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Bachelor of Law with Honours P/T La Responsabilité Délictuelle - 1ère Semaine 2015

1re semaine : Introduction à la responsabilité délictuelle

Le droit des obligations est la partie du droit civil qui régit les rapports
unissant un créancier et un débiteur. Elle comprend le droit du contrat (les
obligations contractuelles) et le droit de la responsabilité (obligations
délictuelles).

Distinction entre la responsabilité contractuelle et la responsabilité


délictuelle

La responsabilité contractuelle sanctionne le dommage subi par un


contractant lors de l’inexécution d’un contrat. La responsabilité contractuelle
suppose l’existence d’un contrat valable et le dommage doit être la
conséquence directe de l’inexécution du contrat.

La responsabilité délictuelle entre en jeu quand une personne cause un


dommage illicite à une autre personne envers laquelle elle n’est liée par
aucun rapport d’obligation préexistante.

Le principe de non-cumul

Un plaignant ne peut cumuler la responsabilité délictuelle et contractuelle. Il


ne peut pas non plus opter pour le régime qui lui apporterait plus
d’avantages.

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Le principe du non-cumul a évolué en principe du non-option: Vide l’arrêt


SOTRAMON LTD. v. MEDITERRANEAN SHIPPING CO. LTD. 2013 SCJ
135

Le principe de non-cumul interdit à la victime, non seulement de cumuler ou


de combiner les deux régimes de responsabilité, mais encore de choisir l’un
ou l’autre. Si les conditions de mise en jeu de la responsabilité
contractuelle sont réunies, ses règles doivent s’appliquer, sinon il
convient de se référer à celles de la responsabilité délictuelle. La victime ne
peut pas choisir les règles qui lui sont les plus favorables. Les articles 1382
et suivants du Code Civil (le régime délictuel) ne peuvent pas être invoqués
à l’appui d’une demande tendant à la réparation d’un préjudice résultant,
pour l’une des parties à un contrat. Le régime délictuel ne peut être utilisé
lorsqu’il y a eu une faute commise par une des parties dans l’exécution d’une
obligation contractuelle.

La responsabilité délictuelle

Le principe de la responsabilité délictuelle est énoncé dans

- l’article 1382, aux termes duquel “tout fait quelconque de l’homme qui
cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est
arrivé à le réparer” ; et

- l’article 1383 qui précise que: “Chacun est responsable du dommage


qu’il a causé, non seulement par son fait, mais encore par sa
négligence ou par son imprudence.”

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Délits et quasi délits

L’art. 1382 et 1383 du CCM sont placés sous la rubrique «délits et quasi-
délits» mais le Code ne donne pas une définition à ces deux expressions.

Le délit civil, c’est tout fait illicite et dommageable commis avec l’intention
de nuire.

Le quasi-délit, c’est tout fait illicite et dommageable commis sans intention


de nuire.

La différence qui les sépare est purement psychologique: le délit suppose


chez son auteur la volonté de nuire, c’est-à-dire la faute intentionnelle,
tandis que le quasi-délit comprend tous les actes illicites et dommageables
non intentionnelles, résultant d’une simple imprudence ou négligence. Dans
les deux cas le Code oblige pareillement l’auteur du fait dommageable à en
fournir réparation complète, que la faute soit ou non intentionnelle.

Séparation de la responsabilité civile et pénale

Les délits civils englobent tous les faits fautifs causant à autrui un dommage
alors que dans le droit pénal, se plaçant uniquement au point de vue de la
répression, le mot ‘délit’ désigne tous les faits dangereux pour l’ordre social
retenus comme infractions et punis d’une peine. Cette différence
fondamentale entre les deux notions entraine des différences essentielles
entre la responsabilité civile et la responsabilité pénale.

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(i) La sanction n’est pas la même. Le délit pénal expose


son auteur à une peine proportionnée à la gravité de la
faute, en vue de décourager une telle conduite par la
crainte du châtiment. Il peut s’agir d’une peine
d’emprisonnement ou d’une amende prévue par la loi
et fixée par la Cour en fonction de la gravité de l’acte.
Le délit civil n’est sanctionné que par une
condamnation pécuniaire, par des dommages-intérêts
tendant à la réparation du préjudice causé à la victime,
sans qu’on tienne compte du degré de gravité de la
faute.

(ii) La responsabilité pénale est mise en jeu par l’action


publique, à travers un avocat du bureau du Director of
Public Prosecution ou un agent de police habilité à
représenter le Director of Public Prosecution (appelé le
‘Prosecutor’). La « victime » de la faute est appelée
comme témoin de la poursuite. La responsabilité civile
est mise en jeu par une action civile et le demandeur
est la personne lésée.

(iii) Les deux catégories de délits ne comprennent pas les


mêmes faits. D’une part, beaucoup de délits civils ne
constituent pas des infractions à la loi pénale : tout fait
dommageable constitue un délit civil et oblige à
réparation; au contraire les infractions pénales sont les
actes considérés comme dangereux pour l’ordre social
et sont limitativement prévus et punis par la loi
répressive. Il s’agit du principe nulla poena sine lege,

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c’est-à-dire, il n’y a pas d’infraction sans une loi écrite


interdisant l’acte en question. Vide Section 10(4) de la
Constitution.

D’autre part, certaines infractions pénales qui


menacent l’ordre public, sans causer aucun dommage
individuel, ne constituent pas des délits civils, par
exemple le vagabondage, le port d’arme prohibées ou
l’excès de vitesse, l’excès d’alcool au volant.

Cependant, il arrive très fréquemment qu’un même


fait, violant la loi répressive et causant en même temps
un dommage à un particulier, constitue à la fois un délit
pénal et un délit civil. Exemple : un accident de la
route, le chauffeur peut être poursuivi au pénal pour
conduite imprudente (sous Section 123C du Road
Traffic Act pour «driving without due care») et la
victime de l’accident peut poursuivre le chauffeur au
civil pour réclamer une indemnisation sous forme de
dommages-intérêts.

La faute et les présomptions de faute ou de responsabilité

(a) La faute

En vertu de l’art. 1382 du CCM, pour que l’auteur d’un dommage soit tenu à
réparer, il faut que ce dommage soit dû à sa faute. La faute est soit
intentionnelle lorsque l’auteur a voulu causer un dommage à autrui ou elle

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peut consister en une simple imprudence ou négligence. Il revient à la


victime de prouver la faute, intentionnelle ou pas.

(b) Les présomptions de faute ou de responsabilité

Le Code dispense, dans certains cas spécifiques, la victime de la preuve de


la faute du défendeur, en présumant cette faute. Ce sont alors les
hypothèses de responsabilité du fait d’autrui ou du fait des choses, prévues
par les articles 1384, 1385 et 1386 du CCM (voir les notes pour les semaines
4, 5, 6 et 7).

Un dommage ayant été causé par une personne ou par une chose, un
individu est présumé responsable, parce qu’il est présumé avoir mal veillé
sur cette personne sous sa charge ou cette chose dont il avait la garde. En
matière de responsabilité du fait des choses, la présomption de faute a fait
place à une présomption de responsabilité, aussi appelé «responsabilité de
plein droit».

Évolution de la responsabilité civile

La responsabilité délictuelle est traditionellement fondée sur l’idée de faute,


mais depuis la fin du 19ème siècle, en raison de la multiplication des
accidents dûs aux progrès du machinisme, on a cherché à élargir la théorie
classique de la responsabilité en contestant son fondement, la faute, en
tentant de rejeter l’idée subjective de culpabilité de l’agent et de la
remplacer par l’idée plus objective de risque créé par l’activité.

Peu à peu la notion traditionnelle de faute est devenue insuffisante suite à la


révolution industrielle avec notamment d'important progrès techniques qui

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amènent un développement du machinisme. Ce développement


s’accompagne d'un accroissement de la dangerosité, et en matière civile les
dommages se multiplient et s’aggravent. On parle de plus en plus
d'accidents: accident du travail, de la route, médicaux.

Or, le problème c'est que bien souvent il n'y a pas de faute à la source de
l'accident. Si c'est bien le cas, la victime qui se trouve dans l'impossibilité de
prouver une faute risque de ne pas recevoir d'indemnisation. On réalise à ce
moment que la notion de faute va apparaître comme trop étroite pour
demeurer le seul fondement de la responsabilité civile. Pour pouvoir
s'élargir, la responsabilité avait donc besoin de nouveaux fondements qui
permettent de pallier les insuffisances de la ‘faute’.

 
Les fondements de la responsabilité civile

A l’origine, le seul fondement de la responsabilité était la faute. Il y a par la


suite eu l’émergence d’autres fondements : le risque et la garantie.

La faute  : responsabilité subjective

Comme mentionné ci-dessus, les auteurs du Code Civil ont fondé le principe
général de la responsabilité sur la faute. L’idée était d’exiger que l’auteur
d’un dommage ait à réparer le dommage qui résulte de sa faute. Cette
responsabilité uniquement fondée sur la faute est dite subjective car elle
s’appuie sur une analyse du comportement de l’auteur du dommage. Sa
conséquence pratique la plus marquante est d’obliger la victime de prouver
la faute de l’auteur du dommage pour obtenir réparation.

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Le risque: un élément d’objectivité

La théorie du risque a été proposée dès la fin du 19ème siècle par Saleilles
et Josserand. L’idée de base est que celui qui agit et cause un dommage par
cette action doit le réparer. La responsabilité fondée sur le risque est dite
objective car elle ne résulte plus d’une analyse du comportement, mais
d’une constatation matérielle: est responsable celui qui a causé le dommage.

La garantie: emphase sur le comportement de la victime

La théorie de la garantie a été proposée plus récemment par Boris Starck.


L’idee essentielle est de rechercher le fondement de la responsabilité non
plus dans le comportement de l’auteur du dommage mais chez la victime:
c’est l’atteinte portée aux droits de la victime qui justifie la réparation du
dommage qu’elle a subi.

Les soucis d'indemnisation des victimes

Au fil du 20ème siècle, les impératifs de la responsabilité se transforment,


l'essentiel n'est plus de moraliser et de réprimer des conduites individuelles.
On est passé de l'impératif de sanction du responsable au souci de
protection de la victime. La faute qui, jusque-là, permettait l'identification du
responsable va devenir un obstacle à l'indemnisation de la victime. Si la
victime n'arrivait pas à prouver la faute, elle se retrouvait sans réparation.

On a compris que, juridiquement, pour favoriser l'indemnisation il était


nécessaire de minimizer le rôle de la faute et de justifier des responsabilités
sans faute. C'est ce à quoi vont s'employer les théories du risque et de la

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garantie. La Jurisprudence s'est montrée créative et audacieuse (voire l’arrêt


Rose-Belle SE v. Chateauneuf) et le législateur a créé des cas de
responsabilité sans faute (Art. 1384 à 1386 du CCM).

Aujourd'hui, c'est bien plus le dommage qui engendre la responsabilité civile


que le comportement du responsable.

Les soucis de la solidarité avec les responsables

          Au fil du développement du souci d'indemnisation des victimes, on


réalise que la structure individualiste de la société est de plus en plus
inadaptée. Il va alors apparaître le souci corollaire de ne plus faire peser le
poids de la réparation sur les seuls responsables. On va se mettre à assister
au déclin de la responsabilité individuelle parallèlement à la socialisation des
risques. Cette socialisation des risques a contribué à répartir le poids de
l'indemnisation des dommages sur la collectivité toute entière, elle s'est
mise en place par différents mécanismes tels que l’assurance.

Le rôle de l’assurance en responsabilité délictuelle

L'assurance est un mécanisme de socialisation des risques qui s'est


développé à Maurice à partir de la loi Act No. 7 de 1983 et qui a permis une
meilleure réparation du coût des risques afin d'indemniser les victimes en
évitant de faire supporter tout le poids du dommage à l'auteur. Cette
extension de l'assurance a d'abord été spontanée puis a été rendue en parti
obligatoire notamment pour certaines activités dangereuses. Par exemple,
l’assurance automobile est obligatoire.

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Le développement de l'assurance a permis aux tribunaux de retenir la


responsabilité civile beaucoup plus facilement en l'interprétant de manière
plus souple. Ils ont donc donné une grande efficacité aux contrats
d'assurance mais, par le jeu de l'assurance, le responsable n'est plus
vraiment le débiteur de la réparation, il va apparaître comme le fournisseur
de l'assurance.

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