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'1.'1\ADUCflllON NOUVELLIC
TAHDIE U
1
SOUS·DillLIOTUl!CAIRE DE L lNSTITUT
TOME PREMIER
PAUJS
LIBRAIRIE DE L. HACHETTE ET c··
1H67
Tous droits réservés
• •
G I~ OGRAPI-II E
DE
STRAB 0 No
LIVll E PPtEMIER.
(JUe la SCICOC8 g~ograJllllque ll'C.,1. plS étrangère à la philOSO}Illie. -
Qu'Homtrc ll3rLout clan ses poë,ne!:) n dounë ln 1rcu\O de con-
uaiSSJ.II {.a ~ü grnphique.c;. - Que les ancrcns tr.utJs d~ gêogt:l-
phac (ournullent tic lacunes, d'incohérences, d'errl'uru1 ùc mensonges
ct de contr.tdacltons. - Preuves et déwou~tratlons à 1 appu1 de
ce Ju~cmcnl de 1 •ut ur. - Table311 :iOmma•rc rcprcscotam en
o<iCCO\Ir 1 la th p IU()U g(:nerale de b terre balJitt~O. - J:lypo-
lbt ct ob. cnattous JlOSiuves tendant à étnbhr qu'eu bënucoup d e
h ux lJ. terre ella w<1r &c sont rêc.ipr.oqucmcnt d{:plaeées ct substituée"
l'une ê l'rnatr •
1
1
•
.. GEOGRA.PHlE IlE S 1 DO~'"
et ailletns :
• Déjà au sein de l'Océan a disparu l'élincelnnt ilnmbean du
« soleil, attirant après soi sur la terre le sombrt: voile de la
1 nuit •; J
1
JO GÉOGRAPUJE DE STRABON.
• " loppe :rée nt du soleil ne r pl ndit j rn ·s pour cUJI, e
c 1 Cun le nuit pane loujour:> n -d d 1 rs t t '.
IJ ronnai~sait pareillement 1'1 ter du moin nomme t-i
1 41)sien , nation thracique, rn mc de ce fi m ) e
toul le littoral à parur du 1 1 ter, utr ment dü la
'I h nec jn(qu'au Pénée, pu squ'll mC'lai n C' lt!f; rœon en~ ct
qu il ig-nale l'Athos, l' Axius ct le do tu c 'i à-,,s.
Uu nt u littoral de la G1ècc, pro) nge1 eut de celui de
la TJuace, 1l a été décrit par lui en eutier ju qu'nux frontiè-
a·cs de la Thesprotie. 11 connaissait enfin J'extrrmtlé de I'I-
lahe, à en juger par ln mention qu'il n fnilc de 11 cn osa et
ùcs Sioèle~J et l'extrémité ùc l'lLérjc, uiusi quo la richesse
et Jo pro~::pédté des peuples qui l'occupaient, ot dont nous
parlions toul à l'heure. Si maintunant, dans J'intcr,•alle, se
lais enl aperceYoir quelques lacunes, on p ut Jes lui par-
donn r le géo(fraphe de profc sion lui-nwme omettant sou-
' cnt bien des déta1ls. D est oxcu able aus i ct ne mérite
aucun blâme s'il a cru devoir meler, çà ct 1 , qu lques mr-
con l cces fabuleuses à ses réciiR, d'aill ur tout li torique
t did tiques~ car il n'e.J pas \Iai, comme 1 pr tend
ernto thène, que tout pocto \Ïse uniquement plaire ct
jnmnis ù instruire : tout au contmin~~ c ux qui ont tnulé le
plu pertinemment les que&ions de po~tiquo proclament la
po 'sie une sorte de philosophie p1'Ïmith·c. 1\fuis nous réfu-
terons pius longuement ce jugement d'l~•·atosLh~ne, quanù
nous uurons, Jllus loin, à reparler du poôto.
J J. Ptmr le moment, ce qui n été dit doit suffire lL éta-
blir qu'Homère a été bien •·éellcmcnt Jo ]lère dP la géugra-
phte. Quant au.x successeurs qu'il a eus dans cette sc1ence,
c'étaient, comme cl1acun sait, des homme d'un m~rite émi-
nent et familiarisés avec les étutlcs philo ophiques : les
doux qu'r:ratosthène nomme immédiatement aprè. lui
ont Anaximandre, qui fut le _disciple cl le oompntr·iote de
'I hui , el Hécatée de f\1Het. Erntosthènc ajoute qu' AnaXI-
mandre publia la première Carle géographique, ot qu ·il re te
x l (' .
Ll\RE I. l1
d.Hécat(Je un Traité cie gcooraphic, dont J'a.uthcnlicité ressort
suivant lui, de l'ensemble des œuvres de cet auteur'.
12. l\lainle.nant, que l'élude de la géogmphio exige unt·
grande 'ariété de connaissances, beaucoup l'ont dit avant
n u~; llipparqut' notamment, dans sa Critique tic la Gioara-
pl i d' El'aLOstlt ne, fait remarquer très-judicieu~emcnt que
la conn ai .. nnce de la grograplrie, si utile à la fois au t:implc
particulier et à rérudiL de profession, ne saurait abtolu-
ment s'acquérir sans quelques notions préliminaires d'astro·
nomie et sans la pratique des règles du calct~l dos éclipses.
Comment juger~ par exemple, si Atexnmhie d'g!:{ypto est plus
septentrionale un y) lus më.ridionale quo Babylouo el de com-
llien olle peul l'OtJ·e, sans recourir à la mèthocJo des climatsr
De utême, cemmeut savoir exactement si ttJl pnys est plus
avancé vers l'orient et tel autre \'ers l'occidunt, autrement
que par la comparaison des éclipses du sole1l et de celle de
la lune? Ain i s'explique Hipparque à cel égard.
13. En gén~raJ, quiconque se propose de décrir·e les
co.ractères prO}H'OS de teUe ou telle contrée a essentielle-
ment besoin de recourir à l'astronomie et à la g~om~trie,
pour b1en en déterminer la configuration, l'étendue, les
dititances relnthe~, le climat ou la situation géographique, la
température, ct, on un mot, toutes les conditions atmosphé-
riques. Puisqu'il n'est pas de maçon bâtis~anl une maison
ni d'archiLPcle édifiant une ville, qui ne tjcnnent compte
préalablement de toutes ces circonstances, à plus forte raison
le philosophe, qui embrasse ùans ses étn<.les la terre hu hi rée
tout entièreJ y aura-t-H égard. Et, àe fait, la chose lni im-
llOrle plus qu'à personne. Car si, pom· uno étendue do pays
restreinte, la situation au nord et la situation au midi
n'impliquent qu'une légère ditférence, rapportés à la cir-
conférence totale de la terre habitée, le nord comprendra
jusqu'aux derniérs confins de la ScyLbie el de ln Cel~quc,
et le midi ju,qu'aux extrémités les plus reculées de l'Ethio-
1. Ou, romm M Charles MGIICT propose de trndulro • .. de l:~ eomp~r:uson
avec l'auLre ouvrn e de cet 11.uleur•• c'est a .qluulr Se$ G ni loyctf. Voy.
or.
:)(y {1. Ge /mit ttf tôt' lttltoui~, p. '9%{1, au bas de la~~ COI(IOUC.
.... GÉOGR.APHJE DE S1 RADON •
16 GÉOGRAPHIE DE STltABO.N.
n
tions vulgaires sufliscnt à constater la réalité. est évident,
par exemple, que la courbure de la mer empPche seule le
navigateur d'apercevoir au loin les lumières placées à la hau-
teur ordinaire de l'œil, et qui n'ont besoin que d'être un
peu haussées pour devenir Yisibles: même à une distance
plus grande, de même que r œil n"a besoin que de regarder
de plus haut pour découvrir ce qui auparavant lui demeurait
caché. Homère dfSjà en avait fait la rem.arque, car tel esl le
sens de ce vers :
' Une fois soulovô par la vague immense, il put porter trôs-
ICt lom sa vue perçante •. ,
t. (JI ~ \ • :.
UVRE I. 21
aussi connue, on n'a que faire, prO\'Îsoirement dn moins,
d'un traité 1el que le nôlrc, et J'on doit, au préalable, se fa-
lia1·iser avec des notion~, sans le5quelles il n'y a pas d'é-
tudes géographiques pos~i bles.- Yoilà pourquoi les auteuré\
de Portulans cl de Périples oe font qu!un travail inutile,
quand ils négligent d'ajouter à leurs descriptions co qui, en
[ait d'éléments mathématiques ct astronomiques, s'y ralla-
che nécessnirewent '·
22. Bn somme, il faut que le présent traitü s'adresse à
tout le monde, à la fuis aux poliliqurs ct aux ::;impies parti-
culiers, commo notre 1wéeéùenle composilion hi~tnl'ique. Lh
n.ussi nous empJ,lyir,us cotte qualification de polilitfLIC, pour
désiMrx1cr, pnr opposition à l'homme· complt.!tcment illelln!,
celui qui n pnrcour·u le cercle entier de5 études composant ce
qu'on appelle d'ordinuir·e l'Jducation libérale et. plnlosoplti-
que. Car celui-lit seul, disions-nous 1 peul blâmer et louer?!
propos ct discerner dans l'histoire les érénewents \Taimont
'ffines do mémoire, qui a médité sor les grandes questions
ic vertu et de sagesse ct sur les différents Eystèmes qui s'y
rapportent.
23. A) aut donc publié déjà des Mcmoi1·es historique~,
nti1es: nous le supposons du moins, aux progr·ès do la philo-
..ophie morale et politique, nous ayons voulu les compMtcr~
pnr ln prt!sente composition: conçue sur le même plan, olla
s'adresse aux mêmes homme~, à ceux surtout (pd occupent
les hn.ulcs pos1 Lions. Et ùe même que, Jans nul ro Jli'Cmier-
ouvrnge, nous n'nvuus mentionné que les faits relèitifs aux
hommes cl aux vies illustres, omellant à dessein tout co t)lli
pouvait être potit ct obscur, ici aussi nous avons Ùt.t négliger
les potits faits, les faits trop peu marquants, pour insister
dn\·aatn~e sur les belles ol grandes chose~, qui sc ti'Ouvcnt
ruunir à Ja fois J'utile, l'intéressant et l'agréable. Dans les
stalues colossales, on ne recherche }las l'exactitude minu-
.
1. A l'excrnple de ~1. Mcineke et s:vr J'indir.ation donnée Jl:tr Coray, nous
a."ons transpor16 le• toute celte ph race. qui s5 'rou\C lHtnitl;ellement placée l
l.1 fin ùu clanphre UJYIUit, m:us qui u'cst peut-être hien t:.ussi qu'une glo. r
m rtinale mtrodmlc moltiment .1uns !~; texlt! de Strabon.
-- G~OGRAPHIE DE STRADO ••
CHAPITRE II.
1. Si après que tant d'autres ont tr. it.-t ces m ti ~ , n U::,
rnlrcprenous de Jes traiter à n LJ· tour, qu'on aH nd p r
nou en hlûmer que nous aJons té con,nincu d n' ,·mr fat~
qu ré1 él r danc: les mêmes terme tout c qu'1 lat nt
a\ rmt nous. Il nous a sem1Jlé en effel, que. 1 r' 1 a :t-
l lé m cc laquelle nos préd 'cosseurs avaient t
telle 1 ar lie, ceux-là telle autre, il a\ aient 1 l n
1 tc encor beaucoup à faire, et que, ~i )l u qu nom; pu~
on ajouter à leur travail, ce peu uffirait ncore b J h 1
1 otro entre1 rise. Or, la généwtion p1 nte a \U s con-
nnis one s géographiques s'étendre cu ibl m nt a' c les
[H ogrè de la domination des Rom nin et de 1 arlhe , comma
d ·ji\, nu dire d'J~ratosthèoe, les gtSnéwtions po tu ieures ù
Alcxandro avaient vu les leurs s'nccroitre beaucoup pnr le
fait de sos r.onqu«ltes. Alc}.1lndre, en cfTat, nou~ n rév ,],~ en
quelque sorte une grande par·tie de l'A. jo, cl dan le 1 orù
do l'Europe, tout ]c pays jusqu'à l'lstcr: Jcs Hm win!: a leui
tour nou ont révéié tout Poccidcnl d I'Furopc ju qu
l'Albis, fleuve qui partage en deux la G r1r nnio, san comp·
ter ln r 'gion qui s'étend au delà de 1•1 r jusqu"au fl m-e
T}T3 • Quant à la contrée uhé1 ioua-e j u qu·au fronti 1 c
de 1a otes et à Ja partie du lillornl qui nhoutit à J C l-
chide, c'est par l\fithridate Eupator ct par c li utcn nt
que nous le connaissons. Enfin, grâce au Purtbe..., l"II~r-
LIVRE I. 23
canie, ln Bactriane et la portion de Ja Sc~ thie qui s'étend
au.dcssns de ces deux contrées nous sont mieux connues
qu'elle ne l'étaient de nos prédécesseurs : n~y cC1t-il que
cala, nous aurions donc, on le \'oit, quelque chose h dire de
plu qu'eux. Mais c'est ce qu~on ver_ra mieux encore pnr les
critique que nous dirigeons contre eux, non pas tant co!ltre
les plus anciens que contre ceux qui sont yenus après E~a
tosthène et contre Ératosthène lui-même, et cela à dessein
ct par la raison que leur grande supériorité de lumièr·cs sur
le commun des hommes doit rendre d'autant plu~ difilcile
pour )cs géué,.at.ions futures la réfutation ùes errom•s qu'ils
ont pu conunottro. Si, du reste, nous nous voyons forC!l) do
conLredire parfois les autorités mêmes que nous avons choi-
sies pour nos guides l1abilnels, qu'on nous le par·donne. Ce
n'est pas, en effet, chez nous un parti pris à l'avance do con-
tredire tous )cs géographes sans exception qui nous ont pré-
rédé; il en e.. t hraucoup au contraire qua nous comptons
n~gliger absolument comme nous ayant paru des guides
trop peu sl1rs~ el nous résenons nos critiques pour ceux que
nous savons être lutbituellement exacts. Disputer en règle •
contre toute espèce d:ad\e~aires; ce serait en vérité pPrdre
a peine; mais contre un Eratoslhène, un llosidonius, un
llljlpru·qlJe, un Polybe el autres noms pareils, il y a quelque
t•hose de glorieux à Je faire.
2. Nous commencerons par Eratost]Jènc l'examen en \
questiou. metlnut tou,iours en regard do nos jugements les
CI ittques qu'If ippnrq ue a dirigées coutre lui. Hz·atosthènc ne
mérite assurément pas qu'on le traite aussi cavalièrement
que l'a fait Polémon, qui prétend démonlrel' qu'il u'avait
ml• mc pas visité Athènes; mais il ne mér·üo }las non plus la
coufinnce aveugle que quelques-uns ont en lui, malgré ce
!!rand nombre de maîtres soi-disant excellents dont il aurait
~té le disCiple. Il a écrit ceci: • Jamais peut-être on n'avait
vu fleurir dans une même enceinte, dans une seule et même
cité, autant de philosophes éminents qu'on en comptait alors
autour d'ArcésiJaüs et d'Ariston. • - Soit, mais h mon sens
celan~ suflh point, et l'important était de Eavoir discerner
GÊOGRAPlllE DE STHADON.