David. Camille – Jacquemin, Thomas. Les Nations Unies : une
organisation contestée : Au cœur de la politique internationale, 50 minutes.fr, 2015. Denis Alland, Manuel de droit international public, PUF, 3ème mise à jour, 2015. Chevron, Jean-Jacques, Les Nations Unies, Nane Editions, 2018. Hélène Simonian-Gineste, Fiches d’Institutions Internationales, 4ème éd., Ellipses, 2018. Jean-Claude Zarka, Institutions Internationales, 7ème éd. Ellipses, 2017. Jean-Claude Zarka, Relations Internationales, 5ème éd., Ellipses, 2013. Seydou Nourou Tall, -Droit des organisations internationales africaines, l’Harmattan, 2015. Pierre Marie-Dupuy – Yann Kerbrat, Droit International Public, Précis, Dalloz, 2020. Objectif du cours L’objectif du présent cours est de rendre compte, sans prétention aucune à l’exhaustivité, de l’essence des règles qui régissent le « système onusien ». La démarche dont nous avons fait l’option sera de ne pas essentiellement circonscrire l’étude autour des règles juridiques mais aussi de privilégier l’angle institutionnel. A cet égard, en plus des règles dont la maitrise est fondamentale, le présent support se donne l’ambition de mettre en relief, non sans simplicité, l’architecture institutionnelle dont l’ONU est l’incarnation mais aussi de voir la manière dont elle fonctionne. Introduction L’Organisation des Nations unies, créée à San Francisco le 25 juin 1945, succède à la Société des Nations (SDN) qui échoua dans sa mission d’universalisme et de maintien de la paix. Élément révélateur de l’hégémonie des États-Unis sur l’Organisation universelle, le siège de l’ONU a été fixé à New York et non plus à Genève comme c’était le cas pour la Société des Nations. Élaboré à l’hôtel Dumbarton Oaks de Washington par la Chine, les États-Unis, le Royaume-Uni et l’URSS, le projet d’Organisation des Nations unies et la Charte de l’ONU furent entérinés par 51 pays en 1951. Née en 1945, du rêve de paix des nations au sortir de la Seconde Guerre mondiale, l’ONU a fêté en 2017 son 72e anniversaire. Au titre de ses réussites, on a l’habitude de citer la renaissance de l’État cambodgien où l’aide de l’Organisation a été importante ou encore la création d’une justice internationale, avec les tribunaux sur l’ex-Yougoslavie ou sur le Rwanda puis la mise en place d’une Cour pénale internationale permanente. Il faut également mentionner ses contributions réussies au rétablissement de la démocratie et de la paix au Salvador, au Mozambique et en Afrique du Sud par exemple. Mais depuis de nombreuses années, elle connaît une sérieuse crise de crédibilité. En effet, on a stigmatisé l’incapacité de l’Organisation à venir à bout de confl its comme ceux de l’ex-Yougoslavie et de la Somalie. Comme l’a très justement remarqué son secrétaire général, Boutros Boutros-Ghali « la guerre du Golfe a donné une trop grande crédibilité aux Nations unies » (entretien à Libération du 12 janvier 1995). Effectivement, dans la situation nouvelle de l’après-guerre froide, on avait parlé de « nouvel ordre mondial » et certains avaient prédit que l’ONU allait devenir le « gendarme international » qui interviendrait militairement pour mettre fin à tous les conflits menaçant la paix du globe. Il faut rappeler que durant quatre décennies, l’organisation mondiale a été souvent synonyme d’inertie et cela notamment en raison de la guerre froide. Ni le Viêt-nam, ni la Tchécoslovaquie ou encore l’Afghanistan n’ont fait l’objet de sanctions décidées par l’Organisation universelle. À l’occasion de chaque grande crise internationale, le Conseil de sécurité fut paralysé par l’utilisation du droit de veto. Mais la nouvelle situation internationale est en réalité, comme le constate l’ancien secrétaire général de l’Organisation, « plus difficile que celle de la guerre froide » et nous verrons que l’ONU doit s’adapter au nouveau contexte international. D’autre part, la bureaucratie onusienne, qualifiée jadis de « machin » par Charles de Gaulle, est très critiquée. Déjà, en 1969, le rapport Jackson qualifiait le système onusien de « monstre préhistorique ». Quoi qu’il en soit, force est d’admettre que l’Organisation des Nations unies constitue aujourd’hui le seul véritable forum international et donc un espace de dialogue et de concertation irremplaçable. En outre, il ne faut pas perdre de vue que l’Organisation universelle a également pour but de contribuer au développement économique et social. En effet, la Charte des Nations unies, dans son préambule, assigne à l’Organisation aussi bien de maintenir la paix et la sécurité internationale que de « favoriser le progrès économique et social de tous les peuples ». Boutros Boutros-Ghali a eu raison de rappeler que « 70 % de l’activité des Nations unies sont consacrés aux questions de développement » ; ce que l’opinion publique a tendance à ignorer. De plus, le progrès social inscrit dans la Charte de 1945 n’est pas uniquement un principe généreux. C’est un principe générateur de paix. Effectivement, « il existe une évidente complémentarité entre le maintien de la paix et la promotion du développement. Les facteurs économiques et sociaux pèsent d’un poids important dans la plupart des conflits actuels. De surcroît, les situations de guerre aggravent considérablement le sous- développement des États. Il ne peut donc y avoir de paix efficace sans développement, ni de développement durable sans la paix ». Le 21 mars 2005, le secrétaire général de l’Organisation, Kofi Annan, a présenté un rapport ambitieux (« Dans une liberté plus grande : développement, sécurité et respect des droits de l’homme pour tous ») pour réformer l’organisation internationale, fragilisée par la guerre en Irak de 2003 ; une organisation qui a également dû faire face à toute une série de scandales, en particulier dans sa gestion du programme « pétrole contre nourriture ». Kofi Annan a notamment proposé d’élargir la composition du Conseil de sécurité. Mais, en septembre 2005, le sommet du 60e anniversaire de l’ONU n’a pas débouché sur des résultats concrets. Aucun accord n’a pu être trouvé sur l’élargissement du Conseil de sécurité. Toutefois, la décision a été prise de créer un Conseil des droits de l’homme en lieu et place de la Commission des droits de l’homme. Les États membres ont également décidé d’instituer « une Commission de consolidation de la paix en tant qu’organe intergouvernemental consultatif » ayant vocation à aider les États sortant d’un conflit armé. Le 18 septembre 2017, le président Trump a ouvert les débats de l’Assem-blée générale de l’ONU avec une initiative pour rendre l’Organisation « plus performante et efficace ». Le président américain, qui a dénoncé la « bureaucratie » et la « mauvaise gestion » de l’ONU, a obtenu la signature de 126 pays au bas d’une déclaration appelant à une réforme de l’Organisation. L’administration Trump a souhaité mettre cette dernière sous pression pour qu’elle se réforme. Les États-Unis qui sont le premier contributeur au budget onusien ont menacé de réduire leur contribution financière. On constatera tout d’abord la complexité du « système onusien » en examinant la structure institutionnelle de l’ONU (chapitre 1.). Puis, nous rendrons compte des problèmes soulevés par le régime juridique de la participation des États (chapitre 2.) avant de considérer le bilan de l’Organisation en ce qui concerne le maintien de la paix (chapitre 3). Chapitre 1 : La structure juridico-institutionnelle de l’ONU Il convient d’exposer successivement les organes principaux (A.), les organes subsidiaires (B.), les institutions spécialisées (C.), et les organisations autonomes (D.) qui caractérisent le « système onusien ». A. Les organes principaux Les organes principaux de l’ONU sont l’Assemblée générale (a), le Conseil de sécurité (b), le Conseil économique et social (c), le Conseil de tutelle (d), la Cour internationale de justice (e) et le Secrétariat (f). a. L’Assemblée générale 1. Composition Elle se compose de tous les États membres des Nations unies. Chacun d’eux a le droit d’avoir 5 représentants à l’Assemblée générale mais ne pourra disposer que d’une voix dans les votes. 2. Les sessions L’Assemblée générale tient une session ordinaire chaque année à partir du mois de septembre. L’Assemblée générale peut aussi se réunir en session extraordinaire lorsque les circonstances l’exigent soit à la demande du Conseil de sécurité, soit sur demande de la majorité des membres des Nations unies. 3. Le Bureau Au début de chaque session, un Bureau, qui dirigera les travaux de l’Assemblée générale, sera élu. Il se compose d’un président, de vice-présidents et des présidents des commissions. Le président de l’Assemblée générale joue un rôle essentiel au niveau du bon fonctionnement de la session. 4. L’organisation du travail Le travail de l’Assemblée générale peut se faire soit en séance plénière, soit en commission. Il existe plusieurs commissions dont chacune est spécialisée dans son domaine. Commissions Attributions La 1re Commission Questions politiques et de sécurité La Commission politique spéciale Certaines questions politiques La 2e Commission Questions économiques et financières La 3e Commission Questions sociales, humanitaires et culturelles La 4e Commission Questions de tutelle La 5e Commission Questions administratives et budgétaires La 6e Commission Questions juridiques 5. Les prises de décision En commission, les votes sont acquis à la majorité simple des membres présents et votants. À l’Assemblée plénière, il convient de distinguer deux cas de figure. Pour les questions importantes, on vote à la majorité des deux tiers des membres présents et votants. Les questions importantes, énumérées par la Charte des Nations unies, sont : – les recommandations relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationale ; – l’élection des membres non permanents du Conseil de sécurité ; – l’élection des membres du Conseil économique et social ; – l’élection des membres du Conseil de tutelle ; – l’admission de nouveaux membres dans l’Organisation ; – la suspension des droits et privilèges de membres ; – l’exclusion de membres ; – les questions relatives au fonctionnement du régime de tutelle et les questions budgétaires. Pour toutes les autres questions, on vote à la majorité simple des membres présents et votants. 6. Les compétences de l’Assemblée Les compétences de l’Assemblée générale sont très nombreuses. Il faut distinguer les compétences qui sont spécifiques à l’Assemblée de celles qu’elle partage avec les autres organes principaux des Nations unies. Parmi les compétences propres de l’Assemblée générale, il faut relever notamment : le vote du budget de l’ONU, l’examen des rapports des autres organes de l’ONU, le développement de la coopération internationale dans les domaines économique, social, culturel et dans celui de la protection des droits de l’homme. S’agissant des compétences partagées de l’Assemblée générale, on doit signaler qu’elle a la faculté de « discuter de toute question se rattachant au maintien de la paix et de la sécurité internationale ». Cependant, « toute question de ce genre, qui appelle une action, est renvoyée au Conseil de sécurité par l’Assemblée générale, avant ou après discussion » en vertu de l’article 11 de la Charte des Nations unies. De plus, d’après l’article 12 de la Charte, lorsque le Conseil de sécurité s’occupe d’une question de paix et de sécurité, l’Assemblée générale « ne doit faire aucune recommandation sur cette situation ou ce différend à moins que le Conseil de sécurité ne le lui demande ». Il en résulte une subordination évidente de l’Assemblée générale au Conseil de sécurité. b. Le Conseil de sécurité 1. Composition Le Conseil de sécurité est un organe restreint qui comprend deux types de membres : des membres permanents et des membres élus. La Chine, la France, le Royaume-Uni, les États-Unis, et la Russie, qui occupe désormais, depuis janvier 1992, le siège initialement dévolu à l’URSS, constituent les cinq membres permanents du Conseil de sécurité. De plus, le Conseil comporte dix membres non permanents élus pour deux ans par l’Assemblée générale, renouvelés par moitié chaque année. À l’origine, c’est-à-dire avant la révision de la Charte intervenue en 1963, qui entra en vigueur en 1965, le Conseil de sécurité ne comprenait que 6 membres non permanents. 2. Organisation Le Conseil de sécurité présente la particularité d’être un organe permanent. En eff et, selon l’article 28 de la Charte, il est organisé « de manière à pouvoir exercer ses fonctions en permanence ». Ayant vocation à gérer les crises internationales, le Conseil de sécurité doit être effectivement en mesure de siéger chaque fois que la paix est menacée. C’est pourquoi chaque État membre du Conseil doit disposer d’un représentant permanent à New York, au siège de l’Organisation. Le Conseil de sécurité est le seul organe des Nations unies à avoir un caractère permanent. La présidence du Conseil est tournante. Chaque mois, il est présidé alternativement par le représentant permanent de chaque État membre du Conseil, suivant l’ordre alphabétique anglais. Cette présidence assurée par roulement permet d’éviter que le Conseil ne soit victime de l’influence d’une puissance particulière. Il peut arriver que les ministres des Affaires étrangères soient amenés à représenter leur État au Conseil de sécurité. On se souvient du discours prononcé le 14 février 2003 par le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, lors de la crise irakienne. D’autre part, plusieurs réunions du Conseil de sécurité ont été organisées au niveau des chefs d’État ou de gouvernement. La première réunion au sommet du Conseil de sécurité a eu lieu le 31 janvier 1992 pour débattre de la question de la responsabilité du Conseil en matière de paix et de sécurité internationale. Ce premier sommet du Conseil de sécurité avait demandé au nouveau secrétaire général de l’ONU, Boutros Boutros Ghali, de préparer un rapport sur « le moyen de renforcer la capacité de l’Organisation des Nations unies dans les domaines de la diplomatie préventive, du maintien et du rétablissement de la paix, et sur la façon d’accroître son efficacité dans le cadre des dispositions de la Charte ». Le 24 septembre 2009, une autre réunion au sommet du Conseil de sécurité a adopté à l’unanimité la résolution 1887 sur le désarmement et la non- prolifération nucléaire. 3. Les prises de décision Pour les questions de procédure, les décisions sont adoptées par un vote affirmatif de 9 membres sur les 15 (avant la réforme de 1965, les décisions étaient prises à la majorité de 7 voix). Pour toutes les autres questions, les décisions du Conseil de sécurité sont prises par « un vote affirmatif de 9 de ses membres dans lequel sont comprises les voix de tous les membres permanents ». C’est le fameux « droit de veto » qui permet à chacune des 5 grandes puissances de bloquer le mécanisme de vote. Cette primauté reconnue aux membres permanents va à l’encontre du principe de « l’égalité souveraine » des États consacré par la Charte. Celle-ci « préfère l’inaction de l’Organisation, le non-accomplissement de ses responsabilités dans une crise donnée, à une action susceptible de mettre l’ONU en conflit avec l’un des Cinq ». Dans son rapport rendu public le 20 septembre 1994, le groupe de travail chargé par l’Assemblée générale d’étudier « la question de la représentation équitable au Conseil de sécurité » a relevé « l’opinion très répandue, que le droit de veto est antidémocratique », et qu’il devrait être soit « limité à des sujets particuliers » soit subordonné pour sa validité à deux voix négatives. Pendant la guerre froide, l’opposition quasi permanente entre l’URSS et les États-Unis a souvent neutralisé le Conseil de sécurité. Entre 1945 et 1990, le droit de veto a été utilisé 193 fois. En revanche, il a été utilisé seulement 12 fois de 1990 à 2002. Depuis la fin de la guerre froide, le fonctionnement du Conseil de sécurité a changé car ses cinq membres permanents ont coopéré les uns avec les autres sauf sur certains dossiers comme le Kosovo, l’Irak et la Syrie. La crise syrienne a d’ailleurs marqué le retour à la paralysie du Conseil de sécurité. Le 12 avril 2017, Moscou a opposé son veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité demandant la coopération du régime syrien dans l’enquête sur l’attaque chimique de Khan Cheikhoun imputée à l’armée syrienne tandis que la Chine s’est abstenue. Depuis le début du conflit syrien en 2011, la Russie a opposé huit fois son veto au Conseil de sécurité et a été suivie à six reprises par la Chine. Le 24 septembre 2013, devant l’Assemblée générale de l’ONU, François Hollande a suggéré que les membres permanents du Conseil de sécurité définissent un « code de bonne conduite » pour que, en cas de crime de masse, « ils puissent décider de renoncer collectivement à leur droit de veto ». « Le secrétaire général de l’ONU, à la demande d’au moins cinquante États membres, serait saisi pour se prononcer sur la nature du crime. Une fois son avis rendu, le code de conduite s’appliquerait immédiatement. Pour être réaliste, ce code exclurait les cas où seraient en cause les intérêts vitaux nationaux d’un membre permanent du Conseil » (Laurent Fabius, « Réformer le droit de veto au Conseil de sécurité », Le Monde, 4 octobre 2013). Enfin, notons que le 18 octobre 2013, l’Arabie saoudite a refusé d’entrer au Conseil de sécurité en tant que membre non permanent ; un geste sans précédent visant à protester contre « l’impuissance » du Conseil, notamment face à la crise syrienne. 4. Les compétences du Conseil de sécurité L’article 24 de la Charte des Nations unies investit le Conseil de sécurité de « la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales ». Dans le règlement pacifique des différends, dont la prolongation est susceptible de menacer la paix internationale, le Conseil de sécurité peut intervenir, lorsqu’il est saisi par un État membre ou un État non-membre de l’Organisation des Nations unies. Au cas de menaces contre la paix, de rupture de la paix ou d’actes d’agression, le Conseil est compétent pour décider des mesures à adopter. Le Conseil de sécurité intervient également dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive (AMD). Sa résolution 1373 du 28 septembre 2001 est à l’origine de la création du Comité contre le terrorisme (CCT). Sa résolution 1540 du 28 avril 2004, qui est sa première résolution sur les AM, a créé un Comité (Comité 1540), lequel a vocation à coordonner les actions des États en matière de non-prolifération des AMD. Enfin, on soulignera que le recours à la force armée est licite lorsqu’il est autorisé par le Conseil de sécurité pour maintenir ou rétablir la paix internationale au titre du chapitre VII de la Charte de l’ONU. Le recours à la force est également licite en cas de légitime défense (art.51, Charte de l’ONU). 5. La réforme du Conseil de sécurité Depuis de très nombreuses années, la réforme du Conseil de sécurité est présentée comme une nécessité. Comme on le sait, sa composition reflète les rapports de force au lendemain du second conflit mondial. De l’avis général, il faudrait la modifier afin d’accroître la légitimité mais aussi l’efficacité du Conseil. Dans sa forme actuelle, ce dernier demeure pour tous les États membres de l’organisation universelle un anachronisme. Le 10 décembre 1993, un groupe de travail chargé d’examiner la question de l’élargissement du Conseil de sécurité avait été constitué par l’Assemblée générale. Celui-ci a notamment suggéré d’instaurer des membres dits « semi- permanents » qui seraient amenés à se succéder à la fi n de leur mandat de deux ans. Mais cette idée de créer des membres dits « semi-permanents » a été critiquée. Dans leur rapport très attendu sur la réforme de l’Organisation mondiale, le groupe des « 16 sages » nommé par Kofi Annan a proposé quant à lui que le Conseil de sécurité passe de 15 à 24 membres, avec deux modèles possibles pour la répartition des sièges. Dans la première formule suggérée par ce groupe de 16 personnalités présidé par l’ancien Premier ministre thaïlandais Anand Panyarachun et comprenant l’ancien ministre français de la Justice Robert Badinter, il est prévu l’arrivée de 6 nouveaux membres permanents qui ne seraient pas dotés du droit de veto et de 3 non permanents. La deuxième formule propose l’ajout de 8 membres semi-permanents, élus pour quatre ans renouvelables, et d’un membre non permanent. Selon le rapport du groupe de réflexion, qui a été remis en décembre 2004 à Kofi Annan, la sélection des États candidats devrait se faire en prenant en compte 3 critères : la contribution au budget de l’Organisation universelle ; la contribution à la paix et à la sécurité internationale ; la mise à la disposition de l’Organisation de troupes pour les missions de maintien et de rétablissement de la paix. Kofi Annan n’avait pas affiché de préférence pour l’une ou l’autre des deux propositions faites par le groupe des « Sages ». On rappellera que toute réforme doit être approuvée par les deux tiers des membres de l’Assemblée générale de l’ONU. La réforme doit aussi être ratifiée par les 5 membres permanents du Conseil de sécurité. Il faut également signaler que le Japon, l’Allemagne, l’Inde et le Brésil ont déclaré, dans un communiqué commun publié en septembre 2004, que se fondant sur la conviction partagée qu’ils constituent des candidats légitimes à un siège permanent au sein d’un Conseil élargi, ils soutiennent leurs candidatures mutuelles. Les quatre pays, qui ont mis en avant leur puissance économique et démographique, leur poids régional et leur influence mondiale, ont ajouté qu’à leur avis, « l’Afrique devrait aussi être représentée parmi les membres permanents » du Conseil. Mais le projet des « quatre », qui préconise un Conseil à 25 avec 6 sièges permanents supplémentaires et qui est soutenu par la France comme l’a rappelé le Président Hollande le 25 septembre 2012 à l’ONU, a suscité des oppositions. Certains pays redoutent une modification des grands équilibres actuels. Ainsi, par exemple, l’Italie s’est déclarée publiquement contre la candidature de l’Allemagne. La candidature de l’Inde, quant à elle, inquiète son voisin, le Pakistan et celle de Tokyo n’est pas forcément du goût de Pékin qui s’oppose aussi à l’entrée du Brésil au Conseil de sécurité. Les efforts du « G4 » se sont heurtés à plusieurs pays (Argentine, Italie, Pakistan, Mexique) qui ont cherché à promouvoir leur propre projet de réforme. Ces derniers ont constitué le groupe « Unis pour le consensus », lequel ne veut créer que des sièges non permanents au Conseil. Le continent africain, quant à lui, n’est pas parvenu à s’accorder sur les pays pouvant prétendre aux 2 sièges permanents qui lui étaient réservés dans le projet du « G4 ». Par ailleurs, l’Union africaine a affiché son hostilité à l’idée de sièges permanents sans droit de veto. D’autres scénarios de réforme du Conseil ont été proposés. Mais ils n’ont pu aboutir, faute de consensus. Cela étant précisé, si la réforme du Conseil de sécurité s’avère impossible, l’existence du G20, qui apparaît comme le nouveau cadre de régulation des problèmes se posant à l’échelle mondiale, pourrait constituer une solution alternative. À en croire certains observateurs, le G20, lequel est représentatif de la nouvelle réalité géopolitique de la planète, pourrait devenir « le nouveau Conseil de sécurité ». c. Le Conseil économique et social (ECOSOC) 1. Composition Il se compose de 54 membres élus par l’Assemblée générale pour une durée de 3 ans avec renouvellement par tiers chaque année. Les 5 grandes puissances, membres permanents du Conseil de sécurité, ont jusqu’ici toujours été réélues. 2. Les prises de décision Le Conseil économique et social, qui siège en principe deux fois par an, adopte des recommandations à la majorité simple. 3. Les compétences Il étudie les questions relatives à la coopération économique et sociale internationale. Il est en relation avec les institutions spécialisées. 4. Vers la suppression de l’ECOSOC ? En 1995, la Commission sur le « gouvernement global » constituée sous l’égide du secrétaire général des Nations unies, pour réfléchir à la forme que pourrait prendre une sorte de « nouvel ordre politico-économique mondial », a suggéré la création d’un « Conseil de sécurité économique ». Ce dernier, composé de personnalités politiques, serait susceptible de se substituer à l’actuel G8, le fameux groupe des huit principaux pays industrialisés. Ce Conseil de sécurité économique aurait un rôle délibératif dans les secteurs de l’économie, de la vie sociale et de l’environnement. Le Conseil économique et social de l’ONU « qui ne se justifie plus » serait alors supprimé. L’idée de créer un Conseil de sécurité économique a été développée par de nombreuses personnalités dont l’ancien président de la Commission européenne, Jacques Delors. Le 11 décembre 2012, le président français François Hollande, qui a plaidé pour une « nouvelle gouvernance » mondiale, a suggéré la création « d’un conseil de sécurité économique et social » au niveau des Nations unies : « de la même manière qu’il existe un Conseil de sécurité pour traiter des questions de la paix, il doit être possible dans le cadre onusien d’avoir un Conseil de sécurité traitant des questions de la crise ou de la coordination des politiques économiques ». d. Le Conseil de tutelle 1. Composition Le Conseil de tutelle comprenait à l’origine trois catégories de membres : les 5 membres permanents du Conseil de sécurité, les États chargés d’administrer des territoires sous tutelle, des membres élus pour trois ans par l’Assemblée générale. Le nombre de représentants d’États administrant des territoires sous tutelle devait être égal à celui des représentants d’États n’administrant pas des territoires. 2. Les compétences Il partageait avec l’Assemblée générale le soin d’assurer le contrôle de l’administration des territoires placés sous tutelle. Mais le Conseil de Tutelle s’est trouvé sous l’autorité de l’Assemblée générale des Nations unies. Il pouvait examiner les rapports élaborés par les États administrant des territoires. Il pouvait également faire procéder à des visites périodiques dans les territoires sous tutelle et recevoir des pétitions émanant des populations de ces territoires. Il a occupé la place qui appartenait à la Commission des mandats, sous la Société des Nations. C’est un organe intergouvernemental qui a participé au processus de décolonisation. Dans le document final adopté le 16 octobre 2005, lors du sommet mondial 2005, les États membres de l’ONU ont pris la décision de le supprimer. e. La Cour internationale de justice (CIJ) 1. Composition La CIJ, qui a succédé en 1946, à la Cour permanente de Justice internationale instituée en 1920 sous les auspices de la Société des Nations, est composée de 15 juges élus pour 9 ans. Elle est chargée par la Charte de l’ONU de dire le droit. Les juges de « l’organe judiciaire principal de l’ONU », selon la formule de l’article 92 de la Charte, sont renouvelables par tiers tous les trois ans et sont de nationalités différentes. Ils sont élus conjointement par l’Assemblée générale et le Conseil de sécurité, parmi des personnes « jouissant de la plus haute considération morale », et « possédant une compétence notoire en matière de Droit international » (art. 2 du statut de la CIJ). De plus, il faut désigner des personnes qui « assurent dans l’ensemble la représentation des grandes formes de civilisation et des principaux systèmes juridiques du monde » (art. 9 du statut de la CIJ). Les juges de la CIJ, qui siège à La Haye, élisent pour trois ans leur président et leur vice-président qui sont rééligibles. Les membres de la CIJ bénéficient de garanties : l’inamovibilité et la possession des privilèges et immunités diplomatiques. 2. Les compétences La CIJ est compétente pour trancher les litiges entre États par des arrêts. Ces jugements prononcés par la CIJ sont obligatoires pour les parties. En vertu de l’article 94 de la Charte, chaque membre des Nations unies s’engage à se conformer à la décision de la CIJ dans tout litige auquel il est partie. Si une partie en litige ne satisfait pas aux obligations qui lui incombent en vertu d’un arrêt rendu par la Cour, l’autre partie peut recourir au Conseil de sécurité et celui-ci, s’il le juge nécessaire, peut faire des recommandations ou décider des mesures à prendre pour faire exécuter l’arrêt. La CIJ donne des avis consultatifs à la demande de certains organismes internationaux. Selon l’article 96 de la Charte des Nations unies, l’Assemblée générale ou le Conseil de sécurité peut demander à la CIJ un avis consultatif sur toute question juridique. L’article 96 de la Charte indique également que tout autre organe de l’Organisation ou une institution spécialisée peuvent se voir autoriser par l’Assemblée générale à demander à la Cour internationale de justice des avis consultatifs sur « des questions juridiques qui se poseraient dans le cadre de leur activité ». De nombreux observateurs ont vivement regretté l’absence totale de la Cour internationale de justice lors de la crise du Golfe de 1990-1991. Aussi, pour certains, il serait désormais indispensable d’accroître les pouvoirs de la CIJ afin de lui permettre de contrôler le fonctionnement des organes politiques de l’ONU. De l’avis de Géraud de la Pradelle, la CIJ devrait être en mesure d’apprécier la légalité des actions conduites par le Conseil de sécurité : « en effet, seul un contrôle juridictionnel de la légalité des actes du Conseil de sécurité pourrait garantir le respect du droit par ce Conseil ». D’une manière générale, la CIJ a contribué par sa jurisprudence à l’évolution du droit international public. Comme on le sait, ses arrêts ont notamment exercé une réelle influence sur le développement du droit de la mer. Le 27 octobre 2016, le président de la CIJ, qui a présenté devant l’Assemblée générale de l’ONU le rapport annuel d’activité de la CIJ, a insisté sur la nécessité d’adapter les méthodes de travail de la Cour « afin de répondre à l’augmentation de sa charge de travail et à la complexification des affaires qui lui sont soumises » par un nombre croissant d’États. f. Le secrétariat général 1. Le secrétaire général Il est nommé par l’Assemblée générale sur recommandation du Conseil de sécurité. Il est titulaire d’un mandat de cinq ans renouvelable. La Commission Carlsson a proposé que ce mandat soit porté à sept ans et qu’il ne soit plus renouvelable. D’après l’article 97 de la Charte, le secrétaire général est « le plus haut fonctionnaire de l’organisation ». Il peut « attirer l’attention du Conseil de sécurité sur toute aff aire qui, à son avis, pourrait mettre en danger le maintien de la paix et de la sécurité internationales » (art. 99, charte de l’ONU). Il dirige le Secrétariat dont il nomme le personnel. Il exécute les décisions des diff érents organes de l’Organisation mondiale. Chaque année, il présente un rapport à l’Assemblée générale. Il est assisté de secrétaires généraux adjoints et de sous-secrétaires généraux. Par ailleurs, il est chargé de l’enregistrement et de la publication des traités internationaux passés par les membres de l’ONU. À côté de leurs fonctions administratives, les Secrétaires généraux de l’ONU ont joué un rôle politique essentiel à partir du moment où ils ont été investis de missions diplomatiques. Le secrétaire général de l’ONU est devenu, dans les relations internationales, l’instance majeure de négociation ou encore de médiation. Le Suédois Dag Hammarskjöld, dont le mandat a été caractérisé par le développement de la diplomatie « discrète », a notamment joué un rôle fondamental dans l’installation d’une force internationale en Égypte. Javier Perez de Cuellar, qui a été réélu pour un second mandat, et dont l’action a fait l’unanimité, a joué un rôle très actif lors de la guerre du golfe Arabo-Persique. Son successeur, l’Égyptien Boutros Boutros-Ghali, juriste et ancien ministre des Affaires étrangères, a poursuivi dans la même voie et il a rédigé en 1992 un rapport intitulé « Agenda pour la paix ». Les États-Unis se sont opposés au renouvellement de son mandat et ont utilisé leur droit de veto au conseil de sécurité, le 19 novembre 1996. C’est le Ghanéen Kofi Annan, ancien secrétaire général adjoint de l’ONU chargé des opérations de maintien de la paix, qui a succédé à M. Boutros-Ghali. Kofi Annan a réduit le nombre des fonctionnaires de l’organisation et s’est efforcé d’améliorer la coordination des différents services. Il est parvenu à obtenir de l’Assemblée générale la création d’un poste de vice-secrétaire général. Kofi Annan a fait œuvre de médiateur en arrivant à conclure un accord avec l’Irak, le 23 février 1998.Le 3 avril 2000, devant l’Assemblée générale de l’ONU, à New York, il a présenté « un plan d’action pour le XXIe siècle ». Kofi Annan a réaffirmé sa thèse sur le droit d’intervention humanitaire en insistant sur le fait que « la souveraineté nationale ne saurait justifier les violations aveugles des droits de l’homme et les tueries » Kofi Annan, qui a cherché à rénover les Nations unies, notamment en les ouvrant sur la société civile, a été réélu à l’unanimité, le 27 juin 2001, pour un nouveau mandat de cinq ans. Le 12 octobre 2001, le prix Nobel de la Paix a été attribué conjointement à Kofi Annan et à l’ONU. Le 21 mars 2005, il a présenté devant l’Assemblée générale de l’ONU le projet de réforme le plus ambitieux de l’Organisation depuis la création de celle-ci, en 1945. Intitulé « Dans une liberté plus grande », un titre directement tiré de la Charte de 1945, le rapport de Kofi Annan est en fait l’aboutissement d’un processus de réforme initié après la crise irakienne. Le 1er janvier 2007, le ministre sud-coréen des Affaires étrangères, Ban Ki- Moon, qui a été pendant deux ans (2001-2003) le haut représentant de la Corée du Sud auprès de l’ONU, a succédé à Kofi Annan. La fermeté qu’a affichée Ban Ki-Moon dans son soutien aux mouvements du « printemps arabe » a été saluée par les pays occidentaux. Il a été réélu, le 21 juin 2011, pour un deuxième mandat de cinq ans. Le 19 juillet 2012, il a souligné que « la communauté internationale a une responsabilité collective envers le peuple syrien ». Le 16 septembre 2013, il a qualifié de « crime de guerre » l’utilisation, le 21 août 2013, d’armes chimiques en Syrie, une utilisation attestée par un rapport des inspecteurs de l’ONU. Le 1er janvier 2017, Antonio Guterres a succédé à Ban Ki-Moon. Cet ancien Premier ministre du Portugal a été le Haut-Commissaire de l’ONU pour les réfugiés de juin 2005 à décembre 2015. Le 12 décembre 2016, après avoir prêté serment en tant que 9e secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres a déclaré que l’Organisation devait « se préparer à changer » et a recommandé des réformes dans trois domaines : le maintien de la paix, l’aide au développement durable et la gestion. M. Guterres souhaite mener à bien la réforme de la bureaucratie onusienne. Il veut aussi rendre les érations de maintien de la paix « plus efficaces et moins coûteuses». 2. Les fonctionnaires Plus de 10 000 fonctionnaires internationaux travaillent pour la machine administrative onusienne. Selon la Charte, leur recrutement doit s’effectuer sur « une base aussi large que possible ». D’autre part, les fonctionnaires internationaux doivent être des personnes « possédant les plus hautes qualités de travail, de compétence, et d’intégrité ». Ils sont désignés par le secrétaire général de l’ONU sur présentation de leur gouvernement respectif. Ils ne doivent recevoir aucune injonction émanant de ce dernier. Ils bénéficient de privilèges et immunités « qui leur sont nécessaires pour exercer en toute indépendance leurs fonctions en rapport avec l’organisation » (article 105 de la Charte). B. Les organes subsidiaires L’article 7 de la Charte prévoit que « les organes subsidiaires qui se révéleraient nécessaires pourront être créés ». L’Assemblée générale et le Conseil de sécurité sont les deux organes principaux qui disposent du pouvoir de créer un organe subsidiaire. Les organes subsidiaires ne sont pas autonomes par rapport à l’ONU. Principaux organes subsidiaires de l’ONU : La Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement CNUCED Le Programme des Nations unies pour le développement PNUD L’Institut des Nations unies pour la formation et la recherche UNITAR Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés HCR Le Conseil mondial de l’alimentation CMA Le Fonds des Nations unies pour l’enfance UNICEF Le Programme alimentaire mondial de la FAO et de l’ONU PAM L’Office de secours et de travaux pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient UNRWA Le Centre des Nations unies pour les établissements humains HABITAT Le Fonds des Nations unies pour la population FNUAP Le Programme des Nations unies pour l’environnement PNUE La CNUCED (192 membres) se réunit tous les quatre ans au niveau ministériel pour déterminer les priorités de l’institution onusienne. Le Groupe des 77, qui est la plus grande coalition de pays en développement au sein de l’Organisation mondiale, a été institué à l’issue de la première CNUCED. Le PNUE créé en 1972 a notamment pour fonction de suivre la situation de l’environnement dans le monde et de coordonner les programmes menés dans le cadre de l’ONU. C. Les institutions spécialisées Les institutions spécialisées constituent des organismes autonomes par rapport à l’ONU. L’article 57 de la Charte stipule que « les diverses institutions spécialisées créées par accords intergouvernementaux et pourvues, au terme de leurs statuts, d’attributions internationales étendues, dans les domaines économique, social, de la culture intellectuelle et de l’éducation, de la santé publique et autres domaines connexes, sont reliées à l’Organisation conformément aux dispositions de l’article». Les institutions spécialisées sont des organisations internationales indépendantes créées par les États. Leur liaison avec l’ONU va reposer sur un accord passé entre le Conseil économique et social des Nations unies et l’institution spécialisée. Les institutions spécialisées travaillent, au moins indirectement, pour la paix : l’UNESCO, créée en 1945, alphabétise, la FAO, créée en 1945, lutte contre la faim, l’OMS, créée en 1946, combat les endémies. Toutefois, comme l’a écrit Victor-Yves Ghebali, « les institutions spécialisées des Nations unies sont entrées en crise au début des années 1970 ». La politisation excessive de ces institutions, qui a pour effet d’affaiblir leurs crédibilités, a été critiquée. En réaction à « l’admission de la Palestine comme État membre », le 31 octobre 2011, à l’UNESCO, les États-Unis ont décidé de suspendre leur contribution financière à cette organisation qui constitue le plus gros forum international après l’ONU. Le 12 octobre 2017, les États-Unis ont annoncé leur retrait de l’UNESCO, accusant l’organisation onusienne d’être « anti-israélienne ». Ils avaient déjà quitté l’UNESCO en 1984 pour dénoncer sa mauvaise gestion et étaient revenus en 2003. Le premier ministre israélien a également annoncé le 12 octobre 2017 qu’Israël avait engagé les procédures nécessaires en vue de son retrait de l’organisation. Le FMI, qui a été créé en 1944 aux termes d’un accord signé lors de la conférence de Bretton Woods, est chargé d’assurer la stabilité du système monétaire et fi nancier international. Il doit prévenir les crises et résoudre ces dernières lorsqu’elles surviennent. Il a aussi pour mission de faciliter l’expansion du commerce international. Le FMI fournit des crédits aux pays en développement qui connaissent des difficultés financières et leur demande, en contrepartie, de mettre en œuvre des réformes structurelles. En avril 2009, le sommet du G20 de Londres l’a investi d’un nouveau rôle de surveillance des pratiques économiques et financières des États. Ce sommet du G20, qui a décidé le triplement de ses ressources, a renforcé le FMI qui est désormais placé au centre de la régulation mondiale. Le conseil d’administration du FMI a adopté, le 5 novembre 2010, une importante réforme destinée à attribuer aux pays émergents une place plus conforme à leur poids économique. En mai 2010, les dirigeants européens ont mis en œuvre un plan d’aide à la Grèce financé par la zone euro et le FMI. Ce dernier n’était encore jamais venu au chevet d’un État membre de la zone euro. Après la Grèce, d’autres pays de la zone euro (Irlande, Portugal, Espagne, Chypre) ont également bénéficié d’un plan d’aide concocté par les institutions de l’UE et le FMI. La Banque mondiale constitue le second pilier de l’architecture financière internationale mise en place lors de la conférence de Bretton Woods, en 1944. La lutte contre la pauvreté est devenue son principal objectif. En 1997, elle a été à l’origine de l’initiative de la réduction de la dette des États les plus pauvres. Ses ressources proviennent des pays développés et d’emprunts sur les marchés internationaux des capitaux. Principales institutions spécialisées de l’ONU : L’Organisation internationale du travail OIT La Banque mondiale BM L’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture UNESCO L’Organisation pour l’alimentation et l’agriculture FAO ou OAA Le Fonds monétaire international FMI L’Organisation mondiale de la santé OMS L’Union postale universelle UPU L’Union internationale des télécommunications UIT L’Organisation maritime internationale OMI L’Organisation météorologique mondiale OMM L’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle OMPI Le Fonds international du développement agricole FIDA L’Organisation des Nations unies pour le développement industriel ONUDI D. Les organisations autonomes Sans avoir la qualité d’institution spécialisée, deux organisations internationales sont reliées à l’ONU par le biais d’accords particuliers : l’Organisation mondiale du commerce, qui compte 159 États membres, et l’Agence internationale de l’énergie atomique. a. L’Organisation mondiale du commerce (OMC) Le GATT (General Agreement on Tariffs and Trade) ou accord général sur les tarifs douaniers et le commerce, signé à Genève le 30 octobre 1947 et entré en vigueur le 1er janvier 1948, a eu pour but de faciliter le développement du commerce international. Conformément aux accords du cycle de l’Uruguay, le GATT s’est transformé en 1995 en Organisation mondiale du commerce (OMC) dont l’acte final a été signé le 15 avril 1994 à Marrakech. Comme le GATT, l’OMC, qui est entrée en activité le 1 er janvier 1995, a pour tâche principale de libérer le commerce mondial de ses entraves et de faire accepter par tous les pays participants la règle de base qui est la fameuse clause de la nation la plus favorisée. Elle est la seule organisation internationale qui a vocation à s’occuper des règles qui régissent le commerce entre les États. La conférence ministérielle réunit tous les pays membres et définit la stratégie générale de l’OMC. Elle se réunit au moins tous les deux ans et est l’autorité suprême de l’OMC. Le Conseil général exerce les fonctions de la conférence ministérielle entre les réunions de celle-ci. Cet organe permanent formé de représentants de tous les États membres traite des affaires courantes de l’Organisation. L’Organe de règlement des différends apparaît quant à lui comme la « contribution la plus originale de l’OMC à l’économie mondiale ». Il est en réalité le Conseil général composé de tous les membres de l’OMC intervenant en matière de différends. Le directeur général de l’OMC, le brésilien Roberto Azevedo, s’est félicité de l’accord sur l’agriculture, l’aide au développement et la facilitation des échanges conclu à Bali le 7 décembre 2013 : « Pour la première fois de son histoire, l’OMC a vraiment tenu ses promesses. Nous avons remis le mot “mondial” dans l’Organisation mondiale du commerce ». La 10e Conférence ministérielle de l’OMC a eu lieu à Nairobi en décembre 2015. La Déclaration de Nairobi a reconnu les divergences de vue des pays au sujet de l’avenir du Cycle de Doha. Alors que de nombreux accords commerciaux régionaux ont été conclus, elle a réaffirmé la nécessité de faire en sorte que ces accords « restent un complément, et non un substitut, du système commercial multilatéral ». Enfin, depuis l’élection de Donald Trump, la Maison Blanche souhaite rejeter le système multilatéral façonné, depuis l’après-guerre, par le GATT puis par l’OMC. En mars 2017, lors du G20 de Baden-Baden, Washington a refusé de s’engager, comme il en était l’usage depuis 2005, sur la « lutte contre toutes les formes de protectionnisme ». Si la déclaration finale du sommet du G20 de Hambourg, en juillet 2017 a réaffirmé son engagement à lutter contre le protectionnisme, elle a reconnu pour la première fois aux pays le droit à l’usage d’« instruments légitimes de défense commerciale ». b. L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) L’AIEA, dont le siège est établi à Vienne, a pour objectif l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire et la protection contre la rétroactivité. Elle a pour origine le fameux discours (« des atomes pour la paix ») prononcé le 8 décembre 1953 par le président des États-Unis Dwight David Eisenhower devant l’Assemblée générale de l’ONU. Le statut de l’AIEA a été adopté en 1956 et est entré en vigueur le 29 juillet 1957. Le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) signé le 1er juillet 1968 par la Grande-Bretagne, les États-Unis, ainsi que l’URSS, et entré en vigueur le 5 mars 1970, qui fixe des limites à la prolifération nucléaire, a chargé l’AIEA de vérifier le respect de leurs engagements par les États non nucléaires. Le TNP, qui a été signé par 189 pays, repose sur la distinction entre les puissances nucléaires et les puissances non nucléaires. Les puissances nucléaires sont les États qui prennent l’engagement de refuser de transférer à des États non nucléaires les technologies nucléaires militaires et d’œuvrer pour le désarmement. Il s’agit des États qui ont procédé à une explosion atomique avant le 1er janvier 1967 : les États-Unis, l’URSS, le Royaume-Uni, la France et la Chine. Les pays non nucléaires s’interdisent, quant à eux, d’acquérir des technologies nucléaires militaires. Mais plusieurs États non-signataires du traité ont élaboré et, parfois même, testé des bombes atomiques. Le Pakistan, Israël ou l’Inde, qui n’ont pas signé le TNP, possèdent l’arme atomique. La communauté internationale a décidé, le 11 mai 1995, de rendre permanent le TNP. Cette décision a été prise sans vote par une « majorité » des 175 États représentés à la conférence organisée par les Nations unies à New York. La conférence d’examen du TNP est un grand rendez-vous diplomatique qui a lieu tous les cinq ans. En mai 2000, à l’issue de la conférence de révision, les cinq grandes puissances nucléaires reconnues (France, Chine, États-Unis, Grande-Bretagne, Russie) avaient accepté « un engagement sans équivoque d’accomplir l’élimination totale de leurs arsenaux nucléaires ». Toutefois, l’accord n’avait prévu aucun calendrier. Cet engagement a été salué par Kofi Annan qui l’a qualifié de « consensus historique ». Il a été réaffirmé en mai 2010 par ces cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU. Mais les Cinq, qui ont réaffirmé leur autorité sur l’ordre nucléaire mondial, se sont à nouveau opposés à l’établissement d’un quelconque calendrier. Le 4 mars 2005, à l’occasion du 35e anniversaire du TNP, le secrétaire général de l’ONU avait estimé que ce traité continuait de représenter la pierre angulaire de la sécurité mondiale. Mais sa crédibilité a été mise à mal par les ambitions de l’Iran et de la Corée du Nord, laquelle est sortie du TNP en 2003. Le 28 mai 2010, la conférence de suivi du TNP est parvenue à un accord portant sur la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient. Mais la conférence internationale sur l’établissement d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient mentionnée dans le document final de la Conférence d’examen du TNP de 2010, qui devait avoir lieu en 2012, n’a pas été organisée. Les trois États dépositaires du TNP (États-Unis, Russie et Royaume- Uni) ont décidé de la reporter. La porte-parole de la diplomatie américaine, Victoria Nuland, a déclaré le 23 novembre 2012 que la conférence était reportée en raison en particulier de l’absence de consensus entre les pays concernés. Par ailleurs, selon la nouvelle doctrine nucléaire américaine, qui a été présentée en avril 2010, les États-Unis s’engagent désormais à ne pas utiliser l’arme nucléaire contre des États non nucléaires à condition qu’ils respectent les dispositions du TNP. D’autre part, l’AIEA a renforcé ses pouvoirs d’inspection. Elle a adopté en 1997 un « protocole additionnel » au TNP qui autorise des inspections sans préavis, même sur des installations non nucléaires et exige des États davantage d’information. Mais, l’AIEA n’est pas dotée d’un système de sanction spécifique. Ses moyens restent limités. Les relations entre l’AIEA et l’ONU sont définies par un accord approuvé par l’Assemblée générale des Nations unies, le 14 novembre 1957. Chaque année, l’AIEA doit remettre un rapport à l’Assemblée générale de l’ONU. L’AIEA peut aussi être amenée à adresser un rapport au Conseil de sécurité de l’ONU. C’est la fameuse résolution 1141 adoptée à l’unanimité par ce dernier, le 8 novembre 2002, qui a été à l’origine du retour des inspecteurs de l’AIEA en Irak. Cette résolution a institué un régime renforcé de vérification du désarmemet de l’Irak dont l’exécution a été confiée à l’AIEA et à la commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations unies (COCOVINU). La résolution 1141, qui ordonnait la reprise des inspections en Irak, a imposé au régime de Saddam Hussein des conditions très strictes pour le travail des inspecteurs en désarmement. Elle a exigé de l’Irak une coopération pleine et entière avec la COCOVINU et l’AIEA. Elle a accordé aux inspecteurs un accès immédiat, inconditionnel et sans restriction à la totalité des sites irakiens. L’article 13 de la résolution 1141 rappelait que le Conseil de sécurité « a averti à plusieurs reprises l’Irak des graves conséquences auxquelles il aurait à faire face s’il continuait à manquer à ses obligations ». Par ailleurs, en 1986, l’AIEA s’est dotée d’une convention sur la notification rapide d’un accident nucléaire et d’une convention sur l’assistance en cas d’accident nucléaire ou de situation d’urgence radiologique. Ces textes ont été complétés par la convention de 1994 sur la sûreté nucléaire.
Chapitre 2 : Le régime juridique de la participation des États à l’ONU
Il sera question d’aborder dans un premier temps, les règles organisant l’adhésion à l’ONU (Section 1) avant de voir les règles présidant à sa perte (Section 2). Section 1 : les règles d’adhésion à l’ONU A. L’obtention de la qualité de membre de l’ONU Il faut opérer une distinction entre les membres originaires des Nations unies et les membres admis. Selon l’article 3 de la Charte, les membres originaires de l’ONU sont les États qui ont participé à la Conférence de San Francisco ou ceux qui ont antérieurement signé la Déclaration des Nations unies du 1 er janvier 1942. Les membres originaires de l’ONU sont les États pacifiques qui ont combattu contre les puissances de l’Axe. Parmi les cinquante et un membres originaires de l’ONU, il faut citer la Pologne qui avait souscrit à la Déclaration de 1942 mais qui n’était pas présente à la Conférence et aussi la Biélorussie et l’Ukraine, simples États fédérés, qui comme du reste l’Argentine et le Danemark, avaient participé à la Conférence sans avoir approuvé la Déclaration des Nations unies. Au terme de l’article 4 de la Charte, la procédure d’admission à l’ONU est subordonnée à un certain nombre de conditions. L’État qui sollicite son admission à l’ONU doit être « un État pacifique ». Il doit de plus accepter « les obligations de la Charte », et être « capable de les remplir et disposé à le faire ». C’est l’Assemblée générale qui décide de l’admission d’un État à l’ONU et cela sur recommandation du Conseil de sécurité. De 1946 à 1950, seulement neuf États ont pu être admis à l’ONU (Afghanistan, Islande, Suède et la Thaïlande en 1946, Pakistan et Yémen en 1947, Birmanie en 1948, Israël en 1949 et Indonésie en 1950). Cette crise au niveau de la procédure d’admission à l’ONU s’explique par la « guerre froide » qui a conduit chaque bloc à user de son droit de veto au Conseil de sécurité pour s’opposer à l’entrée d’un État de l’autre bloc. De 1951 à 1955, aucun État n’a pu être admis à l’Organisation des Nations unies. Ce n’est qu’à partir de 1955 qu’est venue prendre fi n cette période de blocage. En effet, en 1955, 16 États ont été admis simultanément à l’ONU, c’est ce que l’on a qualifié le « package deal » : l’Albanie, l’Autriche, la Bulgarie, le Cambodge, Ceylan, l’Espagne, la Finlande, la Hongrie, l’Italie, la Jordanie, l’Islande, le Laos, la Libye, le Népal, le Portugal et la Roumanie. En 1960, en raison du processus de décolonisation, 16 États africains ont été admis à l’ONU : le Burkina-Faso, le Bénin, le Cameroun, le Congo, la Côte d’Ivoire, le Gabon, le Mali, le Niger, le Nigeria, la République centrafricaine, le Sénégal, la Somalie, le Tchad, le Togo, le Zaïre, et Madagascar. D’une manière générale, grâce à la « détente », les Nations unies ont pu devenir véritablement à partir de 1955 l’Organisation « universelle ». À la différence de la Société des Nations, l’ONU a toujours accepté sans difficulté l’admission des micro-États ; États exigus, comme par exemple le Cap-Vert, dont on peut se demander s’ils sont véritablement en mesure de satisfaire pleinement aux obligations fixées par la Charte. On peut citer le cas de l’île de Grenade, admise à l’ONU en 1975, et qui ne compte guère que 100 000 habitants. De même, Sainte Lucie, qui est entrée aux Nations unies en 1979, n’a que 110 000 habitants. Admis à l’ONU en 1984, Brunei Darussalam n’en compte que 250 000. Trois autres micro-États sont apparus à l’occasion de la 54e Assemblée générale de l’ONU, en septembre 1999 (Tonga, Nauru et Kiribati). Ces nouveaux États membres de l’Organisation des Nations unies sont venus confirmer une tendance bien établie, celle de la « morcellisation » ou « balkanisation » de la planète. Aujourd’hui, l’ONU compte 193 États. La fi n de la guerre froide, qui s’est caractérisée par l’éclatement de l’ancien bloc de l’Est, a permis à 17 nouveaux États d’entrer à « La Maison de Verre » de New York : 12 républiques de l’ex- URSS, 2 républiques issues de la partition de l’ex-Tchécoslovaquie, la République tchèque et la République slovaque et 3 républiques de l’ex- Yougoslavie, la Croatie, la Slovénie et la Bosnie-Herzégovine. Le 27 septembre 2002, le Timor-Oriental est devenu le 191e membre de l’ONU, sous le nom de république démocratique du Timor-Oriental. Le 28 juin 2006, le Monténégro est devenu le 192e État membre de l’ONU. Enfin, le 14 juillet 2011, l’Assemblée générale des Nations unies a voté par acclamation l’admission de la République du Soudan du Sud comme nouvel État membre au sein de l’ONU, ce qui fait d’elle le 193 e membre de l’Organisation mondiale. Le 13 juillet 2011, le Conseil de sécurité avait adopté une résolution qui recommandait cette admission. Les États non-membres de l’organisation mondiale ne sont pas concernés par les droits et obligations inscrits dans la Charte de l’ONU. Toutefois, ils peuvent siéger à l’ONU en qualité d’observateurs. Ils pourront ainsi participer aux travaux des différents organes de l’organisation sans toutefois pouvoir disposer du droit de vote. B. La représentation de l’État à l’ONU C’est à propos de la Chine que s’est posé le problème de la représentation d’un État membre. Initialement, la Chine était représentée dans les instances de l’ONU par la « république de Chine » qui avait participé à la constitution de l’Organisation universelle et cela conformément à la Charte des Nations unies. Mais après 1949, la « république de Chine » se replia dans l’île de Formose, alors que Mao Tsé-toung instaurait le régime de la « république populaire de Chine », à Pékin. Jusqu’en 1971, Pékin n’est pas parvenu à faire admettre que la Chine ne pouvait plus être représentée à l’ONU par le gouvernement de Formose. Pour protester contre l’absence de représentation à l’ONU de la Chine populaire, l’URSS pratiqua au Conseil de sécurité la « politique de la chaise vide ». Ce n’est qu’à la suite d’un vote favorable de l’Assemblée générale de l’ONU de 1971 que le gouvernement de Pékin a pu représenter la Chine à la place du gouvernement de Formose. C’est la résolution 2758 du 25 octobre 1971 qui a décidé : le rétablissement de la république populaire de Chine dans tous ses droits et la reconnaissance des représentants de son gouvernement comme les seuls représentants de la Chine à l’Organisation des Nations unies, ainsi que l’expulsion immédiate des représentants de Tchang-Kaï-Chek du siège qu’ils occupent illégalement à l’Organisation des Nations unies et dans tous les organismes qui s’y rattachent. Un problème analogue s’est posé en ce qui concerne la représentation du Cambodge. En effet, jusqu’en 1991, c’était la délégation du Kampuchéa démocratique qui représentait le Cambodge à l’ONU et cela alors que depuis 1979 le gouvernement de la république populaire du Kampuchéa était au pouvoir à Phnom-Penh. Section 2 : La perte de la qualité de membre Après l’exposé du retrait à un Etat de la qualité de membre (A), il sera question d’attirer l’attention sur le cas particulier des membres observateurs ( B). A. Le retrait d’un Etat de l’ONU À la différence du pacte de la Société des Nations, la Charte des Nations unies n’a pas prévu l’hypothèse d’un retrait volontaire d’un État membre. Toutefois, ce retrait volontaire de l’ONU, à l’initiative d’un État membre, n’est pas expressément prohibé par la Charte qui respecte ici le principe de la souveraineté des États. L’Indonésie s’est retirée de l’ONU en 1965 mais elle est revenue participer aux activités de l’Organisation en 1966. L’exclusion d’un État membre est permise par l’article 6 de la Charte des Nations unies. Il s’agit d’une sanction décidée par l’Assemblée générale, sur recommandation du Conseil de sécurité, en vue d’exclure de l’Organisation un État qui « enfreint de manière persistante les principes énoncés dans la Charte ». Mais cette procédure déclenchée par l’Organisation et destinée à retirer sa qualité de membre de l’ONU à un État n’est pas facile à appliquer car elle risque de se heurter au droit de veto de l’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité. En octobre 1974, une tentative d’exclusion de l’Afrique du Sud de l’ONU n’a pas pu aboutir. Enfin, tout en demeurant membre de l’ONU, un État peut être « suspendu » selon l’article 5 de la Charte de « l’exercice des droits et privilèges inhérents à la qualité de membre » dans l’hypothèse où « une action préventive ou coercitive a été entreprise par le Conseil de sécurité » contre lui. Le premier des droits reconnus aux États membres des Nations unies est naturellement le droit de vote à l’Assemblée générale ainsi que dans tous les organes restreints auxquels ils appartiennent. De plus, tout État membre de l’ONU a, sans droit de vote, le droit de participer aux travaux des organes dont il ne fait pas partie. B. Le statut d’État observateur non-membre de l’ONU Pour devenir un « État membre » de l’ONU, la demande est examinée par le Conseil de sécurité et doit obtenir le vote de 9 des 15 membres du Conseil et le non-veto des 5 membres permanents. Elle est ensuite soumise au vote de l’Assemblée générale où un vote favorable à la majorité des deux tiers est requis. En revanche, pour devenir un « État non-membre » de l’Organisation universelle, il ne faut pas présenter une demande au Conseil de sécurité. La requête doit être soumise au vote de l’Assemblée générale et elle requiert une majorité simple. Avant de devenir membres à part entière de l’ONU, des pays comme la Finlande, l’Autriche ou le Japon ont longtemps bénéficié du statut d’observateur permanent ; un statut qui « relève de l’usage » car, comme le souligne l’ONU, « aucune disposition de la Charte des Nations unies n’en fait état ». Historiquement, il a été créé en 1946 pour la Suisse, laquelle est devenue un « État membre » de l’ONU en 2002. Le 29 novembre 2012, l’Assemblée générale des Nations unies a accordé à la Palestine le statut d’État observateur non-membre auprès de l’ONU. L’obtention de ce statut « d’État non-membre » ne signifie pas sa reconnaissance en tant qu’État sur le plan international mais uniquement dans le cadre des Nations unies. Il permet toutefois de renforcer l’existence de la Palestine sur la scène internationale. Ce statut, qui est aussi celui du Vatican, lui donne accès à des agences de l’ONU comme l’OMS ainsi qu’à des traités internationaux, notamment le traité de Rome relatif à la CPI. Mais il ne lui donne pas le droit de vote au sein des organes onusiens. Chapitre 3 : L’ONU et le maintien de la paix Il importe de voir le système prévu par la charte (Section 1) avant d’étudier le système né de la pratique (Section 2). Section 1. Le système prévu par la Charte En vertu du chapitre 7 de la Charte des Nations unies (« Action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte d’agression »), le Conseil de sécurité se voit conférer une fonction de « police internationale ». a. Le rôle du Conseil de sécurité Il est compétent non seulement pour adopter des recommandations, mais également pour prendre des mesures coercitives. L’interruption complète ou partielle des relations économiques et des communications ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques, radioélectriques et des autres moyens de communication, ainsi que la rupture des relations diplomatiques sont, selon l’article 41 de la Charte, les mesures non militaires pouvant être décidées par le Conseil de sécurité. Mais, si ce dernier juge que les sanctions économiques ou politiques défi nies à l’article 41 de la Charte sont « inadéquates », il a alors la possibilité d’entreprendre au moyen de forces aériennes, navales ou terrestres, toute action qu’il juge nécessaire au maintien ou au rétablissement de la paix et de la sécurité internationales conformément à l’article 42 de la Charte. Dans son article 46, celle-ci charge le Conseil de sécurité d’élaborer les « plans pour l’emploi de la force armée » avec l’aide du Comité d’État-major. L’utilisation des pouvoirs dévolus au Conseil doit être rendue possible par la mise à sa disposition de contingents nationaux fournis par tous les membres des Nations unies. Ces derniers peuvent accorder un droit de passage aux forces terrestres, navales, aériennes constituées de contingents nationaux. b. Les sanctions prises par le Conseil de sécurité Tout d’abord, plusieurs résolutions ont été votées par le Conseil de sécurité à partir de décembre 1966 et jusqu’en 1979 en vue d’infliger à la Rhodésie une asphyxie économique. Mais l’efficacité de ces sanctions est discutable. Ensuite, en 1977, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 418 imposant un embargo sur les livraisons d’armes et de matériel militaire à destination cette fois-ci d’un État membre de l’ONU, la République sud-africaine. Ces sanctions n’ont disparu qu’en 1994 avec le démantèlement de l’apartheid. Par la résolution 748 du 31 mars 1992, le Conseil de sécurité a institué un embargo sur les fournitures d’armes, l’assistance technique et militaire, et les relations aériennes en direction de la Libye . Le 25 septembre 1991, le Conseil a voté la résolution 713 décrétant l’embargo sur les livraisons d’armes à l’ex-Yougoslavie. Le 30 mai 1992, il a adopté la résolution 757 instituant un triple embargo pétrolier, commercial et aérien contre le Monténégro et la Serbie. Un véritable blocus a été décrété en 1990 à l’encontre de l’Irak, suite à son invasion du Koweït. Cet embargo imposé par l’ONU devait à la fois sanctionner le régime de Saddam Hussein et dissuader l’Irak de se lancer à nouveau dans une aventure militaire contre son voisin du sud. Le 14 avril 1995, l’ONU adoptera la fameuse résolution 986, dite « pétrole contre nourriture », autorisant l’Irak à procéder à des ventes limitées de pétrole ; les sommes obtenues par Bagdad devant permettre de satisfaire les besoins essentiels de la population irakienne en nourriture et médicaments. En 1996, l’Irak signera avec l’ONU un mémorandum d’accord définissant les modalités d’application de la résolution 986. Ce programme humanitaire « pétrole contre nourriture » aux proportions énormes et sans équivalent dans l’histoire de l’ONU a été institué pour atténuer les effets de l’embargo. Enfin, par plusieurs résolutions adoptées le 15 décembre 2010, le Conseil de sécurité de l’ONU a mis un terme aux sanctions imposées à l’Irak après l’invasion du Koweït, en 1990. Le Conseil a levé l’interdiction faite à Bagdad d’acquérir des armes de destruction massive et de développer un programme nucléaire civil. Il a également définitivement abrogé le programme « pétrole contre nourriture » qui était en pratique terminé depuis le 31 décembre 2007. Pour le Secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, ces décisions prises par le Conseil de sécurité symbolisent la normalisation du statut de l’Irak dans la communauté des nations. Des sanctions économiques ont été également prises à l’encontre de l’Iran. Le 23 décembre 2006, pour la première fois, le Conseil de sécurité a imposé des sanctions à l’Iran touchant à ses programmes nucléaire et balistique, pour son refus de suspendre ses activités nucléaires sensibles. La résolution 1737 a interdit à tout État de fournir des technologies et éléments spécifiques contribuant aux programmes nucléaires et d’armements iraniens. Le 9 juin 2010, il a voté la résolution 1929 qui prévoit un quatrième train de sanctions à l’encontre de l’Iran Cette résolution impose notamment la vigilance en cas de transactions avec toute banque iranienne, y compris la banque centrale. Pour Hillary Clinton, il s’agit des « sanctions les plus significatives jamais adoptées contre l’Iran ». Un accord historique sur les paramètres encadrant le programme nucléaire iranien, afin d’empêcher qu’il ne conduise à la bombe atomique, a été conclu à Lausanne le 2 avril 2015 entre Téhéran et les pays négociateurs (Chine, États- Unis, Russie, France, Allemagne, Royaume-Uni). Le président Trump a accusé l’Iran de violer « l’esprit » de cet accord en raison de son rôle « déstabilisateur » au Moyen-Orient et a annoncé le 13 octobre 2017 qu’il refusait de le certifier. Une loi votée en 2015 oblige le Président américain à dire au Congrès, tous les 90 jours, si l’Iran respecte l’accord nucléaire et si la levée des sanctions est bien dans l’intérêt national des États-Unis. En cas de « non-certifi cation », le Congrès a 60 jours pour décider de réimposer ou non des sanctions. Par ailleurs, se disant gravement préoccupé par la situation en Libye et condamnant la violence et l’usage de la force contre des civils, le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté, le 26 février 2011, à l’unanimité, une série de sanctions contre les autorités libyennes, incluant un embargo sur les armes et la saisine de la Cour pénale internationale (résolution 1970). La résolution 1973 adoptée le 17 mars 2011 par le Conseil de sécurité de l’ONU est venue ensuite renforcer les sanctions prises en février 2011 contre le régime du colonel Kadhafi, notamment l’embargo sur les armes. Enfin, le Conseil de sécurité a également adopté des « sanctions ciblées » contre la Corée du Nord (RPDC) avec les résolutions 1718 (2006) et 1874 (2009) qui prévoient notamment un embargo sur les programmes nucléaires et les programmes ayant trait aux missiles et aux armes de destruction massive. Le 2 mars 2016, le conseil a adopté la résolution 2270 qui condamne notamment l’essai nucléaire réalisé par la RPDC le 6 janvier 2016 et alourdit les sanctions. Mais ces dernières ont des effets limités et la RPDC a mené son cinquième essai nucléaire le 9 septembre 2016. Le 30 novembre 2016, le Conseil de sécurité a de nouveau renforcé les sanctions contre la RPDC (résolution 2321). Le 5 août et le 11 septembre 2017, il a encore durci sensiblement les sanctions appliquées à RPDC (résolutions 2371 et 2375). Le secrétaire général de l’ONU a condamné à plusieurs reprises les différents tirs de missile effectués par la RPDC en 2017 : c’est une « violation des résolutions du Conseil de sécurité et une menace pour la paix et la sécurité dans la région ». Section 2 : Le système né de la pratique a. La guerre de Corée L’invasion de la Corée du Sud par l’armée nord-coréenne, le 25 juin 1950, a provoqué une action militaire de l’ONU ; action militaire qui se termina avec l’armistice du 27 juillet 1953 signée à Pan-Mun-Jom. Cette action coercitive conduite sous l’impulsion des États-Unis n’est pas intervenue en application des dispositions du chapitre 7 de la Charte de l’ONU. C’est la résolution votée par le Conseil de sécurité le 7 juillet 1950 qui a légitimé, sous couvert des Nations unies, l’opération militaire des Américains et de leurs alliés. Dans cette affaire de Corée, c’est par voie de recommandation que le Conseil de sécurité est intervenu. Le système prévu par la Charte a été complètement occulté. L’adoption de la résolution de 1950 a été possible grâce à l’absence de l’URSS, qui pratiquait alors la politique de la « chaise vide » pour contester la non-représentation de la Chine populaire à l’ONU. Ainsi, l’URSS n’était pas en mesure d’opposer son veto à cette intervention armée de l’ONU dont la légalité fut contestée. b. La résolution «Union pour le maintien de la paix» Lorsque l’URSS retourna participer aux réunions du Conseil de sécurité, à partir du 1er août 1962, elle opposa systématiquement son veto aux décisions intéressant le conflit coréen. C’est la résolution 377 du 3 novembre 1950 qui allait permettre de débloquer cette situation. Cette résolution également connue sous le titre de « Résolution Acheson », du nom du secrétaire d’État américain (Dean Acheson) qui la fit voter par l’Assemblée générale des Nations unies, permet à celle-ci d’être saisie des questions relatives au maintien de la paix lorsque le Conseil de sécurité, paralysé par l’usage du droit de veto, s’avère incapable de remplir sa « responsabilité principale ». Dans l’hypothèse d’une paralysie du Conseil de sécurité imputable à l’exercice du droit de veto, la résolution Acheson stipule que « l’Assemblée générale examinera immédiatement la question afin de faire aux membres les recommandations appropriées sur les mesures collectives à prendre, y compris, s’il s’agit d’une rupture de la paix ou d’un acte d’agression, l’emploi de la force armée, en cas de besoin, pour rétablir la paix ou la sécurité internationales ». Cette résolution 377, dont la « constitutionnalité » par rapport à la Charte a été vivement critiquée, permet à l’Assemblée de se substituer au Conseil de sécurité sur la demande de la majorité de ses membres ou sur celle de 9 membres du Conseil. Mais, à l’inverse du Conseil, l’Assemblée ne disposera que de son pouvoir de recommandation et ne pourra, là non plus, prendre des mesures coercitives. Née du conflit coréen, la résolution 377 a été utilisée en 1956 (crises de Hongrie et de Suez), en 1958 (Liban), en 1960 (Congo), en 1971 (conflit indo-pakistanais), en 1980 (Afghanistan), en 1981 (Namibie) et en 1982 (affaire du plateau du Golan). c. Les opérations de maintien de la paix L’ONU a créé « les opérations de maintien de la paix » qui sont confiées à des contingents militaires internationaux appelés « casques bleus ». Placés sous l’autorité du secrétaire général de l’ONU, les « casques bleus » ont pour objectif d’intervenir sur les lieux des conflits armés afin de s’interposer entre les belligérants. En vue de désamorcer les conflits, les forces d’urgence des Nations unies vont établir une « zone tampon » ou encore un « cordon sanitaire » entre les parties. L’intervention des casques bleus, dont la constitution dépend des États membres de l’ONU, extérieurs au conflit, est décidée soit à l’initiative du Conseil de sécurité, soit à l’initiative de l’Assemblée générale. Principales « opérations de maintien de la paix » : FUNU n° 1 Force d’urgence des Nations unies Créée en 1956 après la crise de Suez (première force d’urgence des Nations unies). ONUC : Opération des Nations unies au Congo Créée en 1960 lors de l’indépendance du Congo UNFICYP : Force des Nations unies pour le maintien de la paix à Chypre Créée en 1964 à Chypre. FUNU n° 2 : Force d’urgence des Nations unies Mise en place après la guerre du Kippour pour surveiller le cessez-le-feu entre Israël et l’Égypte (1973). FNUOD : Force des Nations unies chargée d’observer le désengagement Créée en 1974 sur le plateau du Golan entre Israël et la Syrie. FINUL : Force intérimaire des Nations unies au Liban Créée en 1978 au Liban pour superviser le retrait des forces israéliennes du sud du pays. FORPRONU Constituée en 1992 dans l’ex-Yougoslavie. APRONUC Créée au Cambodge en 1992. Dans son avis consultatif de 1962 (certaines dépenses des Nations unies), la Cour internationale de justice a reconnu de façon implicite que l’Assemblée générale était compétente pour mettre en œuvre des opérations de maintien de la paix. Celles-ci sont des opérations pacifiques et non coercitives et doivent nécessairement reposer sur le consentement permanent des États concernés dans la mesure où elles émanent d’une simple recommandation. Ces opérations de police onusienne, nées de la défaillance du pouvoir de coercition du Conseil de sécurité, sont temporaires. Ces opérations de maintien de la paix (OPM) peuvent aussi consister en des missions d’observation confiées à un groupe d’observateurs militaires ou civils. D’une manière générale, ces actions de maintien de la paix visent à affirmer la présence symbolique de l’ONU sur le lieu d’un conflit. Au 1er octobre 2017, il y avait 16 OPM en cours. C. Le rôle positif des Nations unies lors de la guerre du Golfe La guerre du golfe Arabo-Persique de 1990-1991 a été l’occasion de l’application presque complète du chapitre 7 de la Charte des Nations unies. La fi n de l’antagonisme Est-Ouest, qui avait pendant 40 années paralysé le fonctionnement normal du Conseil de sécurité de l’ONU, allait permettre à ce dernier de réagir de façon remarquable à la crise consécutive à l’annexion du Koweït par l’Irak, en mettant en œuvre les dispositions du chapitre 7 de la Charte de San Francisco. Ainsi, le Conseil de sécurité a été en mesure de voter une douzaine de résolutions dont certaines furent adoptées à l’unanimité. Mais la majorité de ces résolutions ont été prises avec le vote négatif ou l’abstention de Cuba et du Yémen. Le 2 août 1990, le Conseil de sécurité a obtenu l’accord des cinq grandes puissances (États-Unis, URSS, Chine, France, et Royaume-Uni) afin d’adopter la résolution 660 qui condamne l’agression de l’Irak contre le Koweït, en se fondant sur les articles 39 et 40 de la Charte. Par la résolution 678 du 29 novembre 1990, le Conseil de sécurité a autorisé le recours à la guerre après le 15 janvier 1991 (« Autorisant les États membres qui coopèrent avec le Koweït… d’user de tous les moyens nécessaires pour faire respecter [les résolutions] si, au 15 janvier 1991, l’Irak n’a pas appliqué les résolutions »). Force est de reconnaître que la réaction de l’ONU à la violation flagrante par l’Irak de sa Charte constitutive a constitué, incontestablement, un moment historique dans l’histoire de l’Organisation mondiale et plus largement dans celle de la société internationale. Cependant, tous les mécanismes prévus par le chapitre 7 de la Charte n’ont pas été utilisés. Si les puissances alliées ont été habilitées par le Conseil à utiliser la force contre l’Irak, les opérations militaires n’ont pas été conduites par le Comité d’État-major de l’article 47 de la Charte ; comité formé des chefs d’État-major des membres permanents du Conseil de sécurité qui est, au terme de la Charte, le « responsable de la direction stratégique de toute force armée mise à la disposition du Conseil ». Ce comité conçu pour coordonner les actions armées internationales n’a jamais fonctionné en raison notamment de la guerre froide. De plus, le drapeau de l’ONU n’a pas été attribué à la force multinationale qui fut constituée. C’est la raison pour laquelle certains ont pu voir dans la guerre du Golfe une intervention militaire des alliés conduite par les États-Unis au titre de la légitime défense collective de l’article 51 de la Charte. Le secrétaire général de l’ONU de l’époque, Javier Perez de Cuellar, a estimé pour sa part que la guerre du Golfe n’était pas « la guerre des Nations unies » même si elle était « légale dans le sens où elle a été autorisée par le Conseil de sécurité » (Le Monde, 9 février 1991). Cela étant admis, cette première véritable action de police internationale, sans commune mesure avec l’opération coréenne, a contribué largement à restaurer l’autorité et le prestige de l’organisation universelle, au point de donner à penser que celle-ci allait être l’un des principaux agents d’un « nouvel ordre international ». D. L’incapacité de l’ONU face aux conflits intra-étatiques Au lendemain de la guerre du Golfe, les Nations unies ont été confrontées à une sérieuse crise de crédibilité en raison de leur incapacité à régler des conflits comme ceux du Rwanda ou de l’ex-Yougoslavie. L’ONU s’est révélée impuissante à assurer sa mission essentielle de sauvegarde de la paix dans la mesure où les dangers qui menacent celle-ci ont considérablement changé de nature : ce sont des conflits intra-étatiques et non plus interétatiques qui sont venus ensanglanter notre planète. Depuis le début des années 1990, la paix a été beaucoup moins menacée par une guerre mondiale de type traditionnel que par la multiplication des confl its inter- ethniques c’est-à-dire des guerres civiles que ce soit par exemple dans les balkans ou dans les républiques nées de l’ancienne URSS. 17 des 18 guerres recensées à la fi n 2012 par l’Institut Heidelberg étaient des guerres civiles intérieures, une seule était un conflit entre deux États (confl it entre le Soudan et le Soudan du Sud). Or, l’ONU dont la Charte est fondée sur le principe du respect de la souveraineté des États membres n’a pas vocation à intervenir dans les affaires intérieures des États. Comme l’a écrit son ancien secrétaire général, Boutros Boutros-Ghali, l’ONU doit aujourd’hui faire face « à des sécessions, à des partitions, à des affrontements ethniques, à des rivalités tribales. Nous avons affaire non plus à des armées régulières mais, dans la plupart des cas, à des milices, à des bandes armées, ou même à de simples individus en armes. Dans ces nouveaux conflits, ce sont les civils qui sont les premières victimes — et parfois même la première cible — des aff rontements ». Les déboires de l’ONU en Yougoslavie ou encore en Somalie ont bien montré que l’organisation était peu faite pour s’interposer dans des guerres essentiellement civiles. Le Rwanda a illustré l’incapacité de l’Organisation à empêcher un véritable génocide. C’est la raison pour laquelle certains ont suggéré de modifi er la Charte des Nations unies afi n d’y introduire une sorte de droit d’ingérence humanitaire. Ainsi, une situation de génocide ou d’atteinte aux droits des minorités pourrait légitimement justifier une ingérence humanitaire. Il faut noter en ce sens que la Commission Carlsson a, en 1995, proposé que la Charte élaborée en 1945 soit modifiée pour autoriser le Conseil de sécurité à intervenir dans des crises intra-gouvernementales en cas de « violation massive de la sécurité des gens ». D’autres vont jusqu’à affirmer que l’ONU devrait abandonner son ambition initiale d’imposer la paix à travers le monde pour se consacrer désormais exclusivement à des opérations d’assistance humanitaire. D’autre part, force est de constater, comme l’a lui-même reconnu Boutros Boutros-Ghali, que l’Organisation n’a plus les moyens à sa disposition pour entreprendre les opérations de rétablissement de la paix prévues au chapitre 7 de sa Charte. C’est ce qui explique que l’ONU ait été amenée à accepter la sous- traitance d’opérations importantes de maintien de la paix par de grandes puissances régionales et leurs armées nationales : les États-Unis sont intervenus en Haïti, la France au Rwanda et cela avec la bénédiction de l’Organisation. En Bosnie, les Nations unies ont sous-traité à l’OTAN. Boutros Boutros-Ghali n’était pas favorable à une politique de « sous-traitance » des opérations de maintien de la paix à certains pays car, selon lui, « cela affaiblit l’image des Nations unies ». Mais le secrétaire général de l’Organisation faisait remarquer qu’il avait « une responsabilité morale » : Si je n’arrive pas à obtenir une intervention collective de la part des Nations unies, je suis obligé de penser à la sous-traitance. Par ailleurs, si on veut que l’ONU joue le rôle de « gendarme » du monde de l’après-guerre froide, il faut, comme cela a été proposé à plusieurs reprises, la doter de moyens militaires spécifiques et permanents. Par le passé, l’idée de mettre en place un corps de « légionnaires volontaires » au service des Nations unies avait pu être préconisée. Boutros Boutros-Ghali, qui a jugé « peu réaliste » l’idée de doter l’Organisation mondiale d’une armée internationale permanente, a affirmé qu’il s’était efforcé de convaincre les États de créer des Stand-by forces (forces en attente) spécialement entraînées pour le maintien de la paix et disponibles dans un délai très bref. Enfin, on doit souligner que les dépenses de l’ONU occasionnées par les opérations de maintien de la paix, qui se sont multipliées depuis la chute du mur de Berlin et la fin de la guerre froide, ont spectaculairement augmenté et cela alors que l’Organisation internationale a connu une grave crise financière. S’agissant des effectifs des opérations, alors que les Casques bleus étaient 12 000 en 1996, et 20 000 en 2000, ils sont au nombre d’environ 113 000 aujourd’hui. E. L’évolution du mandat des casques bleus Kofi Annan, qui a engagé la réforme du Département des Opérations de maintien de la paix, a obtenu que les casques bleus soient désormais armés de « mandats robustes » leur autorisant notamment l’usage plus fréquent de la force et cela conformément aux recommandations figurant dans le rapport Brahimi de 2000. Les soldats de l’ONU, qui représentent aujourd’hui la deuxième armée déployée au monde derrière celle des États-Unis, accomplissent désormais de nombreuses missions : surveiller l’application d’un cessez-le-feu, désarmer les ex-combattants, assurer la protection des populations civiles, reconstruire l’État de droit, assurer le respect des droits de l’homme, appuyer l’organisation d’élections, garantir l’assistance économique et humanitaire… F. La Commission de consolidation de la paix Le 20 décembre 2005, le secrétaire général de l’ONU s’est félicité de l’adoption par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale d’une résolution créant une « Commission de consolidation de la paix » chargée d’aider les pays sortant d’un conflit à ne pas rechuter dans la violence. La création de ce nouvel organe consultatif intergouvernemental des Nations unies, qui figurait parmi les objectifs du « sommet mondial 2005 », a été qualifiée d’« historique » par Kofi Annan, selon lequel « trop souvent, nous avons laissé une paix fragile se désagréger en confl it renouvelé ». « La moitié des pays émergeant d’un conflit sombrent de nouveau dans la violence dans les cinq années qui suivent », a souligné le président de l’Assemblée générale de l’ONU dans un discours prononcé le 20 décembre 2005. Il a également indiqué que la Commission de consolidation de la paix est un organe subsidiaire consultatif de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité, le premier organe de ce type aux Nations unies. Elle est dotée d’un comité d’organisation permanent, composé de 31 membres élus pour deux ans renouvelables, dont 5 membres permanents du Conseil de sécurité. La Commission de consolidation de la paix va en principe intervenir dans les pays qui sortent d’un conflit, une fois qu’un accord de paix a été conclu et qu’un degré minimal de sécurité existe. Elle a constitué un Groupe de travail sur les leçons apprises pour mettre à profit « les expériences passées nationales et internationales d’engagement post-conflit ». Elle s’est occupée des pays suivants : le Burundi, la Sierra Leone, la Guinée-Bissau, la République centrafricaine, la Guinée et le Liberia.
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Un Droit Dans La Guerre ? Volume III. Cas, Documents Et Supports D'enseignement Relatifs À La Pratique Contemporaine Du Droit International Humanitaire