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Le statut de l’erreur

Jean-Pierre Astolfi, didacticien et professeur de sciences de l’éducation à l’Université de Rouen,


s’interroge longuement sur le statut de l’erreur dans les apprentissages. Premier constat: l’erreur
scolaire est plutôt source d’angoisse alors qu’en dehors de l’école (dans le domaine sportif par
exemple) elle est davantage source de défi pour les jeunes. Le didacticien identifie ensuite les
principaux types d’erreurs scolaires pour lesquelles il propose médiations et remédiations. Une manière
de transformer l’erreur en tremplin afin de débloquer les démarches d’apprentissage.
Quel est le statut de l’erreur à l’école? Pour Jean-Pierre Astolfi, l“aversion spontanée pour l’erreur, et le
rejet didactique qui en résulte souvent, correspond d’abord à une certaine représentation de l’acte
d’apprendre, représentation largement partagée par les enseignants, les parents et le sens commun.”
Dans l’idée d’une acquisition naturelle des connaissances, les erreurs ne peuvent être considérées que
comme des “ratés” de l’apprentissage. Symptôme d'une incompétence quelconque, l’erreur est alors
synonyme de “faute” ou de “bogue” au sens informatique.

Typologie des erreurs en 8 cas selon la nature du diagnostic

- Lorsque l'erreur est assimilée à une faute, elle est à la charge de l'élève.  Dans ce cas, le modèle
sous-jacent de l'enseignant est un modèle transmittif.
- Quand l'erreur est assimilée à un "bogue", elle est à la charge du concepteur de programme qui ne
s'est pas suffisamment adapté au niveau réel de l'élève ; le modèle sous-jacent peut alors être qualifié de
comportementaliste.
- Mais dès que l'erreur devient "indicateur de processus" et qu'elle intéresse l'enseignant, elle revêt
un caractère nettement plus positif. Ici, le modèle pédagogique est constructiviste. L'erreur devient le
"témoin des processus intellectuels en cours comme le signal de ce à quoi s'affronte la pensée de l'élève
aux prises avec la résolution d'un problème. L'erreur devient alors créatrice au lieu d'être destructrice.

1) complexité propre au contenu d'enseignement 

Certaines erreurs peuvent être causées par la complexité propre au contenu d’enseignement.
Insuffisamment perçue, la complexité interne peut être source de difficulté systématique.

2) conceptions alternatives 

Certaines erreurs témoignent des conceptions alternatives des élèves (appelées plus communément
représentations).
  Afin de modifier le statut que l’on donne à ce type d’erreurs, il s’agit en premier lieu d’analyser les
représentations et les obstacles sous-jacents à la notion étudiée. La prise en compte didactique nécessite
un travail d’écoute, de compréhension, d’identification, de comparaison et de discussion avec les
élèves.

3) démarches étonnantes 

Face à une réponse attendue, les démarches étonnantes sont parfois trop rapidement étiquetées comme
fausses.
  L’analyse de la diversité des procédures possibles peut donc se révéler très utile. De plus, les
stratégies variées sont susceptibles d’être source d’évolutions chez les élèves. “Au lieu de juger
erronées de telles stratégies, mieux vaut leur permettre de les exprimer collectivement, les étonner par
une diversité qu’ils n’imaginent pas et proposer à toute la classe d’appliquer successivement plusieurs
des idées émises”
4) difficulté de compréhension de consignes 

Les erreurs peuvent relever de difficultés de compréhension des consignes. 


 Afin d’y remédier, le didacticien propose d’effectuer un travail sur la compréhension des consignes
(multiplier les consignes possibles à partir d’un même support, analyser et reformuler des consignes,
etc.). Selon lui, “on peut aussi inverser les habitudes scolaires et proposer une réponse en demandant de
retrouver quelle pouvait être la question.”

5) emprunt à une autre discipline 

Autres erreurs fréquentes que celles qui trouvent leur origine dans une autre discipline. En effet, un
élève qui n’a pas réinvesti en physique ce qu’il a appris en mathématiques risque de se voir sanctionné
- parfois injustement - pour cause de non-transfert entre disciplines. 
Des traits de structure et des traits de surface coexistent entre deux disciplines et il faut en être
conscient. Le transfert des connaissances est une opération à construire. Pour Jean-Pierre Astolfi, il est
indéniable que l’école “doit postuler et organiser un tel transfert”. Mais il ajoute immédiatement: “Le
transfert, c’est aussi un travail permanent à faire et non le ”simple” transport d’une compétence
acquise. Toute activité intellectuelle authentique consiste à rapprocher deux contextes, afin d’en
apprécier les différences et les similitudes.”

6) habitudes scolaires 

Les erreurs peuvent aussi résulter d’habitudes scolaires et d’un mauvais décodage des attentes qui
“conduisent à des résolutions coutumières qui font l’économie d’une construction notionnelle”. 
 Pour remédier à ces obstacles didactiques, il s’agit d’analyser le contrat didactique en vigueur et de
procéder à un travail critique sur les attentes.

7) opérations intellectuelles 

D’autres erreurs sont directement liées aux opérations intellectuelles impliquées, c’est-à-dire à “la
diversité des opérations intellectuelles pour résoudre des problèmes en apparence proches”. 
 Des exercices apparemment proches mettent en jeu des compétences logico-mathématiques diverses et
cela mérite d’être analysé. En guise de traitement didactique, il s’agit d’opérer une sélection plus stricte
des exercices et des activités.

8) surcharge cognitive

Les erreurs sont quelquefois dues à une surcharge cognitive. 


 La charge mentale de l’activité devrait être mieux évaluée et l’activité décomposée en sous-tâches,
plus faciles à gérer au niveau de la mémoire. 

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