations relatives des facteurs dans les différents pays. Comme une mesure directe de
dotations est pratiquement impossible, l'auteur opte pour l'utilisation du PIB réel par habitant
(mesuré en PPA) comme proxy pour mesurer les dotations relatives des facteurs. Le PIB par
habitant représente la disponibilité des facteurs de production, notamment le capital, pour
chaque individu d'un pays déterminé à une date donnée. Plus le PIB par habitant est faible,
plus la main-d'œuvre est abondante et plus le stock de capital est rare. En régressant les
niveaux de prix relatifs sur la croissance du PIB réel par habitant (mesuré en PPA), l'auteur
constate des niveaux de prix "adéquate" pour chaque pays, étant donné son niveau de revenu
par habitant. En effet, plus le PIB réel est élevé, plus le niveau relatif de prix est élevé et plus
le taux de change devrait s’apprécier. Une comparaison entre les niveaux de prix estimés et
observés se traduit par une mesure de distorsion comparée à l'indice de référence américain.
Selon l'auteur, les niveaux excessivement élevés de prix par rapport au prix international
signifie, toutes choses égales par ailleurs, le protectionnisme ou la surévaluation.

Les indices sont la moyenne de la période 1976-1985 qui, selon l'auteur, serait capable
d'annuler les variations à court terme, et donc s’approcher de la position d'équilibre à long
terme. Les valeurs supérieures à 0 représentent la surévaluation par rapport au prix en PPA du
panier considéré et en dessous de 0 représentent la sous-évaluation. Selon l'auteur, les
résultats s’ajustent de manière raisonnable, concernant les études connues pour ces pays.

Dollar soutient que les pays en développement les plus ouverts au commerce extérieur,
ont tendance à avoir plus de croissance. Il analyse 95 pays en développement dans la période
1976-1985 en se basant sur un indice "d’ouverture vers l'extérieur", construit avec des

243 
 
 

comparaisons de la PPA. Il conclut que les pays les plus orientés vers l'extérieur, enregistrent
un taux de croissance par habitant plus élevé. Selon un classement des pays en trois groupes,
l’Amérique latine, l’Afrique et l’Asie, il démontre que le groupe des pays d’Asie, bien connu
pour leur stratégie de développement réussie, est plus ouvert vers l'extérieur que les pays
africains ou latino-américains. En se basant sur les mesures de volatilité et la comparaison des
prix internationaux, Dollar (1992) montre que les monnaies les plus dépréciées sont associées
à des taux de croissance par habitant plus élevé.

Dans les même travaux, Dollar (1992) trouve que si les pays latino-américains et
africains auraient adopté les mêmes politiques du taux de change que les pays asiatiques, leurs
taux de croissance auraient être, respectivement en moyenne de1.5% et 2.1% plus élevé de
1976 à 1985. Dollar mentionne les gains de productivité potentiels provenant du secteur non
échangeable traditionnel, comme une explication possible des résultats empiriques. L'auteur
procède par une analyse purement empirique, consacrant peu d’intérêt aux discussions
théoriques. Parmi les arguments théoriques présentés, l'auteur souligne le dynamisme du
secteur des biens échangeables et l’importance pour la croissance économique des externalités
positives apportées par les exportations. Selon Dollar, la surévaluation des monnaies serait
également associée à un protectionnisme commercial excessif. D'autres auteurs sont en
désaccord avec cette interprétation. Rodrik (1994) par exemple, qualifie le travail de Dollar de
simple indice d'appréciation de change plutôt qu'une mesure adéquate du protectionnisme.

Benaroya et Janci (1999) se basent également sur les écarts à la PPA comme des
mesures des désajustements. Ils trouvent des résultats en conformité avec les travaux de
Dollar (1992). Ils s’appuient sur une version étendue du modèle de Balassa-Samuelson (1964)
et trouvent des corrélations significatives entre les niveaux de taux de change et le taux de
croissance. Selon les auteurs, les pays qui connaissent une sous-évaluation relative, comparée
aux règles des effets Balassa-Samuelson (plus le revenu par habitant est élevé, plus la
monnaie est appréciée), ont tendance à avoir une hausse des exportations et des taux de
croissance par habitant plus élevé (Benaroya et Janci 1999).

Se basant sur le travail de Dollar (1992), Easterly (2001) a construit une série du taux
de change réels à partir de 1960 jusqu'en 1999 pour les pays développés et en développement.
Il a appliqué, d'abord, la méthode traditionnelle de calcul des taux de change réel: "(IPC
domestique)" / (taux de change domestique par rapport au dollar américain par * IPC

244 
 
 

américain). Pour rendre la série des différents pays relativement comparables, il centre ses
résultats sous forme d’indices en utilisant les valeurs trouvées par Dollar (1992). Pour chaque
pays, l’auteur a créé ses séries des moyennes pour la période 1976-1985 égales au travail de
Dollar (1992).

Easterly (2001) analyse la croissance des pays en développement à partir de 1980


jusqu'en 1998. Il montre que malgré les réformes des années 1980 et 1990, les taux de
croissance observés ont été moins forts que prévus et plus faibles que dans les années 1960 et
1970. Selon Easterly, les niveaux élevés du taux d'intérêt et le fardeau de la dette seraient à
l’origine du ralentissement de la croissance dans les pays de l'OCDE. Dans ces analyses, il
utilise plusieurs variables de la littérature classique, tels que: le PIB par habitant initial, le taux
de scolarisation, les infrastructures et la stabilité des prix. Les résultats tendent à confirmer les
résultats attendus de la littérature, où une meilleure éducation et des infrastructures
contribuent à la croissance alors que les taux d'inflation élevés ont tendance à être un obstacle
à la croissance. La nouveauté importante de son travail est l’utilisation de la longue série de
taux de change réels pour les pays développés et en développement en se basant sur la
méthodologie de Dollar (1992). Easterly (2001) souligne aussi les corrélations négatives entre
la surévaluation du taux de change et le taux de croissance par habitant.

Fajnzylber et al. (2004), ont tenté d’expliquer la performance de la croissance


économique dans les pays d’Amérique latine et des Caraïbes sur la période 1961 à 1999. Ils
ont inclus un indice de surévaluation du taux de change comme déterminant de la croissance.
La spécification de la variable surévaluation du taux de change réel est inspirée des études
précédentes (Dollar, 1992, et Easterly, 2001), basées sur la mesure de la PPA. Les auteurs ont
travaillé avec des périodes de temps relativement courtes, en moyenne de 5 ou 10 ans. Dans
cette étude, quatre méthodes différentes ont été appliquées sur le même échantillon et les
mêmes variables explicatives. La première est l'estimateur MCO pooled, qui ignore la
présence d'effets spécifiques aux pays et traite toutes les variables comme exogènes. La
deuxième est l'estimateur des MCO within, qui avilit toutes les variables en utilisant les
moyennes individuelles correspondantes avant d’appliquer la méthode des MCO. Cette
méthode élimine les effets spécifiques aux pays, mais ignore l'endogénéité conjointe des
variables explicatives (y compris le niveau initial du revenu). La troisième méthode est
l'estimateur des GMM en niveaux, qui utilise des instruments pour contrôler l'endogénéité
conjointe, mais qui ignore les effets spécifiques à chaque pays. Le quatrième est l'estimateur

245 
 
 

des GMM en système qui prend en compte les effets propres au pays ainsi que l'endogénéité
conjointe. Ils ont utilisé la méthode des Moments généralisée (GMM) en système développée
pour des modèles dynamiques en données de panel. Ces méthodes ont été introduites par
Holtz-Eakin, Newey et Rosen (1990), Arellano et Bond (1991), et Arellano et Bover (1995).

Dans cette analyse économétrique, les auteurs ont suivi la littérature sur la croissance
endogène, qui cherche à lier le taux la croissance économique d'un pays à des variables
économiques, politiques et sociales en utilisant un large échantillon de pays sur une période
donnée. Le modèle estimé est utilisé d’abord pour examiner les changements du taux de
croissance pour chaque pays et examiner ensuite si ses performances ont été proches des
valeurs attendues.

Fajnzylber et al. (2004) ont employé une grande variété de variables économiques et
sociales qui peuvent être proposées comme des déterminants de la croissance économique. Ils
se sont concentrés sur les variables qui ont reçu le plus d'attention dans la littérature
académique et les milieux politiques. Ces variables peuvent être divisées en cinq groupes: la
convergence conditionnelle, la réversion cyclique, les politiques structurelles et
institutionnelles, les politiques de stabilisation, et les conditions extérieures.

À l’issue des quatre estimations, Fajnzylber et al. (2004) ont conclu qu’à l'exception
de la variable gouvernance, toutes les variables explicatives ont des coefficients de même
signe. La signification statistique et la taille estimée de la plupart des variables sont également
remarquablement similaires dans les méthodes d'estimation. Pour les auteurs, ces pays ont été
en partie motivés par la conviction que les vigoureuses réformes orientées vers le marché
génèrent une forte croissance économique. Par conséquent, le succès des réformes est jugé par
l'amélioration de la croissance qui a suivi dans les années 1990. En effet, ils montrent que
cette amélioration aurait pu être attendue des changements des politiques et d'autres
déterminants au cours des années 1980 et 1990. Pour les pays d’Amérique Latine et des
Caraïbes, la contribution des politiques structurelles à la croissance a été positive dans les
années 1990 comparée aux années 1980. Pour certains pays, la contribution des politiques de
stabilisation a également été positive. Pour la plupart des pays qui ont suivi des réformes, la
contribution à la croissance due à des améliorations dans les politiques structurelles et de
stabilisation varie entre 2,5 et 3%.

246 
 
 

Concernant l’indice de surévaluation, ils ont montré que la surévaluation du taux de


change réel a également un impact négatif sur la croissance économique. Un taux de change
surévalué produit une mauvaise allocation des ressources au détriment des secteurs
exportateurs. Par ailleurs, la surévaluation du taux de change réel génère un risque élevé des
crises de la balance des paiements. Ces crises sont suivies par une baisse importante et
durable de l'activité économique réelle. De même, ils constatent que la fréquence des crises
bancaires systémiques a un effet négatif et important sur la croissance économique. Les pays
qui connaissent une crise bancaire s’étalant sur une période de cinq ans souffrent d'un
ralentissement du taux de croissance annuel de près de 3 %.

Les auteurs expliquent que la faible croissance peut aussi être due à l'insuffisance des
réformes structurelles (faible ouverture commerciale), aux politiques de stabilisation
inappropriées (la surévaluation du taux de change), et encore aux conditions internationales
négatives (ralentissement de la croissance dans les pays industrialisés). Pour les pays
d’Amérique latine et des Caraïbes, les politiques de stabilisation auraient un rôle,
principalement par la réduction de la volatilité macroéconomique. Ce qui rendrait la
croissance plus élevée de plus de 0,2 %.

Pour étudier la relation entre les politiques macroéconomiques et la volatilité


économique, Acemoglu et al (2002) ont construit une mesure simple de la volatilité de ces
pays. Cette mesure est représentée par l'écart type du taux de croissance de la production par
habitant. En plus de la volatilité, ils ont étudié une mesure de "grandes crises". Dans ce but, ils
ont calculé la plus forte baisse de la production pour tous les pays, entre 1970 et 1997, comme
indicateur de la sévérité de la crise la plus importante. Enfin, ils ont examiné la croissance
moyenne comme mesure de la performance économique globale. Ils ont expérimenté
différentes mesures de la politique macroéconomique. Dans leur étude, ils rapportent les
résultats en utilisant trois différentes mesures qui semblent être les plus efficaces (c'est à dire,
ils ont l'effet le plus robuste sur leurs mesures de la performance économique et de la
volatilité). Ces mesures sont la taille moyenne des administrations publiques (mesurée par la
consommation publique par rapport au PIB), le taux moyen de l'inflation (en log), et une
mesure de la surévaluation du taux de change. L’indicateur de la surévaluation du taux de
change est obtenu à partir des travaux d’Easterly et Levine (2002), qui prolongent les données
de Dollar (1992).

247 
 
 

Les résultats de ces études montrent une relation bi-variée, d’une part entre les
variables macroéconomiques et la volatilité économique, d’autre part entre les crises et la
croissance. Selon les auteurs, dans tous les cas, les relations attendues sont bien vérifiés. Les
pays avec des secteurs d’administrations publiques importants sont plus volatils et ont connu
des crises plus graves. Ils connaissent également des taux de croissance, en moyenne, plus
faibles. La même chose est vraie pour les pays à forte inflation et avec des taux de change
surévalués.

Acemoglu et al (2002) ont développé l'argument selon lequel la cause fondamentale de


l'instabilité est d'ordre institutionnel. Dans un travail sur les institutions macroéconomiques et
la croissance, ils ne rejettent pas les effets réels des niveaux de taux de change sur les
variations des taux de croissance par habitant. Bien que, l'une des principales conclusions de
l'étude souligne l'importance des institutions au lieu de variables macroéconomique comme
cause du développement économique, les taux de change réels apparaissent toujours très
significatifs. La seule variable macroéconomique qui semble jouer un rôle important est la
surévaluation du taux de change réel. La surévaluation réelle est utilisée comme une méthode
d’expropriation ou de redistribution. Ainsi, le taux de change surévalué est souvent
insoutenable, et peut conduire naturellement à des crises économiques.

Selon Acemoglu et al (2002) la vision macroéconomique standard lie la volatilité


économique aux mauvaises politiques macroéconomiques. Le grand secteur des
administrations publiques et les déficits budgétaires, l’inflation élevée et les désajustements
du taux de change se traduisent par des crises macroéconomiques. En concordance avec cette
vision, beaucoup de macro-économistes voient une relation de causalité entre l’amélioration
de la conduite de la politique monétaire des années 1980 et 1990 et la plus grande stabilité de
la croissance américaine, tout au moins jusqu’à la crise de 2007-2008.

1.2. Les désajustements basés sur l’approche de la PPA


 

En se basant sur la méthode de la PPA pour mesurer les écarts de taux de change réel,
Domaç et Shabsigh (1999); Gala et Lucinda (2006); Rodrik (2008) et Berg et Miao (2010)
étudient la relation entre les désajustements de change et la croissance économique.

248 
 
 

Domaç et Shabsigh (1999) ont examiné l'impact des désajustements du taux de change
réel sur la croissance. Pour s’assurer de la robustesse de leur investigation empirique, les
auteurs ont fait appel à trois mesures du désajustement du taux de change réel. La première
mesure est basée sur la théorie de la PPA: les désajustements du taux de change réel sont
calculés comme la déviation du taux de change réel observé par rapport à certaines années de
référence dans lesquelles le taux de change réel est censé être en équilibre. La deuxième
mesure des désajustements utilise la prime du marché noir du taux de change nominal par
rapport au taux officiel comme un proxy pour les désajustements du taux de change réel. La
troisième mesure est basée sur un modèle formel du taux de change d'équilibre développé par
Edwards (1989). Cette mesure permet au taux de change réel d'équilibre de changer
continuellement reflétant ainsi l'évolution des fondamentaux économiques et
macroéconomiques ainsi que les politiques commerciales. Toutefois, toutes les trois mesures
des désajustements du taux de change réel sont conceptuellement différentes et elles
pourraient potentiellement se déplacer dans des directions opposées.

Avant une analyse plus détaillée, les auteurs ont montré à partir d’une simple étude
statistique, une relation négative entre le taux de croissance par habitant et la mesure des
désajustements du taux de change réel. Selon les auteurs, bien que cela ne suggère pas un lien
de causalité, le résultat est intéressant car il confirme les attentes théoriques. Ensuite, ils ont
étudié empiriquement l'impact des désajustements du taux de change réel sur la croissance
économique en introduisant d'autres variables: la variabilité du taux de change réel,
l'investissement par rapport au PIB, le taux de croissance des échanges commerciaux et la
croissance démographique. Ils ont estimé le modèle en utilisant la méthode des triples
moindres carrés (3SLS) itérative sur un système d'équations.

Les résultats empiriques de cette étude soulignent que la croissance est affectée
négativement par l'ensemble des mesures des désajustements du taux de change réel. Ils
confirment les effets néfastes de la mauvaise gestion économique sur la croissance
économique prédite par les modèles de croissance endogène. Les auteurs suggèrent que l'effet
négatif de mesure du désajustement du taux de change réel sur la croissance est nettement
plus important que les autres déterminants. D'autres facteurs influencent également la
croissance. Plus précisément, la croissance du capital social (mesurée par l'investissement par
rapport au PIB) et la population ont les signes théoriques attendus. Les résultats indiquent que
le taux de croissance du commerce n'a pas d'effet statistiquement significatif sur la croissance.

249 
 
 

Les données empiriques suggèrent que la baisse du taux de croissance économique dans les
pays concernés pendant la période étudiée peut être attribuée plus à la mauvaise gestion
économique qu’à la diminution des termes de l'échange.

Domaç et Shabsigh (1999) expliquent que pendant les années 1970 et 1980, les quatre
pays arabes considérés dans cette étude -Egypte, Jordanie, Maroc et Tunisie- ont poursuivi
des politiques de taux de change qui ont entraîné, dans certaines périodes, un taux de change
surévalué. Ces politiques ont été motivées par la nécessité de protéger la position de la
balance extérieure des coûts de politiques domestiques expansionnistes insoutenables (et par
fois des chocs externes). De tels désajustements du taux de change ont une incidence
défavorable sur la croissance économique. Cet effet résulte de la détérioration de la
compétitivité extérieure et de la mauvaise allocation des ressources nationales.

Les résultats empiriques ont souligné l'impact négatif des désajustements du taux de
change réel, découlant des politiques de taux de change dans ces pays, sur leur croissance
économique au cours de la période1970-1980. Les politiques de libéralisation et de réformes
économiques initiées par ces pays à la fin des années 1980 et au début des années 1990 ont
abouti à des alignements majeurs dans leur taux de change réel vers un équilibre plus durable,
améliorant ainsi les perspectives de croissance de ces pays.

À la suite des travaux précédents, l’étude de Gala et Lucinda (2006) traite la relation
entre la croissance et la surévaluation du taux de change réel à partir de données de panel.
L’étude porte sur un échantillon de 58 pays en développement de 1960 à 1999 en utilisant les
mesures de la PPA. Les auteurs ont aussi utilisé un nouvel indice de la surévaluation qui
prend en compte les variations de revenu réel par habitant. Par conséquent, ils ont ajusté leurs
estimations du taux de change par l’effet Balassa-Samuelson. L'échantillon comprend 22 pays
d'Afrique, 19 d'Amérique latine et des Caraïbes, 14 d'Asie et du Moyen-Orient et 2 en
provenance d'Europe, dont le revenu moyen par habitant est entre environ 500 et 7000 dollars
américains en PPA.

Les variables de contrôle choisis pour l'analyse économétrique peuvent être classées
en deux groupes: structurelles et macroéconomiques. Le premier groupe représente les
variables bien connues de la littérature de la croissance économique et comprend le capital
humain, les infrastructures physiques et institutionnelles. Le second groupe rassemble des

250 
 
 

variables de la littérature plus récente, qui tentent de mettre en corrélation des variables à
court terme avec des résultats économiques de long terme. Dans ce groupe, les auteurs ont
sélectionné le taux d'inflation, le taux d’utilisation des capacités -ou l’output gap- la
surévaluation du taux de change et les chocs des termes de l’échange.

Les modèles sont d'abord estimés en utilisant des moyennes en coupe transversale
pour toute la période. Ensuite, on utilise des moyennes de cinq ans, calculées en fonction des
données pour chaque pays. Ils ont utilisé aussi la méthode des moments généralisés (GMM)
comme technique d'estimation. Cette méthode est suffisamment flexible pour faire face aux
erreurs de mesure et aux problèmes d'endogénéité (Bond et al. 2001). Ils ont également utilisé
les estimateurs GMM en système, qui permettent d’améliorer l'estimateur GMM en différence
lorsque les instruments présentent un haut degré de persistance (Arellano et Bover (1995) et
Blundell et Bond (1998)). Dans ce cas, les variables en différence retardées sont des
instruments inappropriés, conduisant à des estimations peu fiables pour les estimateurs GMM
en différence.

Le revenu initial par habitant présente un signe négatif et significatif pour tous les
modèles estimés, sauf dans le modèle des GMM en système. Comme pour les variables
structurelles, le coefficient associé à la variable de scolarisation a un signe positif, significatif
dans les estimations des GMM en système. Pour le cas des variables macroéconomiques,
l'inflation et l’output gap présentent des coefficients avec des signes attendus et significatifs
dans l'estimation des GMM en système. Les termes de l'échange sont positivement liés au
taux de croissance du revenu par habitant, et la surévaluation du taux de change est liée
négativement au taux de croissance du revenu par habitant. En revanche, ces deux derniers
déterminants ne semblent pas être très significatifs en se basant sur la méthodologie des
GMM en différence. Dans les estimations basées sur la méthodologie des GMM en système,
les coefficients associés à l'importance des institutions, à l'éducation et à la surévaluation du
taux de change montrent une significativité importante et des signes attendus. Les termes de
l'échange, l'éducation, les infrastructures et les «bonnes institutions» sont positivement
corrélés à la croissance par habitant alors que l'inflation et la surévaluation sont corrélées
négativement.

Le coefficient associé à la surévaluation du taux de change réel est égal à -0,0168, une
valeur très significative. Toute chose égale par ailleurs, une dévaluation du taux de change

251 
 
 

réel de 10% pourrait contribuer à une augmentation de 0,168% de croissance moyenne du


revenu par habitant. Une dévaluation de 40% serait associée à une augmentation du taux de
croissance réel du revenu par habitant de 0.672 %. Ceci équivaut à plus d'un demi-point de
pourcentage du taux de croissance moyen du revenu réel par habitant.

Les estimations en utilisant le taux de change réel, corrigé par les écarts de
productivité, montrent que la valeur absolue et la significativité des coefficients associés à la
surévaluation sont pertinentes. Cela indique que les différentiels de productivité peuvent avoir
un rôle important pour mesurer l'impact des niveaux du taux de change réel sur le taux de
croissance. Les coefficients estimés pour cette variable sont de signes négatifs, compris entre
0.0080 et 0.0122 et très significatifs. Cela implique qu’une dévaluation du taux de change réel
de 10%, toutes choses égales par ailleurs, augmentera le taux de croissance du revenu réel par
habitant en moyenne de 0,122%.

L'indice corrigé des écarts de productivité montre aussi que les pays asiatiques
interviennent sur leurs taux de change, en essayant d'éviter les appréciations. Un résultat qui a
été montré dans «la peur du flottement» (Calvo et Reinhart (2002)). Les estimations utilisant
le taux de change réel non ajusté par la productivité sont également en accord avec les
résultats attendus.

Les conclusions générales de cette étude soulignent l’impact des désajustements de


taux de change sur le taux de croissance du PIB réel par habitant. Les résultats sont en
concordance avec les anciennes études économétriques. En effet, la pluparts des conclusions
montrent les effets négatifs de la surévaluation sur la croissance de long terme. Les résultats
soutiennent également plusieurs études, qui montrent la supériorité de la gestion du taux de
change en Asie du Sud-est par rapport aux expériences latino-américaines et africaines dans
les dernières années. La surévaluation du taux de change, au Mexique, au Brésil et en
Argentine a été une cause importante des crises de la balance des paiements dans les années
1980 et 1990. De même, les taux de change compétitifs des pays asiatiques sont à l’origine
des succès de la stratégie de croissance tirée par les exportations depuis les années 1970.

Rodrik (2008), s’est intéressé à l’étude de l’effet de la sous-évaluation sur la


croissance économique. L'ensemble de données se compose de 184 pays et onze périodes de 5
ans de 1950-1954 à 2000-04. La spécification de base pour estimer la relation entre la sous-

252 
 
 

évaluation et la croissance se base sur la méthodologie «within». D'abord, il construit un


indice de sous-évaluation du taux de change réel variant dans le temps, basé sur les données
des niveaux de prix dans les différents pays. Cet indice de sous-évaluation est essentiellement
un taux de change réel corrigé de l'effet Balassa-Samuelson. Il saisit le prix relatif des biens
échangeables par rapport aux prix des biens non-échangeables, en tenant compte du fait que
les pays riches ont des prix relatifs des biens non échangeables élevés (en raison de la
productivité élevée dans se secteur). L’auteur a calculé un indice de sous-évaluation du taux
de change en trois étapes. Tout d'abord, il a utilisé les données sur le taux de change nominal
et les facteurs de conversion en PPA, pour calculer un taux de change réel. Cependant, dans la
pratique les biens non échangeables sont moins chers dans les pays pauvres (selon Balassa-
Samuelson), ce qui nécessite un ajustement. Dans la deuxième étape, il a pris en compte l'effet
Balassa-Samuelson en régressant le taux de change réel sur le PIB par habitant. Enfin, pour
avoir cet indice de sous-évaluation, il a retenu la différence entre le taux de change réel
effectif et l’effet Balassa-Samuelson-ajusté.

À l’issue d’une variété de spécifications de panel à effets fixes, l’auteur a montré qu'il
y a une relation positive systématique entre la croissance et la sous-évaluation, en particulier
dans les pays en développement. Les résultats fournissent la preuve que la sous-évaluation de
la monnaie stimule la croissance économique. Ceci est particulièrement vrai pour les pays en
développement. En effet, les estimations montrent que les coefficients de la régression
représentant la sous-évaluation sont très significatifs pour les économies émergentes.
Cependant, pour les pays les plus riches de l'échantillon, l’effet est faible et statistiquement
très proche de zéro. Comme le révèlent les résultats des estimations dans les pays en
développement, le coefficient s'élève à 0,027 et est très significatif. La dernière estimation
faite par Rodrik, suggère que 50 % de sous-évaluation est associée à une augmentation de la
croissance (au cours de la même sous-période de 5 ans) de 1,35 %. Selon l’auteur, ceci est un
effet non négligeable. Il montre aussi, que l’impact estimé de la sous-évaluation semble être
indépendant de la période de temps considérée. En effet, en travaillant sur deux sous-périodes
pré-et post-1980, la valeur du coefficient de la sous-évaluation reste fondamentalement
inchangée. Cela indique que les canaux à travers lesquels la sous-évaluation affecte
l’économie a peu à voir avec l'environnement économique mondial. Pour Rodrik, l'explication
ne peut pas être un simple modèle de croissance tirée par les exportations.

253 
 
 

La littérature sur la relation entre la politique de taux de change et la croissance s'est


concentrée en grande partie sur les conséquences de la surévaluation de grande taille.
Cependant, Rodrik explique que les résultats suggèrent fortement que la relation qu’il a
estimée ne repose pas sur des valeurs aberrantes. L’effet sur la croissance est entraîné autant
par l’effet positif de la sous-évaluation que par l'effet négatif de la surévaluation. Les taux de
change mal gérés et inappropriés peuvent être désastreux pour la croissance économique.
Éviter la surévaluation de la monnaie est l'un des impératifs les plus robustes qui peuvent être
tirées de diverses expériences de la croissance économique partout dans le monde. Le taux de
change surévalué est associé à des pénuries de devises, la recherche des rentes et de
corruption, aux déficits trop importants des comptes courants, aux crises de la balance des
paiements, et aux cycles macroéconomiques ‘stop and go’, toutes choses qui sont
préjudiciables à la croissance économique.

Les résultats de l'estimation en panel dynamique avec la méthode des GMM


fournissent un contrôle supplémentaire sur les biais de spécification et d'endogénéité. Les
résultats des GMM en «différence» et en «système», montrent que les coefficients de la sous-
évaluation sont positifs et statistiquement significatifs pour les pays en développement, mais
pas pour les pays développés. L’auteur soutient, que si la surévaluation nuit à la croissance, la
sous-évaluation l’encourage. Pour la plupart des pays, les périodes de forte croissance sont
associés à des monnaies sous-évaluées. A l’égard de ces résultats, Rodrik a conclu qu’il y a
peu de preuves de la non-linéarité de la relation entre le taux de change réel d'un pays et sa
croissance économique. Une augmentation de la sous-évaluation favorise la croissance
économique aussi bien que une diminution de la surévaluation. Néanmoins, cette relation n'est
valable que pour les pays en développement. Le prix relatif des biens échangeables aux biens
non échangeables (le taux de change réel) semble jouer un rôle plus fondamental dans le
processus de croissance.

Berg et Miao (2010) reprennent les travaux de Rodrik (2008) pour mesurer l’impact
des désajustements de change sur la croissance. Ils estiment des mesures des désajustements
fondées sur la PPA augmentée de variables fondamentales tels que les termes de l’échange ou
le taux d’investissement en pourcentage du PIB. Cette approche de mesure de la sur ou sous-
évaluation repose sur la notion du taux de change réel d'équilibre "fondamental"
conformément à la spécification du Washington Consensus (WC). Ce taux de change réel
d'équilibre a été proposé et défini par Nurkse (1945), comme le prix relatif des biens

254 
 
 

échangeables et non échangeables, qui réalise simultanément l'équilibre interne et externe.


L'approche empirique générale relie le taux de change réel actuel à un ensemble de variables
qui influent sur ce prix relatif à moyen et long terme. Néanmoins, les désaccords ne manquent
pas sur la façon d'estimer le taux de change d’équilibre, notamment au sujet de l'horizon
temporel pertinent et l’ensemble des déterminants correspondants. Toutefois, ils ont suivi les
travaux sur le taux de change du FMI (2006), ainsi que des applications récentes dans les pays
à faible revenu (Christiansen et al. (2009)).

Les auteurs ont repris le modèle de croissance de base en se basant sur des données en
moyenne de cinq ans. Empiriquement, ils ont inclus les deux mesures de la sous-évaluation
dans les régressions de la croissance ainsi que d’autres déterminants standards de la
croissance économique. Leurs résultats suggèrent, que d’une part les écarts du taux de change
par rapport à l’équilibre issus de leur méthodologie sont plus importants que ceux calculés par
rapport à la PPA. D’autre part, il s'avère qu'il est très difficile de distinguer empiriquement
quelle mesure du désajustement est la plus pertinente pour la croissance. Selon les auteurs, les
différences entre les concepts du désajustement sont dues aux "fondamentaux" qui
déterminent le taux de change d'équilibre. En outre, ces mêmes fondamentaux de base ont un
effet direct plausible sur la croissance. Chacune des mesures des désajustements a été
introduite dans la régression de la croissance. Les coefficients estimés sont à peu près les
mêmes. En d'autres termes, l’effet des désajustements sur la croissance est le même quelle
que soit la définition utilisée. Les effets des fondamentaux sur la croissance sont également
invariant à la mesure de désajustement utilisée.

Selon la spécification du Washington Consensus, l'impact de la surévaluation est très


différent de celui de la sous-évaluation. La surévaluation occasionne un déséquilibre
extérieur, ce qui peut nécessiter une croissance plus faible pour rétablir la balance extérieure.
La sous-évaluation peut conduire à une «surchauffe» et de l'inflation excessive et doit aussi
être mauvaise pour la croissance à moyen terme. Pour Rodrik, la surévaluation est mauvaise
parce qu'elle rétrécit le secteur marchand, même si elle est entraînée par les fondamentaux.
Tandis que la sous-évaluation améliore la croissance pour les mêmes raisons avancées pour la
spécification du Washington Consensus. En d'autres termes, la relation entre les
désajustements et la croissance est linéaire. Par ailleurs, la sous-évaluation pourrait être
associée à une production inférieure à son potentiel. La principale conclusion que les auteurs

255 
 
 

tirent est que la plupart des résultats de Rodrik (2008) ne se distingue pas vraiment de la
spécification du Washington Consensus sur le rôle du désajustement pour la croissance.

1.3. Les désajustements basés sur des modèles ad hoc


 

Popov et Polterovich (2002) se préoccupent des effets positifs possibles de la sous-


évaluation du taux de change sur la croissance à long terme plutôt que des problèmes de
surévaluation. Ils examinent dans leurs analyses les effets de la monnaie compétitive sur la
croissance. Les auteurs travaillent avec un échantillon de 100 pays développés et en
développement sur la période 1960-1999. Ainsi, ils introduisent une nouvelle mesure de taux
de change réel associée à l'accumulation de réserves de change étrangères. Afin de montrer
comment la sous-évaluation peut améliorer la croissance, ils suggèrent un modèle de
croissance économique endogène à trois secteurs (un secteur du bien de consommation, un
secteur des biens d’investissement et un secteur d'exportation). Selon les auteurs,
l'accumulation de réserves pourrait servir de proxy pour les situations de sous-évaluation
relative du taux de change réel. La politique d’accumulation des réserves de change reflète un
maintien de la compétitivité des monnaies pour de longues périodes. De nombreux pays en
développement auraient pratiqué ce genre de politique délibérée comme une stratégie de
développement. Un tel choix se traduit par l'acquisition constante de liquidités par les pays,
pour garder leurs monnaies très compétitives pour de longues périodes. La Chine, Hong
Kong, Taïwan, Singapour, la Malaisie et la Thaïlande avec environ 1/5 des réserves
mondiales actuelles sont de bons exemples.

En comparant les niveaux des réserves avec le taux de croissance par habitant, Popov
et Polterovich trouvent une relation positive pour les pays en développement. Sur la période
1960-1999, ils ont trouvé de grandes variations dans les niveaux des réserves de change entre
les différents pays. Certaines économies ont déjà atteint plus de 40 % du PIB en réserves pour
des périodes de temps différentes, telles que: Hong Kong 40 %, Singapour 60 %, le Botswana
à 100 %. Tandis que d'autres pays présentent des niveaux assez faibles, variant entre 5 et 10
% du PIB. L’étude de la corrélation entre les niveaux de réserves et le taux de croissance par
habitant montre une relation positive pour les pays en développement.

Après avoir introduit des variables de contrôle dans les régressions, le niveau initial du
revenu par habitant, l’investissement par rapport au PIB et la croissance démographique, ils

256 
 
 

trouvent que l'accumulation de réserves de change, comme politique délibérée des autorités
monétaires, est un facteur pertinent pour expliquer le taux de croissance économique (Popov
et Polterovich (2002)). Les auteurs constatent également une forte corrélation positive entre
l'accumulation de réserves de change étrangères et l’investissement par rapport au PIB, les
échanges commerciaux, l’investissement direct étranger (IDE) et la sous-évaluation mesurée
par les écarts à la PPA.

Les auteurs font valoir, à partir des résultats présentés par le modèle, que la persistance
de la sous-évaluation du taux de change peut entraîner une augmentation du bien-être. Les
justifications théoriques résident dans la littérature sur les modèles de la croissance tirée par
les exportations. L'accumulation de réserves de change accentue la dévaluation du niveau de
taux de change réel, ce qui augmente la demande globale à court terme et stimule les
innovations technologiques dans le long terme. Une relative dévaluation du taux de change
augmente les profits dans le secteur traditionnel non échangeable, en stimulant des taux
d'investissement plus élevés. La présence d'externalités positives et l’effet d’apprentissage
dans ce secteur contribuent à une dynamique plus vigoureuse dans les trajectoires de
développement technologique.

Leurs résultats semblent suggérer que l'accumulation de réserves de change contribue


à la croissance économique d'une économie en développement en augmentant à la fois
l'investissement par rapport au PIB et la productivité du capital. Ils proposent l'interprétation
suivante de ces faits stylisés: (1) L’accumulation des réserves de change reflète des sous-
évaluations du taux de change réel qui est expansionniste à court terme, et peut avoir des
effets à long terme, si de telles dévaluations sont effectuées périodiquement et de façon
inattendue, (2) La sous-évaluation du taux de change réel permet de tirer pleinement les
avantages des externalités de l’exportation et d’encourager la croissance tirée par les
exportations; (3) l’accumulation des réserves de change attire les investissements étrangers
directs, car elle augmente la crédibilité du gouvernement du pays bénéficiaire et abaisse le
prix en dollars des actifs réels. Il est aussi démontré que les sous-évaluations du taux de
change d'équilibre de petites tailles permettent d’améliorer la richesse d’un pays.

L'accumulation de réserves de change n'est une condition ni nécessaire ni suffisante de


la croissance économique. La croissance dans les pays qui n'ont pas accumulé des réserves
peut être plus rapide que dans les autres en raison d’un meilleur climat d'investissement, de

257 
 
 

meilleures institutions et à une plus grande implication dans le commerce international atteint
grâce à une plus grande ouverture de leurs économies, même si leurs taux de change sont à
des niveaux d'équilibre. On peut également avoir le cas où les réserves accumulées d’un pays
ne sont pas capables d'augmenter l’investissement en raison de la fuite des capitaux résultant
d’un mauvais climat d'investissement.

Cependant, selon Popov et Polterovich l'accumulation des réserves de change est un


puissant mécanisme macroéconomique pour augmenter le taux de croissance à long terme.
Même les gouvernements les plus inefficaces et corrompus peuvent utiliser l'accumulation de
réserves comme dispositif de dernier recours pour promouvoir la croissance.

Toulaboe (2004), a étudié le lien entre les désajustements du taux de change et la


croissance économique dans les pays en développement. La première partie de son article,
porte sur l'estimation du taux de change d'équilibre et la construction d’un indicateur des
désajustements du taux de change. En utilisant cet indicateur, la relation entre le taux de
croissance moyen du PIB par habitant et les désajustements du taux de change est ensuite
étudiée en prenant compte des variables explicatives généralement incluses dans les
régressions empiriques de la croissance économique. Les variables sont construites pour 33
pays en développement - 18 pays d’Afrique sub-saharienne, 7 pays d’Asie, et 8 d’Amérique
latine. L’auteur utilise des données en moyennes de 5 ans pour la période 1985-1999.

Un modèle simplifié est utilisé pour déterminer le taux de change réel d'équilibre.
L'approche théorique adoptée dans cette étude s'appuie sur les travaux de Baffes et al. (1997).
Le taux de change d’équilibre est défini à partir d’une équation réduite et peut donc être
exprimé comme une fonction des termes de l'échange, des variables de la politique
commerciale et du progrès technologique.

Les résultats indiquent l’importance de la politique budgétaire pour la croissance


économique. La variable de la politique budgétaire, mesurée par la consommation publique en
pourcentage du PIB, a un effet négatif, et significatif dans les quatre variantes de l'équation de
régression de la croissance. Bien qu’une politique gouvernementale adéquate soit essentielle,
la présence des dépenses gouvernementales conséquentes et croissantes dans une économie
semble entraver la croissance économique, en particulier dans les pays en développement. La
croissance de la population et de l'investissement aussi que le taux d’inflation ont les signes

258 
 
 

théoriques attendus. Le coefficient de croissance de la population est négatif et statistiquement


significatif. Le coefficient de la variable investissement (en pourcentage du PIB) est positif et
significatif, reflétant l'importance de l'accumulation du capital pour les pays en
développement. Il y a aussi des indications que l'amélioration des termes de l’échange
contribue favorablement à la croissance économique. Le coefficient des termes de l’échange
est positif, mais statistiquement non significatif. Toutefois, l'incertitude concernant les termes
de l'échange nuit à la croissance économique. L'écart-type du paramètre termes de l’échange
est négatif et statistiquement significatif. Le PIB par habitant initial et l'espérance de vie à la
naissance interviennent dans le modèle avec leurs signes attendus, mais ne sont pas
statistiquement significatif. La variable scolarisation dans le secondaire, étonnamment,
semble nuire à la croissance économique.

Les résultats de régression montrent aussi que les désajustements du taux de change
réel en moyenne sont associés négativement à la croissance économique. Le coefficient de la
variable désajustement est négatif et statistiquement significatif dans les quatre variantes. Les
résultats confirment le caractère critique du taux de change réel dans l’explication de la
croissance économique. Les résultats indiquent également que ce sont les désajustements du
taux de change réel, et non pas son instabilité, qui entravent la croissance économique.
L'écart-type du coefficient de désajustement du taux de change réel est statistiquement non
significatif. Le principal résultat, cependant, corrobore l'idée que la politique du taux de
change joue un rôle vital dans la croissance économique des pays en développement. Ceci
confirme l'hypothèse que le maintien du taux de change réel à son niveau approprié est
essentiel pour la croissance économique dans les pays en développement. En revanche, les
politiques de change inappropriées dans de nombreuses régions du monde en développement,
qui conduisent à un désajustement du taux de change réel, expliquent partiellement la
mauvaise performance économique que connaissent ces régions.

Les résultats peuvent aussi être utilisés pour prédire la performance économique sous
différents régimes de taux de change. D'une part, les régimes de taux de change flexible
permettent aux autorités monétaires (ou au marché) de répondre rapidement à des
perturbations imprévues qui peuvent obliger le taux de change réel à s'écarter de son niveau
d'équilibre. D'autre part, les régimes de change fixe (ou ancrage) limitent la capacité des
autorités à utiliser les taux de change comme un instrument de la politique économique pour
répondre aux déséquilibres externes. Par conséquent, ils conduisent souvent à des

259 
 
 

désajustements chroniques. Les résultats de cette étude appuient l'idée que les pays qui
adoptent des régimes de change flexible connaissent une croissance économique supérieure
aux pays ayant des régimes de change fixes.

L'objectif principal de l’étude d’Auguirre et Calderon (2005) est d'évaluer les effets
des désajustements du taux de change réel et de sa volatilité sur la croissance économique.
Pour cette raison, ils calculent les désajustements fondamentaux du taux de change réel
comme étant les écarts du taux de change réel observé par rapport à son niveau d’équilibre de
long terme. Ils estiment empiriquement une équation du taux de change réel de long terme
dérivée à partir d'un modèle d'équilibre général simple dans l'esprit de la nouvelle
macroéconomique ouverte. Pour résumer brièvement, le modèle est une version réduite du
modèle d'Obsteld-Rogoff111 augmenté par la présence des dépenses publiques. Le modèle est
estimé en utilisant des techniques de cointégration en données de panel et en séries
temporelles. Ils constatent que les prix relatifs des biens non échangeables sont fonction de la
position extérieure nette, de la productivité relative des biens échangeables par rapport aux
biens non échangeables, des termes de l'échange et des dépenses du gouvernement.

Après le calcul des désajustements du taux de change réel« fondamental », ils évaluent
leur impact sur la croissance en utilisant les techniques en données de panel dynamique. Ces
techniques répondent non seulement aux problèmes des composants non observées propres à
chaque pays, mais aussi à la possibilité de variables explicatives endogènes. En utilisant un
échantillon de 60 pays sur la période1965-2003, en moyenne de 5 ans, ils obtiennent les
résultats suivants:

Premièrement, l'appréciation du taux de change réel d’équilibre est expliquée par les
l’augmentation de la productivité relative, des chocs favorables des termes de l’échange, la
meilleure position nette d'actifs étrangers et l’augmentation de la part des dépenses publiques
au PIB. Les résultats des estimations sont vérifiés pour les techniques de cointégration en
données du panel ainsi qu’en séries temporelles.

Deuxièmement, les taux de change réels dans les pays en développement ont un degré
de désajustement plus important par rapport aux pays industrialisés. Ce constat pourrait être
                                                            
111
Une version similaire de ce modèle, sans les dépenses du gouvernement, est présentée par Lane et Milesi-
Ferreti (2004).

260 
 
 

partiellement attribuable à des politiques macroéconomiques, commerciales et de taux de


change inappropriés dans les pays en développement.

Troisièmement, une relation négative et significative existe entre la croissance et les


désajustements du taux de change réel. Ce résultat est valable s’ils utilisent les mesures
fondamentales des désajustements du taux de change réel ou d'autres mesures telles que
l'indice de surévaluation du taux de change réel de Dollar (1992) et des déviations du taux de
change réel par rapport au calcul des tendances en utilisant le filtre passe-bande112.Ce résultat
est conforme à la thèse que les désajustements persistants du taux de change réel-dus à des
politiques inadéquates- se sont révélés être une source importante du ralentissement de la
croissance.

Quatrièmement, l’existence d'asymétries dans la relation entre la croissance et les


désajustements du taux de change réel est analysée. Plus précisément, ils évaluent la relation
entre la croissance et la surévaluation du taux de change réel ainsi qu’entre la croissance et la
sous-évaluation du taux de change réel. La croissance est affectée inversement par la sous-
évaluation et la surévaluation réelle du taux de change réel, bien que, dans le premier cas,
l'effet soit plus important que dans le second. D’une part, ramener la surévaluation par rapport
aux niveaux moyens dans les pays en développement aux normes des économies
industrialisés entraine une augmentation de la croissance économique. D'autre part, la
réduction du degré de sous-évaluation des pays en développementaux niveaux moyens des
pays industrialisés augmente la croissance entre 3 et11 points de base par an.

Cinquièmement, l'effet des désajustements du taux de change réel sur la croissance


dépend de la taille de l'écart par rapport au taux de change réel d'équilibre. Plus la taille de la
surévaluation du taux de change réel est grande, plus l'effet sur la croissance est défavorable.
L’effet sur la croissance est positif pour les sous-évaluations de petite taille (jusqu'à 12%) et
négatif pour les grandes sous-évaluations.

                                                            
112
Un filtre passe-bande est un filtre ne laissant passer qu’une bande ou intervalle de fréquences compris entre
une fréquence de coupure basse et une fréquence de coupure haute du filtre. Le concept de filtre passe-bande est
une transformation mathématique appliquée à des données (un signal). Cette transformation a pour fonction
d'atténuer les fréquences à l'extérieur de la bande passante, l'intervalle de fréquences compris entre les
fréquences de coupure. Ainsi, uniquement les fréquences comprises dans cet intervalle sont conservées intactes
ou avec une faible atténuation.

261 
 
 

Sixièmement, l'impact des désajustements du taux de change réel est toujours négatif
et significatif. Il est encore plus sévère pendant les périodes de crises de change. Une relation
négative est observée entre la croissance économique et la volatilité des désajustements du
taux de change réel. De plus cette relation peut être non linéaire.

Enfin, les auteurs explorent économétriquement les déterminants de la persistance des


désajustements du taux de change réel afin d'évaluer la possibilité pour un pays de suivre une
stratégie de sous-évaluation. Les variables politiques, en particulier les contrôles de capitaux
dans la gestion des systèmes de taux de change nominal, ne sont pas significatifs pour le
maintien d'une sous-évaluation du taux de change réel pour une période de temps nécessaire.
Toutefois, la situation conjoncturelle de l'économie et la stabilité monétaire sont
significatives.

1.4. Les désajustements basés sur l’approche du BEER


 

Magyari (2008), Béreau et al (2009) et Sallenave (2010) étudient l’impact des


désajustements du taux de change réel sur la croissance économique en se basant sur
l’approche BEER.

L'objectif principal de l’étude de Magyari (2008) est d'explorer l'impact des


désajustements du taux de change réel sur la croissance économique sur une période
trimestrielle de 1998 à 2007 dans quatre pays d’Europe centrale et orientale: la République
tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Roumanie. Le taux de change réel d'équilibre de la
couronne tchèque, du forint hongrois, du zloty polonais et du leu roumain vis à vis de l'euro
est estimé en se basant sur l’approche BEER développée par MacDonald (1997). L’impact
des désajustements du taux de change réel sur la croissance économique est étudié en
procédant par des estimations pays par pays (séries temporelles), puis par une analyse en
données de panel. D'autres variables explicatives sont introduites, comme: l'écart de
production par rapport à son niveau potentiel (output gap), pour contrôler l’effet cyclique; la
différence première du PIB en log décalée afin de quantifier l’effet de convergence, le degré
d'ouverture commerciale comme un proxy pour les politiques structurelles nationales et les
termes de l'échange pour saisir l'effet des chocs extérieurs sur la croissance économique.

262 
 
 

Les désajustements du taux de change réel, les indicateurs de surévaluation et de sous-


évaluation sont utilisés afin d'étudier l'impact des désajustements du taux de change sur la
croissance économique. Magyari procède à l'estimation de trois panels de croissance avec
trois indicateurs du mouvement du taux de change réel en utilisant la technique d'estimation
des moments généralisés(GMM), proposée par Arellano et Bond(1991). L’application de cette
méthode d'estimation permet d’introduire un ensemble de variables instrumentales (variables
dépendantes et indépendantes retardées).

À l’issue de cette étude, l’auteur montre que les désajustements du taux de change réel
ont un impact négatif et statistiquement significatif sur la croissance au seuil de 1%. Le R-
carré est aussi très élevé (0,90), suggérant que les variables indépendantes expliquent une
grande partie de la variance de la variable dépendante. L’augmentation du degré des
désajustements du taux de change réel de 1% diminue la croissance économique d'environ
0,02%. Les autres variables sont toutes statistiquement significatives au seuil de 1% et ont les
signes économiquement attendus, à l'exception du degré d'ouverture commerciale qui a un
impact négatif sur la croissance économique. Une augmentation des termes de l’échange (qui
peut être générée par une augmentation des prix à l'exportation ou une diminution de prix à
l'importation) améliore la croissance économique.

En étudiant séparément l'effet de la surévaluation ou de la sous-évaluation, Magyari


trouve une relation négative et statistiquement significative au seuil de 5% entre l'indicateur
de croissance économique et la surévaluation du taux de change réel. Les résultats sont
cohérents avec l'idée selon laquelle la surévaluation persistante a un effet négatif sur la
croissance économique. Le coefficient de la sous-évaluation n’est pas statistiquement
significatif et l’auteur ne peut pas tirer de conclusion quant à l’effet global de la sous-
évaluation sur la croissance dans la région. Ces résultats sont cohérents avec ceux présentés
par Razin et Collins (1997) et Rodrik (2008).Par ailleurs, le signe de l’output gap et le degré
d'ouverture commerciale sont restés négatifs et de taille semblable à ceux du modèle
précédent. Les effets spécifiques par pays et par période sont également significatifs.

Les principaux résultats de cette analyse reflètent l’impact global négatif des
désajustements du taux de change réel sur les performances économiques. La surévaluation du
taux de change réel ralentit la croissance économique dans les quatre pays d’Europe centrale
et orientale de l'étude. Le PIB réel diminue respectivement de 0,017% comme une réponse à

263 
 
 

l'augmentation de 1% du degré des désajustements du taux de change. Néanmoins, il diminue


de 0,031% par trimestre lorsque la surévaluation augmente de 1%.

L’approfondissement de l'analyse en procédant à une étude pays par pays, a permis


d'identifier les effets individuels propres à chaque pays. Les résultats obtenus prouvent l'utilité
de l'analyse en séries chronologiques. En effet, les résultats des estimations confirment que le
désajustement du taux de change réel des quatre monnaies influe négativement sur la
croissance économique. Au contraire, l’introduction des effets de la surévaluation ou de la
sous-évaluation séparément sur la croissance économique montre des résultats assez
surprenants, qui ne sont pas parfaitement en cohérence avec ceux obtenus dans le cadre de
l'analyse en données de panel.

D'une part, la sous-évaluation et la surévaluation influencent négativement la


croissance en République tchèque, en Hongrie et en Pologne. Ces résultats ne sont pas en
accord avec les fondements théoriques, qui stipulent que la sous-évaluation est bénéfique à la
croissance économique. En effet, dans les modèles de croissances tirés par les exportations, la
sous-évaluation encourage les secteurs de production orientés vers l'exportation, leur
permettant d'être plus rentables. D'autre part, la Roumanie représente une exception en
comparaison avec le reste des pays en raison de l’absence d’une relation significative entre la
croissance économique et la sous-évaluation du leu roumain. Par ailleurs, les désajustements
du taux de change ont eu une influence négative et statistiquement significative sur la
croissance économique. Ces résultats peuvent être attribués au fait que le commerce extérieur
a eu une contribution négative sur le PIB de manière significative.

Enfin, Magyari suggère qu'il serait utile que les banques nationales des quatre pays
mènent leur politique monétaire de telle sorte que les taux de change réels restent le plus
possible proches de leurs niveaux d'équilibres. Cette tendance pourrait être utile dans le
processus de réalisation (nominal et réel) des critères de convergence concernant l'intégration
à l'Union Européenne.

Sallenave (2010) a évalué les effets des désajustements de taux de change effectif
réel sur la croissance sur la période 1980-2006 sur des données annuelles. Elle considère à la
fois les pays industriels et émergents en se concentrant sur une quinzaine de pays ou de
régions appartenant au groupe des vingt (G20). Elle a estimé d'abord les taux de change

264 
 
 

effectif réel d'équilibre en s'appuyant sur l’approche comportementale BEER. Ensuite, elle
estime un modèle de croissance en panel dynamique en utilisant la technique d'estimation des
GMM en différence. Cette technique répond à la fois à la question des effets non observés
propres aux pays et à la possibilité d’existence de variables explicatives endogènes.
Concernant les facteurs déterminants de la croissance, Sallenave tient compte des
déterminants habituels: valeur initiale du PIB par habitant, un indicateur du capital humain,
ouverture commerciale, termes de l'échange, les dépenses publiques et l'investissement. Elle
estime le modèle de croissance d'abord sur toute la période, puis sur deux sous-périodes, à
savoir 1980-1995 et 1996-2006.

En expliquant le taux de change effectif réel d’équilibre par la position d'actifs


étrangers nets et l'effet Balassa-Samuelson, Sallenave montre que la moyenne des dés
ajustements dans les pays émergents est plus élevée que dans les pays avancés. Par ailleurs
l'ajustement vers l'équilibre tend à être plus souple dans les économies industrielles.

Pour les trois régressions de l a croissance, elle trouve les signes attendus de l’effet de
convergence conditionnelle. En effet, toutes choses étant égales par ailleurs, les pays à faible
revenu par habitant ont tendance à avoir une croissance plus rapide. Le coefficient de l’output
gap est négatif, mais non significatif, sur toute la période et la sous-période 1980-1995 et
significatif avec un signe positif sur la période 1996-2006. Par conséquent, aucun effet de
retour cyclique n’est observé. Le coefficient de l'ouverture commerciale est positif et
statistiquement significatif pour toutes les estimations. Plus les pays sont orientés vers
l'extérieur, plus ceci contribue favorablement à la croissance économique. Les termes de
l'échange, qui captent à la fois les changements dans la demande mondiale des exportations
d'un pays et les coûts de la production, sont négatifs mais statistiquement non significatifs,
sauf pour la sous-période 1996-2006. L’effet de la croissance démographique est négatif et
significatif. Le coefficient de la variable investissement (en pourcentage du PIB) est positif et
significatif, reflétant l'importance de l'accumulation du capital pour les pays en
développement. La variable de scolarisation secondaire est significative avec un signe négatif,
ce qui signifie que l'obtention d'un diplôme d'études secondaires semble nuire à la croissance
économique ce qui est surprenant. Les dépenses du gouvernement apparaissent de manière
positive mais non significative.

265 
 
 

En ce qui concerne la variable désajustement, tant sur la période globale que sur la
période de 1980-1995, seule la volatilité des désajustements contracte la croissance
économique, avec des coefficients respectivement estimés de -0,01 et -0,003. En revanche, sur
la période 1996-2006, la volatilité des désajustements est non significative et positive. La
relation entre la croissance et les désajustements du taux de change réel est négative et
significative. Ce résultat implique que la croissance diminue en réponse à l'augmentation des
désajustements du taux de change réel. Plus généralement, ce résultat corrobore l'idée que les
politiques de taux de change continuent à jouer un rôle vital pour la croissance économique.
Une politique de change adaptée devrait se concentrer sur la réduction des désajustements du
taux de change réel.

Enfin, l’auteure souligne que les pays qui poursuivent des réformes majeures et
appropriées du taux de change afin de réduire les désajustements du taux de change réel sont
davantage susceptibles d'enregistrer des gains en termes du PIB réel par habitant.

Béreau et al. (2009) ont accordé une attention particulière à l'influence des sur-ou
sous-évaluations du taux de change sur la croissance économique pour un ensemble de 32
pays, y compris à la fois les économies avancées et émergentes. Le but de cet article est
d'étudier le lien entre les désajustements monétaires et la croissance en accordant une
attention particulière aux effets asymétriques potentiels. Pour estimer le taux de change réel et
les équations de croissance, elles utilisent des données annuelles sur la période 1980 – 2007.
Elles se sont appuyées sur la méthode du taux de change d'équilibre comportemental BEER
introduite par Clark et MacDonald (1999). Cette approche consiste à estimer une relation à
long terme entre le taux de change effectif réel et ses fondamentaux, en se basant sur les
techniques de cointégration en panel. Elles se sont appuyées sur l'estimation d'un modèle de
régression en panel à transition lisse (PSTR), permettant un impact différencié des
surévaluations et des sous-évaluations du taux de change sur la croissance économique.

Dans l'esprit de la théorie néoclassique de la croissance, elles considèrent les variables


suivantes: l’ouverture commerciale (mesuré comme la somme des exportations et des
importations, en pourcentage du PIB), la consommation publique en pourcentage du PIB,
utilisé comme un indicateur de la politique budgétaire, l'investissement (en pourcentage du
PIB), le taux d'inflation pour tenir compte de la stabilité du niveau des prix et la croissance de
la population. Enfin, à ces facteurs habituels, elles ont ajouté les désajustements monétaires

266 
 
 

afin d'examiner l'impact de la surévaluation et la sous-évaluation du taux de change sur la


croissance économique.

À cette fin, en estimant des modèles de régression en panel à transition lisse, Béreau et
al. (2009) montrent que l'impact des désajustements du taux de change sur la croissance
économique est non linéaire et asymétrique. En effet, elles trouvent qu'il existe une relation
positive et significative entre la croissance et les désajustements du taux de change lorsque la
monnaie est sous-évaluée (ou légèrement surévaluée). Tandis que les surévaluations
importantes ne semblent pas avoir des effets marqués sur la croissance économique.

Concernant les résultats relatifs aux variables de contrôle, toutes les variables
explicatives ont les signes attendus, quel que soit le signe et la taille des désajustements. Leurs
résultats montrent que les désajustements ont également le signe attendu dans le cas des sous-
évaluations et des petites surévaluations. En effet, dans le premier régime, le coefficient est
égal à 0,09, ce qui signifie que, toutes choses étant égales par ailleurs, une dépréciation du
taux de change réel de 10 % contribue à une augmentation du PIB par habitant de 0,9 %. Les
sous-évaluations et les surévaluations de petite taille ont ainsi un impact positif sur la
croissance économique. Ce résultat illustre le fait que la compétitivité est renforcée lorsque
les monnaies sont sous-évaluées. Comme le premier régime comprend également des
surévaluations de moins de 9,8%, il est important de noter que ces surévaluations faibles ont
également favorisé la croissance. Plus important encore, elles concluent la présence d’un effet
asymétrique des désajustements du taux de change réels sur la croissance, selon qu'ils
reflètent les sur-ou sous-évaluations de la monnaie considérée. En effet, cet impact varie entre
0,9% (régime 1) et de 0,03% (régime 2) sur la croissance du PIB par habitant. En d'autres
termes, la sous-évaluation et la faible surévaluation des monnaies stimulent la croissance. En
revanche, les surévaluations élevées du taux de change n'ont pas d'effets importants.
Autrement dit, plus la surévaluation diminue, plus la croissance économique est stimulée.
Cet impact différent des désajustements du taux de change sur la croissance met clairement en
évidence l'intérêt de cette étude non linéaire. Les politiques de change appropriées qui limitent
la surévaluation de la monnaie pourraient être utilisées pour promouvoir la croissance
économique.

Les résultats impliquent que les sous-évaluations, qui pourraient être attribuées à des
dévaluations compétitives, peuvent conduire le taux de change à un niveau qui encourage les

267 
 
 

exportations et favorise la croissance. Au contraire, les surévaluations ne sont pas


spécialement décourageantes pour la croissance économique. Ces résultats montrent que la
politique de taux de change peut jouer un rôle clé dans la croissance économique et suggèrent
que pour améliorer les performances, les décideurs peuvent dévaluer leurs monnaies.

Conclusion 
 

Dans ce chapitre, nous avons présenté un bref aperçu des éléments de preuve dans la
littérature sur le lien entre les désajustements du taux de change et la performance
économique. Nous observons que la littérature évalue non seulement la relation entre les
désajustements (ainsi que l'instabilité du taux de change) et la croissance, mais aussi le lien
avec certaines sources de la croissance telles que l'investissement, la productivité, la
croissance des exportations et l'investissement direct étranger.

En ce qui concerne les liens économiques entre les désajustements du taux de change
et la croissance, certains chercheurs suggèrent que les désajustements du taux de change ont
un impact négatif sur l'allocation optimale des ressources et, par conséquent, sur la croissance.
D'autre part, certains ont fait valoir que la sous-évaluation-qui pourrait être le reflet des
dévaluations compétitives- peut conduire le taux de change à un niveau qui encourage les
exportations. En conséquence, cela peut affecter positivement la croissance en raison des
économies d'échelle, l'adoption de technologies et d'autres avantages déjà soulignés par la
littérature.

La plupart des études antérieures dans la littérature ont utilisé les mesures fondées sur
la PPA et la PPA ajustée de l’effet Balassa-Samuelson pour mesurer les désajustements du
taux de change. Une description détaillée de la littérature empirique sur les effets des
désajustements du taux de change et de sa volatilité sur la croissance est présentée dans ce
chapitre. Nous trouvons que, pour presque toutes les études, la croissance et les
désajustements (ainsi que sa volatilité) sont négativement associés quelle que soit la mesure
de désajustement utilisée. D’une part, seuls quelques travaux tels que Béreau et al. (2009)
montrent des non-linéarités potentielles dans la relation entre la croissance et les
désajustements du taux de change. D'autre part, certaines études antérieures intègrent l'écart-
type du coefficient de variation de changements dans le taux de change, au lieu de la volatilité

268 
 
 

des désajustements du taux de change. Ils constatent avec vigueur que la croissance est
inversement liée à la volatilité des désajustements du taux de change ou des fluctuations du
taux de change.
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

269 
 
 

Chapitre 7 
Désajustements et croissance 
économique : étude empirique 

Introduction 
 

L'impact des désajustements du taux de change sur la croissance est devenu un sujet de
recherche économétrique important dans les dernières années. Après plusieurs études de la
Banque mondiale sur les vertus de l'orientation vers l'extérieur et la compétitivité des
monnaies pour la croissance (Dollar (1992) et Cavallo (1990)), de nombreuses études
économétriques ont mesuré, en incluant d’autres variables, les effets de la surévaluation du
taux de change sur la croissance par habitant (Easterly (2001) et Fajnzylber et al (2002)). Il y
a une montée d’une littérature politique de plus en plus orientée vers les discussions du rôle
des politiques de change dans la stratégie du succès du développement asiatique. Les
monnaies compétitives stimulent le revenu et l’investissement régional (Bresser-Pereira,
2004a, Dooley 2005), tandis que les surévaluations sont parmi les principales causes des
crises et de la stagnation en Amérique latine au cours des années 1990 (Frenkel 2004).

En dépit de la conscience grandissante des conséquences néfastes des désajustements


du taux de change pour la performance économique, peu d'études empiriques ont directement
tentées de répondre à cette question. Edwards (1988) a attribué ceci essentiellement aux
difficultés inhérentes à la construction de mesures adéquates des désajustements. En effet, la
méthodologie utilisée pour déterminer le niveau d’équilibre du taux de change est un enjeu
important pour les décideurs politiques.

La plupart des études précédentes qui visent à étudier le lien entre les taux de change
et la croissance économique reposent sur des mesures des désajustements fondés sur la PPA
(Dollar (1992), Benaroya et Janci (1999), Easterly (2001), Loayza et al. (2004), Acemoglu et
al. (2003)). La plupart des études récentes sur cette question se basent sur des approches
(BEER) pour estimer les désajustements du taux de change (Magyari (2008); Béreau et al,

270 
 
 

2009 ; Sallenave, 2010). Néanmoins, les approches de type FEER peuvent aussi être utilisées
car elles permettent de mieux assurer la cohérence des désajustements de change pour les
différents pays en utilisant un modèle du commerce mondial. Williamson (1990) montre que
les écarts par rapport à l’équilibre sont néfastes pour la croissance. D’une part, les
surévaluations impliquent des déséquilibres extérieurs. D’autre part, les sous-évaluations
abusives impliquent un déséquilibre interne et une inflation excessive. La sous-évaluation,
même si elle est bénéfique pour la croissance, peut avoir des influences aux conséquences
néfastes et inattendues sur les fondamentaux de l’économie. L’analyse de la relation
«désajustements-croissance», à partir de l’approche FEER est plus adaptée pour identifier les
défaillances dans les modèles de croissance adoptés par chaque pays.

La plupart des travaux antérieurs utilisent le Moindre Carré Ordinaire, Triple Moindre
Carré Ordinaire et la Méthode des Moments Généralisées dynamique comme techniques
d’estimations de la relation entre désajustements du taux de change et taux de croissance
économique. Notre travail exploite une nouvelle technique économétrique, à savoir les
modèles PSTR (Panel Smooth Transition Régression) utilisés par Béreau et al. (2009) dans le
même contexte. Ces modèles sont une solution intéressante pour répondre aux nouveaux
enjeux posés par l’emploi de données de panel macroéconomiques. L’utilisation de modèles à
changements de régimes en données de panel permet à la fois de conjuguer les avantages de
travailler sur données de panel et de résoudre simultanément les problèmes de non-linéarité,
d’hétérogénéité et d’instabilité temporelle de la relation au cours du temps (Colletaz et Hurlin,
2006; Bessec et Fouquau, 2008). A titre comparatif, nous étudions la relation en nous basant
sur les Méthodes des Moments Généralisées dynamiques (GMM) développées par Arellano et
Bover (1995).

Le but de ce chapitre est d'étudier la relation entre les désajustements du taux de


change réel et la croissance économique, en accordant une attention particulière aux effets
asymétriques potentiels. Notre contribution est triple. Tout d'abord, nous nous appuyons sur
un large échantillon de pays, comprenant des économies développées et en développement.
La prise en compte d'un large échantillon de pays est d'une importance particulière dans le
contexte actuel des déséquilibres mondiaux, qui appelle à un ensemble cohérent du taux de
change d'équilibre. Deuxièmement, nous effectuons cette analyse en s'appuyant sur la
méthodologie FEER. Troisièmement, nous tenons expressément compte du signe et de la
taille des désajustements par l'estimation d'un modèle de panel non linéaire. Plus précisément

271 
 
 

nous nous appuyons sur l'estimation d'un modèle de régression en panel à transition lisse
(PSTR), permettant un impact différencié des surévaluations et des sous-évaluations du taux
de change sur la croissance économique.

1. Les déterminants de la croissance 
 

Dans ce chapitre, nous reprenons les mêmes déterminants présentés auparavant


(chapitre 2). Depuis le milieu des années 1980, avec l’émergence des modèles de croissance
endogène, la croissance économique n’est plus la conséquence de la démographie et du
progrès technique (Romer, 1986 ; Lucas, 1988 et Rebelo, 1991). Ces derniers opèrent une
rupture par rapport à la théorie néo-classique et divergent du modèle de Solow sur deux points
fondamentaux. D’une part, l’exogénéité du progrès technique est remise en cause ; les
individus peuvent donc choisir délibérément d’accumuler des connaissances et influencent
ainsi positivement la croissance. D’autre part, ces modèles intègrent dans leurs formalisations
plusieurs facteurs de croissance tels que l’investissement en capital physique, le capital
humain, le capital public, la recherche et développement, etc. L’accumulation du capital
physique et humain crée des externalités positives à la base du processus de croissance
endogène.
 

Plusieurs facteurs sont susceptibles d’influencer la croissance économique. Le capital


humain est considéré comme une source domestique de croissance. Dans le cadre de la théorie
de la croissance endogène, les politiques économiques et sociales peuvent affecter le niveau
du taux de croissance sur le sentier d’équilibre stable. Le progrès technique peut être rendu
endogène par des investissements en capital humain (Lucas, 1988). Les différences dans les
niveaux d’éducation de la force de travail des pays à la période initiale peuvent engendrer des
différences également dans le niveau de leurs taux de croissance. Les populations les plus
éduquées sont supposées générer des taux de croissance plus élevés du produit total et même
du produit par tête. Théoriquement, il est attendu que chaque niveau de scolarité génère une
croissance plus élevée. Toutefois, plusieurs travaux ont montré que le niveau d’éducation
primaire était négativement relié au taux de croissance économique. Pour cette raison, la
présente étude retient plutôt le niveau d’éducation secondaire, comme variable tendant à saisir
l’impact du capital humain.

272 
 
 

Parmi les facteurs relatifs à la politique économique supposés influencer les


performances économiques, nous retenons en priorité : le taux d’inflation et le ratio de la
consommation publique par rapport au PIB. Dans les pays en développement, une inflation
peut conduire, lorsqu’elle est forte, à un ralentissement de la croissance économique et à une
détérioration de l’emploi. Une inflation nationale plus forte qu’à l’étranger réduit l’attractivité
de l’économie et la compétitivité des entreprises nationales. Elle conduit à procéder à des
réajustements monétaires. Une hausse de l’inflation réduit le taux d’intérêt réel (donc les
charges d’intérêt des emprunteurs) mais conduit les banques à relever leurs taux d’intérêt
nominaux (les années 1980 et 1990), donc à pénaliser l’investissement. Les dépenses
publiques, sans être excessives, exercent un effet d’externalité positif sur la croissance
économique. Suivant l’optique keynésienne, la régulation de l’activité économique par les
pouvoirs publics passe par des actions contra-cycliques. Cette perspective amène les pouvoirs
publics à soutenir activement l’activité dès lors que la demande des agents est déprimée et à la
freiner lorsque son emballement fait craindre des déséquilibres internes et externes. Ainsi, à
court terme, les dépenses publiques peuvent servir à stimuler la demande globale et à relancer
une croissance économique jugée trop molle. L’argument en faveur des dépenses publiques
consiste à penser que certaines dépenses publiques, notamment les investissements publics,
comme les réseaux routiers, l’électricité, le transport, les télécommunications, l’éducation et
la santé génèrent des externalités qui améliorent la productivité des facteurs privés et peuvent
de ce fait soutenir la croissance économique (Aschauer, 1989 ;Tanzi et Zee, 1997).

En résumé les variables explicatives retenues sont : à côté des désajustements du taux
de change, le PIB réel par habitant décalé, le taux d’inflation, l’investissement en pourcentage
du PIB, l’indicateur du développement humain, le degré d’ouverture, l’investissement direct
étranger en pourcentage du PIB, les dépenses publiques.

273 
 
 

2. Le modèle économétrique 

2.1. Présentation générale


 

Les modèles de panels à transition lisse (Panel Smooth Transition Regression models)
sont des modèles à effets fixes avec des variables explicatives exogènes. González et al.
(2005) ont proposé une extension des modèles PTR (Panel Transition Regression) à transition
brutale, développé par Hansen (1999). La modélisation PSTR est caractérisée par un passage
à transition lisse. Le modèle de base à deux régimes est défini comme :

                                        y µ  β′ X β′ X ; , ε                                                  7.1

Pour    1, . . . , et    1, . . . , , où       désignent respectivement la dimension


individuelle et temporelle du panel.  est la variable dépendante, X X ,…,X est la
matrice des k variables explicatives ne contenant pas de variables endogènes retardées,
µ  représente l'effet fixe individuel,   ,..., et où ε est
iid 0;  . ; ,   désigne la fonction de transition associée à une variable de
transition , à un paramètre de seuil et un paramètre de lissage   . La fonction de
transition  ; , est une fonction continue de q et bornée entre 0 et 1, et ces valeurs
extrêmes sont associées à des coefficients de régression    et     . Plus généralement, la
valeur de q détermine la valeur de q ; γ, c  et donc les coefficients de régression 
  ; ,  pour l'individu  au temps  .

La modélisation PSTR a l’avantage d’engendrer des relations moins extrêmes que


celles des modèles PTR (Colletaz et Hurlin, (2006), Bessec et Fouquau, (2008)). Le modèle
peut être interprété de deux façons différentes (González et al. (2005)). Premièrement, il peut
être considéré comme un modèle de données de panel hétérogène linéaire, où les coefficients
peuvent varier suivant les individus et la période de temps considérée. En effet, le PSTR peut
être considéré comme un modèle possédant une infinité de régimes qui fluctuent entre un
nombre limité de "régimes extrêmes" (souvent deux). Deuxièmement, le modèle PSTR peut
être simplement considérée comme un modèle de panel homogène non linéaire où le système
transite progressivement entre deux régimes extrêmes linéaires et homogènes.

274 
 
 

González et al. (2005) ont proposé de retenir une fonction de transition logistique
d’ordre m :

                ; , 1 exp γ q c ,,γ  0, 1 m                 7.2

Où     ,..., est un vecteur de dimension 1, regroupant les paramètres de seuils


et γ représente le paramètre de lissage supposé positif. L’ordre113 de la fonction de transition a
un impact direct sur la dynamique transitoire entre les régimes extrêmes. D’un point de vue
empirique, González et al. (2005) indiquent qu’il est habituellement suffisant de considérer
   1 ou    2 . Ces valeurs autorisent en général les variations nécessaires des
coefficients de pente afin de tenir compte d’une majorité des cas de non-linéarités dues à des
changements de régimes.

Le figure (19) représente la fonction logistique dans le cas où le paramètre de seuil


  0 et    1. Sur l’axe des abscisses figurent les valeurs de la variable de transition q
prises arbitrairement entre 5 et -5 et sur l’axe des ordonnées la valeur de la fonction de
transition ; , .

                                                            
113
Le nombre de restrictions m.

275 
 
 

Figure 19. Fonction de transition logistique avec

1
0.9
Valeur de la fonction de transition

0.8
0.7
0.6
0.5
0.4
gam=1
0.3
gam=2.5
0.2 gam=5
gam=25
0.1
0
-5 0 5
Valeur de la variable de transition

Concernant la fonction de transition logistique, on constate que plus le paramètre de


lissage est grand, plus la transition entre les deux régimes est brutale. Habituellement,
l’alternative à l’utilisation d’une fonction transition logistique est l’emploi d’une fonction
exponentielle proposée par Teräsvirta et Anderson (1992). La fonction de transition
exponentielle a l’avantage d’être plus parcimonieuse, nécessitant l’estimation d’un unique
seuil comme l’indique l’équation (7.3) (Bessec et Fouquau, (2008)) :

                                           ; , 1 exp γ q c  , γ  0,                                      7.3

Le figure (20) représente la fonction exponentielle dans le cas où le paramètre de seuil


0. Sur l’axe des abscisses figurent les valeurs de la variable de transition q prises
arbitrairement entre 5 et -5 et sur l’axe des ordonnées la valeur de la fonction de transition
; , .

276 
 
 

Figure 20. Fonction de transition exponentielle avec

1
Valeur de la fonction de transition 0.9
0.8
0.7
0.6
0.5
0.4
0.3 gam=1
0.2 gam=2.5
gam=5
0.1
gam=25
0
-5 0 5
Valeur de la variable de transition

Le profil de la fonction exponentielle est le même que celui de la fonction logistique


d’ordre 2 2 . Plus particulièrement, on retrouve la forme en U qui implique que la
fonction tend vers 1 lorsque la variable de transition  s’éloigne du paramètre de seuil c,
mais en revanche tend vers 0 pour  , ce qui n’était pas le cas avec la fonction logistique
d’ordre 2.

Ces deux fonctions de transition suggèrent des dynamiques différentes du processus de


retour à la moyenne: la fonction logistique est caractérisée par un ajustement asymétrique de
( y ) par rapport à ses valeurs passées en fonction de la variable de transition, (q ), qu’elle
soit au dessous ou au dessus du seuil : la fonction de transition détecte le signe des
déviations (effet signe). Par contre, la fonction exponentielle suggère un ajustement
symétrique: elle donne l’ampleur des déviations (effet taille). En d’autres termes, en utilisant
une fonction logistique on admet que les déviations positives et négatives retournent à la
moyenne avec des vitesses différentes, alors qu’avec la fonction exponentielle la vitesse de
retour à la moyenne est la même quelles que soient les déviations positives ou négatives.

Dans les modèles PSTR la valeur des élasticités, pour un pays donné et à une date
donnée, peut être différente de la valeur des paramètres estimés pour les régimes
extrêmes     . Le paramètre correspond à l’élasticité que si la fonction de
transition  ; , tend vers 0. La somme des paramètres      correspond à l’élasticité

277 
 
 

lorsque la fonction de transition  ; , tend vers 1. Entre ces deux régimes extrêmes,
l’élasticité est définie comme la moyenne pondérée des paramètres      .

Plus particulièrement, lorsque γ tend vers l’infini, la fonction de transition tend vers
une fonction indicatrice, le modèle PSTR possède alors le même mécanisme de transition
qu’un modèle PTR à deux régimes. En revanche, la fonction de transition devient constante
quand γ tend vers 0  limγ ; , 1/2 , le modèle PSTR se ramène alors à un modèle
de panel linéaire à coefficients homogènes et à effets fixes individuels. Dans la situation
intermédiaire où γ ne tend ni vers zéro ni vers l’infini, la dynamique d’une série peut être
décrite par les coefficients de pente de l’un ou l’autre des régimes extrêmes, ou à partir d’une
combinaison des coefficients des deux régimes extrêmes pondérés par la fonction de
transition  . Quel que soit le choix de la fonction de transition, les modèles PSTR ont le grand
avantage d’autoriser aux paramètres de varier en fonction de la variable de transition ( ) et
du pays considéré. Plus précisément, l’élasticité est définie comme la somme pondérée des
paramètres et 

    ; , ,

Enfin, ce modèle peut être analysé comme une généralisation du modèle PSTR pour
permettre à plus de deux régimes différents est le modèle additif à fonction de transition :

′ ′
                                       ; ,                                      7.4

Où ; , désigne la jème fonction de transition pour  1, . . . , associée à une

variable de transition  et à des seuils  .

Aucune contrainte n’est imposée sur le choix du mécanisme de transition, différentes


fonctions de transition peuvent être utilisées ainsi que diverses variables de transition. Si
   1,  , et ∞ pour tout    1, . . . , , le modèle (7.4) devient un modèle PTR
avec    1 régimes. Par conséquent, le modèle PSTR additif peut être considéré comme une
généralisation de multiple modèle PTR de Hansen (1999). Le modèle à régime multiples (7.4)

278 
 
 

est une alternative dans les tests de diagnostic de l'hétérogénéité résiduelle. L’évaluation des
modèles PSTR sera présentée dans la section suivante.

2.2. La construction d’un PSTR 
 

L’application des modèles non linéaires tels que le modèle de panel à transition lisse
nécessite une modélisation minutieuse et systématique. Les étapes de la modélisation sont les
mêmes que celles suivies dans les modèles en série temporelle (STR) et qui peut être étendu
aux modèles PSTR. La procédure de construction des modèles PSTR se décompose en 3
étapes : la spécification, l'estimation et l'évaluation. La spécification comporte des tests
d'homogénéité, en sélectionnant la variable de transition  appropriée. Si l’hypothèse de
l'homogénéité est rejetée, on détermine la forme appropriée de la fonction de transition, en
choisissant la valeur appropriée de dans l’équation (7.2). Les méthodes des Moindres
Carrés Non Linéaires sont utilisées pour l'estimation des paramètres. À l'étape de l'évaluation,
des tests de mauvaise spécification sont utilisées pour vérifier si le modèle estimé fournit une
description adéquate des données. Les hypothèses nulles testées à ce stade comprennent : la
constance des paramètres, la non hétérogénéité résiduelle et l’absence d’auto-corrélation des
résidus. Enfin, il faut déterminer le nombre de régimes dans le panel (Teräsvirta (1998) et van
Dijk, Teräsvirta, et Franses (2002)).

2.2.1.  La spécification du modèle: test d'homogénéité 
 

La phase de spécification initiale du cycle de modélisation se compose essentiellement


de l’hypothèse de l'homogénéité (ou test de linéarité) contre l'alternative PSTR. Nous
reprenons le modèle PSTR (équation 7.1) avec une unique fonction de transition logistique
d’ordre (équation 7. 2) et une variable de transition  . L’hypothèse d'homogénéité dans les
modèles PSTR peut être étudiée en testant les hypothèses suivantes:

    H : γ 0 versus γ 0
Ou
 H′ : β 0 versus β 0

Selon González et al. (2005), sous les deux hypothèses nulles le modèle PSTR
contient des paramètres de nuisance non identifiés. En particulier, les paramètres de seuil ne

279 
 
 

sont pas identifiés sous les deux hypothèses nulles. Le problème des tests d'hypothèses, en
présence de paramètres de nuisance non identifiés, a d'abord été étudiée par Davies (1977,
1987). Luukkonen et al. (1988), Andrews et Ploberger (1994) et Hansen (1996) ont proposé
des solutions alternatives dans le cadre des séries temporelles. Pour contourner le problème
d'identification, González et al. (2005) proposent de reprendre la même démarche que celle
proposée par Luukkonen et al. (1988). En effet, les auteurs proposent de remplacer la fonction
de transition ; , (équation 7.2) par son développement de Taylor au premier ordre
autour de  0. La transformation du modèle PSTR conduit à la régression auxiliaire
suivante.

′ ′ ′
                                                                     (7.5)

Où les vecteurs des paramètres  ′ , . . . , ′


sont des multiples de  et  ′
, où
 est le résidu du développement de Taylor. Par conséquent, le test  H : γ 0 dans (1) est
équivalent à tester l'hypothèse nulle H : β β 0 dans (7.4). Avec cette
reformulation, le problème des paramètres de nuisance non identifiés ne se pose plus dans
l’équation auxiliaire obtenue. Cette hypothèse nulle peut être commodément testée par un test
du multiplicateur de Lagrange LM. Afin de définir la statistique  , González et al. (2005)
proposent d’écrire l’équation (7.5) en notation matricielle comme suit:

                                                                                                                7.6


 
′ ′ ′
où ,…, avec ,…, ′,    1, . . . , ,        où est la
matrice identité de dimension N et est un vecteur 1 , et ,…, ′. Par ailleurs,
′ ′ ′ ′ ′ ′ ′ ′
    ,..., où   ,…, ′ ,     ,..., ′ avec   ,..., ′
′ ′ ′ ′
et   ,…, ′ , et   ,..., ′ . Enfin, le vecteur  
′ ′
  ,..., ′à  1 dimension et     ,..., ′.
La statistique du test LM a la forme suivante:

TN SCR SCR
                                                                                                                    7.7
SCR

280 
 
 

Où SCR est la somme des carrés des résidus d’un modèle linéaire avec effets individuels et
SCR la somme des carrés des résidus de l’équation auxiliaire. Sous l’hypothèse nulle, la
statistique LM est distribuée suivant une loi du chi-deux à degré de liberté où est le
nombre de variables explicatives. Cependant, lorsque l’échantillon est de petite taille,
González et al. (2005) proposent une statistique alternative :

SCR SCR

                                                          SCR                                                                      7.8

Sous l’hypothèse nulle, cette statistique de Fisher LMF est distribuée suivant une loi de
Fisher , . Ce test permet de rejeter ou non l’hypothèse d'homogénéité au
profit d’un modèle PSTR, mais également de déterminer une variable de transition "optimale"
parmi un ensemble de variables potentielles. Selon González et al. (2005), la variable de
transition optimale est celle qui minimise la p-value du test de linéarité.

Colletaz et Hurlin, (2006) ont proposé de calculer un pseudo- LRT 114 test, ayant
également une distribution asymptotiquement selon un 2 sous l'hypothèse nulle.
Cette statistique est définie comme:

                                                 2 log SCR log SCR                                                7.9

La logique est similaire quand il s'agit de tester le nombre de fonctions de transition


dans le modèle ou de manière équivalente le nombre de régimes extrêmes.

Deux remarques concernant le test d'homogénéité : Premièrement, le test peut être


utilisé pour sélectionner la variable de transition appropriée dans le modèle PSTR. Dans ce
cas, le test est effectué pour un ensemble de variables de transition. La variable de transition
appropriée est celle qui a le plus fort degré de rejet de la linéarité. Deuxièmement, le test
d'homogénéité peut également être utilisé pour déterminer l'ordre approprié de la fonction
de transition logistique115.

                                                            
114
Ce test est meilleur sur des petits échantillons
115
Granger et Teräsvirta (1993) et Teräsvirta (1994) ont proposé une série de tests séquentielle pour choisir entre
   1 et    2.  

281 
 
 

2.2.2.  Estimation des paramètres 
 

′ ′ ′
L'estimation des paramètres , , , ′ dans le modèle PSTR (7.1) est une
application de l'estimateur des Moindres Carrés Non Linéaire à effets fixes (NLS).
L’approche suivie pour l’estimation des coefficients de pente, des paramètres de seuil et de
lissage s’effectue en deux étapes. La première consiste à éliminer les effets fixes individuels
et la seconde revient à estimer les coefficients par les moindres carrés non linéaires. Pour la
première étape, il est nécessaire d’extraire les moyennes individuelles de l’équation (7.1) tout
en tenant compte de l’influence du seuil c et du paramètre de lissage γ.

Pour la variable expliquée et les résidus, l’opération consiste à calculer les variables
centrées sur leurs moyennes individuelles. L’élimination des effets fixes nécessite des
transformations Within standards dans les modèles de données de panel linéaires. Ces
transformations requièrent de réécrire le modèle PSTR (7.1) comme suit:


                                                           ,                                                   7.10
 
′ ′ ′ ′
Où , , ; , ′ et , ′ . En soustrayant les moyennes
individuelles de l’équation (7.10) donne:


                                                          ,                                                     7.11
 

′ ′ ′ ′
, , ; , , ′

, ; ,

282 
 
 

Avec , , et sont des moyennes individuelles. La matrice des variables explicatives


, dépend de la fonction de transition et doit être recalculée à chaque couple de
paramètre de seuil et de lissage γ.

Une fois les effets individuels éliminés, on applique les moindres carrés non-linéaires
afin de déterminer les différents coefficients du modèle. Il s’agit de minimiser la somme des
carrés des résidus du modèle PSTR par rapport aux coefficients de pente et au paramètre de
seuil et de lissage. Plus précisément, pour un couple , il est possible d’estimer les
coefficients de pente des régimes extrêmes à l’aide des moindres carrés (Colletaz et Hurlin,
(2006)).


                        , , , ,                          7.12

À partir de l’équation (7.11) le modèle PSTR devient linéaire conditionnellement


à β γ, c . Ainsi, les paramètres de la fonction de transition γ et c sont estimés par les moindre
carrés non linéaires à partir du programme suivant:

N T

                                           Q γ, c y β γ, c ′ ,                                        7.13

Finalement, pour un couple , il est possible d’estimer les coefficients de pente des
régimes extrêmes à l’aide des moindres carrés.

′ ′ ′ ′
                                                             , ,                                                         7.14

À partir des estimateurs de γ et c, il est possible d’estimer à nouveau les coefficients de


pente en se servant de l’équation (7.12). Lorsque les résidus sont supposés normalement
distribués, cette méthode d’estimation est équivalente à une procédure de maximum de
vraisemblance concentrée.
 

283 
 
 

Cependant, González et al. (2005), Colletaz et Hurlin, (2006) montrent que la


convergence de cette procédure d'estimation est fortement dépendante du choix de la valeur
initiale de et  . La solution proposée par Colletaz et Hurlin (2006) est alors de créer une
grille de recherche sur ces paramètres en sélectionnant plusieurs valeurs possibles pour le
paramètre de lissage et pour le seuil (prise parmi les valeurs de la variable de transition). La
somme des carrés des résidus pouvant être facilement calculée, il suffit ensuite de sélectionner
le couple qui la minimise et de s’en servir comme valeur de départ. González et al. (2005)
proposent comme autre solution pour obtenir les conditions initiales, l’emploi de l’algorithme
du simulated annealing (ou recuit simulé)116.

2.2.3.  L’évaluation du modèle 
 

L’évaluation d'un modèle PSTR estimé est une partie essentielle de la procédure de
construction du modèle. À cet effet, González et al. (2005) considèrent deux tests de mauvaise
spécification. Plus précisément, ils proposent le test de constance des paramètres au cours du
temps et le test de non linéarité résiduelle, développé par Eitrheim et Teräsvirta (1996),
utilisé dans le cadre des modèles STAR univarié. Les auteurs proposent aussi, une utilisation
alternative du test de non hétérogénéité résiduelle comme un test de spécification permettant
de déterminer le nombre de régimes dans le modèle PSTR.

a. Le test de constance des paramètres

Le test de constance des paramètres a connu un grand succès en séries temporelles


contrairement à celui en données de panel à dimension temporelle de petite taille.
L’augmentation de la taille de la dimension temporelle dans les modèles de donnés de panel a
rendu le test de constance des paramètres de plus en plus utile. Le test de constance des
paramètres permet de tester si la représentation PSTR se modifie au cours du temps
conditionnellement à une fonction de transition lisse qui a pour variable de transition le temps.
González et al. (2005) ont développé un test spécifique pour les modèles PSTR, et qui peut
être étendu à d'autres modèles à effets fixes après certaines modifications.

                                                            
116
Le recuit simulé est une méthode empirique (métaheuristique) inspirée d'un processus utilisé en métallurgie.
On alterne dans cette dernière des cycles de refroidissement lent et de réchauffage (recuit) qui ont pour effet de
minimiser l'énergie du matériau. Cette méthode est transposée en optimisation pour trouver les extrema d'une
fonction.

284 
 
 

L’hypothèse nulle de ce test correspond à la constance des paramètres tandis que


l’hypothèse alternative est que la valeur des coefficients de pente varie de manière lisse au
cours du temps. Sous l’hypothèse alternative, le modèle PSTR varie dans le temps et se
ramène à une représentation TV-PSTR (Time Varying Panel Smooth Transition Regression)
et qui peut définie comme suit :

′ ′
; ,                                                                                        

′ ′
                                                           ; , ; ,               7.15

Où ; , est une fonction de transition logistique ayant pour variable de transition


et ; , est une fonction de transition logistique d’ordre ayant pour variable de
transition le temps . Cette fonction a la forme suivante :

                                           ; , 1 exp  t c                              7.16

 
Où ,…, ′est un vecteur des paramètres de seuil de dimensions h avec 
… , et  est le paramètre de lissage  0 . Ceci est identique à  ; ,  tel que
défini dans (2) avec .Ainsi, lorsque h  1 , lemodèle TV-PSTR permet un simple
changement monotone, tandis que le changement est symétrique autour de     /
2 dans le cas où h   2. Le lissage de cette transition est contrôlé par  . Lorsque
∞, ; , devient une fonction indicatrice ; I  si h   1 et 1 I 
 si h   2. Lorsque  0, la fonction de transition ; , 1/2 pour tout  .

Dans l’équation (7.15), l’hypothèse nulle de constance des coefficients n’est pas
directement testable à cause des paramètres de nuisance. La solution à ce problème
d'identification est la même que celle proposée dans la section précédente. Il est alors
nécessaire d’avoir recours à un développement de Taylor du premier ordre autour de  . Le
remplacement de la fonction de transition ; ,  donnela régressionauxiliaire suivante:

                                 ; ,                        7.17

285 
 
 

Où ; , , et ; , est le terme du résidu de Taylor et les


paramètres et ̂ sont estimés sous l’hypothèse  H . Dans l’équation (7.17), les
paramètres  pour j  1, 2, . . . , h, h 1, . . . , 2h sont des multiples de  γ .L'hypothèse nulle de
constance des paramètres H : γ    0 dans l’équation (7.15) peut être reformulée
comme  H :      0 pour j  1, 2, . . . , h, h 1, . . . , 2h dans la régression auxiliaire.
Finalement sous H :  ; , 0  et , la série approximative de Taylor
n'affecte pas la théorie de la distribution asymptotique. Il est donc possible de calculer une
statistique de Lagrange du type LM  ou de Fisher suivant la taille de l’échantillon pour
effectuer ce test :

TN SCR SCR
                                                                                                                 7.18
SCR

SCR SCR

                                                                     SCR                                                        7.19

Où SCR est la somme des carrés des résidus sous l’hypothèse nulle autrement dit du modèle
PSTR équation (7.1) et  SCR , la somme des carrés des résidus lors de l’estimation de
l’équation auxiliaire équation (7.17). Sous l’hypothèse nulle la statistique LM est
asymptotiquement distribuéeselon un 2  et la statistique LMF est approximativement
distribuée selon un Fisher : F 2 , 2   1      1 .  Sous l’hypothèse
nulle le modèle est un modèle à effets fixes homogènes 0 dans l’équation
(7.15).

b. Le test de non hétérogénéité résiduelle


 

Le test de non hétérogénéité (non linéarité) résiduelle (no remaining heterogeneity)


permet de tester le nombre de régimes ou de manière équivalente le nombre de fonctions de
transition nécessaire pour capter toute l’hétérogénéité et la non-linéarité des données. La
logique de ce test est similaire à celle présentée lors des tests de constance des paramètres.

L'hypothèse selon laquelle un modèle PSTR à deux régimes capte adéquatement


l'hétérogénéité des données de panel peut être testée de différentes manières. Dans ce cadre,

286 
 
 

on considère un modèle additif PSTR avec      2 , ou un PSTR à trois régimes. Plus


précisément dans ce test, l’hypothèse nulle d’un modèle PSTR a une unique fonction de
transition r = 1 est confronté à l’hypothèse alternative d’un modèle PSTR possédant au
minimum deux fonctions de transition r = 2. L’écriture de ce modèle à trois régimes est la
suivante :

                    ; , ; ,                7.20

 
Où les variables de transition et  ne sont pas nécessairement les mêmes. L'hypothèse
nulle d'absence de l'hétérogénéité résiduelle dans l’estimation d’un modèle PSTR à deux
régimes peut être formulée comme H : γ    0. Ce test subit à nouveau le problème de
présence de paramètres de nuisance non identifiés sous l'hypothèse nulle. Comme

précédemment, le problème d'identification est contournée en remplaçant ; ,  par

son développement de Taylor au premier ordre autour de  γ    0 . Le choix d’une


approximation de premier ordre de Taylor conduit à la régression auxiliaire suivante :

       ; , ̂         7.21

 
Où et ̂ sont des estimateurs sous l'hypothèse nulle. L'hypothèse de non hétérogénéité
résiduelle peut alors être reformulée comme H :    ...      0 . Sachant que les
coefficients pour j  1, . . . , m sont des multiples de .

Il est ensuite possible d’utiliser une statistique de Lagrange ou de Fisher suivant la taille de
l’échantillon pour effectuer ce test :

TN SCR SCR
SCR

SCR SCR  

SCR

287 
 
 

Où SCR et SCR désignent respectivement, la somme des carrés des résidus sous l’hypothèse
nulle, autrement dit du modèle PSTR avec une fonction de transition (7.1), et la somme des
carrés des résidus lors de l’estimation de l’équation auxiliaire (7.21). Sous l’hypothèse nulle la
statistique LM est asymptotiquement distribuée comme un   et LMF est
approximativement distribuée comme un Fisher :   , 2        2 où
 est l’ordre de la fonction de transition.

c. Déterminer le nombre de régimes


 

Les tests de constance des paramètres et de non hétérogénéité résiduelle peuvent être
généralisés pour servir de tests de mauvaise spécification dans un modèle PSTR additif pour
toute valeur de  . Le test de non hétérogénéité résiduelle peut aussi servir pour déterminer le
nombre de régimes (fonctions de transition) dans le modèle.

En cas de rejet de l’hypothèse nulle, le modèle employé est mal spécifié. Il doit
contenir au minimum une seconde fonction de transition pour capter l’hétérogénéité restante.
La démarche doit alors se poursuivre, le modèle PSTR contenant deux fonctions de transition
doit être confronté à un modèle contenant trois fonctions. Cette séquence de test se poursuit
jusqu’au non rejet deH . Le paramètre  dont lavaleur est comprise entre]0, 1[permet de tenir
compte de l’emploi d’une stratégie de test séquentielle. Considérer un niveau de risque de
première espèce à    % conduit à accepter plus facilement l’hypothèse nulle ce qui a pour
avantage d’éviter d’obtenir des spécifications contenant un trop grand nombre de régimes. La
valeur de prise dans González et al. (2005) est de 0.5.

La procédure séquentielle peut être résumée dans les 4 étapes suivantes:

1. Estimer un modèle linéaire (homogène) et tester l'homogénéité du modèle à un


niveau de signification prédéterminé  .

2. Si l'homogénéité est rejetée, on estime un modèle PSTR à deux régimes.

3. Tester l'hypothèse de non hétérogénéité résiduelle pour ce modèle. Si elle est rejetée
à un seuil de significativité  , tel que 0  1 , on estime un modèle PSTR

288 
 
 

avec      2 . L'objectif de réduire le niveau du paramètre de significativité est


d'éviter les modèles avec un grand nombre de régimes.

4. Continuer jusqu'à la première acceptation de l'hypothèse de non hétérogénéité


résiduelle.

Dans cette section, nous avons présenté le modèle PSTR hétérogène. Ce modèle
permet aux coefficients de régression de varier en fonction d'une variable exogène et de
fluctuer entre un nombre limité de "régimes extrêmes" (souvent deux). Le modèle est une
généralisation du modèle PTR (Panel Transition Regression) à transition brutale, développé
par Hansen (1999). Le modèle permet aux coefficients une transition lisse lors du passage
d'un régime à un autre. L’approche comprend un cycle de modélisation pour le modèle PSTR,
contenant les tests d'homogénéité, de la constance des paramètres et du non linéarité
résiduelle. González et al. (2005) montrent que ces tests standards doivent être appliqués avec
prudence, étant donné qu'ils sont affectés considérablement par l'hétéroscédasticité
transversale.

À ce jour, il existe relativement peu d’applications des modèles à seuils. Initialement,


González et al. (2005) les ont utilisés pour prolonger à l’aide d’une transition lisse l’étude de
Hansen (1999) portant sur les décisions d’investissement des firmes en présence
d’imperfections sur le marché du capital. De la même manière, Béreau et al. (2009) les ont
employés pour montrer la présence d’effets de seuils dans l’impact des désajustements du
taux de change sur la croissance économique. Le comportement asymétrique de la croissance
économique vis-à-vis de l’évolution des désajustements du taux de change montre bien
l'utilité de l’application de ce type de modèle.

Nous introduisons une estimation basée sur les GMM qui ne peut être que d’ordre
comparatif. Cette méthodologie repose sur un modèle dynamique sur donnée de panel (c.à.d.
l’ensemble des variables explicatives incluse la variable dépendante retardée).Comme le
souligne Arellano et Bover ( 1995) et Arellano et Bond ( 1991), l’avantage de cette
méthode est de prendre en compte les effets spécifiques pays et pallier aux biais
d’endogénéité.

289 
 
 

L’´equation de régression pour l’estimation sous sa forme dynamique est donnée par :

                                                    µ                                         7.23

Où représente le taux de croissance du PIB par tête réel, est le logarithme du


PIB par tête réel décalé, représente les désajustements du taux de change effectif réel,
représente les variables de contrôle telles que le taux de scolarisation secondaire (IDH),
l’ouverture commerciale (OPEN), les dépenses publiques (GOUV) et l’inflation (INF), µ est
l’effet spécifique pays, est l’effet spécifique temporel et le terme d’erreur,    
représentent respectivement l’indice pays et l’indice temporel.

3. Procédure de l’estimation économétrique 
 

Dans cette étude, nous considérons un panel de 25 pays émergents (Argentine,


Bolivie, Basil, Chili, Chine, Colombie, Equateur, Egypte, Inde, Indonésie, Malaisie, Mexique,
Maroc, Pakistan, Paraguay, Pérou, Philippines, Singapore, Sri Lanka, Thaïlande, Tunisie,
Turquie, Uruguay, Venezuela et Vietnam) et 13 pays de l’OCDE (Allemagne, Autriche,
Corée du Sud, États-Unis, Espagne, Finlande, France, Ireland, Italie, Japon, Pays-Bas,
Portugal et Royaume-Unis) sur la période 1982-2010 sur données annuelles. Les données sont
tirées des bases de données du CEPII (CHELEM), de la Banque Mondiale et du Fond
Monétaire International. Les résultats des estimations du taux de change d’équilibre basés sur
le modèle FEER fournis par les travaux de Jeong et al. (2010) et Aflouk et al. (2010) sont
repris et étendus à un échantillon plus large (Bolivie, Equateur, Egypte, Maroc, Pakistan,
Paraguay, Pérou, Singapore, Sri Lanka, Tunisie, Turquie, Venezuela et Vietnam), en
conservant la même méthodologie (Annexe 9). Les données de  sont obtenues à partir de
la base de données de Barro et Lee (2010).

Nous proposons de réexaminer la relation entre les désajustements du taux de change


effectif réel et la performance économique à travers une étude économétrique intégrant
d’autres variables explicatives de la croissance qui sont devenues standard dans la littérature.
Nous appliquons une spécification PSTR ainsi à titre de comparaison les Méthodes des
Moments Généralisés dynamique (équation (7.23)).

290 
 
 

Nous avons dans un premier temps régressé, sur la totalité de l’échantillon, la


croissance du PIB réel par tête sur le PIB réel par tête décalée; destiné à capter un éventuel
effet de convergence, l’indice de développement humain et le taux d’inflation calculé à
partir des indices de prix à la consommation; le taux d'investissement / ; le degré
d’ouverture du commerce extérieur et l’investissement direct étranger  .Les
dépenses publiques  , en guise d’approximation de l’impulsion budgétaire, ont été
introduites séparément, afin de distinguer leurs effets éventuels.

La première de ces variables est le revenu par habitant décalé, son coefficient
représente l’effet de convergence, qui serait négatif selon la théorie néoclassique. La seconde
variable est une mesure du stock de capital humain. Les deux théories (néoclassique et
endogène) prédisent que le coefficient du stock de capital humain devrait être positif, car les
pays mieux dotés en capital humain devraient jouir d’une croissance plus élevée.

Les autres variables de contrôle comprennent : la part des dépenses d’investissement


réelles dans le PIB, celle des dépenses de consommation réelles du secteur public, des
mesures du degré d’ouverture au commerce et aux flux de capitaux internationaux. Le signe
attendu du coefficient de la part des investissements dans le PIB est positif, car l’accumulation
du capital est censée favoriser la croissance du PIB réel par habitant. Comme Aschauer(1989)
et Tanzi et Zee (1997) l’ont souligné, la variable relative à la consommation du secteur public
vise à représenter les dépenses publiques qui peuvent générer des externalités positives qui
améliorent la productivité des facteurs privés. Le coefficient de cette variable serait donc
positif. Quand, à l’effet attendu des échanges extérieurs, il reste ambigu dans la théorie
économique (Hadjimichael et al.1997) 117 . Les effets attendus des flux de capitaux
internationaux sur la croissance économique sont positifs.

S'agissant de la variable désajustements de change, la plupart des études mettent en


évidence deux effets importants : une surévaluation tend à ralentir la croissance, alors qu’une
sous-évaluation accroit la compétitivité des exportations ce qui génère des externalités
favorables à la croissance.

                                                            
117
Hadjimichael et Galy (1997):«The CFA Franc Zone and the EMU», IMF Working-Paper n°97/156.

291 
 
 

4. Résultats et interprétations 
 

Nous testons en premier lieu la linéarité118 et nous déterminons le nombre de régimes


nécessaires pour capter la non-linéarité et /ou l’hétérogénéité individuelle et l’instabilité
temporelle des coefficients de pentes. Dans un second temps, nous estimons les paramètres
des modèles à seuil afin de déduire l’élasticité entre croissance économique et les
désajustements du taux de change, mais également la croissance estimée par rapport à un
désajustement de change donné. Les estimations pour les modèles PSTR avec une fonction
logistique sont effectuées à partir des codes de Hurlin, et ceux de Colletaz.

Nous considérons alternativement les trois panels composés de pays différents : tout
l’échantillon, les pays émergents et en dernier lieu, celui des pays développés. La démarche
suivie est classique : dans une première étape nous testons la non-linéarité de notre fonction
de croissance à l’aide d’une spécification à seuils. Si l’hypothèse de linéarité est rejetée nous
devons ensuite déterminer le nombre de fonctions de transition optimal pour capter toute la
non-linéarité. Pour chaque spécification, nous avons donc reporté dans le tableau (27) le
calcul des statistiques de test LM ainsi que les statistiques du test de Fisher. Ces valeurs sont
indiquées jusqu’au premier non rejet de H . Cependant, nous limitons notre analyse à un
modèle à une fonction de transition logistique  1 .

Il apparaît que quelles que soit les statistiques adoptées ou l’echantillon sélectionné, le
test de linéarité conduit clairement au rejet de l’hypothèse nulle d’existence d’une relation
linéaire entre la croissance économique et les désajustements de change.

                                                            
118
Le test de linéarité contre une alternative PSTR consiste à  H   θ    0 dans l’équation (4) pour la
spécification avec une fonction de transition logistique, et H   θ   θ  0 pour la fonction logistique.

292 
 
 

Tableau 26. Tests de linéarité contre l’alternative PSTR

Tous les pays Pays émergents Pays developpés


LM LM LM
40.79 6.77 56.95 9.83 42.87 7.65
H0 : r = 0 vs H1 : r = 1
(0.00) (0.00) (0.00) (0.00) (0.00) (0.00)

9.74 1.55 1.96 0.31 5.11 0.79


H0 : r = 1 vs H1 : r = 2
(0.13) (0.15) (0.92) (0.93) (0.52) (0.57)
La procédure de test est la suivante. Premièrement le modèle linéaire (r = 0) est testé contre un modèle à un seuil
   1 . Si l’hypothèse nulle est rejetée, le modèle à un seuil est testé contre un modèle contenant deux seuils.
La procédure se poursuit jusqu’à ce l’hypothèse de seuil additionnel soit rejetée. Les statistique LM et LMF
correspondantes suit une distribution asymptotique χ2(1) pour une fonction logistique sous l’hypothèse nulle.
Les p − values correspondantes sont reportées entre parenthèses. (Source: estimations de l’auteur).

Les coefficients de pentes éstimés pour les modèles PSTR, les parametres de lissages
et de seuils ainsi que les résultats des GMM sont reportés dans les tableaux 28, 29 et 30. Nous
considérons les modèles LPSTR avec    1, les coefficients ont les signes attendus : est
toujours positif, tandis que le coefficient est négatif. Les valeurs des paramètres de lissage
estimées sont relativement petites. Ce point confirme l’impossibilité d’utiliser un modèle à
transition brutale pour décrire la relation non-linéaire entre la croissance économique et les
désajustements de change. Les résultats montrent bien que les désajustements du taux de
change de change influent différemment sur la croissance économique, d’une part par rapport
aux modèles d’estimations adoptés (PSTR, GMM) et d’autre part par rapport à l’échantillon
retenu.

Nous accordons notre attention en premier lieu à l’ensemble des variables de contrôle
pour les trois échantillons considérés. Toutes les variables explicatives ont des signes attendu,
quelle que soit la spécification retenue (PSTR, GMM).

Les régressions révèlent un effet négatif très significatif du PIB réel par habitant
décalé. Ce résultat appuie donc l’hypothèse de l’effet de convergence avancé par la littérature
théorique. L’investissement semble jouer un rôle plus important dans le cas des pays
développés. Ce constat peut être rendu au fait que les investissements dans la pluparts des
pays émergents sont parfois orientés vers des projets improductifs (secteur immobilier,
consommation finale, etc.…). Les variables qui reflètent les relations extérieures des pays
soulèvent quelques interrogations. Alors que les IDE ont produit un effet attendu pour les
diverses spécifications, l’effet inattendu du degré d’ouverture commerciale pour les pays

293 
 
 

développés résultant du modèle PSTR, signifie que les taux d’ouverture commerciale
importants qui ont marqué ces économies n’ont pas favorisé leur croissance économique. Un
tel effet peut être rendu, entre autres, à l’adoption en pratique des modèles de croissance tirés
beaucoup plus par la demande interne. En revanche la variable IDH (indicateur du
développement humain), malgré son signe positif pour les différentes spécifications semble
avoir un effet plus significatif sur la croissance pour économies émergentes. L’effet de
l’inflation s’avère de signe attendu, avec un effet négatif et très significatif. Il reste à signaler
que nous avons écarté la variable des dépenses publiques des régressions. Etant donnée la
disponibilité limitée de données et/ou même si elles existent, elles ne représentent qu’une
partie des dépenses publiques (consommations des administrations publiques). Ces difficultés
nous empêchent d’interpréter avec précision l’effet attendu de cette variable.

En ce qui concerne l’effet des désajustements de change sur la croissance économique,


les résultats du modèle PSTR apparaissent relativement concordants dans l’ensemble pour les
trois échantillons. En outre, nous constatons que la valeur du paramètre de seuil est différente
d’un échantillon à l’autre. Selon nos estimations, nous obtenons des paramètres de seuil pour
les désajustements de 15,8 % pour l’échantillon total, 15,5 % pour les pays émergents et 9 %
pour les pays développés. Ces résultats sont relativement importants et peuvent refléter le
degré de développement de chaque région.

Tableau 27. Les déterminants de la croissance : PSTR et GMM ;Tous l’echantillon (1982-2010)
 

PSTR GMM
Variable Coeff T-Stat Coeff T-Stat
PIB par habitant décalé en log -0.028 -4.940 -0.030 -6.459
Inflation -0.001 -4.526 -0.001 -4.654
Investissement/PIB 0.043 2.240 0.039 2.017
IDH 0.002 1.012 0.003 1.167
Degrés d'ouverture 0.065 4.046 0.069 4.172
IDE/PIB 0.220 5.194 0.213 5.049
Désajustements 0.029 4.162 0.008 1.668
Désajustements * ; , -0.050 -3,920
0.158
5.000
Source : estimations de l’auteur

294 
 
 

Considérons tous d’abord l’échantillon total (tableau 28). En ce qui concerne les
résultats des estimations PSTR, le seuil estimé pour le désajustement est de 15,8 %. En effet
dans le premier régime, le coefficient est de 0.029 ( ; , 0 . Nos résultats
confirment l’effet négatif de la surévaluation 0  sur la croissance, quelque soit sa valeur.
En outre, une sous-évaluation 0 de moyenne taille jusqu’à environ 16 % peut être
favorable à la croissance économique. Ce constat est en accord avec les résultats d’Aguirre et
Calderón (2005) et Berg et Miao (2010).Cependant, dans le second régime, les
mésalignements semblent jouer diffèrament sur la croissance. L’impact de la sous-évaluation
à des niveaux relativement élevés sur la croissance est négatif et significatif dans le cas du
régime exreme ( ; , 1 . Au dela de 15,8 %, une augmentation de la sous-
évaluation de 1% contribue à une réduction de la croissance du PIB par habitant de 2,1 %.
Aguirre et Calderón (2005) montrent que la croissance est positive seulement pour les sous-
évaluations de petites tailles (jusqu’à 12 %). Nos résultats ne semblent pas être concordants
avec ceux de Béreau et al (2009). En effet, les auteures montrent que la sous-évaluation -
quelle que soit sa taille- affecte positivement la croissance. A contrario, elles concluent que
les surévaluations de grande taille n’ont pas un effet sur la croissance économique.

En théorie, l’industrialisation peut être accomplie à travers la sous-évaluation réelle en


créant des profits dans le secteur des biens échangeables. Cependant, des difficultés peuvent
apparaître. Une monnaie très sous-évaluée implique une détérioration de la distribution des
revenus et une utilisation intensive des ressources naturelles. Les dévaluations peuvent mener
à des niveaux des sous–évaluations excessives. Ce phénomène incite souvent à une inflation
et une récession, notamment par le renchérissement des biens de production. Elle pousse ainsi
à une spirale inflation-dévaluation, causant un sérieux retard dans le développement
économique (Dervis et Petri, 1987; Isard, Ito et Symansky, 1997).

Il apparait selon l’étude économetrique basée sur les modèles du GMM (tableau 28)
que les mésalignements du taux de change effectif réel ont une faible influence sur la
croissance des pays dans leurs ensemble. Malgé leurs signes attendus, les désajustements de
change ne semblent pas jouer un role important dans les performances economiques des pays
étudiés. Ce constat peut être expliqué d’une part par les diffèrents niveaux du developpements
de ces pays et d’autre part par l’importante volatitilé des mésalignements surtout dans les
économies emergentes.

295 
 
 

Tableau 28. les déterminants de la croissance : PSTR et GMM ; Les pays émergents

PSTR GMM
Variable Coeff T-Stat Coeff T-Stat
PIB par habitant décalé en log -0.053 -6.674 -0.053 -6.699
Inflation -0.001 -3.653 -0.001 -3.614
Investissement/PIB 0.032 1.467 0.032 1.440
IDH 0.023 4.619 0.025 5.291
Degrés d'ouverture 0.052 2.738 0.058 3.000
IDE/PIB 0.280 3.748 0.280 3.667
Désajustements 0.022 2.549 0.009 1.538
Désajustements * ; , -0.031 -2,022
0.155
5.000
Source : estimations de l’ auteur.

En prenant en compte les disparités des niveaux de developpements entre les pays,
nous procédons à l’estimation de la relation mésalignements-croissance sur deux sous
échantillons.

Les résultats reportés dans les tableaux (28) et (29) peuvent réveler certaines
divergences : Premièrement, le seuil estimé varie entre les deux groupes de pays: 9 %
seulement pour les pays développés et 15,5% pour les pays émergents. Cette différence peut
être expliquée par le fait que les désajustements de change en moyenne sont plus élevés dans
les pays émergents que dans les pays avancés. Les économies émergentes sont en situation de
rattrapage économique. Ces pays utilisent les meilleures stratégies pour maintenir la
compétitivité de leurs exportations. Une monnaie sous-évaluée peut favoriser les exportations
de façon significative; ce qui relance considérablement la croissance.

296 
 
 

Figure 21. Impact des désajustements de change sur la croissance dans les pays émergents
 

Argentine Brésil
80 0.2 80 0.2
M 0 M 0
60 60
é é
40 -0.2 40 -0.2
s I s I
-0.4 -0.4 m
a 20 m a 20
l -0.6 p l -0.6 p
0 0
i -0.8 a i -0.8 a
-20 c -20
g -1 g -1 c
n -40 -1.2 t n -40 -1.2 t
e -60 e -60
-1.4 -1.4
m m
-80 -1.6 -80 -1.6
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Chine Inde
80 0.2 80 0.2
M M
60 0 60 0.1
é é
s 40 -0.2 I s 40 0 I
a 20 m a 20 m
-0.4 p -0.1 p
l 0 l 0
i -0.6 a i -0.2 a
g -20 c g -20 c
-40 -0.8 t -40 -0.3 t
n n
e -60 -1 e -60 -0.4
m m
-80 -1.2 -80 -0.5
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Indonesie Philippines
80 0.2 80 0.2
M M 0.1
60 0 60
é é
0
s 40 -0.2 I s 40 I
-0.1 m
a 20 -0.4 m a 20
l 0 p l -0.2 p
-0.6 0
i a i -0.3 a
g -20 -0.8 c g -20
-0.4 c
n -40 -1 t n -40 -0.5 t
e -60 -1.2 e -60 -0.6
m m
-80 -1.4 -80 -0.7
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Mexique Colombie
80 0.2 80 0.5
M M
60 60
é 0.1 é 0
s 40 I s 40 I
0
a 20 m a 20 -0.5 m
l p l p
0 -0.1 0
i a i a
-20 -20 -1
g -0.2 c g c
n -40 t n -40 t
-0.3 -1.5
e -60 e -60
m m
-80 -0.4 -80 -2
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

297 
 
 

Thailande Malaisie
80 0.2 80 0.1
M
60 0.1 M
60
é 0 é 0
s 40 I s 40 I
-0.1 -0.1 m
a 20 -0.2 m a 20
l p l 0 p
0 -0.3 -0.2
i a i a
-20 -0.4
g c g -20 -0.3 c
-0.5
n -40 t n -40 t
-0.6 -0.4
e -60 e -60
-0.7
m m
-80 -0.8 -80 -0.5
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Egypte Turquie
80 0.2 80 0.2
M M
60 60
é 0 é 0
s 40 I s 40 I
-0.2 m
a 20 -0.2 m a 20
l p l p
0 0 -0.4
i a i a
-20 -0.4 -20
g c g -0.6 c
n -40 t n -40 t
-0.6 -0.8
e -60 e -60
m m
-80 -0.8 -80 -1
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Tunisie Maroc
80 0.2 80 0.2
M M
60 60
é 0 é 0
s 40 I s 40 I
-0.2 m -0.2 m
a 20 a 20
l p l p
0 -0.4 0 -0.4
i a i a
-20 -20
g -0.6 c g -0.6 c
n -40 t n -40 t
e -0.8 e -0.8
-60 -60
m m
-80 -1 -80 -1
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Bolivie Chili
80 0.5 80 0.2
M M
60 60 0
é 0 é
s 40 I s 40 -0.2 I
a 20 -0.5 m a 20 m
p -0.4 p
l 0 l 0
i a i -0.6 a
-1
g -20 c g -20 c
-0.8 t
n -40 t n -40
-1.5
e -60 e -60 -1
m m
-80 -2 -80 -1.2
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

298 
 
 

Equateur Paraguay
80 0.2 80 0.2
M M 0
60 0.1 60
é é
-0.2
s 40 0 I s 40 I
-0.4 m
a 20 m a 20
-0.1 p -0.6 p
l 0 l 0
i -0.2 a i -0.8 a
g -20 c g -20
-1 c
-0.3 t
n -40 n -40 -1.2 t
e -60 -0.4 e -60 -1.4
m m
-80 -0.5 -80 -1.6
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Perou Uruguay
80 0.2 80 0.2
M 0 M
60 60 0
é é
40 -0.2 40 -0.2 I
s I s
-0.4
a 20 m a 20 -0.4 m
l -0.6 p l p
0 0 -0.6
i -0.8 a i a
-20 c -20 -0.8 c
g -1 g
n -40 -1.2 t n -40 -1 t
e -60 e -60 -1.2
-1.4
m m
-80 -1.6 -80 -1.4
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Venezuela Vietnam
80 0.2 80 0.2
M M
60 0 60
é é 0
s 40 -0.2 I s 40 I
-0.2 m
a 20 -0.4 m a 20
l p l p
0 -0.6 0 -0.4
i a i a
-20 -0.8 c -20
g g -0.6 c
n -40 -1 t n -40 t
e e -0.8
-60 -1.2 -60
m m
-80 -1.4 -80 -1
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

Singapore Sri Lanka


80 0.15 80 0.2
M M
60 0.1 60
é é 0
s 40 0.05 I s 40 I
a 20 m a 20 -0.2 m
0 p p
l 0 l 0
i -0.05 a i
-0.4
a
g -20 c g -20 c
-40 -0.1 t -40 t
n n
-0.6
e -60 -0.15 e -60
m m
-80 -0.2 -80 -0.8
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact

299 
 
 

Pakistan
80 0.2
M 0
60
é
40 -0.2
s I
-0.4 m
a 20
l -0.6 p
0
i -0.8 a
-20 c
g -1
n -40 -1.2 t
e -60 -1.4
m
-80 -1.6
e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n
t
Mésalignement Impact

Source : calculs de l’auteur


 
Deuxièmement, les résultats des modèle PSTR, montrent que la sous-évaluation a un
effet négatif signficatif sur la croissance des pays émergents au dessus du seuil estimé (15,5
%)119. Ceci est illustré dans les figures (21), qui représentent les désajustements du taux de
change réel et leurs effets sur la croissance (c'est à dire l'élasticité). Comme on peut le voir,
plus la taille des sous-évaluations est élevée (des valeurs inférieures au seuil estimé), plus
l'effet positif des désajustements sur la croissance est important (voir, par exemple,
l'Argentine à partir du 2002, la Malaisie après 1996 ou la Chine après 1994). Au contraire, les
surévaluations ont des effets négatifs (voir le Mexique entre 1991 et 1995 ou le Brésil entre
1996 à 2002, par exemple).

En revanche pour les pays avancés, même au dela du seuil de 9 %, la sous-évaluation a


un effet significatif et positif à hauteur de 0,028. Ce résultat peut être expliqué par une
volatilité des désajustements de change mieux maitrisée dans les pays developpés par rapport
aux pays émergents. À ce sujet, Magyari (2008), Aguirre et Calderón (2005) et autres
montrent que la relation est négative entre la croissance économique et la volatilité des
désajustements de change. Ce résultat peut être expliqué aussi par les effets néfastes de la
persistance de l’instabilité du taux de change sur la croissance (Ghura et Grennes, 1993;
Bleany et Greenaway, 2001). Ce constat met en avant les effets positifs de la politique
monétaire adoptée par les économies developpées. Cette politique favorise la stabilité du
niveau des prix et par conséquence la stabilité du taux de change réel dans les économies
avancées. En outre le régime de change flexible adopté par ces pays favarise la stabilité du
taux de change en permettant un ajustement automatique.

                                                            
119
Le coefficient dans le second régime = (0,022-0,031=-0,009)

300 
 
 

Tableau 29. les déterminants de la croissance : PSTR et GMM ;Les pays développés (1982-2010)
 

PSTR GMM
Variable Coeff T-Stat Coeff T-Stat
PIB par habitant décalé en log -0.048 -6.954 -0.43 -19.53
Inflation -0.228 -5.422 -0.23 -3.53
Investissement/PIB 0.466 8.137 1.38 15.15
IDH 0.002 1.218 0.06 11.36
Degrés d'ouverture -0.036 -1.337 0.08 1.93
IDE/PIB 0.158 4.844 0.06 2.05
Désajustements 0.076 5.325 0.04 2.66
Désajustements * ; , -0.048 -1.988
0.090
5.000
Source : estimations des auteurs

Troisièmement, les résultats obtenus par les estimations GMM à partir des deux sous
échantillons appuient les constats démontrés auparavant. Les désajustements avec un
coefficient positif mais non significatif (tableau 29) n’apparaissent pas comme un déterminant
de la croissance pour les économies émergentes.

Figure 22. Impact des désajustements de change sur la croissance dans les pays avancés

États-Unis Royaume-Uni
80 1.5 80 0.6
M 1 M
60 60 0.4
é é
40 0.5 40 0.2
s I s I
0
a 20 m a 20 0 m
l -0.5 p l p
0 0 -0.2
i -1 a i a
-20 -20 -0.4 c
g -1.5 c g
n -40 -2 t n -40 -0.6 t
e -60 e -60 -0.8
-2.5
m m
-80 -3 -80 -1
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact
    

301 
 
 

Japon Corée
80 1 80 1
M 0.8 M
60 60
i é 0.5
40 0.6 40
s I s I
0.4 m
a 20 a 20 0 m
l 0.2 p l p
0 0
i 0 a i a
-20 -20 -0.5
g -0.2 c g c
n -40 -0.4 t n -40 t
-1
m -60 e -60
-0.6
e m
-80 -0.8 -80 -1.5
n e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 10
t n
t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact
    

France Allemagne
80 1 80 1.5
M M
60 60
é 0.5 é 1
s 40 I s 40 I
0
a 20 m a 20 0.5 m
l p l p
0 -0.5 0
i a i a
-20 -20 0
g -1 c g c
n -40 t n -40 t
-1.5 -0.5
e -60 e -60
m m
-80 -2 -80 -1
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact
    
Espagne Portugal
80 3 80 3
M M
60 2 60 2
é é
s 40 1 I s 40 1 I
a 20 0 m a 20 m
p 0 p
l 0 -1 l 0
i a i -1 a
g -20 -2 c g -20 c
-40 -3 t -40 -2 t
n n
e -60 -4 e -60 -3
m m
-80 -5 -80 -4
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact
    

Italie Irlande
80 0.8 80 1
M M
60 0.6 60
é é 0.5
s 40 0.4 I s 40 I
a 20 0.2 m a 20 0 m
l p l p
0 0 0
i a i a
-20 -0.2 c -20 -0.5
g g c
n -40 -0.4 t n -40 t
-1
e -60 -0.6 e -60
m m
-80 -0.8 -80 -1.5
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact
    

302 
 
 

Pays-Bas Finlande
80 0.4 80 1.5
M 0.2 M 1
60 60
é é
40 0 40 0.5
s I s I
-0.2 m 0
a 20 a 20 m
l -0.4 p l -0.5 p
0 0
i -0.6 a i -1 a
-20 -20
g -0.8 c g -1.5 c
n -40 -1 t n -40 -2 t
e -60 e -60
-1.2 -2.5
m m
-80 -1.4 -80 -3
e e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
n n
t t
Mésalignement Impact Mésalignement Impact
    

Autriche
80 1.5
M
60
é 1
s 40 I
a 20 0.5 m
l p
0
i a
-20 0
g c
n -40 t
-0.5
e -60
m
-80 -1
e
82 84 86 88 90 92 94 96 98 00 02 04 06 08
n
t
Mésalignement Impact
 
Source : calculs de l’auteur
 
Selon les résultats des estimations du taux de change d’équilibre, nous constatons que
les désajustements de change pour les pays émergents sont plus élevés et moins stables que
ceux des pays industrialisés. Cette constatation peut être attribuée en partie à des politiques
macroéconomiques (commerciales et du taux de change) inappropriées (Ghura et Grennes,
1993). Le degré élevé des désajustements et leurs persistances se sont révélés être une source
importante de ralentissement de la croissance et surtout dans les pays émergents comme le
montre le tableau (annexe 10). En effet, Sallenave (2010) conclu que l'ajustement vers
l'équilibre tend à être plus souple dans les économies industrialisées que dans les économies
émergentes. Ainsi, elle met en évidence que les pays qui poursuivent des réformes
appropriées pour réduire les désajustements du taux de change sont plus susceptibles
d'enregistrer des gains en termes de croissance.

303 
 
 

Conclusion 
 

L'objectif principal de ce chapitre est d’étudier l'impact des désajustements du taux de


change effectif réel sur la croissance économique. Par conséquence, nous avons repris les
résultats des estimations du taux de change d’équilibre basés sur le modèle FEER fournis par
les travaux de Jeong et al. (2010) et Aflouk et al. (2010). Dans ce travail, nous avons élargi
l’échantillon en rajoutant d’autres pays. Nous nous basons sur la même méthdologie.

Pour cet objectif, nous avons utilisé le modèle PSTR avec une fonctionde transition de
type logistique et la spécification du GMM afin de caractériser la relation entre les
désajustements de change et la croissance économique.

Notre étude effectuée sur un échantillon de 25 pays émergents et 13 pays developpés


sur une la periode 1982-2010 confirme la présence de non-linéarité et de l’asymetrie dans
cette relation.Par ailleurs, l’emploi de spécification à seuil avec une fonction de transition
logistique caractérise mieux les comportements de la relation mésalignements-croissance pour
les trois échontillons.

Dans l’ensemble les variables explicatives de contrôle sont significatives et de signe


attendu. Les résultats obtenus pour la variable mésalignement montrent que pour les valeurs
en dessous des seuils estimés, les surévaluations ont un effet négatif sur la croissance. En
revanche jusqu’aux seuils éstimés, la sous-évaluation a un effet positif.

Cependant, la division en sous-échantillon de pays permet d’observer que la valeur du


seuil varie entre les économies avancées et les économies émérgentes, un seuil de 9 % pour
les économies industrialisées et 15,5% pour les pays émergents. Le niveau initial du
développement, ainsi que les mésalignements globalement plus élevés dans les pays
émergents que dans les pays avancés, peuvent expliquer les différentes valeurs du seuil entre
les deux groupes de pays.

Nous constatons dans la relation décrite ci-dessus que l’effet des désajustements sur la
croissance dépend de la taille de l’écart du taux de change par rapport à l’équilibre dans le cas
des sous-évaluations. D’une part, nous trouvons que l’effet sur la croissance est plus
défavorable, quelle que soit la taille de la surévaluation. D’autre part, nous constatons que la
304 
 
 

croissance est positive dans le cas des sous-évaluations de petite taille (jusqu’à 15,5 %) et un
effet négatif dans le cas des importantes sous-évaluations pour les pays émergents. En
revanche pour les pays avancés, la sous-évaluation semble avoir un effet positif même au dela
du seuil estimé.

Les conclusions de l’analyse basée sur les spécifications des GMM sont données à
titre comparatif. Cette méthode ne met pas en évidence les effets des variations du taux de
change propres à un pays mais, pour l’ensemble des pays. Pour les pays émergents, les
résultats des GMM montrent que les désajustements de change, même s’ils ont un signe
attendu, n’apparaissent pas comme un déterminant favorisant la performance économique des
pays émergents. Ces résultats impliquent que la croissance est entravée par des écarts trop
élèves du taux de change par rapport au niveau d'équilibre.

Les contributions de la littérature empirique soulèvent l’importance des


désajustements de change pour expliquer les performances économiques surtout dans les pays
émergents. Cependant, les désajustements peuvent avoir des conséquences qui vont au-delà de
l’impact couramment exercé sur la compétitivité des exportations des pays considérés (Collins
et Razin, 1997). Lahrèche-Révil (1999) montre que le niveau du taux de change réel n’est pas
un déterminant systématique de la croissance, mais un catalyseur : si les conditions internes
sont réunies, une sous-évaluation réelle peut avoir un impact favorable sur la croissance.

305 
 
 

CONCLUSION GENERALE 
 

Avec l'ouverture croissante des économies, la question du régime de change optimal


est devenue une problématique centrale de la politique économique et par conséquent de
l'analyse économique. Dans ce travail, cette problématique a été abordée à travers les
interactions entre la politique de change et la politique macroéconomique (monétaire,
budgétaire, inflation, etc.). Après plusieurs revirements d'opinions sur l'optimalité d'un régime
de change fixe par rapport à un régime de change flottant un consensus semble se dégager,
plus circonspect où les recommandations de politique de change sont moins générales. Cet
état d'esprit est parfaitement résumé par l'affirmation de Fränkel (1999) selon laquelle «aucun
régime de change particulier n'est approprié pour tous les pays ou tout le temps». Ce qui
pourrait passer pour un échec et au contraire l'expression d'un approfondissement des
connaissances en matière de régime de change et incite à poursuivre cet effort de
compréhension de la politique de change et celle de ses effets sur l'économie. Cet effort est
nécessaire d'abord parce que l'objectif de développement économique consiste à créer les
conditions favorables à une croissance économique forte et durable qui permettent d'élever
continuellement le bien-être, en particulier celui des plus défavorisés.  

Notre démarche a consisté à nuancer les discours sur les systèmes de change qui ont
pu apparaître trop manichéens. En effet, on observe concrètement que les transitions dans les
régimes de change ne sont pas linéaires et n’obéissent pas aux mêmes critères dans tous les
pays. D'une part, l’insoutenabilité d'un régime change fixe n’est pas intrinsèquement lié à la
nature du régime. Tant d'un point de vue théorique qu'empirique, les facteurs qui provoquent
la rupture de régime sont d'origines diverses. D'autre part, la relation entre flexibilité de
change et meilleures performances économiques n’est guère plus robuste. Les éléments
généralement avancés pour accréditer cette relation sont les suivants :  

1. La comparaison de la distribution des régimes sur longue période, semble être


favorable au régime de change flexible. Mais se focaliser sur la tendance générale à
partir des régimes de change de juré pur peut conduire à des conclusions hâtives. En
effet, des catégorisations plus fines qui tiennent compte des régimes de change
réellement mis en œuvre conduisent à réévaluer le rôle des régimes de change fixe et
surtout des régimes intermédiaires. L’élargissement de la classification officielle du
FMI à la fin des années 1990 a conduit à un renversement de l’appréciation du régime

306 
 
 

de change dominant. Le mouvement de transformation des régimes de change ne s'est


pas traduit par un incessant mouvement vers la flexibilité et notamment sous sa forme
de flottement libre. On observe par ailleurs, le maintien de nombreux régimes de
change intermédiaires. La tendance d'une domination des régimes de change de
flottement libre semble même s’inverser, en passant de 60% en 2000, à 53 % en 2010.
La distribution semble par conséquent se stabiliser autour de deux catégories
prédominantes. Il s’agit du flottement géré et du change fixe par rapport à une seule
monnaie. Ce constat est aussi confirmé par les nombreuses études basées sur la notion
de régime de facto soutenant que la classification officielle surestime la flexibilité du
taux de change. En somme, les régimes intermédiaires continuent d’être une part
importante des régimes de change existants. De plus, le passage à des régimes plus
flexibles observé depuis les années 1970 semble moins prononcé que dans les
déclarations et les classifications officielles. L’adoption des taux de change flottants
par les pays émergents est un phénomène qui doit donc être observé avec prudence.  

2. L’ensemble des études établissent peu de différence entre le change fixe et flexible en
matière de taux de croissance par tête. Une distinction apparaît sur la volatilité du PIB
plus prononcée dans les premiers mais ils affichent habituellement une inflation plus
basse. Le double effet discipline-crédibilité est souvent avancé pour justifier cet
avantage. Toutefois, les pays qui changent fréquemment leurs parités malgré le
maintien d’un ancrage n’en bénéficient pas pleinement. Les enseignements tirés des
effets d’une plus grande flexibilité sur les performances économiques demeurent peu
robustes (Edwards et Savastano 1999). Les résultats permettent donc de croire que la
présence d’un cadre de politique monétaire solide, plutôt qu'un régime de change en
tant que tel, est un facteur déterminant de la croissance économique. Il ne faut donc
pas conclure à une relation de causalité entre régime de change et performances
économiques. Les performances économiques d’un pays ne peuvent être entièrement
attribuées au régime de change adopté, ni aux objectifs qu’il assigne et ni aux
contraintes auxquelles il est confronté. 

Après cette remise en cause d'un lien univoque entre régime de change et
performances macroéconomiques nous avons procédé à un travail économétrique à partir de
l’évolution et du fonctionnement des régimes de change dans les pays émergents en lien avec
leurs performances économiques. Plus précisément, notre recherche a visé à estimer les effets
macroéconomiques du système de change. Dans un premier temps, nous avons étudié l'impact

307 
 
 

que le régime de change exerce sur la croissance. Ensuite, nous avons approfondi notre
investigation pour comprendre comment le régime de change affecte la croissance en essayant
de répondre aux trois questions suivantes.  

 L'impact de l’inflation sur la croissance est-il modifié par le régime de change ?  

 L'effet du système de change sur la croissance dépend-t-il du degré d’ouverture ? 

 L'effet du système de change sur la croissance dépend-t-il du développement du


système financier domestique ?  

Par rapport à la littérature existante, nos apports se situent à différents niveaux. Nos
conclusions semblent indiquer que la neutralité du régime de change prévaut principalement
dans l’échantillon des pays étudiés. Dans les pays émergents, les systèmes de change fixes et
flexibles n'exercent pas d’effets statistiquement distincts, quelle que soit la typologie adoptée
(jure ou facto). Cette absence de lien est donc robuste au type de classification utilisé. Ces
résultats sont obtenus en contrôlant les relations économétriques avec l'ensemble des variables
de contrôles usuelles. En effet, nos résultats suggèrent que, les canaux de l'ouverture
commerciale, de l'investissement et du capital humain semblent les plus importants comme
déterminants de la croissance dans les pays émergents. Notre modèle a indiqué aussi que
l’impact des marchés financiers sur la croissance économique demeure très limité dans ces
pays. 

Nos résultats montrent également que la variable d’interaction entre les régimes de
change fixes et l’inflation affecte négativement la croissance. Ce constat remet en cause
l’effet «discipline» souvent avancé pour justifier le choix des régimes de change fixes. Par
ailleurs, le développement du système financier domestique réduit la croissance, en raison de
l'instabilité souvent associée à la libéralisation financière dans les pays émergents. En outre,
les gains du développement financier sur la croissance ne sont pas renforcés dans les systèmes
de change flexible. Cela suggère que, favoriser le développement du système financier peut
constituer un moyen pour les pays qui choisissent un régime de change fixe de réduire les
effets négatifs sur la croissance. De même, les régimes de change associés à l’ouverture
commerciale n’apparaissent pas comme des déterminants significatifs de la croissance. Ainsi,
contrairement à la thèse selon laquelle l’ouverture commerciale associée à un régime de
change flexible améliore la croissance n'est pas confirmée par nos résultats. 
 

308 
 
 

En se basant sur la classification de facto, notre analyse indique que les pays avancés
qui adoptent un régime de change fixe semblent être affectés négativement par ce régime de
change. Sur ce plan, les régimes de change fixes pourraient imposer un coût d'ajustement plus
élevé contrairement aux régimes plus flexibles. En effet, ils induisent une plus forte volatilité
qui elle-même réduit la croissance. Les régimes de taux de change flexibles semblent avoir un
léger avantage sur les régimes de taux de change fixes en matière de croissance. 

Pour la question du choix du régime de change, l’étude, tant théorique qu’empirique,


nous a conduits à produire un résultat original, l'absence de lien univoque entre le régime de
change et la croissance. Plus précisément, il n’y aurait pas de régime de change meilleur en
tout lieu et en tout temps. L'absence d'un consensus sur ce qui constituerait le régime de
change optimal caractérise le débat en la matière et les controverses demeurent importantes
soulignant la vivacité et l'importance de cette question. Il est toutefois admis que le régime de
change optimal dépend en général des caractéristiques structurelles de l’économie, de la
nature et des sources des chocs, de l’ampleur de l’ouverture et de la libéralisation économique
et financière et des préférences des décideurs politiques, etc. Des politiques monétaire et
budgétaire adéquates demeurent nécessaires au bon fonctionnement de tout régime. En
résumé, l’optimalité d'un régime de change ne peut être considérée seule, de manière
décontextualisée.  

À l’issue de nos réflexions autour de cette relation, il est apparu qu’un niveau
approprié du taux de change accompagné du choix du régime de change adéquat sont
consubstantiels à de meilleures performances économiques. Les deuxième et troisième parties
ont débattu de ces questions et procédé à des applications économétriques. La transition dans
les régimes de change vers plus de flexibilité ne s’associe donc pas forcément à de meilleures
performances économiques. Encore faut-il, déterminer correctement le niveau du taux et
choisir le régime de change le mieux adapté au contexte économique du pays concerné. Pour
saisir toute la dimension de la question dans le cadre d’un pays émergent, un modèle FEER
nous a semblé nécessaire. 

La résolution du modèle FEER a enrichi notre compréhension du fonctionnement des


économies émergentes et en développement. Cette approche permet d'adopter une
perspective plus structurelle afin de ne pas nous limiter à des travaux économétriques et
apporter un éclairage distinct de l'approche standard qui se limite le plus souvent à l'étude
d'une équation réduite comme chez Clark et MacDonald (1999). 

309 
 
 

L’évolution des taux de change d’équilibre dans les différentes régions nous assure de
la cohérence du modèle FEER et de la robustesse de la démarche suivie. Elle permet de
retracer l’histoire économique et politique de ces pays. En cela, l’évolution du taux de change
réel d’équilibre des principaux pays émergents, demeure très contrastée. Le cas chinois est le
plus significatif. De 1980 à 1994, la stratégie d’ouverture commerciale était basée sur la
dépréciation du yuan en termes réel et nominal avec des périodes alternatives de (sur) et de
sous-évaluation, mais en préservant plus de sous-évaluation tout en évitant le recours à
l'endettement extérieur. Depuis le milieu des années 1990, un tournant s'est produit avec une
sous-évaluation permanente du yuan en termes réel et nominal, en raison d'une réévaluation
réelle du yuan moins importante que la réévaluation du taux de change d'équilibre, résultant
de la réussite de la stratégie d'ouverture chinoise. Les excédents chinois sont l'un des
symptômes des déséquilibres mondiaux persistants. 
 
L'Inde a suivi une voie différente concernant l'évolution du taux de change, même s’il
y a des similitudes avec la Chine: une longue période de dépréciation réelle et nominale,
suivie à la fin des années 1990 par une appréciation réelle et une stabilisation nominale.
Cependant, au cours de la période de dépréciation, la durée de la surévaluation a été plus
longue qu’en Chine, avec des déséquilibres courants plus prononcés. Après la stabilisation, la
surévaluation a été presque la règle, avec la persistance des déficits courants, sauf pour une
courte période entre 2001 et 2003. L'Inde n'a pas profité d'une réévaluation de son taux de
change d'équilibre comme en Chine. Ce qui peut être interprété comme un échec de la
politique de libéralisation et d'ouverture commerciale. Cela signifie une surévaluation
considérable par rapport aux autres partenaires asiatiques, ce qui contraint le potentiel de
croissance future de l'Inde. 
 
Au Brésil, trois périodes différentes peuvent être distinguées. Depuis le début des
années 1980 jusqu’à l'adoption du Plan Real en 1994, une succession de programmes de
stabilisation et d'ajustement du taux de change ont essayé de préserver la compétitivité par le
biais d’une sous-évaluation réelle et nominale permanente, mais avec de grandes difficultés à
maîtriser l'inflation. De 1994 à 2002, l'accent a davantage été mis sur la stabilisation de
l'inflation et moins sur la compétitivité. La surévaluation réelle et nominale était permanente,
mais graduellement elle a diminué après 1998. Depuis 2002, une situation plus équilibrée a
prévalu sans désajustements en termes réels, avec une sous-évaluation par rapport au dollar et
une appréciation du taux de change d'équilibre reflétant l'amélioration de la compétitivité

310 
 
 

brésilienne. En revanche, l'environnement économique s’est détérioré avec l'éclatement de la


crise. La sous-évaluation par rapport au dollar a disparu et la surévaluation réelle est
réapparue, bien que modérément. 
 
Les pays d'Asie, y compris la Corée, ont à peu près suivi le même chemin en dépit de
niveaux de développement inégaux: une dépréciation réelle et, souvent, nominale jusqu'à la
fin des années 1980, une stabilisation par rapport au dollar avec une appréciation réelle au
cours des années 1990, des dévaluations importantes après la crise asiatique de 1997-1998 qui
ont été suivies par une réévaluation par rapport au dollar nominale et réelle. Il n'y a pas de
configuration générale en termes de sous ou surévaluation pour toutes les monnaies asiatiques
au cours des années 1980 et 1990. Les périodes de sous-évaluations et de surévaluations ont
alternativement prévalu. L'Indonésie occupe une position particulière en raison de son statut
de producteur de pétrole. Le won coréen et le bath thaïlandais ont été plus surévalués avant la
crise asiatique de 1997. Après les dévaluations massives de 1997-1998, la sous-évaluation
réelle n'a pas duré et les déséquilibres sont restés limités en termes réels, mais pas par rapport
au dollar. Durant les années 2000 toutes les monnaies de l'Est asiatique ont été sous-évaluées
par rapport au dollar, mais moins que le yuan et le yen. Depuis l'éclatement de la crise
financière de 2008, la sous-évaluation a été préservée par rapport au dollar. Cette
configuration, bien que moins marquée que dans le cas de la Chine, contribue à la persistance
des déséquilibres courants. 
 
Contrairement aux pays asiatiques, l’ampleur des désajustements de change dans les
pays d’Amérique latine varie davantage selon les pays étudiés à cause d’une importante
hétérogénéité et d’un plus faible degré d’intégration entre ces pays. S'ils ont été tous touchés
par la crise de la dette des années 1980, le redressement financier à la suite du Plan Brady
dans les années 1980, les crises spéculatives de la fin des années 1990 et la dernière crise
financière, les variétés de politiques de stabilisation et du taux de change nominal déterminent
des chemins macroéconomiques et des déséquilibres très différents. Les pays d'Amérique
latine ont connu des désajustements et des déséquilibres courants plus importants et plus
dispersés. Mais une stabilisation nominale a été observée depuis les années 2000.  
 
Contrairement aux pays d’Amérique latine et aux pays asiatiques, les évolutions des
désajustements de change dans les pays Sud méditerranéens sont très comparables en dépit
d’une importante hétérogénéité et d’un plus faible degré d’intégration entre ces pays.

311 
 
 

L'examen de l'évolution des taux de change effectifs réels des pays Sud Méditerranéens par
rapport à leur niveau d’équilibre, au cours de la période 1982- 2011, permet de distinguer
plusieurs tendances distinctes. Une phase de surévaluation au cours des années 1980, puis,
une phase de sous-évaluation au cours des années 1990, et enfin, une phase de surévaluation
durant les années 2000, à l’exception de la Tunisie qui se trouve en fin de période très proche
de l’équilibre. 
 
Dans l'ensemble, en 2010, le dollar était encore surévalué par rapport à toutes les
monnaies de l'Asie de l’Est, à l'exception du yen qui était proche de l'équilibre. La sous-
évaluation du yuan était la plus importante. Le dollar était également surévalué par rapport à
certaines économies d'Amérique latine (Argentine, Chili et Uruguay) qui ont bénéficié de
monnaies sous-évaluées en termes réels. Le Brésil et le Mexique avaient des monnaies
proches de l'équilibre par rapport au dollar, mais légèrement surévaluées en termes réels,
réduisant leur marge de manœuvre, en particulier pour le Mexique. Enfin, la Colombie et,
surtout, l'Inde ont souffert d’une surévaluation face au dollar et en termes réel. 
 
Dans une économie mondiale de plus en plus intégrée, le niveau du taux de change
s’avère essentiel dans le processus d’ajustement et de croissance, en particulier pour les pays
émergents. L'influence de long terme des désajustements du taux de change sur l'activité
économique réelle reste une question ouverte. Diverses études empiriques ont examiné
l'importance de variables telles que le niveau initial du PIB, l'investissement, le capital
humain, l'ouverture commerciale et la croissance de la population, pour expliquer la
croissance économique. Cependant, peu d’études retiennent les désajustements du taux de
change comme un déterminant potentiel de la croissance. Notre objectif est de combler cette
lacune en accordant une attention particulière à l'influence des sur-ou sous-évaluations du
taux de change sur la croissance économique pour un grand nombre de pays, y compris les
économies en développement et avancées. 
 
À la fin de cette thèse, nous avons tenté de réexaminer la relation des désajustements
du taux de change aux performances économiques, à celle de la croissance en particulier à
partir d'une approche en données de panel, Il en résulte que la sur et la sous-évaluation
peuvent avoir des effets différents sur la croissance économique. De plus, les effets des
désajustements du taux de change réel peuvent aussi dépendre de la taille des écarts par
rapport à l'équilibre. Pour tester cette hypothèse on a mobilisé des modèles de régression de

312 
 
 

panel à transition lisse (Smoothing Threshold). On montre ainsi que l'impact des
désajustements du taux de change sur la croissance économique est non linéaire et
asymétrique. 

 
En effet, pour étudier cette possibilité, nous avons testé l'hypothèse nulle de linéarité
dans notre modèle en utilisant les désajustements précédemment calculés comme variable de
transition. En d'autres termes, nous avons testé s'il existait une hétérogénéité dans la relation
de la croissance avec les désajustements du taux de change et si la transition d'un régime à un
autre dépendait de la valeur et du signe de l'écart du taux de change par rapport à son niveau
d'équilibre.  
 
Les résultats du test basé sur un développement de Taylor de premier ordre d'un
modèle de régression non linéaire à transition lisse (PSTR) montrent que la linéarité peut être
rejetée pour les deux groupes de pays étudiés. On a donc procédé à l'estimation de la relation
de croissance non linéaire, en utilisant le taux de croissance du PIB réel par habitant comme
variable dépendante. On a retenu la régression des estimations du modèle PSTR utilisant une
spécification d'une fonction de transition logistique à deux régimes. 
 
Nos résultats ont montré que la valeur du seuil estimé varie entre les économies
avancées et les économies émergentes, un seuil de 9 % pour les économies industrialisées et
15,5% pour les pays émergents. Le niveau initial du développement, ainsi que les
désalignements globalement plus élevés dans les pays émergents que dans les pays avancés,
peuvent expliquer les différentes valeurs du seuil entre les deux groupes de pays. 
 
Dans l’ensemble, les résultats améliorent le pouvoir explicatif du modèle qu’apporte
l’intégration de variables devenues standards dans la littérature et habituellement utilisées.
Toutes les variables explicatives ont les signes attendus, quels que soient le signe et la taille
des désajustements. En effet, le coefficient du PIB par habitant décalé est négatif, ce qui
signifie que l'hypothèse de convergence conditionnelle est mise en évidence: les pays à plus
faible PIB par habitant ont tendance à croître plus rapidement. La position initiale de
l'économie est donc un déterminant significatif de la croissance. Comme indiqué
précédemment, nous avons également inclus le taux de scolarisation secondaire comme autre
caractéristique de conditions initiales. Cette variable est significative et de signe attendu pour

313 
 
 

les pays émergents. Ce résultat est en accord avec plusieurs études qui déclarent l'impact
positif significatif du capital humain sur la croissance. En ce qui concerne le taux d'inflation,
le coefficient estimé est significativement négatif pour les deux groupes de pays, ce qui
signifie que l'instabilité des prix tend à entraver la croissance. En d'autres termes, l'inflation,
dans le cadre d'une politique de stabilisation macroéconomique générale, est une condition
importante pour favoriser la croissance. La variable de l'investissement a aussi le signe
attendu car il existe une relation positive entre l'accumulation du capital et la croissance mais
elle n’est pas significative dans le cas des pays émergents. 
 
L'ouverture commerciale a également un impact positif sur la croissance pour les pays
émergents. Dans l'ensemble, ceci est conforme à la fois avec l'approche néoclassique et la
théorie de la croissance endogène. En effet, l'impact positif du commerce sur la croissance est
expliqué par les avantages comparatifs, que ce soit dans la dotation en ressources ou dans les
différences dans la technologie. Quant à la littérature sur la croissance endogène, elle affirme
que l'ouverture commerciale affecte positivement la croissance grâce à des économies
d'échelle et à la diffusion technologique entre les pays. Enfin, les coefficients de croissance de
la population et des dépenses publiques sont négatifs, mais comme ils ne sont pas
significatifs, ces variables ont été retirées de l'équation.  
 
Les résultats obtenus pour la variable désajustement ont également les signes attendus.
Nos résultats présentent donc l'effet asymétrique des désajustements du taux de change réels
sur la croissance, selon qu'ils reflètent des sur-ou sous-évaluations de la monnaie considérée.
En effet, nous trouvons qu'il existe une relation positive et significative entre la croissance et
les désajustements du taux de change lorsque la monnaie est légèrement sous-évaluée, tandis
que les surévaluations importantes semblent avoir de forts effets négatifs sur la croissance
économique. Pour les pays émergents cet impact varie entre 0.022 (régime 1) et -0,009
(régime 2) sur la croissance du PIB par habitant. En d'autres termes, les sous-évaluations de
petite taille des monnaies stimulent la croissance. En revanche, les surévaluations du taux de
change ont des effets négatifs importants sur la croissance.  
 
Dans le premier régime, les sous-évaluations de petite taille dans les économies
émergentes contribuent à une augmentation du PIB par habitant. Les sous-évaluations de
petite taille, jusqu’aux seuils estimés, ont un impact positif sur la croissance économique,
confirmant les résultats d’Aguirre et Calderón (2005). Ce résultat est cohérent aussi avec ceux

314 
 
 

de Bresser-Pereira (2002), Dooley et al. (2005) et Béreau et al. (2009), ceci illustre le fait que
la compétitivité est renforcée lorsque les monnaies sont sous-évaluées. Dans les pays
émergents, comme le régime 2 comprend également des sous-évaluations de plus de 15.5 %,
il est important de noter que ces fortes sous-évaluations n’ont pas favorisé la croissance. Pour
les économies avancées, les résultats obtenus montrent que pour les valeurs au-dessus du seuil
estimé de 9%, les sous-évaluations ont également un effet positif sur la croissance pour
(régime 2). 
 
Des estimations complémentaires en GMM examinent la relation entre les
désajustements du taux de change et la croissance économique. Les résultats montrent que les
désajustements du taux de change en valeur absolue sont corrélés négativement avec la
croissance économique, en concordance avec les conclusions de Ghura et Grennes, (1993);
Bleany et Greenaway, (2001). Ceci confirme l'hypothèse que le maintien du taux de change
réel à son niveau approprié est essentiel pour la croissance économique. En revanche, les
politiques de change inappropriées dans de nombreuses régions du monde en développement,
qui conduisent généralement à un désajustement du taux de change, expliquent au moins
partiellement, la mauvaise performance économique que connaissent ces régions. 
 
Nos conclusions générales soulignent la pertinence de la question de l’impact du
niveau de taux de change sur le taux de croissance du PIB réel par habitant. Nous constatons
que l’effet des désajustements sur la croissance dépend de la nature et de la taille de l’écart du
taux de change par rapport à l’équilibre. Cet impact asymétrique des désajustements du taux
de change sur la croissance met en évidence l'intérêt de notre étude sur la présence de non
linéarités et souligne que la politique de taux de change peut jouer un rôle clé dans la
croissance économique. Des politiques de change appropriées qui limitent la surévaluation de
la monnaie pourrait être utilisée pour promouvoir la croissance économique. Nos résultats
soutiennent également plusieurs études qui montrent la supériorité de la gestion des taux de
change en Asie du Sud-Est par rapport aux expériences latino-américaines et africaines dans
les 30 dernières années. La surévaluation du taux de change, au Mexique, au Brésil et en
Argentine a été une cause importante des crises de la balance des paiements dans les années
1980 et 1990. À l’opposé, les taux de change compétitifs des pays asiatiques expliquent les
succès de la stratégie de croissance tirée par les exportations depuis les années 1970. 
 

315 
 
 

En conclusion les résultats de ce travail ont conduit à un déplacement de la


problématique du lien régime de change et performance économique à celle du lien entre
désajustements du taux de change et performances économiques. Ce n'est donc pas le régime
de change qui apparaît tant déterminant que le niveau du change compte tenu des
caractéristiques économiques du pays étudié, plus précisément de l'importance de l'écart de
son taux de change nominale avec son taux de change d'équilibre.  
 
Au-delà des résultats obtenus dans ce travail, il existe de nombreuses autres questions
à traiter qui sont apparues lors de la réalisation de ce travail. Ces dernières années, les pays
d’Afrique du Nord ont fait face à plusieurs chocs: financiers et économiques (crise 2007, crise
de l’euro), de change (fluctuations des parités monétaires Euro-Dollar-Yen) et politiques
(Attentat du 11 septembre, guerre d’Irak et le printemps Arabe). Par leur nature et leur
ampleur ces chocs ont affecté, de manière différenciée et avec des formes et une intensité
variables selon les pays, la croissance, les flux commerciaux, les flux de capitaux, les flux
touristiques et les taux de change de ces pays. Chercher la meilleure combinaison possible des
mesures économiques permettant de stabiliser le taux de change réel face à de tels chocs, tout
en réduisant les coûts économiques engendrés par les ajustements nécessaires, reste une
question largement ouverte.  
 
Du point de vue théorique, il semble important d’analyser plus en détail comment les
spécificités économiques de chaque pays influencent la dynamique du taux de change réel et
comment celui-ci en retour affecte les performances économiques. En effet, il faut prendre en
compte, les importants changements intervenus soit au niveau des structures des marchés
domestiques et des comportements des agents, soit au niveau du contexte international avec
l’accélération de la libéralisation commerciale et financière. 
 
Le modèle du taux de change réel d’équilibre bien qu’il ait satisfait l’objectif
recherché, mettre en évidence la possibilité d’un taux d’équilibre propre aux pays émergents,
pourrait être élargi en introduisant au niveau des déterminants de la balance courante des
aspects financiers qui sont absents dans nos estimations actuelles.
 
Nous avons pu lier la question du choix du régime de change à celle de la
détermination du taux d’équilibre, qui sont trop souvent traitées séparément. Beaucoup
d’enseignements largement admis à propos des pays émergents sont issus des études

316 
 
 

économétriques utilisant des données de panel, très puissantes et surtout palliant au manque
de données qui caractérisent ceux-ci. L’abondance de ces travaux peut occulter l’aspect
spécifique du pays. Les spécificités des pays émergents tant au niveau de l’analyse et de la
modélisation qu’aux niveaux de la démarche économétrique, de la pertinence des données et
de l’interprétation des résultats, devraient faire l'objet d'un programme de recherche
spécifique traitant des aspects idiosyncratiques.  

Des questions méthodologiques devraient également être approfondies. Notamment en


ce qui concerne la relation existante entre la réflexion économique et l’outil empirique ou
encore le discours économique souvent hermétique et un empirisme dominant parfois trop
réducteur. L'introduction de modèle en données de panel avec effet de seuil permettent
d'élargir les spécificités des relations analysées à la non linéarité, mais la question de la
communicabilité des résultats théoriques aux gouvernants reste problématique d'autant que la
question du niveau des taux de change est loin de constituer une question épuisée par la
technique. Les désajustements de change expriment également des rapports de forces
politiques.

317 
 
 

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329 
 
 

ANNEXES 

Annexe 1 : Evolution des catégories de régimes de change du rapport annuel sur les
arrangements et restrictions de change du FMI

Volumes 1950-1973

1. Par value or central rate exists--Par value of central rate applied


2. Effective rate other than par value or central rate applicable to all or most transactions: fixed rate or
fluctuating rate

Volume 1974, (no mention of par values)


1. Exchange rate maintained within relatively narrow margins in terms of:
US Dollar, Sterling, French Franc, group of currencies, and average of exchange rates of main trading partners.
2. Exchange rate not maintained within relatively narrow margins

Volumes 1975-1978
1. Exchange rate maintained within relatively narrow margins in terms of:
US Dollar, Sterling, French Franc, South African Rand or Spanish Peseta, group of currencies
(under mutual intervention arrangements), and composite of currencies.
2. Exchange rate not maintained within narrow margins

Volumes 1979-1982
1. Exchange rate maintained within relatively narrow margins in terms of
US Dollar, Sterling, French Franc, Australian Dollar, Portuguese Escudo, South African Rand
or Spanish peseta, a group of currencies (under mutual intervention arrangements), a composite
of currencies, and a set of indicators.
2. Exchange rate not maintained within relatively narrow margins

Volumes 1983-1996
Exchange rate determined on the basis of :
1. a peg to: the US Dollar, Sterling, the French Franc, other currencies, and composite of currencies
2. limited flexibility with respect to: a single currency, cooperative arrangement
3. More flexible arrangements: adjusted according to a set of indicators, other managed floating, and
4. independently floating.

Volumes 1997-1998
1. Pegged to: single currency, composite of currencies
2. Flexibility limited
3. Managed floating
4. Independent floating.

Volumes 1999-2001
1. Exchange arrangement with no separate legal tender
2. Currency board arrangement
3. Conventional pegged arrangement
4. Pegged exchange rate within horizontal bands
5. Crawling peg
6. Crawling band
7. Managed floating with no pre-announced path for the exchange rate
8. Independently floating

Sources: International Monetary Fund, Annual Report on Exchange Restrictions, 1950-1978 and Annual Report
on Exchange Arrangements and Exchange Restrictions, 1970-2001.

330 
 
 

Annexe 2: Classification des régimes de change par LYS

 
Source : Levy-Yeyati et Sturzenegger (2005).

331 
 
 

Annexe 3 : Classifications fine et agrégée du schéma « naturel » de Reinhart et Rogoff

Source : Reinhart et Rogoff (2003).

332 
 
 

Annexe 4. Description du schéma de classification de Reinhart et Rogoff

 
Source: Reinhart et Rogoff (2003).

333 
 
 
Annexe 5 : Régressions de la croissance, avec les régimes de change officiels et de facto ; estimations des GMM en système
Tableau 30. Résultats des estimations des GMM en système pour les pays émergents selon la classification de jure
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.046 -0.043 -0.049 -0.031 -0.0466 -0.0432 -0.0443 -0.0504
(-2.45)** (-2.90)** (-2.69)** (-3.38)** (-2.93)** (-3.07)*** (-2.98)*** (-3.00)***
Crédit domestique accordé au -0.0034 -0.0034 -0.0024 -0.0041 -0.0034 -0.0097
secteur privé/PIB (-1.34) (-1.16) (-0.14) (-1.42) (-1.3) (-0.41)
Investissement direct étranger 0.0030 0.0028 0.0030 0.0037 0.0025 0.0029 0.0034 0.0035
(2.28)** (2.28)** (2.27)** (2.82)** (1.92)* (2.47)** (2.18)** (2.69)**
Consommation du secteur -0.0040 -0.0031 -0.0036 -0.0029 -0.0038 -0.0031 -0.0051 -0.0041
public/PIB (-2.62)** (-2.31)** (-2.53)** (-2.41)** (-2.81)** (-2.48)** (-2.82)*** (-2.58)**
Indicateur du développement 0.022 0.0203 0.0225 0.018 0.0229 0.0192 0.0246 0.0218
Humain (2.08)** (2.41)** (2.32)** (2.72)** (2.39)** (2.38)** (2.41)** (1.88)*
Inflation -0.0078 0.0068 -0.0076 -0.0076 -0.0081 -0.0075
(-1.57) (-1.59) (-1.50) (-1.53) (-1.42) (-1.38)
Investissement /PIB 0.0017 0.0021 0.0022 0.0081 0.0024 0.0020 0.0018 0.0016
(2.61)** (3.04)** (3.12)*** (3.03)** (3.35)*** (3.16)*** (2.56)** (2.01)*
Degré d’ouverture / PIB 0.0013 0.0026 0.0027 0.0025 0.0026 0.0024
(1.27) (1.77)* (1.59) (1.81)* (1.85)* (2.07)**
Taux de croissance de la population -0.0056 -0.0078 -0.0066 -0.0037 -0.0072 -0.0080 -0.0020 -0.0044
(-1.15) (-1.80)* (-1.31) (-1.21) (-1.52) (-1.87)* (-0.37) (-0.80)
Régime de change fixe 0.0092 0.0055
(1.12) (0.74)
Régime de change intermédiaire 0.0049
(0.32)
Régime de change flottant -0.0074
(-0.97)
Change fixe* inflation -0.0035
(-0.98)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0028
(0.61)
Degré d’ouverture * change flottant 0.0010
(1.29)
Crédit domestique accordé au -0.0023
secteur privé/PIB *change flottant (-1.76)*
Constant 0.34 0.3211 0.3586 0.2247 0.3432 0.3255 0.3383 0.3783
(2.47)** (2.62)** (2.49)** (3.25)** (2.67)** (2.85)** (2.81)** (2.91)***
Observations 750 750 750 750 750 750 750 750
Number of id 25 25 25 25 25 25 25 25
Hansen J statistic 18.13 16.97 16.21 19.39 18.83 18.18 18.18 18.87
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
334 
 
 
Tableau 31: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays avancés selon la classification de jure
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.013 -0.004 -0.001 -0.004 -0.005 -0.002 -0.0013 -0.054
(-2.03)* (-2.05)* (-1.89)* (-1.94)* (-2.10)** (-1.92)* (-2.09)** (-2.16)**
Crédit domestique accordé au -0.0032 -0.0031 -0.0033 -0.0038 -0.0035 -0.0034
secteur privé/PIB (-3.61)*** (-4.05)*** (-3.96)*** (-4.33)*** (-4.63)*** (-3.48)***
Investissement direct étranger 0.0034 0.0038 0.0027 0.0032 0.0033 0.0032 0.0043 0.0062
(1.01) (1.68)* (1.00) (1.15) (1.74)* (1.72)* (1.87)* (2.83)**
Consommation du secteur -0.0046 -0.0036 -0.0034 -0.0026 -0.0035 -0.0044 -0.0043 -0.0080
public/PIB (-3.07)*** (-3.37)*** (-2.78)** (-2.90)** (-2.98)** (-3.00)*** (-4.09)*** (-3.65)***
Indicateur du développement -0.0044 -0.005 -0.005 -0.0055 -0.0059 -0.0063 -0.0043 -0.0027
Humain (-0.93) (-1.76)* (-1.66)* (-2.04)* (-1.77)* (-1.66) (-1.17) (-0.56)
Inflation -0.002 -0.0018 -0.0019 -0.0019 -0.0021 -0.0030
(-5.21)*** (-4.97)*** (-5.17)*** (-5.95)*** (-3.68)*** (-4.41)
Investissement /PIB 0.0022 0.008 0.0015 0.0013 0.009 0.0010 0.0061 -0.0018
(0.18) (1.03) (1.74)* (2.06)* (1.21) (0.98) (-0.78) (-1.45)
Degré d’ouverture / PIB -0.0026 0.003 0.0007 0.0051 0.0049 -0.0017
(-0.35) (0.46) 1.00 (0.53) (0.53) (-1.23)
Taux de croissance de la population -0.0038 -0.001 -0.0037 -0.0030 -0.0012 -0.0016 -0.0055 0.0105
(-0.64) (-0.23) -0.77 (-0.65) (-0.23) (-0.28) (-0.08) 0.97
Régime de change fixe -0.0074 -0.0021
(-1.79)* (-0.87)
Régime de change intermédiaire -0.004
(-1.23)
Régime de change flottant 0.0092
(2.13)**
Change fixe* inflation -0.0015
(-4.62)***
Degré d’ouverture * change fixe 0.0055
(1.38)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0022
(-0.30)
Crédit domestique accordé au -0.0058
secteur privé/PIB *change flottant (-0.94)
Constant 0.25 0.12 0.0033 0.0554 0.08 0.12 0.1634 0.7768
(1.64) (1.01) (0.20) (0.90) (0.62) (0.85) -1.090 (3.85)***
Observations 540 540 540 540 540 540 540 540
Number of id 18 18 18 18 18 18 18 18
Hansen J statistic 15.1 12.95 12.02 13.10 13.57 12.73 10.48 10.18
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
335 
 
 
Tableau 32: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays asiatique selon la classification de jure
1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.014 -0.0176 -0.0115 -0.015 -0.0173 -0.0179 -0.0166 -0.0149
(-1.89)* (-2.98)** (-1.76)* (-2.51)** (-2.20)** (-2.93)** (-4.49)*** (-2.71)**
Crédit domestique accordé au -0.0030 -0.0033 -0.0040 -0.0034 -0.0031 -0.0038
secteur privé/PIB (-3.00)** (-2.23)** (-3.25)*** (-3.28)*** (-3.20)*** (-3.20)***
Investissement direct étranger 0.0053 0.0056 0.0049 0.0048 0.0055 0.0055 0.0055 0.0056
(6.62)*** (7.35)*** (6.85)*** (5.42)*** (8.73)*** (8.53)*** (5.01)*** (8.84)***
Consommation du secteur 0.0027 0.0016 0.0031 0.0027 0.0013 0.0017 0.0022 0.0013
public/PIB (2.00)* (0.98) (1.86)* (1.72)* (0.76) (1.00) (1.30) (0.98)
Indicateur du développement 0.0079 0.0108 0.0078 0.0094 0.0107 0.0109 0.0094 0.0096
Humain (1.85)* (3.66)*** (1.71)* (2.84)** (2.86)** (3.53)*** (4.15)*** (2.62)**
Inflation -0.0024 -0.0022 -0.0024 -0.0024 -0.0024 -0.0022
(-3.81)*** (-3.60)*** (-3.75)*** (-3.76)*** (-3.69)*** (-2.86)**
Investissement /PIB 0.0024 0.0029 0.0032 0.0031 0.0031 0.0030 0.0032 0.0024
(8.04)*** (9.62)*** (6.75)*** (11.06)*** (8.46)*** (10.19)*** (10.06)*** (7.94)***
Degré d’ouverture / PIB -0.00084 -0.00055 -0.00013 -0.00044 -0.00039 -0.00013
(-1.70) (-0.92) (-0.02) (-0.58) (-0.65) (-2.68)**
Taux de croissance de la population -0.0073 -0.0085 -0.0111 -0.010 -0.0100 -0.0092 -0.0095 -0.0067
(-2.63)** (-3.72)*** (-2.72)** (-4.92)*** (-3.39)*** (-3.50)*** (-3.64)*** (-3.16)***
Régime de change fixe 0.0029 -0.0048
(0.83) (-0.15)
Régime de change intermédiaire 0.0238
(2.08)**
Régime de change flottant -0.0012
(-0.31)
Change fixe * inflation 0.0015
(-0.38)
Degré d’ouverture * change fixe -0.0011
(-0.33)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0020
(-0.88)
Crédit domestique accordé au -0.0085
secteur privé/PIB * change flottant (-1.25)
Constant 0.037 0.0924 0.0171 0.06 0.0927 0.0935 0.0765 0.0802
(0.99) (2.28)** (0.61) (1.67) (2.27)** (2.14)** (2.41)** (1.89)*
Observations 290 290 290 290 290 290 290 290
Number of id 10 10 10 10 10 10 10 10
Hansen J statistic 6.15 0.00 3.87 0.52 0.00 0.00 2.84 0.81
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
336 
 
 
Tableau 33: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays Amérique Latine selon la classification de jure
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.047 -0.0413 -0.0482 -0.036 -0.0409 -0.0389 -0.0345 -0.0422
(-1.97)* (-1.86)* (-2.13)** (-1.82)* (-2.48)** (-1.86)* (-2.45)** (-2.15)**
Crédit domestique accordé au -0.0053 -0.0063 -0.0055 -0.0052 -0.0054 -0.0062
secteur privé/PIB (-1.32) (-1.43) (-1.29) (-1.26) (-1.31) (-1.40)
Investissement direct étranger 0.0041 0.0024 0.0068 0.0044 -0.0058 0.0010 0.0056 0.0064
(0.21) (0.14) (0.43) (0.24) (-0.31) (0.06) (0.37) (0.34)
Consommation du secteur -0.0028 -0.0022 -0.0024 -0.0018 -0.0024 -0.0022 -0.0019 -0.0021
public/PIB (-2.46)** (-2.11)** (-2.38)** (-1.52) (-2.73)** (-2.11)** (-1.81)* (-2.31)**
Indicateur du développement 0.0104 0.0179 0.0169 0.018 0.0180 0.0165 0.0199 0.0176
Humain (0.41) (0.74) (0.57) (0.81) (0.65) (0.70) (0.79) (0.71)
Inflation -0.0085 0.0073 -0.0091 -0.0087 -0.0082 -0.0084
(-1.81)* (-1.87)* (-1.95)* (-1.83)* (-1.74)* (-1.80)*
Investissement /PIB 0.0026 0.0025 0.0030 0.0018 0.0029 0.0024 0.0021 0.0022
(1.62) (1.35) (1.44) (1.09) (1.82)* (1.45) (1.18) (1.48)
Degré d’ouverture / PIB -0.0027 -0.0030 -0.0048 -0.0036 -0.0024 -0.0028
(-1.14) (-1.03) (-1.30) -1.59 (-0.92) (-1.08)
Taux de croissance de la population -0.039 -0.0324 -0.0364 -0.021 -0.0343 -0.0314 -0.0230 -0.0291
(-1.32) (-1.60) (-1.45) (-0.99) (-1.59) (-1.73)* (-0.98) (-1.26)
Régime de change fixe 0.0093 0.0066
(0.87) (0.62)
Régime de change intermédiaire -0.0214
(-0.89)
Régime de change flottant -0.0033
(-0.32)
Change fixe * inflation -0.0049
(-1.89)*
Degré d’ouverture * change fixe 0.0014
(1.49)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0020
(-1.18)
Crédit domestique accordé au -0.0037
secteur privé/PIB * change flottant (-1.30)
Constant 0.43 0.3728 0.4404 0.309 0.3716 0.3567 0.2996 0.3711
(1.77)* (1.78)* (1.99)* (186)* (2.09)** (1.82)* (1.28) (1.84)*
Observations 330 330 330 330 330 330 330 330
Number of id 11 11 11 11 11 11 11 11
Hansen J statistic 2.86 0.42 0.43 0.85 0.00 0.00 0.73 0.10
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de Student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
337 
 
 
Tableau 34: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays émergents selon la classification de facto
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.046 -0.0497 -0.0477 -0.394 -0.0486 -0.0499 -0.0493 -0.04614
(-2.73)** (-2.72)** (-2.69)** (-3.00)** (-2.60)** (-2.71)** (-2.81)** (-2.27)**
Crédit domestique accordé au -0.0039 -0.0045 -0.0012 -0.0038 -0.0041 -0.0019
secteur privé/PIB (-1.41) (-1.43) (-0.55) (-1.28) (-1.39) (-0.76)
Investissement direct étranger 0.0028 0.0026 0.0023 0.0034 0.0025 0.0025 0.0030 0.00240
(2.06)** (1.86)* (1.75)* (2.40)** (1.93)* (1.88)* (1.94)* (1.73)*
Consommation du secteur -0.0045 -0.0038 -0.0033 -0.0029 -0.0040 -0.0039 -0.0052 -0.00331
public/PIB (-3.20)*** (-2.62)** (-2.95)** (-2.33)** (-2.58)** (-2.49)** (-2.57)** (-2.06)**
Indicateur du développement 0.024 0.0244 0.0223 0.0254 0.0234 0.0232 0.0311 0.02251
Humain (2.22)** (2.34)** (2.11)** (2.82)** (2.32)** (2.20)** (2.86)** (1.72)*
Inflation -0.0047 -0.00392 -0.0044 -0.0042 -0.0047 -0.00431
(-1.01) (-1.59) (-0.96) (-0.91) (-0.90) (-0.95)
Investissement /PIB 0.0019 0.0023 0.0025 0.0019 0.0023 0.0023 0.0022 0.00164
(2.89)*** (3.24)*** (3.52)*** (2.95)** (3.61)*** (3.37)*** (3.02)** (2.15)**
Degré d’ouverture / PIB 0.00094 0.0027 0.0031 0.0027 0.0030 0.00212
(0.98) (1.72)* (1.68)* (1.75)* (1.84)* (1.92) *
Taux de croissance de la population -0.0055 -0.0077 -0.0087 -0.0029 -0.0084 -0.0085 -0.0038 -0.00639
(-1.26) (-1.63) (-1.92)* (-0.95) (-1.88)* (-1.73)* (-0.73) (-1.48)
Régime de change fixe 0.00032 -0.0040
(0.40) (-0.05)
Régime de change intermédiaire 0.0026
(0.26)
Régime de change flottant -0.0041
(-0.52)
Change fixe* inflation -0.0013
(-5.73)***
Degré d’ouverture * change fixe 0.0076
(1.74)*
Degré d’ouverture * change flottant 0.0077
(1.63)
Crédit domestique accordé au -0.00229
secteur privé/PIB *change flottant (-1.80)*
Constant 0.34 0.3645 0.3439 0.277 0.3609 0.3717 0.3689 0.33869
(2.67)** (2.60)** (2.60)** (2.67)** (2.48)** (2.60)** (2.60)** (2.36)**
Observations 750 750 750 750 750 750 750 750
Number of id 25 25 25 25 25 25 25 25
Hansen J statistic 19.13 18.85 16.69 17.27 18.90 19.34 14.39 14.84
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
338 
 
 
Tableau 35: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays avancés selon la classification de facto
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.0046 -0.0043 -0.0279 -0.0069 -0.0016 -0.0035 -0.0102 -0.0517
(-1.60) (-1.85)* (-1.79)* (-1.50) (-1.76)* (-1.64) (-1.80)* (-1.94)*
Crédit domestique accordé au -0.0035 -0.0043 -0.0040 -0.0035 -0.0037 -0.0034
secteur privé/PIB (-3.54)*** (-4.69)*** (-4.34)*** (-3.57)*** (-4.16)*** (-3.13)***
Investissement direct étranger 0.00031 0.0036 0.0020 0.0022 0.0042 0.0041 0.0054 0.0063
(0.97) (1.53) (0.70) (0.83) (1.82)* (1.73)* (2.30)** (2.54)**
Consommation du secteur -0.0046 -0.0044 -0.0029 -0.0035 -0.0040 -0.0039 -0.0050 -0.0079
public/PIB (-2.57)** (-3.45)*** (-2.76)** (-3.76)*** (-3.18)*** (-3.04)*** (-4.11)*** (-3.54)***
Indicateur du développement -0.0047 -0.0034 -0.0048 -0.0055 -0.0044 -0.0052 -0.0032 -0.0038
Humain (-1.32) (-1.10) (-1.88)* (-1.86)* (-1.27) (-1.78)* (-0.92) (-0.78)
Inflation -0.0020 -0.0016 -0.0020 -0.0018 -0.0021 -0.0029
(-4.68)*** (-4.50)*** (-4.75)*** (-4.61)*** (-3.88)*** (-5.31)***
Investissement /PIB -0.0017 0.0068 0.0018 0.0014 0.0081 0.0090 0.0062 -0.0016
(-0.14) (0.77) (1.72)* (1.82)* (0.97) (1.10) (0.71) (-1.72)*
Degré d’ouverture / PIB -0.00046 0.0025 0.0013 0.0043 0.0030 -0.0016
(-0.69) (0.28) (2.42)** (0.55) (0.36) (-1.07)
Taux de croissance de la population -0.0048 0.0044 -0.0056 -0.0039 0.0041 -0.0021 0.0016 0.0107
(-0.65) (0.08) (-1.01) (-0.72) (0.08) (-0.05) (0.29) (1.19)
Régime de change fixe 0.0014 -0.0019
(0.22) (-0.26)
Régime de change intermédiaire 0.0062
(1.05)
Régime de change flottant -0.0091
(-0.88)
Change fixe* inflation -0.0095
(-1.45)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0010
(1.46)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0013
(-1.61)
Crédit domestique accordé au -0.0052
secteur privé/PIB *change flottant (-0.53)
Constant 0.27 0.1879 -0.1807 0.055 0.1170 0.1047 0.2587 0.7480
(1.85)* (1.52) (-1.36) (0.73) (0.91) (0.80) (1.86)* (4.11)***
Observations 540 540 540 540 540 540 540 540
Number of id 18 18 18 18 18 18 18 18
Hansen J statistic 16.40 14.24 12.11 6.86 13.33 13.25 12.53 6.94
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
339 
 
 
Tableau 36: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays asiatique selon la classification de facto
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.016 -0.01462 -0.0089 -0.0131 -0.0135 -0.0112 -0.0106 -0.0158
(-1.81)* (-2.53)** (-2.46)** (-2.96)** (-2.22)** (-1.76)* (-3.01)** (-2.11)**
Crédit domestique accordé au -0.0036 -0.0040 -0.0043 -0.0030 -0.0031 -0.0038
secteur privé/PIB (-4.25)*** (-3.28)*** (-3.84)*** (-2.52)** (-2.82)** (-2.83)**
Investissement direct étranger 0.0053 0.0055 0.0051 0.0051 0.0052 0.0054 0.0057 0.0054
(6.89)*** (10.85)*** (8.66)*** (5.63)*** (7.68)**** (8.61)*** (7.06)*** (17.04)***
Consommation du secteur 0.0026 0.0015 0.0030 0.0024 0.0072 0.0010 0.0021 0.0019
public/PIB (1.80)* (0.82) (1.78)* (1.37) (0.38) (0.51) (1.10) (1.29)
Indicateur du développement 0.010 0.0103 0.0080 0.0063 0.0092 0.0090 0.0050 0.0072
Humain (1.92)* (3.25)*** (1.69) (2.36)** (2.34)** (2.23)** (2.02)* (2.24)**
Inflation -0.0024 -0.0022 -0.0025 -0.0025 -0.0023 -0.0022
(-3.73)*** (-3.70)*** (-3.93)*** (-4.12)*** (-3.34)*** (-3.20)***
Investissement /PIB 0.0024 0.0029 0.0033 0.0031 0.0028 0.0027 0.0031 0.0022
(5.93)*** (7.02)*** (6.69)*** (12.91)*** (8.08)*** (5.45)*** (6.20)*** (6.36)***
Degré d’ouverture / PIB -0.0007 -0.00065 -0.00035 -0.00076 -0.00011 -0.00061
(-0.91) (-1.02) (-0.41) (-1.19) (-1.68) (-1.01)
Taux de croissance de la population -0.0068 -0.0096 -0.0114 -0.010 -0.0099 -0.0092 -0.0112 -0.0083
(-2.22)** (-2.97)** (-2.72)** (-4.55)*** (-2.62)** (-2.89)*** (-3.36)*** (-2.55)**
Régime de change fixe 0.0039 0.00485
(0.39) (0.47)
Régime de change intermédiaire 0.0014
(0.21)
Régime de change flottant -0.0030
-0.30
Change fixe * inflation 0.0075
(1.50)
Degré d’ouverture * change fixe 0.0069
(1.51)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0054
(-1.06)
Crédit domestique accordé au -0.0017
secteur privé/PIB * change flottant (-1.42)
Constant 0.049 0.0779 0.0039 0.059 0.0832 0.0710 0.0486 0.0874
(1.27) (2.49) (0.15) (1.81)* (2.93)** 2.71 (1.54) (1.93)*
Observations 300 300 300 300 300 300 300 300
Number of id 10 10 10 10 10 10 10 10
Hansen J statistic 4.48 0.00 0.66 0.00 0.00 0.00 2.67 1.59
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de Student de robustesse; * significatif à 10%; ** significatif à 5%; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur
340 
 
 
Tableau 37: Résultats des estimations des GMM en système pour les pays Amérique Latine selon la classification de facto
Taux de croissance PIB réel par habitant 1 2 3 4 5 6 7 8
PIB réel par habitant décalé -0.047 -0.09913 -0.03470 -0.049 -0.0285 -0.0244 -0.0078 -0.036748
(-2.35)** (-2.77)** (-2.33)** (-2.74)** (-2.40)** (-2.17)** (-2.47)** (-2.55)**
Crédit domestique accordé au -0.0043 -0.0055 -0.0044 -0.0051 -0.0049 -0.0050
secteur privé/PIB (-1.20) (-1.38) (-1.08) (-1.33) (-1.26) (-1.26)
Investissement direct étranger 0.0057 0.0086 0.0053 -0.0058 0.0037 0.0003 0.0023 -0.0034
(0.29) (0.46) (0.32) (0.21) (0.21) (0.15) (-0.21)
Consommation du secteur -0.0017 -0.0086 -0.0026 -0.0016 -0.0018 -0.0012 -0.0092 -0.0023
public/PIB (-1.76)* (-0.84) (-2.01)* (-1.78)* (-1.99)* (-1.15) (-0.91) (-2.95)**
Indicateur du développement -0.0055 0.0281 0.0202 -0.0014 0.0198 0.0212 0.0238 0.0170
Humain (-0.51) (2.06)** (0.80) (-0.11) (0.84) (1.05) (1.03) (0.67)
Inflation -0.0086 -0.0085 -0.0090 -0.0087 -0.0085 -0.0085
(-1.92)* (-1.96)* (-1.85)* (-1.78)* (-1.84)* (-1.73)*
Investissement /PIB 0.0032 0.0014 0.0026 0.0034 0.0022 0.0020 0.0010 0.0024
(2.80)** (1.22) (1.33) (3.77)*** (1.42) (1.25) (0.75) (1.36)
Degré d’ouverture / PIB -0.00040 -0.0023 -0.0047 -0.0025 -0.0028 -0.0040
(-0.20) (-1.16) (-1.10) (-1.20) (-1.24) (-1.33)
Taux de croissance de la population -0.041 -0.0060 -0.0324 -0.0401 -0.0232 -0.0189 -0.0090 -0.0291
(-2.13)** (-0.49) (-1.40) (-2.61)** (-1.20) (-1.02) (-0.41) (-1.10)
Régime de change fixe -0.0075 0.01672
(-0.60) (1.47)
Régime de change intermédiaire -0.0031
(-0.30)
Régime de change flottant -0.0042
(-0.54)
Change fixe * inflation -0.00114
(-4.28)***
Degré d’ouverture * change fixe -0.0015
(-0.92)
Degré d’ouverture * change flottant -0.0017
(-1.12)
Crédit domestique accordé au -0.001833
secteur privé/PIB * change flottant (-0.96)
Constant 0.44 0.524 0.3252 0.459 0.2492 0.2060 0.0566 0.3291
(2.44)** (2.43)** (2.37)** (2.73)** (2.29)** (2.05)** (2.31)** (2.36)**
Observations 330 330 330 330 330 330 330 330
Number of id 10 10 10 10 10 10 10 10
Hansen J statistic 1.36 0.18 4.32 1.24 0.16 0.00 0.39 0.33
P-value of J 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000 1.000
Entre () t statistiques de student de robustesse; * significatif à 10% ; ** significatif à 5% ; *** significatif à 1%
Source : estimations de l’auteur.
341 
 
 

Annexe 6: Sources des données

Variable Source

ACRMAN, XREG
Base de données CHELEM, CEPII
OB
ISNFA P.R. Lane and G.M. Milesi-Ferretti’s Database, 2007

Indice Chinn et Ito 2008,


RKAOPEN; CAS
World Economic Outlook, IMF, April 2012
Annual Report on Exchange Arrangements
ERR de jure
and Exchange Restrictions, IMF

Reinhart et. Rogoff


ERR de facto
http://personal.lse.ac.uk/ilzetzki/IRRBack.htm

Economic Outlook, OECD, December 2008


OG
(pour les économies émergentes , calculs de l’auteur)

World population prospect, ONU, Last update, September 28,


CDR, ODR
2007
PIB, OPEN, GOUV, I, World Development Indicators,WDI et
INF, FD, FDI International Financial Statistics (IFS) - IMF
Barro, Robert and Jong-Wha Lee, April 2010, "A New Data Set
IDH of Educational Attainment in the World, 1950-2010." NBER
Working Paper No. 15902

Annexe 7: Tests de racine unitaire des déterminants de la balance courante pour les pays
émergents

En Niveau Difference Première

IPS IPS

CA -3.32*** -5.93***
ISNFA -2.23** -4.34***
DR -2.48*** -4.08***
OB -4.08*** -3.62***
OG -8.20*** -10.09***
Source: calcul des auteurs. (*** = Significatif à 1%, ** = significatif à 5%, * = significatif à 10% en utilisant le test
statistique Im Pesaran Shin, le rejet de l'hypothèse nulle (de la présence d'une racine unitaire), nous amène à rejeter la
non-stationnarité de la série.)

342 
 
 

Annexe 8: Tests de racine unitaire en panel des determinants des désajustements en valeur
absolue

En Niveau Difference Première

IPS IPS

1
AERM -6.42*** -18.08***

2
ERM -6.62*** -14.99***

OPEN 4.62 -12.25***

ACRMAN 3.80 -12.60***

XREG -2.15** -2.97***

RKAOPEN -12.45*** -13.00***

EER -5.13*** -6.46***

Notes: (1) Le LERM est l'acronyme de la valeur absolue du désalignement du taux de change en termes
réels. Notes: (2) L'ERM est l'acronyme du désalignement du taux de change en termes réels. **, ***
indiquent la stationnarité statistique au seuil de 5 pour cent et 1 pour cent, respectivement. Source: calculs
des auteurs.

343 
 
 

Annexe 9: désajustement de change en termes réels et nominal


 

Tableau 38. La sous-évaluation   0     0 et la surévaluation  0     0 pour


Equateur Bolivie, Paraguay Pérou et Venezuela (en %)

e_ecu e_bol e_par e_per e_ven e_ecu r_bol r_par r_per r_ven
82 -24.8 17.0 -26.6 -25.8 -30.2 -23.9 5.1 -32.1 -26.7 -28.7
83 22.5 23.8 -0.5 -2.5 37.6 8.1 3.4 -23.1 -13.7 19.0
84 19.8 25.0 -6.1 33.0 42.8 6.3 3.9 -23.9 15.4 23.6
85 34.7 -7.3 -3.7 29.8 18.1 25.4 -9.3 -9.8 19.1 10.3
86 5.3 -4.3 -10.1 -3.1 -39.5 -2.8 -11.4 -18.9 -13.1 -39.1
87 -65.7 -28.1 -26.5 9.8 -64.1 -51.4 -26.5 -25.0 2.9 -54.2
88 -8.0 2.7 -8.7 -60.0 -83.8 -3.9 5.1 -4.0 -52.2 -60.5
89 -13.9 15.2 21.9 190.5 -6.7 -6.6 16.8 19.2 185.0 -2.7
90 -1.2 -7.0 17.5 -19.6 38.8 1.9 -1.3 12.9 -13.3 34.4
91 -17.9 -23.2 -16.7 -22.9 -1.1 -3.6 -5.8 -3.4 -7.8 7.3
92 -2.5 -44.3 -18.1 -34.8 -50.0 8.8 -19.0 -2.7 -16.0 -27.0
93 -12.0 -46.1 -9.7 -53.9 -38.1 0.2 -21.4 1.9 -32.7 -20.2
94 4.3 -6.9 2.6 -18.9 4.3 1.3 -7.6 -0.1 -19.1 1.9
95 -7.6 -22.9 -7.3 -64.7 -10.3 -0.1 -9.9 -0.9 -46.4 -3.3
96 17.6 -17.3 -8.4 -29.3 33.7 16.6 -8.7 -1.2 -20.4 29.3
97 3.9 -34.7 -19.0 -21.7 8.9 8.2 -18.3 -4.9 -11.8 11.4
98 -39.1 -36.5 -5.9 -25.3 -62.3 -23.1 -18.7 0.3 -14.8 -43.5
99 25.5 -23.0 0.8 7.6 -22.5 20.4 -15.8 1.6 7.3 -17.5
00 27.0 -9.4 3.2 8.3 29.4 15.3 -12.3 -1.7 2.0 20.8
01 -3.4 0.8 -2.2 7.5 -13.7 -5.3 -3.3 -4.0 2.6 -14.0
02 -5.9 0.8 17.6 12.5 -3.8 -9.2 -5.8 5.4 3.9 -7.8
03 3.7 23.4 19.4 14.8 -13.1 -3.9 9.4 4.6 4.7 -16.2
04 -4.0 14.4 2.5 10.7 -0.1 -0.9 13.8 3.0 11.4 2.2
05 7.9 17.7 0.2 16.9 22.1 6.4 13.4 0.5 15.1 18.3
06 17.2 24.4 0.5 24.5 23.1 12.7 17.5 0.7 21.2 18.6
07 4.0 13.9 -5.1 7.0 2.2 7.7 16.2 1.0 11.5 6.6
08 4.1 13.6 -8.0 -17.7 18.5 7.3 14.7 -0.5 -8.2 19.3
09 -8.1 6.7 8.1 16.0 -53.6 -8.1 1.4 2.7 10.5 -45.2
10 -18.5 10.5 3.0 7.4 -20.9 -16.5 9.3 5.5 6.9 -20.3
11 -8.0 3.2 11.5 13.1 -26.6 -10.3 4.8 11.1 11.7 -28.9
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur.

344 
 
 

Tableau 39. La sous-évaluation(e> 0 et r> 0) et la surévaluation(e< 0 et r< 0) pour le Pakistan,


Sri Lanka, Singapore, et Viêtnam (en %)

e_pak e_sri e_sin e_viet r_pak r_sri r_sin r_viet


82 51.0 -50.8 -11.7 na 32.8 -41.3 8.2 na
83 42.7 12.0 21.9 na 17.3 -6.9 5.4 na
84 14.6 48.1 26.4 na -4.8 19.9 0.8 na
85 17.2 8.5 -16.8 na 8.4 1.5 4.7 na
86 28.4 5.7 -23.9 na 12.1 -4.6 6.0 na
87 14.9 6.5 -30.0 na 5.7 -0.9 10.0 na
88 -1.5 -14.7 -13.4 na 1.6 -6.8 4.6 na
89 -5.5 -12.8 -11.0 -48.1 1.1 -3.4 1.5 -26.9
90 0.7 1.4 -13.1 -49.7 4.3 3.8 1.3 -24.6
91 -12.7 -19.6 -18.8 -58.2 3.0 -3.1 -0.3 -23.1
92 -1.1 -17.0 -30.8 -30.7 15.0 0.5 -0.4 -8.9
93 -28.8 -12.6 -29.0 -46.3 -8.9 1.7 2.7 -17.8
94 14.3 -2.8 23.2 -9.3 8.8 -4.3 -5.7 -8.6
95 -0.8 -8.8 11.4 32.6 7.9 0.9 -9.8 27.0
96 -17.1 -3.9 11.1 11.7 -9.9 1.4 -7.9 9.4
97 -19.4 -0.5 13.2 11.5 -9.4 5.3 -11.8 10.8
98 -0.5 2.9 -0.5 5.8 7.1 7.4 -3.6 7.9
99 2.1 2.9 -0.1 27.6 3.0 2.9 1.2 15.2
00 33.4 0.3 8.5 28.5 23.5 -3.8 0.4 10.2
01 26.3 10.4 -15.9 16.4 18.3 3.1 13.1 5.5
02 53.2 12.1 -12.7 5.3 39.1 1.9 11.6 -1.9
03 47.5 16.2 6.7 0.1 32.1 3.3 -1.7 -4.7
04 14.6 -1.4 -4.9 -10.7 15.9 1.3 0.6 -2.5
05 -8.5 1.8 13.3 -6.7 -5.8 2.1 -10.7 -1.9
06 -38.2 -6.5 32.0 -6.4 -30.5 -3.5 -21.8 -1.6
07 -55.6 -5.9 41.4 -27.6 -39.1 2.1 -25.3 -3.1
08 -55.4 -37.4 4.6 -20.2 -38.9 -19.8 -6.8 -1.8
09 -60.6 29.4 5.1 -6.5 -54.2 19.3 0.1 -2.6
10 -13.8 23.6 31.4 1.6 -18.7 11.4 0.6 -1.2
11 20.1 -0.6 33.1 10.6 9.1 -7.4 2.0 0.0
Prévisions pour 2011 basées sur les perspectives de l’économie mondiale, FMI, avril 2012. Source : calculs de
l’auteur.

345 
 
 

Annexe 10: Désajustement en valeur absolue et croissance économique; estimation en GMM

Variable Tous les pays Pays émergents Pays avancés


Coeff T-Stat Coeff T-Stat Coeff T-Stat
PIB par habitant décalé en log -0,036 -6,390 -0,052 -5,947 -0,052 -7,153
Inflation -0,001 -4,551 -0,001 -2,106 -0,154 -3,692
Investissement/PIB 0,031 1,625 0,028 1,201 0,290 5,647
HDI 0,002 1,002 0,022 4,004 -0,001 -0,714
Degré d’ouverture 0,052 3,248 0,053 2,543 0,040 1,413
FDI/GDP 0,208 4,947 0,271 3,499 0,175 5,075

Désajustements en valeur absolue -0,029 -3,614 -0,018 -1,718 -0,026 -1,884


Source : estimations de l’auteur.

346 
 
 
 

Table des matières

REMERCIEMENTS .................................................................................................................. 3

INTRODUCTION GENERALE ............................................................................................ 5

PARTIE I REGIMES DE CHANGE ET CROISSANCE ECONOMIQUE ................... 18

Chapitre 1 Régimes de change: typologie, classifications et évolution .............................. 19

Introduction .............................................................................................................................. 19
1. Régimes et politiques de change ....................................................................................... 21
2. Classifications des systèmes de change ............................................................................ 24
2.1 Régimes de change de jure ........................................................................................ 24
2.2. Les classifications de facto ........................................................................................ 27
2.1.1. La classification de Levy-Yeyati et Sturzenegger (LYS) .................................. 28
2.1.2. La classification de Reinhart et Rogoff .............................................................. 31
3. Évolution des régimes de change ...................................................................................... 34
Conclusion ................................................................................................................................ 40

Chapitre2 Etude théorique et empirique du lien entre régime de change et croissance


économique ............................................................................................................................. 42

Introduction .............................................................................................................................. 42
1. Régimes de change et performance économique : cadre théorique .................................. 44
1.1. Régimes de change et performance en termes d’inflation ......................................... 44
1.2. L’indépendance ou la coopération ............................................................................. 45
1.3. Ajustement macroéconomique .................................................................................. 47
1.3.1. Au niveau extérieur: stabilité ou équilibre ......................................................... 47
1.3.2. Au niveau intérieur: des objectifs réels ou nominaux ........................................ 49
1.4. Régimes de change et croissance économique .......................................................... 54
2. Analyse empirique du lien entre régimes de change et croissance ................................... 55
2.1. L’étude de Ghosh et al (1997) ................................................................................... 58
2.2. L’étude de Rizzo. J.M (2000) .................................................................................... 61

347 
 
 

2.3. L’étude de Levy-Yeyati et Sturzenegger (2001) ....................................................... 63


2.4. L’étude de Bailliu, Lafrance et Perrault (2002) ......................................................... 66
2.5. L’étude de Dieudonné Ella (2004) ............................................................................ 69
2.6. L’étude de Coudert et Dubert (2005) ........................................................................ 71
3. Le modèle de croissance ................................................................................................... 73
3.1. Les déterminants de la croissance ............................................................................. 74
3.2. Le modèle retenu et choix des variables .................................................................... 83
4. Méthodologie d'estimation ................................................................................................ 88
5. Résultats et interprétation ................................................................................................. 91
5.1. Résultats avec les régimes officiels ........................................................................... 91
5.2. Résultats avec les régimes de facto ......................................................................... 103
Conclusion .............................................................................................................................. 110

PARTIE II DÉTERMINATION DU TAUX DE CHANGE REEL D’ÉQUILIBRE.... 113

Chapitre 3 Les méthodologies des taux de change réels d'équilibre ............................... 114

Introduction ............................................................................................................................ 114


1. L’approche de la Parité des Pouvoirs d’Achat (PPA) ..................................................... 115
2. Le modèle à productivité différenciée : L’effet Balassa-Samuelson .............................. 119
3. Le modèle du taux de change d’équilibre d’Edwards ..................................................... 122
4. Le modèle du taux de change réel d’équilibre d’Elbadawi (1994) ................................. 126
5. Le Taux de Change d’Equilibre Fondamental de Williamson........................................ 130
6. La modélisation des taux de change d’équilibre comportemental .................................. 136
7. Le Taux de Change Réel Naturel (NATREX) ................................................................ 139
Conclusion .............................................................................................................................. 141

Chapitre 4 Estimations des taux de change réel d'équilibre ........................................... 143

Introduction ............................................................................................................................ 143


1. Cadre théorique et méthodologique ................................................................................ 144
1.1. L'approche FEER et le SMIM ................................................................................. 145
1.2. La modélisation macroéconomique ......................................................................... 147

348 
 
 

1.2.1. Le modèle multinational................................................................................... 147


1.2.2. Le modèle national ........................................................................................... 153
2. Les élasticités du commerce extérieur ............................................................................ 157
3. Equilibre externe et interne ............................................................................................. 159
3.1. La détermination de la balance du compte courant d’équilibre............................... 159
3.2. Les résultats des simulations des cibles de la balance courante .............................. 162
3.2.1. Les grands pays asiatiques ............................................................................... 164
3.2.2. Les BRIC .......................................................................................................... 165
3.2.3. Les autres pays du sud-Est asiatique ................................................................ 167
3.2.4. Les autres pays d’Amérique Latine .................................................................. 168
3.2.5. Les pays méditerranéens .................................................................................. 171
4. L'estimation de l'équilibre interne ................................................................................... 178
5. Taux de change d'équilibre et désajustements ................................................................ 180
5.1. Les estimations du FEER pour le Japon et la Corée................................................ 181
5.2. Les estimations du FEER pour le Brésil, l'Inde et la Chine .................................... 184
5.3. Estimations du FEER pour les monnaies du Sud-Est asiatique............................... 189
5.4. Estimations du FEER pour les autres monnaies latino-américaines ....................... 193
5.5. Estimations du FEER pour les pays Sud-Méditerranéens ....................................... 199
6. Les déterminants des désajustements du taux de change................................................ 212
Conclusion .............................................................................................................................. 219

Chapitre 5 Tests de sensibilités et comparaison avec d’autres estimations de taux de


changes d’équilibre .............................................................................................................. 224

Introduction ............................................................................................................................ 224


1. Les tests de sensibilité ..................................................................................................... 226
2. La comparaison entre les approches FEER et BEER ..................................................... 227
2.1. Les considérations méthodologiques ....................................................................... 227
2.2. Comparaison entre les estimations FEER et BEER ................................................ 229
2.3. Comparaison avec les estimations du Cline ............................................................ 235
Conclusion .............................................................................................................................. 237

349 
 
 

PARTIE III DÉSAJUSTEMENT DE CHANGE ET CROISSANCE ÉCONOMIQUE


................................................................................................................................................ 239

Chapitre 6 Désajustement et Croissance Économique : Revue de la Littérature ......... 240

Introduction ............................................................................................................................ 240


1. Les désajustements du taux de change réel et croissance économique .......................... 242
1.1. Les désajustements basés sur les indices de Dollar ................................................. 242
1.2. Les désajustements basés sur l’approche de la PPA................................................ 248
1.3. Les désajustements basés sur des modèles ad hoc .................................................. 256
1.4. Les désajustements basés sur l’approche du BEER ................................................ 262
Conclusion .............................................................................................................................. 268

Chapitre 7 Désajustements et croissance économique : étude empirique...................... 270

Introduction ............................................................................................................................ 270


1. Les déterminants de la croissance ................................................................................... 272
2. Le modèle économétrique ............................................................................................... 274
2.1. Présentation générale ............................................................................................... 274
    2.2. La construction d’un PSTR ...................................................................................... 279
2.2.1. La spécification du modèle: test d'homogénéité .............................................. 279
2.2.2. Estimation des paramètres ................................................................................ 282
2.2.3. L’évaluation du modèle .................................................................................... 284
3. Procédure de l’estimation économétrique ....................................................................... 290
4. Résultats et interprétations .............................................................................................. 292
Conclusion .............................................................................................................................. 304

CONCLUSION GENERALE ............................................................................................. 306

BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................. 318

ANNEXES ............................................................................................................................. 330

350 
 
Résumé : Dans un contexte d'ouverture croissante des économies, il est pertinent de
s’interroger sur le choix optimal du régime de change pour les pays émergents. Notre étude
empirique de la relation entre le régime de change et la croissance nous a conduit à l'absence
de lien univoque entre le régime de change et la croissance. Plus précisément, il n’y aurait pas
de régime de change meilleur en tout lieu et en tout temps. À l’issue de ces réflexions, il est
apparu qu’un niveau approprié du taux de change accompagné du choix d’un régime de
change adéquat sont consubstantiels à de meilleures performances économiques. À cette fin,
après avoir estimé le taux de change réel d’équilibre en se basant sur un modèle FEER, nous
avons conduit une analyse économétrique non linéaire des effets des désajustements de
change sur la croissance. Nous avons constaté que cet effet dépend de la nature et de
l’ampleur du désajustement de change. Pour les pays émergents, l’effet sur la croissance est
positif pour les sous-évaluations de petite taille et négatif pour les grandes sous-évaluations.
En revanche pour les pays avancés, la sous-évaluation a un effet positif même au dela du seuil
estimé. Les surévaluations du taux de change ont des effets négatifs sur la croissance. Cet
impact asymétrique des désajustements de change sur la croissance souligne l’importance de
la politique de change sur la croissance. Des politiques de change appropriées qui limitent la
surévaluation de la monnaie pourrait être utilisée pour promouvoir la croissance économique.

Mots clés : Régimes de change, croissance économique, modèle FEER, PSTR, GMM, taux
de change d’équilibre.

Exchange Rate Regime, Equilibrium Exchange Rate and Economic Growth

Abstract: In the context of increasing openness of economies, it is necessary to consider the


optimal choice of exchange rate regime in emerging countries. In our work we studied the
relationship between exchange rate regime and growth. The empirical study has shown the
absence of unequivocal link between exchange rate regime and growth. More precisely, there
would not be a better exchange rate regime anywhere and anytime. Following these
considerations, the appropriate level of the exchange rate with the choice of suitable exchange
rate regime is inherent to better economic performance. Consequently, we estimated real
exchange rate misalignments based on a FEER approach. Then, we conducted a non-linear
econometric analysis of the effect of the exchange rate misalignments on growth. We find that
this effect depends of the nature and size of the exchange rate misalignments. For emerging
countries, the effect on growth is positive for the small undervaluation and negative for a
large undervaluation. In contrast for developed countries, undervaluation appears with a
positive effect even beyond the estimated threshold. The overvaluation of the exchange rate
has a negative effect on growth. This asymmetric impact of exchange rate misalignments on
growth emphasizes the importance of the exchanges policy on economic growth. Appropriate
exchange rate policies, that limit overvaluation, could be used to promote economic growth.

Keywords: exchange rate regime, economic growth, FEER approach, PSTR, GMM
equilibrium exchange rate.
CEPN
Université de Paris 13 Villetaneuse,
99 avenue Jean-Baptiste Clément
F 93430 Villetaneuse

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