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INTRODUCTION
En tant que branche de la science économique, l’économie publique a pour objet principal
l’étude des normes rationnelles qui régissent l’activité d’un secteur (publicou assimilé) visant
à produire des biens et services collectifsen vue de maximiser le bien-être social.
L’économie publique classique ainsi définie, qui fait de la maximisation du surplus collectif
le fondement de la rationalité des décisions publiques, a beaucoup évolué depuis trois
décennies. Une nouvelle économie publique a émergée, caractérisée par la substitution de
l’approche positive à l’approche normative classique. La nouvelle économie publique tient
compte en effet, dans l’analyse et la mise en œuvre des critères parétiens d’allocation
optimale des ressources, du comportement stratégique des agents publics, de l’action des
groupes de pression et des modalités concrètes des élections.Les mutations institutionnelles de
l’intervention de l’Etat et les phénomènes d’asymétrie d’information dans les relations
principal-agent ont été les facteurs déterminants de ce renouveau théorique de l’économie
publique, dans quatre directions principales :
- La gestion publique directe a régressé, se traduisant par une diversification des acteurs
ainsi que par une décentralisation au bénéfice des collectivités locales ;
La littérature de référence est constituée par les nouvelles théories de la firme (ou théories
néo-institutionnelles), qui prennent racine dans les travaux précurseurs de l’école du « public
choice » (Tullock, Tollison), approfondis par les développements récents de la théorie des
incitations (Baron et Myerson, 1982 ; Laffont et Tirole, 1993).
A.2. L’Administration
B. Le rôle de l’Etat
Les normes rationnelles qui sous tendent l’économie publique sont définies selon des
conceptions particulières du rôle de l’Etat, tant du point de vue de sa légitimité et de ses
missions, que de l’efficacité de son action.
Nous rappelons les principales théories de l’Etat, ainsi que la définition des frontières du
secteur public et l’analyse de l’efficacité de l’action de l’Etat
Théorie néo-classique
Les crises financières en Asie, en Amérique latine et centrale, en Russie ont ouvert la
première crise de la mondialisation libérale, et ont montréla nécessité d’une régulation. Les
institutions de Bretton Woods ont été incapables de les prévenir. Les conséquences de la
dérégulation systématique ont mis en évidence la fragilité du système.
6
Le "Consensus de Washington" fondé sur la primauté des marchés financiers est alors
remis en cause dans un débat qui oppose les néo-keynésiens aux ultralibéraux. Il porte sur
la nature de la régulation et sur le rôle de l'État :
- Les uns, avec Milton Friedman, estiment que les institutions financières sont
responsables de la crise et qu'il vaudrait mieux les supprimer en faisant confiance au
seul marché pour réguler l'économie.
- D'autres, avec Joseph Stiglitz, insistent au contraire sur les dysfonctionnements du
marché, sur le rôle de l'État, et sur les politiques sociales. Cette confrontation a
alimenté les réflexions qui ont débouché sur le rapport "Meltzer", adopté en novembre
1998 par la commission de contrôle des institutions de Bretton Woods, mise en place
par le Congrès américain.
La logique libérale de l’Etat minimal en économie cantonne l’Etat dans un rôle de
réglementation. Celle-ci est incompatible avec l’idée de régulation, fût-elle assurée
indirectement par le marché, car elle débouche inéluctablement sur l’interventionnisme
étatique, pour corriger les défaillances du marché.
Plus généralement, les limites du modèle libéral sont analysées par référence au concept
d’effets pervers1, défini par Hayek comme le résultat non intentionnel d’une somme de
décisions individuelles rationnelles. Ceci représente une limite patente du modèle libéral,
puisque contrairement à la main invisible d’Adam Smith, l’agrégation de décisions
individuelles cohérentes ne conduit pas nécessairement à la réalisation de l’intérêt général.
Quelques exemples d’effets pervers ont été relevés dans la pensée économique :
- Certains néoclassiques ultra-libéraux (notamment F. Von Hayek) se sont ainsi
opposés à l’intervention même minimale de l’Etat, qu’ils considèrent comme
potentiellement perturbatrice. Tout projet de l’Etat visant par exemple à réduire les
inégalités risque de contrarier la croissance économique, celle-ci étant en grande partie
fondée sur les différences de capacité engendrées par les disparités de revenus ;
- Hayek a également préconisé en 1976, et pour les mêmes raisons, une
dénationalisation de la monnaie, jugeant exorbitant le pouvoir monétaire de l’Etat,
qui peut user de la planche à billets et provoquer l’inflation ;
- L’économie de l’offre (« supply side economics ») développée aux Etats-Unis dans
les années 70 (voir notamment Laffer) illustre cette limite (les effets pervers) du
libéralisme, puisqu’elle condamne l’imposition excessive des entreprises, qui
risquerait de contrarier le rôle central que celles-ci jouent dans la croissance
économique dans un système libéral ;
- Sans utiliser le terme d’effet pervers, Keynes a mis en exergue dans sa « théorie
générale » les limites du libéralisme, en relevant la défaillance globale, et non plus
seulement locale, du modèle de marché. Il explique ainsi que son objectif n’est pas de
condamner le libéralisme, mais d’éviter que les choix individuels (aussi rationnelles
soient-elles) conduisent à une solution globalement sous-optimale.
1
Yves Crozet. Analyse économique de l’Etat. Armand Colin, Paris,(1991), pp 126 ss.
7
3
Stanley Fisher (1988). “Recent Developments in Macroeconomics”, Economic Journal, June.
4
B. C. Greenwald and J. E. Stiglitz (1993). “Keynesian, New Keynesian and New Classical Economics”,
Oxford Economic Papers, March.
9
E. Plan du cours
Le cours comporte deux parties :
PREMIERE PARTIE
Cette théorie s’est développée dans deux principales directions, qui constitueront les chapitres
de cette première partie:
- L’économie du bien-être (chapitre I)
- La théorie des choix collectifs (chapitre II)
Il s’agit de la branche normative de l’économie qui étudie les effets des activités économiques
sur le bien-être de la collectivité. Elle inclut l’analyse des comportements individuels au
moyen d’une fonction d’utilité sociale (ou collective), l’analyse des biens collectifs, la
définition de critères d’efficience (optimum parétien et optimum de second rang) et d’équité
(évaluation des politiques publiques).
u ( q )e
t
U= dt
0
où
consommée, au prix p, flux actualisé au taux d’escompte social δ (pour tenir compte
des exigences d’équité intergénérationnelle). Le flux d’utilité sociale est défini comme
la somme des surplus des producteurs et des consommateurs.
- r la variable d’intégration
- l’approche ordinale, dans laquelle les indicateurs sont utilisés pour construire une
échelle de préférences permettant de distinguer entre plusieurs niveaux de bien-être,
représentés graphiquement par des courbes d’indifférence.
11
- l’approche cardinale, dans laquelle les indicateurs sont utilisés pour construire un
étalon ou une unité de mesure de l’utilité.
Prix du marché impropres à l’expression de la valeur des biens et services sociaux, du fait
des distorsions du marché. On utilise en général les prix virtuels (ou implicites), qui
prévaudraient en cas de marché efficient, et qui résultent de l’optimisation (maximisation
sous contrainte)
Critique de Rawls
L’hypothèse traditionnelle d’additivité a d’abord été critiquée par Rawls (1971), qui
propose le critère du maximin (dit critère de Rawls). Dans cette hypothèse la fonction
d’utilité sociale s’écrit :
U = min (U1, U2, ….., Un)
où U1 représente l’utilité de l’individu (ou de la période ou de la génération) 1.
Le critère du maximin signifie que le maximum de bien-être social est obtenu par la
maximisation du bien-être de l’individu (de la période ou de la génération) le (la) moins
riche, soit
Max U = max [min (U1, U2, …..., Un).
Critique de Solow
Solow a ensuite introduit le critère deconsommativité, et actualise l’indice q plutôt que
l’utilité. La maximisation intertemporelle du bien-être social est soumise à la
maximisation du niveau de consommation indéfiniment soutenable.
Les biens collectifs sont, avec les externalités et le monopole naturel, des manifestations de la
défaillance du marché (cf infra), c’est-à-dire de son incapacité à assurer une allocation
efficiente des ressources dans certains cas. La définition des biens collectifs repose
généralement sur la distinction biens privés / biens publics, et selon les critères de rivalité et
d’exclusion. La congestion est une caractéristique supplémentaire permettant d’affiner la
classification des biens collectifs. Un biencongestionné (ou encombré) est un bien dont le
coût marginal social de consommation est supérieur au coût marginal privé de consommation,
du fait d’une demande excessive. L’exemple le plus plausible est celui d’un site touristique
surpeuplé. On peut remédier à la congestion par une augmentation du prix. Cette mesure
renforce en fait l’exclusion, comme dans le cas d’un bien de club.
Tableau 4
Le marché est par nature impropre à la fourniture des biens publics purs, du fait de leur non
exclusion. Dans ce cas l’Etat se substitue au marché pour la fourniture de ces biens. On parle
de biens tutélaires (« merit goods »). C’est le cas des campagnes de vaccinations par
exemple, qui sont gratuites et obligatoires, la santé étant (dans ce cas) un bien public pur.
L’accès libre est également une manifestation de la défaillance du marché. La plupart des
ressources naturelles sont en accès libre, du fait de l’absence de droit de propriété défini, et
par conséquent l’absence de marché et de prix pour réguler leur exploitation.
I. 3. L’OPTIMUM PARETIEN
L’optimum parétien est défini comme le meilleur état de satisfaction collective réalisable, ou
un état où il n’est plus possible d’améliorer la satisfaction d’un agent quelconque, sans réduire
celle d’au moins un autre agent.
Formellement, l’optimum de Pareto sera réalisé si l’utilité de chaque agent est maximale,
étant donné l’utilité des autres agents.
d’une unité de Ade manière à maintenir constante la satisfaction du consommateur sur la courbe
d’indifférence,soit :
Le taux de substitution entre biens est alors égal au rapport des utilités marginales de A et B. Pour une
substitution de B à A, On aura
dA U ' B
TMSBB / A 5
dB U ' A
U 'B pB
TSTB / A 6
U 'A pA
Graphiquement, cette condition est remplie au point de tangence entre la droite de budget et la courbe
d’indifférence (E sur le graphique 1). Toute combinaison autre que celle définie en ce point [(A0,B0)
par exemple], bien que procurant la même satisfaction (on est sur la même courbe d’indifférence),
représente une dépense plus élevée (au-dessus de la droite de budget).
Graphique 1
5
U = U (A,B). La variation de U est nulle sur la courbe d’indifférence, soit dU = U’ A.dA + U’B.dB = 0 et
TSMBB/A= U’B /U’A = - (dA/dB)
6
R = pAA + pBB. La variation du revenu R est nulle sur la droite de budget, soit dR= p A.dA + pB.dB = 0 et
pB/pA= - (dA/dB) = U’B /U’A
14
A0
U1U2
U0
O B0 B
U1 U1 (a1 , b1 ) U 2 (a 0 a1 , b 0 b1 ) U 20
Où λ est le multiplicateur de Lagrange. En annulant les dérivées partielles il vient :
15
U 1 U 1 U 2
0
a1 a1 a 2
U 1 U 1 U 2
0
b1 b1 b2
U 1
U 2 (a 0 a1 , b 0 b1 ) U 20 0
et, en utilisant les deux premières équations,
U 1 / a1 U 2 / a 2
U 1 / b1 U 2 / b2
C’est la condition d’optimalité recherchée. Les deux membres représentent les TMSB
(rapports des utilités marginales) des consommateurs 1 et 2.
Arrow et Debreu ont donné une représentation graphique de l’équilibre. C’est la courbe de
contrat, lieu des points de tangence, ou des optima de Pareto, dans le diagramme emboîté
(ou diagramme d’Edgeworth), dans le cas simple d’une économie à deux agents et deux biens
(CC sur le graphique 2).Les TMSB des consommateurs 1 et 2 (représentés ici par les axes
d’origine 01 et 02 respectivement) sont égaux aux points de tangence entre les courbes
d’indifférence de 1 et 2.
Graphique 2
a2 02
b
C
b2
b1
C
01a
a1
16
TMST = - dK/dL
Le TMST est égal au rapport des productivités marginales des facteurs, soit :
( K / L) ( F ' L / F ' K )
/
K/L F 'L / F 'K
- Un σ égal à 0 signifie que les facteurs sont complémentaires, sans aucune possibilité de
substitution.
- Un σ positif signifie que les facteurs sont substituables.
Le point de tangence avec l’isoquant définit alors la combinaison optimale. Cet optimum se
caractérise par l’égalité du taux marginal de substitution technique et du rapport des prix des facteurs,
soit :
F 'k p
TMST k
F ' L pL
17
Graphique 3
Y2
Y1
Y0
0 L
Y1 Y1 ( K1 , L1 ) Y2 ( K 0 K1 , L0 L1 ) Y20
Où λ est le multiplicateur de Lagrange. En annulant les dérivées partielles il vient :
18
Y1 Y1 Y
2 0
K 1 K 1 K 2
Y1 Y1 Y
2 0
L1 L1 L2
Y1
Y2 ( K 0 K 1 , L0 L1 ) Y20 0
et, en utilisant les deux premières équations,
Y1 / K 1 Y2 / K 2
Y1 / L1 Y2 / L2
A.1.Tous les consommateurs consomment de chaque bien produit. Les fonctions d’utilité
des consommateurs sont :
où
A.2. Tous les producteurs utilisent tous les facteurs de production et produisent tous les
biens.Les fonctions de production implicites sont :
où
19
x hj
- la quantité du facteur Xj utilisée par h,
B.1. Les quantités globales de facteurs fournies par les consommateurs sont égales aux
quantités globales utilisées par les producteurs
m N
x
i 1
*
ij x hj , avec j = 1,…,n
h 1
B.2. Les quantités consommées globales des biens produits sont égales aux quantités
produites globales
m N
m
m N n N
Z U 1 (q11
*
,..., x10n x1*n ) i U i (qi*1 ,..., xin0 xin* ) U i0 h Fh (q h1 ,...x hn ) j xij* xhj
i 2 h 1 j 1 i 1 h 1
s
N m
k q hk qik*
k 1 h 1 i 1
Z U
*1 k 0
q1k q1k
*
Z U
i *i k 0
qik
*
qik
Z U
h *i k 0
q hk qik
Z U 1
j 0
x1 j
*
( x10j x1*j )
Z U i
i j 0
xij
*
( xij0 xij* )
Z Fh
h j 0
x hj
*
x hj )
j U 1 / q1*j U m / qmj
*
F1 / q1 j FN / q Nj
, avec j, k = 1,…, s
k U 1 / q1*k U m / qmk
*
F1 / q1k FN / q Nk
2) Les TMSB de tous les consommateurs et les taux marginaux de substitution technique
(TMST) de tous les producteurs doivent être égaux pour tous les facteurs(biens primaires)
pris deux à deux (j et k)
7
Rappelons que dans la théorie des productions jointes, la courbe de transformation des produits (qui a la forme
d’un isoquant concave) est le lieu des combinaisons d’outputs (Q 1 et Q2) qui peuvent être obtenues avec un
niveau donné d’un input (X par exemple). Le TTP est alors défini comme le rapport de la productivité marginale
de X pour la production de Q2, à la productivité marginale de X pour la production de Q1.
21
3) les taux de substitution bien-facteur des consommateurs doivent être égaux aux taux de
transformation correspondants facteur-bien des producteurs
avec
j= 1, …, n
k = 1, …, s
Lorsque ces conditions sont toutes réunies, les deux théorèmes suivants de l’économie
du bien être sont vérifiés. Ils ont été démontrés par Maurice Allais en 1944 (Guerrien
1985, pp 194 ss) :
- La première est de savoir si l’Etat doit fixer le prix des biens et services qu’il fournit
aux citoyens, selon les lois du marché.
- La seconde porte sur la spécificité des techniques d’évaluation des projets publics.
La tarification des entreprises publiques obéit à une logique d’optimum de second rang.
Elle considère le prix théorique (p*)detarification au coût marginal(p* = Cm)comme une
norme parétienne de référence permettant de déterminer le « vrai prix »pour les monopoles
publics, par la prise en compte descontraintes de marché. Uneentreprise publique(en général
un monopole fonctionnant à rendements constamment croissants) serait en effet en déficit
budgétaire structurel si elle tarifiait sa production au coût marginal8. De plus, il
nepourraitcoexister avec des entreprises privées ayant un comportement non marginaliste. La
vérité des prix implique alors un prix qui permette aux entreprises publiques de couvrir leurs
coûts de production,en leur assurant un « profit normal »(π*)qui concilie l’objectif de service
8
En rendements croissants en effet, le coût marginal est inférieur au coût moyen.
23
public avec la contrainte d’équilibre budgétaire.Le prix « vrai » (p)serait ainsi donné pour
l’entreprise publique par
p = Cm + π*9
Dans cette optique de second rang, la tarification des entreprises publiques utilise
habituellement deux types d’instruments, prenant le coût marginal comme base de
tarification :
- La tarification au coût moyen(supérieur au coût marginal dans sa branche
décroissante, c-à-d. en rendement croissants). Dans ce cas, π* représente l’écart entre
le coût marginal et le coût moyen.
- Le péage. Dans ce dernier cas π* désigne le péage, qui représente l’écart entre le prix
« vrai » (p) et le prix théorique (p*).
L’évaluation des projets publics repose sur un ensemble de méthodes visant à comparer les
avantages et les coûts sociaux de ces projets, en vue de déterminer les conditions d’optimalité
des choix publics. Souvent condensés sous le terme d’analyse coût-avantage (ACA), ces
méthodes évaluent non seulement la rentabilité financière des projets, mais également leur
rentabilité économique c-à-d les externalités (positives et négatives) qu’ils génèrent.
- Lecritère de la valeur ajoutée nette (VAN), qui actualise les flux de coûts et de
bénéfices du projet sur un horizon temporel donné [0, T], selon la formule
9
Noter que la taxation optimale utilise formule similaire, à cette différence près que π est remplacé par une taxe
t* qui « internalise » le coût marginal externe (l’externalité générée par l’activité du polluer)
24
L’examen de la logique des décisions par scrutin met en évidence les caractéristiques et les
limites de la règle majoritaire.La littératureconcerne cinq principaux points :
Dans son « Essai sur l’application de l’analyse à la probabilité des décisions rendues à la
pluralité des voix » (1785), Condorcet avait énoncé en le théorème suivant : toute règle
démocratique de choix collectif présente des risques d’intransitivité dès que le choix porte
sur trois alternatives ou davantage. Ce théorème est connu sous le nom de « Paradoxe de
Condorcet ». Chaqueélecteur a son ordre de préférence transitif, mais différent des autres.
Tableau 1
PREFERENCES
ELECTEURS X Y Z X
25
Selon Arrow, les préférences collectives peuvent être déterminées de deux manières, à partir
des préférences individuelles : soit par un dictateur,soit par une procédure de vote majoritaire.
Dans ce dernier cas, tous les membres de la société participent au vote, et Arrow énonce cinq
axiomesque doivent vérifier les structures de préférences collectives pour être démocratiques :
1) Ordre complet. Les préférences doivent être réflexives et transitives sur tout le
domaine des choix. Le classement des préférences dans l’optimum parétien n’est
pas complet à cet égard, puisqu’il suppose qu’une allocation A est préférée
collectivement à B si le niveau d’utilité d’une personne au moins est supérieur
pour A et si le niveau d’utilité d’aucun individu n’est inférieur. Cet axiome
signifieque l’on accepte l’état des choix tel qu’il est, et que les choix individuels
sont indépendants, de telle manière qu’un mouvement d’opinion ne puisse pas
infléchir toutes les préférences dans le même sens.
3) Souveraineté des citoyens. Les choix collectifs doivent respecter les préférences
unanimes. Si tous lesindividus préfèrent une option, le choix collectif doit refléter
cette option10.
10
Ceci revient en fait à faire l’hypothèse d’additivité des préférences
26
- Le premier prouve qu’un choix collectif vérifiant les axiomes 2, 3 et 4 est parétien et
unanime, puisque ne nuisant à personne.
D.Black a montré en 1948, que le scrutin majoritaire garantissait la transitivité des choix
collectifs selon un seul critère si tous les votants avaient des ordres de préférence
unimodaux, c’est-à-dire ne présentant qu’un seul maximum11. On en déduit le théorème de
l’électeur-médian, c’est-à-dire celui dont la position est centrale, partageant l’ensemble des
électeurs en deux sous-ensembles égaux. Black montre que cette position peut être décrite par
la règle de la majorité absolue, soit la position :
M = [(N-µ) / 2] + 1
M = [(N-1) / 2] + 1
La position de l’électeur médian est en effet donnée par (N + 1) / 2, ce qui est équivalent à la
position M de la majorité absolue.
Le théorème s’énonce comme suit : si les votants sont en nombre impair et ont tous des
préférences unimodales, le scrutin majoritaire est transitif, et coïncide avec l’optimum de
l’électeur-médian.L’électeur-médian joue ainsi un rôle primordial dans la décision, puisqu’il
peut donner la majorité absolue à l’une quelconque des deux coalitions (N-1) / 2 situées à sa
gauche soit à sa droite.
11
Ceci signifie que le domaine des préférences de chaque électeur est convexe
27
1) Si l’état initial est non parétien, l’on se trouve en situation de jeu coopératif, ou à
somme positive. Ceci veut dire que si on se donne trois électeurs 1, 2, et 3 ayant des
préférences unimodales, et si 1 est l’électeur-médian, la décision majoritaire conduira
à un optimum parétien en même temps qu’à l’optimum individuel pour 1. La raison en
est que toute tentative de 1 pour passer à une satisfaction plus élevée, lèserait soit 2
soit 3 soit les deux, et donnerait lieu à des coalitions instables entre les trois électeurs.
2) Si l’état initial est parétien, l’on se trouve en situation de jeu non coopératif, à somme
nulle. Cette fois tout écart par rapport à l’optimum initial, donnera lieu à des effets de
redistribution des satisfactions individuelles et des revenus au profit de la coalition
majoritaire, quiramèneront à l’optimum.
Bowen énonce alors, 12 ans avant Samuelson12, le théorème d’équilibre de production des
biens collectifs, non rivaux. La production de tout bien collectif est optimale lorsque la
somme des utilités marginales individuelles de consommation est égale au coût marginal de
production. L’indivisibilité de consommation des biens collectifs (non rivaux) implique en
effet que chaque unité supplémentaire non de bien non rival profite à tous les consommateurs.
La procédure de Bowen sera généralisée et dynamisée par Green et Laffont 13 pour établir les
conditions sous lesquelles cette procédure conduit à un optimum parétien.
12
Paul A. Samuelson, « Diagrammatic Exposition of a Theory of Public Expenditure ». Review of Economics
and Statistics, Vol 37, N° 4, 1955, pp 350-56.
13
J.R. Green et J.J. Laffont. Incentives in Public Decision Making. North Holland, 1979.
28
DEUXIEME PARTIE
Une externalité est un coût (ou un bénéfice) résultant d’une activité donnée, qui n’est pas
supporté par (qui n’échoit pas à) l’agent exerçant l’activité considérée, ou qui n’est pas pris
en compte par le marché. Dans le premier cas on parle d’un coût externe ou d’une externalité
négative. Dans le second cas on parle d’un bénéfice externe ou d‘une externalité positive. La
littérature se réfère généralement (Buchanan et Stubblebine, 1962) au concept d’externalité
au sens de Pareto(« Pareto-relevant ») , c’est-à-dire une externalité qui s’oppose à la
réalisation de l’optimum parétien, notamment par la violation de l’hypothèse d’indépendance
des fonctions d’utilité des agents. Deux conditions d’existence ; Il y a externalité au sens de
Pareto chaque fois :
29
Un bénéfice externe peut être par exemple une amélioration de l’efficacité productive des firmes par la
production de nouvelles technologies, sans contrepartie pour l’inventeur. Il peut aussi s’agir d’une
externalité de réseau, dérivant par exemple d’une connexion à internet
Il peut s’agir d’une externalité de consommation ou de production. Le tableau 2 décrit les externalités
selon les deux critères d’activité (production ou consommation) et d’impact (négatif ou positif).
Tableau 2
Exemples d’externalités selon l’activité et l’impact
Impact Activité
Externalité négative (ou coût Pollution, bruit ou radiation par Déchets ménagers ou bruit de
externe) une usine par exemple téléviseur par exemple
Les externalités sont généralement définies par référence à la responsabilité du générateur (le pollueur)
envers la victime (individu ou collectivité), dans une optique d’internalisation. Elles peuvent alors
être décrites selon quatre types de relations pollueur-victime : 1) Producteur-producteur, 2)
Producteur-consommateur, 3) Consommateur-consommateur, 4) Consommateur-producteur. Le
tableau 3 résume cette description. Une case du tableau décrit l’externalité générée par le pollueur (à
gauche en ligne), et subie par la victime (au dessus en colonne).
Tableau 3
Exemples d’externalités selon la relation pollueur-victime
Victime
Pollueur
Producteur Consommateur
Les externalités présentent les caractéristiques des biens collectifs, notamment la non rivalité
(ou l’indivisibilité) et la non exclusion. Les externalités sont ainsi des « biens » à
consommation indivisible, c’est-à-dire entrant dans les fonctions d’utilité de tous les agents de
la collectivité considérée.
A l’inverse, le cas du déversement d’effluents toxiques par une usine dans un cours d’eau utilisé en
aval pour l’irrigation par une ferme, est une externalité privée.
A l’inverse, l’externalité technologique se transmet par des mécanismes hors marché, notamment
biochimiques. Dans l’exemple ci-dessus l’externalité technologique (pollution accrue) est associée à
l’externalité pécuniaire.
L’externalité est au contraire non transférable en général, lorsqu’elle est publique et que le marché est
concurrentiel.
L’hypothèse d’externalité multidirectionnelle est plus réaliste toutefois, chaque pays étant pollueur et
victime. Ce dernier argument fonde la coopération internationale pour la réduction des émissions de
gaz à effet de serre.
Le graphique 7 décrit ce cas. Les abscisses décrivent les quantités (Q) de pollution (l’externalité)
épurée. Les ordonnées décrivent les coûts (C) et les bénéfices (B) de l’externalité. La droite CMP
désigne le coût marginal privé de la pollution. CMS désigne le coût marginal social de la dépollution.
La droite BMS désigne le bénéfice marginal social de l’épuration. L’’externalité négative est
représentée par la surface hachurée ABCD.
Graphique 7
32
BMS CMP
B
A
D C
Q0 Q’ Q
Par rapport à cet optimum, deux cas de sous-optimalité correspondant à une perte de bien-être collectif
(ou d’externalité) sont décrits sur le graphique 8 :
1. En Q1, le bénéfice social de la dépollution est supérieur au coût social (BMS > CMS). Il y a donc
un manque à gagner pour la société, puisqu’un volume supplémentaire de pollution peut être épurée.
La perte de bien-être correspondante est représentée par le triangle ABE.
2. En Q2 , la situation inverse prévaut (BMS < CMS). La société supporte un coût excessif de
dépollution. La perte de bien-être correspondante est représentée par le triangle CDE
Graphique 8
33
C,B
CMS
BMS
A C
E
B D
O
Q1 Q* Q2 Q
Les défaillances institutionnelles renvoient aux insuffisances de l’Etat dans l’exercice de ses
fonctions de régulation économique et de gouvernance. Pour être justifiées, les interventions
de l’Etat doivent être nécessaire (nécessité tenant généralement aux défaillances du marché et
à un déficit de gouvernance). Elles doivent ensuite être efficaces (correction des distorsions
aux moindres coûts). Ces défaillances incluent : 1) les distorsions du marché engendrées par
des interventions erronées de l’Etat (notamment par des taxes, des subventions, des quotas,
des entreprises et des projets publics inefficients); 2) la non internalisation des effets
secondaires, d’interventions par ailleurs justifiées (par exemple la contamination des nappes
souterraines par l’utilisation d’engrais subventionnés); 3) la non intervention par omission de
l’Etat, lorsque la défaillance du marché aurait justifié l’intervention. Des vides juridiques dans
l’exploitation des ressources naturelles ont parfois conduit à des conflits tragiques entre
législations traditionnelle et moderne ; 4) L’absence de bonne gouvernance dans la gestion
des ressources, c’est-à-dire l’absence de participation, de transparence, de responsabilité, de
primauté du droit, d’efficacité et d’équité. C’est le cas notamment dans la gestion des
ressources des ressources forestières où l’absence de bonne gouvernance détruit les
écosystèmes et exclut les populations riveraines.
CHAPITRE IV
est alors de déterminer les conditions d’un optimum de second rang. Lipsey et Lancaster ont
été les premiers à définir ces conditions14. L’idée de base est que lorsque toutes les conditions
de l’optimum parétien ne peuvent pas être satisfaites, l’équilibre général de marché ou la
référence aux conditions marginales parétiennes conduit alors à des situations sous-optimales.
Si par exemple pour une branche donnée de l’économie le prix est supérieur au coût marginal,
il ne sera plus efficient de se référer à la condition marginale parétiennes p = Cm pour les
autres branches, car alors il y aurait une demande excessive des biens produits par ces
dernières. Dans une optique de second rang, il conviendrait alors de taxer ces autres biens
pour amener les consommateurs à affecter leur budget comme ils le feraient dans l’optique
parétienne de tarification au coût marginal.
Fk U 1 m U j
k j
E k E j 2 E
où
14
R.G. Lipsey et Kelvin Lancaster. “The General Theory of Second Best”, Review of Economic Studies, Vol 24
(1956-1957), pp. 11-32.
15
Anthony C. Fisher. Resource and environmental Economics. Cambridge University Press, 1981, pp 166 ss.
35
La première condition d’optimalité signifie que chaque firme poursuivra son activité
F
polluante, jusqu'au point où la productivité marginale k k , de l'émission de déchets
E k
polluants (considérés comme facteur de production), est égale au coût marginal de cette
émission, c'est-à-dire la somme pondérée des désutilités pour tous les consommateurs, soit
U 1 m U j
j
E j 2 E
U j F
j k k
X ij Lik
Graphique 9
Coûts, Profits
C
Pm
36
Selon le théorème de Coase, les externalités peuvent être corrigées par le marché (contrats et
négociations privés) si les droits de propriété sont définis, et s’il n’y a pas de coûts de
transaction. Les pollueurs et les victimes peuvent alors internaliser les externalités par des
contrats privés, et instaurer une utilisation efficiente des ressources, puisque la distribution
des droits de propriété affecte uniquement la structure et non le niveau du revenu.
Le « prix » est représenté dans ce cas par l'indemnité versée après négociation soit par le
pollueur pour compenser le dommage subi par la victime, soit par ce dernier pour compenser
la perte d'activité subie par le pollueur.
- Un second corollaire est que l’efficience (du moins à court terme) peut être réalisée à
travers le principe “victime payeur” plutôt que le principe “pollueur payeur”, si pour des
raisons d’équité (ou pour toute autre raison) on peut s’attendre à une défaillance du
pollueur.
- Le troisième corollaire découle de l’absence d’effet revenu et d’effet de richesse. La
commercialisation des droits étant de ce fait aisée et sans coût, le marché les redistribue
de manière efficiente quelle que soit leur distribution initiale.
La principale limite du théorème de Coase tient au fait que la pollution étant un « mal »
public, sa non rivalité induit des comportements de passager clandestin et des coûts de
négociation qui rendent celle-ci difficile selon le théorème de Coase. Le théorème de Coase
est ainsi mieux indiqué pour des négociations dans des petits groupes voire entre voisins.
Ces courants sont essentiellement issus des nouvelles théories de l’organisation industrielle,
auxquelles sont associés notamment les noms de F.Knight (1921), R. Coase (1937), A.
Alchian (1952), H. Leibenstein (1966), H. Demsetz (1972), O. Williamson (1975), Jensen et
Meckling (1976). Les nouvelles théories de la firme (encore appelées nouvelle économie
institutionnelle ou théories néo-institutionnelles) ont une filiation directe avec la théorie de la
rationalité limitée (ou procédurale)16, ou les limites du modèle néoclassique de l’optimum
parétien. Dans ce dernier modèle de référence de l’analyse économique des décisions
publiques, l’efficience économique repose sur des conditions très restrictives : concurrence
parfaite, information parfaite, absence d’externalités, etc... Ces conditions garantissent, du fait
de l’hypothèse sous-jacente de rationalité substantielle des choix individuels, que les objectifs
fondamentaux des politiques publiques sont atteints :
1) Le degré d’équité dans la distribution des revenus est conforme aux préférences
collectives ;
2) L’offre de monnaie dans l’économie est suffisante pour assurer un équilibre de plein
emploi avec stabilité des prix.
Dans les nouvelles théories de la firme, les choix économiques publics ont une rationalité
limitée par l’imperfection des marchés et de l’information, ainsi que par les externalités. La
firme apparaît dans ce contexte, comme une organisation, un lieu de négociations
contractuelles, un mode de coordination économique alternatif au marché.
16
Le concept de rationalité limitée (ou procédurale) a été forgé par Herbert Simon (Prix Nobel 1978), pour ses
recherches en intelligence artificielle, caractérisée par le recours aux machines pour pallier les carences de
l’intelligence humaine, ainsi que pour ses recherches appliquées en nouvelle microéconomie, caractérisée par la
prise en compte de l’environnement social comme contrainte sur les décisions individuelles.
38
- celles fondées sur les défaillances du marché, qui justifient l’intervention publique
pour l’internalisation des externalités, la fourniture des biens et services collectifs, la
régulation des monopoles naturels,
- et celles fondées sur les défaillances institutionnelles, qui justifient à l’inverse
l’ouverture à la concurrence et au secteur privé, pour pallier la faiblesse du cadre
incitatif public.
La théorie des droits de propriété aborde le problème des organisations du point de vue de la
répartition des droits de propriété. Selon cette théorie l’entreprise est caractérisée par une
structure particulière de droits de propriété définis par un ensemble de contrats [Alchian and
Demsetz, 1972]. D’après le théorème de Coase (1960), l’efficience économique sera réalisée,
et l’optimum instauré par des contrats privés, si les droits de propriété sont clairement définis,
et sont échangeables sur un marché concurrentiel, et s’il n’y a pas de coûts de transaction. Un
système de propriété efficace permet aux cocontractants de profiter des avantages de la
spécialisation et d’assurer un système efficace d’incitation.
La théorie de l’agence permet de comprendre dans une certaine mesure le recours par les
gouvernements aux partenariats public-privé. Selon cette théorie, la divergence d’intérêts et
l’asymétrie d’information existant entre deux acteurs, le mandant et le mandataire, engendre
bien souvent des coûts d’agence comme ceux liés aux dépenses de surveillance et d’incitation,
et aux assurances. La relation d’agence peut être définie comme un contrat par lequel une
personne (le principal) engage une autre personne (l’agent) pour exécuter en son nom une
tâche qui implique une délégation de pouvoir de décision à l'agent [Jensen et Meckling,
1976].
Dans le cas des organisations publiques, les gestionnaires jouent un rôle qui leur a été confié
par l’Etat, considéré comme le propriétaire et l’actionnaire principal de l’entreprise publique.
Mais, puisque ce sont les gestionnaires qui y prennent les décisions pertinentes, ce dernier n’a
pas le contrôle de l’entreprise. Dans cette relation, les intérêts de l’agent (les gestionnaires) et
ceux du principal (l’Etat) ne concordent pas, ce qui engendre des coûts de surveillance
(« monitoring costs »), par exemple les coûts des vérifications comptables et les coûts
d'établissement des états financiers. Les pertes engendrées par ces divers coûts sont
supportées par l’Etat. L’argumentation de Jensen et Meckling (1976) suppose que la
séparation de la structure de propriété des fonctions managériales engendre inéluctablement
des conflits d’intérêts entre propriétaires (actionnaires) et dirigeants et donne lieu à des coûts
d’agence.
La théorie des coûts de transaction tire son origine des travaux de Coase(1937). L’auteur part
d’un constat selon lequel, alors que sur le marché la coordination entre agents économiques se
fait de façon inconsciente par le système de prix, à l’intérieur de la firme elle résulte de
l’autorité de l’entrepreneur. L’essence de la coordination par la firme, d’après Coase, se
trouve dans la hiérarchie et la suppression du système de prix. Le recours au marché entraîne
des coûts, qui sont constitués de coûts de découverte de prix adéquats et de coûts de
négociation et de conclusion de contrats séparés, pour chaque transaction. Par conséquent, la
coordination administrative par la firme s’impose parce qu’elle permet une économie de coûts
(appelés plus tard coûts de transaction par Williamson). La question principale posée par
Coase est de savoir quelle est la nature de la firme et pourquoi elle existe. Selon l’auteur, les
firmes existent parce qu’elles permettent de réduire les coûts de transaction, via un système de
coordination fondé sur la hiérarchie.
L’approche de Williamson (1985) est quelque peu différente de celle de Coase (1937). Il
présente la théorie de la firme comme une partie de la théorie des institutions du capitalisme
et la firme elle-même n’est plus conçue comme une hiérarchie (vision de Coase), mais plutôt
comme un nœud de contrats. Dans la conclusion de ces contrats, Williamson (1985) distingue
les coûts ex ante, qui correspondent aux coûts de recherche et de conclusion du contrat, et des
coûts ex post, qui sont relatifs à l’exécution du contrat lui-même. C’est sur ces derniers coûts
que l’auteur focalise son analyse de la théorie de la firme. L’analyse de Williamson repose
tout comme celle de Coase sur l’hypothèse de rationalité limitée, mais en diffère par la prise
en compte des comportements stratégiques des agents consistant, dans un contexte
d’information incomplète, à induire leur partenaire en erreur pour en tirer profit. L’auteur
distingue deux formes de comportements stratégiques : ex ante et ex post.
- La première est celle qui peut être observée en amont de la passation du contrat. Cette
forme peut conduire à la sélection adverse [Akerlof, 1970] c’est-à-dire à des
transactions sur des produits de mauvaise qualité.
- La deuxième se réfère à la phase d’exécution du contrat. Elle tient à l’incomplétude du
contrat17 et la difficulté de déterminer la volonté des parties à respecter leurs
engagements.
17
L’incomplétude des contrats résulte de l’incertitude, les coûts de transaction étant plus élevés dans ce contexte
du fait de l’impossibilité de prévoir explicitement toutes les contingences au moment de la signature du contrat.
40
La théorie des marchés contestables a été formulée initialement par Baumol, Panzer et Willig
(1986) aux Etats-Unis dans un contexte de renforcement du libéralisme économique et du
déclin de l’Etat-providence. L’idée de base est que la concurrence, lorsqu’elle n’est pas
confrontée à des contraintes de barrières à l’entrée et à la sortie, garantit l’efficience des
entreprises présentes sur le marché, même si ces dernières sont peu nombreuses, offrent le
même produit ou sont en situation de monopole. Un tel marché implique que toute entreprise
nouvelle peut à tout moment venir s’installer sur le marché, et l’accès par les entreprises aux
mêmes informations, à la même technologie et aux mêmes services. Les barrières incluent les
barrières juridiques, l’attribution de droits exclusifs à certaines entreprises, les investissements
non récupérables.
Ainsi, afin d’arriver à une organisation économique plus optimale du secteur public, l’Etat
devrait favoriser la concurrence. Cette concurrence ferait en sorte que les entreprises en place
puissent être contestées par des concurrents potentiels disposés à les supplanter par un produit
ou service de meilleure qualité au moindre coût, par l’innovation, etc...
La théorie de l’efficience X a été développée par Leibenstein (1966) pour prendre en compte
le fait que certaines inefficacités organisationnelles ne résultent pas d’un défaut d’allocation
des facteurs de production. C’est le cas notamment des inefficacités liées à la motivation du
personnel ou à une mauvaise organisation de l’entreprise. Des entreprises disposant de la
même composition de main-d’œuvre (facteur travail) et de la même technologie (facteur
18
Le traité de Maastricht signé le 7 février 1992, dépasse l’objectif initial de la Communauté Européenne qui
visait à réaliser un marché commun. Ce traité établit entre autres, la neutralité des gouvernements quant à
lapropriété de certaines entreprises. Les services publics sont invités au libre jeu de la concurrence.
41
- L’absence de pression externe du fait que ces entreprises sont souvent en situation de
monopole, ce qui favoriserait une « vie tranquille » et n’inciterait pas à un effort de
compétitivité, d’efficience et d’efficacité, contrairement au secteur privé.
C’est vers la fin des années 60 que l’analyse économique des choix publics prend
véritablement son essor, notamment avec les travaux de l’École de Virginie. La théorie des
choix publics est apparue très tôt comme l’une des théories ayant le plus aidé à faire avancer
les idées néo-libérales sur le plan économique. Élaborée essentiellement par des économistes
comme Buchanan et Tollison (1972), Tullock, elle postule que l’inefficience des entreprises
publiques est due notamment aux groupes d’intérêts et aux jeux politiques qui caractérisent
les administrations publiques. Selon l’Ecole du « Public Choice » les agents qui prennent les
décisions publiques, notamment les administrateurs d’entreprises publiques, les politiciens et
les bureaucrates, le font en privilégiant non pas l’intérêt général, mais leurs intérêts propres
comme le ferait tout individu dans ses choix privés [Hodge, 2000]. Ainsi, le courant du
« Public Choice » oppose l’État au marché, le marché étant considéré comme le mécanisme
d’allocation efficiente par excellence des ressources.
Il est important de noter que les implications du modèle parétien de référence rendent inutile
le PPP pour la production et la fourniture des services collectifs. Ces implications sont en
effet celles de la théorie classique de la firme, dans laquelle la firme est assimilée à un agent
individuel maximisateur :
On peut résumer comme suit les implications des théories néo-institutionnelles pour le PPP :
- La théorie des droits de propriété complétée par celle de l’agence impliquent que le
recours au secteur privé dans les ententes contractuelles de partenariats public-privé
permet à l’Etat de minimiser ses coûts d’agence. Dans la firme privée, la nature des
transactions est différente et il n’y a pas d’opposition fondamentale entre elle et le
marché (contrairement à l’État et le marché).
- La théorie des coûts de transactions est évoquée pour justifier le PPP, du fait de
l’inefficience des organisations publiques, lesquelles ne sont pas capables de
minimiser leurs coûts de transaction (c’est-à-dire d’information, de négociation,
d’exécution des contrats). La rigidité des structures, le processus de prise de décision
et les cercles vicieux bureaucratiques imposent une délégation des pouvoirs, ce qui
engendre, en raison notamment de l’imperfection de l’information et des
43
- La théorie des marchés contestables insiste sur le rôle de l’Etat dans l’assainissement
de l’environnement économique, pour stimuler la concurrence avec le secteur privé
dans l’offre et la production de biens et services aux citoyens. L’existence
d’entreprises intégrées en situation de monopole, surtout lorsqu’elles sont publiques,
est fortement remise en question. Ceci s’est traduit au cours des dernières années par
des mouvements de dérégulation, des transferts de gestion, des contrats de concession,
de sous-traitance et des PPP afin de permettre à l’Etat d’améliorer sa performance.
- La théorie de l’efficience X implique que les PPP pourraient contribuer à réduire ces
facteurs d’inefficience dans les organisations publiques, et accroître ainsi la
performance et la compétitivité de celles-ci, afin de mieux intégrer la vérité des prix.
- La théorie des choix publics implique qu’en raison de l’inefficacité de l’Etat pour des
considérations partisanes et bureaucratiques, il est nécessaire de soumettre à la
sanction du marché, le plus grand nombre d’activités gouvernementales.
44
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