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Faire de la démocratie une « trouvaille intellectuelle » grecque datant de 508 av. J.-C., alors
qu’il s’agit d’une forme politique issue d’un processus historique complexe, fruit de réformes
politiques et législatives menées par Dracon, Solon, puis Clisthène, mais aussi de la prise en
compte du rôle primordial joué par le peuple dans les victoires grecques pendant les guerres
médiques (490-479 av. J.-C.) qui opposaient Athènes et les autres cités grecques à la Perse.
Faire de la démocratie athénienne un paradigme (= un modèle) de toute démocratie, quand il
s’agit bien évidemment d’un régime réel particulier, et non idéal qui en fixerait une fois pour
toutes les caractéristiques.
Interroger la démocratie athénienne à partir de l’idée moderne de démocratie et en venir à la
discréditer en fonction de certains critères : régime de petites cités fondées sur l’esclavage,
sans véritable appareil d’état, sans préoccupation pour les « questions sociales ».
Il est bien plus intéressant de constater que l’idée de démocratie apparaît d’emblée dans un débat
politique, au travers d’une question prospective : Quel est le meilleur régime à donner à une cité qu’il
s’agit de fonder ? La démocratie grecque est donc, pour nous, un « germe », et non un modèle ou un
exemple parmi d’autres.
Hérodote (485-425 av. J.-C.), le premier historien grec, met ainsi en scène dans son Enquête une
délibération sur le régime politique à donner à la Perse, à la suite des guerres médiques. Trois mages,
Otanès, Mégabyse et Darius, présentent chacun leurs arguments, respectivement en faveur de la
démocratie, de l’aristocratie et de la monarchie. Hérodote fait prononcer par Otanès un plaidoyer en
faveur de la démocratie :
Otanès, d’abord, demanda qu’on remit au peuple le soin de diriger ses propres affaires. « A mon avis »,
déclara-t-il, «le pouvoir ne doit plus appartenir à un seul homme parmi nous : ce régime n’est ni plaisant,
ni bon. […] Comment la monarchie serait-elle un gouvernement équilibré, quand elle permet à l’homme
d’agir à sa guise, sans avoir de comptes à rendre ? Donnez ce pouvoir à l’homme le plus vertueux qui soit,
vous le verrez bientôt changer d’attitude. Sa fortune nouvelle engendre en lui un orgueil sans mesure, et
l’envie est innée dans l’homme : avec ces deux vices il n’y a plus en lui que perversité ; il commet follement
des crimes sans nombre, saoul tantôt d’orgueil, tantôt d’envie. […] Au contraire, le régime populaire
(« archon plèthos ») porte le plus beau nom qui soit : égalité (« isonomia ») ; en second lieu, il ne commet
aucun des excès dont un monarque se rend coupable : le sort distribue les charges, le magistrat rend
compte de ses actes, toute décision y est portée devant le peuple. Donc voici mon opinion : renonçons à la
monarchie et mettons le peuple au pouvoir, car seule doit compter la majorité. »
HERODOTE, L’Enquête, III, § 80
b) Les institutions de la démocratie athénienne
Complétez les pointillés avec les termes suivants : ECCLESIA, MAGISTRATS, BOULE, HELIEE, CITOYENS,
STRATEGES
Retrouvez les attributions de chaque institution : vote les lois / dirigent la cité / désigne parmi ses
membres les bouleutes, les héliastes et les magistrats / rend la justice / prépare les lois / vote la guerre
ou la paix / veillent à l’application des lois / vote l’ostracisme / dirigent l’armée.
…
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contrôle
élit ou tire au sort
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« La Constitution qui nous régit n’a rien à envier à celle de nos voisins. Loin d’imiter les
autres peuples, nous leur offrons plutôt un exemple. Parce que notre régime sert les intérêts
de la masse des citoyens et pas seulement d’une minorité, on lui donne le nom de
démocratie. En ce qui concerne le règlement de tous nos différends particuliers, nous
sommes tous égaux devant la loi ; mais en ce qui concerne la participation à la vie publique,
chacun obtient la considération en fonction de son mérite, et la classe à laquelle il
appartient importe moins que sa valeur personnelle. Enfin, nul n’est gêné par la pauvreté
et l’obscurité de sa condition sociale s’il peut rendre des services à la cité […] Nous
intervenons tous personnellement dans le gouvernement de la cité au moins par notre vote
ou même en présentant à propos nos suggestions. Car nous ne sommes pas de ceux qui
pensent que les paroles nuisent à l’action. Nous estimons plutôt qu’il est dangereux de
passer aux actes, avant que la discussion nous ait éclairés sur ce qu’il y a à faire. »
La guerre du Péloponnèse, THUCYDIDE, livre II.
III – Périclès, un démagogue plus qu’un démocrate ?
a) Un personnage qui s’appuie sur le peuple pour régner comme un empereur
Comme Thucydide l’écrit à propos de Périclès : « En apparence c’était la démocratie, en réalité le
gouvernement d’un seul. » (II, LXV). Cette remarque sous-entend que le gouvernement portait en
apparence, sous Périclès, le nom de démocratie mais qu’en réalité, il s’apparentait plus à une
monarchie. Maître incontesté d’Athènes pendant des décennies, par la volonté du peuple qui
l’élisait chaque année parmi les dix stratèges à la tête de la cité (il fut réélu 15 fois entre 443 et
429), Périclès s’impose catégoriquement dans le gouvernement de la cité, élimine les oppositions
et mène une politique impérialiste. Les alliés d’Athènes sont soumis, les rebellions réprimées avec
violence et plusieurs conflits éclatent, dont les deux guerres du Péloponnèse.
Toutefois, nul ne peut contester que Périclès a le souci aigu du renom et de la gloire d’Athènes. Il
œuvrera toute sa vie à l’embellissement de la capitale de l’Attique et sa politique de grands
travaux sera également menée dans l’objectif de fournir du travail aux Athéniens et de lutter
contre la pauvreté des plus démunis, comme l’explique l’écrivain Plutarque : « Maintenant que la
ville est suffisamment pourvue des choses nécessaires à la guerre, il faut qu’elle emploie ses
ressources à des ouvrages qui, après leur achèvement, lui vaudront une immortelle renommée et
qui, au cours de leur exécution, maintiendront le bien-être chez elle ; car ils feront naître des
industries de toutes sortes et des besoins variés, qui éveillant tous les arts et occupant tous les
bras, fourniront des salaires à presque toute la population, celle-ci tirant de son sein de quoi
s’embellir et se nourrir en même temps. » Vies parallèles, I, Périclès, §12, PLUTARQUE
Périclès sera bien sûr contesté par l’opposition politique et les alliés de la ligue de Délos. On lui
reprochera ses dépenses excessives, ses visées de grandeurs, la captation du trésor de la ligue
pour l’utiliser uniquement au bénéfice d’Athènes, bref, sa « tyrannie ». Mais Périclès surmontera
ces accusations et parviendra à convaincre le peuple de la légitimité de ses réalisations qui
servent, avant tout, l’intérêt public. A chaque fois qu’une opposition forte se dresse contre lui,
Périclès use ses talents oratoires pour rappeler au dèmos les engagements pris, et pour prouver
qu’il reste fidèle à une ligne de conduite : l’intérêt public. Ainsi, même si le peuple, mécontent,
fera subir l’ostracisme à Périclès en -430 (il sera privé de droits civiques et interdit de participation
aux affaires publiques), ce sera pour finalement changer d’avis et le réélire stratège juste après.
b) Des dépenses considérables pour étendre l’influence culturelle d’Athènes
Athènes avait été laissée en ruine au départ des Perses en 479 av. J.-C. D’après l’historien
Thucydide, Périclès aurait affirmé : « Nous aimons une beauté simple. » et il s’efforcera de
concrétiser cet idéal artistique en se lançant dans un programme de grands travaux destinés à
faire d’Athènes la capitale intellectuelle et artistique de la Grèce. Pour faire face aux dépenses
considérables résultant des grands travaux qu’il entreprend, Périclès n’hésite pas à puiser dans le
trésor de la ligue de Délos, une association des cités grecques dont Athènes prend peu à peu la
tête. Il fait ainsi achever les « Longs Murs » qui relient Athènes à son port, le Pirée, et confie à
Phidias la charge de reconstruire l’Acropole, colline d’Athènes. Des portes monumentales, les
Propylées, marquent l’entrée de l’Acropole et le Parthénon, temple consacré à la déesse Athéna,
protectrice de la cité d’Athènes, est édifié.