Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
org)
Qu’est-ce qu’une mauvaise traduction littéraire ?
Coordination :
Georgiana I. Badea
Gerardo Acerenza
Ileana Neli Eiben
Avant-propos
5
représentation (la littérature), mais dans son fonctionnement
sémiotique et sémantique » (Ibidem 85).
1
Dicton, proverbe, sentence ou formule polémique, dont l’origine est controversée,
se voit attribuer la création soit à Niccolò Franco, dans « La risposta della Lucerna»
(1539, cf. Paulo Cherchi, dans la revue Lingua Nostra), soit, notamment, à Du Bellay,
en 1549 : « Mais que diray-je d’aucuns, vrayement mieux dignes d’estre appelez
traditeurs, que traducteurs ? vu qu’ils trahissent ceux qu’ils entreprennent exposer,
les frustrans de leur gloire, et par mesme moyen seduisent les lecteurs ignorans, leur
monstrant le blanc pour le noir. » (La Défense et illustration de la langue française,
[1549] 1905, 76, cf. Folena 1991, 31, v. aussi Bouzaher, dans la présentation de sa
traduction en français du livre d’Eco, 2007). Son origine, italienne, française ou autre,
ne serait que secondaire, car la formule, dit-on, devrait être attribuée à Jérôme.
6
considérer comme mauvaise toute « traduction qui, généralement
sous couvert de transmissibilité, opère une négation systématique de
l’étrangeté de l’œuvre étrangère. » (1984, 17) ?
7
Références bibliographiques
Georgiana I. Badea
Gerardo Acerenza
8
« De la traîtrise à la translucifération »
Inês OSEKI-DÉPRÉ
Université d’Aix-Marseille, CIELAM, France
9
Car, si dans toute traduction il y a une part inhérente et
inévitable de « trahison » (= infidélité), il n’en va pas de même pour la
« traîtrise », qui possède une connotation plus forte (= perfidie) liée à
un comportement, à une attitude.
Ainsi, lorsqu’un traducteur du portugais du Brésil aussi notoire
que Jacques Thiériot s’attaque aux textes de Guimaraes Rosa, en
particulier à « Meu tio o Iauaretê », il est considéré comme tout à fait
créatif, sa traduction connaît un énorme succès auprès des
connaisseurs, on loue la musicalité de ses trouvailles, l’audace de ses
inventions, le rythme de sa traduction française où humour et jeux de
mots semblent faire bon ménage. Bref, sa traduction fait partie des
« bonnes traductions ». Or, il serait intéressant d’analyser la traîtrise
subliminale de Thiériot accessible aux seuls lecteurs bilingues : sa
traduction trahit l’original dans son point le plus sensible, ce que
Benjamin appelle : l’intention, das Meinen du texte.
En effet, comme des chercheurs l’ont montré, en sur-
interprétant l’original, en attribuant à l’Indien une personnalité
malfaisante et criminelle, la traduction de Thiériot joue sur le ton de
l’histoire, transforme un récit empreint de magie et de primitivisme en
quelque chose de vulgaire et banal, ce qu’il s’agira de démontrer.
En revanche, l’autre méthode traductive, celle qu’utilisent les
poètes brésiliens Augusto et Haroldo de Campos, tout en se fondant
sur la transformation, obtient une traduction de même intensité que
l’original, grâce à ce qu’Haroldo de Campos appelle
« l’isomorphisme ». Je l’illustre par la lecture des « Sirènes » par divers
traducteurs.
La traduction dont l’étymologie la rapproche de la tradition
(ainsi que de la trahison), toutes provenant de « tradere » (livrer,
emporter) est aussi, comme le souligne Antoine Berman (2008),
transmission de l’oralité qui n’est pas à confondre avec langue parlée
(Thiériot) mais qui se rapproche de la musicalité (les frères Campos).
Références bibliographiques
10
CAMPOS, Haroldo de. « La traduction comme création et comme critique ».
Sao Paulo, 1962. Première publication française in : Change,
Traduire/transformer, 1972.
CAMPOS (DE) Haroldo, CAMPOS, Augusto de. Panaroma do Finnegans Wake,
S. P., Perspectiva, 1971.
DERRIDA, Jacques. « Qu’est-ce qu’une traduction relevante ? ». In : GRAHAM,
Joseph (dir.), Difference and Translation, Ithaca and London : Cornell
University Press, 1985 : 209-248.
GUIMARÃES ROSA, João. Mon oncle le jaguar (titre original : Meu tio o
Iauaretê). Traduction française de Jacques Thiériot). Paris : Albin Michel,
1998.
MESCHONNIC, Henri. Poétique du traduire, vol. IV. Lagrasse : Verdier, 1999.
11
La littérature francophone antillaise au péril de la traduction en anglais et
en espagnol
Raphaël CONFIANT
Université des Antilles
12
nativisation des langues européennes ? L’existence ou non de parlers
créoles ? La soumission (inconsciente ou consciente) des traducteurs
aux normes linguistiques européennes ? À travers quelques exemples
d’erreurs graves de traduction de Césaire, Glissant et Chamoiseau, nous
tenterons de dessiner les contours de ce qui peut être considéré comme
une « mauvaise traduction » en nous situant d'emblée dans une
perspective proche de celle d’Henri Meschonnic.
13
Les interventions du traducteur dans le texte, ou comment rendre une
traduction… mauvaise
Gerardo ACERENZA
Université de Trente, Italie
14
habitants, beaucoup moins à l’époque !) et il se trouvait et se trouve
encore de nos jours à presque 80 km de distance de Péribonka. Cette
« parolisation (explicitation) » (Ladmiral 2004, 25) est-elle nécessaire ?
Les exemples de ce genre sont, hélas, nombreux. De plus,
Melitta ne rend pas en italien les caractéristiques lexicales et
syntaxiques du texte de départ, ne traduit pas plusieurs parties du
texte, en allant jusqu’à gommer parfois une phrase ou une suite de
phrases jugées inutiles, les prénoms de plusieurs personnages du
roman sont également modifiés.
Notre objectif est d’analyser la nature et la fonction des
nombreuses interventions du traducteur (de la traductrice) dans le
texte d’arrivée. Pourquoi intervient-il (elle) si fréquemment en
affichant sa visibilité dans le texte d’arrivée ? Peut-on dire que les
stratégies mises en œuvre par Melitta dénaturent le texte original et
que Lui non tornò più est une « mauvaise traduction littéraire » ? Les
nombreux écarts qui existent par rapport au texte de départ
autorisent-ils à considérer cette traduction dans la tradition des
« belles infidèles » ?
Références bibliographiques
Corpus
15
Le sérieux de la mauvaise traduction. À propos des versions roumaines
du roman Les Trois mousquetaires d’Alexandre Dumas
Georgiana I. BADEA
Université de l’Ouest de Timisoara, Roumanie
16
l’impression d’avoir été rédigée dans la langue de la traduction, c’est
réduire en miettes l’idiolecte de l’écrivain traduit, l’exotisme du texte
source (TS), c’est l’acclimater, le relocaliser, etc. (Hartmann, Benjamin,
Meschonnic, Berman, etc.). Tout cela pour que le lecteur ne soit pas
appelé à relire une phrase ou à s’arrêter pour réfléchir. Donc, une
mauvaise traduction :
17
des époques concernées se caractérise par des consentements à la
perte. Par le truchement de la comparaison des trois versions
roumaines à l’original, on constatera que ce n’est pas une question de
mauvaise compréhension, ni de méthode inappropriée qui ferait
tomber les TC de 1857 et de 1956 dans un manque de clarté ou, aussi
pire, dans l’altération de l’intention sémantique du TS, etc. Ces trois
versions – de B. B., Archip et Lehrer, Zavastin – représentent trois siècles
auxquels correspondent trois étapes de l’évolution du roumain
littéraire, trois perspectives/conceptions traductives, trois attentes
mentalitaires et sociétales et, non pas dernièrement, trois réceptions de
l’univers discursif de Dumas-père (Neț 2008, 15).
S’il fallait résumer l’impact d’une (supposée) mauvaise
traduction littéraire selon le nombre de rééditions, alors, la dernière
version en date, celle de 2009, rééditée en 2011, se situerait au premier
rang. On est d’accord que les retombées d’une mauvaise traduction
littéraire pourraient être désastreuses pour un auteur, cependant d’une
mauvaise traduction on peut recueillir des avantages, tout comme en
peut recueillir d’une bonne, mais d’une autre nature pourtant : elle
instigue à la retraduction.
Nous conclurons sur les causes des différentes formes
d’entropies susceptibles de caractériser une mauvaise traduction qui
pourrait « voile[r] ce que [le texte] était censé […] évoquer sous prétexte
qu’il faut respecter l’ambiguïté de l’original » (Margot 1978, 158). Ces
entropies sont déterminées par une variable hospitalité langagière,
aiguillonnée d’un désir de (re)traduire des œuvres dont les traductions
vieillissent, parce qu’elles meurent (Meschonnic). Bonne, mauvaise,
médiocre, noble… Comment différencier les traductions ? Si l’on
considérait « bonne traduction » une traduction dite « objective » dans
la compréhension et subjective dans la réexpression, une mauvaise
traduction serait-elle subjective dans la compréhension et objective
dans la réexpression ? L’auteur et son traducteur spéculent leur
subjectivité dans la réexpression ; les lecteurs dans la réception. Par
surcroît, cette subjectivité d’expression n’est pas uniquement
interlinguistique, mais aussi intralinguistique (Derrida 1996). La
relativité des critères d’évaluation traductive témoigne de la
discrimination que l’examinateur – lecteur ou critique – s’emploie à
pratiquer.
18
Références bibliographiques sélective
Corpus
Alexandre DUMAS
Les Trois mousquetaires (feuilleton), Le Siècle. mars-juillet 1844.
Les Trois mousquetaires. Paris : Éditions Baudry, 1844.
Ceǐ treǐ musquetarǐ (TC1). Traducere din fraçosesce de B. P. Parté întîǐ illustrata
cu XV. Gravurǐ. Publicată de Z. Călinescu. Bucuresci. Imprimeria Naţională a luǐ
Iosif Romanovŭ & Companie. 1857, cu alphabet de tranziție.
Cei trei muschetari. Traducere de Ticu Archip și Milton Fanny Lehrer, 1956
(TC2). 19 rééditions : 1959 et 1969, Editura Tineretului ; 1964, Editura pentru
Literatură ; 1969, Editura Albatros ; 1988, Editura Facla, Timişoara ; 1992,
Editura Helicon, Timişoara, Editura Eden, Bucarest et Editura Porto-Franco ;
1993, editura Hyperion, Chișinău ; 1997, Editura Vizual, București ; 1999 et
2000, Editura 100+1 Gramar ; 2000, 2002, 2014, Editura Cartex ; 2001, Editura
Regis et Drago Print ; 2016, Editura Litera.
Cei trei muschetari. Traducere de Marius Zavastin, 2009 (TC3), București :
Adevărul Holding. Réédition en 2011.
19
Le style d’un « co-auteur » et la question de « la trahison » en
traduction littéraire ; sur les traductions de The Waves de Virginia
Woolf, de Marguerite Yourcenar à Michel Cusin
Hamza BALI
Université Echahid Hamma Lakhdar Eloued, Algérie
20
aussi loin dans le texte littéraire, le traducteur ne se trouve pas dans une
sorte de « trahison salvatrice » qui réponde en partie à ce qu’il a ressenti
lors de sa lecture du texte original ?
Nous proposons dans cette communication une réflexion qui
part d’une hypothèse à travers laquelle nous vérifions la question de la
figure du traducteur et le style d’un co-auteur en comparant deux
traductions. D’une part, celle de Marguerite Yourcenar où il s’agit avant
tout d’une romancière qui a vécu à l’époque de l’auteur du roman et l’a
côtoyée, ce qui a donné à la traduction un aspect d’engagement
beaucoup plus littéraire. Nous pouvons même préciser beaucoup plus
en nous intéressant à la toute première phrase du roman. Un exemple
qui illustre parfaitement la différence entre les deux traductions:
« The sun had not yet risen. The sea was indistinguishable from the
sky, except that the sea was slightly creased as il a cloth had wrinkles
in it. ».
21
C’est dans cette différence que nous nous enfonçons dans notre
réflexion afin de parvenir à cerner la question du rapport entre le style
d’un co-auteur et la trahison en traduction littéraire. Nous précisons
qu’il s’agit d’une hypothèse à vérifier et à laquelle nous réfléchissons
pour parvenir à cerner un champ de recherche qui pourrait être fort
utile dans le domaine de la traduction littéraire.
Références bibliographiques
22
Affaiblissement et effacement de la focalisation dans la traduction en
italien de la phrase clivée française : un exemple de « mauvaise
traduction littéraire » ?
Alberto BRAMATI
Université de Milan, Italie
23
autant d’une « trahison » du texte source, et donc d’une « mauvaise
traduction littéraire » ? Pour répondre à cette question, notre
intervention se propose de montrer :
et de vérifier :
24
dont l'effet de focalisation n'est le plus souvent pas reproduit en italien
et, ensuite, d'essayer de comprendre pour quelle raison les
traducteurs professionnels préfèrent soit affaiblir, soit effacer cet effet
– y a-t-il un problème grammatical ? Y a-t-il un problème
d’« orthonymie » (Chevalier et Delport, 1995) ? Y a-t-il un problème
mélodique-rythmique ? Et dans ces cas, compte tenu du contexte
d’emploi de la clivée ainsi que du style de l’œuvre, est-ce qu’on peut
toujours parler d’une « mauvaise traduction littéraire » ? C’est à ces
questions que nous allons essayer de donner une réponse.
Références bibliographiques
25
La mauvaise traduction : une question d'incohérence(s). Autour de La
Métamorphose de Kafka
Jean-Jacques BRIU
Université Paris Nanterre, France
26
qui modifient immédiatement l’expression et qui sont de type, dira-t-
on, « stylistique » (mais qu’est-ce au juste que le style ?) ;
secondairement, on y décèlera des éléments qui, au fil du texte,
déconstruisent, modifient, reconstruisent autrement le récit, lui
conférant une autre coloration, impression, interprétation (parlera-t-
on alors de « style » différent ou de signification globale différente ?)
jusqu’à l’aliénation, la trahison ? De tels éléments, ainsi que leurs effets
induits (par gauchissement, gommage, déraillement, connotations)
sont jugés plutôt qualitatifs ; leur perception est souvent intuitive,
diffuse, globale. Retrouve-t-on dans le texte de Vialatte la monotonie,
l’affectivité, l‘ironie, l’humour, voire le comique que contient le texte
de Kafka ? La traduction est-elle « mauvaise » quand elle ne les restitue
pas ou mal ? quand l’addition des erreurs, par excès ou par défaut,
devient trop importante ?
Nous soulignerons qu’il n’est pas de traduction qui duplique,
reproduit dans une autre langue, standardise de façon neutre un
changement de langue ; car il s’agit bien toujours d’un changement de
texte et de public, de lecteur. Une traduction ne cesse pas d’être
relative à divers repères : d’abord un auteur, puis un traducteur qui
chacun dans une situation donnée produit un texte dans une langue
différente, enfin un lecteur qui dans une autre situation donnée crée
dans l’autre langue un autre texte. Par conséquent, il n’y a pas identité,
reproduction, simple changement entre des systèmes linguistiques qui
seraient équivalents et réversibles – mais similarité, correspondance,
proximité, approximation ; leur évaluation est « mauvaise » si elle est
inexistante, faible, non cohérente. Il y a irréductiblement du
« presque » pour reprendre Eco, mais c’est toujours du « presque
quelque chose » de donné par l’auteur ; « presque » parce que l’auteur
et sa langue sont particuliers, autres, étrangers par rapport au
traducteur et qu’ils font chacun, au sens de Meschonnic, un texte dans
une situation donnée…
Pour le lecteur français de La Métamorphose qui ignore la
langue de l’original, il n’y avait qu’un texte, bon ou mauvais : c’était
celui de Vialatte. Il y a été réduit, condamné durant 50 ans. Seul le
lecteur bilingue – dont le traductologue – comparant les deux textes,
l’original et sa traduction, pouvait dire dans quelle mesure cette
dernière était « mauvaise ». Depuis 1988, les traductions se sont
rapidement multipliées : le lecteur non germanophone en a dix à sa
27
disposition qu’il peut lire et comparer. Les traductologues, eux, ont
onze textes… et bien plus de questions.
Références bibliographiques
Corpus
28
De la fidélité comme standard pour une mauvaise traduction
Miloud BOUKHAL
Centre universitaire Salhi Ahmed de Naama, Algérie
1
Yan Fu, né le 8 janvier 1854 et mort le 27 octobre 1921, est un écrivain chinois de
la période moderne. Ses traductions d’œuvres philosophiques occidentales ont
exercé une grande influence sur le mouvement intellectuel en Chine (v. Wikipédia).
29
contribuent seulement à garantir la première. Car il le dit à propos de
l’expressivité: « All these efforts are required for the translation to be
expressive, so as to be faithful. » (Zhang 2013, 182)
Mais au fait, qu’est-ce que la fidélité en traduction chez ce
traducteur ? Selon Zhang la fidélité ou faithfulness pour Yan Fu c’est :
« to remain true to the original text. If a translator adds something or
spices up the content at will, it is a rewriting rather than translation »
(Zhang 2013, 183). Dans un autre horizon nous trouvons d’autres
définitions pour cette notion. En Europe, par exemple, la fidélité a
connu plusieurs acceptions selon ceux qui se sont intéressés à la
traduction. Se mettant dans ce que Berman appelle la position
traductive, les théoriciens, depuis Cicéron, ont évoqué la fidélité
comme un objectif suprême à atteindre. Les sourciers considèrent
qu’être fidèle, c’est de conserver l’étrangeté du texte étranger. Et les
ciblistes estiment que la traduction ne devrait pas sentir la traduction.
Ce tiraillement entre fidélité comprise comme littéralité et trahison
admise comme liberté, existe bel et bien dans le monde de la
traduction, ce qui a amené des traductologues comme Berman à
affirmer que : « il est vrai que, dans ce domaine la traduction, il est
sans cesse question de fidélité et de trahison. » (Berman 1995, 15).
Pour étayer notre exposé sur cette notion, on va prendre des
exemples de la traduction du roman À quoi rêvent les loups de Yasmina
Khadra faites en arabe par Amine Zaoui pour avoir une idée sur le profil
idéal d’une mauvaise traduction littéraire.
Références bibliographiques
30
MOUNIN, Georges. Les problèmes théoriques de la traduction. Paris :
Gallimard, 1963.
NIDA, Eugene, TABER, Charles. The Theory and Practice of Translation.
Leiden : Brill Academic Publishers, 2003.
REISS, Katharina. La Critique des Traductions ses possibilités et ses Limites :
Catégories et critères pour une évaluation pertinente des traductions, (tr.
Catherine Bocquet). Arras : Artois Presses Université, 2002.
VINAY, Jean-Paul. « La traduction littéraire est-elle un genre à part ? ». [En
ligne]. URL : http://id.erudit.org/iderudit/004570ar
XIAOYI, Yuan. « Débat du siècle : fidélité ou recréation ». In : Meta vol. 44, no.
1, 1999 : 61–77.
ZHANG, Min. « An Inquiry into Yan Fu’s Translation Theory of Faithfulness,
Expressiveness, and Elegance : The Beginning of China’s Modern Translation
Theory ». In : Trans-Humanities, Vol. 6, No. 3, 2013 : 179–196. [En ligne]. URL :
http://eiheng.ewha.ac.kr/page.asp?pageid=book10&pagenum=060600.
رسالة إلى علي بن يحي في ذكر ما ترجم من كتب جالينوس بعلمه وبعض. بن اسحاق،حنين
أواصر.ما لم يترجم..2009 أفريل. المركز القومي للترجمة،كتاب غير دوري
[Ḥunayn ibn Isḥāq, Risālaẗ Ilā Ali ibn Yaḥiā fī Ḏikri Mā Torǧima Min Kotob
Ǧālinous Bi’ilmihi Wa Ba’d Mā Lam Youtarǧam. Awṭsir. Kitāb Ġayr Dawrī, Al
Markaz Al Qawmī Littarǧamaẗ. Avril 2009.]
Corpus
KHADRA, Yasmina. À quoi rêvent les loups. Paris : Éditions Julliard Pocket,
1999.
ZAOUI, Amine 1 دار الغرب ط، ترجمة أمين الزاوي، ياسمينة خضرة،بم تحلم الذئاب
.2002
[Bima Tahlomo Aḏi’āb, Yasmina H̱ adra, Tarǧamaẗ Amine Zaoui, Dar Al- Ġarb,
Aṭab’a Al Oulā. 2002.]
31
Traduire la contrainte : des interrogations pour la tradition littéraire
brésilienne
32
au pronom « eux », destinataires de la dédicace de W ou le souvenir
d’enfance (« Pour E »), les parents de Perec disparus pendant la
Deuxième Guerre mondiale. L’autre possibilité est de reconnaître
l’importance de la contrainte dans l’original, traduire le roman en
effaçant la lettre la plus courante dans la langue cible et en accepter
les conséquences. C’est le cas de la traduction en espagnol, El
Secuestro (1997), où le choix a été de supprimer la lettre « a ». Selon
d’autres interprétations de l’œuvre de Perec, le thème du roman La
Disparition n’est pas la Shoah, mais le vide, l’absence (Bénabou 2002),
ou encore la totalité, exprimée par l’idée du puzzle chez Perec, ainsi
que par ses créations de formes littéraires, ses énumérations, ses listes
et ses inventaires (Joly 2004). En accord avec cette interprétation de
l’œuvre de Perec, si le roman lipogrammatique radie la voyelle la plus
courante de la langue française parce que ce récit est une grande
représentation littéraire du vide, alors, pour la représentation du vide
dans la traduction en langue étrangère, la lettre effacée doit
pareillement être la plus utilisée dans la langue cible.
En considérant la contrainte oulipienne et la tradition littéraire
brésilienne, y aurait-il alors un bon et un mauvais choix de traduction
de La Disparition ?
Quelles sont les incohérences nocives derrières
chacune des deux versions ?
Dans notre étude nous nous proposons de répondre à ces
questions surtout à partir des concepts d’effet contrainte, de David
Bellos, et d’amnésie de la traduction brésilienne, d’Inês Oséki-Dépré.
Dérivation de l’effet de réel de Roland Barthes, le concept de Bellos, le
principal traducteur anglophone de Perec et un important diffuseur de
l’Oulipo aux États-Unis, est une « supposition provoquée chez le
lecteur non-averti qu’il y a, à un niveau quelconque du texte [oulipien],
un enjeu de type esthétique ou formel », dont « l’ignorance »
provoque les lectures les plus « productrices » (2004, 25). Dans un
article sur sa traduction de Jacques Roubaud, la traductrice et
théoricienne Oseki-Dépré affirme que la poétique du poète oulipien
explicite l’amnésie de la traduction brésilienne, car « le sol de la
littérature brésilienne, sa mémoire de langue, [sa « mémoire
publique »] n’est pas comparable à la mémoire de la littérature
française. Sa traduction de Quelque chose noir fait « surgir donc dans
notre langue une poétique inédite, héritière de formes et traditions
diverses, absentes dans notre mémoire » (2009, 401).
33
Ainsi, afin de respecter la tâche du traducteur énoncée par le
critique, poète et traducteur brésilien Haroldo de Campos, « la
configuration d’une tradition active [...] qui est née d’une pédagogie
fructueuse et stimulante [...] » (2011, 43), notre communication
ambitionne une réflexion sur l’importance de la traduction des textes
à contrainte pour le renouvellement de la mémoire publique culturelle
brésilienne. Les études sur les traductions des œuvres oulipiennes en
général, et sur La Disparition en particulier, se limitent à présenter les
choix de traduction et exposer les solutions en langue étrangère. À
partir d’une discussion sur la contrainte oulipienne, notre point original
est de démontrer comment les traductions lipogrammatiques du
roman de Perec de 1969 peuvent être « bonnes » ou « mauvaises »,
selon leur contribution à l’enrichissement d’une tradition littéraire
brésilienne et, par conséquent, examiner le rapport entre les formes
littéraires, la tradition littéraire et la traduction. Pour illustrer notre
argument, nous souhaitons proposer un projet de traduction vers le
portugais de quelques poèmes hétérogrammatiques de Perec, issus
d’Alphabets (1976). Les poèmes de ce recueil reposent sur une
réduction de l’alphabet à onze lettres, où figurent les dix plus
fréquemment utilisées en français (« e », « s », « a », « r », « t », « i »,
« n », « u », « l », « o »), auxquelles est ajoutée une lettre
supplémentaire. La contrainte supplémentaire est qu’une lettre ne
peut qu’être utilisée qu’après l’emploi des dix autres. Nous tenterons
de provoquer des lectures « farfelues », « imaginatives », ou encore
« poétiques », marques identifiées par Bellos (2004, 25) comme celles
d’une « bonne » interprétation du texte sous contrainte.
Références bibliographiques
34
JOLY, Jean-Luc. Connaissement du monde : multiplicité, exhaustivité, totalité
dans l’œuvre de Georges Perec, 1147 f. (Thèse) – Lettres Modernes,
Toulouse, Toulouse 2, 2004.
LESCURE, Jean. « Petite histoire de l’Oulipo ». In : La littérature potentielle.
Paris : Gallimard, 2007 : 24-35.
OSEKI-DÉPRÉ, Inês. « D’une traduction amnésique (à propos de Algo : Preto,
de Jacques Roubaud) ». In : Alea, vol 11, n. 2, Rio de Janeiro, juil-déc, 2009 :
384-402.
Corpus
Georges PEREC
35
La traduction entre écriture et désœuvrement
Djihed CHAREF
INALCO, France
36
En vue de ce constat, si l’on considère que ces textes
(maghrébins) se situent à la lisière de deux langues/cultures/visions du
monde, car la langue maternelle « est à l’œuvre dans la langue
étrangère, de l’une à l’autre se déroule une traduction permanente et
un certain et un entretien en abîme, extrêmement difficile à mettre à
jour » (Khatibi 1985), cela nous conduit à la question de l’hybridité,
comme caractéristique fondamentale de la littérature maghrébine,
cette hybridité suppose, d’abord, énonciativement, que l’on pourrait
interpréter ces écritures comme un faire ou comme un résultat du faire
traductif, donc, comme autant de mauvaises écritures produisant de
mauvaises traductions. Textuellement ensuite, à travers une relation
interdiscursive et tensionnelle, impliquant une mise en présence
concrète du dire traduit et/ou de la parole traduite dans l’élaboration
du texte.
Références bibliographiques
BALLARD, Michel. La traduction, contact des langues et de cultures. Arras :
Artois Presses Université, 2005.
BARTHES, Roland. L’aventure sémiologique. Paris : Le Seuil, 1985.
BERMAN, Antoine. L’Épreuve de l’étranger. Culture et traduction dans
l’Allemagne romantique. Paris : Gallimard, 1984.
BLANCHOT, Maurice. L’entretien infini. Paris : Gallimard, 1977.
CASANOVA, Pascale. La république mondiale des lettres. Paris : Seuil, 2008.
CALLE-GRUBER, Mireille. « Écrire de main morte ou l’art de la césure chez
Assia Djebar ». L’esprit créateur, vol. 48, n° 4, 2008 : 5-14.
DERRIDA, Jacques. L’Écriture et la différence. Paris : Seuil, coll. « Tel Quel »,
1967.
ECO, Umberto. Dire presque la même chose. Expériences de traduction,
traduit de l’italien par Myriem Bouzaher. Paris : Grasset, 2003.
GLISSANT, Édouard. Philosophie de la relation. Paris : Gallimard, 2009.
IVANTCHEVA-MERJANSKA, Kristinalrene. Écrire la langue de l’autre. Paris :
L’Harmattan, 2015.
KHATIBI, Abdelkebir. Maghreb pluriel. Paris : Denoël, 1985.
MESCHONNIC, Henri. Poétique du traduire. Paris : Verdier, 1999.
ROUX-FAUCARD, Geneviève. Poétique du récit traduit. Caen : Lettres
modernes Minard, 2008.
STEINER, George. Après Babel ; une poétique du dire et de la traduction,
(traduit de l’anglais par Lucienne Lotringer). Paris : Albin Michel, 1978.
YELLES, Mourad. Littératures orales et écritures postcoloniales. Alger : OPU,
2002.
37
Splendeurs et misères de la réécriture (auto)traductive. Le cas de
Matéi Visniec
Georgeta CRISTIAN
Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, France
38
Au terme de notre étude comparative, nous dresserons le bilan
des aspects positifs et des aspects négatifs relevés précédemment
dans les deux traductions. Ensuite, nous les évaluerons en nous
appuyant sur les particularités d’une bonne ou d’une mauvaise
traduction théâtrale, particularités établies par différents traducteurs
professionnels de théâtre et par des chercheurs, dont Aaltonen (2000),
Déprats (2010), Pavis (1980), Zatlin (2005) et Zuber (1980).
À ce stade, nous estimons que les deux traductions font passer
le message littéraire et théâtral du texte original, mais par des moyens
différents et à des degrés différents. Plus précisément, la traduction
allographe est, paradoxalement, plus fidèle à l’original que
l’autotraduction mais elle « neutralise » davantage le message
littéraire et théâtral. En revanche, l’autotraduction s’écarte de
l’original, afin d’adapter le message esthétique à l’« horizon d’attente »
(Berman 1995) du lecteur/public roumanophone.
Références bibliographiques
39
MAGIARU, Daniela. Matei Vişniec. Mirajul cuvintelor calde [Matéi Visniec. Le
mirage des mots chaleureux]. Bucureşti : Institutul Cultural Român, 2010.
PAVIS, Patrice. « Vers une spécificité de la traduction théâtrale : la traduction
intergestuelle et interculturelle ». In : Le théâtre au croisement des cultures.
Paris : José Corti, 1990 : 135-170.
SARRAZAC, Jean-Pierre (dir.). Poétique du drame moderne et contemporain.
Lexique d’une recherche. Louvain-la-Neuve : Éditions du Centre d’Études
Théâtrale, 2001.
SIMEONE, Bernard. Écrire, traduire, en métamorphose. L’Atelier infini. Paris :
Éditions Verdier, 2014.
ZUBER, Ortrun (ed.). Languages of Theatre. Problems in the Translation and
Transposition of Drama. Oxford/New York/Toronto/Sydney/Paris/Frankfurt :
Pergamon Press Ltd, 1980.
Corpus
Matéi VISNIEC
40
Quelques réflexions sur le transfert de l’écriture durassienne en
albanais
41
courtes (réduites à l’essentiel), indépendantes, nominatives,
juxtaposées et souvent morcelées. Donc, il s’agit d’une langue proche
à l’oral, calquée sur le vietnamien (Bouthors-Paillart 2002, 163-164).
Face à une écriture si complexe, la tâche du traducteur se
révèle plus difficile parce qu’elle demande un effort supplémentaire si
l’on veut s’assurer que le lecteur « aille à la rencontre de l’écrivain »
(Schleiermacher, cité par Berman 1995, 299). Mais, comment parvenir
à transmettre cette urgence durassienne caractérisée à la fois par la
brièveté, la simplicité, l’oralité, l’implicite ? Comment présenter au
lecteur un texte assimilable sans pour autant en porter atteinte à la
nature étrangère ? La première traduction de l’Amant en Albanie a été
accomplie en 1994 (réédition 2005) par Nasi Lera, également écrivain
contemporain albanais.1
Cette étude se propose, à travers une approche comparative,
de mettre en évidence les stratégies de traduction utilisées, avec le but
de comprendre si le traducteur a respecté la spécificité de l’écriture
durassienne, qui constitue son altérité aussi bien sur le plan du sens
que sur celui des formes, ou bien il a cédé à la tentation de réorganiser
le discours tout en ne garantissant pas aux lecteurs albanais la
reconnaissance et la réception de « l’Autre en tant qu’Autre » (Berman
1999, 74).
Références bibliographiques
1
N. Lera a traduit entre autres les grands de la littérature française tels qu’André
Gide, Albert Camus, Raymond Radiguet, J.M.C Le Clézio, Françoise Sagan, Simone de
Beauvoir, Guy de Maupassant, etc.
42
DURAS, Marguerite, GAUTHIER, Xavière. Les Parleuses. Paris : Les Éditions
de Minuit, 2013.
DURAS, Marguerite. Écrire. Paris : Gallimard, 1993.
DURAS, Marguerite. « Entretien avec Aliette Armel ». Le Magazine littéraire,
n° 276, 1990 : 18-24.
MOUNIN, Georges. Les belles infidèles. Lille : Presses Universitaires de
Septentrion, 2016.
TUPJA, Edmond. Këshilla një përkthyesi të ri. Tiranë : Onufri, 2000.
43
La retraduction d’une même œuvre littéraire serait-ce une solution
pour améliorer la qualité de la traduction ?
Mzago DOKHTOURICHVILI
Université d’État Ilia, Géorgie
44
nouvelle traduction peut actualiser d’autres compréhensions ou
interprétations. L’original serait donc (cf. Brotski) l’ensemble de toutes
les éventuelles traductions. Par conséquent, nous allons porter une
attention plus particulière à des ouvrages et des discussions
théoriques qui traitent du caractère complexe du phénomène de
retraduction. Aussi, allons-nous nous interroger, en nous basant sur
des exemples concrets, sur des critères qui nous aideront à qualifier de
fidèles ou d’infidèles, de bonnes ou de mauvaises différentes
traductions d’une même œuvre littéraire effectuées à des moments
différents par différents traducteurs.
Le corpus de notre analyse est constitué de trois traductions en
français de Chevalier à la peau de tigre de Chota Rustavéli, de trois
traductions en géorgien des Fleurs du mal de Charles Baudelaire et de
trois traductions en géorgien du Petit Prince de Saint-Exupéry, ces
traductions ayant été effectuées à des époques différentes par
différents traducteurs.
L’analyse comparée des traductions effectuées des œuvres de
notre choix nous permettra de répondre à la question posée dans le
titre de notre communication, à savoir, si la retraduction à plusieurs
reprises d’une même œuvre littéraire pourrait être une solution pour
transmettre, dans la langue cible, d’une façon exacte le sens et la lettre
du texte source, si on peut mettre un signe d’équation entre une
traduction fidèle, exacte et une bonne traduction, et entre une
traduction infidèle (traîtresse) et une mauvaise traduction, ou bien si
les notions de traduisibilité–traductibilité vs intraduisibilité–
intraductibilité pourraient servir de critères, parmi tant d’autres, pour
la définition de la bonne et de la mauvaise traduction. Ou bien encore
devrait-on « renoncer à l’idéal de la traduction parfaite » (Ricœur) et
se réconcilier à l’idée que le traducteur doit effectuer une « double
trahison » (Nouss) afin d’arriver à « faire résonner dans sa propre
langue l’écho d’une œuvre conçue dans une langue étrangère »
(Benjamin).
L’analyse comparée de plusieurs traductions d’une même
œuvre littéraire nous permettra également d’établir les motifs et les
raisons qui conditionnent la nécessité d’une retraduction (le statut du
texte source, les erreurs lexico-sémantiques ou syntaxiques, la
sollicitation de l’éditeur, la curiosité du nouvel lecteur, l’évolution des
langues, le problème de traduction des références culturelles, la
45
négligence, dans la traduction déjà effectuée, de la poétique, du
rythme du texte source, le « vieillissement » de la traduction existante,
le caractère polysémique et la polyphonie du texte) et de contribuer,
de cette façon, au développement du courant de la théorie
traductologique qui étudie les motifs de la retraduction d’une même
œuvre littéraire et le caractère complexe de ce phénomène.
Références bibliographiques
46
Les imperfections de la traduction du texte de théâtre
Jean-Paul DUFIET
Université de Trente, Italie
47
Mais en tout état de cause, la traduction du texte de théâtre
s’inscrit pleinement dans son genre textuel de référence lorsqu’elle est
destinée à la scène et qu’elle est indifférente aux préoccupations
éditoriales. La traduction n’est alors qu’un moment du processus
théâtral, elle n’est pas destinée à exister pour elle-même. D’ailleurs de
très nombreuses traductions de textes dramatiques sont représentées
sans être jamais publiées, et restent à l’état de tapuscrit.
Le propre d’une traduction destinée à être représentée est
d’être surdéterminée et orientée par un projet scénique qui dépend
d’un metteur en scène et non pas d’un éditeur. C’est le metteur en
scène qui sollicite le traducteur, qui d’ailleurs souvent le seconde pour
ne pas dire le « contrôle », même quand sa compétence linguistique
est très limitée. Le russe, le suédois, le norvégien, le serbe, etc… sont
des langues peu accessibles. Aucune incompétence linguistique
n’empêche un metteur en scène d’intervenir directement sur la
traduction. Car la question n’est pas linguistique et philologique : c’est
le projet scénique qui conditionne l’opération de traduction et non pas
l’inverse. Et c’est exactement pour cette raison que tout metteur en
scène veut sa propre traduction, c’est-à-dire la traduction adéquate à
son projet esthétique et scénique, et qu’il re-traduit toujours le texte
étranger qu’il entend mettre en scène, même s’il en existe déjà de
nombreuses traductions. Une pièce comme Hamlet a subi, ou
bénéficié selon ce qu’on en pense, d’un nombre incalculable de
traductions depuis que Shakespeare est entré dans le répertoire
français, au XIXe siècle ; la situation est identique en Allemagne,
comme en est la preuve la dernière mise en scène de Richard III par T.
Ostermeyer.
Il résulte de cette situation que le texte source subit ou peut
subir de nombreuses opérations qui fonctionnent souvent par couple
d’opposition : coupure et amplification, réécriture et citation,
accentuation et adoucissement sémantiques, historicisation et
contemporéanisation, simplification et complexification en vue du
passage à l’oral, etc. Dans une perspective linguistique et littéraire
stricte, toutes ces opérations peuvent être considérées comme des
défauts graves, alors qu’en réalité, elles expriment la nature – les choix
esthétiques, les intentions dramaturgiques – du projet scénique qui a
motivé l’acte de traduire. Le texte d’arrivée n’est pas destiné à être
confronté au texte de départ mais demande à être saisi dans ses
48
relations intersémiotiques avec l’espace, les lumières, les sons, les
costumes, le jeu des comédiens…
En termes disciplinaires, la traduction du texte de théâtre
dépend donc autant de critères esthétiques, pragmatiques et culturels
que de critères, linguistiques, philologiques et stylistiques. À partir de
cette problématique, on propose une réflexion sur la traduction de
texte de théâtre ; on s’appuiera sur un certain nombre d’exemples
français et européens, classiques et contemporains.
Références bibliographiques
49
L’inquiétude de la traduction
Catherine DU TOIT
Université de Stellenbosch, Afrique du Sud
50
par la politique éditoriale de la maison d’édition) ne sont pas très
souvent prises en compte. Cela s’explique par le fait que ces
implications ne sont, dans la plupart des cas, qu’une présence-fantôme
dont le lecteur exclu de la langue et de la culture source ne peut être
conscient – à moins qu’il ne soit hanté par la vague inquiétude
qu’exprime Camille de Toledo dans le chant cité en exergue.
Nous prendrons pour exemple la traduction en français de
textes afrikaans. Même dans les rares cas où il ne s’agit pas de
traduction-relais, le traducteur se heurte non seulement contre une
certaine rigidité de la langue française avec ses normes du bien écrire,
mais aussi contre d’autres difficultés parfois considérées comme des
intraductibilités, telles que l’alternance linguistique qui caractérise les
dialogues du quotidien sud-africain, ou la forte oralité des textes
afrikaans contemporains, où la répétition rythme le discours, alors que
cette répétition reste taboue dans la pratique de la traduction en
France.
Dans ses romans policiers, Deon Meyer trace le profil culturel
de la société sud-africaine dans toute sa complexité sans pour autant
réduire les personnages à des stéréotypes ethniques simplistes. Le
roman policier sud-africain fonctionne inévitablement comme
médiateur culturel et ceci se voit chez Meyer non seulement dans
l’intrigue, les références culturelles ou le contact interrelationnel mais
aussi dans le dialogue qui reflète souvent l’alternance linguistique qui
caractérise le quotidien sud-africain. Il ne s’agit pas seulement de se
faire comprendre par l’autre mais d’aller à sa rencontre. Pour le lecteur
local, le type d’alternance linguistique et son placement révèlent le
contexte social et ethnique du locuteur. Ainsi, l’alternance linguistique
dans le dialogue fonctionne comme une didascalie invisible qui fait
vivre la diversité culturelle et linguistique tout en donnant des indices
importants pour l’intrigue et la caractérisation identitaire.
La traduction peut-elle rendre la complexité de ce tissu social
tout en respectant les limites imposées par des pratiques éditoriales
qui, selon Ortega y Gasset (2004) enferment l’auteur traduit dans la
prison de la norme expressive ? Est-il possible d’arriver à des
compromis fonctionnels malgré les attentes supposées des lecteurs ?
Ou faudrait-il accepter de voir les textes afrikaans homogénéisés au
cours de leur transformation en français ? Est-ce, par ailleurs, une
question de langue mineure qui s’incline devant la force imposante
51
d’une langue majeure ? Ou s’agit-il plutôt d’une rigidité ancrée dans
de vieilles habitudes ? Et qu’en est-il, au milieu de ces approches et
compromis, de la qualité de la traduction ?
Nous vivons une époque d’hybridation et de métissage où
s’impose une plus grande réceptivité à la traduction comme espace
d’échange et de communication au-delà de la diversité linguistique ;
un espace où nous pouvons apprendre à penser et à vivre, dans l’entre-
les-langues.
Références bibliographiques
Corpus
Deon MEYER
Kobra. H&R : Le Cap, 2012.
En vrille. Seuil : Paris, 2014.
Koors. H&R : Le Cap, 2016.
L’Année du Lion. Seuil : Paris (à paraître).
52
Vers la connaissance du bon/mauvais traducteur littéraire
53
tâche est bien plus dure quand il doit transférer une grande œuvre
littéraire écrite par un écrivain jouissant d’une renommée
internationale.
Un survol des différents discours traductologiques, d’hier et
d’aujourd’hui, révèle le fait que le traducteur a été souvent considéré
comme un « humble médiateur d’œuvres étrangères, toujours traître
alors même qu’il se veut la fidélité incarnée » (Berman 1984, 16), ou
comme un « copieur d’œuvres d’art – copieur de talent […] – dont la
copie se doit de conserver l’essentiel de l’original » (Tatilon 2003, 114).
Rappelons en passant le fameux adage Traduttore, traditore qui plane
comme une ombre, depuis des siècles, sur le travail du traducteur.
Confronté à l’autorité (de l’auteur, du texte source) et victime
de nombreux préjugés, le traducteur risque d’éprouver un sentiment
d’infériorité qui constitue, selon nous, la clé de voûte de son devenir.
C’est de ce point que part et se développe sa profession : le traducteur,
grâce à la faculté psychique de tendre à un but, se fixe comme objectif
l’acte de traduire et se fraye une voie susceptible de l’aider à atteindre
son but, obtenir un nouveau texte en langue cible. Il y a alors deux
solutions qui se présentent à lui. D’une part, il peut s’estimer
insuffisant, se laisser accabler par le sentiment d’infériorité. Il court
ainsi le risque de devenir un « mauvais » traducteur puisqu’il ne
parvient pas à se libérer de la contrainte exercé sur lui par l’auteur, le
texte et la langue source. Il tombe dans le piège du littéralisme, de la
fidélité aux mots. D’autre part, il peut chercher à compenser le
sentiment d’infériorité par la tendance à se faire valoir. La
surestimation de soi risque aussi de le transformer en « mauvais »
traducteur : il n’hésitera pas à faire plus qu’on n’attend de lui, à
s’infiltrer dans le texte et à le déformer (pensons aux « belles
infidèles »). Dans ce cas, il se fera accuser d’infidélité, de déviation par
rapport au texte source, à l’intention de l’auteur. Le traducteur semble
ainsi se retrouver dans une situation impossible, presque sans issue.
Qu’est-ce qu’il peut encore faire ? Peut-il devenir un bon traducteur ?
Si oui, comment ? Il doit cultiver son sentiment de communion
humaine (présent selon Adler dans toutes les manifestations de la vie),
en ayant la conscience « de ne produire aucun dommage, mais de
rendre d’utiles services ». (Adler 1966, 58). En agissant de la sorte, le
traducteur pourra devenir maître de son destin.
54
Tous ces aspects sont faciles à repérer chez les apprentis
traducteurs qui, faute d’expérience traductive, et sous le poids de
l’auteur et du texte source, traduisent la langue en prenant la
traduction pour une opération strictement linguistique. Or, par la
traduction « [c]e ne sont donc pas des mots que l’on transpose d’une
langue en une autre, mais le sens dont ils sont porteurs. C’est le sens
qui est le fondement des équivalences de traduction. » (Delisle 2014).
Il faut par la suite leur apprendre la juste mesure leur permettant
d’accomplir adéquatement leurs tâches. Pour illustrer ces affirmations,
nous comparerons des traductions faites par des apprentis traducteurs
à partir de fragments extraits du livre d’Eric-Emanuel Schmitt, La
rêveuse d’Ostende, et d’autres versions en roumain. En guise de
conclusion, nous voulons souligner la nécessité de réévaluer le statut
du traducteur (littéraire) et plaider pour une formation de qualité lui
permettant d’acquérir les bonnes ressources pour son faire de
traducteur.
Références bibliographiques
ADLER, Alfred. Connaissance de l’homme. Étude de caractérologie
individuelle. Traduit de l’allemand par Jacques Marty. Paris : Payot, 1966
[1949].
ARENDT, Hannah. « Qu’est-ce que l’autorité ? ». In : La crise de la culture.
Traduit de l’anglais par LEVY, P. et al. Paris : Gallimard, 1972 : 121-185.
BERMAN, Antoine. L’Épreuve de l’étranger. Culture et traduction dans
l’Allemagne romantique. Paris : Gallimard, 1984.
BERMAN, Antoine. Pour une critique des traductions : John Donne. Paris :
Gallimard, 1995.
DELISLE, Jean. « La traduction littéraire ou l’art de "faire fleurir les déserts du
sens" ». 2014.
PYM, Anthony. Pour une éthique du traducteur. Arras/Ottawa : Artois Presses
Université /Presses de l’Université d’Ottawa, 1997.
TATILON, Claude. « Traduction: une perspective fonctionaliste ». In La
linguistique, vol. 39, no 1, 2003 : 109-118.
VENUTI, Lawrence. The Translator’s invisibility : A History of Translation.
London/New York : Routledge, 1995.
Corpus
Éric-Emmanuel SCHMITT
« Crime parfait ». In : La rêveuse d’Ostende. Paris : Albin Michel, 2007.
« Crimă perfectă ». In : Visătoarea din Ostende : Traducere din limba franceză
de Liliana Donose Samuelsson). Bucureşti : Humanitas, 2013.
55
Ni bonne ni mauvaise. La traduction allemande d’auteurs
francophones d’Afrique Subsaharienne
Deva EL-SHADDAI
Université Louis-et-Maximilien (LMU) Munich, Allemagne
56
Robertson (1995 ; 2009 ; 2012), une littérature glocale : elle est
produite dans l’espace où le local et le global se rencontrent et
interpénètrent. Elle est glocale parce qu’elle s’adresse (et s’est
toujours adressée) à une audience globale, parce qu’elle s’approprie,
au niveau local, des formes littéraires et des langues globales et, parce
qu’elle est hybride et met en scène un espace hybride et translocal.
Par conséquent, la traduction d’œuvres littéraires europhones
d’Afrique Subsaharienne est aussi glocale. Elle cherche à concilier le
souci de rendre accessible une œuvre produite sur le plan global au
public local allemand, et celui de préserver les spécificités esthétiques
et culturelles locales dans le texte original. Il s’ensuit qu’elle est à la
fois bonne et mauvaise : elle est mauvaise dans le sens bermanien
(Berman 1992, 5), car en essayant de produire un texte transparent,
elle corrige, réécrit et recadre le texte africain et le dépouille de bon
nombre de ses qualités esthétiques. En même temps, là où le texte
original africain ne pose aucun problème de lisibilité, elle lui reste
fidèle et se montre en bonne traduction.
Références bibliographiques
57
MAYANJA, Shaban. « Pthwoh ! Geschichte, Bleibe ein Zwerg, während ich
wachse ! ». Untersuchungen zum Problem der Übersetzung afrikanischer
Literatur ins Deutsche. Zugl. : Hannover, Univ., Diss., 1999. 1. Aufl. Hannover:
Revonnah (Schriftstücke, 9), 1999.
ROBERTSON, Roland. « Glocalization: Time – Space And Homogeneity–
Heterogeneity ». In : M. Featherstone, S. Lash, R. Robertson (ed.): Global
Modernities (Theory, Culture & Society), 1995 : 25–54.
ROBERTSON, Roland, WHITE, Kathleen E. « What Is Globalization? ». In :
George Ritzer (Hg.), The Blackwell Companion to Globalization. [Nachdr.].
Malden, Mass. : Blackwell, 2009 : 54–66.
ROBERTSON, Roland. « Globalisation or Glocalisation? ». In : Journal Of
International Communication, n° 18 (2), 2012 : 191–208.
VENUTI, Lawrence. The Translator's Invisibility. A History of Translation. 2
edition. London : Routledge, 2008.
Corpus
58
L’utilité des mauvaises traductions. La première version des Chants
orphiques de Dino Campana en roumain
Aurora FIRȚA
Université de Bucarest, Roumanie
59
français). Toutefois, qualifier de mauvaise cette traduction n’est pas
que le résultat de l’absence de la rime, qui semble un choix assumé par
le traducteur-poète, mais aux nombreux inexactitudes lexicales et
sémantiques causées, parfois, par des similitudes entre les langues
roumaine et italienne.
Voilà trois exemples :
60
Références bibliographiques:
Corpus
61
Mauvaise traduction ou appropriation auctoriale et revendication
d’une « licence poétique » ? La traduction d’Anabase de Saint-John
Perse par T. S. Eliot
62
œuvres contemporaines ou à venir, telles que Ash Wednesday (1930)1.
Fort éloignée du texte de départ2, mais d’autant plus admirée en tant
qu’œuvre poétique indépendante, l’œuvre de ce poète-traducteur
peut donc être considérée comme une création nouvelle.
Or, à en juger d’après les nombreuses infidélités (cf. Shlomo
1973) commises par T.S. Eliot, la traduction d’Anabase semble prendre
le parti de la littérarité contre la littéralité. Ces deux principes semblent
maintenir une tension dialectique infiniment riche, qui se révèle non
seulement tout au long de la genèse de cette traduction, mais aussi
dans les paratextes qui la commentent.
En effet, la traduction d’Anabase par T.S. Eliot connut quatre
éditions successives3, accompagnées de quatre préfaces. C’est ici que
le traducteur commente ses choix et justifie, à partir de la deuxième
édition, les modifications qu’il apporte, avec l’aide de Saint-John Perse,
à sa version précédente. Ce que T.S. Eliot avait fièrement revendiqué,
dans sa première préface, comme des « écarts poétiques » en faveur
d’une « liberté » et d’une « intention auctoriale », sera humblement
reconnu, dans les préfaces des versions successives, comme des
« inexactitudes » et des « erreurs », réparées pour assurer une plus
grande « fidélité littérale ». Les préfaces révèlent donc à la fois une
critique du traduire et l’ethos du poète-traducteur, dont le double
statut oscille entre la conscience professionnelle du traducteur voulant
servir le texte de départ, et la liberté créatrice du poète.
D’autre part, la traduction du poème Anabase fut en vérité une
transposition à quatre mains : Saint-John Perse annote la traduction
1
La traduction d’Eliot relève si clairement de l’appropriation poétique que des
lecteurs américains ont pu croire qu’il en était l’auteur – et Saint-John Perse, le
traducteur. Chapin rapporte cette conversation entre Saint-John Perse et « une des
“Précieuses” littéraires de Washington » : « “Je sais que vous êtes poète. Mais je ne
sais pas au juste si c’est T. S. Eliot qui a traduit un poème de vous, ou si c’est vous, au
contraire, qui êtes le traducteur d’un de ses plus fameux poèmes ?” — “La deuxième
hypothèse est la bonne !” lui affirma aussitôt le poète. Et tout au long du dîner ils
continuèrent de parler d’un poème d’Eliot intitulé Anabase. » (1965, 290).
2
« Elle est, inutile de le cacher, la plus infidèle, sur-traduction plutôt que
transposition, et pourtant la seule reconnue des Anglais, et cela malgré la tentative
d’un traducteur professionnel réputé, critique de Saint -John Perse par surcroît, de
présenter une version plus exacte. […] L’inventaire des libertés prises par T. S. Eliot a
été dressé par le critique israélien Shlomo Elbaz. » (Levillain 1999, 98-99).
3
Faber and Faber (Londres) 1930; Harcourt, Brace and Co (New York) 1938 ;
Harcourt, Brace and Co (New York) 1949 ; Faber and Faber (London) 1949.
63
éliotienne et la corrige à maints endroits (Hartmann 2007, 230 sq., 252
sq.). Cette collaboration, qui permet à Saint-John Perse de recréer son
œuvre dans la langue anglaise, de l’interpréter et d’en expliciter l’art
poétique, infléchit également son statut d’auteur – il devient « co-
traducteur », ou, comme le dit T.S. Eliot, « demi-traducteur »4. Aussi
notre étude s’intéressera-t-elle également au manuscrit de T.S. Eliot
annoté par Saint-John Perse, dévoilant la genèse collaborative de cette
traduction. Les variantes et corrections que Saint-John Perse y apporte
évoquent, implicitement, un discours traductologique, traversé lui
aussi par la dialectique d’une aspiration double, qui rend fascinante
toute entreprise de traduction – l’exigence d’une fidélité littérale et le
désir d’une liberté poétique.
Références bibliographiques
Corpus
4
« Quant à la traduction, elle n’aurait pu être ce qu’elle est sans la collaboration
prêtée par l’auteur, au point d’en faire pour moi un demi-traducteur. » (Eliot 1965,
420-422).
64
La Bande dessinée d’Hergé en grec : mutilations sémantiques dans les
bulles
Elisa HATZIDAKI
Université Paul-Valéry Montpellier, France
65
de respecter la taille standardisée des bulles, élimine certains éléments
sacrifiant parfois le sens de l’énoncé. En d’autres termes, pour parvenir
à tout rentrer dans les bulles, il n’hésite pas à remodeler le récit en
enlevant ce qui pourrait parasiter la clarté et la fluidité du texte grec et
par conséquent l’action du discours narratif. Plus encore, si la
traduction modifie délibérément des aspects du TS, en supprimant par
exemple des mots ou des signes, il est légitime que les réactions chez
le lecteur hellénophone ne soient pas les mêmes. Peut-on alors parler
d’une mauvaise traduction ? Comment définir au juste la bonne
traduction d’une BD ? Si l’on accepte la définition de la sociologue
Evelyne Sullerot qui affirme que la BD est l’antichambre de la culture
et si l’on admet que les textes illustrés sont vecteurs des sens,
symboles et représentations, on se situe au-delà de la tradition cibliste
ou sourcière, et loin de tout regard statique qu’impose la dichotomie
étrangéité vs familiarité. Ainsi, la traduction optimale de la BD serait
celle qui transmet les idées. Est-ce pourtant le cas chez Hergé ? Dans
les vignettes grecques, le texte correspond-il à l’illustration ? Quels
sont les messages estropiés et les images estompées dans la BD en
question ? Pour répondre à ces interrogations, nous nous proposons
de comparer des segments narratifs dans les deux langues afin
d’établir une typologie des dissemblances repérées. La méthode
d’analyse que nous proposons devrait nous permettre d’affirmer si la
traduction grecque atteint son but, si elle rend clairement et
intégralement la pensée et le vouloir dire du texte français ou si, en
revanche, elle atténue l’intensité de certains éléments sous-jacents.
Enfin, qu’en est-il des effets produits et quelles sont finalement les
représentations que peut se faire le public hellénophone ? Notre but
est de montrer aussi que l’interprétation ou la reformulation de la
parole de l’Autre, dans une société qui se veut multiculturelle, doit
respecter des valeurs universelles, héritage commun de l’humanité.
Références bibliographiques
66
ECO, Umberto. Dire presque la même chose. Expériences de traduction.
Traduit de l’italien par Myriem Bouzager. Paris : Grasset, 2003.
JAKBSON, Roman. Essais de linguistique générale. Paris : Minuit, 1973.
FAUR, Jean-Claude. À la rencontre de la bande dessinée. Marseille : Bedesud,
1983.
LADMIRAL, Jean-René. Traduire : théorèmes pour la traduction. Paris :
Gallimard, Coll. « Tel », 1994.
MCCARTHY, Tom. Tintin et le secret de la littérature. Paris : Hachette
Littératures, 2006.
MESHONNIC, Henri. Poétique du traduire. Paris : Verdier, 1999.
MOUNIN, Georges. Les Belles infidèles. Lille : Presses Universitaires du
Septentrion, 2016.
NOUSS, Alexis. « Eloge de la trahison ». In : TTR : traduction, terminologie,
rédaction, Volume 14, n°2, 2001 : 167-179.
PYM, Anthony. Pour une éthique du traducteur. Arras/Ottawa : Artois Presses
Université/Presses de l’Université d’Ottawa, 1997.
RICŒUR, Paul. Soi-même comme un autre. Paris : Seuil, 1990.
SULLEROT, Evelyne. Bande dessinée et culture. Paris : Opera Mundi, 1966.
67
Une approche pragmatique du concept de « mauvaise » traduction.
L’exemple d’Un amour de Dino Buzzati
Floryne JOCCALLAZ
Université de Genève, Suisse
68
rendu ce phénomène d’annihilation de soi passant par l’adoption de
certains traits linguistiques de la personne désirée.
Notre analyse nous permettra d’affirmer que, de
« laboratoire » (Vignali-De Poli 2011, 207) linguistique audacieux au
service de riches effets narratifs en langue source, le roman apparaît
en français comme décoloré par l’intervention du traducteur. Ce
constat nous conduira à réfléchir au rôle essentiel d’une traduction
comportant des faiblesses au niveau de la compréhension du style de
l’auteur, dans la réflexion soutenant un projet de retraduction. Malgré
les évidents manquements d’Un amour, nous soulignerons son succès
éditorial dans l’Hexagone et évoquerons la manière dont les
« mauvaises » traductions françaises de Buzzati ont pourtant permis
d’offrir à l’œuvre de l’écrivain un second souffle en Italie, grâce
notamment aux activités de l’« Association internationale des Amis de
Dino Buzzati », fondée à Paris en 1976. Ce n’est en effet qu’en 1989,
sous l’impulsion de Nella Giannetto, qu’a été créée à Feltre
l’« Associazione Dino Buzzati ». Ce regain d’intérêt a ouvert la voie à de
nouvelles études qui ont mis en lumière la richesse, jusque-là souvent
ignorée, de l’écriture buzzatienne.
Références bibliographiques
69
HEWSON, Lance. An Approach to Translation Criticism. Amsterdam
/Philadelphie : John Benjamins Publishing Company, 2011.
HEWSON, Lance. « Entretien avec Muguraş Constantinescu ». In : Atelier de
traduction, n. 19, 2013 : 15-21.
LAFFONT, Robert. « Un de mes auteurs préférés : Buzzati ». In : Cahiers Dino
Buzzati, n. 2, 1978 : 19-25.
LIVI, François. « Traduire Buzzati ». In : Travaux du Centre de traduction
littéraire (CTL). Traduire les classiques italiens. Dante, Boccaccio, Tasso,
Buzzati, n. 14, 1992 : 31-42.
PANAFIEU, Yves. Un autoritratto. Dialoghi con Yves Panafieu (Luglio-Settembre
1971). Milan : Mondadori, 1973.
PANAFIEU, Yves. Eve, Circé, Marie ou la femme dans la vie et dans l’œuvre de
Dino Buzzati. Paris : Association internationale des amis de Dino Buzzati,
1989.
VIGNALI-DE POLI, Cristina. La parole de l’autre : l’écriture de Dino Buzzati à
l’épreuve de la traduction. Berne, Berlin, Bruxelles, etc. : Peter Lang, 2011.
Corpus
BUZZATI, Dino
70
L’analytique de la traduction dans l’étude des traductions roumaines
de la nouvelle La Parure de Guy de Maupassant
71
À travers ces analyses, nous visons à comparer non seulement
la façon dont les traducteurs ont interprété le texte, mais également
la manière dont ils ont contribué à manifester la pluralité
interprétative de l’œuvre littéraire en question. La comparaison à
l’original fait ressortir non seulement des passages plus ou moins
touchés par des déformations, mais également la différence entre
chaque traduction et le texte de départ ainsi qu’entre les traductions
elles-mêmes.
Les analyses macrostructurales ainsi que les analyses
microstructurales du texte vont nous aider à construire un parcours
cohérent de lecture du texte à traduire, à remplir des « blancs » du
texte (cf. Eco 1985), à identifier la cohésion et la cohérence textuelle,
la progression thématique, la segmentation, ainsi que la focalisation,
les marqueurs linguistiques, les structures des séquences descriptives,
narratives et dialogales, le fonctionnement des temps verbaux, etc., à
la reconstruction du texte dans la langue cible.
Lorsqu’on veut évaluer la qualité d’une traduction, on doit
prendre en compte ce gendre d’analyses. Ce n’est qu’ ainsi qu’on peut,
dans un premier temps, arriver au niveau de profondeur du texte à
traduire, et vérifier l’acceptabilité des choix traductifs ; et, dans un
second temps, identifier les tendances déformantes qu’engendre une
compréhension/interprétation déficitaire des structures du texte à
traduire, et implicitement les erreurs de traduction qui s’ensuivent.
Références bibliographiques
72
ECO, Umberto. Lector in fabula ou coopération interprétative dans les textes
narratifs. Paris : Éd. Bernard Grasset&Fasquelle, 1985.
FLOREA, Ligia Stela. Pour une approche linguistique et pragmatique du texte
littéraire. București : Ed. Eliteratura, 2015a.
FLOREA, Ligia Stela. « Construction du point de vue et traduction. À propos
de l’incipit de Qui j’ose aimer d’Hervé Basin ». In : Atelier de traduction, n. 24,
2015b : 91-105.
MAINGUENEAU, Dominique. Manuel de linguistique pour les textes
littéraires. Paris : Armand Colin (livre numérique), 2010.
Corpus
Guy de MAUPASSANT
73
Qui est Laura ? Réflexions sur le pouvoir de déformation du transfert
d’une langue à une autre
74
portraits des personnages, les sentiments qui les animent, voire même
la narration. Tel est le cas pour Les Bains de Kiraly de Jean Mattern
(2008), dont un personnage en particulier sort défiguré de la
traduction croate (Királyeve toplice, 2010) : Laura, devenue
méconnaissable, et avec elle la relation qui la lie à Gabriel, son époux
et le personnage central du roman. Nous montrerons comment la
Laura croate est dépossédée de sa personnalité et de quelles façons
opèrent les « tendances déformantes » (Berman) qui la rendent
étrangère à elle-même. Abordant cette traduction aux niveaux
microstructurel et macrostructurel, nous scruterons d’abord les choix
lexicaux et les décalages sémantiques qui en découlent. Nous
aborderons également une question le plus souvent escamotée dans
les travaux traductologiques, à savoir celle de l’aspect, qui en croate
est une catégorie verbale et morphologique, relevant de la grammaire
et du lexique, mais qui a aussi à voir avec la sémantique ainsi qu’avec
la représentation que l’énonciateur se fait du procès. La question des
choix aspectuels et des valeurs aspectuelles qui en découlent relève
des décalages interlinguistiques qu’implique la rencontre de deux
systèmes verbaux différents. Nous montrerons que, considérés au
niveau macrostructurel, l’ensemble de ces décalages contribue à
déformer les personnalités des personnages, après quoi nous
soulignerons comment le rapport affectif reliant Laura à Gabriel se
trouve du même coup faussé. Nous tenterons finalement de trouver
dans le texte en croate la réponse à la question initiale : Qui est Laura ?
Références bibliographiques
75
HURTADO ALBIR, Amparo. La Notion de fidélité en traduction. Paris : Didier
érudition, 1990.
LADMIRAL, Jean-René. Traduire : Théorème pour la traduction. Paris :
Gallimard, 1994 [1979].
LE CALVÉ, Ivičević. « Traduire l’infinitif prédicat : quand le processus traductif
éclaire la langue source ». In : Ljubičić M. (éd.). Studia Romanica et Anglica
Zagrabiensia, vol. LX, Zagreb : Facultas Philosophica Universitatis Studiorum
Zagrabiensis, 2015 : 39-54.
LE CALVÉ, Ivičević. « Traduire l’absence : la phrase elliptique du verbe dans
Istanbul de Daniel Rondeau ». In : Vinaver-Ković M./Stanojević V. (dir.), Les
études françaises aujourd'hui, Belgrade : Faculté de Philologie de l’Université
de Belgrade, 2014 : 319-330.
LE DISEZ, Jean-Yves, WINIBERT, Segers. Le bon sens en traduction. Rennes :
Presses universitaires de Rennes, 2013.
MILLIARESSI, Tatiana (éd.). De la linguistique à la traductologie : Interpréter /
traduire. Villeneuve d'Ascq : Presses universitaires du Septentrion, 2011.
POP, Mirela. « L’équivalence comme adéquation – essai de définition du
concept ». In : Buletinul Ştiinţific al Universităţii « Politehnica » din Timişoara,
vol. 1, n° 1, 2002 : 46-53.
STEINER, Georges. Après Babel. Une poétique du dire et de la traduction.
Traduction de Lucienne Lotringer. Paris : Albin Michel, 1998.
Corpus
Jean MATTERN
76
La traduction du pertexte : introduction et quelques cas particuliers
Alberto MANCO
Université « L’Orientale » de Naples, Italie
77
Nous proposons trois étapes d’analyse. D’abord, nous allons
présenter quelques exemples tirés de diverses publications italiennes :
de Topolino à Rat-Man, de L’Eternauta à Batman, pour n’en nommer
que quelques-unes. Ensuite, nous dédions une attention particulière
aux éditions françaises, italiennes et espagnoles de Maus d’Art
Spiegelman que nous repportons à l’original anglais afin de faire
remarquer que le traitement auquel les pertextes étaient soumis n’est
certainement pas uniforme. En fait, la disparité des traitements qui les
concernent surprend beaucoup.
Enfin, la comparaison de deux éditions italiennes de Maus,
proposées par de Ranieri Carano (1995) et Cristina Previtali (2010),
nous a permis de constater que le choix de ne pas traduire le pertexte
est parfois discutable, influant directement sur la réception dont la
traduction est l’intermédiaire.
Références bibliographiques
78
interpretazione, traduzione, Atti del XIII Congresso SILFI. Società
Internazionale di Linguistica e Filologia Italiana (Palermo, 22-24 settembre
2014), Franco Cesati Editore e Centro di studi filologici e linguistici siciliani,
2016b : 363-382.
PODEUR, Josiane (a cura di). Tradurre il fumetto/Traduire la bande dessinee.
Napoli : Liguori, 2012.
PODEUR, Josiane. « De Malet à Malet-Tardi en Italie: une histoire de
contraintes ». In : Podeur Josiane (dir.), Tradurre il fumetto/Traduire la bande
dessinée. Naples : Liguori, 2012 : 51-80.
WALKER, Mort. The Lexicon of Comicana. USA : Backinprint.com, 2000.
Corpus
Art SPIEGELMAN
79
Tout est loin. Problèmes de traduction d’un roman hongrois, datant du
régime communiste
MARÁDI Krisztina
Université de Debrecen, Hongrie
80
être exprimées sous forme directe, concrète ou, au contraire, de
manière allusive, codée, faisant appel à un vécu commun avec le
lecteur.
Traduire ce monde pour le montrer à des personnes qui n’en
avaient que des notions vagues et embellies – comme le régime
communiste améliorait l’image transmise à l’extérieur – représentent
une difficulté majeure. La traduction entre dans le processus
d’interculturation où « il s’agit de faire se croiser deux univers
linguistiques et culturels par la production d’un texte intermédiaire,
venu de l’un et transposé dans l’autre, intégré dans l’autre pour y
former un nouvel ensemble cohérent et pourtant lié à ses origines »
(Blanchet 2004). Pour que ce processus donne de bons résultats, il faut
tout d’abord interpréter le texte de départ, faire une identification
sociopragmatique et après reformuler l’information pertinente
extraite. L’opération nécessite une réflexion approfondie de la part du
traducteur afin d’identifier les éléments culturels directement
traduisibles, les différences traduisibles par des équivalents indirects
et celles proprement intraduisibles. Or, une approche
sociopragmatique exige une connaissance profonde de la culture
source pour éviter les mauvaises traductions dont l’œuvre choisie est
pleine et qui sont imputables surtout – comme je viens de le dire – à la
méconnaissance d’une réalité, hermétiquement fermée pour
l’extérieur et imprégnée de références socio-culturelles.
Références bibliographiques
81
KIBÉDI VARGA, Áron. « Pragmatique de la traduction ». In : Revue d’Histoire
littéraire de la France. No 3, 1997 : 428-179
KISS, Sándor. « Nyelvi rendszer és fordítás (vagy miért lehetséges a
lehetetlen?) » [Système linguistique et traduction (comment l’impossible
devient-il possible?]. In : Francia-magyar szótárak és műfordítás
[Dictionnaires franco-hongrois et traduction]. Revue d’Études Françaises. No
15, Budapest : Centre Interuniveritaires d’Etudes Françaises, 2010 : 35-43.
KONTRA, Miklós (éd.). Nyelv és társadalom a rendszerváltozáskori
Magyarországon. [Langue et société en Hongrie, à l’époque du changement
de régime]. Budapest : Osiris, 2003.
LACKFI, János. « Kettős megközelítésben a műfordításról » [Une double
approche de la traduction littéraire]. In : Francia-magyar szótárak és
műfordítás [Dictionnaires franco-hongrois et traduction]. Revue d’Études
Françaises. No15, Budapest : Centre Interuniveritaires d’Etudes Françaises,
2010 : 141-151.
MOREAU, Marie-Louise (éd.). Sociolinguistique. Concepts de base. Sprimont :
Mardaga, 1997.
MOUNIN, George. Les problèmes théoriques de la traduction. Paris :
Gallimard, 1963.
PERGNIER, Maurice. Les fondements sociolinguistiques de la traduction.
Villeneuve d'Ascq : Presses Universitaires du Septentrion, 1998.
RICŒUR, Paul. Sur la traduction. Paris : Bayard, 2004.
TATILON, Claude. « Traduction : une perspective fonctionnaliste ». In : La
Linguistique, Vol. 39, Fasc. 1., 2003 : 109-118.
Corpus
82
Vieillissement et oubli, contretemps de la (bonne) traduction (avec
Walter Benjamin et Marcel Proust)
83
son propre achèvement et celui de l’original, sa propre métamorphose
et celle de l’original, sa propre « croissance » (Benjamin 2000, I, 252)
et celle de l’original. C’est-à-dire, à la limite, elle ne cesse de solliciter
une autre traduction, ou, si l’on veut, une retraduction, qui rouvre et
réinterroge, du même coup, l’original et ses traductions, aussi bien que
« le rapport le plus intime entre les langues » (Benjamin 2000, I, 248)
qui se remettent ainsi en contact.
C’est donc en partant du contrepoint proustien que je voudrais
revenir sur la pensée de Benjamin sur la littérature et la traduction, sur
leurs « corrélations de vie », pour réfléchir plus spécialement sur la
dimension productive du vieillissement et de l’oubli, pris en tant que
contretemps critiques inhérents à toute œuvre – original ou traduction
–, et qui les vouent tous les deux – original et traduction –, de façon
nécessaire et inexorable, à l’inachèvement et à la « vie continuée »,
cela à la fois « à l’intérieur du massif forestier » (Benjamin 2000, I, 254)
de chacune des langues en jeu et dans la frontière entre elles – au
moins pour les lecteurs « qui comprennent l’original » (Benjamin 2000,
I, 244).
J’explorerai en particulier dans mon étude un élément
fondamental lorsqu’il est question, chez Proust, des rapports entre le
monde sensible, les souvenirs et la traduction de la vie que l’œuvre
aspire toujours à être pour l’écrivain, élément mis en relief par
Benjamin lui aussi dans son essai sur l’écrivain : il s’agit de l’odeur,
« refuge inaccessible de la mémoire involontaire » (Benjamin 2000, III,
337). C’est à partir de là que je proposerai une image conceptuelle qui
me permettra peut-être de spéculer sur la distinction entre la bonne
et la mauvaise traduction : celle d’une traduction odorante.
Références bibliographiques
84
BENJAMIN, Walter. Sur Proust. Traduit par Robert Kahn. Caen : Nous, 2015.
GAGNEBIN, Jeanne-Marie. « Le printemps adorable a perdu son odeur ». In :
Alea, vol.9, n.1, 2007 : 64-74.
KRISTEVA, Julia. « L’autre langue où traduire le sensible ». In : French Studies
LII (4), 1998 : 385-396. [
LAGES, Susana Kampff. Walter Benjamin : tradução e melancolia. São Paulo :
Edusp, 2002.
WEIDNER, Daniel. Traduction et survie. Walter Benjamin lit Marcel Proust :
Traduit par Guillaume Burnod et Aurélia Kalisky) Paris : Éditions de l’éclat,
2015.
Corpus
85
La traduction sans un original achevé : traduire le continu du brouillon
de Mon cœur mis à nu, de Charles Baudelaire
Thiago MATTOS
Université de São Paulo, Brésil
86
allé jusqu’à privilégier les états “intermédiaires” comme autant de
textes – fin du privilège du produit fini. C’est ainsi qu’on édite et qu’on
lit maintenant Nietzsche, et Hölderlin » (Meschonnic 1990, 172). Pour
évaluer une traduction qui n’a pas de texte source « définitif » et pour
exposer brièvement notre projet de retraduction, nous proposons la
notion de continu du brouillon, qui nous permet de penser la fidélité
dans ce cas comme une fidélité à l’inachèvement de l’« original ».
Comme on le verra, au Brésil on traduit Mon cœur mis à nu en tant que
journal intime. Pour cela, on a préparé un texte source structuré,
organisé et transcrit comme un journal. L’inachèvement y est présent,
mais de manière marginale et même non littéraire. Néanmoins, Mon
cœur mis à nu n’est pas un journal (Ruff 1968 ; Didier 1973 ; Pichois
1983 et 2001 ; Guyaux 2011), mais un projet littéraire, une œuvre à
venir. D’après Meschonnic, en traduisant le continu, on traduit le
rythme, c’est-à-dire le mode d’organisation du discours. Ce que le
langage fait. Or, en traduisant Mon cœur mis à nu à partir de ses
variables, à partir de son brouillon, on peut traduire le continu de cette
écriture, la manière dont on organise et on met en mouvement le
continu du brouillon. À cet égard, on traduit le manuscrit, sa dimension
matérielle, son processus, ses tensions, la dispersion, la sélection et la
mise en séquence des fragments, les ratures, les décisions des éditeurs
par rapport au manuscrit, à la marge brouillée entre l’achevé et
l’inachevé. Comme dirait Duchet, « le bourgeonnement, le parasitage,
le bruit, les lacunes, le chaos d’un work in progress dans le tissu
textuel » (1985, 245).
Références bibliographiques
87
MESCHONNIC, Henri. « L’écriture, le rythme et le langage ordinaire ». Protée
– théories et pratiques sémiologiques. Université du Québec à Chicoutimi, vol.
18, no.1, 1990 : 7-11.
MESCHONNIC, Henri. Poétique du traduire. Paris : Verdier, 1999.
MESCHONNIC, Henri. La rime et la vie. Paris : Gallimard, 2006 [1989].
NEEFS, Jacques. « Marges ». In : HAY, Louis et al., De la lettre au livre :
sémiotique des manuscrits littéraires. Paris: Éditions du CNRS, 1989 : 57-88.
PICHOIS, Claude. « Notice ». In : BAUDELAIRE, Charles, Œuvres complètes.
Paris : Gallimard, 1983.
PICHOIS, Claude. « Introduction ». In BAUDELAIRE, Charles. Mon cœur mis à
nu. Édition diplomatique établie par Claude Pichois. Genève : Librairie Droz,
2001.
RUFF, Marcel. « L’intégrale ». In : BAUDELAIRE, Charles. Œuvres de
Baudelaire. Paris : Seuil, 1968.
ZULAR, Roberto, PINO, Claudia Amigo. Escrever sobre escrever. São Paulo :
Martins Fontes, 2007.
Corpus d’analyse
Charles BAUDELAIRE
88
Bien traduire pour séduire. Organisation textuelle et problèmes de
traduction dans Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos
Andrea NAGY
Université de Debrecen, Hongrie
89
méso-textuel que nous nous intéresserons dans cette communication,
convaincue avec Bakhtine que « [l]orsque nous choisissons un type
donné de proposition, nous ne choisissons pas seulement une
proposition donnée ; en fonction de ce que nous voulons exprimer à
l'aide de cette proposition, nous sélectionnons un type de proposition
en fonction du tout de l'énoncé fini qui se présente à notre imagination
verbale et qui détermine notre opinion ». (1984, 288). Notre corpus
inclut le texte original français et deux traductions des Liaisons
dangereuses : la traduction italienne réalisée par Maria Teresa Nessi
en 1977 (édition Garzanti, Milan) et la traduction hongroise faite par
István Örkény en 1965 (édition Helikon, Budapest). Ces deux
traductions, quoique réalisées à peu de distance temporelle l’une de
l’autre, présentent des divergences considérables quant à la
traduction des figures méso-textuelles : alors que la traduction
italienne respecte la structure séquentielle du texte original français,
la traduction hongroise s’en détache en la décomposant et en
réorganisant les propositions qui la constituent, ce qui ne laisse pas
intact le message véhiculé. En effet, nos analyses comparées de lettres
choisies montreront que le non-respect de la structure des séquences
méso-textuelles françaises fait perdre, dans la traduction hongroise,
des contenus affectifs latents, et affaiblit la tension cachée entre le
contenu sémantique de la séquence (amour, souffrance) et le sens
suggéré de sa structure (pure séduction, conquête).
Références bibliographiques
90
KÁROLY, Krisztina. Szövegtan és fordítás [Linguistique textuelle et
traductologie]. Budapest : Akadémiai Kiadó, 2007.
KLAUDY, Kinga. Bevezetés a fordítás elméletébe [Introduction à la théorie de
la traductologie]. Budapest : Scholastica, 2009.
PETŐFI, János S. « La textologie sémiotique et la méthodologie de la
recherche linguistique ». In : Fondements de la recherche linguistique :
perspectives épistémologiques, Cahiers de l’ILSL no 6. Lausanne : Université
de Lausanne, 1995.
PETŐFI, János S. A szöveg mint komplex jel. Bevezetés a szemiotikai-
textológiai szövegszemléletbe [Le texte comme signe complexe. Introduction
à l’approche textuelle en textologie sémiotique]. Budapest : Akadémiai Kiadó,
2004.
TATILON, Claude. « Traduction : une perspective fonctionnaliste ». In : La
Linguistique, Vol. 39, Fasc. 1, 2003 : 109-118.
TOLCSVAI NAGY, Gábor. A magyar nyelv szövegtana [Grammaire textuelle de
la langue hongroise]. Budapest : Nemzeti Tankönyvkiadó, 2001.
Corpus
91
Une traduction, deux antidotes : les contrefaçons du psautier de
Genève
Vanessa OBERLIESSEN
Paris-Sorbonne, France
92
bibliques en français, et il ne peut pas être tout à fait sincère de la part
de Désiré qui propose lui-même une traduction de certains passages.
L’identification ou non des paraphrases versifiées en français avec le
texte biblique qu’elles imitent est toutefois une question majeure pour
la théorie de la traduction de l’époque, un problème qui ne s’arrête
d’ailleurs pas aux frontières confessionnelles.
2) Le traducteur comme hérésiarque
Désiré, tout comme I.D.D.C., s’attaque à des traductions qu’il juge
« mauvaises » – Désiré à celle de Marot, son adversaire protestant à
celle de Désiré. Ce jugement est, du moins en apparence, basé sur des
critères exégétiques : les « chansons » incriminées sont dangereuses
parce qu’elles traduisent les sensibilités hérétiques de leurs auteurs.
Artus Désiré va particulièrement loin dans son analyse de Marot en
proposant une liste des « erreurs » du Quercinois : il s’agit
essentiellement d’une liste de vers qui laissent deviner des idées
« hérétiques », et non de critiques philologiques, même si les deux
disciplines sont indissociables au XVIe siècle. Désiré assimile Marot à
plusieurs traditions (luthérienne, calviniste, etc.) qu’il distingue
correctement. En effet, il fait l’étalage de son expertise dans le
domaine pour mieux « classer » son adversaire dans la foule des
courants hérétiques qui affligent la chrétienté depuis ses débuts. Sa
définition d’une traduction « fausse » ressemble ainsi à celle de la
faculté de théologie de la Sorbonne pour qui associer une publication
à une erreur doctrinale connue revient à la disqualifier.
3) Contre le poison des mots
Il ne faut toutefois pas accorder trop d’importance au programme
« anti-traduction » d’Artus Désiré, ni d’ailleurs aux déclarations
d’intention de son adversaire qui proclame comme lui qu’il ne se
permettrait pas de se faire l’émule de Marot. En effet, de nombreux
passages de son recueil représentent des tentatives de traduction à
part entière, intercalées entre des strophes de polémique religieuse.
C’est grâce à ces passages que l’on peut deviner des éléments d’une
théorie de la traduction concrète que les pièces liminaires, quoique
nombreuses, ne précisent pas. C’est notamment la question de la
source qui est au centre des intérêts divergents de Désiré et d’I.D.D.C.,
puisque Désiré traduit spontanément des formules du latin de la
Vulgate tandis que Marot et I.D.D.C. prennent appui sur les traductions
de Louis Budé et de la Bible de Genève. Si une traduction est
93
poisonneuse, c’est donc parce qu’elle découle d’une source
empoisonnée. En plus du texte, il sera nécessaire de s’intéresser aux
pièces liminaires car Artus Désiré et I.D.D.C parodient non seulement
les psaumes de Marot mais aussi leur dédicace, leur préface et les
entêtes qui proposent un résumé, une interprétation et un usage
possible pour chaque psaume.
Références bibliographiques
Corpus
94
bon[n]nes doctrines &sente[n]ces preservatives d'heresie, tant pour les sains,
que pour les malades... Par Artus Desiré. Paris : Pierre Gaultier, 1560, réed.
en 1561, 1562 et 1567.
MAROT, Clément. Pseaumes Octantetrois de David, mis en rime Françoise.
Genève : Jean Crespin, 1551 (avec Théodore de Bèze).
MONTMÉJA, Bernard de. Réponse aux calomnies, s.l. [Orléans], 1563, f. f3 v.
95
La mise à mort (1965) de Louis Aragon dans l’Espagne franquiste : un
cas de trahison et de « mauvaise » traduction ?
96
D’une part, nous analyserons brièvement les suppressions
faites par la censure officielle et, d’autre part, nous regarderons de
près le niveau microtextuel du livre et les stratégies de traduction
suivies par le traducteur. Nous constaterons que le traducteur a fait
plusieurs calques de la langue française, ainsi que des suppressions,
des mauvaises traductions résultant de phrases mal comprises, etc.
Cette traduction est-elle plutôt au service de l’étranger, ou au service
du lecteur d’arrivée ? Dans ce cas, nous verrons que les deux choix
dans une même traduction sont possibles et que cela peut
éventuellement s’exposer à une « mauvaise » traduction. En effet, le
traducteur est au service de l’étranger lorsque, dans certains passages,
il reste trop attaché à l’original, provoquant des faux sens, tandis que
dans d’autres passages c’est le censeur et le traducteur lui-même qui
suppriment et autocensurent des passages pour être plutôt au service
du lecteur d’arrivée. De fait, l’idéologie du traducteur peut être une
barrière lorsqu’il interprète et réécrit des textes, surtout quand ces
derniers ont des objectifs politiques ou idéologiques contraires aux
idées du traducteur ou du gouvernement. Ceci peut avoir des
conséquences assez graves, puisque la traduction a la capacité de
manipuler les discours sans que le public récepteur en soit conscient.
Si dans le processus de réécriture d’une œuvre les éléments
idéologiques qui définissent l’auteur original disparaissent ou se
transforment, l’image transmise dans la traduction ne correspond pas
à la réalité du contexte source. Par conséquent, une partie importante
du contenu se perd de manière irrémédiable pour les lecteurs du texte
cible.
Pour vérifier si l’œuvre de cet auteur dit « suversif » a
effectivement joui d’une bonne critique en Espagn et en dépit d’une
traduction contestée, nous analyserons également les critiques
littéraires de cette œuvre publiées dans le journal espagnol ABC, l’un
des journaux conservateurs les plus connu de l’époque, ainsi que dans
Triunfo, l’une des revues culturelles de gauche les plus importantes des
années ‘60 et ‘70. On pourrait donc considérer la réception comme un
passage clé pour l’acceptation des œuvres traduites : même si dans ce
cas la traduction n’est pas un reflet fidèle de l’original, elle permet
quand même de faire découvrir l’auteur et l’œuvre en Espagne. Dans
ce cas, la traduction devrait donc se présenter comme un processus de
découverte : la découverte de l’étrange, de la différence dans le texte
97
source, et la découverte des possibilités qui comporte l’auto réflexion :
« de cette manière, ce n’est pas seulement le traducteur qui crée le
texte traduit mais aussi la traduction qui crée le traducteur, car il n’y a
pas d’acte de traduction qui laisse les parties impliquées indemnes »
(Vidal 2007).
Références bibliographiques
Corpus
Louis ARAGON
La Mise à mort. Paris: Gallimard, Coll. « Blance », 1965.
Tiempo de morir. Maison d'édition Lumen. Traduction d'Oriol Durán, 1969.
98
Les traductions brésiliennes des écrivains-traducteurs
Germana PEREIRA
Université de Brasília, Brésil
99
étant donné l’époque historique et les moyens à disposition des
traducteurs. La collection a été entièrement revisée et notée par Globo
et relancée entre 2006 et 2012 ayant pour titre « Proust définitif ».
Qu’est-ce qui établit le caractère définitif de l’œuvre ? Ses traducteurs,
des poètes reputés dans les lettres brésiliennes et à l’étranger ? La
qualité de leurs traductions ? Le travail de révision et, parfois, de
retraduction se réalise dans la nouvelle édition ? Voilà autant de
questions auxquelles nous essayerons de traiter à défaut d’y répondre.
Références bibliographiques
100
RÓNAI, Paulo. Escola de tradutores. 5 ed. rev. ampl. Rio de Janeiro : Nova
Fronteira, 1987.
Corpus
Marcel PROUST
101
Une mauvaise traduction littéraire ?
ou
Le rêve de la poésie du Tout Monde
102
traduction d’un poème de Pablo Neruda (« La isla », dans Glissant
2010, 38) et pour le portugais brésilien, sa traduction d’une chanson
populaire, intitulée « De la boue au chaos » (v. Glissant 2010, 222).
La connaissance des littératures étrangères par des traductions
et le manque de familiarité proprement linguistique avec la langue
portugaise (dans sa double face américaine et européenne) et à la
limite même avec l’espagnol (du point de vue sémantique et
syntaxique) empêchent sans doute Glissant d’appréhender l’une des
caractéristiques les plus importantes des littératures hispaniques (par-
là, nous voulons dire les littératures de langue portugaise et espagnole
en Europe et dans les Amériques), à savoir, la profonde innutrition, et
ce depuis la Renaissance, de l’oralité traditionnelle telle qu’elle existe
grâce au romancero, cet étonnant ensemble de courts poèmes
nommés « romances » d’origine médiévale et qui témoignent du
temps de la longue durée. En d’autres mots: le poète martiniquais
passe malheureusement à côté de quelque chose qui aurait dû le
passionner.
Pour ce qui est des textes qui résistent à tout effort de
traduction, malgré leur simplicité aberrante, l’exemple d’un quatrain
du poète moderniste brésilien Manuel Bandeira pourrait servir comme
point de départ d’une réflexion sur la réécriture littéraire de l’oralité
traditionnelle, l’une des voies de la création poétique contemporaine.
Références bibliographiques
103
GLISSANT, Édouard. La terre le feu l’eau et les vents. Une anthologie du Tout-
Monde. Paris : Galaade, 2010.
HELDER, Heberto. « O Bebedor noturno : poemas mudados para o
português ». In : Poesia toda, 1996 : 159-241.
PAZ, Octavio. Cuadrivio. México : Joaquín Mortiz, 1965.
PESTRE de ALMEIDA, Lilian. « Traduire Césaire, entre l’oral et l’écrit, d’un
langage à un autre ou de la traductibilité entre deux langues sœurs et deux
cultures métissées ». In : Présence Africaine, n° 189, Césaire 2013: parole due.
Colloque de Cérisy, décembre 2014 : 195-210.
PESTRE de ALMEIDA, Lilian. Aimé Césaire hors frontières. Poétique,
intertextualité et littérature comparée. Würzburg, K/N, 2015.
PESTRE de ALMEIDA. Lilian. Mémoire et métamorphose. Aimé Césaire entre
l’oral et l’écrit. Königshausen & Neumann, 2010.
PESTRE de ALMEIDA, Lilian. « Habiter Babel ou traduisant l’œuvre de
Césaire ». In : Césaire, Arnold, 2013 : 1653-1670.
SMITH, Annette. « Traduire Césaire ou l'R/aire/erre de "rôdeuse" ». In : Aimé
Césaire ou l'athanor d'un alchimiste. Paris : Ed. Caribéennes et ACCT, 1987 :
145-156.
104
De quelle manière la traduction pensante nous aide-t-elle à traduire la
littérature?
Nino PIRTSKHALAVA
Université d’État Ilia, Géorgie
105
Plus tard la chose deviendra primordiale pour Martin
Heidegger. Dans son célèbre recueil de l’après-guerre « Holzwege »
(Chemins qui ne mènent nulle part, 1950), dans la partie dénommée
« La parole d’Anaximandre » il affirme que lorsque nous traduisons
d’une langue à une autre en tout premier lieu il faut faire attention à
la chose, la matière (die Sache). « Or la chose ici en cause, c’est l’affaire
de la pensée (die Sache des Denkens). Sans donc négliger aucunement
la langue mise au point par la philologie, il nous faut, lors de la
traduction, penser d’abord en direction de la chose ici pensée. »
Heidegger insiste que seulement la traduction pensante (das
denkende Übersetzen) qui signifie un saut par-dessus un fossé (Sprung
über einen Graben) permet d’être fidèle à la chose du texte original.
L’analyse comparée des différentes versions des traductions
(géorgienne, française, anglaise, russe) de La Montagne magique (Der
Zauberberg) de Thomas Mann témoigne que fignoler
philologiquement la langue de traduction n’est pas suffisant. Une
langue impeccable au sens strictement philologique de la traduction
de ce roman n’est pas toujours capable de transmettre l’enjeu, le fait
de l’original. En ce compromis, la « chose » reste parfois
intraduisible et le véritable contexte philosophique, historique,
culturel se perd.
Dans cette optique, il est édifiant de prendre en compte
certains éléments composites en tant que mots-clés, par exemple :
« Sorgenkind » et « Siebenschläfer » dans l’œuvre de Thomas Mann
qui gagne la fonction d’un symbole universel dans le roman.
En parlant du fond mythique de La Montagne magique, il faut
attirer l’attention sur la légende paléochrétienne des Sept Dormants
d’Éphèse (Siebenschläfer-Legende) qui semble commun aux chrétiens
et aux musulmans. Il est à noter que nous ne pouvons trouver aucune
trace de cette légende dans les nombreuses traductions du roman.
Dans les versions géorgienne, russe, française et anglaise du roman, la
relation à la légende est pratiquement perdue en raison de la
transmission du mot original « Siebenschläfer » à travers diverses
formes linguistiques (en géorgien, nous avons ძილისგუდა
[dzilisguda], en russe « спящий летаргическим сном » et
« сонливец », en français « le dormeur » et « notre dormeur », en
anglais « our sleeper »).
106
Le problème est que le terme « Siebenschläfer » qui était
initialement lié uniquement à la légende des Sept Dormants d'Éphèse
et ne serait utilisé qu'au pluriel, désignant ainsi le nombre des jeune
gens dormants, acquis progressivement toute une gamme de
significations. En conséquence, dans l'allemand moderne, ce mot est
plutôt utilisé au singulier qu'en pluriel. Précisément pour
l'identification du contexte culturel des changements dans la
signification de ce terme, il faut tenir compte des données historiques
des langues (par exemple alléguées dans le « Deutsches Wörterbuch »
par l'un des plus brillants lexicographes européens, l’une des figures
les plus marquantes de l’histoire de la linguistique allemande Hermann
Paul).
En outre, l’analyse de la fonction de différents mythes,
légendes, symboles ou métaphores platoniciennes qui a eu une
influence exceptionnelle sur le travail poétique et philosophique des
artistes et penseurs occidentaux du XXe siècle, comme Thomas Mann
et Martin Heidegger, nous permet d'acquérir une perspective
totalement nouvelle de la littérature et de la philosophie moderne.
Le motif du « souci » pourrait servir d’exemple précis pour
l’illustration de l’histoire de l’accueil de la Cura Fable dans la littérature
et la philosophie européennes.
En conséquence l’examen du phénomène de l’anxiété comme
d’une figure mythologique profondément symbolique a une longue
tradition dans la poésie et remonte à l’antiquité. Goethe s’est
familiarisé avec la Cura Fable du poète latin Hyginus par l’adaptation
de cette fable par Herder dans son poème « L’enfant de l’angoisse »
(Das Kind der Sorge) et l’a utilisé dans son « Faust », devenant ainsi
l’une des principales sources d’influence pour les conceptions de
Heidegger et Thomas Mann.
Il s’agit ainsi du « Sorgenkind des Lebens » en tant que le
modèle cohérent pour l'illustration de l’histoire de la réception de la
Cura Fable et de l’accueil du motif du « souci » (Sorge). Il est à noter
que nous ne trouverons aucune trace de cette fable dans les
différentes traductions : en géorgien, nous avons ძნელად
აღსაზრდელი ბავშვი [dznelad aghsazrdeli bavshvi] ; en russe
« трудное дитя жизни » ; en français « l’enfant gâté de la vie » ; en
anglais « delicate children of life » ou « life’s delicate child ».
107
En l’occurrence pour chaque autre langue la capacité
d’expression est délimitée. L’expression porteuse de mythe vivant
dans son sein dans une autre langue va apparaître mort-née. Le
traducteur devient un certain accoucheur, le maïeuticien malchanceux
et la traduction même en tant qu’une sage-femme échouée se brise
contre l’impuissance d’éviter la mortinaissance de l’essence mythique
ou de « chose » inhérent à ces composites allemands. Par conséquent
au cours de la traduction se volatilisent trois quarts des choses qui dans
la formulation de Thomas Mann jouent un rôle crucial. C’est pour avoir
amputé le texte d’origine de sa substance, que la non-traduction de
ces mots-clés réduit le texte cible à un pâle reflet de l’original.
Références bibliographiques
108
Retraductions, révisions. Les mauvaises traductions du théâtre
québécois en Italie
Fabio REGATTIN
Université de Bologne, Italie
1
L’hypothèse de la retraduction a été souvent mise en discussion (voir par exemple
Collombat 2004, Koskinen et Paloposki 2010, Monti 2011). Elle garde quand même
sa validité au moins du point de vue des croyances du public (comme le démontre le
prestige associé en général à une « nouvelle traduction », voir encore Monti 2011)
et lorsque l’on a affaire à ces retraductions qu’Anthony Pym définit « actives » (1998,
82), à savoir celles qui, partageant virtuellement la même collocation culturelle de
leur(s) antécédent(s), doivent avoir été conçues en opposition explicite à ces
derniers.
109
en réduisant l’« orthonymie »2 des traductions précédentes (ce qui
n’est pas sans rappeler l’hypothèse de la retraduction).
Les différences entre une traduction et une retraduction, entre
une traduction et sa version révisée semblent donc pouvoir dessiner,
en creux, les lieux textuels considérés comme insatisfaisants : des lieux
où une traduction est considérée, par quelqu’un au moins, à un
moment donné au moins, comme « mauvaise ».
Notre analyse portera sur quelques pièces québécoises
traduites en italien. Ces dernières ne sont pas très nombreuses : des
études récentes (Paré 2009, Regattin 2014, De Vaucher-Minelle 2003-
2016) en répertorient moins d’une centaine. Bien que l’importation de
la dramaturgie québécoise soit, de plus, très récente – on peut la faire
remonter à la fin des années 1980 – il existe déjà quelques cas de
retraduction et de révision, qui pourraient fournir des pistes
intéressantes pour l’étude du concept de « mauvaise traduction » au
théâtre. Selon plusieurs sources en ligne, le texte-phare de la
dramaturgie québécoise, Les Belles-sœurs de Michel Tremblay, a été
retraduit non moins de cinq fois après la parution de la première
version italienne (Le Cognate, 1994 ; traduit par Francesca Moccagatta
et Jean-René Lemoine). De même, trois pièces de Michel-Marc
Bouchard (Les Feluettes, Le Voyage du couronnement, Le Chemin des
passes dangereuses), traduites par Francesca Moccagatta, ont été
publiées en Italie à deux reprises : une première fois en 1993, 1995 et
2000 dans des revues, et une deuxième fois, en 2003, dans un recueil
publié par Ubulibri. Avant la deuxième publication, la traductrice a revu
chacun de ces textes, en y intégrant de nombreux changements au
niveau textuel et paratextuel.
Par une analyse systématique des textes, nous verrons si notre
corpus permet de confirmer l’hypothèse de la retraduction (sous sa
forme première ou bien sous celle de Chevalier et Delport) ou si, au
théâtre, d’autres impératifs l’emportent (comme semble le suggérer,
par exemple, Aaltonen 2003).
2
« La conviction que, dans tous les cas, il y a une façon "droite", "directe", moins
"travaillée", de dire le monde, ses choses et ses événements. Une façon plus que
toutes les autres déliée de celui qui y recourt, plus "objective" donc » (Chevalier et
Delport 1995, 9). Cette conviction se doublerait, selon Chevalier et Delport, de la
tendance inconsciente des traducteurs à l’usage de ces formulations.
110
Références bibliographiques
Corpus
BOUCHARD, Michel-Marc
111
« Il viaggio dell’incoronazione ». Traduction de Francesca Moccagatta. In :
Intercity Plays, n. 1, 1995: 85-100.
« Il viaggio dell’incoronazione ». Traduction de Francesca Moccagatta in
Michel-Marc Bouchard, Teatro. Milano : Ubulibri, 2003 53-95.
Le Chemin des passes dangereuses, Montreuil, Éditions Théâtrales, 1998.
« Il cammino dei passi pericolosi ». Traduction de Francesca Moccagatta. In :
Intercity Plays, n. 4, 2000 : 259-270.
« Il sentiero dei passi pericolosi ». Traduction de Francesca Moccagatta. in
Michel-Marc Bouchard, Teatro. Milano : Ubulibri, 2003.
TREMBLAY, Michel
112
Les traductions françaises des romans policiers de Tony Hillerman : de
l’ethnocentrisme à la « translatio exotique »
Romain RICHARD-BATTESTI
Université de Corse Pasquale Paoli, France
113
traductologique que nous proposons d’appeler « translatio exotique »
implique tout d’abord une prise en considération des spécificités du
texte source. Dans la sphère française, les romans de Tony Hillerman
font partie du genre policier ethnologique, une littérature fondée sur
les cultures dites archaïques (indiens navajos chez Tony Hillerman,
aborigènes australiens chez Arthur Upfield), qui évoque
l’interculturalité et plus largement la question du métissage. Nous
proposons d’y ajouter le concept d'exotisme tel qu’il est défini par
Victor Segalen. Le récit et l’intrigue reposent avant tout sur la
réappropriation et la réactualisation de procédés archaïques comme
l’observation des traces ou la chasse, ce sont les fondements mêmes
de l’enquête policière qui sont ainsi interrogés. Il en va de même pour
ce qui relève de la traduction de ces intrigues. Danièle et Pierre Bondil
assurent une transmission et une compréhension optimales au lecteur
français, ils exploitent ainsi une fonction exégétique en acceptant
parfois de ne pas traduire, en ayant recours à des procédés considérés
comme des faiblesses du traducteur. La traduction de ces intrigues
policières n’est plus seulement une opération de passage d’une langue
A vers une langue B, elle est un transfert, elle est une translatio.
Les clivages traditionnels tels que « traduction
littéraire/traduction littérale » se dissipent dans le cas des traductions
françaises des œuvres de Tony Hillerman, et cela ouvre la voie à de
nouvelles réflexions qui permettront de repenser les critères d’une
mauvaise traduction. Par ailleurs, certains concepts traductologiques
fondés sur l’inter-échange et la conciliation du même et de l’autre,
comme l’ouvertude (v. Cordonnier 1995), se réalisent peut-être dans
les traductions françaises des romans policiers de Tony Hillerman avec
la « translatio exotique ».
Références bibliographiques
114
ECO, Umberto. Dire presque la même chose. Traduit de l’italien par Myriem
Bouzaher. Paris : Grasset, Coll. biblio essais, 2003.
ECO, Umberto. Du superman au surhomme. Traduit de l’italien par Myriem
Bouzaher. Paris : Grasset, Coll. biblio essais, 1993.
ELEFANTE, Chiara. « La note du traducteur : un enjeu complexe pour le
traducteur et l’éditeur ». In : Magdalena Nowotna et Amir Moghani (dir.), Les
Traces du Traducteur. Paris : INALCO-CERLOM, 2009 : 91-109.
GINZBURG, Carlo. Mythes, emblèmes, traces. Paris : Flammarion, 1984.
LAPLANTINE, François, NOUSS Alexis. Le métissage. Paris : Téraèdre, Coll. Ré,
2011.
REUTER, Yves. Le roman policier. Paris : Armand Colin, 2009.
SEGALEN, Victor. Essai sur l’exotisme. Paris : LGF, 1986.
TODOROV, Tzvetan. Poétique de la prose. Paris : Seuil, 1980 : 9-19.
Corpus
Tony HILLERMAN
115
Traduction et retraduction d’Ulysse : le portrait du même en autre
Romain RIVAUX
Florida Atlantic University, États-Unis
116
Cette intervention au sein du processus de traduction fut pour Joyce
une opportunité d’aller parfois au-delà de l’original, d’explorer de
nouvelles limites, de littéralement recomposer le texte, à l’instar de
cette requête auprès de Monnier (au sujet de la traduction du
fragment de « Pénélope ») de supprimer non seulement la
ponctuation, comme cela avait été fait pour le texte anglais, mais aussi
les accents sur les lettres et les apostrophes. Nous tenterons ainsi
d’éplucher un maximum de correspondances et de notes de révision
du texte traduit – de tels documents étant disponibles au Ransom
Center de University of Texas, Austin – pour comprendre la mesure
dans laquelle l’Ulysse de 1929 n’est pas tant une traduction
relativement « mauvaise » qu’une œuvre de prolongement tendant à
tenir lieu de l’original. Rappelons effectivement que le texte original
fut censuré en Angleterre et aux États-Unis dès 1922 et ne vit jour,
initialement, qu’en France, sa terre première de réception.
Enfin, et c’est particulièrement le cas chez Joyce, une
« mauvaise » traduction peut aussi se définir par son incapacité à
restituer le plus grand nombre d’intertextes. Roman moderniste par
excellence, Ulysse se voulait le réceptacle des savoirs universels,
comme si Joyce avait voulu y réunir la plus grande des bibliothèques
du monde. Le skopos du texte d’Ulysse était donc précisément cet
universalisme culturel et linguistique qui était en train de germer et qui
encapsulait déjà Finnegans Wake. Ainsi, dans un troisième temps, nous
nous livrerons à un véritable jeu de piste pour déterminer en quels
points l’Ulysse de 2004, bénéficiant de près d’un siècle de distance, a
pu mieux saisir la complexité de l’œuvre en faisant coexister les
myriades d’intertextes déjà en contact dans le texte source de 1922.
Ce sera donc par la capacité du texte traduit à rester à la fois pluriel et
illisible – c’est-à-dire à privilégier ce que Lambert et van Gorp appellent
le contexte systémique – signature essentielle du grand moment
joycien, que nous nous permettrons de formuler l’ultime critère de
distinction en matière de « bonne » ou « mauvaise » traduction, chez
Joyce.
Références bibliographiques
117
DERRIDA, Jacques. Ulysse gramophone. Paris : Galilée, 1987.
DERRIDA, Jacques. Qu’est-ce qu’une traduction « relevante ». Paris : Carnets
de l’Herne, 2005.
LAMBERT, José, VAN GORP Hendrijk. « On describing translations ». In :
LAMBERT, José, DELABASTITA, Dirk, D’HULST, Lieven, MEYLAERTS, Reine
(éd.), Functional Approaches to Translation and Culture : Selected Papers by
José Lambert. Amsterdam/Philadelphie : John Benjamins, 2006 : 37-47.
POUND, Ezra. Literary Essays, éd. T. S. Eliot. New York/London : New
Directions, 1968.
***Pound/Joyce : The Letters of Ezra Pound to James Joyce, with Pound’s
Essays on Joyce. New York/London : New Directions, 1970.
VERMEER, Hans J. « Skopos and commission in translational action ». In : L.
Venuti (éd.), The Translation Studies Reader. New York : Routledge, 2012 :
191-202.
Corpus
James JOYCE
Letters I, éd. Stuart Gilbert. New York : The Viking Press, 1966.
Letters II, éd. Richard Ellmann. New York : The Viking Press, 1966.
Letters III, éd. Richard Ellmann. New York : The Viking Press, 1966.
Selected Letters, éd. Richard Ellmann. Londres : Faber & Faber, 1975.
Series I. James Joyce Writings and Correspondence, 1899-1958 Ulysses
(1922), Translated into French by A. Morel, page proofs with corrections by
Stuart Gilbert, 1928, Harry Ransom Center, The University of Texas at Austin,
Collection 1899-1968.
Ulysses, éd. Hans Walter Gabler. New York : Vintage Books, 1986.
Œuvres II, éd. établie par J. Aubert avec la collaboration de M. Cusin, D.
Ferrer, J. M. Rabaté, A. Topia et M. D. Vors, Traduction d’Ulysse par A. Morel
assisté de S. Gilbert, entièrement révisée par V. Larbaud et l’auteur. Paris :
Gallimard, coll. Pléiade, 1995.
Ulysse, traduction dirigée par J. Aubert. Paris : Gallimard, 2004.
118
Quand y a-t-il mauvaise traduction ?
Serge ROLET
Université de Lille, France
119
(cf. Meschonnic) qui se fait sentir. On peut penser que la question
« Qui traduit ? », dans ce cas, se pose : les traductions des romans de
guerre soviétiques sont réalisées par ce qu’on pourrait appeler des
traducteurs organiques (comme il y a des « intellectuels organiques »),
liés aux Partis communistes. Ce profil spécial, de même que le
processus de traduction lui-même (en URSS, la traduction est confiée
à deux personnes, la première est locuteur natif de la langue source,
l’autre de la langue cible) n’est pas sans effet sur la qualité, souvent
faible, des traductions.
Références bibliographiques
120
Étude de la trahison dans la traduction des redoublements du turc en
français
Ilhami SIGIRCI
Université Kırıkkale, Turquie
121
des redoublements qui demeurent parfois intraduisibles et, de la sorte,
contraignent le traducteur à trahir le sens dans la langue cible. D’où
provient la mauvaise traduction la plupart du temps.
Appartenant à la famille des langues ouralo-altaïques, ayant
plusieurs niveaux d’expression et riche en connotation, le turc est une
langue agglutinante basée sur le fonctionnement des suffixes et
dispose d’un support culturel fort différent de celui du français. Par
conséquent, en turc, l’emploi, la construction et la fonction des
redoublements sont très différents de ceux du français. En turc, ils sont
utilisés fréquemment et remplissent des fonctions diverses, suivant le
contexte dans lequel ils figurent. Dans notre corpus, ils assument une
grande fonction dans la construction du sens de l’énoncé. Pour cette
raison, afin de contextualiser notre aproche, nous présentons leur
fonctions en turc. Ensuite, nous allons voir comment les
redoublements ont pu être traduits et examiner les trahisons faites par
le traducteur. Nous nous intéressons donc aussi bien à la stratégie
traductive qu’aux difficultés qui ont causé la mauvaise traduction. Car
le texte littéraire est avant tout un texte condensé, riche en
significations, se donnant à des interprétations multiples qu’un texte
cible prendra en considération sans traduire l’une d’elle. Or, en ce qui
concerne les redoublements, notre texte cible ne contient pas les
mêmes éléments culturels et multisémantiques que le texte source. Il
s’ensuit que le traducteur ne se soumet pas au jeu des forces des
signifiants du texte source, ce qui le pousse à ne pas chercher
l’équivalent en langue d’arrivée, mais à ne traduire que le sens général
de l’énoncé de manière à ce qu’ils soient entendus par le lecteur de la
langue cible.
Références bibliographiques
122
HATIBOĞLU, Vecihe. Türk Dilinde İkileme [Redoublements en turc]. Ankara :
Türk Dil Kurumu Yayınları, 1981.
LADMIRAL, Jean-René. Traduire: Théorèmes pour la traduction. Paris :
Éditions Gallimard, 1994 [1979].
LEDERER, Marianne. Quelques considérations théoriques sur les limites du
traduisible. Forum Vol.3, n. 2. Paris : Presses de la Sorbonne, 2004.
MESCHONNIC, Henri. Poétique du traduire. Paris : Verdier, 1999.
MOUNIN, Georges. Les belles infidèles. Villeneuve d’Ascq : Presses
Universitaires du Septentrion, 1994.
OSEKI-DEPRÉ, Inês. Theories et pratiques de la traduction litteraire. Paris :
Armand Colin, 1999.
STEINER, Georges. Après Babel, Une poétique du dire et de la traduction,
(trad. de l´anglais par Lucienne Lotringer). Paris : Albin Michel, 1978.
TATILLON, Claude. Sonorité et textes poétiques. Montréal : Didier, 1976.
Corpus
Orhan KEMAL
123
L'Évaluation dans la traduction littéraire: le point de vue d’un
herméneute
Bernd STEFANINK
Université de Bielefeld, Allemagne
1
« Hermeneutik lässt sich geradezu als die Kunst definieren, Gesagtes und
geschriebenes erneut zum sprechen zu bringen. Was das für eine Kunst ist, können
124
réclamant de la rhétorique aristotélicienne, aux termes de laquelle
l’oralité était toujours sous-jacente au texte écrit, Gadamer (1990,
387) décrit la tâche de la traductrice comme devant restituer « parole
et sens » aux signes du texte écrit. « Alles Schriftliche bedarf der
Rückverwandlung der Zeichen in Rede und Sinn ». Les signes
linguistiques du texte à traduire doivent être « réanimés » pour ainsi
dire, devenir chair et os. Si la traductrice n’y parvient pas, sa traduction
est mauvaise. Cette réanimation nécessite des techniques
d’interprétation et d’explicitation du sens pareilles à celles que nous
les fournit l’approche herméneutique ; elle est impossible si l’on s’en
tient aux termes des théories « objectivistes » dans le sillage d’Otto
Kade et de l’école de Leipzig. Pour Larbaud (1997, 65), traduire, c’est
rendre « Un son, une couleur, un mouvement, une atmosphère ». Est
par conséquent mauvaise toute traduction qui rate cet objectif.
Après un bref aperçu des réponses apportées par les
différentes approches théoriques à la question qui fait l’objet de ce
colloque, nous montrerons à l’aide d’exemples tirés de notre corpus
d’herméneutique traductive comment cette reconversion du texte
écrit en parole vivante peut se faire et comment l’approche
herméneutique fournit des critères scientifiques clairs permettant de
juger de la qualité d’une traduction. De même nous montrerons que
ces critères trouvent leur confirmation dans les recherches récentes
en sciences cognitives. En un troisième temps, nous donnerons des
exemples, tirés de notre corpus d’herméneutique traductive, illustrant
la thèse heideggerienne que ce sont les mots qui viennent au sens2 et
les retombées didactiques de cette thèse dans la formation à la
« bonne traduction ».
Références bibliographiques
wir von der Rhetorik lernen » (Gadamer 1978, 261). « Alles Schriftliche [...] bedarf
der Rückverwandlung der Zeichen in Rede uns Sinn » (Gadamer 1990, 397).
2
„Den Bedeutungen wachsen Worte zu” (Heidegger 1967, 160)
125
LARBAUD, Valéry. Sous l’invocation de Saint Jerôme. Paris : Gallimmard, 1997
[1946].
MAVRODIN, Irina. Poietică și Poetică [Poïétique et Poétique]. Craiova : Scrisul
Românesc, 1982 [1998].
REISS, Katharina. Möglichkeiten und Grenzen der Übersetzungskritik:
Kategorien und Kriterien für eine sachgerechte Beurteilung von
Übersetzungen. Munich : Hueber, 1971.
ROBINSON, Douglas. The Translator’s Turn. Baltimore : John Hopkins
University Press, 1991.
ROBINSON, Douglas. Translation and the Problem of Sway. Amsterdam : John
Benjamins, 2011.
ROBINSON, Douglas. Schleiermacher’s Icoses. Social Ecologies of the different
Methods of Translating. Bucharest : Zeta Books, 2013.
STEFANINK, Bernd, BĂLĂCESCU, Ioana. « Les cheminements de la créativité
en traduction ». In : Meta, 60-3, 2015 : 599-620.
STEFANINK, Bernd, BĂLĂCESCU, Ioana. « Le verbum interius du traducteur et
la cristallisation du sens: traçabilité du processus traduisant à travers les
isotopies et les sciences cognitives ». In : Meta, 62/2 (under publication in
Aug. 2017).
126
Il tesoro dei poveri de D’Annunzio et ses traductions : les dérives d’une
translation
Jihane TBINI
Faculté des Lettres de la Manouba, Tunisie
127
l’illusione » hisse l’illusion au rang de trésor, alors que la tournure
restrictive de Douagi avilit le trésor en illusion.
Ainsi, notre propos n’est pas d’étudier les problèmes
linguistiques liés au passage d’une langue à l’autre, mais de
commenter les enjeux de la décision interprétative de Douagi. La
traduction pose en effet une question qui lui est inhérente, celle de la
réception du texte. Autrement dit : pour quiconque pense la
traduction, la question n’est pas de savoir comment on traduit, mais
comment on a lu. Or sachant que la réception d’un texte n’est jamais
strictement personnelle (nous lisons en fonction d’une époque, d’un
instant historique) la traduction est dès lors datée (et c’est pour cette
raison que les traductions « vieillissent »).
La traduction de la dernière phrase importe dans la mesure où
elle corrobore l’idée que la réception du texte varie. Loin d’être un
simple remaniement local dicté par le passage de l’italien à l’arabe, le
choix traductif de Douagi convie le lecteur à reconsidérer
rétroactivement la nouvelle, non sans un certain cynisme. Le
désenchantement de la génération de l’Entre-Deux- Guerres semble
avoir déteint sur la lecture du récit d’origine que fait Douagi.
Tessier traduit en français le texte de Douagi, qu’il considère
comme texte source de référence – nous y retrouvons la double
licence osée par Douagi –,adopte l’interprétation de l’auteur tunisien
et réécrit D’Annunzio via cette traduction intermédiaire. Nous nous
proposons d’étudier la « translation » à l’œuvre dans cette triade,
affectant certes la langue, mais aussi le sens, tributaire du contexte et
de la réception.
Si « traduire, c’est gérer un déficit » (Mejri 2005), le « déficit »
dans ce cas est de taille et altère le sens même de la nouvelle. Mais
une bonne traduction est-elle vraiment tributaire de la fidélité au texte
source ? À cet effet, nous adhérons à l’affirmation de Jalel Gharbi : « Ne
pas trahir peut être la pire des infidélités ».
Références bibliographiques
128
GHARBI, Jalel. « Poétique de la traduction ». In : Raymond Mbassi ATÉBA
(dir.), Francophonie et francophilie littéraires. Paris : Karthala (à paraître).
HURTADO ALBIR, Amparo. La notion de fidélité en traduction. Paris : Didier
Érudition, 1990.
JANKÉLÉVITCH, Valdimir. Le je-ne-sais-quoi et le presque-rien. I. La manière et
l’occasion. Paris : Seuil, 1980.
KRISTEVA, Irena. « Perspectives herméneutiques de la traduction : du
dialogue herméneutique à l’hospitalité langagière ». Signes, Discours et
Sociétés, 3. Perspectives croisées sur le dialogue, 30 juillet 2009. [En ligne].
URL : ttp://www.revue-signes.info/document.php?id=1170.
LADMIRAL, Jean-René. Traduire : théorèmes pour la traduction. Paris : Payot,
1979.
LARBAUD, Valery. Sous l’invocation de Saint Jérôme. Paris : Gallimard, 1997.
MEJRI, Salah. « Traduire, c’est gérer un déficit ». In : Meta Vol. 50, No. 1,
2005 : 120–128.
MESCHONNIC, Henri. Poétique du traduire. Paris : Verdier, 1999.
MOUNIN, Georges. Les problèmes théoriques de la traduction. Paris :
Gallimard, 1963.
RICŒUR, Paul. Sur la traduction. Paris : Bayard, 2004.
STEINER, Georges. Après Babel. Paris : Albin Michel, 1998
TESTARD, Maurice. « Les problèmes de la traduction ». In : Bulletin de
l'Association Guillaume Budé, n°1, mars 1985 : 2-29.
Corpus
129
La traduction du texte sacré : Tension entre fidélité pragmatique et
trahison blasphématoire
Mustapha TIJJINI
Université Mohammed d’Oujda, Maroc
130
hommes et Dieu, ensuite selon une optique horizontale de la re-
lecture et l’inter-textualité intercommunautaire. L’objectif étant
d’élaborer des modes de mise en discours et de traduction efficaces
des univers de croyances de sorte à éviter les chocs inter-religieux et
interconfessionnels qui menacent actuellement l’humanité et
instaurer par la traduction un entre-deux où règnent paix et tolérance
entre les peuples.
À travers cette réflexion, nous avons l’intention de rapprocher
le texte religieux du texte littéraire – étant donné qu’ils présentent
beaucoup de ressemblances – afin de dégager des critères définitoires
permettant d’identifier la « mauvaise traduction religieuse » et
proposer ensuite des critères définissant « la bonne traduction
religieuse ».
Références bibliographiques
131
HAMIDULLAH, Muhammad. « Introduction ». In : Le Coran. Traduction de
Muhammad HAMIDULLAH. Maryland : Amana Corp., 1989 : v-xxxiv.
LADMIRAL, Jean-René. Traduire : théorèmes pour la traduction. Paris :
Gallimard, 2002 [1979].
MESCHONNIC, Henri. La poétique du traduire. Paris : Verdier, 1999.
SELESKOVITCH, Daniela, LEDERER, Marianne. Interpréter pour traduire, Paris :
Didier, 1984.
132
Les « mauvaises » traductions : quelles instances évaluatrices ? Étude
de cas
Maria ȚENCHEA
Université de l’Ouest de Timişoara, Roumanie
133
c) le spécialiste traductologue (à la fois lecteur et critique, mais
aussi enseignant) : il compare le texte cible au texte source (cela peut
se faire dans le cadre d’une démarche didactique, avec de futurs
traducteurs), mettant en évidence nombre de « trahisons »
(inadéquations) par rapport au texte de départ, ce qui alourdit encore
le jugement rendu sur la traduction, qui sera considérée comme
franchement mauvaise. On pourra ainsi enregistrer des contre-sens ou
des faux-sens (traduction inexacte), ainsi que de fréquents décalages
quant au niveau de langue (choix injustifié de mots ayant une
connotation trop littéraire ou même archaïsante, totalement
inadéquats dans le contexte, qui évoque le monde moderne).
L’analyse de quelques fragments du texte traduit en roumain,
accompagnée de propositions d’amélioration de la traduction, nous
permettra de formuler plusieurs critères objectifs autorisant les
lecteurs et les critiques à qualifier un texte littéraire traduit comme
étant une bonne ou une mauvaise traduction (ou, de manière plus
exacte, plus ou moins bonne ou plus ou moins mauvaise : toute
qualification admet des degrés), sans néanmoins oublier de distinguer
entre subjectivité du traducteur et défauts de traductions et tout en
soulignant les différences quant à la réception de la traduction par les
instances évaluatrices considérées. Quels remèdes peut-on envisager
pour accroître la qualité des traductions ? Nous évoquerons, à part,
bien sûr, la nécessité d’un autocontrôle plus sévère du traducteur,
l’intervention essentielle d’un réviseur, ce qui n’est pas toujours une
réalité dans l’activité éditoriale.
Références bibliographiques
134
FLAMAND, Jacques. « Qu’est-ce qu’une bonne traduction ? ». In : Meta, vol.
29, n° 3, 1984 : 330–334.
GILE, Daniel. « Les fautes de traduction : une analyse pédagogique ». In :
Meta, vol. 37, n° 2, 1992 : 251-262.
HURTADO ALBIR, Amparo. La notion de fidélité en traduction. Paris : Didier
Érudition, 1990.
LANE-MERCIER, Gillian. « Antoine Berman aujourd'hui ». In : TTR : traduction,
terminologie, rédaction, vol. 14, n°2, 2001 : 83–95.
MOUNIN, Georges. Les Belles infidèles. Villeneuve d’Ascq : Presses
Universitaires du Septentrion, 1994.
NOUSS, Alexis. « Éloge de la trahison ». In : TTR : traduction, terminologie,
rédaction, vol. 14, n°2, 2001 : 167-179.
REISS, Katarina. La critique des traductions, ses possibilités et ses limites,
Traduction de l’allemand par Catherine Boquet. Arras : Artois Presses
Université, 2002.
LAROSE, Robert. « Méthodologie de l’évaluation des traductions ». In : Meta,
vol. 43, n° 2, 1998 : 163-186.
ȚENCHEA, Maria. « Traduction et communication : le problème de la qualité
des traductions ». In : Comunicare profesională şi traductologie (Lucrările
Conferinţei Internaţionale, 26-27.09.2002). Timişoara : Ed. Orizonturi
universitare, 2002 : 325-330.
ȚENCHEA, Maria. « Le rôle du commentaire de traduction dans la formation
des traducteurs ». In : Comunicare profesională şi traductologie (Lucrările
Conferinţei Internaţionale, 25-26.09.2003). Timişoara : Ed. Orizonturi
Universitare, 2004 : 181-186.
135
Un rythme, un souffle (in)fidèles ? La vocalité de Proust entre les
langues
Davide VAGO
Université Catholique Milan-Brescia, Italie
1
Nous utilisons le mot « vocalité » dans l’acception que lui donnent Paul Zumthor et
Pierre Léon. L’oralité se réfère au fonctionnement de la voix en tant que véhicule du
langage ; la vocalité, par contre, est indépendante du langage. Elle indique en fait les
valeurs et les activités propres à la voix en tant que telle. Voir l’introduction de
P. Zumthor à l’essai de C. Bologna (Flatus vocis. Metafisica e antropologia della voce,
Bologna, Il Mulino, 1992) et P. Zumthor, « Oralité », Intermédialités : histoire et
théorie des arts, des lettres et des techniques/Intermediality: History and Theory of
the Arts, Literature and Technologies, 12, 2008 : 169-202. Pour Pierre Léon, cf.
Bibliographie.
136
Prisonnière) afin de montrer comment l’écriture de Proust se nourrit
aussi de ce modèle vocal par le biais d’une architecture lexicale et
syntaxique permettant d’ancrer le souffle de la voix dans la page. Après
avoir montré comment le « vocal » est à même de structurer certains
passages choisis, nous nous proposons d’étudier la fidélité ou
l’infidélité de quelques traductions de Proust (en anglais et en italien2)
de ces mêmes passages, à travers le prisme de la sensibilité (ou de
l’indifférence) des traducteurs à ce souffle original et originaire. Une
mauvaise traduction serait en effet, d’après nous, celle qui dénature le
rythme vital de la page proustienne, autrement dit une traduction qui
ne serait pas respectueuse de la vocalité émergeant des mailles de la
Recherche. Dans notre conclusion, nous reviendrons sur l’idée que
toute bonne traduction est bel et bien une herméneutique de l’œuvre
littéraire, c’est parce que celle-ci fait apparaître son originalité à
travers un « air de la chanson » bien reconnaissable, comme Proust
écrit dans une page de critique littéraire : dans le cas de la Recherche,
« l’équivalence sans identité » de la traduction (Ricœur) ne peut se
passer d’une fidélité au vocal.
Références bibliographiques
2
Pour l’anglais : je vais utiliser la traduction « classique » de Proust par Scott-
Moncrieff et la nouvelle traduction (2003) parue chez Penguin sous la direction de
Christopher Prendergast (chaque tome a été confié à un traducteur différent). Pour
l’italien : Raboni (Mondadori « Meridiani ») ; Nessi Somaini (Rizzoli « Bur »), Pinto-
Grasso (Newton Compton « I Mammut ») e Serini (Einaudi).
137
EELLS, Emily, TOTH, Naomi (éds.). La sonorité proustienne et sa traduction en
anglais. Paris : Honoré Champion, « Recherches proustiennes », à paraître en
2017.
FONAGY, Ivan. La Vive Voix. Essais de psycho-phonétique. Paris : Payot, 1983.
GOPNIK, Adam. « Why an imperfect version of Proust is a classic in English ».
The New Yorker, March 30, 2015.
LEON, Pierre. Précis de phonostylistique. Parole et expression. Paris : Nathan
Université, 1993.
MESCHONNIC, Henri. Critique du rythme. Paris : Verdier, 1982.
MOUNIN, Georges. Les problèmes théoriques de la traduction. Paris :
Gallimard, 1963.
RICŒUR, Paul. Sur la traduction. Paris : Bayard, 2004.
SOSTERO, G. Henrot, LAUTEL-RIBSTEIN, Florence (éds.). Traduire À la
recherche du temps perdu, Revue d’études proustiennes, n° 1, 2015.
SPITZER, Leo. Études de style. Paris : Gallimard, 1970.
ZUMTHOR, Paul. « Oralité ». Intermédialités : histoire et théorie des arts, des
lettres et des techniques/Intermediality: History and Theory of the Arts,
Literature and Technologies, 12, 2008 : 169-202.
Corpus
Marcel PROUST
À la recherche du temps perdu, éd. J.-Y. Tadié et alii. Paris : Gallimard,
« Bibliothèque de la Pléaide », 4 vol., 1987-1989.
La Prigioniera. Traduzione di Paolo Serini. Torino : Einaudi, 1950-1978.
Alla ricerca del tempo perduto. Traduzione di Maria Teresa Nessi Somaini.
Milano : BUR, 1985-1994.
Alla ricerca del tempo perduto. Traduzione di Giovanni Raboni. Milano : A.
Mondadori, 1995-1998, 4 vol.
Alla ricerca del tempo perduto. Traduzione di Paolo Pinto et Giuseppe Grasso.
Roma: Newton Compton, 2002, « I Mammut », 2 vol.
The Captive. Translated into English by C. K. Scott Moncrieff, 1929 [The
University of Adelaide Library, 2005.
In Search of Lost Time, vol. 5 The Prisoner and The Fugitive. Translated into
English by Carol Clark. Penguin, 2003.
138
La « mère » est-elle vraiment intouchable ?
Primoz VITEZ
Université de Ljubljana, Slovénie
139
Rendre de ses erreurs tous les Doctes tesmoins,
Et vouloir bien souvent par un caprice extréme
Entendre qui jamais ne s'entendit soy mesme. (Colletet, 1658)
140
Références bibliographiques
141
Yves Bonnefoy traducteur : trahir le poème au nom de la poésie
Thomas VUONG
Universités Paris-Sorbonne et Paris XIII – SPC, France
142
de considérer selon quels critères ces traductions traîtresses
constituent ou non de mauvaises traductions.
Cette trahison, implicitement liée à sa vision du traduire, peut se
manifester de manière formelle : on prendra particulièrement
exemple sur le sonnet, emblème du poème conçu en tant que norme
close. Y. Bonnefoy se méfie de la contrainte, dans son œuvre de poète,
et ne vient au sonnet que tardivement ; au cours de son parcours de
traducteur, il choisit explicitement de remodeler la forme. Traduits en
treize, quinze ou seize vers, les sonnets de Pétrarque, Keats, Leopardi
ou Yeats perdent une partie de ce que la forme amène au propos qui
les motive – autant que thématique : cet héritier du surréalisme
revendique en effet la liberté de réinterpréter une partie du poème-
source, en lui attribuant un nouvel horizon imaginaire ou bien spirituel.
On se demandera en quelle mesure le bouleversement formel d’un
sonnet par la traduction amène à une modification de l’expérience
poétique qui s’y trouve, et ce que traduire en poète y substitue.
On rappellera quelques-unes de ses traductions, textes
autobiographiques ou théoriques et on évoquera leurs fondations,
souvent liées à l’histoire littéraire française, afin d’évaluer en quelle
mesure sa conception du traduire correspond à cet objectif assumé de
trahison tacite du poème, en vue de servir au plus près sa conception
de la poésie : souvent discutables, ses traductions présentent à la fois
des parti pris conséquents, et des beautés qui leur sont propres.
L’ensemble de cette étude constituera une analyse d’une
traduction pensée comme trahison, mais au nom d’un principe
supérieur du traduire : l’une des modalités de la mauvaise traduction
consiste-t-elle à se détourner du traduire, pour obtenir un texte traduit
de qualité supérieure ?
Références bibliographiques
143
BONNEFOY, Yves. « Traduire les Sonnets de Shakespeare » (1995), repris dans
Théâtre et Poésie : Leopardi et Yeats. Paris : Mercure de France, 1998 : 221-
224.
BONNEFOY, Yves. La Communauté des traducteurs. Strasbourg : Presses
Universitaires de Strasbourg, 2000.
FINCK, Michèle. « Yves Bonnefoy et Yeats, The Lake Isle of Inisfree et la
musique de paysage ». In Daniel Lançon (éd.), Yves Bonnefoy et le XIXe siècle :
vocation et filiation. Tours : Publications de l’Université François Rabelais,
2001 : 255-287.
LE BLANC, Charles. Le Complexe d’Hermès, Regards philosophiques sur la
traduction. Ottawa : Presses de l’Université d’Ottawa, 2009.
LOMBEZ, Christine. « Yves Bonnefoy et la traduction “au sens large” ». In La
seconde profondeur. Paris : Traductologiques. Les Belles Lettres, 2016 : 97-
125.
OSSOLA, Carlo. « Bonnefoy et Leopardi ». In : Daniel Lançon (éd.), Yves
Bonnefoy et le XIXe siècle : vocation et filiation. Tours : Publications de
l’Université François Rabelais, 2001 : 289-309.
PINET-THELOT, Livane. « Hamlet père & fils ». In : FINCK, Michèle, WERLY,
Patrick (dir.), Yves Bonnefoy, Poésie et dialogue. Strasbourg : Presses
Universitaires de Strasbourg, 2013 : 224-230.
ROESLER, Stéphanie. « Au-delà des figures, les êtres : Shakespeare et Yeats
traduits par Yves Bonnefoy ». In : TTR : traduction, terminologie, rédaction,
vol. 19, n° 1, 2006 : 97-121.
SCOTTO, Fabio. « Yves Bonnefoy, traducteur de Leopardi et Pétrarque ». In :
Littérature, n°150, juin 2008 : 70-82.
SCOTTO, Fabio. « Le son de l’autre : théorie et pratique de la traduction d’Yves
Bonnefoy ». In : LANÇON, Daniel, NÉE, Patrick (éd.), Yves Bonnefoy, poésie,
recherche et savoirs. Paris : Hermann, 2007 : 73-89.
Corpus
Yves BONNEFOY
Quarante-cinq poèmes de W.B. Yeats. Paris : Hermann, 1989.
XXIV sonnets de Shakespeare. Paris : Bibliophiles de France, 1994.
Keats et Leopardi, quelques traductions nouvelles. Paris : Mercure de France,
2000.
PETRARQUE. Je vois sans yeux et sans bouche je crie. Paris : Galilée, 2011.
SHAKESPEARE, William. Les Sonnets. Paris : Gallimard, 2007.
144
Traduire le Coran : un rapport dialogique ou contrastif ?
145
à ces multiples pressions, tantôt linguistiques, et tantôt
extralinguistiques. Pour dégager les critères d’une mauvaise
traduction, il nous semble édifiant de traiter aussi de la genèse du sens
telle qu’elle se profile dans le texte produit par le traducteur, une
formation textuelle qui prend appui sur un réseau intertextuel, où les
multiples voix président à la création du sens. Le traducteur du Coran
semble être imprégné d’une pluralité de voix, d’influences, de
traductions, et de textes. Subir l’influence d’autrui dans sa propre
traduction, ne constitue-t-il pas un critère d’une mauvaise traduction ?
« L’autarcie » textuelle est-elle une marque d’une traduction réussie ?
Nous essayerons de mettre en évidence les éléments qui
concourent à « une mauvaise traduction » en convoquant un ensemble
de concepts à même de répondre à notre problématique (analyse de
discours, mécanisme d’incidence syntaxique et sémantique
énonciative).
Références bibliographiques
146
Corpus
147
Retraduire = améliorer ? L’exemple de la nouvelle traduction
allemande des Exercices de style
Anke GRUTSCHUS
Université de Cologne, Allemagne
148
À côté, les nouveaux traducteurs invoquent le motif suivant :
Tout en reconnaissant les mérites de la première traduction qualifiée
de « pionnière » (Queneau 2016, 202), ils reprochent à leurs
prédécesseurs le caractère trop littéral de leur traduction. Cette
fidélité excessive au texte de départ aurait empêché une pourtant
nécessaire « re-création de l’attitude de Queneau » (2016, 204). Par
ailleurs, la littéralité trop importante aurait eu pour résultat une
version allemande « globalement plus artificielle » (2016, 205)
comparée à l’original français.
La présente contribution se propose d’approfondir la réflexion
autour de la qualité présumée d’une traduction à partir des critères
déjà évoqués ci-dessus : la modernité d’une traduction, sa fidélité
(excessive ou adéquate) à l’original ainsi que son caractère « naturel ».
La comparaison des deux versions allemandes des Exercices de style
servira de base à la présente réflexion.
Références bibliographiques
Corpus
Raymond QUENEAU
149
La polyphonie et le paratextuel dans la traduction en roumain des
romans de Frédéric Beigbeder
150
parsemés dans tous les romans de cet auteur. Les analyses préalables
appliquées au corpus empirique extraits des textes originaux et de leur
traduction ont fait surgir la nécessité de revenir sur plusieurs passages
des traductions en roumain des écrits de Frédéric Beigbeder qui
semblent être moins réussis. Le motif essentiel de ces problèmes de
traduction a à sa base, dans la majorité des cas, des interprétations
erronées de la polyphonie qui résultent des effets textuels et discursifs
des jeux de mots. Pour ne pas perdre le bon parcours de la nouvelle
production littéraire (le texte traduit), il faut que le traducteur puisse
mettre sur la table toutes ses compétences culturelles, linguistiques
(étymologiques) et autres. Nous avons remarqué aussi des faits
intéressants dans la traduction en roumain des effets polyphoniques
construits par des éléments grammaticaux qui sont générés par le
fonctionnement plus spécial des systèmes grammaticaux du français
et du roumain sur lesquels jouent avec plus ou moins de succès les
traducteurs des textes beigbederiens. Une autre situation qui pose des
signes d’interrogation est le recours aux paratextes de traduction qui,
d’une part, multiplient le nombre des voix dans la polyphonie des
romans soumis à la traduction et, de l’autre côté, nous poussent à
revenir sur la nécessité de ces « ajouts » paratextuels (notes
explicatives élaborées par le traducteur, par les spécialistes, les
érudits, etc.) et de leur pertinence informative mise au service des
destinataires de la traduction, car nous avons constaté que,
malheureusement, ces compartiments trahissent parfois les situations
de décodage erroné de l’original par le traducteur et donc
l’impossibilité d’assurer une reformulation adéquate du message
original dans le texte en roumain.
Références bibliographiques
151
BRES, Jacques et al. « Dialogisme et polyphonie ». In : Approches
linguistiques : actes du colloque, 3-9 septembre 2004. Bruxelles : Duculot,
2005.
CEBUC, Larisa. « La réalisation du terme « polyphonie» sous l’impact de la
traduction ». In : Studia Universitatis Moldaviae, n° 4 (94), Chişinău : CEP
USM. 2016 : 80-85.
COŞERIU Eugeniu. Omul şi limbajul său. Studii de filozofie a limbajului, teorie
a limbii şi lingvistică generală. Iaşi : Editura Universităţii « Alexandru Ioan
Cuza », 2009.
ECO, Umberto. Dire presque la même chose. Expériences de traduction.
Traduit de l’italien par Myriem Bouzaher. Paris : Grasset, 2006.
GENETTE, Gérard. Palimpsestes. Paris : Seuil, 1982.
HENRY, Jacqueline. La Traduction des jeux de mots. Saint-Etienne : Presses
Sorbonne Nouvelle, 2003.
LADMIRAL, Jean-René. Sourcier ou cibliste. Paris : Les Belles Lettres, 2014.
NOUSS, Alexis « Éloge de la trahison ». In : TTR : études sur le texte et ses
transformations, vol. 14, n° 2, 2001 : 67-180.
OSEKI-DEPRE, Inès. Théories et pratiques de la traduction littéraire. Paris :
Armand Colin, 2006.
RICŒUR, Paul. Sur la traduction. Paris : Bayard, 2004.
SARDIN, Pascale. « De la note du traducteur comme commentaire : entre
texte, paratexte et prétexte ». In : Palimpsestes, n° 20, 2007 : 121-136.
WALTER, Benjamin. « La tâche du traducteur ». In : Œuvres 1. Paris :
Gallimard, 2000 : 244-262.
YUSTE FRIAS, José. « Au seuil de la traduction : la paratraduction ». In : Event
or Incident. Événement ou Incident. On the Role of Translation in the
Dynamics of Cultural Exchange. Du rôle des traductions dans les processus
d’échanges culturels. Berne, Berlin, Bruxelles, Frankfurt am Main, New York,
Oxford, Wien : Peter Lang, coll. Genèses de Textes–Textgenesen (Françoise
Lartillot [dir.]), vol. 3, 2010 : 287-316.
ZBANŢ Ludmila, ZBANŢ Cristina. « Abordarea textuală a traducerii în viziunea
lui Eugeniu Coşeriu ». In : Anuar de lingvistică şi istorie literară. T. LI, 2011,
Bucureşti : Editura Academiei Române, 2012 : 423-432.
ZBANŢ Ludmila, GHEORGHITA Elena. « Le modèle fractal appliqué à la
traduction spécialisée ». In : Revista Ştiinţifică “Studia Universitatis”. Seria
“Ştiinţe umanistice”, n° 10 (60). Chişinău : CEP USM, 2012 : 131-138.
152
Corpus
Frédéric BEIGBEDER
153
Notices biobibliographiques
154
critique des traductions chez les Arabes. Il enseigne la traduction à l’université depuis
2010. Il est auteur de plusieurs articles sur la traduction.
155
philosophie de la langue : la terminologie arabe à l’épreuve de la traduction, 2012 et
Falsafat al-sard, tarjamat al-huwiyya fi nas, 2013. Il a publié une série d’articles et de
traductions (du français vers l’arabe).
156
publiés en Géorgie, en France et au Canada et directrice de la revue de langue
française Etudes interdisciplinaires en Sciences humaines (revue du CODFREURCOR,
Université d’État Ilia). Depuis 2000, elle est coordinatrice de la coopération entre
l’Université d’État Ilia et l’Université Paul Valéry – Montpellier 3. Elle est membre du
CIEF (Centre International d’Etudes Francophones) et chevalier dans L’Ordre des
Palmes Académiques (1996) ; élevée au grade d’Officier (novembre 2010).
Ileana Neli EIBEN est assistante à l’Université de l’Ouest de Timişoara, Roumanie. Elle
enseigne le français dans le cadre du Département des langues romanes de la Faculté
des Lettres, Histoire et Théologie. Ses principales lignes de recherche sont :
l’autotraduction, les études québécoises, la littérature migrante et l’écriture
féminine. Elle est membre fondateur des associations : Asociaţia de studii francofone
DF et ISTTRAROM–Translationes ; membre du Conseil International d’Études
Francophones, de l’Association Internationale des Études Québécoises et de
l’Association d’études canadiennes en Europe Centrale. Secrétaire de rédaction de
la revue Dialogues francophones, elle a publié plusieurs articles dans des revues de
spécialité.
Deva EL-SHADDAI est assistante au Département des Langues Etrangères, Faculté des
Lettres et Sciences Humaines, Université de Maroua. En 2015, elle a soutenu sa thèse
de doctorat « Schreiben und Übersetzen zwischen Lokalem und Globalem:
Kulturtransfer und Macht in der Produktion und Übersetzung kamerunischer
Literatur ins Deutsche, aufgezeigt am Beispile Mongo Bétis und Ferdinand Oyonos »,
à Ludwig-Maximilians-Universität Munich. Ses champs d’intérêt sont : la littérature
allemande, la littérature comparée, la théorie postcoloniale et la littérature
francophone africaine.
157
Aurora FIRȚA. Avec un doctorat en philologie italienne (« Ascendance de la poésie de
Salvatore Quasimodo dans les Chants de Giacomo Leopardi », 2011), Aurora Firţa est
maître assistant auprès du Département des Langues romanes de l’Université de
Bucarest et, depuis 2014, responsable de projets culturels et scientifiques auprès de
l’Institut roumain de la culture et de la recherche humaniste à Venise et, aussi,
coordinatrice du Lectorat de langue, culture et littérature roumaines de l’Université
Ca’ Foscari de Venise. Ses recherches portent sur la poésie italienne des XIX e et XXe
siècles, sur les relations roumaines-italiennes dans le domaine de la littérature et sur
des questions de traductologie italo-roumaines. Elle a traduit en roumain la poésie
de Giorgio Caproni, Poezii/Poesie (2015) ; a publié les volumes Leopardi în secolul XX.
Cazul Quasimodo (2013) et Carlo Bo, Dragoş Vrânceanu, Carteggio (1930-1976), a
cura di Aurora Firţa (2016).
158
Michèle Finck à l’Université de Strasbourg. Principales publications concernant la
traduction : « Traduction, interprétation et critique. Les traductions anglaises et
allemandes des poèmes de Saint-John Perse à l’épreuve de l’imagination créatrice »
(2009) ; « Histoire d’une traduction » [étude des manuscrits de la traduction anglaise
d’« Etroits sont les vaisseaux » d’Amers de Saint-John Perse], Souffle de Perse, 2000 ;
Les Manuscrits de Saint-John Perse. Pour une poétique vivante (2007).
Kinga Eva KELEMEN est doctorande à l’Université Babeș-Bolyai de Cluj-Napoca. Elle prépare
une thèse de doctorat intitulée Instruments linguistiques et pragmatiques dans l’analyse
critique de la traduction littéraire. Analyse critique de quelques traductions roumaines
de Guy de Maupassant sous la direction du professeur des universités Ligia-Stela
Florea. Elle a publié des articles dans des revues spécialisées et des actes de colloque
ainsi qu’une traduction dans Tribuna (2010).
159
articles) dans différentes revues croates (Književna smotra, Fantom slobode, Revija
malih književnosti).
Thiago MATTOS est doctorant, sous la direction du Prof. Álvaro Faleiros, en Études
Linguistiques, Littéraires et Traductologiques en Français, à l’Université de São Paulo,
Brésil. Sa thèse est intitulée Entre o texto e o não texto: o contínuo do rascunho na
tradução de Mon cœur mis à nu, de Charles Baudelaire. Il a publié les recueils de
poèmes Teu pai com uma pistola (2012) et Casa devastada (2014). En 2017, il publie
avec Álvaro Faleiros le livre A retradução de poetas franceses no Brasil: de Lamartine
a Prévert. Trois dernières publications d’auteur : Livro do desassossego, de Fernando
Pessoa, e Mon cœur mis à nu, de Charles Baudelaire: aproximações e afastamentos.
(2016) ; A prática discursiva editorial: leitura monocromática, enciclopédias e
precarização (2016) ; A relação entre poética e sistema literário em André Lefevere
(2016).
160
d’Études Luso-Brésiliennes de l’Université Aix-Marseille, où il vient régulièrement
pour donner des cours dans le domaine de la traduction. Il a séjourné à plusieurs
reprises au Collège International des Traducteurs Littéraires, à Arles, en tant que
traducteur (deux fois avec la bourse d’aide aux traducteurs étrangers, du CNL) et, en
2012 et 2015, en tant que tuteur de la « Fabrique des Traducteurs » (Portugais/
Français). Il a déjà publié plusieurs essais au Brésil et en France sur la traduction
littéraire et sur des auteurs comme Diderot, Baudelaire, Rimbaud, Bataille, Barthes,
Ponge, Deguy, Tarkos. Il a traduit beaucoup dans le domaine des sciences humaines
(plus récemment : Philippe Lacoue-Labarthe, Georges Didi-Huberman, Jacques
Derrida, Paul Veyne) et dans celui de la littérature et de la poésie (plus récemment :
Georges Bataille, Christian Prigent, Christophe Tarkos, Charles Pennequin).
Inês OSEKI-DÉPRÉ est depuis sept. 2011 Professeur émérite de Littérature générale
et comparée à l’Université de Provence. Son laboratoire de rattachement : CIELAM
– AMU (Université d’Aix-Marseille). Elle est membre du Comité scientifique de
publications de la revue TTR (revue de traduction littéraire de l’Université Mc Gill,
Montréal) et membre du comité de publications de la revue Cadernos de Traduçao,
de l’Université Fédérale de Florianópolis. Elle est membre du conseil d’administration
du CIPM (Centre International de Poésie à Marseille). Elle fait partie de plusieurs
associations professionnelles : ATLAS (Association des Traducteurs Littéraires en
Arles), SFLGC (Société française de Littérature Générale et Comparée), Centre de
Recherches de Littérature Générale et Comparée et de Traduction Littéraire (EA),
aujourd’hui Centre de recherches de Transposition. Elle a bénéficié de plusieurs
missions de recherche et d’enseignement en France et à l’étranger. Dernière
mission : la chaire française à l’UFMG d’une durée de 6 semaines (cours magistraux,
conférences). Ses derniers ouvrages publiés sont : Traduction et Poésie, 2004 ;
Théories et pratiques de la traduction littéraire, 2006 ; De Walter Benjamin à nos
161
jours, Paris, Honoré Champion, 2006 ; De Haroldo de Campos une anthologie, 2006 ;
Algo : Prêt (traduction de Quelque chose noir, de Jacques Roubaud), 2006.
Traductrice littéraire, elle a publié de nombreuses traductions d’auteurs brésiliens,
portugais ou autres : Écrits, de Jacques Lacan, traduction portugaise (préfacée, 342
pages), 1976 ; Les Premières Histoires, de João Guimarães Rosa (203 pages) (avec le
Concours de l’Unesco), (préface, 10 pages), traduction française 1982 ; Galaxies,
préface et œuvre complète, Haroldo de Campos, La main courante, La Souterraine,
1998. Algo : preto, traduction brésilienne de l’œuvre de Jacques Roubaud, 2005 ;
Quelque chose noir; Haroldo de Campos : une anthologie, 2006 ; Essais critiques,
Christian Prigent, en collaboration avec Marcelo Jacques de Moraes (à paraître).
162
série d’études (en français, en anglais, en allemand et en russe) dans des revues
spécialisées ou des actes de colloque.
163
recherche à l’étranger. Missions d’enseignement et de recherche sponsorisées par
la Fondation Herder jusqu’à présent : août 2015 – juillet 2016, à Universidade Federal
de Santa Catarina ; févr. 2011–sept. 2012, à Adama University/Ethiopie (projet
DAAD) ; 2007-2010, Université Babeş-Bolyai de Cluj/ Roumanie (Projet DAAD) ; oct.
1998 - juillet 1999, à l’Université de Craiova/Roumanie (projet DAAD pour la création
d’un département de traductologie). Missions d’enseignement de courte durée (1-3
mois) : au Kenya, en Egypte, en Tunisie, au Portugal, en Roumanie, etc. pour la
formation de formateurs en traductologie. Formation : Maîtrise de Philosophie sur
Sartre et les « trois H » Hegel, Husserl, Heidegger (sous la direction de Paul RICOEUR,
Paris/Sorbonne 1966, avec une Bourse du Gouvernement Français) ; Maîtrise de
Lettres Françaises 1967 (Sorbonne, avec une bourse DAAD) ; Licence Langue et
Littérature Anglaises (Paris/Sorbonne 1969, avec bourse du DAAD) ; MA de
Linguistique Générale (sous la direction de André MARTINET, Université René
Descartes/Paris V, 1971, bourse DAAD) ; De 1972-1975 : École des Chartes ; École
Pratique des Hautes Études (EPHE) ; Maîtrise en édition de textes ; Doctorat en
Linguistique sous la Direction de A. Martinet et Gérard Moignet : « Aspects
diachroniques du français médiéval » (summa cum laude), en 1975, avec une bourse
« Villigst » de 1972-1975 ; les bourses « Villigst » sont destinées à former l’élite
protestante). Distinctions : Diplôme de l’Académie des Sciences Roumaines/Section
Linguistique, pour l’ensemble des recherches (sept. 2009).
164
en italien un texte d’Octave Mirbeaum La mort de Balzac/La morte di Balzac (2014)
et il a édité une nouvelle édition bilingue (italien-anglais) du Tartuffe de Molière
(2015). Il est à présent MCF en Littérature française à l’Université Catholique (Milan-
Brescia).
165
Sciences humaines (CODFREURCOR) et depuis octobre 2016 elle est membre
du Comité exécutif de l’AFELSH (Association des facultés et établissements
de lettres et sciences humaines). Elle est membre des comités scientifiques
des colloques internationaux organisés en Arménie, France, Italie, Géorgie,
République de Moldova, Roumanie, Ukraine et membre des comités de
rédaction des publications scientifiques. Les domaines des recherches
scientifiques ciblent les problèmes de la traductologie et de la traduction
dans la dimension cognitive, communicative, sociale, culturelle et autres.
166
Table des matières
167
La retraduction d’une même œuvre littéraire serait-ce une solution pour
améliorer la qualité de la traduction ? /Mzago DOKHTOURICHVILI 44
Tout est loin. Problèmes de traduction d’un roman hongrois, datant du régime
communiste / MARÁDI Krisztina 80
168
Bien traduire pour séduire. Organisation textuelle et problèmes de traduction
dans Les Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos / Andrea NAGY 89
Il tesoro dei poveri de D’Annunzio et ses traductions : les dérives d’une translation
/ Jihane TBINI 127
169
Un rythme, un souffle (in)fidèles ? La vocalité de Proust entre les langues / Davide
VAGO 136
170