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Cours de Droit

Année académique
des Nations Unies
22/23

Par M. Abdourahmane Mbodj Diop


Doctorant en Droit international
FSJP/UCAD
Chargé d’enseignement et de
recherche

Contact : abdoumbodjdiop1994@gmail.com
Bibliographie Indicative

 David. Camille – Jacquemin, Thomas. Les Nations Unies : une


organisation contestée : Au cœur de la politique internationale, 50
minutes.fr, 2015.
 Denis Alland, Manuel de droit international public, PUF, 3ème mise à jour,
2015.
 Chevron, Jean-Jacques, Les Nations Unies, Nane Editions, 2018.
 Hélène Simonian-Gineste, Fiches d’Institutions Internationales, 4ème éd.,
Ellipses, 2018.
 Jean-Claude Zarka, Institutions Internationales, 7ème éd. Ellipses, 2017.
 Jean-Claude Zarka, Relations Internationales, 5ème éd., Ellipses, 2013.
 Seydou Nourou Tall, -Droit des organisations internationales africaines,
l’Harmattan, 2015.
 Pierre Marie-Dupuy – Yann Kerbrat, Droit International Public, Précis,
Dalloz, 2020.
Objectif du cours
L’objectif du présent cours est de rendre compte, sans prétention aucune à
l’exhaustivité, de l’essence des règles qui régissent le « système onusien ».
La démarche dont nous avons fait l’option sera de ne pas essentiellement
circonscrire l’étude autour des règles juridiques mais aussi de privilégier l’angle
institutionnel. A cet égard, en plus des règles dont la maitrise est fondamentale,
le présent support se donne l’ambition de mettre en relief, non sans simplicité,
l’architecture institutionnelle dont l’ONU est l’incarnation mais aussi de voir la
manière dont elle fonctionne.
Introduction
L’Organisation des Nations unies, créée à San Francisco le 25 juin 1945,
succède à la Société des Nations (SDN) qui échoua dans sa mission
d’universalisme et de maintien de la paix. Élément révélateur de l’hégémonie
des États-Unis sur l’Organisation universelle, le siège de l’ONU a été fixé à New
York et non plus à Genève comme c’était le cas pour la Société des Nations.
Élaboré à l’hôtel Dumbarton Oaks de Washington par la Chine, les États-Unis,
le Royaume-Uni et l’URSS, le projet d’Organisation des Nations unies et la
Charte de l’ONU furent entérinés par 51 pays en 1951.
Née en 1945, du rêve de paix des nations au sortir de la Seconde Guerre
mondiale, l’ONU a fêté en 2017 son 72e anniversaire. Au titre de ses réussites,
on a l’habitude de citer la renaissance de l’État cambodgien où l’aide de
l’Organisation a été importante ou encore la création d’une justice
internationale, avec les tribunaux sur l’ex-Yougoslavie ou sur le Rwanda puis la
mise en place d’une Cour pénale internationale permanente. Il faut également
mentionner ses contributions réussies au rétablissement de la démocratie et de la
paix au Salvador, au Mozambique et en Afrique du Sud par exemple.
Mais depuis de nombreuses années, elle connaît une sérieuse crise de crédibilité.
En effet, on a stigmatisé l’incapacité de l’Organisation à venir à bout de confl its
comme ceux de l’ex-Yougoslavie et de la Somalie. Comme l’a très justement
remarqué son secrétaire général, Boutros Boutros-Ghali « la guerre du Golfe a
donné une trop grande crédibilité aux Nations unies » (entretien à Libération du
12 janvier 1995). Effectivement, dans la situation nouvelle de l’après-guerre
froide, on avait parlé de « nouvel ordre mondial » et certains avaient prédit que
l’ONU allait devenir le « gendarme international » qui interviendrait
militairement pour mettre fin à tous les conflits menaçant la paix du globe.
Il faut rappeler que durant quatre décennies, l’organisation mondiale a été
souvent synonyme d’inertie et cela notamment en raison de la guerre froide. Ni
le Viêt-nam, ni la Tchécoslovaquie ou encore l’Afghanistan n’ont fait l’objet de
sanctions décidées par l’Organisation universelle. À l’occasion de chaque
grande crise internationale, le Conseil de sécurité fut paralysé par l’utilisation du
droit de veto. Mais la nouvelle situation internationale est en réalité, comme le
constate l’ancien secrétaire général de l’Organisation, « plus difficile que celle
de la guerre froide » et nous verrons que l’ONU doit s’adapter au nouveau
contexte international.
D’autre part, la bureaucratie onusienne, qualifiée jadis de « machin » par Charles
de Gaulle, est très critiquée. Déjà, en 1969, le rapport Jackson qualifiait le
système onusien de « monstre préhistorique ».
Quoi qu’il en soit, force est d’admettre que l’Organisation des Nations unies
constitue aujourd’hui le seul véritable forum international et donc un espace de
dialogue et de concertation irremplaçable.
En outre, il ne faut pas perdre de vue que l’Organisation universelle a également
pour but de contribuer au développement économique et social.
En effet, la Charte des Nations unies, dans son préambule, assigne à
l’Organisation aussi bien de maintenir la paix et la sécurité internationale que de
« favoriser le progrès économique et social de tous les peuples ». Boutros
Boutros-Ghali a eu raison de rappeler que « 70 % de l’activité des Nations unies
sont consacrés aux questions de développement » ; ce que l’opinion publique a
tendance à ignorer.
De plus, le progrès social inscrit dans la Charte de 1945 n’est pas uniquement un
principe généreux. C’est un principe générateur de paix.
Effectivement, « il existe une évidente complémentarité entre le maintien de la
paix et la promotion du développement. Les facteurs économiques et sociaux
pèsent d’un poids important dans la plupart des conflits actuels.
De surcroît, les situations de guerre aggravent considérablement le sous-
développement des États. Il ne peut donc y avoir de paix efficace sans
développement, ni de développement durable sans la paix ».
Le 21 mars 2005, le secrétaire général de l’Organisation, Kofi Annan, a
présenté un rapport ambitieux (« Dans une liberté plus grande : développement,
sécurité et respect des droits de l’homme pour tous ») pour réformer
l’organisation internationale, fragilisée par la guerre en Irak de 2003 ; une
organisation qui a également dû faire face à toute une série de scandales, en
particulier dans sa gestion du programme « pétrole contre nourriture ».
Kofi Annan a notamment proposé d’élargir la composition du Conseil de
sécurité.
Mais, en septembre 2005, le sommet du 60e anniversaire de l’ONU n’a pas
débouché sur des résultats concrets. Aucun accord n’a pu être trouvé sur
l’élargissement du Conseil de sécurité. Toutefois, la décision a été prise de créer
un Conseil des droits de l’homme en lieu et place de la Commission des droits
de l’homme.
Les États membres ont également décidé d’instituer « une Commission de
consolidation de la paix en tant qu’organe intergouvernemental consultatif »
ayant vocation à aider les États sortant d’un conflit armé.
Le 18 septembre 2017, le président Trump a ouvert les débats de l’Assem-blée
générale de l’ONU avec une initiative pour rendre l’Organisation « plus
performante et efficace ». Le président américain, qui a dénoncé la «
bureaucratie » et la « mauvaise gestion » de l’ONU, a obtenu la signature de 126
pays au bas d’une déclaration appelant à une réforme de l’Organisation.
L’administration Trump a souhaité mettre cette dernière sous pression pour
qu’elle se réforme. Les États-Unis qui sont le premier contributeur au budget
onusien ont menacé de réduire leur contribution financière.
On constatera tout d’abord la complexité du « système onusien » en examinant
la structure institutionnelle de l’ONU (chapitre 1.). Puis, nous rendrons compte
des problèmes soulevés par le régime juridique de la participation des États
(chapitre 2.) avant de considérer le bilan de l’Organisation en ce qui concerne le
maintien de la paix (chapitre 3).
Chapitre 1 : La structure juridico-institutionnelle de l’ONU
Il convient d’exposer successivement les organes principaux (A.), les organes
subsidiaires (B.), les institutions spécialisées (C.), et les organisations
autonomes (D.) qui caractérisent le « système onusien ».
A. Les organes principaux
Les organes principaux de l’ONU sont l’Assemblée générale (a), le Conseil de
sécurité (b), le Conseil économique et social (c), le Conseil de tutelle (d), la
Cour internationale de justice (e) et le Secrétariat (f).
a. L’Assemblée générale
1. Composition
Elle se compose de tous les États membres des Nations unies. Chacun d’eux a le
droit d’avoir 5 représentants à l’Assemblée générale mais ne pourra disposer que
d’une voix dans les votes.
2. Les sessions
L’Assemblée générale tient une session ordinaire chaque année à partir du mois
de septembre. L’Assemblée générale peut aussi se réunir en session
extraordinaire lorsque les circonstances l’exigent soit à la demande du Conseil
de sécurité, soit sur demande de la majorité des membres des Nations unies.
3. Le Bureau
Au début de chaque session, un Bureau, qui dirigera les travaux de l’Assemblée
générale, sera élu. Il se compose d’un président, de vice-présidents et des
présidents des commissions. Le président de l’Assemblée générale joue un rôle
essentiel au niveau du bon fonctionnement de la session.
4. L’organisation du travail
Le travail de l’Assemblée générale peut se faire soit en séance plénière, soit en
commission. Il existe plusieurs commissions dont chacune est spécialisée dans
son domaine.
Commissions Attributions
La 1re Commission Questions politiques et de sécurité
La Commission politique spéciale Certaines questions politiques
La 2e Commission Questions économiques et financières
La 3e Commission Questions sociales, humanitaires et
culturelles
La 4e Commission Questions de tutelle
La 5e Commission Questions administratives et budgétaires
La 6e Commission Questions juridiques
5. Les prises de décision
En commission, les votes sont acquis à la majorité simple des membres présents
et votants. À l’Assemblée plénière, il convient de distinguer deux cas de figure.
Pour les questions importantes, on vote à la majorité des deux tiers des membres
présents et votants. Les questions importantes, énumérées par la Charte des
Nations unies, sont :
– les recommandations relatives au maintien de la paix et de la sécurité
internationale ;
– l’élection des membres non permanents du Conseil de sécurité ;
– l’élection des membres du Conseil économique et social ;
– l’élection des membres du Conseil de tutelle ;
– l’admission de nouveaux membres dans l’Organisation ;
– la suspension des droits et privilèges de membres ;
– l’exclusion de membres ;
– les questions relatives au fonctionnement du régime de tutelle et les questions
budgétaires.
Pour toutes les autres questions, on vote à la majorité simple des membres
présents et votants.
6. Les compétences de l’Assemblée
Les compétences de l’Assemblée générale sont très nombreuses. Il faut
distinguer les compétences qui sont spécifiques à l’Assemblée de celles qu’elle
partage avec les autres organes principaux des Nations unies.
Parmi les compétences propres de l’Assemblée générale, il faut relever
notamment : le vote du budget de l’ONU, l’examen des rapports des autres
organes de l’ONU, le développement de la coopération internationale dans les
domaines économique, social, culturel et dans celui de la protection des droits de
l’homme.
S’agissant des compétences partagées de l’Assemblée générale, on doit signaler
qu’elle a la faculté de « discuter de toute question se rattachant au maintien de la
paix et de la sécurité internationale ». Cependant, « toute question de ce genre,
qui appelle une action, est renvoyée au Conseil de sécurité par l’Assemblée
générale, avant ou après discussion » en vertu de l’article 11 de la Charte des
Nations unies. De plus, d’après l’article 12 de la Charte, lorsque le Conseil de
sécurité s’occupe d’une question de paix et de sécurité, l’Assemblée générale «
ne doit faire aucune recommandation sur cette situation ou ce différend à moins
que le Conseil de sécurité ne le lui demande ». Il en résulte une subordination
évidente de l’Assemblée générale au Conseil de sécurité.
b. Le Conseil de sécurité
1. Composition
Le Conseil de sécurité est un organe restreint qui comprend deux types de
membres : des membres permanents et des membres élus.
La Chine, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis, et la Russie, qui occupe
désormais, depuis janvier 1992, le siège initialement dévolu à l’URSS,
constituent les cinq membres permanents du Conseil de sécurité.
De plus, le Conseil comporte dix membres non permanents élus pour deux ans
par l’Assemblée générale, renouvelés par moitié chaque année.
À l’origine, c’est-à-dire avant la révision de la Charte intervenue en 1963, qui
entra en vigueur en 1965, le Conseil de sécurité ne comprenait que 6 membres
non permanents.
2. Organisation
Le Conseil de sécurité présente la particularité d’être un organe permanent. En
eff et, selon l’article 28 de la Charte, il est organisé « de manière à pouvoir
exercer ses fonctions en permanence ». Ayant vocation à gérer les crises
internationales, le Conseil de sécurité doit être effectivement en mesure de
siéger chaque fois que la paix est menacée. C’est pourquoi chaque État membre
du Conseil doit disposer d’un représentant permanent à New York, au siège de
l’Organisation. Le Conseil de sécurité est le seul organe des Nations unies à
avoir un caractère permanent.
La présidence du Conseil est tournante. Chaque mois, il est présidé
alternativement par le représentant permanent de chaque État membre du
Conseil, suivant l’ordre alphabétique anglais. Cette présidence assurée par
roulement permet d’éviter que le Conseil ne soit victime de l’influence d’une
puissance particulière.
Il peut arriver que les ministres des Affaires étrangères soient amenés à
représenter leur État au Conseil de sécurité. On se souvient du discours
prononcé le 14 février 2003 par le ministre français des Affaires étrangères,
Dominique de Villepin, lors de la crise irakienne. D’autre part, plusieurs
réunions du Conseil de sécurité ont été organisées au niveau des chefs d’État ou
de gouvernement. La première réunion au sommet du Conseil de sécurité a eu
lieu le 31 janvier 1992 pour débattre de la question de la responsabilité du
Conseil en matière de paix et de sécurité internationale. Ce premier sommet du
Conseil de sécurité avait demandé au nouveau secrétaire général de l’ONU,
Boutros Boutros Ghali, de préparer un rapport sur « le moyen de renforcer la
capacité de l’Organisation des Nations unies dans les domaines de la diplomatie
préventive, du maintien et du rétablissement de la paix, et sur la façon
d’accroître son efficacité dans le cadre des dispositions de la Charte ».
Le 24 septembre 2009, une autre réunion au sommet du Conseil de sécurité a
adopté à l’unanimité la résolution 1887 sur le désarmement et la non-
prolifération nucléaire.
3. Les prises de décision
Pour les questions de procédure, les décisions sont adoptées par un vote
affirmatif de 9 membres sur les 15 (avant la réforme de 1965, les décisions
étaient prises à la majorité de 7 voix).
Pour toutes les autres questions, les décisions du Conseil de sécurité sont prises
par « un vote affirmatif de 9 de ses membres dans lequel sont comprises les
voix de tous les membres permanents ». C’est le fameux « droit de veto » qui
permet à chacune des 5 grandes puissances de bloquer le mécanisme de vote.
Cette primauté reconnue aux membres permanents va à l’encontre du principe
de « l’égalité souveraine » des États consacré par la Charte. Celle-ci « préfère
l’inaction de l’Organisation, le non-accomplissement de ses responsabilités dans
une crise donnée, à une action susceptible de mettre l’ONU en conflit avec l’un
des Cinq ».
Dans son rapport rendu public le 20 septembre 1994, le groupe de travail chargé
par l’Assemblée générale d’étudier « la question de la représentation équitable
au Conseil de sécurité » a relevé « l’opinion très répandue, que le droit de veto
est antidémocratique », et qu’il devrait être soit « limité à des sujets particuliers
» soit subordonné pour sa validité à deux voix négatives.
Pendant la guerre froide, l’opposition quasi permanente entre l’URSS et les
États-Unis a souvent neutralisé le Conseil de sécurité. Entre 1945 et 1990, le
droit de veto a été utilisé 193 fois. En revanche, il a été utilisé seulement 12 fois
de 1990 à 2002. Depuis la fin de la guerre froide, le fonctionnement du Conseil
de sécurité a changé car ses cinq membres permanents ont coopéré les uns avec
les autres sauf sur certains dossiers comme le Kosovo, l’Irak et la Syrie.
La crise syrienne a d’ailleurs marqué le retour à la paralysie du Conseil de
sécurité. Le 12 avril 2017, Moscou a opposé son veto à un projet de résolution
du Conseil de sécurité demandant la coopération du régime syrien dans
l’enquête sur l’attaque chimique de Khan Cheikhoun imputée à l’armée syrienne
tandis que la Chine s’est abstenue. Depuis le début du conflit syrien en 2011, la
Russie a opposé huit fois son veto au Conseil de sécurité et a été suivie à six
reprises par la Chine.
Le 24 septembre 2013, devant l’Assemblée générale de l’ONU, François
Hollande a suggéré que les membres permanents du Conseil de sécurité
définissent un « code de bonne conduite » pour que, en cas de crime de masse, «
ils puissent décider de renoncer collectivement à leur droit de veto ». « Le
secrétaire général de l’ONU, à la demande d’au moins cinquante États membres,
serait saisi pour se prononcer sur la nature du crime. Une fois son avis rendu, le
code de conduite s’appliquerait immédiatement. Pour être réaliste, ce code
exclurait les cas où seraient en cause les intérêts vitaux nationaux d’un membre
permanent du Conseil » (Laurent Fabius, « Réformer le droit de veto au Conseil
de sécurité », Le Monde, 4 octobre 2013).
Enfin, notons que le 18 octobre 2013, l’Arabie saoudite a refusé d’entrer au
Conseil de sécurité en tant que membre non permanent ; un geste sans précédent
visant à protester contre « l’impuissance » du Conseil, notamment face à la crise
syrienne.
4. Les compétences du Conseil de sécurité
L’article 24 de la Charte des Nations unies investit le Conseil de sécurité de « la
responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales
».
Dans le règlement pacifique des différends, dont la prolongation est susceptible
de menacer la paix internationale, le Conseil de sécurité peut intervenir, lorsqu’il
est saisi par un État membre ou un État non-membre de l’Organisation des
Nations unies. Au cas de menaces contre la paix, de rupture de la paix ou d’actes
d’agression, le Conseil est compétent pour décider des mesures à adopter.
Le Conseil de sécurité intervient également dans le domaine de la lutte contre le
terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive (AMD). Sa
résolution 1373 du 28 septembre 2001 est à l’origine de la création du Comité
contre le terrorisme (CCT). Sa résolution 1540 du 28 avril 2004, qui est sa
première résolution sur les AM, a créé un Comité (Comité 1540), lequel a
vocation à coordonner les actions des États en matière de non-prolifération des
AMD.
Enfin, on soulignera que le recours à la force armée est licite lorsqu’il est
autorisé par le Conseil de sécurité pour maintenir ou rétablir la paix
internationale au titre du chapitre VII de la Charte de l’ONU. Le recours à la
force est également licite en cas de légitime défense (art.51, Charte de l’ONU).
5. La réforme du Conseil de sécurité
Depuis de très nombreuses années, la réforme du Conseil de sécurité est
présentée comme une nécessité. Comme on le sait, sa composition reflète les
rapports de force au lendemain du second conflit mondial. De l’avis général, il
faudrait la modifier afin d’accroître la légitimité mais aussi l’efficacité du
Conseil. Dans sa forme actuelle, ce dernier demeure pour tous les États membres
de l’organisation universelle un anachronisme.
Le 10 décembre 1993, un groupe de travail chargé d’examiner la question de
l’élargissement du Conseil de sécurité avait été constitué par l’Assemblée
générale. Celui-ci a notamment suggéré d’instaurer des membres dits « semi-
permanents » qui seraient amenés à se succéder à la fi n de leur mandat de deux
ans. Mais cette idée de créer des membres dits « semi-permanents » a été
critiquée.
Dans leur rapport très attendu sur la réforme de l’Organisation mondiale, le
groupe des « 16 sages » nommé par Kofi Annan a proposé quant à lui que le
Conseil de sécurité passe de 15 à 24 membres, avec deux modèles possibles
pour la répartition des sièges.
Dans la première formule suggérée par ce groupe de 16 personnalités présidé par
l’ancien Premier ministre thaïlandais Anand Panyarachun et comprenant
l’ancien ministre français de la Justice Robert Badinter, il est prévu l’arrivée de
6 nouveaux membres permanents qui ne seraient pas dotés du droit de veto et de
3 non permanents.
La deuxième formule propose l’ajout de 8 membres semi-permanents, élus pour
quatre ans renouvelables, et d’un membre non permanent. Selon le rapport du
groupe de réflexion, qui a été remis en décembre 2004 à Kofi Annan, la
sélection des États candidats devrait se faire en prenant en compte 3 critères : la
contribution au budget de l’Organisation universelle ; la contribution à la paix et
à la sécurité internationale ; la mise à la disposition de l’Organisation de troupes
pour les missions de maintien et de rétablissement de la paix. Kofi Annan
n’avait pas affiché de préférence pour l’une ou l’autre des deux propositions
faites par le groupe des « Sages ».
On rappellera que toute réforme doit être approuvée par les deux tiers des
membres de l’Assemblée générale de l’ONU. La réforme doit aussi être ratifiée
par les 5 membres permanents du Conseil de sécurité. Il faut également signaler
que le Japon, l’Allemagne, l’Inde et le Brésil ont déclaré, dans un communiqué
commun publié en septembre 2004, que se fondant sur la conviction partagée
qu’ils constituent des candidats légitimes à un siège permanent au sein d’un
Conseil élargi, ils soutiennent leurs candidatures mutuelles.
Les quatre pays, qui ont mis en avant leur puissance économique et
démographique, leur poids régional et leur influence mondiale, ont ajouté qu’à
leur avis, « l’Afrique devrait aussi être représentée parmi les membres
permanents » du Conseil.
Mais le projet des « quatre », qui préconise un Conseil à 25 avec 6 sièges
permanents supplémentaires et qui est soutenu par la France comme l’a rappelé
le Président Hollande le 25 septembre 2012 à l’ONU, a suscité des oppositions.
Certains pays redoutent une modification des grands équilibres actuels. Ainsi,
par exemple, l’Italie s’est déclarée publiquement contre la candidature de
l’Allemagne. La candidature de l’Inde, quant à elle, inquiète son voisin, le
Pakistan et celle de Tokyo n’est pas forcément du goût de Pékin qui s’oppose
aussi à l’entrée du Brésil au Conseil de sécurité.
Les efforts du « G4 » se sont heurtés à plusieurs pays (Argentine, Italie,
Pakistan, Mexique) qui ont cherché à promouvoir leur propre projet de réforme.
Ces derniers ont constitué le groupe « Unis pour le consensus », lequel ne veut
créer que des sièges non permanents au Conseil. Le continent africain, quant à
lui, n’est pas parvenu à s’accorder sur les pays pouvant prétendre aux 2 sièges
permanents qui lui étaient réservés dans le projet du « G4 ». Par ailleurs, l’Union
africaine a affiché son hostilité à l’idée de sièges permanents sans droit de veto.
D’autres scénarios de réforme du Conseil ont été proposés. Mais ils n’ont pu
aboutir, faute de consensus. Cela étant précisé, si la réforme du Conseil de
sécurité s’avère impossible, l’existence du G20, qui apparaît comme le nouveau
cadre de régulation des problèmes se posant à l’échelle mondiale, pourrait
constituer une solution alternative. À en croire certains observateurs, le G20,
lequel est représentatif de la nouvelle réalité géopolitique de la planète, pourrait
devenir « le nouveau Conseil de sécurité ».
c. Le Conseil économique et social (ECOSOC)
1. Composition
Il se compose de 54 membres élus par l’Assemblée générale pour une durée de 3
ans avec renouvellement par tiers chaque année. Les 5 grandes puissances,
membres permanents du Conseil de sécurité, ont jusqu’ici toujours été réélues.
2. Les prises de décision
Le Conseil économique et social, qui siège en principe deux fois par an, adopte
des recommandations à la majorité simple.
3. Les compétences
Il étudie les questions relatives à la coopération économique et sociale
internationale. Il est en relation avec les institutions spécialisées.
4. Vers la suppression de l’ECOSOC ?
En 1995, la Commission sur le « gouvernement global » constituée sous l’égide
du secrétaire général des Nations unies, pour réfléchir à la forme que pourrait
prendre une sorte de « nouvel ordre politico-économique mondial », a suggéré la
création d’un « Conseil de sécurité économique ».
Ce dernier, composé de personnalités politiques, serait susceptible de se
substituer à l’actuel G8, le fameux groupe des huit principaux pays
industrialisés. Ce Conseil de sécurité économique aurait un rôle délibératif dans
les secteurs de l’économie, de la vie sociale et de l’environnement. Le Conseil
économique et social de l’ONU « qui ne se justifie plus » serait alors supprimé.
L’idée de créer un Conseil de sécurité économique a été développée par de
nombreuses personnalités dont l’ancien président de la Commission européenne,
Jacques Delors. Le 11 décembre 2012, le président français François Hollande,
qui a plaidé pour une « nouvelle gouvernance » mondiale, a suggéré la création
« d’un conseil de sécurité économique et social » au niveau des Nations unies : «
de la même manière qu’il existe un Conseil de sécurité pour traiter des questions
de la paix, il doit être possible dans le cadre onusien d’avoir un Conseil de
sécurité traitant des questions de la crise ou de la coordination des politiques
économiques ».
d. Le Conseil de tutelle
1. Composition
Le Conseil de tutelle comprenait à l’origine trois catégories de membres : les 5
membres permanents du Conseil de sécurité, les États chargés d’administrer des
territoires sous tutelle, des membres élus pour trois ans par l’Assemblée
générale.
Le nombre de représentants d’États administrant des territoires sous tutelle
devait être égal à celui des représentants d’États n’administrant pas des
territoires.
2. Les compétences
Il partageait avec l’Assemblée générale le soin d’assurer le contrôle de
l’administration des territoires placés sous tutelle. Mais le Conseil de Tutelle
s’est trouvé sous l’autorité de l’Assemblée générale des Nations unies. Il pouvait
examiner les rapports élaborés par les États administrant des territoires. Il
pouvait également faire procéder à des visites périodiques dans les territoires
sous tutelle et recevoir des pétitions émanant des populations de ces territoires.
Il a occupé la place qui appartenait à la Commission des mandats, sous la
Société des Nations. C’est un organe intergouvernemental qui a participé au
processus de décolonisation. Dans le document final adopté le 16 octobre 2005,
lors du sommet mondial 2005, les États membres de l’ONU ont pris la décision
de le supprimer.
e. La Cour internationale de justice (CIJ)
1. Composition
La CIJ, qui a succédé en 1946, à la Cour permanente de Justice internationale
instituée en 1920 sous les auspices de la Société des Nations, est composée de
15 juges élus pour 9 ans. Elle est chargée par la Charte de l’ONU de dire le
droit.
Les juges de « l’organe judiciaire principal de l’ONU », selon la formule de
l’article 92 de la Charte, sont renouvelables par tiers tous les trois ans et sont de
nationalités différentes. Ils sont élus conjointement par l’Assemblée générale et
le Conseil de sécurité, parmi des personnes « jouissant de la plus haute
considération morale », et « possédant une compétence notoire en matière de
Droit international » (art. 2 du statut de la CIJ).
De plus, il faut désigner des personnes qui « assurent dans l’ensemble la
représentation des grandes formes de civilisation et des principaux systèmes
juridiques du monde » (art. 9 du statut de la CIJ).
Les juges de la CIJ, qui siège à La Haye, élisent pour trois ans leur président et
leur vice-président qui sont rééligibles. Les membres de la CIJ bénéficient de
garanties : l’inamovibilité et la possession des privilèges et immunités
diplomatiques.
2. Les compétences
La CIJ est compétente pour trancher les litiges entre États par des arrêts. Ces
jugements prononcés par la CIJ sont obligatoires pour les parties.
En vertu de l’article 94 de la Charte, chaque membre des Nations unies s’engage
à se conformer à la décision de la CIJ dans tout litige auquel il est partie. Si une
partie en litige ne satisfait pas aux obligations qui lui incombent en vertu d’un
arrêt rendu par la Cour, l’autre partie peut recourir au Conseil de sécurité et
celui-ci, s’il le juge nécessaire, peut faire des recommandations ou décider des
mesures à prendre pour faire exécuter l’arrêt.
La CIJ donne des avis consultatifs à la demande de certains organismes
internationaux. Selon l’article 96 de la Charte des Nations unies, l’Assemblée
générale ou le Conseil de sécurité peut demander à la CIJ un avis consultatif sur
toute question juridique. L’article 96 de la Charte indique également que tout
autre organe de l’Organisation ou une institution spécialisée peuvent se voir
autoriser par l’Assemblée générale à demander à la Cour internationale de
justice des avis consultatifs sur « des questions juridiques qui se poseraient dans
le cadre de leur activité ».
De nombreux observateurs ont vivement regretté l’absence totale de la Cour
internationale de justice lors de la crise du Golfe de 1990-1991. Aussi, pour
certains, il serait désormais indispensable d’accroître les pouvoirs de la CIJ afin
de lui permettre de contrôler le fonctionnement des organes politiques de
l’ONU.
De l’avis de Géraud de la Pradelle, la CIJ devrait être en mesure d’apprécier la
légalité des actions conduites par le Conseil de sécurité : « en effet, seul un
contrôle juridictionnel de la légalité des actes du Conseil de sécurité pourrait
garantir le respect du droit par ce Conseil ».
D’une manière générale, la CIJ a contribué par sa jurisprudence à l’évolution du
droit international public. Comme on le sait, ses arrêts ont notamment exercé
une réelle influence sur le développement du droit de la mer.
Le 27 octobre 2016, le président de la CIJ, qui a présenté devant l’Assemblée
générale de l’ONU le rapport annuel d’activité de la CIJ, a insisté sur la
nécessité d’adapter les méthodes de travail de la Cour « afin de répondre à
l’augmentation de sa charge de travail et à la complexification des affaires qui
lui sont soumises » par un nombre croissant d’États.
f. Le secrétariat général
1. Le secrétaire général
Il est nommé par l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de
sécurité. Il est titulaire d’un mandat de cinq ans renouvelable. La Commission
Carlsson a proposé que ce mandat soit porté à sept ans et qu’il ne soit plus
renouvelable. D’après l’article 97 de la Charte, le secrétaire général est « le plus
haut fonctionnaire de l’organisation ». Il peut « attirer l’attention du Conseil de
sécurité sur toute aff aire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien
de la paix et de la sécurité internationales » (art. 99, charte de l’ONU).
Il dirige le Secrétariat dont il nomme le personnel. Il exécute les décisions des
diff érents organes de l’Organisation mondiale. Chaque année, il présente un
rapport à l’Assemblée générale. Il est assisté de secrétaires généraux adjoints et
de sous-secrétaires généraux. Par ailleurs, il est chargé de l’enregistrement et de
la publication des traités internationaux passés par les membres de l’ONU.
À côté de leurs fonctions administratives, les Secrétaires généraux de l’ONU ont
joué un rôle politique essentiel à partir du moment où ils ont été investis de
missions diplomatiques. Le secrétaire général de l’ONU est devenu, dans les
relations internationales, l’instance majeure de négociation ou encore de
médiation.
Le Suédois Dag Hammarskjöld, dont le mandat a été caractérisé par le
développement de la diplomatie « discrète », a notamment joué un rôle
fondamental dans l’installation d’une force internationale en Égypte. Javier
Perez de Cuellar, qui a été réélu pour un second mandat, et dont l’action a fait
l’unanimité, a joué un rôle très actif lors de la guerre du golfe Arabo-Persique.
Son successeur, l’Égyptien Boutros Boutros-Ghali, juriste et ancien ministre des
Affaires étrangères, a poursuivi dans la même voie et il a rédigé en 1992 un
rapport intitulé « Agenda pour la paix ».
Les États-Unis se sont opposés au renouvellement de son mandat et ont utilisé
leur droit de veto au conseil de sécurité, le 19 novembre 1996. C’est le Ghanéen
Kofi Annan, ancien secrétaire général adjoint de l’ONU chargé des opérations
de maintien de la paix, qui a succédé à M. Boutros-Ghali. Kofi Annan a réduit
le nombre des fonctionnaires de l’organisation et s’est efforcé d’améliorer la
coordination des différents services. Il est parvenu à obtenir de l’Assemblée
générale la création d’un poste de vice-secrétaire général.
Kofi Annan a fait œuvre de médiateur en arrivant à conclure un accord avec
l’Irak, le 23 février 1998.Le 3 avril 2000, devant l’Assemblée générale de
l’ONU, à New York, il a présenté « un plan d’action pour le XXIe siècle ». Kofi
Annan a réaffirmé sa thèse sur le droit d’intervention humanitaire en insistant
sur le fait que « la souveraineté nationale ne saurait justifier les violations
aveugles des droits de l’homme et les tueries » Kofi Annan, qui a cherché à
rénover les Nations unies, notamment en les ouvrant sur la société civile, a été
réélu à l’unanimité, le 27 juin 2001, pour un nouveau mandat de cinq ans.
Le 12 octobre 2001, le prix Nobel de la Paix a été attribué conjointement à Kofi
Annan et à l’ONU. Le 21 mars 2005, il a présenté devant l’Assemblée générale
de l’ONU le projet de réforme le plus ambitieux de l’Organisation depuis la
création de celle-ci, en 1945. Intitulé « Dans une liberté plus grande », un titre
directement tiré de la Charte de 1945, le rapport de Kofi Annan est en fait
l’aboutissement d’un processus de réforme initié après la crise irakienne.
Le 1er janvier 2007, le ministre sud-coréen des Affaires étrangères, Ban Ki-
Moon, qui a été pendant deux ans (2001-2003) le haut représentant de la Corée
du Sud auprès de l’ONU, a succédé à Kofi Annan.
La fermeté qu’a affichée Ban Ki-Moon dans son soutien aux mouvements du «
printemps arabe » a été saluée par les pays occidentaux.
Il a été réélu, le 21 juin 2011, pour un deuxième mandat de cinq ans. Le 19
juillet 2012, il a souligné que « la communauté internationale a une
responsabilité collective envers le peuple syrien ». Le 16 septembre 2013, il a
qualifié de « crime de guerre » l’utilisation, le 21 août 2013, d’armes chimiques
en Syrie, une utilisation attestée par un rapport des inspecteurs de l’ONU.
Le 1er janvier 2017, Antonio Guterres a succédé à Ban Ki-Moon. Cet ancien
Premier ministre du Portugal a été le Haut-Commissaire de l’ONU pour les
réfugiés de juin 2005 à décembre 2015. Le 12 décembre 2016, après avoir prêté
serment en tant que 9e secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres a déclaré
que l’Organisation devait « se préparer à changer » et a recommandé des
réformes dans trois domaines : le maintien de la paix, l’aide au développement
durable et la gestion.
M. Guterres souhaite mener à bien la réforme de la bureaucratie onusienne. Il
veut aussi rendre les érations de maintien de la paix « plus efficaces et moins
coûteuses».
2. Les fonctionnaires
Plus de 10 000 fonctionnaires internationaux travaillent pour la machine
administrative onusienne. Selon la Charte, leur recrutement doit s’effectuer sur «
une base aussi large que possible ». D’autre part, les fonctionnaires
internationaux doivent être des personnes « possédant les plus hautes qualités de
travail, de compétence, et d’intégrité ». Ils sont désignés par le secrétaire général
de l’ONU sur présentation de leur gouvernement respectif. Ils ne doivent
recevoir aucune injonction émanant de ce dernier.
Ils bénéficient de privilèges et immunités « qui leur sont nécessaires pour
exercer en toute indépendance leurs fonctions en rapport avec l’organisation »
(article 105 de la Charte).
B. Les organes subsidiaires
L’article 7 de la Charte prévoit que « les organes subsidiaires qui se révéleraient
nécessaires pourront être créés ». L’Assemblée générale et le Conseil de sécurité
sont les deux organes principaux qui disposent du pouvoir de créer un organe
subsidiaire. Les organes subsidiaires ne sont pas autonomes par rapport à
l’ONU.
Principaux organes subsidiaires de l’ONU :
La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement
CNUCED
Le Programme des Nations unies pour le développement PNUD
L’Institut des Nations unies pour la formation et la recherche UNITAR
Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés HCR
Le Conseil mondial de l’alimentation CMA
Le Fonds des Nations unies pour l’enfance UNICEF
Le Programme alimentaire mondial de la FAO et de l’ONU PAM
L’Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine
dans le Proche-Orient UNRWA
Le Centre des Nations unies pour les établissements humains HABITAT
Le Fonds des Nations unies pour la population FNUAP
Le Programme des Nations unies pour l’environnement PNUE
La CNUCED (192 membres) se réunit tous les quatre ans au niveau ministériel
pour déterminer les priorités de l’institution onusienne.
Le Groupe des 77, qui est la plus grande coalition de pays en développement au
sein de l’Organisation mondiale, a été institué à l’issue de la première
CNUCED.
Le PNUE créé en 1972 a notamment pour fonction de suivre la situation de
l’environnement dans le monde et de coordonner les programmes menés dans le
cadre de l’ONU.
C. Les institutions spécialisées
Les institutions spécialisées constituent des organismes autonomes par rapport à
l’ONU. L’article 57 de la Charte stipule que « les diverses institutions
spécialisées créées par accords intergouvernementaux et pourvues, au terme de
leurs statuts, d’attributions internationales étendues, dans les domaines
économique, social, de la culture intellectuelle et de l’éducation, de la santé
publique et autres domaines connexes, sont reliées à l’Organisation
conformément aux dispositions de l’article». Les institutions spécialisées sont
des organisations internationales indépendantes créées par les États. Leur liaison
avec l’ONU va reposer sur un accord passé entre le Conseil économique et
social des Nations unies et l’institution spécialisée.
Les institutions spécialisées travaillent, au moins indirectement, pour la paix :
l’UNESCO, créée en 1945, alphabétise, la FAO, créée en 1945, lutte contre la
faim, l’OMS, créée en 1946, combat les endémies. Toutefois, comme l’a écrit
Victor-Yves Ghebali, « les institutions spécialisées des Nations unies sont
entrées en crise au début des années 1970 ». La politisation excessive de ces
institutions, qui a pour effet d’affaiblir leurs crédibilités, a été critiquée.
En réaction à « l’admission de la Palestine comme État membre », le 31 octobre
2011, à l’UNESCO, les États-Unis ont décidé de suspendre leur contribution
financière à cette organisation qui constitue le plus gros forum international
après l’ONU. Le 12 octobre 2017, les États-Unis ont annoncé leur retrait de
l’UNESCO, accusant l’organisation onusienne d’être « anti-israélienne ». Ils
avaient déjà quitté l’UNESCO en 1984 pour dénoncer sa mauvaise gestion et
étaient revenus en 2003. Le premier ministre israélien a également annoncé le
12 octobre 2017 qu’Israël avait engagé les procédures nécessaires en vue de son
retrait de l’organisation.
Le FMI, qui a été créé en 1944 aux termes d’un accord signé lors de la
conférence de Bretton Woods, est chargé d’assurer la stabilité du système
monétaire et fi nancier international. Il doit prévenir les crises et résoudre ces
dernières lorsqu’elles surviennent. Il a aussi pour mission de faciliter
l’expansion du commerce international. Le FMI fournit des crédits aux pays en
développement qui connaissent des difficultés financières et leur demande, en
contrepartie, de mettre en œuvre des réformes structurelles.
En avril 2009, le sommet du G20 de Londres l’a investi d’un nouveau rôle de
surveillance des pratiques économiques et financières des États. Ce sommet du
G20, qui a décidé le triplement de ses ressources, a renforcé le FMI qui est
désormais placé au centre de la régulation mondiale.
Le conseil d’administration du FMI a adopté, le 5 novembre 2010, une
importante réforme destinée à attribuer aux pays émergents une place plus
conforme à leur poids économique.
En mai 2010, les dirigeants européens ont mis en œuvre un plan d’aide à la
Grèce financé par la zone euro et le FMI. Ce dernier n’était encore jamais venu
au chevet d’un État membre de la zone euro. Après la Grèce, d’autres pays de la
zone euro (Irlande, Portugal, Espagne, Chypre) ont également bénéficié d’un
plan d’aide concocté par les institutions de l’UE et le FMI.
La Banque mondiale constitue le second pilier de l’architecture financière
internationale mise en place lors de la conférence de Bretton Woods, en 1944.
La lutte contre la pauvreté est devenue son principal objectif. En 1997, elle a été
à l’origine de l’initiative de la réduction de la dette des États les plus pauvres.
Ses ressources proviennent des pays développés et d’emprunts sur les marchés
internationaux des capitaux.
Principales institutions spécialisées de l’ONU :
L’Organisation internationale du travail OIT
La Banque mondiale BM
L’Organisation des Nations unies pour l’éducation,
la science et la culture UNESCO
L’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture FAO ou OAA
Le Fonds monétaire international FMI
L’Organisation mondiale de la santé OMS
L’Union postale universelle UPU
L’Union internationale des télécommunications UIT
L’Organisation maritime internationale OMI
L’Organisation météorologique mondiale OMM
L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle OMPI
Le Fonds international du développement agricole FIDA
L’Organisation des Nations unies pour le développement industriel ONUDI
D. Les organisations autonomes
Sans avoir la qualité d’institution spécialisée, deux organisations internationales
sont reliées à l’ONU par le biais d’accords particuliers : l’Organisation mondiale
du commerce, qui compte 159 États membres, et l’Agence internationale de
l’énergie atomique.
a. L’Organisation mondiale du commerce (OMC)
Le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) ou accord général sur les
tarifs douaniers et le commerce, signé à Genève le 30 octobre 1947 et entré en
vigueur le 1er janvier 1948, a eu pour but de faciliter le développement du
commerce international. Conformément aux accords du cycle de l’Uruguay, le
GATT s’est transformé en 1995 en Organisation mondiale du commerce (OMC)
dont l’acte final a été signé le 15 avril 1994 à Marrakech.
Comme le GATT, l’OMC, qui est entrée en activité le 1 er janvier 1995, a pour
tâche principale de libérer le commerce mondial de ses entraves et de faire
accepter par tous les pays participants la règle de base qui est la fameuse clause
de la nation la plus favorisée. Elle est la seule organisation internationale qui a
vocation à s’occuper des règles qui régissent le commerce entre les États.
La conférence ministérielle réunit tous les pays membres et définit la stratégie
générale de l’OMC. Elle se réunit au moins tous les deux ans et est l’autorité
suprême de l’OMC. Le Conseil général exerce les fonctions de la conférence
ministérielle entre les réunions de celle-ci. Cet organe permanent formé de
représentants de tous les États membres traite des affaires courantes de
l’Organisation. L’Organe de règlement des différends apparaît quant à lui
comme la « contribution la plus originale de l’OMC à l’économie mondiale ». Il
est en réalité le Conseil général composé de tous les membres de l’OMC
intervenant en matière de différends.
Le directeur général de l’OMC, le brésilien Roberto Azevedo, s’est félicité de
l’accord sur l’agriculture, l’aide au développement et la facilitation des échanges
conclu à Bali le 7 décembre 2013 : « Pour la première fois de son histoire,
l’OMC a vraiment tenu ses promesses. Nous avons remis le mot “mondial” dans
l’Organisation mondiale du commerce ».
La 10e Conférence ministérielle de l’OMC a eu lieu à Nairobi en décembre
2015. La Déclaration de Nairobi a reconnu les divergences de vue des pays au
sujet de l’avenir du Cycle de Doha. Alors que de nombreux accords
commerciaux régionaux ont été conclus, elle a réaffirmé la nécessité de faire en
sorte que ces accords « restent un complément, et non un substitut, du système
commercial multilatéral ».
Enfin, depuis l’élection de Donald Trump, la Maison Blanche souhaite rejeter le
système multilatéral façonné, depuis l’après-guerre, par le GATT puis par
l’OMC. En mars 2017, lors du G20 de Baden-Baden, Washington a refusé de
s’engager, comme il en était l’usage depuis 2005, sur la « lutte contre toutes les
formes de protectionnisme ». Si la déclaration finale du sommet du G20 de
Hambourg, en juillet 2017 a réaffirmé son engagement à lutter contre le
protectionnisme, elle a reconnu pour la première fois aux pays le droit à l’usage
d’« instruments légitimes de défense commerciale ».
b. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA)
L’AIEA, dont le siège est établi à Vienne, a pour objectif l’utilisation pacifique
de l’énergie nucléaire et la protection contre la rétroactivité. Elle a pour origine
le fameux discours (« des atomes pour la paix ») prononcé le 8 décembre 1953
par le président des États-Unis Dwight David Eisenhower devant l’Assemblée
générale de l’ONU. Le statut de l’AIEA a été adopté en 1956 et est entré en
vigueur le 29 juillet 1957. Le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) signé le
1er juillet 1968 par la Grande-Bretagne, les États-Unis, ainsi que l’URSS, et
entré en vigueur le 5 mars
1970, qui fixe des limites à la prolifération nucléaire, a chargé l’AIEA de vérifier
le respect de leurs engagements par les États non nucléaires.
Le TNP, qui a été signé par 189 pays, repose sur la distinction entre les
puissances nucléaires et les puissances non nucléaires. Les puissances nucléaires
sont les États qui prennent l’engagement de refuser de transférer à des États non
nucléaires les technologies nucléaires militaires et d’œuvrer pour le
désarmement. Il s’agit des États qui ont procédé à une explosion atomique avant
le 1er janvier 1967 : les États-Unis, l’URSS, le Royaume-Uni, la France et la
Chine. Les pays non nucléaires s’interdisent, quant à eux, d’acquérir des
technologies nucléaires militaires. Mais plusieurs États non-signataires du traité
ont élaboré et, parfois même, testé des bombes atomiques. Le Pakistan, Israël ou
l’Inde, qui n’ont pas signé le TNP, possèdent l’arme atomique. La communauté
internationale a décidé, le 11 mai 1995, de rendre permanent le TNP. Cette
décision a été prise sans vote par une « majorité » des 175 États représentés à la
conférence organisée par les Nations unies à New York.
La conférence d’examen du TNP est un grand rendez-vous diplomatique qui a
lieu tous les cinq ans. En mai 2000, à l’issue de la conférence de révision, les
cinq grandes puissances nucléaires reconnues (France, Chine, États-Unis,
Grande-Bretagne, Russie) avaient accepté « un engagement sans équivoque
d’accomplir l’élimination totale de leurs arsenaux nucléaires ». Toutefois,
l’accord n’avait prévu aucun calendrier. Cet engagement a été salué par Kofi
Annan qui l’a qualifié de « consensus historique ». Il a été réaffirmé en mai
2010 par ces cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. Mais
les Cinq, qui ont réaffirmé leur autorité sur l’ordre nucléaire mondial, se sont à
nouveau opposés à l’établissement d’un quelconque calendrier.
Le 4 mars 2005, à l’occasion du 35e anniversaire du TNP, le secrétaire général
de l’ONU avait estimé que ce traité continuait de représenter la pierre angulaire
de la sécurité mondiale. Mais sa crédibilité a été mise à mal par les ambitions de
l’Iran et de la Corée du Nord, laquelle est sortie du TNP en 2003.
Le 28 mai 2010, la conférence de suivi du TNP est parvenue à un accord portant
sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Mais la
conférence internationale sur l’établissement d’une zone exempte d’armes
nucléaires au Moyen-Orient mentionnée dans le document final de la
Conférence d’examen du TNP de 2010, qui devait avoir lieu en 2012, n’a pas été
organisée. Les trois États dépositaires du TNP (États-Unis, Russie et Royaume-
Uni) ont décidé de la reporter. La porte-parole de la diplomatie américaine,
Victoria Nuland, a déclaré le 23 novembre 2012 que la conférence était reportée
en raison en particulier de l’absence de consensus entre les pays concernés.
Par ailleurs, selon la nouvelle doctrine nucléaire américaine, qui a été présentée
en avril 2010, les États-Unis s’engagent désormais à ne pas utiliser l’arme
nucléaire contre des États non nucléaires à condition qu’ils respectent les
dispositions du TNP.
D’autre part, l’AIEA a renforcé ses pouvoirs d’inspection. Elle a adopté en 1997
un « protocole additionnel » au TNP qui autorise des inspections sans préavis,
même sur des installations non nucléaires et exige des États davantage
d’information. Mais, l’AIEA n’est pas dotée d’un système de sanction
spécifique. Ses moyens restent limités.
Les relations entre l’AIEA et l’ONU sont définies par un accord approuvé par
l’Assemblée générale des Nations unies, le 14 novembre 1957. Chaque année,
l’AIEA doit remettre un rapport à l’Assemblée générale de l’ONU. L’AIEA peut
aussi être amenée à adresser un rapport au Conseil de sécurité de l’ONU.
C’est la fameuse résolution 1141 adoptée à l’unanimité par ce dernier, le 8
novembre 2002, qui a été à l’origine du retour des inspecteurs de l’AIEA en
Irak. Cette résolution a institué un régime renforcé de vérification du
désarmemet de l’Irak dont l’exécution a été confiée à l’AIEA et à la commission
de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations unies (COCOVINU).
La résolution 1141, qui ordonnait la reprise des inspections en Irak, a imposé au
régime de Saddam Hussein des conditions très strictes pour le travail des
inspecteurs en désarmement. Elle a exigé de l’Irak une coopération pleine et
entière avec la COCOVINU et l’AIEA. Elle a accordé aux inspecteurs un accès
immédiat, inconditionnel et sans restriction à la totalité des sites irakiens.
L’article 13 de la résolution 1141 rappelait que le Conseil de sécurité « a averti à
plusieurs reprises l’Irak des graves conséquences auxquelles il aurait à faire face
s’il continuait à manquer à ses obligations ».
Par ailleurs, en 1986, l’AIEA s’est dotée d’une convention sur la notification
rapide d’un accident nucléaire et d’une convention sur l’assistance en cas
d’accident nucléaire ou de situation d’urgence radiologique. Ces textes ont été
complétés par la convention de 1994 sur la sûreté nucléaire.

Chapitre 2 : Le régime juridique de la participation des États à l’ONU


Il sera question d’aborder dans un premier temps, les règles organisant
l’adhésion à l’ONU (Section 1) avant de voir les règles présidant à sa perte
(Section 2).
Section 1 : les règles d’adhésion à l’ONU
A. L’obtention de la qualité de membre de l’ONU
Il faut opérer une distinction entre les membres originaires des Nations unies et
les membres admis. Selon l’article 3 de la Charte, les membres originaires de
l’ONU sont les États qui ont participé à la Conférence de San Francisco ou ceux
qui ont antérieurement signé la Déclaration des Nations unies du 1 er janvier
1942.
Les membres originaires de l’ONU sont les États pacifiques qui ont combattu
contre les puissances de l’Axe. Parmi les cinquante et un membres originaires de
l’ONU, il faut citer la Pologne qui avait souscrit à la Déclaration de 1942 mais
qui n’était pas présente à la Conférence et aussi la Biélorussie et l’Ukraine,
simples États fédérés, qui comme du reste l’Argentine et le Danemark, avaient
participé à la Conférence sans avoir approuvé la Déclaration des Nations unies.
Au terme de l’article 4 de la Charte, la procédure d’admission à l’ONU est
subordonnée à un certain nombre de conditions. L’État qui sollicite son
admission à l’ONU doit être « un État pacifique ». Il doit de plus accepter « les
obligations de la Charte », et être « capable de les remplir et disposé à le faire ».
C’est l’Assemblée générale qui décide de l’admission d’un État à l’ONU et cela
sur recommandation du Conseil de sécurité.
De 1946 à 1950, seulement neuf États ont pu être admis à l’ONU (Afghanistan,
Islande, Suède et la Thaïlande en 1946, Pakistan et Yémen en 1947, Birmanie en
1948, Israël en 1949 et Indonésie en 1950). Cette crise au niveau de la procédure
d’admission à l’ONU s’explique par la « guerre froide » qui a conduit chaque
bloc à user de son droit de veto au Conseil de sécurité pour s’opposer à l’entrée
d’un État de l’autre bloc. De 1951 à 1955, aucun État n’a pu être admis à
l’Organisation des Nations unies. Ce n’est qu’à partir de 1955 qu’est venue
prendre fi n cette période de blocage.
En effet, en 1955, 16 États ont été admis simultanément à l’ONU, c’est ce que
l’on a qualifié le « package deal » : l’Albanie, l’Autriche, la Bulgarie, le
Cambodge, Ceylan, l’Espagne, la Finlande, la Hongrie, l’Italie, la Jordanie,
l’Islande, le Laos, la Libye, le Népal, le Portugal et la Roumanie.
En 1960, en raison du processus de décolonisation, 16 États africains ont été
admis à l’ONU : le Burkina-Faso, le Bénin, le Cameroun, le Congo, la Côte
d’Ivoire, le Gabon, le Mali, le Niger, le Nigeria, la République centrafricaine, le
Sénégal, la Somalie, le Tchad, le Togo, le Zaïre, et Madagascar.
D’une manière générale, grâce à la « détente », les Nations unies ont pu devenir
véritablement à partir de 1955 l’Organisation « universelle ». À la différence de
la Société des Nations, l’ONU a toujours accepté sans difficulté l’admission des
micro-États ; États exigus, comme par exemple le Cap-Vert, dont on peut se
demander s’ils sont véritablement en mesure de satisfaire pleinement aux
obligations fixées par la Charte.
On peut citer le cas de l’île de Grenade, admise à l’ONU en 1975, et qui ne
compte guère que 100 000 habitants. De même, Sainte Lucie, qui est entrée aux
Nations unies en 1979, n’a que 110 000 habitants. Admis à l’ONU en 1984,
Brunei Darussalam n’en compte que 250 000. Trois autres micro-États sont
apparus à l’occasion de la 54e Assemblée générale de l’ONU, en septembre 1999
(Tonga, Nauru et Kiribati). Ces nouveaux États membres de l’Organisation des
Nations unies sont venus confirmer une tendance bien établie, celle de la «
morcellisation » ou « balkanisation » de la planète.
Aujourd’hui, l’ONU compte 193 États. La fi n de la guerre froide, qui s’est
caractérisée par l’éclatement de l’ancien bloc de l’Est, a permis à 17 nouveaux
États d’entrer à « La Maison de Verre » de New York : 12 républiques de l’ex-
URSS, 2 républiques issues de la partition de l’ex-Tchécoslovaquie, la
République tchèque et la République slovaque et 3 républiques de l’ex-
Yougoslavie, la Croatie, la Slovénie et la Bosnie-Herzégovine.
Le 27 septembre 2002, le Timor-Oriental est devenu le 191e membre de l’ONU,
sous le nom de république démocratique du Timor-Oriental. Le 28 juin 2006, le
Monténégro est devenu le 192e État membre de l’ONU.
Enfin, le 14 juillet 2011, l’Assemblée générale des Nations unies a voté par
acclamation l’admission de la République du Soudan du Sud comme nouvel État
membre au sein de l’ONU, ce qui fait d’elle le 193 e membre de l’Organisation
mondiale. Le 13 juillet 2011, le Conseil de sécurité avait adopté une résolution
qui recommandait cette admission.
Les États non-membres de l’organisation mondiale ne sont pas concernés par les
droits et obligations inscrits dans la Charte de l’ONU. Toutefois, ils peuvent
siéger à l’ONU en qualité d’observateurs. Ils pourront ainsi participer aux
travaux des différents organes de l’organisation sans toutefois pouvoir disposer
du droit de vote.
B. La représentation de l’État à l’ONU
C’est à propos de la Chine que s’est posé le problème de la représentation d’un
État membre. Initialement, la Chine était représentée dans les instances de
l’ONU par la « république de Chine » qui avait participé à la constitution de
l’Organisation universelle et cela conformément à la Charte des Nations unies.
Mais après 1949, la « république de Chine » se replia dans l’île de Formose,
alors que Mao Tsé-toung instaurait le régime de la « république populaire de
Chine », à Pékin.
Jusqu’en 1971, Pékin n’est pas parvenu à faire admettre que la Chine ne pouvait
plus être représentée à l’ONU par le gouvernement de Formose. Pour protester
contre l’absence de représentation à l’ONU de la Chine populaire, l’URSS
pratiqua au Conseil de sécurité la « politique de la chaise vide ».
Ce n’est qu’à la suite d’un vote favorable de l’Assemblée générale de l’ONU de
1971 que le gouvernement de Pékin a pu représenter la Chine à la place du
gouvernement de Formose. C’est la résolution 2758 du 25 octobre 1971 qui a
décidé : le rétablissement de la république populaire de Chine dans tous ses
droits et la reconnaissance des représentants de son gouvernement comme les
seuls représentants de la Chine à l’Organisation des Nations unies, ainsi que
l’expulsion immédiate des représentants de Tchang-Kaï-Chek du siège qu’ils
occupent illégalement à l’Organisation des Nations unies et dans tous les
organismes qui s’y rattachent.
Un problème analogue s’est posé en ce qui concerne la représentation du
Cambodge. En effet, jusqu’en 1991, c’était la délégation du Kampuchéa
démocratique qui représentait le Cambodge à l’ONU et cela alors que depuis
1979 le gouvernement de la république populaire du Kampuchéa était au
pouvoir à Phnom-Penh.
Section 2 : La perte de la qualité de membre
Après l’exposé du retrait à un Etat de la qualité de membre (A), il sera question
d’attirer l’attention sur le cas particulier des membres observateurs ( B).
A. Le retrait d’un Etat de l’ONU
À la différence du pacte de la Société des Nations, la Charte des Nations unies
n’a pas prévu l’hypothèse d’un retrait volontaire d’un État membre. Toutefois,
ce retrait volontaire de l’ONU, à l’initiative d’un État membre, n’est pas
expressément prohibé par la Charte qui respecte ici le principe de la
souveraineté des États. L’Indonésie s’est retirée de l’ONU en 1965 mais elle est
revenue participer aux activités de l’Organisation en 1966. L’exclusion d’un
État membre est permise par l’article 6 de la Charte des Nations unies. Il s’agit
d’une sanction décidée par l’Assemblée générale, sur recommandation du
Conseil de sécurité, en vue d’exclure de l’Organisation un État qui « enfreint de
manière persistante les principes énoncés dans la Charte ».
Mais cette procédure déclenchée par l’Organisation et destinée à retirer sa
qualité de membre de l’ONU à un État n’est pas facile à appliquer car elle risque
de se heurter au droit de veto de l’un des cinq membres permanents du Conseil
de sécurité. En octobre 1974, une tentative d’exclusion de l’Afrique du Sud de
l’ONU n’a pas pu aboutir.
Enfin, tout en demeurant membre de l’ONU, un État peut être « suspendu »
selon l’article 5 de la Charte de « l’exercice des droits et privilèges inhérents à la
qualité de membre » dans l’hypothèse où « une action préventive ou coercitive a
été entreprise par le Conseil de sécurité » contre lui.
Le premier des droits reconnus aux États membres des Nations unies est
naturellement le droit de vote à l’Assemblée générale ainsi que dans tous les
organes restreints auxquels ils appartiennent. De plus, tout État membre de
l’ONU a, sans droit de vote, le droit de participer aux travaux des organes dont il
ne fait pas partie.
B. Le statut d’État observateur non-membre de l’ONU
Pour devenir un « État membre » de l’ONU, la demande est examinée par le
Conseil de sécurité et doit obtenir le vote de 9 des 15 membres du Conseil et le
non-veto des 5 membres permanents. Elle est ensuite soumise au vote de
l’Assemblée générale où un vote favorable à la majorité des deux tiers est
requis.
En revanche, pour devenir un « État non-membre » de l’Organisation
universelle, il ne faut pas présenter une demande au Conseil de sécurité. La
requête doit être soumise au vote de l’Assemblée générale et elle requiert une
majorité simple.
Avant de devenir membres à part entière de l’ONU, des pays comme la
Finlande, l’Autriche ou le Japon ont longtemps bénéficié du statut d’observateur
permanent ; un statut qui « relève de l’usage » car, comme le souligne l’ONU, «
aucune disposition de la Charte des Nations unies n’en fait état ».
Historiquement, il a été créé en 1946 pour la Suisse, laquelle est devenue un «
État membre » de l’ONU en 2002.
Le 29 novembre 2012, l’Assemblée générale des Nations unies a accordé à la
Palestine le statut d’État observateur non-membre auprès de l’ONU. L’obtention
de ce statut « d’État non-membre » ne signifie pas sa reconnaissance en tant
qu’État sur le plan international mais uniquement dans le cadre des Nations
unies. Il permet toutefois de renforcer l’existence de la Palestine sur la scène
internationale. Ce statut, qui est aussi celui du Vatican, lui donne accès à des
agences de l’ONU comme l’OMS ainsi qu’à des traités internationaux,
notamment le traité de Rome relatif à la CPI. Mais il ne lui donne pas le droit de
vote au sein des organes onusiens.
Chapitre 3 : L’ONU et le maintien de la paix
Il importe de voir le système prévu par la charte (Section 1) avant d’étudier le
système né de la pratique (Section 2).
Section 1. Le système prévu par la Charte
En vertu du chapitre 7 de la Charte des Nations unies (« Action en cas de
menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte d’agression »), le Conseil
de sécurité se voit conférer une fonction de « police internationale ».
a. Le rôle du Conseil de sécurité
Il est compétent non seulement pour adopter des recommandations, mais
également pour prendre des mesures coercitives. L’interruption complète ou
partielle des relations économiques et des communications ferroviaires,
maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres
moyens de communication, ainsi que la rupture des relations diplomatiques sont,
selon l’article 41 de la Charte, les mesures non militaires pouvant être décidées
par le Conseil de sécurité. Mais, si ce dernier juge que les sanctions
économiques ou politiques défi nies à l’article 41 de la Charte sont « inadéquates
», il a alors la possibilité d’entreprendre au moyen de forces aériennes, navales
ou terrestres, toute action qu’il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement
de la paix et de la sécurité internationales conformément à l’article 42 de la
Charte.
Dans son article 46, celle-ci charge le Conseil de sécurité d’élaborer les « plans
pour l’emploi de la force armée » avec l’aide du Comité d’État-major.
L’utilisation des pouvoirs dévolus au Conseil doit être rendue possible par la
mise à sa disposition de contingents nationaux fournis par tous les membres des
Nations unies. Ces derniers peuvent accorder un droit de passage aux forces
terrestres, navales, aériennes constituées de contingents nationaux.
b. Les sanctions prises par le Conseil de sécurité
Tout d’abord, plusieurs résolutions ont été votées par le Conseil de sécurité à
partir de décembre 1966 et jusqu’en 1979 en vue d’infliger à la Rhodésie une
asphyxie économique. Mais l’efficacité de ces sanctions est discutable. Ensuite,
en 1977, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 418 imposant un embargo
sur les livraisons d’armes et de matériel militaire à destination cette fois-ci d’un
État membre de l’ONU, la République sud-africaine. Ces sanctions n’ont
disparu qu’en 1994 avec le démantèlement de l’apartheid.
Par la résolution 748 du 31 mars 1992, le Conseil de sécurité a institué un
embargo sur les fournitures d’armes, l’assistance technique et militaire, et les
relations aériennes en direction de la Libye
. Le 25 septembre 1991, le Conseil a voté la résolution 713 décrétant l’embargo
sur les livraisons d’armes à l’ex-Yougoslavie. Le 30 mai 1992, il a adopté la
résolution 757 instituant un triple embargo pétrolier, commercial et aérien contre
le
Monténégro et la Serbie.
Un véritable blocus a été décrété en 1990 à l’encontre de l’Irak, suite à son
invasion du Koweït. Cet embargo imposé par l’ONU devait à la fois sanctionner
le régime de Saddam Hussein et dissuader l’Irak de se lancer à nouveau dans
une aventure militaire contre son voisin du sud. Le 14 avril 1995, l’ONU
adoptera la fameuse résolution 986, dite « pétrole contre nourriture », autorisant
l’Irak à procéder à des ventes limitées de pétrole ; les sommes obtenues par
Bagdad devant permettre de satisfaire les besoins essentiels de la population
irakienne en nourriture et médicaments. En 1996, l’Irak signera avec l’ONU un
mémorandum d’accord définissant les modalités d’application de la résolution
986.
Ce programme humanitaire « pétrole contre nourriture » aux proportions
énormes et sans équivalent dans l’histoire de l’ONU a été institué pour atténuer
les effets de l’embargo.
Enfin, par plusieurs résolutions adoptées le 15 décembre 2010, le Conseil de
sécurité de l’ONU a mis un terme aux sanctions imposées à l’Irak après
l’invasion du Koweït, en 1990. Le Conseil a levé l’interdiction faite à Bagdad
d’acquérir des armes de destruction massive et de développer un programme
nucléaire civil. Il a également définitivement abrogé le programme « pétrole
contre nourriture » qui était en pratique terminé depuis le 31 décembre 2007.
Pour le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, ces décisions prises par le
Conseil de sécurité symbolisent la normalisation du statut de l’Irak dans la
communauté des nations.
Des sanctions économiques ont été également prises à l’encontre de l’Iran.
Le 23 décembre 2006, pour la première fois, le Conseil de sécurité a imposé des
sanctions à l’Iran touchant à ses programmes nucléaire et balistique, pour son
refus de suspendre ses activités nucléaires sensibles.
La résolution 1737 a interdit à tout État de fournir des technologies et éléments
spécifiques contribuant aux programmes nucléaires et d’armements iraniens. Le
9 juin 2010, il a voté la résolution 1929 qui prévoit un quatrième train de
sanctions à l’encontre de l’Iran Cette résolution impose notamment la vigilance
en cas de transactions avec toute banque iranienne, y compris la banque centrale.
Pour Hillary Clinton, il s’agit des « sanctions les plus significatives jamais
adoptées contre l’Iran ».
Un accord historique sur les paramètres encadrant le programme nucléaire
iranien, afin d’empêcher qu’il ne conduise à la bombe atomique, a été conclu à
Lausanne le 2 avril 2015 entre Téhéran et les pays négociateurs (Chine, États-
Unis, Russie, France, Allemagne, Royaume-Uni).
Le président Trump a accusé l’Iran de violer « l’esprit » de cet accord en raison
de son rôle « déstabilisateur » au Moyen-Orient et a annoncé le 13 octobre 2017
qu’il refusait de le certifier. Une loi votée en 2015 oblige le Président américain
à dire au Congrès, tous les 90 jours, si l’Iran respecte l’accord nucléaire et si la
levée des sanctions est bien dans l’intérêt national des États-Unis. En cas de «
non-certifi cation », le Congrès a 60 jours pour décider de réimposer ou non des
sanctions.
Par ailleurs, se disant gravement préoccupé par la situation en Libye et
condamnant la violence et l’usage de la force contre des civils, le Conseil de
sécurité de l’ONU a adopté, le 26 février 2011, à l’unanimité, une série de
sanctions contre les autorités libyennes, incluant un embargo sur les armes et la
saisine de la Cour pénale internationale (résolution 1970).
La résolution 1973 adoptée le 17 mars 2011 par le Conseil de sécurité de l’ONU
est venue ensuite renforcer les sanctions prises en février 2011 contre le régime
du colonel Kadhafi, notamment l’embargo sur les armes.
Enfin, le Conseil de sécurité a également adopté des « sanctions ciblées » contre
la Corée du Nord (RPDC) avec les résolutions 1718 (2006) et 1874 (2009) qui
prévoient notamment un embargo sur les programmes nucléaires et les
programmes ayant trait aux missiles et aux armes de destruction massive. Le 2
mars 2016, le conseil a adopté la résolution 2270 qui condamne notamment
l’essai nucléaire réalisé par la RPDC le 6 janvier 2016 et alourdit les sanctions.
Mais ces dernières ont des effets limités et la RPDC a mené son cinquième essai
nucléaire le 9 septembre 2016.
Le 30 novembre 2016, le Conseil de sécurité a de nouveau renforcé les sanctions
contre la RPDC (résolution 2321). Le 5 août et le 11 septembre 2017, il a encore
durci sensiblement les sanctions appliquées à RPDC (résolutions 2371 et 2375).
Le secrétaire général de l’ONU a condamné à plusieurs reprises les différents
tirs de missile effectués par la RPDC en 2017 : c’est une « violation des
résolutions du Conseil de sécurité et une menace pour la paix et la sécurité dans
la région ».
Section 2 : Le système né de la pratique
a. La guerre de Corée
L’invasion de la Corée du Sud par l’armée nord-coréenne, le 25 juin 1950, a
provoqué une action militaire de l’ONU ; action militaire qui se termina avec
l’armistice du 27 juillet 1953 signée à Pan-Mun-Jom. Cette action coercitive
conduite sous l’impulsion des États-Unis n’est pas intervenue en application des
dispositions du chapitre 7 de la Charte de l’ONU. C’est la résolution votée par le
Conseil de sécurité le 7 juillet 1950 qui a légitimé, sous couvert des Nations
unies, l’opération militaire des Américains et de leurs alliés.
Dans cette affaire de Corée, c’est par voie de recommandation que le Conseil de
sécurité est intervenu. Le système prévu par la Charte a été complètement
occulté. L’adoption de la résolution de 1950 a été possible grâce à l’absence de
l’URSS, qui pratiquait alors la politique de la « chaise vide » pour contester la
non-représentation de la Chine populaire à l’ONU. Ainsi, l’URSS n’était pas en
mesure d’opposer son veto à cette intervention armée de l’ONU dont la légalité
fut contestée.
b. La résolution «Union pour le maintien de la paix»
Lorsque l’URSS retourna participer aux réunions du Conseil de sécurité, à partir
du 1er août 1962, elle opposa systématiquement son veto aux décisions
intéressant le conflit coréen. C’est la résolution 377 du 3 novembre 1950 qui
allait permettre de débloquer cette situation.
Cette résolution également connue sous le titre de « Résolution Acheson », du
nom du secrétaire d’État américain (Dean Acheson) qui la fit voter par
l’Assemblée générale des Nations unies, permet à celle-ci d’être saisie des
questions relatives au maintien de la paix lorsque le Conseil de sécurité, paralysé
par l’usage du droit de veto, s’avère incapable de remplir sa « responsabilité
principale ».
Dans l’hypothèse d’une paralysie du Conseil de sécurité imputable à l’exercice
du droit de veto, la résolution Acheson stipule que « l’Assemblée générale
examinera immédiatement la question afin de faire aux membres les
recommandations appropriées sur les mesures collectives à prendre, y compris,
s’il s’agit d’une rupture de la paix ou d’un acte d’agression, l’emploi de la force
armée, en cas de besoin, pour rétablir la paix ou la sécurité internationales ».
Cette résolution 377, dont la « constitutionnalité » par rapport à la Charte a été
vivement critiquée, permet à l’Assemblée de se substituer au Conseil de sécurité
sur la demande de la majorité de ses membres ou sur celle de 9 membres du
Conseil. Mais, à l’inverse du Conseil, l’Assemblée ne disposera que de son
pouvoir de recommandation et ne pourra, là non plus, prendre des mesures
coercitives. Née du conflit coréen, la résolution 377 a été utilisée en 1956 (crises
de Hongrie et de Suez), en 1958 (Liban), en 1960 (Congo), en 1971 (conflit
indo-pakistanais), en 1980 (Afghanistan), en 1981 (Namibie) et en 1982 (affaire
du plateau du Golan).
c. Les opérations de maintien de la paix
L’ONU a créé « les opérations de maintien de la paix » qui sont confiées à des
contingents militaires internationaux appelés « casques bleus ». Placés sous
l’autorité du secrétaire général de l’ONU, les « casques bleus » ont pour objectif
d’intervenir sur les lieux des conflits armés afin de s’interposer entre les
belligérants. En vue de désamorcer les conflits, les forces d’urgence des Nations
unies vont établir une « zone tampon » ou encore un « cordon sanitaire » entre
les parties. L’intervention des casques bleus, dont la constitution dépend des
États membres de l’ONU, extérieurs au conflit, est décidée soit à l’initiative du
Conseil de sécurité, soit à l’initiative de l’Assemblée générale.
Principales « opérations de maintien de la paix » :
FUNU n° 1
Force d’urgence des Nations unies
Créée en 1956 après la crise de Suez (première force d’urgence des Nations
unies).
ONUC : Opération des Nations unies au Congo
Créée en 1960 lors de l’indépendance du Congo
UNFICYP : Force des Nations unies pour le maintien de la paix à Chypre
Créée en 1964 à Chypre.
FUNU n° 2 : Force d’urgence des Nations unies
Mise en place après la guerre du Kippour pour surveiller le cessez-le-feu entre
Israël et l’Égypte (1973).
FNUOD : Force des Nations unies chargée d’observer le désengagement
Créée en 1974 sur le plateau du Golan entre Israël et la Syrie.
FINUL : Force intérimaire des Nations unies au Liban
Créée en 1978 au Liban pour superviser le retrait des forces israéliennes du sud
du pays.
FORPRONU Constituée en 1992 dans l’ex-Yougoslavie.
APRONUC Créée au Cambodge en 1992.
Dans son avis consultatif de 1962 (certaines dépenses des Nations unies), la
Cour internationale de justice a reconnu de façon implicite que l’Assemblée
générale était compétente pour mettre en œuvre des opérations de maintien de la
paix. Celles-ci sont des opérations pacifiques et non coercitives et doivent
nécessairement reposer sur le consentement permanent des États concernés dans
la mesure où elles émanent d’une simple recommandation.
Ces opérations de police onusienne, nées de la défaillance du pouvoir de
coercition du Conseil de sécurité, sont temporaires.
Ces opérations de maintien de la paix (OPM) peuvent aussi consister en des
missions d’observation confiées à un groupe d’observateurs militaires ou civils.
D’une manière générale, ces actions de maintien de la paix visent à affirmer la
présence symbolique de l’ONU sur le lieu d’un conflit. Au 1er octobre 2017, il y
avait 16 OPM en cours.
C. Le rôle positif des Nations unies lors de la guerre du Golfe
La guerre du golfe Arabo-Persique de 1990-1991 a été l’occasion de
l’application presque complète du chapitre 7 de la Charte des Nations unies. La
fi n de l’antagonisme Est-Ouest, qui avait pendant 40 années paralysé le
fonctionnement normal du Conseil de sécurité de l’ONU, allait permettre à ce
dernier de réagir de façon remarquable à la crise consécutive à l’annexion du
Koweït par l’Irak, en mettant en œuvre les dispositions du chapitre 7 de la
Charte de San Francisco.
Ainsi, le Conseil de sécurité a été en mesure de voter une douzaine de
résolutions dont certaines furent adoptées à l’unanimité. Mais la majorité de ces
résolutions ont été prises avec le vote négatif ou l’abstention de Cuba et du
Yémen. Le 2 août 1990, le Conseil de sécurité a obtenu l’accord des cinq
grandes puissances (États-Unis, URSS, Chine, France, et Royaume-Uni) afin
d’adopter la résolution 660 qui condamne l’agression de l’Irak contre le Koweït,
en se fondant sur les articles 39 et 40 de la Charte.
Par la résolution 678 du 29 novembre 1990, le Conseil de sécurité a autorisé le
recours à la guerre après le 15 janvier 1991 (« Autorisant les États membres qui
coopèrent avec le Koweït… d’user de tous les moyens nécessaires pour faire
respecter [les résolutions] si, au 15 janvier 1991, l’Irak n’a pas appliqué les
résolutions »).
Force est de reconnaître que la réaction de l’ONU à la violation flagrante par
l’Irak de sa Charte constitutive a constitué, incontestablement, un moment
historique dans l’histoire de l’Organisation mondiale et plus largement dans
celle de la société internationale. Cependant, tous les mécanismes prévus par le
chapitre 7 de la Charte n’ont pas été utilisés. Si les puissances alliées ont été
habilitées par le Conseil à utiliser la force contre l’Irak, les opérations militaires
n’ont pas été conduites par le Comité d’État-major de l’article 47 de la Charte ;
comité formé des chefs d’État-major des membres permanents du Conseil de
sécurité qui est, au terme de la Charte, le « responsable de la direction
stratégique de toute force armée mise à la disposition du Conseil ». Ce comité
conçu pour coordonner les actions armées internationales n’a jamais fonctionné
en raison notamment de la guerre froide.
De plus, le drapeau de l’ONU n’a pas été attribué à la force multinationale qui
fut constituée. C’est la raison pour laquelle certains ont pu voir dans la guerre du
Golfe une intervention militaire des alliés conduite par les États-Unis au titre de
la légitime défense collective de l’article 51 de la Charte.
Le secrétaire général de l’ONU de l’époque, Javier Perez de Cuellar, a estimé
pour sa part que la guerre du Golfe n’était pas « la guerre des Nations unies »
même si elle était « légale dans le sens où elle a été autorisée par le Conseil de
sécurité » (Le Monde, 9 février 1991). Cela étant admis, cette première véritable
action de police internationale, sans commune mesure avec l’opération
coréenne, a contribué largement à restaurer l’autorité et le prestige de
l’organisation universelle, au point de donner à penser que celle-ci allait être
l’un des principaux agents d’un « nouvel ordre international ».
D. L’incapacité de l’ONU face aux conflits intra-étatiques
Au lendemain de la guerre du Golfe, les Nations unies ont été confrontées à une
sérieuse crise de crédibilité en raison de leur incapacité à régler des conflits
comme ceux du Rwanda ou de l’ex-Yougoslavie. L’ONU s’est révélée
impuissante à assurer sa mission essentielle de sauvegarde de la paix dans la
mesure où les dangers qui menacent celle-ci ont considérablement changé de
nature : ce sont des conflits intra-étatiques et non plus interétatiques qui sont
venus ensanglanter notre planète.
Depuis le début des années 1990, la paix a été beaucoup moins menacée par une
guerre mondiale de type traditionnel que par la multiplication des confl its inter-
ethniques c’est-à-dire des guerres civiles que ce soit par exemple dans les
balkans ou dans les républiques nées de l’ancienne URSS. 17 des 18 guerres
recensées à la fi n 2012 par l’Institut Heidelberg étaient des guerres civiles
intérieures, une seule était un conflit entre deux États (confl it entre le Soudan et
le Soudan du Sud). Or, l’ONU dont la Charte est fondée sur le principe du
respect de la souveraineté des États membres n’a pas vocation à intervenir dans
les affaires intérieures des États.
Comme l’a écrit son ancien secrétaire général, Boutros Boutros-Ghali, l’ONU
doit aujourd’hui faire face « à des sécessions, à des partitions, à des
affrontements ethniques, à des rivalités tribales. Nous avons affaire non plus à
des armées régulières mais, dans la plupart des cas, à des milices, à des bandes
armées, ou même à de simples individus en armes. Dans ces nouveaux conflits,
ce sont les civils qui sont les premières victimes — et parfois même la première
cible — des aff rontements ».
Les déboires de l’ONU en Yougoslavie ou encore en Somalie ont bien montré
que l’organisation était peu faite pour s’interposer dans des guerres
essentiellement civiles. Le Rwanda a illustré l’incapacité de l’Organisation à
empêcher un véritable génocide. C’est la raison pour laquelle certains ont
suggéré de modifi er la Charte des Nations unies afi n d’y introduire une sorte de
droit d’ingérence humanitaire. Ainsi, une situation de génocide ou d’atteinte aux
droits des minorités pourrait légitimement justifier une ingérence humanitaire. Il
faut noter en ce sens que la Commission Carlsson a, en 1995, proposé que la
Charte élaborée en 1945 soit modifiée pour autoriser le Conseil de sécurité à
intervenir dans des crises intra-gouvernementales en cas de « violation massive
de la sécurité des gens ».
D’autres vont jusqu’à affirmer que l’ONU devrait abandonner son ambition
initiale d’imposer la paix à travers le monde pour se consacrer désormais
exclusivement à des opérations d’assistance humanitaire.
D’autre part, force est de constater, comme l’a lui-même reconnu Boutros
Boutros-Ghali, que l’Organisation n’a plus les moyens à sa disposition pour
entreprendre les opérations de rétablissement de la paix prévues au chapitre 7 de
sa Charte. C’est ce qui explique que l’ONU ait été amenée à accepter la sous-
traitance d’opérations importantes de maintien de la paix par de grandes
puissances régionales et leurs armées nationales : les États-Unis sont intervenus
en Haïti, la France au Rwanda et cela avec la bénédiction de l’Organisation.
En Bosnie, les Nations unies ont sous-traité à l’OTAN. Boutros Boutros-Ghali
n’était pas favorable à une politique de « sous-traitance » des opérations de
maintien de la paix à certains pays car, selon lui, « cela affaiblit l’image des
Nations unies ». Mais le secrétaire général de l’Organisation faisait remarquer
qu’il avait « une responsabilité morale » : Si je n’arrive pas à obtenir une
intervention collective de la part des Nations unies, je suis obligé de penser à la
sous-traitance.
Par ailleurs, si on veut que l’ONU joue le rôle de « gendarme » du monde de
l’après-guerre froide, il faut, comme cela a été proposé à plusieurs reprises, la
doter de moyens militaires spécifiques et permanents. Par le passé, l’idée de
mettre en place un corps de « légionnaires volontaires » au service des Nations
unies avait pu être préconisée.
Boutros Boutros-Ghali, qui a jugé « peu réaliste » l’idée de doter l’Organisation
mondiale d’une armée internationale permanente, a affirmé qu’il s’était efforcé
de convaincre les États de créer des Stand-by forces (forces en attente)
spécialement entraînées pour le maintien de la paix et disponibles dans un délai
très bref.
Enfin, on doit souligner que les dépenses de l’ONU occasionnées par les
opérations de maintien de la paix, qui se sont multipliées depuis la chute du mur
de Berlin et la fin de la guerre froide, ont spectaculairement augmenté et cela
alors que l’Organisation internationale a connu une grave crise financière.
S’agissant des effectifs des opérations, alors que les Casques bleus étaient 12
000 en 1996, et 20 000 en 2000, ils sont au nombre d’environ 113 000
aujourd’hui.
E. L’évolution du mandat des casques bleus
Kofi Annan, qui a engagé la réforme du Département des Opérations de
maintien de la paix, a obtenu que les casques bleus soient désormais armés de «
mandats robustes » leur autorisant notamment l’usage plus fréquent de la force
et cela conformément aux recommandations figurant dans le rapport Brahimi de
2000. Les soldats de l’ONU, qui représentent aujourd’hui la deuxième armée
déployée au monde derrière celle des États-Unis, accomplissent désormais de
nombreuses missions : surveiller l’application d’un cessez-le-feu, désarmer les
ex-combattants, assurer la protection des populations civiles, reconstruire l’État
de droit, assurer le respect des droits de l’homme, appuyer l’organisation
d’élections, garantir l’assistance économique et humanitaire…
F. La Commission de consolidation de la paix
Le 20 décembre 2005, le secrétaire général de l’ONU s’est félicité de l’adoption
par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale d’une résolution créant une «
Commission de consolidation de la paix » chargée d’aider les pays sortant d’un
conflit à ne pas rechuter dans la violence. La création de ce nouvel organe
consultatif intergouvernemental des Nations unies, qui figurait parmi les
objectifs du « sommet mondial 2005 », a été qualifiée d’« historique » par Kofi
Annan, selon lequel « trop souvent, nous avons laissé une paix fragile se
désagréger en confl it renouvelé ». « La moitié des pays émergeant d’un conflit
sombrent de nouveau dans la violence dans les cinq années qui suivent », a
souligné le président de l’Assemblée générale de l’ONU dans un discours
prononcé le 20 décembre 2005.
Il a également indiqué que la Commission de consolidation de la paix est un
organe subsidiaire consultatif de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité,
le premier organe de ce type aux Nations unies. Elle est dotée d’un comité
d’organisation permanent, composé de 31 membres élus pour deux ans
renouvelables, dont 5 membres permanents du Conseil de sécurité.
La Commission de consolidation de la paix va en principe intervenir dans les
pays qui sortent d’un conflit, une fois qu’un accord de paix a été conclu et qu’un
degré minimal de sécurité existe. Elle a constitué un Groupe de travail sur les
leçons apprises pour mettre à profit « les expériences passées nationales et
internationales d’engagement post-conflit ». Elle s’est occupée des pays suivants
: le Burundi, la Sierra Leone, la Guinée-Bissau, la République centrafricaine, la
Guinée et le Liberia.

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