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Bulletin de la Société Botanique de France

ISSN: 0037-8941 (Print) (Online) Journal homepage: https://www.tandfonline.com/loi/tabg17

Induction précoce de la floraison chez une plante


ligneuse Rhus typhina L.

M. Bonnet-Masimbert & J.P. Nitsch

To cite this article: M. Bonnet-Masimbert & J.P. Nitsch (1969) Induction précoce de la floraison
chez une plante ligneuse Rhus�typhina�L., Bulletin de la Société Botanique de France, 116:9,
403-407, DOI: 10.1080/00378941.1969.10838686

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Published online: 10 Jul 2014.

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Bull. Soc. bot. Fr., 1969, 116, 403-407

Induction précoce de la floraison chez une


plante ligneuse Rhus typhina L. e:')
par M. BONNET-MASIMBERT (1) et J.P. NITSCH
Laboratoire de Physiologie pluricellulaire, C.N.R.S.
91- Gif-sur-Yvette

Summary. -The staghorn sumac, Rhus typhina L. flowers normally only


4-5 years after sowing. A single spray of gibberellic acid (1 00 mg/!) followed
by 3 weeks of short days (10 hours of light) can indice flowering in 5-week
old seedlings.

*
**
Le Rhus typhina L. est un sumac qui pousse à l'état sauvage dans la
région Nord-Est de l'Amérique du Nord. Il atteint environ 2 rn de haut
et fleurit généralement à partir de la 4• ou la Y année après le semis.
Les expériences préliminaires décrites ci-dessous montrent qu'il est pos-
sible de provoquer la floraison 6 semaines après le semis, à condition
de combiner une application d'acide gibbérellique (AG) avec des traite-
ments photopériodiques.

PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL.

Les graines de Rhus typhina ont été scarifiées pendant un minimum de


6 h dans de l'acide sulfurique concentré, lavées abondamment à l'eau
froide et semées dans de la « Vermiculite » (granulés de mica expansés)
reposant sur de la bourre de verre, le tout étant arrosé avec la solution
nutritive du Phytotron de Gif mise au point par Nitsch (voir NnscH,
1965). Les plantes ont été élevées dans les Superserres à 24 oc (jour) -
17 oc (nuit) en régime de jours longs ( 16 h de lumière naturelle, complétée
par de la lumière artificielle produite par un ensemble de tubes fluores-
cents et d'ampoules incandescentes).
RÉSULTATS.

L'acide gibbérellique induit la floraison. - Au cours d'une première


expérience, trois lots de 30 plantes chacun ont été soumis aux traitements
suivants, 6 semaines après le semis :
* Séance du 12 décembre 1969.
(1) Adresse actuelle: Station d'Amélioration des Arbres Forestiers, INRA, 14, rue
Girardet, 54 - Nancy.
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A: jours longs de 16 h;
B : une pulvérisation d'acide gibbérellique (l 00 mg/l avec 0,1 % de
« Tween 80 » comme mouillant) suivie immédiatement d'un transfert des
plantes en régime de jours courts de 10 h ;
C : jours courts de 10 h.
Trois semaines après le début de ces traitements, des ébauches d'in-
florescences apparaissent à l'extrémité des tiges du lot B. La figure 1
montre l'aspect des trois lots, un mois après le début de l'expérience.
Au bout de ce temps, les plantes du lot A étaient les plus hautes, et
en pleine croissance végétative, celles du lot B portaient des boutons
floraux (27 plantes sur 30, soit 90 % ), tandis que celles du lot C avaient
arrêté leur croissance, les apex ayant subi le phénomène d'abscission
précédemment décrit (voir NITSCH, 1959).
La figure 2 montre une inflorescence du lot B. Les fleurs sont appa-
remment normales et capables de donner des fruits (fig. 3).
Nous avons ensuite cherché quelle était la dose minimum d'AG capable
de produire cet effet en une fois, par pulvérisation de plantules âgées de
5 semaines et n'ayant que 3 feuilles vraies au-dessus des cotylédons. Les
doses étaient de 1, 10 et 100 mg/1 d'AG, en présence de 0, 1 % de
« Tween 80 ». Après le traitement, les séries de 10 plantes chacune ont
été transférées en régime de 10 h de lumière par jour. Un mois après,
60 % des plantes traitées à la concentration de 100 mg/l avaient formé
des inflorescences, mais aucun des autres lots ne comportait de bourgeons
floraux. Il semble donc que, lorsqu'on n'emploie qu'une pulvérisation
d'AG sur des plantes très jeunes, les concentrations de 10 mg/1 et
au-dessous soient incapables d'entraîner la mise à fleur.
On peut se demander si la gibbérelline agit directement sur le bourgeon
terminal ou bien si elle doit être appliquée sur les feuilles, qui constituent
généralement les récepteurs de l'induction photopériodique. On sait, par
exemple, que chez les plantes qui ont besoin d'une succession de deux
régimes photopériodiques : jours longs __.,. jours courts, l'effet des jours
longs peut être remplacé par une application d'AG faite sur les feuilles
seulement (ZEEVAART, 1969). Nous avons donc comparé les effets d'appli-
cations d'AG soit sur les feuilles seulement (solution à 100 mg/1 appliquée
au pinceau), soit sur l'apex seulement (quelques gouttes d'une solution

FIG. 1. - Aspect des jeunes plantes 10 semaines après le semis.


De gauche à droite : plante élevée en régime de jours longs (végétative), plante
traitée à l'acide gibbérellique à la 6'' semaine, puis placée en jours courts
(avec inflorescence), plante placée en régime de jours courts à la 6'' semaine (apex
tombé ; entrée en dormance).
FIG. 2. - Détail d'une inflorescence produite par une pulvérisation d'acide gibbé-
rellique suivie d'un transfert en régime de jours courts: il n'y a que 8 nœuds entre
les cotylédons et l'inflorescence.
FIG. 3. - Détail des fruits formés sur une jeune plante traitée à l'acide gibbérellique
5 semaines après le semis, puis placée en régime de jours courts.
(Photos B. Norreel.)
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à 1 000 mg/1 déposée à 4 reprises au moyen d'un pinceau), soit sur les
feuilles ct l'apex par pulvérisation (solution à 100 mg/1). Un mois plus
tard, 40 % des plantes fleurissaient dans la première série, 70 % dans la
deuxième et 60 % dans la troisième. La floraison a donc lieu, que la
gibbérelline soit appliquée sur les feuilles ou sur l'apex seulement.
Rôle des jours courts. - Dans toutes les expériences précédentes, un
transfert du régime initial de jours longs à un régime de jours courts
avait lieu après le traitement à l'acide gibbérellique. Les résultats du
tableau I montrent nettement que les jours courts sont indispensables

TABLEAU 1
EFFET DE LA PHOTOPÉRIODE SUR L'INDUCTION DE LA FLORAISON
DU RHUS TYPHINA PAR L'ACIDE GIBBÉRELLIQUE
Dix plantes par série, traitées 5 semaines après le semis. La concentration d'AG
était de 100 mg/1 dans tous les cas. Jours longs (JL) de 16 h ; jours courts (JC)
de 10 h. Résultats relevés 25 jours après le début des traitements.
Traitements Pourcentages
de plantes fleurissantes
Tween 80 seul, puis JL 0%
» , puis JC 0
Tween + AG , puis JL 0
» , puis JC 60
» , puis 2 JC, puis JL 0
» , puis 4 JC, puis JL 0
» , puis 7 JC, puis JL 0
2 JC, puis Tween + AG, puis JL 0
4 JC, puis Tween + AG, puis JL 0
7 JC, puis l'ween + AG, puis JL 0

à la floraison. En effet, les plantes qui, après le traitement à l'acide


gibbérellique, sont maintenues en régime de jours longs n'ont pas fleuri.
Au contraire, si une période jours courts suit le traitement à l'AG, les
plantes fleurissent. Le nombre de jours courts nécessaires pour produire
cet effet est supérieur à 7 mais inférieur à 25 (tableau I).
CoNCLUSIONS.

Les expériences qui viennent d'être relatées montrent qu'il est pos-
sible de faire fleurir précocement des jeunes semis de Rhus typhina au
moyen d'une seule application d'acide gibbérellique. Cependant, l'acide
gibbérellique ne semble pas constituer le « florigène » à lui seul puisque
la floraison ne survient que si son administration est combinée avec une
période jours courts.
On peut rapprocher les résultats obtenus avec le Rhus typhina de
deux autres séries de faits : l'action de l'AG sur la floraison précoce
de certains conifères, d'une part, sur celle des plantes nécessitant un
changement de photopériode d'autre part.
M. BONNET-MASIMBER f ET J.P. ~ITSCH 407

Dans Je premier cas, des applications de gibbérelline sont capables de


diminuer fortement la durée de la période juvénile pendant laquelle aucune
floraison n'a lieu. Ainsi, il est possible de faire produire des cônes sur
des jeunes plantes de Cryptomeria japonica (KATO et coll., 1958),
Cupressus arizonica (PHARIS et coll., 1965 ; BoNNET-MASIMBERT, 1969),
d'autres Cupressus et Thuja plicata (PHARIS et MoRF, 1968), Chamaecy-
paris lawsoniana (BoNNET-MAsiMBERT, 1969) par simple pulvérisation
d'AG. Dans ces cas, un passage d'une photopériode longue à une photo-
période courte n'est pas nécessaire, du moins pour l'obtention de cônes
mâles chez Cupressus arizonica (BONNET-MAsiMBERT, 1969). Pour l'ob-
tention de cônes femelles, par contre, le passage de JL ~ JC semble
indispensable.
D'autre part, chez les plantes qui ne fleurissent qu'après un changement
de régime photopériodique, par exemple le Bryophyl/um daigremontianum
qui nécessite la séquence JL ~ JC ou le Coreopsis grandiflora qui a
besoin de la séquence inverse, la gibbérelline peut remplacer l'effet des
jours longs, mais non celui des jours courts. Selon l'hypothèse de
CHAILAKHYAN (1961), la floraison nécessiterait la conjonction de deux
types de facteurs, les gibbérellines produites durant les jours longs, et
des facteurs encore inconnus ( << anthésines ») qui seraient synthétisés en
régime de jours courts. Il est pr6bable qu'il en soit de même chez le
Rhus typhina dont la floraison a besoin, pour avoir lieu, de gibbérelline
et de jours courts. L'absence de floraison chez cet arbrisseau au cours
des premières années de végétation serait due à l'absence d'une accumu-
lation de gibbérellines endogènes jusqu'à un niveau suffisant.

INDEX BIBLIOGRAPHIQUE
BoNNET-MASIMBERT (M.), 1969. - Floraison précoce des conifères par appli-
cation d'acide gibbérellique. Silvae Genetica (sous presse).
CHAILAKHIAN (M. Kh.), 1961. - Effect of gibberellins and derivatives of
nucleic acid metabolism on plant growth and flowering. ln: PLANT GROWTH
REGULATION, Iowa State Univ. Press, Ames. Iowa, U.S.A., 531-542.
KATO (Y.), FUKUHARU (N.) et KOBAYASHI (R.), 1958. - Stimulation of flower
bud differentiation of conifers by gibberellin. Abstr. 2nd Meeting lapan
Gibberellin Research Assac., 67-68.
NITSCH (J.P.), 1959. - Réactions photopériodiques chez les plantes ligneuses.
Bull. Soc. Bot. France 106: 259-287.
NITSCH (J.P.), 1965. - Deux espèces photopériodiques de jours courts:
Plu!llbaRo indica L. et P. zeylanica. Bulf. Soc. Bot. France 112 : 517-522.
PHARIS (R.P.) et MüRF (W), 1968. - Physiology of gibberellin-induced
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Substances, F. Wightman et G. Setterfield éd., The Runge Press, Ottawa,
p. 1341-1356.
PHARIS (R.P.), RUDDAT (M), PHILLIPS (C.) et HEFTMANN (E.), 1965. - Preco-
cious flowering of Arizona cypress with gibberellin. Canad. Jour. Bot. 43:
923-927.
ZEEVAART (J.A.D.), 1969. - The leaf as the site of gibberellin action in
flower formation in Bryophyllum daigremontianum. Planta 84: 339-347.

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