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Alain Mingat

Aptitudes et classes sociales. Accès et succès dans


l'enseignement supérieur
In: Population, 36e année, n°2, 1981 pp. 337-359.

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Mingat Alain. Aptitudes et classes sociales. Accès et succès dans l'enseignement supérieur. In: Population, 36e année, n°2,
1981 pp. 337-359.

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pop_0032-4663_1981_num_36_2_17177
Resumen
Mingat Alain. — Aptitudes y clases sociales. Posibilidades de ingreso y de éxito en la educación
superior. En este artículo se estudian dos tipos de selección social en el sistema educa- cional. En
primer lugar se comparan las tasas de escolaridad en la educación superior, según clases sociales, con
las aptitudes intelectuales medidas por los Q.I. respectivos. No se plantea que el Q.I. mide o no la
inteligencia, sino que se toma en consideración que es utilizado de hecho por la institución escolar para
medir su eficacia. Se concluye que si la educación superior admitiera exclu- sivamente a los individuos
que tienen los mejores Q.I., en ese caso la proporción de hijos de obreros y de campesinos que
deberian ingresar a este nivel deberia ser mucho mayor que la proporción actual. En el segundo saco
se estudia el éxito en la educación superior según el origen social : se comprueba que el éxito escolar
es casi independiente de la profesión de los padres; pero que se producen muchos contrastes en la
distri- bución de los estudiantes según las disciplinas que eligen : se produce una falta de selección ya
que al comienzo existe una autoselección. Los estudiantes eligen las carreras profesionales en las
cuales piensan que van a tener éxito.

Résumé
Mingat Alain. — Aptitudes et classes sociales : accès et succès dans l'enseignement supérieur. Cet
article étudie deux types de sélection sociale dans l'enseignement. Dans le premier cas, les taux de
scolarisation dans l'enseignement supérieur pour les diverses classes sociales sont comparés aux
aptitudes intellectuelles mesurées par le Q. I.. On ne se demande pas si le Q. I. mesure l'intelligence,
on tient seulement compte du fait qu'il est utilisé par l'institution scolaire pour en mesurer l'efficacité. Or,
on constate que si l'enseignement supérieur ne retenait que les individus ayant les meilleurs Q. I., la
proportion d'enfants d'ouvriers et de paysans qui y entreraient serait bien plus importante qu'elle n'est
actuellement. Dans le second cas on a étudié la réussite dans l'enseignement supérieur selon l'origine
sociale : les taux de réussite générale sont presque indépendants de la profession des parents mais la
répartition des étudiants selon les disciplines est assez contrastée : il y a donc absence de sélection car
au départ, une autosélection des étudiants se produit. Ils se dirigent vers les matières où ils pensent
pouvoir réussir.

Abstract
Mingat Alain. — Aptitudes and Social Classes : Access to and Success in Higher Education. In this
paper, two types of social selection in education are considered. In the first place, the proportions in
higher education in various social groups are compared to the distribution of measured intelligence in
these groups. The adequacy of measurements of intelligence is not discussed, but account is taken of
the fact that IQ measures are used in educational institutions for the purposes of assessment. It is noted
that if entry into higher education were dependent entirely on the achievement of high IQs, the
proportions of workers' and farmers' children in higher education would be far greater than are currently
found. Next, the success rate in higher education for students of different social origin is considered.
Success rates are nearly independent of parental occupation, but the breakdown of students in different
academic disciplines differs by social origin. There is some degree of self-selection at the outset;
students tend to move towards subjects where they feel they are most likely to succeed.
APTITUDES

ET CLASSES SOCIALES

Accès et succès

dans l'enseignement supérieur

L'égalité des chances au départ est l'un des grands th


èmes de nos sociétés démocratiques qui prêtent donc une
grande attention aux sélections et à la réussite scolaire et
universitaire. Or, de nombreux facteurs sociaux et démogra
phiques perturbent très vite cette première étape de la diffé
renciation dans la société. L'INED s'est intéressé à la question
depuis très longtemps et sous la conduite d'A. Girard, de
grandes enquêtes ont été réalisées sur « le niveau intellectuel
des enfants d'âge scolaire » *. Alain Mingat ** utilise ici quel
ques-uns des résultats obtenus par l'INED pour mettre à
l'épreuve la cohérence de la sélection sociale dans l'ense
ignement; il prend ainsi à leur propre piège les mesures clas
siques de l'intelligence (Q. I.) ou du succès universitaire.

Ce texte analyse la population de l'enseignement supérieur en


France et examine les processus de sélection tant en ce qui concerne
les niveaux scolaires primaire et secondaire qui définissent la population
étudiante à son accès à l'Université qu'en ce qui concerne les modes
de réussite à l'intérieur de l'enseignement supérieur lui-même. En effet,
il apparaît clairement qu'il n'est pas possible d'étudier spécifiquement

* Cf. les cahiers « Travaux et Documents » de l'INED,


— № 13. Le niveau intellectuel des enfants d'âge scolaire (t. I), 1950, 284 p.
— № 23. Le niveau intellectuel des enfants d'âge scolaire (t. II). La détermination
des aptitudes, l'influence des facteurs constitutionnels, familiaux et
sociaux, 1954, 300 p.
— № 54. Enquête nationale sur le niveau intellectuel des enfants d'âge scolaire,
1969, 180 p.
— № 83. Enquête nationale sur le niveau intellectuel des enfants d'âge scolaire
(t. III), 1978, 296 p.
** Chercheur à l'Institut de Recherche sur l'Economie de l'Education
(IREDU).

Population, 2, 1981, 337-360.


338 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

l'enseignement supérieur en ignorant qu'il fait partie d'un système éduc


atif global dont il est le dernier maillon (1). C'est la raison pour laquelle
nous consacrerons la première partie de ce texte à caractériser la popul
ation étudiante par rapport à la population totale des classes d'âges
correspondantes en cherchant notamment à mesurer le poids respectif
des facteurs intellectuels et sociaux dans /'« explication » de la sélection
primaire et secondaire. Les facteurs intellectuels seront estimés d'une
part par le score à des tests standardisés et d'autre part par la réussite
scolaire dans l'enseignement primaire. On observera alors comment
fonctionnent les procédures d'orientation et notamment celle d'entrée
dans l'enseignement secondaire qui était pour la population étudiée la
plus fondamentale.
Dans une seconde partie, nous nous attacherons plus directement
à l'enseignement supérieur universitaire en faisant ressortir les spécifi
cités des différentes disciplines en matière de sélection, en recherchant les
facteurs associés à la réussite et à l'échec et en fournissant des est
imations des chances individuelles de réussir dans les disciplines ana
lysées. Ces éléments nous seront alors utiles pour comprendre « en
retour » les modes d'accès et les choix de filières, en renversant la
chronologie et le sens habituel de l'analyse car nous verrons que les
choix de disciplines sont caractérisés par une forte autosélection de
la part des étudiants qui anticipent en moyenne leurs chances objectives
de réussir venant donc ainsi renforcer la sélection globale.

I. — Sélection scolaire « sur le mérite » et accès


à l'enseignement supérieur

S'interroger sur le point de savoir si la sélection de l'enseignement


s'effectue en prenant en compte de façon convenable les qualités intel
lectuelles des enfants revient à rechercher si la distribution des carrières
scolaires individuelles est cohérente avec celle des aptitudes. En effet,
on fait l'hypothèse instrumentale que le système éducatif demande des
aptitudes croissantes au fur et à mesure qu'on s'élève dans la hiérarchie
scolaire. Il convient alors de savoir comment interfèrent les facteurs
intellectuels et sociaux dans la définition des scolarisations et quelle
part revient en propre aux facteurs cognitifs dans l'admission ou l'e
xclusion à un niveau éducatif donné.

(!) On observe bien que les modes d'entrée et de réussite dans l'enseign
ement supérieur sont fondamentalement différents dans le cas par exemple de
l'Autriche où la population bachelière représente moins de 10 % de la classe
d'âges par rapport au Japon ou aux Etats-Unis où la majorité de la classe
d'âges se présente à la porte des Universités.
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 339

On peut a priori considérer que la sélection s'effectue purement


au mérite si l'un quelconque des individus retenus est supérieur, en
termes de qualité, à chacun des individus éliminés. Cela suppose que
la mesure de l'aptitude ait été réalisée de façon satisfaisante pour chacun.
Les données disponibles concernant l'aptitude sont soit des mesures
type Q. I. soit des observations de la réussite scolaire. Ce ne sont pas
des mesures de l'aptitude innée des individus, ni des estimations de la
performance qu'ils n'auraient pu réaliser si leur milieu de développement
avait été plus stimulant par exemple, mais seulement des mesures de
la capacité ponctuelle qu'ils ont de réussir certains types d'épreuves
mettant en jeu certains types de mécanismes cognitifs qui sont de même
nature que ceux que valorise l'institution scolaire. Dans la mesure où
le milieu de développement est plus stimulant dans les catégories éc
onomiquement et culturellement favorisées que dans les catégories défa
vorisées, les résultats Q. I. ne sont donc pas exempts d'un certain biais
social (2). Par conséquent, en jugeant le caractère méritocratique du
système d'enseignement à l'aide de quotients intellectuels, on sous-
estime les capacités potentielles de scolarisation des enfants d'origine
modeste, si bien que les taux de scolarisation que nous pourrons simuler
devront être considérés comme des minorants de ce qui serait possible
en utilisant pleinement les talents potentiels de ces enfants.
Sur le plan empirique, la France possède des renseignements abon
dants grâce aux enquêtes menées par l'Institut National d'Etudes Démog
raphiques (INED) ainsi que par l'Institut National d'Orientation Sco
laire et Professionnelle. L'enquête sur le niveau intellectuel des enfants
d'âge scolaire <3), qui a porté sur environ 100 000 enfants scolarisés
de 6 à 14 ans, nous donne la distribution des notes de Q. I. suivant
plusieurs caractères parmi lesquels la catégorie socio-professionnelle
d'origine, le nombre d'enfants dans la famille ainsi que le rang dans
la fratrie. Ces renseignements sur les distributions de Q. I. sont comparés
avec les distributions de scolarisation pour juger du rôle de l'aptitude
dans la sélection effectuée par le système d'enseignement.
Observons tout d'abord la distribution des Q. I. dans les différentes
classes sociales, chacune des fonctions de répartition (approximativement
normales par construction du test) étant caractérisée par ses deux
premiers moments (moyenne - variance).

(2) II est toutefois très excessif de dire que le Q. I. n'est qu'un habillage
pseudo-scientifique visant à faire reconnaître les plus aptes parmi les enfants
de milieu aisé puisque la variance des Q. I. individuels ne s'explique pour à
peine 10 % par la catégorie sociale d'origine.
(3) INED (1973).
340 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

Tableau 1. — Q.I. moyen des enfants suivant la catégorie sociale


DES PARENTS.

Catégorie socio-professionnelle Q.I. moyen Ecart-type Q.I. moyen


des parents
Ouvriers agricoles 93,5 13,1 95,6
Agriculteurs 96,4 13,1
Manoeuvres 92,6 13,3
Ouvriers spécialisés 96,1 13,3 96,7
Ouvriers qualifiés 98,3 13,3
Contremaîtres 102,5 13,3
Employés 101,8 13,7 101,8
Artisans-commerçants 103,8 13,9 103,8
Cadres moyens 107,9 13,7
Professions libérales 107,4 14,0 108,9
Cadres supérieurs 111,5 13,6
Ensemble 100 15 100

Nous notons d'abord que la relation entre Q. I. moyen et origine


sociale est conforme aux résultats d'études antérieures tant en France
qu'à l'étranger : les moyennes s'ordonnent approximativement suivant la
hiérarchie des emplois occupés par le chef de famille. Les écarts entre
les grands groupes, ouvriers et cadres sont de 12,2 points de Q.I.;
il est intéressant de noter que cet écart est du même ordre de grandeur
que celui qu'on trouve à l'intérieur du groupe des ouvriers lorsqu'on
compare manœuvres et contremaîtres (écart de 9,9 points de Q. L).
Ceci atteste par conséquent d'un continuum lorsqu'on considère les
enfants classés suivant la catégorie socio-professionnelle de leurs parents
(tableau 1). D'une façon générale, s'il est vrai qu'il y a des différences
importantes entre groupes sociaux, il faut aussi garder à l'esprit qu'à
l'intérieur de chaque catégorie la variance est très grande et qu'il y
a de très larges recouvrements dans les fonctions de distribution. Le
graphique 1 montre ces recouvrements pour les enfants d'ouvriers et
de cadres supérieurs.
Essayons maintenant de savoir si ces écarts observés dans les
distributions de Q. I. entre les catégories socio-professionnelles sont à
même d'« expliquer » les inégalités sociales en matière de scolarisation.
Nous utiliserons les résultats de l'enquête longitudinale menée
par l'INED entre 1962 et 1972 <4>. Environ 17 000 enfants ont été
suivis au cours de cette période, à partir de la dernière classe de
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 341

\ Enfants de cadres
N supérieurs
V

80- 90 100 110 120 Q.I.


Graphique 1. — Distribution du Q.I. chez les enfants d'ouvriers
et de cadres supérieurs.

l'enseignement primaire (CM 2 -10-12 ans), un très grand nombre


d'entre eux restant dans l'échantillon au terme de l'étude.
A la rentrée 1971-1972, nous connaissons le nombre d'enfants
scolarisés dans l'enseignement supérieur par catégorie sociale d'origine,
si bien qu'en rapportant ces chiffres à la population de base, et après
correction des pertes statistiques, nous obtenons les taux d'accès au
niveau supérieur (tableau 2).
Pour essayer de savoir si les scolarisations sont cohérentes avec les
distributions d'aptitudes, plusieurs méthodes empiriques sont possibles.
Toutes cependant sont fondées sur l'hypothèse que les facteurs de la
réussite sont de deux types, à savoir des facteurs intellectuels d'une
part, des facteurs non-intellectuels (économiques, sociaux, motivations...)
d'autre part. A côté de ces hypothèses opératoires peu contraignantes,
on fait alors l'hypothèse centrale en supposant que les facteurs non
intellectuels sont à leur niveau optimal dans une catégorie (catégorie

<4> A. Girard et H. Bastide ont publié de nombreux résultats soit dans


Population, soit sous forme d'ouvrage de la collection des Cahiers de l'INED.
Les enquêtes longitudinales sont préférables aux enquêtes transversales car la
détermination des taux de scolarisation pose de redoutables problèmes méthod
ologiques dans ce dernier type d'enquête. En effet, il faut estimer à partir
d'autres sources la population potentiellement scolarisable. Or, les nomenclatures
ne sont pas nécessairement cohérentes entre le numérateur et le dénominateur
de la fraction qui exprime le taux; de plus, il faut faire un certain nombre
d'ajustements délicats tels que la prise en compte de la fécondité différente des
différentes catégories sociales qui de plus n'ont pas la même distribution d'âge;
enfin, on se heurte toujours à des difficultés dans le choix de la classe d'âges
de référence.
342 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

Tableau 2. — Taux de scolarisation dans l'enseignement supérieur


par origine sociale.

Catégorie socio-professionnelle Taux de Taux de scol. Taux de passage


des parents bacheliers % Ens. Sup. % Sup/Вас %
Ouvriers agricoles 9,5 6,1 64,2
Agriculteurs 15,9 9,9 62,3
Ouvriers 12,4 8,2 66,1
Employés 25,8 21,2 82,2
Artisans -commerçants 24,4 19,8 81,2
Cadres moyens 50,2 44,2 88,1
Professions libérales 51,9 52,2 100,6 (a)
Cadres supérieurs 57,4 56,9 99,1
Ensemble 21,5 17,1 80,0
(a) Certains étudiants sont inscrits dans l'enseignement supérieur sans avoir le
baccalauréat (capacité en droit. . .).

socio-professionnelle la plus élevée) qui sert alors de référence. Cette


norme suppose que dans la catégorie de référence, tout est mis en
œuvre, en ce qui concerne les facteurs non intellectuels pour que la
réussite soit assurée. Pour la comparaison que nous voulons faire, nous
chercherons à estimer quels auraient été les taux de scolarisation des
enfants des autres catégories sociales dans l'hypothèse où ils auraient
connu les conditions non intellectuelles des enfants de la catégorie
favorisée de référence.
Pour effectuer ces estimations, nous avons supposer qu'il existait
un seuil de Q. I. au-delà duquel la probabilité de réussite était totale (5)
et en deçà duquel elle était nulle (0). Cette hypothèse ne donne pas une
bonne représentation de la réalité au niveau individuel car on trouve,
même dans la classe favorisée, des enfants qui échouent avec un Q. I.
élevé et des enfants qui réussissent avec un Q. I. relativement faible.
Toutefois, cette hypothèse donne de bonnes estimations au plan d'une
population lorsqu'on compare des groupes entre eux (5).
Connaissant la distribution de Q. I. dans la catégorie professions
libérales (de référence) ainsi que le taux de scolarisation dans l'ense
ignement supérieur des enfants de cette même origine, on peut déterminer
le seuil de Q. I. dont nous avons besoin. Il suffit alors de rechercher
quelle proportion des enfants se trouve à un niveau de Q. I. supérieur
à ce seuil dans les autres catégories socio-professionnelles pour simuler

<5> En effet, la cohérence est grande avec les résultats d'une analyse complète
probabiliste type Wolf et Harnqvist (1961) opérée sur des données individuelles.
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 343

Tableau 3. — Taux de scolarisation dans l'enseignement supérieur


par catégorie socio-professionnelle dans l'hypothèse
d'une sélection fondée sur le critère du Q. I.

Taux de scol. Taux de scol. sur


Catégorie socio-professionnelle Rapport
Ens. Sup. % «critère Q.I. %
des parents (2)/(l)
(1) (2)
Ouvriers agricoles 6,1 17,0 2,8
Agriculteurs 9,9 22,1 2,2
Ouvriers 8,2 23,9 2,9
Employés 21,2 35,8 1,7
Artisans - commerçants 19,8 40,0 2,0
Cadres moyens 44,2 53,4 1,2
Professions libérales 52,2 52,2 1,0
Cadres supérieurs 56,9 63,0 1Д
Ensemble 17,1 29,5 1,7

les taux de scolarisation fondés sur l'aptitude au sens du Q. I. observé.


Le tableau 3 donne ces résultats.
Il apparaît donc que si les procédures de sélection successives dans
le système scolaire jusqu'à l'inscription dans l'enseignement supérieur
étaient fondées exclusivement sur le potentiel intellectuel mesuré par
le Q. I., on aboutirait à une diminution notable de l'inégalité (le rapport
des taux entre les catégories extrêmes passant de 9,3 à 3,7) mais au
maintien d'une structure très diversifiée (6).
Le taux de scolarisation dans l'enseîgnement supérieur des enfants
d'ouvriers passerait de 8,2 % à 23,9 % (soit presque le triple) si cette
catégorie faisait un usage optimal (par rapport aux classes favorisées)
des capacités intellectuelles, au sens du Q. I. dont elle dispose. Ce chiffre
de 23,9 % peut donc être perçu d'une part comme un objectif minimal
d'équité (et d'efficacité) et d'autre part comme un objectif maximal
pour une politique de court (ou de moyen) terme en vue de réduire les
inégalités dans le système scolaire. Ce but pourrait être visé dans la
mesure où on s'attacherait à faire tomber les handicaps socio-écono
miques à la scolarisation des familles défavorisées.
Toutefois, il faut bien garder à l'esprit que ce calcul est fondé
sur le critère du Q. I. et que le résultat à ce type d'épreuve comporte
en lui-même un biais social. Il s'ensuit que les chiffres proposés pr
écédemment doivent être considérés comme des estimations basses de

(6) Avec une augmentation sensible du nombre d'étudiants qui passerait de


800 000 à 1 350 000.
344 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

ce qui serait possible d'obtenir si les enfants issus de familles modestes


ne subissaient pas de handicap lors de leur développement intellectuel,
par rapport aux enfants originaires de familles aisées. Cette seconde
étape (qui pourrait amener la scolarisation des enfants d'ouvriers autour
de 40 %) est beaucoup plus difficile à mettre en œuvre car on sait
que l'environnement a une action d'autant plus importante qu'il concerne
des âges plus jeunes.
Ainsi, le système scolaire d'une part ne permet pas aux enfants
des classes défavorisées de développer au mieux les talents possédés par
les individus, alors que d'autre part, il n'est pas « économiquement »
efficace puisqu'il ne réalise pas l'affectation des individus les plus aptes
dans les formations, puis les métiers, demandant le plus de compétence.
En fait, il apparaît plutôt que le critère de l'aptitude individuelle n'in
tervient que modérément dans la définition des scolarisations, alors que
les conduites sociales apparaissent tout à fait déterminantes. Cette impres
sionse renforce lorsqu'on examine comment se sont constituées les
différences suivant l'origine sociale constatées dans l'enseignement supér
ieur.
A cet effet, nous avons étudié la scolarisation d'une cohorte qui
« quittait » l'enseignement primaire en 1962 pour atteindre l'ense
ignement supérieur entre 1969 et 1972. Certes l'organisation du système
éducatif a évolué depuis cette date; cependant, d'une part, c'est à
partir de cette situation ancienne qu'il faut éclairer la situation observée,
sachant que d'autre part, si l'organisation scolaire a changé, on peut
penser que les mécanismes et les comportements sociaux n'ont pas été
modifiés sur une aussi courte période et qu'ils sont, par conséquent,
toujours à l'œuvre.
En 1962, la classe suivie à l'issue du primaire était décisive pour
la scolarisation future. La « sélection » /orientation pouvait s'opérer sui
vant trois directions : en premier lieu, le maintien dans l'enseignement
primaire en vue de préparer le Certificat d'Etudes Primaires; en second
lieu, l'entrée dans un Collège d'Enseignement Général (CEG) qui con
duisait au Brevet d'Etudes de Premier Cycle (BEPC) avec, dans une
certaine mesure, la possibilité de rattraper certaines filières du lycée
et enfin, troisième voie possible, la plus noble, l'entrée dans un lycée
qui menait au baccalauréat puis à l'enseignement supérieur.
Les taux d'orientation pour les différentes catégories socio-profes
sionnelles, donnés par l'enquête de l'INED, sont indiqués dans le
tableau 4.
Cette orientation préfigure déjà largement, alors que les enfants
ont entre 10 et 12 ans, la répartition sociale observée dans l'enseign
ement supérieur dix ans après. L'orientation était précoce; elle était
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 345

Tableau 4. — Orientation en fin de primaire suivant l'origine sociale.

Taux d'orient, Taux d'entrée


Catégorie socio-professionnelle en 6e CEG + Taux d'entrée
certif. études
des parents au lycée %
primaires % lycée %
Ouvriers agricoles 68 32 11
Agriculteurs 60 40 16
Ouvriers 55 45 16
Employés 33 67 33
Artisans-commerçants 34 66 32
Cadres moyens 16 84 55
Professions libérales 7 93 75
Cadres supérieurs 6 94 75
Ensemble 45 55 27

aussi presque toujours définitive car la passerelle du CEG vers le lycée


n'a été empruntée que par peu d'élèves.
Nous pourrions analyser ces données de la même manière que nous
l'avons fait pour les taux de scolarisation de l'enseignement supérieur
en simulant une sélection au mérite fondée sur le critère du Q. L. Nous
trouverions certainement le même type de résultats à savoir que les
taux d'entrée en sixième devraient être beaucoup plus élevés dans les
familles défavorisées. En fait, lors des procédures d'orientation, la
note du Q. I. n'est pas directement disponible, les décisions étant
surtout prises en fonction de quatre critères :
• La réussite scolaire de l'enfant en classe de CM 2.
• L'âge à l'issue du CM 2 (qui caractérise les « retards » pris
dans le primaire).
• L'avis du maître qui a enseigné à l'enfant en CM 2.
• L'avis des parents en matière d'orientation.
Parmi ces quatre critères, les deux premiers sont factuels, et sont
la base d'une sélection au mérite, alors que les deux autres sont d'une
nature différente puisqu'ils représentent des opinions.
Si nous nous attachons tout d'abord aux deux premiers facteurs,
on observe qu'en moyenne les taux d'entrée en sixième sont d'autant
plus élevés que la réussite scolaire en CM 2 a été bonne et que l'enfant
est jeune. Toutefois, si cette structure se vérifie dans chacune des
catégories socio-professionnelles, les « chances » d'accès demeurent très
différentes suivant le groupe social considéré pour une même réussite
scolaire et un même âge au moment de l'orientation. Ceci atteste du
caractère interactif manifeste entre les variables d'aptitudes et les
variables sociales, ces dernières apparaissant néanmoins tout à fait pré-
346 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

pondérantes dans l'explication des différences inter-individuelles de


scolarisation, car les orientations effectivement prises par les enfants
sont en réalité extrêmement cohérentes avec les vœux émis par les
parents et relativement très éloignées des orientations au mérite (en
affectant à chaque catégorie le taux de passage des enfants de « pro
fessions libérales » pour un même âge et une même réussite scolaire
en CM 2).
Le tableau 5 permet de bien mettre en évidence les poids respectifs
des facteurs cognitifs et sociaux dans le choix d'orientation au moment
de l'entrée en 6e.

Tableau 5. — Comparaison des taux d'entrée en 6e effectifs


AVEC LES TAUX FONDÉS SUR LE MÉRITE SCOLAIRE
ET AVEC LES DÉSIRS EXPRIMÉS PAR LES PARENTS.

Taux observés Mérite scolaire Désir des parents


Taux d'entrée
Catégorie en 6e avec Rapport Désirs Rapport
professionnelle des Taux d entree taux de aux taux des aux taux
parents passage des effectifs parents effectifs
% (1) prof. lib. % (2)/(l) (3)% (3)/(l)
(2)
Ouvriers agricoles 32 75 2,3 37 1,2
Agriculteurs 40 82 2,0 42 1,1
Ouvriers 45 78 1,7 49 1Д
Employés 67 83 1,2 72 1,1
Artisans-commerçants 66 83 1,3 71 1,1
Cadres moyens 84 93 1,1 89 1,1
Professions libérales 93 93 1,0 94 1,0
Cadres supérieurs 94 93 1,0 95 1,0
Ensemble 55 80,8 1,5 59 1Д

Les désirs des parents sont extrêmement proches des orientations


effectives sachant qu'il y a dans chacune des catégories une liaison
positive entre le choix à l'entrée en sixième et la réussite scolaire anté
rieure mais qu'il y a une « sévérité » beaucoup plus grande de la part
des familles modestes quant à l'appréciation de la réussite de leurs
enfants. Il en résulte une sélection accrue. Cette exigence plus grande
des familles modestes peut être comprise dans le cadre d'une analyse
économique de la demande individuelle d'éducation en prenant en
compte les contraintes économiques qui pèsent sur les familles, notam
mentdans leurs décisions d'éducation. Ainsi les familles modestes, d'une
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 347

part ont des besoins de consommation plus pressants, si bien que


l'épargne nécessaire à financer les investissements éducatifs des enfants
a un coût d'opportunité plus élevé et d'autre part ont des besoins de
sécurité plus importants si bien qu'elles cherchent à réduire le risque
d'échec anticipé en se fixant des normes plus exigeantes en matière
de réussite scolaire antérieure au moment de fixer leurs choix éduc
atifs n).
Ces différences de comportement se reproduisent aux différents
stades éducatifs et sont encore très visibles dans l'enseignement supérieur
quand on examine notamment comment s'opère les choix de disciplines
en fonction des origines sociales d'une part, des capacités scolaires
révélées d'autre part. Cette analyse fera l'objet de la seconde section
de ce texte.

II. — Analyse de la sélection universitaire


et des comportements individuels de choix d'études

Pour mesurer la sélection au sens courant du terme, on calcule


habituellement des taux de réussite en rapportant le nombre des reçus
à celui des inscrits et en recherchant éventuellement des sous-populations
dont les taux divergeraient nettement du taux moyen. La connaissance
de ces taux est utile, cependant, la sélection universitaire doit être
comprise dans sa référence souvent implicite à la population sur
laquelle elle s'exerce. En effet, il faut bien garder à l'esprit deux points
fondamentaux concernant l'accès à l'enseignement supérieur.
1. L'Université constitue le cycle final d'un système d'enseigne
ment très sélectif puisqu'environ 20 % d'une génération parvient à
l'enseignement supérieur.
2. Il se produit une « auto-sélection » relativement très forte car,
au moment de s'inscrire à l'Université, les nouveaux étudiants, plus
ou moins conscients de la réalité universitaire, « arbitrent » entre les
différentes disciplines en tenant compte notamment de l'attrait de la
discipline pour elle-même, des avantages liés au métier qu'ils pourront
exercer à l'issue de la formation, ainsi que des chances qu'ils estiment
avoir de réussir leurs études en fonction de leurs caractéristiques propres.
Il est donc clair qu'il y a des relations de réciprocité entre l'orientation
d'une part qui se fait en fonction des anticipations de l'étudiant en
matière de sélection et la sélection elle-même d'autre part dont les
caractéristiques ne sont pas indépendantes de celles de la population
qui a décidé de s'inscrire dans les différentes disciplines.

Voir A. Mingat (1977).


348 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

Etudier la sélection universitaire, c'est donc explicitement recon


naître les rôles respectifs et interdépendants de l'auto-sélection que
s'imposent les étudiants et la sélection que ceux-ci subissent de la part
de l'institution universitaire. Il est donc nécessaire de considérer la
sélection globale produite par ces deux termes, les parts respectives de
l'auto-sélection visible pouvant être très différentes suivant les disciplines
ou les types de formation (8).
Comme l'analyse de l'auto-sélection ne peut être menée qu'après
avoir observé le processus de sélection (puisque celui-ci guide en partie
les choix) nous nous attacherons en premier lieu à la sélection univers
itaire telle qu'elle est opérée par l'institution d'enseignement.

2. La sélection universitaire. La sélection, dans les études univers


itaires est particulièrement import
ante au cours de la première année d'études. Elle décroît ensuite
dans l'ensemble des disciplines après que ce cap ait été franchi. Par
ce processus en deux temps - auto-sélection/sélection au cours de la
première année - l'Université, dans une large mesure, filtre les étudiants
ayant les caractéristiques qu'elle valorise.
Les données que nous analysons maintenant proviennent d'enquêtes
effectuées à l'Université de Dijon. Il n'y a certes pas une parfaite ident
ité quant à la sélection pour une même discipline d'une université à
l'autre et les taux de réussite varient aussi pour une même discipline
et une même université d'une année à l'autre. Toutefois, les structures
de réussite mises en évidence pour l'Université de Dijon semblent
avoir un degré de généralité assez grand et donner une bonne repré
sentation qualitative de la situation française.
1 157 étudiants en première inscription dans huit disciplines uni
versitaires ont été observés. 438 ont réussi les épreuves nécessaires pour
être autorisés à s'inscrire en deuxième année. Toutefois, si on rapporte
les reçus aux inscrits, le chiffre global de 37,8 % cache des différences
tout à fait considérables suivant les groupes considérés (disciplines,
âge, sexe...). De plus, faire le rapport des reçus aux inscrits a pour
conséquence de donner une image faussée de la sélection dans la
mesure où les conditions même de l'échec diffèrent beaucoup selon
les disciplines.

<8> Pour une formation donnée, plus l'auto-sélection est forte, moins la
sélection apparaît sévère. Dans les grandes écoles, on ne fait pas confiance à
l'auto-sélection, celle-ci est remplacée par un concours difficile à la suite duquel
la sélection est faible.
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 349

Tableau 6. — Taux de réussite et modalités de l'échec par discipline


(en %).

Math& Lettres Lettres I.U.T.


nomie cine physique logie sophie classiques modernes gestion semble
Aucun examen 18,4 9,4 17,6 37,4 43,3 6.7 29.3 0,7 17,4
Seulement les
examens du 14,5 0 7,4 5.5 3,3 0 1.0 24,8 7,3
1er semestre
Tous les exa 24,3 68,7 46,1 20,9 23,3 26,7 21.2 2,8 37,6
mens — Echec
Réussite 42,8 22,1 28,9 36,2 30,0 66,6 48,5 71,7 37,8
Total 100,0 100,0 100,0 100.0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

Examinons tout d'abord les taux de réussite dans les différentes


disciplines étudiées. Numériquement ces taux de réussite sont assez
différents d'une discipline à l'autre, mais en outre les « parcours sco
laires » qu'ils résument sont très variables.
Les taux de réussite sont particulièrement faibles en médecine et
en sciences mathématiques et physiques qui attirent pourtant les étudiants
originaires des séries de baccalauréat les plus sélectives (C/Mathématiques
et D/Sciences de la nature). De plus, dans ces disciplines, les échecs
sont essentiellement imputables à des mauvaises notes à des examens
effectivement passés.
A l'opposé, en Lettres (à l'exception des Lettres Classiques), même
si les taux globaux ne sont pas très élevés (bien que supérieurs à ceux
de Médecine ou de Sciences), ils sont, pour une part beaucoup plus
importante, obtenus avec des pourcentages d'étudiants qui n'ont passé
aucun examen beaucoup plus élevé, ce qui signifie que l'élimination
par de mauvaises notes joue un rôle moindre. En effet, ces disciplines
sont caractérisées par un absentéisme important.
Pour essayer d'aller plus loin dans l'analyse, nous avons cherché
à expliquer l'échec ou la réussite par les caractéristiques individuelles
de l'étudiant. A l'examen des classiques tableaux croisant deux à deux
les variables, nous avons préféré la construction d'un modèle prenant
en compte simultanément toutes les variables, les tests statistiques per
mettant de ne retenir que les variables qui ont un effet réel sur le
phénomène étudié.
Puisque Y, la variable analysée ne peut prendre, pour chaque indi
vidu, que deux valeurs (O/Echec ou 1 /Réussite), il faut renoncer à
350 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

utiliser la forme linéaire classique pour la remplacer par une forme


logistique (9). .

où хъ х2, ...xn désignent les caractéristiques (âge, sexe...) de l'étudiant.


Des modèles de ce type ont été estimés pour les différentes dis
ciplines ainsi que pour plusieurs types de population (sur la totalité
des inscrits, sur la population ayant passé au moins une épreuve de
contrôle de connaissances...). Nous donnons ici une illustration concer
nantla médecine avant d'indiquer les principales lignes de force pour
les autres disciplines (10).
Le tableau 7 donne les résultats de l'analyse pour la première
année d'études médicales. Seules les variables significatives (au seuil de
10 %) ont été retenues. Est également indiqué l'impact d'une variation
marginale de chacun des facteurs Xi en termes d'écarts de pourcentage
(positif ou négatif), toutes choses égales par ailleurs, sur la probabilité
de réussir.
On remarque que les variables les plus importantes dans la sélection
en première année d'études médicales sont le baccalauréat d'origine
(série et moyenne à l'écrit) et l'âge de l'étudiant.
• La série du baccalauréat est déterminante puisque la probabilité
de réussite des étudiants des séries autres que mathématiques élément
aireset sciences de la nature est quasiment nulle (en fait aucun étudiant
ayant un baccalauréat de ces séries n'a réussi). Entre la série mathémat
iques (C) et la série sciences de la nature (D), l'avantage est signifi-
cativement en faveur de la première, leur probabilité dépasse, toutes
choses égales par ailleurs, celle de la série sciences de la nature de
24,3 %.
• La moyenne à l'écrit du baccalauréat vient éventuellement per
turber cette hiérarchie des séries puisqu'un point de plus de moyenne
à l'écrit du baccalauréat augmente la probabilité de réussir de 9,2 %.
Ainsi, pour un étudiant, le « handicap » de la série sciences de la
nature (D) par rapport à la série mathématiques (C) peut être compensé
par une moyenne d'écrit au baccalauréat de 2,6 points supérieurs.
(Par exemple, un bachelier de la série D avec 12,6 à l'écrit du bacca
lauréat se trouve, quant à ses chances de réussir en médecine, dans
des conditions comparables à celle d'un bachelier de la série С dont
la moyenne d'écrit n'aurait été que de 10,0).

(9> Pour des compléments sur l'utilité de la méthode logistique et la façon


de conduire les estimations on pourra voir G. Lassibille (1979).
(10) Pour des résultats plus complets, voir A. Mingat (1976).
aptitudes et classes sociales 351

Tableau 7. — Modèle de réussite en première année


d'études médicales.

Variations "marginales"
Ecarts corre
Coefficients (b) spondants (a) sur
Variable Xt Ecart sur Xj
ai Y probabilité de
réussir
Taille de la commune - 0,317+++ Ville/campagne - 10,9%

1,851++ Classe préparatoire/


Etudes précédentes + + 31,8%
terminale
Ressources des parents + 0,118+ 1000,00 F + 2,0 %
(1000 F)
Test D 4 8 + 0,012+++ + 0,2 %
1 point
Age - 0,361++++ 1 an - 6,2 %
Bac maths/Вас sciences + 1,41+++ Bac maths/bac sciences + 24,3 %
naturelles naturelles
Bac ni maths ni sciences
Autres séries de bac - 15,1 + + + "-260,0%"
naturelles
Moyenne à l'écrit du + 0,535++++ 1 point + 9,0 %
bac
Constante - 1,246+++ - -

(a) Les écarts dans la probabilité de réussir ont été "linéarisés" autour du point
correspondant à la probabilité moyenne,
(b) + : significatif au seuil de 10 %
++ : significatif au seuil de 5 %
+++ : significatif au seuil de 1 %
++++ : significatif au seuil de 1 %0

• A côté du baccalauréat, l'âge joue de façon très nette avec une


probabilité d'autant plus faible que l'étudiant est plus âgé (- 6,2 %
sur la probabilité de réussite par année d'âge). En partie liée à l'âge,
la variable études précédentes est également significative. En effet, les
étudiants ayant préalablement suivi une classe préparatoire scientifique
bénéficient d'un avantage considérable, toutes choses égales par ailleurs
( + 31,8 % par rapport à ceux qui viennent directement du baccal
auréat), encore qu'il convienne de défalquer 6,2 % de ces 31,8 % (soit
25,6 %) pour tenir compte de la différence d'âge d'une année.
352 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

Outre ces variables, nous trouvons essentiellement deux autres


variables apportant une contribution significative, mais plus modeste,
à l'explication statistique de la réussite.
— La réussite est, toutes choses égales par ailleurs, plus probable
pour les enfants originaires de milieu rural (11).
— Influence non négligeable des ressources des parents avec un
écart de l'ordre de 10 % entre un étudiant dont les parents ont 2 000 F
de ressources mensuelles et un étudiant dont les revenus mensuels des
parents sont de 7 000 F, à l'avantage de ce dernier.
Après avoir examiné le résultat de l'estimation du modèle indi
viduel de réussite, il est possible d'utiliser les coefficients д{ pour calculer
la probabilité de réussite de n'importe quel étudiant dès lors qu'on
connaît les valeurs Xi définissant ses caractéristiques personnelles (âge,
série du baccalauréat, moyenne au baccalauréat...).
Le tableau 8 donne certains taux de réussite ainsi reconstruits en
faisant varier les trois caractéristiques les plus importantes, à savoir
l'âge, la série du baccalauréat et la moyenne à l'écrit de cet examen.

Tableau 8. — Reconstitution des taux de réussite pour les variables


importantes dans la réussite en première année d'études médicales
(en %).

Age à l'entrée 17 ans 18 ans 19 ans


Moyenne à l'écrit du 8,0 10,0 14,0 8,0 10,0 14,0 8,0 10,0 14,0
baccalauréat
Bac mathématiques (C) 18,9 50,3 84,9 13,6 41,4 79,6 9,5 33,1 73,5
Bac sciences de la nature 5,1 19,8 58,1 3,7 14,7 49,0 2,7 10,7 40,5
(D)
Autres bac 0 0 0 0 0 0 0 0 0

Les calculs ont été effectués pour des étudiants d'origine urbaine entrés
en faculté de médecine l'année de leur baccalauréat.
Des estimations de ce type ont été opérées pour chacune des
disciplines étudiées. Il y a bien sûr des différences entre les modes de
sélection des différentes disciplines, mais il y a aussi un certain nombre
de constantes dont l'action s'exerce à un degré plus ou moins élevé

<u) Ce résultat est un peu surprenant. Il n'est pas confirmé dans les autres
disciplines et on peut imaginer qu'il provient d'une éventuelle particularité de
l'échantillon.
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 353

dans les différentes disciplines. On observe ainsi les principales lignes


de force suivantes :
• II y a un effet significatif et important des variables caracté
risant l'origine et les capacités scolaires de l'étudiant.
— La série du baccalauréat est déterminante dans les disciplines
scientifiques et médicales, assez importante en économie et a un effet
pratiquement inexistant dans les disciplines littéraires.
— La moyenne au baccalauréat est très importante dans toutes
disciplines. L'écart dans la probabilité de réussite, toutes choses égales
par ailleurs, entre un bachelier ayant obtenu 10 à l'écrit du bacca
lauréat et un bachelier ayant obtenu 13 est de l'ordre de 30 % à l'avan
tagedu second dans toutes les disciplines.
• Dans toutes les disciplines, les plus jeunes réussissent mieux.
• Dans presque toutes les disciplines, les étudiants d'origine modeste
ont des résultats inférieurs à ceux des étudiants issus de milieux favor
isés. Ce phénomène, peu perceptible dans les études scientifiques, devient
important dans les études littéraires.
• En général, toutes choses égales par ailleurs, les étudiants ori
ginaires de l'enseignement secondaire public ont des résultats univers
itaires meilleurs. Toutefois, cette relation n'existe pas en Psychologie
et s'inverse en Lettres modernes où les étudiants de l'enseignement privé
réussissent mieux.
• Les variables de conditions de vie de l'étudiant ne semblent pas
avoir une importance très grande hormis le mode de logement avec
une opposition entre ceux qui logent chez leurs parents et ceux qui
ont un logement en cité universitaire ou dans une chambre en ville.
On observe, en effet, une différence souvent significative à l'avantage
de ceux qui habitent la ville universitaire.
Tels sont, de façon très résumée, les principaux résultats obtenus.
Ils ont un intérêt propre pour la connaissance des processus de sélection
à l'université; ils sont également utiles pour comprendre comment s'opè
rent les choix de filière dans la mesure où est pertinente l'hypothèse
suivant laquelle l'étudiant est plus ou moins conscient de la sélection
et de ses chances propres de réussir et décide de son inscription en
tenant compte de ces facteurs objectifs. Examinons donc maintenant
comment les étudiants s'auto-sélectionnent en entrant à l'université.

2. Auto-sélection Le cadre d'analyse que nous utilisons


de la part des étudiants ici s'appuie sur l'hypothèse d'une déci-
et choix de filière. sion éducative individuelle rationnelle
dans laquelle l'étudiant observe les avan
tages et les inconvénients respectifs des différentes disciplines et déter-
354 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

mine celle qui présente le solde le plus favorable pour lui, compte tenu
des contraintes qu'il doit supporter.
Partons tout d'abord de quelques faits qui permettent d'introduire
le modèle de décision.
Lorsque nous observons globalement aussi bien les résultats par
série du baccalauréat que les résultats suivant l'origine socio-professionn
elle des étudiants, nous obtenons des taux de réussite moyens soit
assez proches l'un de l'autre, soit avec des différences dont l'origine
ne paraît pas évidente (tableaux 9 et 10).

Tableau 9. — Taux de réussite global par série du baccalauréat


(en %).

Sciences de
Série du Littéraire Economique iques la nature Technologie
baccalauréat
(A) 44,6
(B) Mathémat
(C) (D) (F-G)
Taux de réussite
46,0 42,8 28,0 27,6
global

Tableau 10. — Taux de réussite global suivant l'origine


SOCIO-PROFESSIONNELLE (en %).

Origine socio Artisans, Cadres


commerç sup, Cadres
Prof, Employés Ouvriers
professionnelle teurs moyens
ants libérales
iteglobal
Taux de réuss Agricul
36,1 38,8 37,9 40,4 36,5 37,8

Selon l'origine sociale, les différences sont extrêmement faibles,


les enfants d'ouvriers comme ceux de cadres supérieurs et professions
libérales ont des taux globaux de réussite très proches. Il serait toutefois
hâtif de conclure qu'il n'y a pas de différenciation sociale à l'université.
En effet, cette apparente absence d'écarts sociaux provient de la combi
naison de deux phénomènes dont les conséquences s'annulent. En pre
mier lieu, il y a dans presque toutes les disciplines une réussite meilleure
des étudiants d'origine aisée, mais en contrepartie et en second lieu,
des choix de discipline où l'auto-sélection est plus forte de la part des
étudiants d'origine modeste. Ils accordent en effet une grande importance
à la sécurité et choisissent plus souvent les disciplines dans lesquelles
ils ont le plus de chances de réussir. A l'opposé, les étudiants d'origine
aisée accordent plus d'importance aux filières débouchant sur des métiers
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 355

plus prestigieux et mieux rémunérés tels la médecine (et dans une moindre
mesure l'économie) de préférence aux lettres ou à l'Institut Universitaire
de Technologie quitte à accepter un risque d'échec plus important.
Il est possible de calculer des taux de réussite en supprimant l'auto-
sélection sociale, c'est-à-dire en calculant ces taux dans l'hypothèse
d'une indifférence sociale dans le choix de la discipline. Les résultats
en sont donnés dans le tableau 11.

Tableau 11. — Taux de réussite global suivant l'origine sociale avec


et sans auto-sélection sociale (en %).

Cadres sup, Cadres


Origine socio commerç
Artisans, Prof, Employés Ouvriers
professionnelle teurs moyens
ants libérales

Taux réels avec 38,8 37,9 40,4 36,5 37,8


"auto-sélection"
sélection" 36,1
Agricul

Taux calculés
sans "auto 34,8 36,4 41,5 40,2 34,4 29,6

On peut alors observer à quel point l'auto-sélection est forte


puisque les étudiants d'origine aisée pourraient obtenir des taux de
réussite plus élevés, alors que les étudiants d'origine modeste auraient
eu un taux de réussite beaucoup plus faible s'ils ne s'étaient pas cont
raints à choisir des études moins rentables mais relativement plus
faciles.
On retrouverait le même effet pour les séries du baccalauréat où
la hiérarchie des séries dans « l'ordre de l'alphabet » (tableau 9) est
du domaine de l'illusion statistique car dans presque toutes les disci
plines les résultats des étudiants de la série mathématique С (et dans
une moindre mesure de la série sciences de la nature D) ont des résultats
très supérieurs à ceux de la série littéraire A. L'explication du taux de
réussite global élevé des titulaires du baccalauréat littéraire A tient à
l'auto-sélection sur critère « scolaire » que s'imposent ces bacheliers
pour préférer les disciplines où ils ont des chances suffisantes de réussir.
C'est en raison même des modes de sélection universitaire et des faibles
chances de réussite des bacheliers littéraires A dans un certain nombre
de disciplines que ces étudiants choisissent des disciplines plus faciles
dans lesquelles leurs taux d'échecs sont relativement faibles.
Le tableau 12 indique des taux de réussite des bacheliers par série
calculée en l'absence d'auto-sélection au moment de l'inscription.
356 aptitudes et classes sociales

Tableau 12. — Taux de réussite global par série de baccalauréat avec


et sans auto-sélection scolaire (en %).

Sciences de
Série du Littéraire mique iques la nature ogie
baccalauréat (F.G.)
(A) (B) (C) (D)
27,7 15,3
Econo Mathémat 28,7 Technol
Taux réels avec 46,0 44,6 42,8 28,0 27,6
"auto-sélection"

Taux calculés sans 14,4


"auto-sélection" 48,3

Les taux calculés sans auto-sélection donnent une image tout à


fait différente de la hiérarchie des séries de baccalauréat et mettent en
lumière les procédures d'accès à l'enseignement supérieur.
Nous retrouvons donc au niveau de l'entrée à l'Université une
structure comparable à celle observée au niveau de l'entrée en 6e avec
une interaction entre facteurs intellectuels et scolaires d'une part et
facteurs sociaux d'autre part (12).
De ces études apparemment diverses, on peut dégager une vue
commune des précédures de sélection.
1) Aux différents points d'orientation du système scolaire, on
trouve des mécanismes qualitativement semblables.
2) Ces mécanismes d'orientation sont caractérisés par une inter
action entre critères sociaux, intellectuels, pédagogiques et économiques.
3) La dimension sociale peut être au moins partiellement résumée
par un goût pour le présent plus fort dans les milieux défavorisés que
dans les milieux aisés et par un besoin de sécurité d'autant plus marqué
que les contraintes économiques qui pèsent sur la famille sont plus
fortes.
4) La conséquence du « biais social » ou de la différenciation
sociale au niveau des choix éducatifs est qu'il n'y a pas une affectation
optimale des talents dans les formations les plus difficiles ni dans les
emplois auxquels ces formations donnent accès; par corrolaire, il y a
dans les milieux socialement défavorisés des réserves d'aptitudes.

<12> Pour des compléments sur une analyse économique des choix des
bacheliers, on pourra voir M. Dura et A. Mingat (1979). L'argumentation déve
loppée dans ce texte repose sur l'hypothèse suivant laquelle le bachelier fait
un arbitrage entre deux caractéristiques souhaitables pour lui mais contradictoires
dans la réalité : l'espérance de carrière professionnelle liée au diplôme préparé
d'une part et probabilité de réussir les études d'autre part. Cet arbitrage se
résout en fonction des contraintes que doit supporter le bachelier et est donc
socialement caractérisé.
APTITUDES ET CLASSES SOCIALES 357

Enfin, notons que l'ensemble de l'analyse a été conduit du côté


de la demande d'éducation émanant des individus ou des familles en
négligeant les disparités du côté de l'offre d'éducation de la part de
l'institution scolaire. En particulier, il apparaît clairement que des
disparités géographiques sont à même de modifier les comportements
individuels. Nous n'en donnerons qu'un exemple au niveau du choix
de filière à l'entrée dans le supérieur en montrant comment l'existence
d'une offre locale est à même de canaliser la demande.
Le tableau 13 donne les pourcentages d'accès à quelques formations
types suivant les caractéristiques de la localisation géographique à l'in
térieur de l'académie de Dijon.

Tableau 13. — Taux d'accès à quelques formations-types en fonction


de l'existence d'une offre locale (en %).

Classe préparatoire Préparation Ecole Institut de


Formation scientifique de commerce Technologie
Bac maths et
Bac mathématiques Bac mathématiques techniques
Série de baccalauréat
(C) (C) (E)
Agglomération 13,6 19,1
45
de Dijon
Ville autre que Dijon
dans laquelle il existe 39,0 31,6
une offre locale
spécifique
Autre - sans 20,9
12,6 13,3
offre locale

Si on considère en premier lieu les classes préparatoires scienti


fiques, on peut observer le pourcentage plus important des entrées
dans ces sections pour les lycées pour les lycéens originaires de Dijon.
En effet, dans l'académie, seul Dijon est doté de ce type de classe (13).
Si on s'attache en second lieu aux classes préparatoires aux éco
les de commerce pour les bacheliers mathématiques, ou à l'Institut

il3> L'argumentation d'une sélection antérieure par le lycée n'est pas valide
car la moyenne au baccalauréat mathématiques des lycéens dijonnais est tout à
fait comparable (en réalité même légèrement inférieure) à celle des autres bachel
iersde la même série de l'académie. Par conséquent, il apparaît bien qu'il y
ait un effet géographique net bien qu'on ne puisse pas savoir si l'origine de
ce phénomène tient à une meilleure information des lycéens dijonnais ou à
une moindre sévérité des établissements pour les lycéens qu'ils connaissent déjà.
358 APTITUDES ET CLASSES SOCIALES

universitaire de Technologie (génie mécanique) pour les bacheliers mathé


matiques et techniques, on se trouve dans une situation plus compliquée
car il faut considérer 3 zones : (1) Dijon qui possède le panel complet
de formation, (2) des villes qui ne possèdent aucune offre locale à
l'exception d'une seule formation spécifique (IUT au Creusot, classe
préparatoire aux écoles de commerce à Nevers et Auxerre) et enfin
(3) des villes qui ne possèdent aucune offre locale. Il est alors inté
ressant de constater que les localisations (1) et (3) ont des taux sem
blables alors que la localisation (2) est caractérisée par des taux signi-
ficativement plus élevés. L'explication de ce phénomène tient également
à l'attraction géographique locale. En effet, dans le cas (2), l'existence
d'une offre spécifique locale modifie les règles de la concurrence entre
filières au profit de celle qui est directement accessible, alors que dans
les cas (1) comme dans le cas (3) les conditions de la concurrence
sont telles que ces filières ne sont pas spécialement privilégiées : par
l'existence de toutes les filières concurrentes sur place pour les dijonnais,
ou par l'absence de toute filière sur place pour les non-dijonnais de la
localisation (3).
Alain Mingat.

BIBLIOGRAPHIE

Duru (M.). — La demande d'éducation à l'issue de l'enseignement secondaire.


Cahier de l'IREDU, 25, 1978.
Duru (M.) et Mingat (A.). — « Comportement des bacheliers, modèle de choix
de discipline » Consommation, 4, 1979.
Girard (A.) et Bastide (H.). — « Orientation et sélection scolaire, cinq années
d'une promotion » in Population et l'enseignement. Paris, INED/PUF, 1970.
Girard (A.) et Bastide (H.) — « De la fin des études élémentaires à l'entrée
dans la vie professionnelle ou à l'université ». Population, 3, 1973.
INED/INETOP. — Enquête nationale sur le niveau intellectuel des enfants d'âge
scolaire. Paris, INED, PUF, 1973, (Cahier Travaux et Documents n° 64).
Lassibille (G1.). — « L'estimation de modèle variable dépendante dichotomique »
Revue d'économie appliquée, 1979.
Mingat (A.). — La réussite, l'abandon, l'échec en première année d'études uni
versitaires. Cahier de l'IREDU, 23, 1976.
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Dijon. Cahier de l'IREDU. 30, 1977.
Wolf (P. de) et Harnqvist (K.). — « Les réserves d'aptitudes, leur importance
et leur répartition » in Halsey (A.) : Aptitude intellectuelle et éducation :
OCDE, 1961.
RESUME - SUMMARY - RESUMEN 359

Mingat Alain. — Aptitudes et classes sociales : accès et succès dans l'ense


ignement supérieur.
Cet article étudie deux types de sélection sociale dans l'enseignement. Dans
le premier cas, les taux de scolarisation dans l'enseignement supérieur pour les
diverses classes sociales sont comparés aux aptitudes intellectuelles mesurées
par le Q. I.. On ne se demande pas si le Q. I. mesure l'intelligence, on tient
seulement compte du fait qu'il est utilisé par l'institution scolaire pour en mesurer
l'efficacité. Or, on constate que si l'enseignement supérieur ne retenait que les
individus ayant les meilleurs Q. I., la proportion d'enfants d'ouvriers et de paysans
qui y entreraient serait bien plus importante qu'elle n'est actuellement.
Dans le second cas on a étudié la réussite dans l'enseignement supérieur
selon l'origine sociale : les taux de réussite générale sont presque indépendants
de la profession des parents mais la répartition des étudiants selon les disciplines
est assez contrastée : il y a donc absence de sélection car au départ, une auto
sélection des étudiants se produit. Ils se dirigent vers les matières où ils pensent
pouvoir réussir.

Mingat Alain. — Aptitudes and Social Classes : Access to and Success in


Higher Education.
In this paper, two types of social selection in education are considered.
In the first place, the proportions in higher education in various social groups
are compared to the distribution of measured intelligence in these groups. The
adequacy of measurements of intelligence is not discussed, but account is taken
of the fact that IQ measures are used in educational institutions for the purposes
of assessment. It is noted that if entry into higher education were dependent
entirely on the achievement of high IQs, the proportions of workers' and farmers'
children in higher education would be far greater than are currently found.
Next, the success rate in higher education for students of different social
origin is considered. Success rates are nearly independent of parental occupation,
but the breakdown of students in different academic disciplines differs by social
origin. There is some degree of self-selection at the outset; students tend to move
towards subjects where they feel they are most likely to succeed.

Mingat Alain. — Aptitudes y clases sociales. Posibilidades de ingreso y de


éxito en la educación superior.
En este artículo se estudian dos tipos de selección social en el sistema educa-
cional. En primer lugar se comparan las tasas de escolaridad en la educación
superior, según clases sociales, con las aptitudes intelectuales medidas por los
Q.I. respectivos. No se plantea que el Q.I. mide o no la inteligencia, sino que
se toma en consideración que es utilizado de hecho por la institución escolar
para medir su eficacia. Se concluye que si la educación superior admitiera exclu-
sivamente a los individuos que tienen los mejores Q.I., en ese caso la proporción
de hijos de obreros y de campesinos que deberian ingresar a este nivel deberia
ser mucho mayor que la proporción actual.
En el segundo saco se estudia el éxito en la educación superior según el
origen social : se comprueba que el éxito escolar es casi independiente de la
profesión de los padres; pero que se producen muchos contrastes en la distri-
bución de los estudiantes según las disciplinas que eligen : se produce una falta
de selección ya que al comienzo existe una autoselección. Los estudiantes eligen
las carreras profesionales en las cuales piensan que van a tener éxito.

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