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                                                                                Les Thraces

Les Thraces constituaient un peuple de langue thraco-illyrienne (donc indo-


européenne) dont les tribus, signalées dans les Balkans en même temps que les
Achéens, les Éoliens et les Ioniens, partageaient un ensemble de croyances, un
mode de vie et une même langue avec des variantes et dialectes. Leur civilisation,
encore mal connue, s'est épanouie du IIe millénaire av. J.-C. au IIIe siècle av. J.-C.,
sur un substrat anté-indo-européen dit «pélasge» développé dès le Ve millénaire av.
J.-C. comme civilisation agricole et pourvue de nécropoles richement dotées en or.
L'étymologie de ce nom reste incertaine. Orale, la culture des Thraces était faite de
légendes et de mythes incluant la croyance en l'immortalité sous la forme de
l'«orphisme», décrit par Hérodote. Les connaissances que nous avons de ce peuple
viennent des auteurs grecs anciens et de découvertes archéologiques récentes.
Les Thraces vécurent sur un vaste territoire européen entre la mer Noire (le pont
Euxin) à l'est, la rivière Strouma (Strymon) à l'ouest, les Carpates septentrionales au
nord (Daces), la mer Égée au sud, ainsi que dans le sud-ouest de l'Asie mineure
(Phrygiens peut-être, Thyniens et Bythiniens sûrement). Les auteurs grecs anciens
signalent en Asie centrale des peuples aux dénominations proches de celles des
Thraces, tels les Bactres, les Massagètes ou des Dahes, de langues iraniennes (or
celles-ci ont été apparentées aux langues thraco-illyriennes). Les Thraces
s'étendirent au cours de l'histoire sur les régions suivantes : Roumanie, Moldavie,
Bulgarie, nord-est de la Grèce, l'Albanie, Yougoslavie, Turquie (partie européenne et
Asie Mineure occidentale), Autriche, Hongrie, Allemagne, Tchécoslovaquie, Pologne,
Ukraine (jusqu'au Dniepr), Volga inférieure et Tadjikistan.

Origines

Comme dans le cas des Étrusques et de beaucoup d'autres peuples, les avis des
historiens diffèrent à propos des origines des Thraces, exogènes et aborigènes. Une
première hypothèse, qui privilégie les origines aborigènes, considère que les
Thraces sont présents dans la région des Balkans plus de 5000 ans avant notre
ère : il n'y aurait alors pas eu de réelle rupture depuis le néolithique chez ce peuple,
et leur société se serait complexifiée au fur et à mesure. La seconde hypothèse
privilégie les apports exogènes, en l'occurrence Indo-européens, et affirme que les
Thraces ne sont venus des steppes ukrainiennes que vers le début du IIe millénaire
av. J.-C., époque au terme de laquelle sont survenus quelques bouleversements
dans les régions immédiates, dont les plus importants sont ; le déferlement des
peuples de la mer, la célèbre Guerre de Troie ainsi que la phase initiale de Hallstatt
en grande partie conséquente aux importations des Balkans (métaux,
harnachement, cavalerie, etc.).

Époque mycénienne

C'est l'époque des rois anonymes décrits par Homère dans l'Iliade. Dès le IIIe
millénaire av. J.-C. les Thraces, l'un des peuples indo-européens les plus anciens
d'après les linguistes, présentent une société très hiérarchisée, gérée par les soldats
et les prêtres. Sur chaque territoire règne un souverain.
Cette civilisation tout à fait spécifique s'est créée dans une vaste zone du sud-est
européen à la population sédentaire mais en contact avec les « cultures des steppes
». Durant cette période les Thraces n'ont eu que peu de contacts avec les autres
grandes civilisations.
En l'absence d'écrits, les trésors des rois et des aristocrates permettent une
approche de la culture thrace. Le service cultuel de Vălčitrăn, les trésors de Panajot
Hitovo et de Kazičene donnent la preuve du pouvoir politique et économique des
premiers souverains thraces anonymes ainsi que de l'originalité, de la technologie et
de la maîtrise artistique de leurs orfèvres.

Royaumes thraces : des États religieux

Alors que disparaît la civilisation mycénienne et qu'apparaissent les cités grecques,


les Thraces conservent leur organisation. Les royaumes sont gouvernés par des
dynasties de rois-prêtres (polistes) à la tête de troupes de cavaliers aristocrates
(tarabostes) et de paysans guerriers (comates). Les nombreuses résidences
fortifiées correspondent à des capitales temporaires, quand le roi y réside.
Les paysans sont libres. Les fouilles archéologiques sur un marché du Ve siècle av.
J.-C. (près de Krăstevič) n'ont pas permis de découvrir d'atelier. Mais les mines, la
métallurgie, le travail des métaux étaient des monopoles royaux et les ateliers
étaient à la cour du roi.

Langue

Le thrace était une langue indo-européenne autrefois parlée dans le sud-est de


l'Europe par les Thraces, voisins au nord des anciens Grecs. Cette langue balto-
balkanique, pour laquelle on dispose de très peu de sources écrites, s'est éteinte au
Haut Moyen Âge. La plupart des Thraces ont fini par être hellénisés ou romanisés,
quelques-uns d'entre eux ayant survécu en tant que tels dans des régions reculées
jusqu'au Ve siècle ap. J.C.
Si l'on exclut le dace (au motif qu'il s'agissait, soit d'une langue thrace distincte, soit,
comme le conjecturent certains linguistes, d'une branche distincte de l'indo-
européen), le thrace était parlé dans ce qui est aujourd'hui la moitié sud de la
Bulgarie, la partie orientale de la République de Macédoine actuelle, le nord de la
Grèce, la partie européenne de la Turquie et dans certaines régions de la Bithynie
(nord-ouest de la Turquie d'Asie).
Les paléolinguistes considèrent en général que la Serbie orientale était une zone
linguistique daco-mésienne. Le mésien, selon le linguiste bulgare Vladimir
Gueorguiev notamment, appartiendrait au groupe dace.

Vestiges linguistiques:

On sait très peu de choses du thrace, étant donné qu'aucune inscription de plus de
quelques mots n'a été déchiffrée de façon satisfaisante à ce jour, et que même les
traductions les plus fiables proposées pour des phrases brèves ne sont pas
forcément rigoureusement exactes. Certaines parmi les inscriptions les plus longues
pourraient être effectivement d'origine thrace, mais constituer non pas de véritables
phrases en langue thrace, mais plutôt des accumulations de noms ou de formules
magiques.
Un nombre suffisamment important de termes a cependant survécu pour démontrer
que le thrace appartenait à la famille des langues indo-européennes, et au groupe
des langues satem à l'époque où il est attesté.
Outre les inscriptions mentionnées ci-après, le thrace est attesté via des
anthroponymes, des toponymes (lieux habités, noms de montagnes, de cours d'eau,
de lacs etc.), des noms de plantes, de divinités, et par quelques termes mentionnés
dans des textes grecs anciens comme spécifiquement thraces.
Inscriptions
Seules quatre inscriptions thraces significatives ont été retrouvées à ce jour. L'une
figure sur une bague en or trouvée en 1912 à Ezerovo, en Bulgarie, et datée du Ve
siècle av. J.-C.. Gravée en caractères grecs, elle se lit :

        ΡΟΛΙΣΤΕΝΕΑΣ / NΕΡΕΝΕΑ / ΤΙΛΤΕΑΝ / ΗΣΚΟ / ΑΡΑ / ΖΕΑ / ΔΟΜΕΑΝ /


ΤΙΛΕΖΥΠΤΑ / ΜΙΗ / ΕΡΑ / ΖΗΛΤΑ
        rolisteneas / nerenea / tiltean / ēsko /aras / zea / domean / tilezupta /miē / era
/zēlta

Selon Dimităr Dečev7, elle signifierait : « Je suis Rolisteneas, descendant de


Nereneas. Tilezupta, une femme arazienne, m'a rendu à la terre. » Toutefois,
d'autres traductions ont été proposées, notamment par V. Gueorguiev.
Une seconde inscription a été trouvée en 1965 près du village de Kiolmen, dans le
district de Preslav, et est datée du VIe siècle av. J.-C.. Elle comporte 56 lettres en
alphabet grec, et représente probablement une inscription funéraire similaire aux
inscriptions phrygiennes :

        ΕΒΑΡ. ΖΕΣΑΣΝ ΗΝΕΤΕΣΑ ΙΓΕΚ. Α / ΝΒΛΑΒΑΗΓΝ /


ΝΥΑΣΝΛΕΤΕΔΝΥΕΔΝΕΙΝΔΑΚΑΤΡ. Σ
        ebar. zesasn ēnetesa igek. a / nblabaēgn / nuasnletednuedneindakatr. s

Une troisième inscription, figurant elle aussi sur une bague, a été trouvée à Duvanli,
dans le district de Plovdiv, à côté de la main gauche d'un squelette et remonte au Ve
siècle av. J.-C.. La bague porte l'effigie d'un cavalier, entourée par l'inscription, qui
n'est que partiellement lisible (16 lettres sur 21) :

        ΗΥΖΙΗ.....ΔΕΛΕ / ΜΕΖΗΝΑΙ
        ēuziē.....dele / mezēnai

Elle semblerait invoquer la protection d'un «cavalier Eusie».

Ce sont les plus longues inscriptions qui sont parvenues jusqu'à nous. Les autres
sont constituées essentiellement de mots isolés ou de noms propres sur des
récipients et autres objets.
Classification du thrace
Langues paléo-balkaniques en Europe orientale entre le Ve et le Ier siècle av. J.-C.

La langue thrace est généralement considérée par les linguistes, soit comme une
branche spécifique, soit comme l'un des rameaux, de la branche thraco-dace de
l'indo-européen. Elle était autrefois souvent regroupée avec les langues illyriennes
ou phrygiennes. L'hypothèse d'une parenté phrygienne est abandonnée de nos
jours. L'hypothèse thraco-illyrienne, également discutée, resterait toutefois
d'actualité, mais c'est l'hypothèse daco-thrace qui semble aujourd'hui la plus
probable.
Le daco-thrace (ou thraco-dace) a lui-même fait l'objet d'hypothèses, en tant que
branche de l'indo-européen à rapprocher, soit de l'albanais[réf. nécessaire], soit du
balte[réf. nécessaire], soit encore du gréco-macédonien[réf. nécessaire], mais
aucune preuve définitive à l'appui de l'une ou l'autre de ces théories n'existe à ce
jour. Le thrace reste donc considéré, soit comme une branche à part entière de
l'indo-européen, soit comme un rameau du daco-thrace.

L'influence grecque :

À partir du VIe siècle av. J.-C. l'aristocratie thrace, surtout les Besses et les Odryses
ont des échanges avec les Grecs et même utilisent l'alphabet grec pour des écrits
non encore déchiffrés.
Hérodote explique dans le livre V de son œuvre que «la nation des Thraces est,
après celle des Indiens, la plus importante du monde. S'ils avaient un seul roi et s'ils
pouvaient s'entendre entre eux, ils seraient invincibles et, d'après moi, beaucoup
plus puissants que toutes les nations.»
À cette époque les Thraces sont refoulés de leur frontière ouest sur l'Adriatique par
les Illyriens puis par les Macédoniens. La région côtière formant leur frontière sud où
les Grecs tentent de s'implanter en 4643 est traversée sans difficultés par les Perses
de Darius Ier, mais après la défaite des Perses contre les Grecs, ceux-ci se retirent.
Les Athéniens arrivent alors à contrôler une partie de la Thrace sud grâce à leur
colonie d'Amphipolis.
Sitalcès, le roi des Odryses (le plus puissant des royaumes thraces de cette période)
est l'allié des Athéniens dans la guerre du Péloponnèse. Après sa mort, Seuthès, cité
par Thucydide et surtout par Xénophon dans l’Anabase puis ses successeurs,
notamment Cotys Ier et Kersobleptès, conquièrent toute la Thrace ou presque. C'est
l'apogée de l'empire odryse qui parvient à unifier la Thrace, ce que Hérodote avait dit
impossible.
Les Odryses forment alors une brillante civilisation, largement influencée par
l'hellénisme comme le montre le personnage de Seuthès dans l’Anabase qui
comprend de mieux en mieux le grec6. Le trésor de Rogozen est une des traces du
développement de la civilisation odryse au IVe siècle.
Mais Philippe II de Macédoine puis Lysimaque étendent la domination
macédonienne sur la Thrace méridionale puis sur la majeure partie du territoire. Les
Odryses continuèrent la lutte contre Lysimaque proclamé roi de Thrace puis contre
ses successeurs Séleucos, Ptolémée Kéraunos, les Attalides de Pergame.

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Le royaume des Odryses est une union de tribus thraces établie entre le Ve et le IIIe
siècle av. J.-C.. Il s'étendait en grande partie sur l'actuelle Bulgarie, ainsi que sur le
sud-est de la Roumanie, le nord-ouest de la Grèce et la partie européenne de
l'actuelle Turquie. Le roi Seuthès III décide plus tard le transfert de la capitale à
Seuthopolis (aujourd'hui Kazanlak, en Bulgarie centrale)

Histoire

L'État des Odrysiens est le premier royaume thrace qui prend le pouvoir dans la
région, par l'unification de plusieurs tribus sous un seul et unique souverain, le roi
Térès Ier. Au début, cet état ne s'étend que sur la Thrace orientale et les régions du
Nord, jusqu'à l'embouchure du Danube. Plus tard, son territoire augmente
significativement, jusqu'à la mer Noire à l'est, la région peuplée de la tribu Tribali au
nord-ouest et le bassin de la rivière Strymon au sud-ouest. Ce vaste territoire est
peuplé d'un certain nombre de tribus thraces et daco-mésiennes qui, unies sous le
règne d'un seul souverain, commencent à mettre en œuvre une politique interne et
externe. Ces conditions sont favorables pour surmonter les divisions tribales qui
pourraient conduire progressivement à la formation d'une communauté ethnique
plus stable.
Selon les historiens grecs Hérodote et Thucydide, une dynastie royale émerge parmi
les tribus odrysiennes en Thrace vers la fin du Ve siècle av. J.-C., qui vient à dominer
une grande partie de la région et des peuples entre le Danube et la mer Égée sur le
siècle suivant. Des écrivains tardifs, des pièces de monnaie royale, et des
inscriptions indiquent la survie de cette dynastie au début des premiers siècles de
notre ère, bien que son influence politique décline progressivement sous les
Macédoniens, et plus tard sous les Romains. En dépit de leur disparition, la période
des Odrysiens est d'une importance décisive pour l'avenir du sud-est de l'Europe,
sous l'Empire romain et au-delà. Sous les Odrysiens, le grec est devenu la langue
officielle. Les coutumes et traditions grecques contribuent à la refonte de la société à
l'est des Balkans. Les Odrysiens créent la première entité étatique qui remplace le
système tribal, à l'est la péninsule balkanique. Leurs rois sont généralement connus
dans le monde extérieur comme les rois de Thrace, bien que leur pouvoir ne
s'étende pas à toutes les tribus thraces. Même dans les limites de leur royaume, la
nature de leur pouvoir royal est restée fluide, sa définition soumise aux impératifs de
la géographie, des relations sociales et de circonstance.
Le fils de Térès Ier, Sitalcès, se révèle être un bon chef militaire, obligeant les tribus
qui font défection à reconnaître sa souveraineté. Le riche état qui se propage entre
le Danube à la mer Égée construit des routes pour développer les échanges et bâtit
une puissante armée. En 429 av. J.-C., Sitalcès organise une campagne massive
contre les Macédoniens, avec une grande armée de tribus thraces et panoniennes
indépendantes. Selon Thucydide, elle comprend plus de 150 000 hommes, mais
Sitalcès, en tant qu'allié d'Athènes, est obligé de faire retraite, faute de ravitaillement
et l'hiver approchant1.
Au IVe siècle av. J.-C., le royaume est divisé en trois petits royaumes, dont l'un, avec
la capitale Seuthopolis, survit le plus longtemps. Au cours de l'époque hellénistique,
il est à plusieurs reprises vassal, de Philippe II de Macédoine puis de son fils
Alexandre le Grand, du diadoque puis roi de Thrace Lysimaque, de Ptolémée II et
Philippe V de Macédoine, et est même un moment sous la coupe des Celtes, qui
créé en Thrace le royaume de Tylis, mais maintient en général ses propres rois.
Au milieu du IIe siècle av. J.-C., le royaume des Odryses devient client de la
République romaine tandis que les autres tribus thraces sont soumises. La région
passe sous contrôle romain. Vers 100 av. J.-C., c'est la famille des Astéens qui
devient la famille régnante sur les Odryses, jusqu'à la mort de Rhescuporis II lors
d'une invasion des Besses voisins. Les armées romaines viennent libérer la Thrace
et Auguste confie alors à Rhémétalcès Ier, de la famille des Sapéens, le royaume
des Odryses, qui n'a plus de souverain depuis la mort du dernier roi des Astéens
Rhescuporis II. Une partie des terres des Astéens sont alors rattachée à Rome. Les
successeurs de Rhémétalcès Ier se combattent, Rhescuporis III fait assassiner
Cotys VIII puis est jugé et condamné par Rome en 19, et ce sont leurs jeunes fils
respectifs qui deviennent co-rois sous la tutelle des Romains, qui renforcent leur
contrôle sur la région. Caligula décide d'un nouveau partage vers l'an 38, distribuant
les divers royaumes de l'Orient romain à plusieurs rois, faisant la politique inverse de
Tibère. Le royaume des Odryses échoit entièrement à Rhémétalcès III, qui est
assassiné en 46. Le territoire thrace annexé purement et simplement par Claude est
divisée entre la Mésie et la province de Thrace.

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De la période romaine à nos jours


La ligne Jireček (du nom de l'historien qui l'a déterminée Konstantin Josef Jireček)
montre les zones de romanisation (au nord) et d’hellénisation (au sud) des Thraces
En 168 et 133 av. J.-C. la Thrace passe sous domination romaine et le royaume des
Odryses reste fidèle à Rome, sûrement en raison de la menace des Daces sur le
Danube. Mais d'autres s'y opposent et sont soumis par la force. De nombreux
Thraces sont pris comme esclaves : leur caractère rebelle et combatif les destine
fréquemment à la carrière de gladiateurs (le plus connu d'entre eux est Spartacus).
En 46 est créée la province romaine de Thrace. La romanisation des Thraco-illyriens
(du moins, au nord de la ligne Jireček) les transforme en Dalmates et en Valaques
(latins orientaux). Une colonie grecque au nom thrace de Byzance (Byza = rivage,
coteau) est choisie pour être la capitale de l'Empire romain d'orient sous le nom de
Constantinople.
Mais l'invasion des Goths en 376 commence une série de guerres qui transforme
cette région en champ de bataille : pour ne citer que les plus marquantes, après les
passages des Huns et des Avars, l'occupation par les Slaves et l'affrontement des
Bulgares et des Byzantins s'achève par une slavisation de plus en plus marquée des
pays jadis thraces. La Thrace n'est plus qu'une région géographique.
Les Turcs annexent toute la Thrace en 1389, puis encerclent et prennent
Constantinople en 1453. Leur domination dure jusqu'en 1878. Se crée alors en
Thrace septentrionale la province autonome de Roumélie orientale réunie à la
Bulgarie en 1885. Durant la 1° guerre balkanique (1912) la Thrace est prise par les
Bulgares, disputée entre Bulgares et Grecs, en partie rendue aux Turcs par le traité
de Constantinople du 29 septembre 1913. Les frontières ont changé plusieurs fois
mais finalement la Thrace reste partagée entre ces trois pays, dont deux (Bulgarie et
Grèce) sont aujourd'hui membres de l'Union Européenne, et le troisième (Turquie)
candidat.

Liste des peuples thraces

Les Thraces étaient composés de plusieurs centaines de peuples différents selon les
témoignages qui nous sont parvenus, sans qu'on puisse savoir toujours exactement
qui sont ces peuples.
Les quatre principales tribus étaient les Odryses, les Gètes, les Triballes et les
Daces. On trouve la première mention des Thraces dans l'Iliade d'Homère. Ils sont
alors les alliés des Grecs assiégeant Troie. Les Thraces étaient réputés très bons
cavaliers, ainsi qu'orfèvres de grande maîtrise.
On sait que sans doute, le plus important et le plus puissant des peuples thraces,
que les Grecs appelaient Gètes et les Romains, Daces, était composé de plusieurs
tribus, capables de se réunir en temps de guerre dans un seul État centralisé, ce qui
faisait de leur puissance un potentiel contre-pouvoir face à l'Empire romain
(falsifications massives des monnaies romaines par exemple).
Les autres Thraces, où qu'ils aient habité, semblent avoir été tous conquis par
l'Empire romain très tôt et assimilés très vite, ne pouvant pas opposer une aussi
grande résistance (surtout ceux de Mésie).
        Bessi
        Bisaltae
        Bithyniens
        Bottiaeans (Battaei)
        Cicones
        Daces: voir aussi Liste des tribus daces
                Apuli
                Carpes - Sur les pentes orientales des Carpates (Carpathes)
                Costoboci - Ukraine occidentale (Galicie) et Moldavie
                Suci - en Valachie occidentale (Olténie)
        Dii
        Edoni
        Gères
        Maedi
        Moesi
        Nipsaeans
        Scyrmiadae
        Satrae
        Thyni
        Trausi
        Triballi

Les tribus suivantes avaient une composante thrace :

        Agathyrses (tribu Scythe, ou Thraco-Scythe)


        Dardani (mélangés aux Illyriens et probablement aux Paioniens)
        Scordisques (Celto-Thraces)
        Trères (Thraco-Cimmériens)

Thraces célèbres

        Dionysos, dieu du vin et de la vigne.


        Orphée, héros légendaire de la mythologie grecque, fils du roi de Thrace Œagre
et de la muse Calliope. Il est le fondateur mythique d'un mouvement religieux appelé
orphisme.
        Spartacus fut un gladiateur thrace qui mena un soulèvement d'esclaves dans
l'actuelle Italie.
        Burebista était l'un des plus grands rois daces. Il réussit à confédérer les
populations thraces depuis la rivière Hercinica (l'actuelle Moravie) à l'ouest, jusqu'au
Boug méridional à l'est.
        Décébale, dernier roi dace: battu par Trajan, il s'est suicidé avec toute sa cour.

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Daces
Les Daces (en grec Δάϰοι, au singulier Δάϰης, en latin Daci, au singulier Dacus) est
le nom donné par les Romains aux tribus thraces du Nord, ayant peuplé le bassin
Bas-Danube dans l'Antiquité. Les Daces sont parfois identifiés aux Gètes (les
historiens roumains les appellent Gèto-Daces, ou Gètodaces, arguant que Gètes est
leur nom nom grec, et Daces leur nom latin) mais d'autres historiens considèrent
qu'il s'agissait de deux peuples distincts, mais apparentés. Daces de part et d'autre
des Carpates, Gètes le long du Danube. Au sud de l'Haemos, les sources antiques
ne parlent plus de Daces ou de Gètes mais de Thraces sans autre précision, et là
aussi les historiens débattent pour savoir s'il s'agissait d'un ensemble thrace unique
(opinion majoritaire) ou de populations différentes. Quoi qu'il en soit, du nom des
Daces dérive le nom romain de leur territoire, la Dacie.

Daces, Gètes et autres Thraces


Dans les écrits historiques, les Daces ou Gètes sont souvent comptés parmi les
Thraces (et confondus avec les Goths). Toutefois, quelques récits parlent des
Daces, des Gètes et des Thraces comme de peuples différents mais apparentés.
Hérodote écrit que les Thraces dans leur ensemble étaient « le peuple le plus
nombreux du monde après celui des Indes, et s'ils avaient un seul roi, et pouvaient
s'entendre entre eux, ils seraient invincibles et, d'après moi, beaucoup plus
puissants que toute autre nation ». Pour lui les Thraces étaient divisés en deux
grandes branches : les Thraces proprement dits, au sud de l'Haemos (aujourd'hui la
chaîne des Balkans en Bulgarie), et les Daces, au nord de ces montagnes, qu'il
qualifie de « plus braves et les plus droits des Thraces ». Hérodote cite en outre les
Gètes de la Dobrogée, présents dans ces lieux en 514 av. notre ère, comme
branche distincte du peuple thrace.
Langues
Les langues des Thraces et des Gètodaces forment l'une des branches de la famille
de langues indo-européennes. Ayant intégré des éléments su substrat pélasge
(préhellénique), elles présentent des éléments communs avec l'ancien macédonien,
l'illyrien, le latin, le balte,le slave, l'indo-iranien, l'arménien et le hittite. On regroupe
en langues thraco-illyriennes (ou paléo-balkaniques) l'ensemble des parlers entre
l'ouest de la plaine de Pannonie, le nord des Carpates, les rivages de l'Adriatique, de
l'Égée et du Pont Euxin, et l'est jusqu'au Tyras, mais il s'agit plus d'un regroupement
géographique que linguistique.
La langue des Daces reste mal connue et comme le gaulois par rapport à la langue
française, seuls quelques mots supposés daces (250) se retrouvent en roumain.
Pour l'écriture, on ne dispose guère que de quelques écrits en grec et latin (voire les
deux en traduction au même temps), tandis que le Rohonczi Codex est apocryphe.
Le dace (dit «gète» par les Grecs) est une langue centum des langues thraco-
illyriennes de l'antiquité (langue morte), qui reste très peu connue en raison
l'absence de tout document écrit (le «Rohonczi Codex» étant apocryphe). Les
«langues thraco-illyriennes» forment un regroupement avant tout géographique de
deux branches (l'illyrienne et la daco-thrace) des langues indo-européennes. Ces
deux branches étaient linguistiquement distinctes, l'une étant satem, l'autre centum.
Une langue orale
Comme les Gaulois, quand les Daces écrivent, c'est en grec. En dace, la
transmission orale reste privilégiée : très peu de traces écrites nous sont parvenues.
Une des rares inscriptions en langue dace ne comporte que trois mots, dont deux
noms propres, et se rencontre sur un vase cérémoniel : « Decebalus Per Scorilo »,
ce qui pourrait signifier « Décébale, fils de Scorilo ».
Le dace est donc connu surtout à partir de la toponymie, par des noms propres
(notamment dans les listes militaires romaines et sur les pierres tombales), par des
noms de divinités, d'animaux et de 40 plantes médicinales.
Selon la légende protochronique roumaine, le poète romain Ovide aurait écrit deux
poèmes en dace pendant son exil en Scythie mineure, à Tomis, mais rien n'étaye
cette légende. En revanche Décébale, roi des Daces, a envoyé des missives en latin
à Dioclétien et à Trajan, contenant des noms propres daces. Quelques inscriptions
en alphabet grec ancien se rencontrent sur les murs de quelques forteresses, ainsi
que sur des bijoux.
L'existence d'un lexique commun à l'aroumain, au roumain (langues romanes
orientales) et à l'albanais (langue non romane) a fait l'objet de nombreuses études et
d'explications parfois divergentes :
• l'origine partiellement dace des ancêtres des Albanais, rejoints par les
«Daces libres» lors des invasions ;
• le simple contact géographique dans l'actuelle Serbie avant l'arrivée des
Slaves ;
• le peuplement roman de l'actuelle Roumanie à partir des Balkans, où les
proto-Roumains auraient initialement été voisins des proto-Albanais.
Les débats continuent, d'autant qu'au XIXe siècle et au début du XXe siècle, tout
mot du lexique commun roman oriental d'origine inconnue se voyait attribuer d'office
une origine dace, ce qui concerne environ 160 mots. Or il été ultérieurement
démontré que 70 sont en réalité d'origine albanaise, langue satem balkanique
d'origine non daco-thrace, mais illyrienne, et à phonétisme distinct.

Religion
Selon Hérodote d'Halicarnasse, leur religion présente de nombreux points communs
avec l'Orphisme et semble avoir été à base de divinations et d'initiations. Leur
médecine était de type holistique. Leur calendrier, très précis, rythmait les travaux
agricoles mais avait également des connexions avec l'astronomie et l'astrologie. Les
Daces connaissent et utilisent un calendrier solaire sacré, qui est conservé à
l'intérieur de la cité de Sarmizégétuse. Il peut être considéré parmi les plus précis de
l'Antiquité, car l'erreur de ce calendrier n'est que de 1 h 15 min 3 s chaque année (8
840 ans si on applique des corrections tous les 3 ans).
À la guerre, les Daces prenaient le totem du loup et se nommaient ceux qui sont
semblables aux loups. Ainsi, les Daces ont eu comme enseigne de guerre le
drapeau et le dragon avec tête de loup et queue de serpent, qui vole en se gonflant.
Quand les Romains découvrent leur existence, les Daces croyaient en deux mondes
et en l'immortalité de l'âme, sous forme d'une continuation du soi après la mort dans
l'autre monde : un monde où Zamolxis les attend. Selon une autre version, Zamolxis
étant apparemment un Poliste (sorte de druide) pythagoricien, prophète du créateur
unique Gabeleisos.
la présence de quelques autres divinités, pour la vie sur terre, témoigne de la nature
radicalement différente de ces deux mondes.

Organisation sociale
L'organisation sociale des Daces illustre la « trilogie indo-européenne » définie par
Dumézil. Les Daces sont gouvernés par des dynasties de rois-prêtres (Polistes) à la
tête de troupes de cavaliers aristocrates (Tarabostes) et de paysans guerriers
(Comates).
Les Polistes, sortes de druides, progressent en connaissances par le biais
d'initiations successives, proches de celles des orphistes et des pythagoriciens. Pour
marquer leur appartenance ils se couvrent la tête d'un bonnet de feutre blanc. Les
Tarabostes, propriétaires de forêts, de rivières, de gués et de moulins, ne sauraient
travailler : leur destin est de transmettre et d'exercer l'art de la guerre. Ce sont
souvent eux qui montent des expéditions de pillage vers les peuples et les cités
voisines. Pour marquer leur appartenance ils se couvrent la tête d'un bonnet de
feutre rouge (proche du bonnet phrygien des Thraces d'Anatolie). Ainsi tarabostesei
= pileati ; ils forment la classe des cavaliers. Les Comates (coma = crinière)
combattent à pied : soldats, paysans, artisans, ils portent les cheveux longs
(capillati) et restent tête nue l'été, mais portent bonnet de laine noire l'hiver. Tous
sont des hommes libres.
À l'origine, ils vivent dans des huttes de bois et pisé regroupées en villages entourés
d'une palissade, puis, à une époque tardive, ils construisent des forteresses aux
tours coniques en pierre (toponymes finissant en « dava » : Sarcidava, Cumidava,
Capidava, Piroboridava…).

Activités
Les Daces développèrent à bronze une civilisation agricole, connaissant le travail et
le commerce de l'or, de l'argent et de sel (des mines étaient exploitées dans
l'actuelle Transylvanie), civilisation dont on trouve aujourd'hui les vestiges en
Bulgarie, Roumanie, Moldavie, Serbie, Macédoine, Grèce et Turquie. Ils exportant
également du sel, de la laine, des cuirs et du miel. Les chevaux sont surtout utilisés
comme animaux de trait. Ils connaissaient de nombreuses plantes médicinales et
utilisaient la médecine holistique. Les richesses des Daces sont constituées de très
importantes réserves d'or, de sel et de céréales. Le commerce extérieur est
important, au vu du nombre de monnaies étrangères trouvées dans le pays. Le
commerce s'effectue surtout avec la Grèce, puis avec l'empire romain, dont les
influences sont fortes dans le sud du pays dès avant la conquête romaine.
Dès la fin du deuxième siècle av. J.-C., les Daces ne se contentent plus d'utiliser les
pièces venant des autres pays, mais commencent à frapper leurs propres pièces
d'or, sans doute avec l'aide des colons grecs. La plupart sont des contrefaçons
parfaites des pièces romaines. D'autres, par contre, sont originales, et portent des
inscriptions en alphabet grec.
Les plus nombreuses sont les fameuses pièces Koson, ainsi nommées par
l'inscription qu'elles portent, et qu'on suppose être le nom du chef des Daces dans
une région, après l'assassinat de César à Rome et de Burebista en Dacie. Sur une
partie des pièces, on voit un consul romain considéré comme l'adversaire avec un
"R" et "Koson" en alphabet grec. Sur le revers, on voit un vautour avec les ailes
ouvertes, une serre sur un sceptre et, dans l'autre serre, une couronne. 8,41
grammes or, 18-21 mm diamètre (description de Constantin Preda).
Mode de vie
Platon (Charmide) écrit qu'il a appris d'un Thrace qui vénérait Zalmoxis, une mélodie
pour rendre un homme immortel. On a découvert, dans une région des Gèto-Daces
(à Histria), un instrument musical, datant du IIIe siècle av. J.-C., formée de trois
flûtes de bois. Orphée, un des plus grands poètes de l'antiquité, malgré des
légendes contradictoires, semble bien provenir d'une peuplade thrace. On dit aussi
que Musaios (ami d'Orphée), Thamiris et même Eumolpe sont thraces.
Les Daces ont une stratégie militaire avec des points de défense séparés des lieux
de vie. La construction des points de défense profite au maximum des
caractéristiques physico-géographiques de la région. Les structures militaires sont le
résultat de l'union des tribus en cas de danger. Elles peuvent se focaliser sur un seul
objectif, comme la construction d'un ensemble de défense. Pour la première fois, on
peut parler d'une armée dace vers le IVe ou IIIe siècle, sous Dromichète, avec toutes
les institutions d'un État.
On retrouve deux types d'armes : armes de lutte à distance et armes de lutte au
corps à corps. La cavalerie a un rôle de harcèlement, pour essayer d'attirer l'ennemi,
lui tendre des pièges, et le mettre en position défavorable. Les Daces n'utilisent pas
de techniques massives avec des unités rigides et nombreuses.
Pour les luttes au corps à corps, les Daces préfèrent porter une arme spécifique, la
sica, ornée des symboles sacrés. En albanais sika=thika. Cette arme est ensuite
utilisée par une partie des gladiateurs à Rome, appelés thraces par les Romains.

Les Daces à Rome avant Jésus-Christ


Les Daces se trouvent à Rome, avec d'autres populations de la région connue de
nos jours comme les Balkans, comme les Illyriens par exemple, dès la période entre
44 avant J.-C. (mort de Jules César) et 31 avant J.-C., lors de l'instauration du
principat d'Auguste. Ils ont de nombreuses occupations, dont la principale est le
métier de gladiateur qui leur convient bien, vu leur aptitude pour la lutte individuelle.
Les gladiateurs s'entraînent dans de petites arènes nommées "ludus". On connaît
quatre dénominations de ces arènes: Dacicus, Gallicus, Magnus, Matutinus.
L'existence de l'arène Dacicus suggère un nombre important de Daces gladiateurs.
Plus tard, lorsque la Dacie devient province romaine, les Daces se dirigent
davantage vers les activités militaires, devenant membres de la garde impériale - les
prétoriens et la garde à cheval - equites singulares. Les inscriptions des pierres
funèbres des soldats appartenant à la garde impériale portent sans faute et avec
une certaine distinction le lieu d'origine des décédés. Par exemple; natione Tharx -
pour les thraces.
Un bon exemple est celle de Lucius Avilius Dacus, sur marbre, de l'année 70 avant
J.-C., deux siècles avant la conquête de la Dacie. Une autre inscription, découverte
Via Flaminia, est dédiée à la mémoire de la reine Zia, veuve du roi des Costoboces,
Dieporus, établie par ses petits enfants Natoporus et Driglisa. Il semble que Via
Flaminia étaient reçus des prisonniers d'origine royale et noble. La présence dace à
Rome, dans la garde impériale, se remarque dans de nombreuses inscriptions en
marbre, dédiées aux empereurs : s'y trouvent également les noms des soldats, avec
le lieu d'origine : Aurelius Valerius Drubeta, Antonius Bassinass Zermizegetusa, Titus
Lempronius Augustus Apulum. Sur un total de 120 noms daces, 15 sont originaires
de Sarmizégétuse. Parmi ceux-ci, Claudiano, centurion de la VIe cohorte. Mais aussi
Iulius Secondinus, natione Dacus, prétorien appelé de nouveau au service, ayant
atteint l'âge de 85 ans dans des conditions ou à cette époque on dépasse rarement
l'âge de 50 ans.

Les tribus (et royautés) daces ont toujours été très indépendantes, chacune menant
sa propre politique, même s'il est arrivé que certains rois, tels Burebista ou
Décébale, parviennent à en fédérer la plupart (le premier finissant assassiné, le
second contraint au suicide). Sous Domitien comme sous Trajan, dont les règnes
sont concomitants à celui de Décébale, la plupart des tribus daces fédérées ont
attaqué l'Empire romain (Décébale obtenant de Domitien le versement d'un tribut)
mais celles vivant le long du Danube et commerçant intensément avec les Romains
ont toujours préféré s'allier à ces derniers. C'est ce qui permit à l'architecte
Apollodore de Damas de construire pour Trajan, en toute sécurité, un pont en pierre
sur le Danube, élément-clé de la conquête romaine commencée en 101 et achevée
en 106, conclue par la prise du trésor de Décébale, le suicide de ce dernier, et
l'intégration du sud-ouest de la Dacie à l'Empire romain, qui exploita dès lors, durant
165 ans, les mines d'or, d'argent et de sel de cette nouvelle province.

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Gètes

Gètes (Γέται, au singulier Γέτης) est le nom donné par les Grecs aux tribus thraces
du Nord, ayant peuplé le bassin Bas-Danube dans l'Antiquité. Les Gètes sont parfois
identifiés aux Daces (les historiens roumains les appellent Gèto-Daces, ou
Gètodaces, arguant que Gètes est leur nom grec, et Daces leur nom latin) mais
d'autres historiens considèrent qu'il s'agissait de deux peuples distincts, Gètes le
long du Danube, Daces de part et d'autre des Carpates. Au sud de l'Haemos, les
sources antiques ne parlent plus de Daces ou de Gètes mais de Thraces sans autre
précision, et là aussi les historiens débattent pour savoir s'il s'agissait d'un ensemble
thrace unique (opinion majoritaire) ou de populations différentes1.

Histoire

Dans l'espace carpato-danubien-pontique, des Tatras à l'Égée, vivaient les peuples


Thraces, dont l'historien grec Hérodote d'Halicarnasse écrivait qu'ils étaient le peuple
« le plus nombreux du monde, après celui des Indes ». Certains (les Thynes et
Bithynes) étaient d'ailleurs passés en Asie Mineure. Ces populations ont créé une
florissante civilisation du bronze dont on trouve aujourd'hui les vestiges en Bulgarie,
Roumanie, Moldavie, Serbie, Macédoine, Grèce et Turquie.
Les Thraces se sont divisés, à l'âge du fer (environ 800 av. notre ère - 106 ap. J.-C.),
en deux grandes branches : les Thraces proprement dits, au sud de l'Haemos
(aujourd'hui la chaîne des Balkans en Bulgarie), et les Gètodaces, au nord de ces
montagnes. Hérodote cite les Gètes de la Dobrogée, présents dans ces lieux en 514
av. notre ère, comme branche distincte du peuple thrace.

Langues
Les langues des Thraces et des Gètodaces sont l'une des branches de la famille de
langues indo-européennes. Ayant intégré des éléments du substrat pélasge
(préhellénique), elles présentent des éléments communs l'ancien macédonien,
l'illyrien, le balte, l'indo-iranien, l'arménien et le hittite.

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La Dacie est, dans l’Antiquité, un territoire de la région carpato-danubiano-pontique


correspondant approximativement à celui de la Roumanie actuelle. Le mot Dacie (du
latin Dacia) vient du nom romain de ses occupants principaux, les Daces, qui sont
très proches des Thraces. Il a servi aussi à dénommer une marque d'automobiles
roumaines.
La Dacie parmi les autres pays thraco-illyriens.
Ethnies et migrations

Les Daces parlaient un dialecte thrace (langue indo-européenne).


La Dacie était également peuplée par les Sarmates, les Scythes, et les Bastarnes.
On relève aussi quelques peuplements celtes, et probablement un certain nombre
de colons grecs et commerçants romains. Les ennemis des Daces sont les Romains
et parfois certains Celtes. Leurs alliés sont les Thraces et les Grecs, jusqu'à la
conquête de la Grèce par l'Empire romain.
Après 256, les alliés des tribus daces restantes sont les Goths dans une « fédération
de peuples barbares ». Les Goths sont les derniers à s'être alliés mais n'étaient
qu'une minorité de ces peuples appelés dans les sources historiques « envahisseurs
goths ». Ces envahisseurs englobaient surtout des peuples aussi divers que des
Scythes/Sarmates, Daces/Gètes/Carpes ainsi que des Vénèthes du Dniepr, ancêtres
des Slaves de nos jours (ces derniers, qui peuplaient une grande partie de l'Europe,
étaient pratiquement inconnus des Romains avant ces invasions). Cette confusion
entre Goths et les autres ennemis des Romains en Europe occidentale fait que les
premières études historiques avaient tendance à mélanger Goths et Gètes, croyant
qu'il s'agissait du même peuple (avant qu'on découvre l'origine germanique des
Goths). On évoque aussi des alliances tardives avec les Huns vers le IIIe siècle.
Les invasions, encouragées par les Daces libres, qui apparaissent sur un fond
d'insurrections dans la province de Dacie romaine sont la raison principale de la
retraite d'Aurélien1. C'est la première grande province perdue par l'Empire romain à
un moment où il était encore assez puissant. Cependant, la perte ne fut pas
officiellement admise : le terme utilisé était que la province entière avait été déplacée
au Sud du Danube.
Quelques historiens prennent à la lettre ce déplacement et considèrent que les
régions au nord du Danube sont restées faiblement habitées pendant une période
allant jusqu'à 600. Mais pour la plupart des historiens, les Daces romanisés sont
probablement les ancêtres des Roumains actuels. Selon Lovinescu, un auteur peu
connu, contemporain de Mircea Eliade, dans les traditions roumaines, la Dacie
apparaît sous différents noms : Dochia, Baba Dochia, Deciana, Baba Gaïa, etc.
Dacia felix serait à certaine époque, une divinité collective dace, confondue avec
Gaïa, le grand principe féminin, selon une association courante dans l'Antiquité.
C'est une part de la vieille énigme de l'origine du peuple roumain.

Présentation

Organisation sociale
Les Daces sont divisés en deux classes : une aristocratie (tarabostes) et le peuple
ordinaire (comati). Les aristocrates, classe privilégiée, seuls autorisés à se couvrir la
tête, portent un chapeau de feutre (ainsi tarabostesei = pileati). Les autres, soldats,
paysans et artisans, portent les cheveux longs (capillati).
Ils vivent originellement dans des huttes de bois regroupées en villages entourés par
une palissade, puis, à une époque tardive, ils construisent des forteresses et des
tours coniques en pierre.
Selon Platon (Charmide), un Thrace vénérant Zamolxis (donc Dace), lui aurait appris
une mélodie pour rendre un homme immortel.
On a découvert dans une région des Gèto-Daces (à Histria) un instrument musical,
datant du IIIe siècle av. J.-C., formé de trois flûtes de bois.
Deux types d'armes existent alors de manière certaine : armes de lutte à distance et
armes de lutte au corps à corps. La cavalerie a un rôle de harcèlement, visant à
attirer l'ennemi, lui tendre des pièges, et le mettre en position défavorable. Les
Daces ne semblent pas avoir jamais utilisé des techniques massives avec des unités
rigides et nombreuses.

Pour les luttes au corps à corps, les Daces préfèrent porter une arme spécifique, la
sica, ornée des symboles sacrés. Cette arme est ensuite adoptée par une partie des
gladiateurs à Rome, appelés thraces par les Romains. Sur la colonne Trajane, on
peut voir des Daces utilisant des faux de guerres (falx) dont la lame de taille égale
au manche est dans la continuité de celui-ci. Une version à une main existe aussi,
peut être la romphée (romphaia) des Thraces. Les légionnaires romains durent
adopter leur équipement en conséquence, se protégeant le bras droit par des
plaques articulées pour éviter d'être mutilés par ces faux.
Religion
Leur religion serait à base de divinations et d'initiations. Les Daces croient en
l'immortalité de l'âme, sous forme d'une continuation du soi après la mort dans un
autre monde, un monde où Zalmoxis les attend. (Zalmoxis étant le premier homme à
avoir eu accès à ce monde). La présence de quelques divinités, pour la vie sur terre,
témoigne d'une croyance pas complètement monothéiste.

Les Daces se donnent le nom de loups ou ceux qui sont semblables aux loups.
Ainsi, les Daces ont deux types de symboles de guerre : le drapeau et le dragon
avec tête de loup et queue de serpent, qui vole en se gonflant.

Activités

Leurs principales activités sont l'agriculture et l'élevage. Les chevaux sont surtout
utilisés comme animaux de trait.
Les richesses des Daces sont constituées de très importantes réserves d'or, de sel
et de céréales. Ils exploitent les mines d'or et d'argent de l'actuelle Transylvanie.
Ils ont développé une civilisation agricole, possèdent de l'or et de l'argent et
pratiquent le commerce.
Le commerce extérieur est important, au vu du nombre de monnaies étrangères
trouvées dans le pays, et s'effectue surtout avec la Grèce, puis avec l'Empire
romain.
Dès la fin du IIe siècle av. J.-C., ils commencent à fabriquer des pièces en or, sans
doute avec l'aide des colons grecs. La plupart sont des contrefaçons parfaites des
pièces romaines, mais une partie des pièces ne sont pas des contrefaçons, car
comportant également des inscriptions en alphabet grec.
Les plus nombreuses sont les statères en or au nom de KOSON, ainsi nommées
d'après l'inscription KOSON qui y figure, et qu'on suppose être le nom du chef des
Daces dans une région après l'assassinat de Burebista en Dacie (et de César à
Rome le même année). À l'avers de ces pièces, on voit un consul romain entouré de
deux licteurs et un monogramme qui semble être la composition des lettres B et R.
En exergue, KOSON en alphabet grec. Le revers présente un aigle avec les ailes
éployées, une serre sur un sceptre, et, dans l'autre serre, une couronne. 8,41
grammes or, 18-21 mm diamètre (description de Constantin Preda). Ces pièces
ressemblent aux deniers de Brutus (les licteurs) et de Pomponius (l'aigle de la
Victoire). Ils auraient pu être frappés par Brutus pour obtenir le soutien militaire de
Kozon dans le cadre de la guerre contre Octave et Marc-Antoine avant la bataille de
Philippes. Appien affirme en effet que Brutus a battu monnaie avec de l’or et de
l’argent que lui avait fournis la femme d’un membre de la dynastie, un roi de Thrace.
De nombreux Thraces ont combattu dans les rangs de Brutus lors de cette bataille
décisive.

Les Daces connaissent et utilisent un calendrier solaire sacré, qui est conservé à
l'intérieur de la cité de Sarmizegetusa. Ce serait un des plus précis de toute
l'Antiquité, puisque l'erreur de ce calendrier ne serait que de 1 h 15 min 3 s chaque
année (8 840 ans si on applique des corrections tous les trois ans)3.
Ils connaissent de nombreuses plantes médicinales, et pratiquent une médecine
holistique. Les noms de ces plantes ont été sauvegardés par les Grecs, sans que
leur traduction soit correctement fournie.

Les Daces vus par les Romains

Les Daces se trouvent à Rome, avec d'autres populations originaires de la région


actuelle des Balkans, comme les Illyriens par exemple, dès la période entre 44 av.
J.-C. (mort de Jules César) et 31 av. J.-C., lors de l'instauration du principat
d'Auguste.
Ils ont de nombreuses occupations, dont la plus importante reste celle de gladiateur,
qui leur convient bien, vu leur goût pour la lutte individuelle. Les gladiateurs
s'entraînent dans de petites arènes nommées ludus. On connaît quatre
dénominations de ces arènes : Dacicus, Gallicus, Magnus, Matutinus. L'existence de
l'arène Dacicus suggère un nombre important de Daces luttant comme gladiateurs.
Lorsque la Dacie devient province romaine, les Daces se dirigent plus vers les
activités militaires, devenant membres de la garde impériale — les prétoriens et la
garde à cheval. La présence dace à Rome dans la garde impériale se manifeste
dans de nombreuses inscriptions en marbre dédiées aux empereurs et sur
lesquelles on relève également les noms des soldats avec leur lieu d’origine :
Aurelius Valerius - Drubeta, Antonius Bassinass - Zermizegetusa, Titus Lempronius
Augustus - Apulum. Sur un total de 120 noms daces, 15 sont originaires de
Sarmizegetusa. Parmi eux, on remarque Claudiano, centurion de la 6e cohorte.
Une autre inscription concerne Iulius Secondinus, natione Dacus, prétorien appelé
de nouveau au service, âgé de 85 ans, dans des conditions où à cette époque on
dépasse rarement l'âge de 50 ans.
Les inscriptions des pierres funèbres des soldats appartenant à la garde impériale
portent avec une certaine distinction le lieu d'origine des décédés. Par exemple :
natione Thrax - pour les Thraces ; Lucius Avilius Dacus, dont le nom est écrit en
marbre (70 av. J.-C.), deux siècles avant la conquête de la Dacie.
Une autre inscription a été découverte sur la Via Flaminia, dédiée à la mémoire de la
reine Zia, veuve du roi des Costoboces, Dieporus, mise par ses petits-enfants
Natoporus et Driglisa. Il semblerait que des prisonniers d'origine royale et noble aient
été reçus sur la Via Flaminia.

L'empereur romain Trajan déclare : « Recevant l'empire pourrissant et faible, dans


toutes ses directions, de cette tyrannie qui l'avait travaillé longtemps à l'intérieur et
des nombreuses invasions des Gètes d'en dehors, j'ai été le seul à avoir osé
attaquer ces peuples de l'autre côté du Danube. J'ai conquis même ces Gètes, la
plus guerrière des nations qui ait jamais existé, non seulement par le corps, mais
aussi par ces maximes de Zalmoxis, qui vit avec eux dans une telle vénération qu'il
les a touchés si profondément dans leur cœur. Car ne croyant pas qu’ils meurent,
mais qu'ils changent seulement leur habitation… »
Cités de Dacie

Voir une Liste des cités daces.


Ruines du temple dace de Sarmizegetusa.

La capitale de la province romaine Dacia Felix était Ulpia Traiana Sarmizegetusa,


(du nom de l'empereur Trajan, Ulpius Traianus), se situe aujourd'hui dans le judet
d'Hunedoara, en Roumanie. Il ne faut pas la confondre Ulpia avec l'ancienne
capitale des Daces sous Décébale, Sarmizegetusa, située à 40 km de Ulpia, dans
les monts Orăştie.

        Acidava (Slatina)
        Aegyssos (Tulcea)
        Apoulon (Alba Iulia)
        Buridava (Râmnicu Vâlcea)
        Capidava (Topalu)
        Cumidava (Râşnov)
        Dacidava (Şimleu Silvaniei)
        Dierna/Tierna (Orşova) (Tierna)
        Germisara/Germizera (Geoagiu)
        Pelendava (Craiova)
        Petrodava (Piatra Neamţ)
        Piroboridava (Poiana)
        Sangidava (Topliţa)
        Sucidava/Succidava (Corabia)
        Singidava (Deva)
        Utidava (Târgu Ocna)
        Ziridava (Pecica)
        Drubeta
        Napoca (Cluj-Napoca, Cluj)
        Potaissa (Turda, Cluj)
        Apulum (Alba-Iulia, Judeţ de Alba)

N.B. : dava signifie "cité" (dans le sens d'"oppidum") en dace.

Histoire

La période dace
        vers 2400-1700 av. J.-C., à la fin du néolithique, une peuplade d'origine indo-
européenne, s'installe sur un territoire qui deviendra plus tard approximativement
celui de la Dacie. Commence alors une civilisation florissante, avec de nombreux
objets en or et argent et le culte de Zalmoxis.
        700 av. J.-C., installation de colonies grecques sur les bords de la mer Noire
        112-109 av. J.-C., puis 74 av. J.-C., 60-59 av. J.-C. et ainsi de suite, des conflits
avec les Romains. Burebista gagne sans difficulté toutes les batailles contre les
Celtes et lutte contre César du côté de Pompée, mais il arrive trop tard. Burebista
est assassiné par l'aristocratie dace la même année que Jules César, très peu de
temps après celui-ci.

La période romaine

Tous ces détails sur ces deux conflits se trouvent dans Dion Cassius, mais aussi en
plus explicite sur la colonne Trajane, érigée à Rome par Apollodore de Damas. Pour
ces campagnes, l'Empire romain mobilise plus de 150 000 hommes pendant six ans.
Ils construisent un pont en pierres sur le Danube, premier du genre dans le monde,
utilisé non seulement pour la conquête, mais aussi longtemps après celle-ci. On le
voit sur la colonne Trajane, ainsi qu'un pont flottant utilisé pour l'attaque.
Après la conquête des cités (en dace dava) situées entre le Danube et la capitale
(Argidava, Amutria, Pelendava, Castra Nova, Romula, Acidava, Rusidava, Pons
Aluti, Burridava, Castra Trajana, Arutela, Praetorium... aujourd'hui Blidaru, Costeşti,
Piatra Roşie, Băniţa, Capâlna, Tilisca et quelques autres), commence le siège de
Sarmizegetusa. La cité, conquise après une résistance féroce, est détruite jusqu'à
ses fondations. Seul le calendrier sacré est épargné.
Toutes les forteresses daces sont détruites. Une partie des polistes (prêtres) et des
tarabostes (aristocrates) daces réussissent néanmoins à s'échapper de
Sarmizegetusa, avec Décébale à leur tête, et organisent une résistance.
Pourchassés, bientôt acculés, leur chef Décébale se suicide pour ne pas tomber
prisonnier, et leur permettre une reddition honorable.
Ensuite des tarabostes ralliés à Rome aident les Trajan à retrouver l'emplacement
des trésors de Décébale (évalués par l'historien Jérôme Carcopino à 165 500 kg d'or
et 331 000 kg d'argent). Ils feront partie du butin de la campagne. Une légende naît
au XIXe siècle, lorsque le récit de Dion Cassius est étudié par les historiens, légende
selon laquelle il resterait encore un grand nombre de trésors cachés. De fait,
certains objets précieux ont été trouvés lors de «fouilles sauvages», qui n'ont
apporté à leurs « inventeurs » que jalousies et ennuis avec les autorités. Les
habitants de cette région croient depuis lors à une « malédiction de Décébale », une
série de malheurs pour qui trouve les trésors du roi dace et les vend.
Du côté romain, la construction de la colonne Trajane n'est pas la seule façon de
célébrer la conquête d'une partie de la Dacie et d'employer le butin saisi. L'État
romain donne une fête de 123 jours, pendant lesquels la population peut boire et
manger à volonté aux frais de l'État. Au Forum de Trajan, également dû à Apollodore
de Damas, on érige des statues des tarabostes capturés, qui se trouvent
actuellement en haut des colonnes de l'Arc de Constantin.
La province romaine de Dacie se limite aux actuelles Transylvanie et Olténie. Le
reste de l'ancien royaume dace revient aux tribus daces libres telles que les
Carpiens, les Costoboces et les Tyrgètes. On peut le voir sur certaines cartes4. Elle
reste sous l'autorité d'un gouverneur de rang prétorien. La Légion XIII Gemina et ses
nombreux auxiliaires ont leurs quartiers dans la province.

Chronologie

        85-89 ap. J.-C., les Daces engagent deux grandes guerres contre les Romains,
avec des incursions profondes dans l'Empire romain qui font des ravages. Victoire
de Décébale, roi des Daces. Décébale accepte de se reconnaître client de l’Empire,
mais omet de rendre les prisonniers et les étendards des légions. Un traité
sanctionne le statu quo.
        101-102 ap. J.-C., pour mettre fin à cet accord humiliant, Trajan lance sa
première campagne. En 105-106 ap. J.-C., lors de la deuxième campagne, une
partie de la Dacie devient province romaine.

Après la retraite romaine de Dacie

La retraite romaine de Dacie inaugure une période de l'histoire des ancêtres des
Roumains et des Aroumains surnommée par les historiens roumains « Âge pastoral
» en référence à l'occupation principale des Thraco-Romains, période qui ne peut
être connue que surtout à travers l'archéologie, la linguistique comparée et la
toponymie, car les sources écrites, tant épigraphiques que paléographiques, sont
très succinctes et sujettes à controverses. Cette “diète documentaire” fait appeler
cette période « Âge obscur » ou « Âge sombre » par les historiens hongrois, slaves,
allemands ou occidentaux qui affirment que, puisqu'il n'y a pas de sources fiables,
c'est que les ancêtres des Roumains ne s'y trouvaient pas. Suivant cette position, la
quasi-totalité des atlas historiques occidentaux ne mentionne même pas l'existence
des locuteurs des langues romanes orientales entre 271 et 1300, bien qu'ils soient
attestés non seulement par la toponymie, mais tout de même aussi par des
chroniqueurs comme Théophane le Confesseur, Théophylacte Simocatta, Kedrenos,
Nicétas Choniatès et Anne Comnène. L'historien roumain Neagu Djuvara remarque
que : «Les arguments des thèses antagonistes peuvent tous être contestés, mais ils
ont le mérite d'exister, tandis qu'aucun fait archéologique et aucune source écrite
n'étayent l'hypothèse d'une disparition pure et simple des roumanophones pendant
mille ans, qu'ils se soient envolés avec les hirondelles pour migrer en Afrique, ou
qu'ils soient allés hiberner avec les ours dans les grottes des Carpates ou des
Balkans...». De plus, même s'il n'y avait aucune preuve archéologique ou
toponymique et aucune mention écrite, la simple existence des langues romanes
orientales tend à prouver que les Thraco-Romains ont survécu à l'arrivée des Slaves
et des Bulgares dans la région.

Chronologie

        en 271, la retraite romaine est définitive au nord du Danube. Les relations


commerciales continuent néanmoins avec les habitants au nord du Danube, comme
le prouve l'archéologie. Suivant ces relations, le christianisme aussi s'étend au nord
du Danube. La création de la Dacie aurélienne au sud du Danube est une opération
politique, pour masquer le déclin de l'Empire romain et peut-être pour préparer, en
cas de redressement, la reconquête de la Dacie.
        l'empereur roman Galère (règne de 293-311) est Dace, originaire du nord du
Danube par sa mère. Parce que Galère a persécuté les chrétiens, l’auteur chrétien
Lactance (vers 250, vers 325) le présente sous un jour très noir dans son livre La
Mort des persécuteurs : « au moment où il est devenu empereur, il s'est déclaré
l'ennemi du nom même de "Romain"; il proposa alors que l'empire soit appelé, non
pas l'Empire romain, mais l'Empire dace » ; en réalité cet empereur gouverne et
défend efficacement l’Empire romain pendant près de vingt ans.
        le 271 à 381, les Daces du nord du Danube passent sous contrôle des tribus
carpiennes, des Daces libres, et forment les Carpo-Daces.
        la présence des Thraco-Romains est mentionnée au VIe siècle par les
chroniqueurs Théophane le Confesseur et Théophylacte Simocatta.
        plus tardivement (du IXe siècle au XIIIe siècle) les descendants des Daces (au
nord du Danube) et des Thraces (au sud du Danube) romanisés apparaissent sous
le nom de Valaques (notamment dans le cadre du Regnum Bulgarorum et
Valachorum ("royaume des Bulgares et des Valaques") au XIIe siècle)8.
        néanmoins ces populations, dans leur mémoire collective et dans leurs auto-
désignations (endonymes) n'oublient pas leurs origines latines, comme le montrent
de nombreuses sources.
        la datation au carbone 14 du Rohonczi Codex donne les années 1520-1530:
c'est un document de plus de 400 pages de papier fabriqué en Italie. On suppose
que c'est une copie d'un original plus ancien, car il est écrit dans une langue de type
roman très archaïque, proche latin vulgaire, et surtout dans une graphie peu connue,
que l'on a supposée être un alphabet dace.
        le plus ancien document écrit en langue roumaine moderne date de 1521, en
alphabet cyrillique gréco-slavon, car, depuis le Regnum Bulgarorum et Valachorum
("royaume des Bulgares et des Valaques") au XIIe siècle, l'église et les chancelleries
des états roumains utilisaient le slavon comme langue liturgique et officielle. Entre la
disparition de l'Empire romain et 1521, les Daces et les Thraces romanisés n'ont
évidemment pas disparu.

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