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Sujet
A quelles conditions les instruments des politiques climatiques peuvent-ils pallier les défaillances du
marché ?
Introduction
Le climat est un bien collectif mondial. Essentiel aux hommes, mais aussi non excluable et non rival, il
n’est pas correctement valorisé par le marché. Ce dernier se révèle incapable de refléter dans ses prix les
atteintes faites au climat par les activités économiques. Par exemple, le prix des énergies fossiles
génératrices de gaz à effet de serre reflète leur coût d’extraction et leur rareté, mais pas les coûts du
réchauffement climatique. Le marché est donc défaillant puisqu’il ne tient pas compte des externalités
négatives sur le climat et fournit de mauvais signaux aux agents économiques, qui les encouragent à
continuer à polluer. Au final, le niveau de pollution généré par la régulation marchande est trop élevé
pour assurer le bien-être des générations futures.
Ces défaillances du marché justifient que les pouvoirs publics, à différents niveaux (local, national,
supranational), prennent des mesures pour atténuer le réchauffement climatique. Ils disposent en la
matière de trois instruments principaux, dont l’un est réglementaire (les normes) et les deux autres sont
économiques (taxes et quotas assortis de marchés des droits d’émission)
Les pouvoirs publics font face à un dilemme. Si la mise en œuvre des instruments est trop couteuse, il y a
un risque que les acteurs ne suivent pas (que l’on songe au rejet actuel de l’écotaxe en Bretagne). A
l’inverse, si on veut réduire fortement le coût de la mise en œuvre on risque de ne pas atteindre les
objectifs poursuivis. A quelles conditions peut-on assurer à la fois l’adhésion de tous à la lutte contre le
réchauffement climatique et l’efficacité de ces politiques ?
Nous verrons tout d’abord que si l’on veut assurer l’adhésion aux efforts d’atténuation du réchauffement,
il faut en réduire les coûts en recourant à des instruments économiques. Puis que le souci de la réalisation
des objectifs doit tout de même primer sur celui de la réduction des coûts.
II. Mais cette réduction des coûts ne doit pas conduire à transiger sur les objectifs ou les
moyens
La mise en œuvre du protocole de Kyoto a démontré que la volonté de faire adhérer un grand nombre de
pays en rendant moins contraignants les engagements et en limitant les ambitions pouvait se retourner
contre l’efficacité du dispositif–cf. la défection du Canada par ex. (doc. 1). De même, le Mécanisme de
Développement Propre a eu des effets pervers, les pays en développement ne modernisant plus les
installations existantes très polluantes en dehors du MDP. C’est pourquoi il existe d’autres conditions que
l’efficacité économique au succès des politiques climatiques.
Conclusion
Comme le climat est un bien collectif mondial, si l’on veut lutter efficacement contre le réchauffement
climatique, les politiques climatiques doivent concerner l’ensemble de la planète. L’enjeu est donc de
faire adhérer les citoyens, les entreprises et les Etats à l’effort de lutte contre le réchauffement. Cette
adhésion aura d’autant plus de chance de se produire que les efforts seront moins couteux pour les mêmes
objectifs et équitablement répartis. C’est pourquoi la première condition pour que les instruments de
politique climatique puissent pallier les défaillances du marché est d’adopter des instruments
économiques (taxes, marchés de quotas d’émission) qui permettent de limiter les coûts, et de combiner
ces instruments en fonction des situations où ils sont les plus efficaces. Mais il faut aussi que les recettes
des taxes soient utilisées pour promouvoir le développement de l’économie verte (via l’innovation et la
diffusion des technologies propres).
Toutefois, la seconde condition est que la volonté d’assurer l’adhésion aux programmes de lutte contre le
changement climatique ne vide pas ces programmes de leur substance. Il importe que le niveau des taxes
ne soit pas trop faible, ou que les quotas d’émission ne soient pas alloués en trop grande quantité. En un
mot, le prix du carbone émis doit rester élevé. Jean Tirole propose donc la fixation d’un prix plancher sur
les marchés du carbone.
Enfin, la dernière condition est peut-être de ne pas se priver des ressources de la réglementation. En effet,
comme le montre le cas des normes d’émission des véhicules particulier en Europe, la norme assure à
coup sûr la réalisation des objectifs poursuivis… ce que ne garantissent pas les autres instruments. Quand
les taxes paraissent, à tort ou à raison, socialement inacceptables, la norme peut représenter une
alternative intéressante aux instruments économiques.