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Les politiques de l’environnement : présentation générale

Katheline Schubert
Dans Économie & prévision 2016/1 (n° 208-209), pages I à IV
Éditions Direction générale du Trésor
ISSN 0249-4744
DOI 10.3917/ecop.208.0000
© Direction générale du Trésor | Téléchargé le 17/04/2023 sur www.cairn.info (IP: 196.65.183.240)

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Les politiques de l’environnement :
présentation générale

Économie et Prévision a publié un premier numéro spécial consacré à


(1)
l’économie de l’environnement et des ressources naturelles en 2000 ,
(2)
suivi d’un deuxième en 2009 . Le rythme s’accélère pour ce troisième
numéro spécial, et les préoccupations des chercheurs changent : le
numéro que vous avez entre les mains est presque entièrement
consacré au changement climatique, alors que les numéros précédents
étaient beaucoup plus éclectiques, et l’accent est mis sur la politique
économique. Il ne s’agit pas d’un choix éditorial mais très
probablement du reflet des préoccupations de la société. Les articles
de ce numéro tentent ainsi d’apporter leur pierre à la conception et à la
mise en œuvre de la politique climatique, à un moment où elle apparaît
à la fois terriblement nécessaire et particulièrement timide et fragile.

Fanny Henriet, Nicolas Maggiar et Katheline Schubert, dans un


article intitulé La France peut-elle atteindre l’objectif du Facteur 4 ?
Une évaluation à l’aide d’un modèle stylisé énergie-économie,
construisent, calibrent, et simulent un modèle stylisé de l’économie
française, conçu pour évaluer le niveau de la taxe carbone qui
permettrait d’atteindre l’objectif du Facteur 4, c’est-à-dire de diviser
par quatre les émissions de CO2 à un horizon de quarante ans. Le
modèle utilisé est simple et transparent ; il explicite les hypothèses qui
sont faites sur le progrès technique et sur les possibilités de
substitution entre l’énergie fossile et les autres biens et facteurs.
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L’enseignement principal que l’on peut tirer des simulations est que
l’objectif d’une division par 4 des émissions de CO2 à un horizon de 40
ans ne peut être atteint à l’aide d’une taxe carbone seule, si le taux de
progrès technique sur l’énergie reste à sa valeur historique et si l’on
veut que le niveau initial et le taux de croissance temporel de cette taxe
demeurent raisonnables. Il faut jouer à la fois sur la taxe carbone et sur
un supplément de progrès technique économisant l’énergie fossile.

Mauricio Bermúdez Neubauer, André Grimaud et Luc Rougé,


dans un article intitulé Politiques de recherche et développement, taxe
(1) Économie de l’Environnement
carbone et paradoxe vert, étudient également l’impact d’une taxe
et des Ressources Naturelles, carbone sur les émissions de gaz à effet de serre mais dans un modèle
numéro d’Économie et Prévision où le progrès technique est endogène et décomposé en un progrès
dirigé par Pierre Malgrange, technique permettant d’économiser une ressource non renouvelable et
M i c h e l M o r e a u x e t Mi c h e l polluante et un progrès technique portant sur une ressource
Mougeot, n°143-144, 2000.
(2) Économie de l’Environnement
renouvelable et propre. Les pouvoirs publics taxent les émissions
et des Ressources Naturelles, polluantes et subventionnent les deux secteurs de recherche. Les
numéro d’Économie et Prévision auteurs s’intéressent en particulier à l’apparition éventuelle d’un
dirigé par Dominique Bureau, paradoxe vert, c’est-à-dire l’apparition de situations où la mise en
François Salanié et Katheline œuvre d’une taxe carbone entraîne une augmentation des émissions
Schubert, n° 190-191, 2009.
polluantes à court terme. Ils montrent que la subvention à la recherche
dédiée au secteur propre va à l’encontre de la taxe carbone. Si cette taxe
génère un paradoxe vert, la subvention le modère ; si la taxe ralentit
l’extraction de la ressource, la subvention crée un paradoxe vert.

I
Une autre politique permettant de diminuer l’accumulation du
carbone dans l’atmosphère, la capture du carbone, est envisagée par
Jean-Pierre Amigues, Gilles Lafforgue et Michel Moreaux dans un
article intitulé Des modes de capture du carbone et de la compétitivité
relative des énergies primaires. Ils considèrent une économie
bisectorielle dans laquelle le secteur 1 produit des émissions de
carbone concentrées et peut recourir au Captage et Stockage du
Carbone (CSC), tandis que le secteur 2 produit des émissions diffuses
et n’a donc accès qu’à une technologie de capture atmosphérique
nettement plus coûteuse. En imposant un seuil critique de pollution à
ne pas dépasser, les auteurs montrent qu’il est optimal de commencer à
capturer pleinement les émissions du secteur 1 avant l’atteinte du
seuil. La capture des émissions du secteur 2 n’intervient qu’une fois le
plafond de pollution atteint et n’est que partielle. Enfin, la taxe
carbone optimale doit être croissante durant la phase avant plafond,
puis décroître par paliers jusqu’à zéro.

Dominique Bureau, dans un article intitulé Transition écologique et


investissements verts, introduit dans un modèle de croissance de type
AK un actif non renouvelable qui permet d’analyser les besoins en
capital vert (comme l’investissement dans les énergies renouvelables)
de l’économie. Le rôle du capital vert dans la transition vers une
économie bas carbone dépend notamment des valeurs des élasticités
relatives à la demande pour les services dont la production dégrade
l’environnement et de la substituabilité entre capital vert et ressources
naturelles. L’impact sur le taux d’épargne souhaitable dépend aussi de
la productivité du capital vert et des possibilités d’adapter le capital
existant.

Ruben Bibas, Sandrine Mathy et Meike Fink adoptent une


méthodologie tout à fait différente de celle des quatre papiers
précédents. Le point de départ de leur article, intitulé Elaboration et
analyse macroéconomique d’un scenario bas carbone « acceptable »,
est le constat du déficit d’acceptabilité des politiques climatiques et du
fait que les faibles crédibilité, légitimité et appropriation par les
parties prenantes des scénarios bas carbone sont un frein au
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développement durable. À l’aide d’un processus de concertation
associant 30 parties prenantes issues des ONG et des secteurs public et
privé, ils co-développent un scenario bas carbone qu’elles jugent
acceptable. Les mesures correspondantes sont alors intégrées dans le
modèle technico-économique Imaclim-R France. Les simulations
montrent que le scénario concerté permet de réduire de 68 % les
émissions de CO2 en 2050, résultat proche de l’objectif du Facteur 4.
Les mesures sont bénéfiques pour l’emploi et la croissance
économique, sauf à court terme. Ce résultat constitue un socle solide
sur lequel construire l’acceptabilité des trajectoires Facteur 4.

L’approche d’Olivier Godard est elle aussi très différente et très


générale. Dans un article intitulé Les politiques climatiques
nationales : viser le « Facteur 4 » en 2050 ? Implications des
positionnements cognitifs et éthiques, il analyse la manière dont des
stratégies nationales de lutte contre l’effet de serre des pays
développés peuvent se déterminer en fonction de combinaisons de
positionnements cognitifs et éthiques au regard de scénarios
climatiques mondiaux. L’évaluation des choix de stratégies est menée
sur la période 2011-2050, à partir d’une fonction agrégée des
dommages climatiques mondiaux et du prix de référence du carbone à
introduire pour mener l’économie vers la cible du Facteur 4 en 2050.
L’objectif principal de l’article est de déterminer quelles

II
configurations permettent de justifier la cible du Facteur 4 en 2050
pour des États de petite et moyenne taille. Seules deux y parviennent :
un « cosmopolitisme dynastique fort de type prédictif » et
l’« universalisme ‘kanto-millien’ ». Toutes deux incorporent un prix
du carbone élevé et un taux d’actualisation faible.

Enfin, Stéphanie Monjon dans un article intitulé Réduire au-delà de


20 % les émissions de gaz à effet de serre dans l’Union européenne :
quelles conséquences sur les secteurs intensifs en énergie européens ?
étudie le système communautaire d’échange de quotas d’émission de
gaz à effet de serre. La récente crise économique a fait plonger le signal
prix généré par l’instrument et fait craindre que les investissements
nécessaires à la transition vers une société sobre en carbone soient
retardés. La Commission européenne a alors proposé de renforcer
l’objectif du système, ce qui pourrait augmenter les fuites de carbone
dans les industries exposées à la concurrence internationale. L’article
analyse l’impact du durcissement de la contrainte à l’aide d’un modèle
statique d’équilibre partiel. Différents modes d’allocations des quotas
d’émissions sont analysés, notamment à travers leurs impacts sur les
fuites de carbone sectorielles et la production industrielle.

Les deux derniers articles ne portent pas sur le changement climatique.


Le premier s’intéresse à l’impact local sur la santé et plus précisément
les pathologies respiratoires des émissions de dioxyde de soufre. Le
second a au contraire une ambition macroéconomique puisqu’il
présente une évaluation globale des mesures du Grenelle de
l’environnement.

Emmanuelle Lavaine, dans son article intitulé L’impact de la


production d’énergie sur les pathologies respiratoires : le cas de la
raffinerie des Flandres, utilise l’arrêt des activités de la raffinerie des
Flandres en septembre 2009 comme expérience naturelle. Elle montre
tout d’abord que l’arrêt de l’activité de raffinage, suivi en 2010 par la
fermeture définitive de la raffinerie, diminue la concentration locale
en SO2. Ce choc exogène sert ensuite à étudier l’impact sanitaire d’une
importante concentration en SO 2 qui résulte de la production
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d’énergie. Les estimations suggèrent que la diminution de la
concentration en SO2 a réduit significativement la sévérité des
pathologies respiratoires.

Marie-Laure Guillerminet, Philippe Briard, Pierre Fery, Elodie


Galko, Caroline Klein et Timothée Ollivier, dans un article intitulé
Impacts macroéconomiques sur la croissance et l’emploi à
court-moyen terme des investissements associés au Grenelle de
l’environnement, examinent ex ante les effets sur l’emploi et la
croissance des principales mesures économiques du Grenelle de
l’Environnement à court et moyen termes à l’aide du modèle
macroéconométrique Mésange. Leur résultat principal est que ces
mesures auraient un impact positif sur le PIB et l’emploi à court terme,
principalement lié au multiplicateur de l’investissement, et un impact
négatif à moyen terme en raison du ralentissement des investissements
et de la hausse des prélèvements obligatoires nécessaires à leur
financement. Ces résultats sont robustes pour différentes hypothèses
en matière d’évolution des prix du pétrole, de comportement
d’épargne des ménages, de mode de financement des mesures et de
gains de productivité associés aux nouveaux projets de transports. Ils
ne prennent toutefois pas en compte les effets du Grenelle sur
l’environnement, la compétitivité et le bien-être.

III
La sélection d’articles présentés ici n’a évidemment pas la prétention
d’épuiser le champ, mais elle reflète bien quoique partiellement l’état
de la réflexion des économistes en matière de politique climatique. Par
ailleurs ce numéro reproduit un Trésor-Éco sur la manière dont le
secteur financier pourrait accompagner la transition vers une
économie bas-carbone résiliente au changement climatique. Le
prochain numéro spécial pourrait être consacré à l’autre grand
problème environnemental global, la perte de la biodiversité, pour
l’analyse duquel les progrès restant à faire sont immenses.

Katheline Schubert

École d’Économie de Paris, Université Paris 1


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IV

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