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HGGSP 1 COMPRENDRE UN REGIME POLITIQUE LA DEMOCRATIE

AXE 1 DEMOCRATIE DIRECTE ET DEMOCRATIE REPRESENTATIVE

En 2018, le mouvement des Gilets Jaunes qui a enflammé la France a montré deux choses : la crise du système de
représentativité de la démocratie en France et la volonté de participer au débat politique, à la vie publique. Le rêve
d’une démocratie directe, l’exemple de la Suisse, de nombreux thèmes ont été abordés sur la démocratie en France.
Problématique : Quels sont les enjeux du débat entre démocratie directe et démocratie représentative ?

I. La démocratie à Athènes aux Ve-IVe siècle avant J.C

A. La naissance de la démocratie directe à Athènes.

La cité d’Athènes au Ve siècle avant J.C, est le meilleur exemple d’une cité gouvernée selon des principes
démocratiques. Elle invente les premières formes de participation des citoyens à la vie politique.
Vers 508 av. J.-C., Clisthène, un homme politique athénien, crée les dèmes (circonscription administrative de base du
territoire athénien) et les tribus (regroupement de la population de plusieurs dèmes) et réforme l’exercice de la
politique.
La cité devient un espace politique égalitaire dans lequel chaque citoyen obéit aux lois qu’il a conçues et respecte les
institutions au sein desquelles il a exercé ou exercera une fonction. C’est le principe de l’isonomie, c’est-à-dire l’égalité
civique et politique de tous les citoyens.
La démocratie athénienne est une démocratie directe. Elle implique la participation de tous les citoyens aux
institutions et repose sur une assemblée, l’Ecclésia, qui se réunit sur la colline de la Pnyx. Les citoyens y débattent,
votent la loi, l’ostracisme (condamnation d’un citoyen à un exil de dix années), tirent au sort et élisent les magistrats.
Chaque citoyen a le droit à la parole à tout moment et à tous propos, c’est le principe de l’isegoria.
L’égalité est assurée par le tirage au sort : Le conseil de la Boulé est formé de 500 citoyens, tirés au sort par l’Ecclésia
pour un an. Il examine les projets de lois avant de les proposer à l’Ecclésia. L’Héliée est le tribunal de la cité et ses
membres sont également tirés au sort. Seuls les magistrats les plus importants, à l’image des stratèges, sont élus par
l’assemblée, pour un an.
A Athènes, la citoyenneté est un privilège qui donne des droits. Ces droits sont politiques (participer à la vie politique,
élire et être élu), juridiques (isonomie) et économiques (accès à la propriété). Pour acquérir la citoyenneté, les jeunes
Athéniens doivent effectuer l’éphébie (formation militaire et civique) et prêter serment de défendre la cité.
À partir de la réforme de Périclès en 451 avant JC, il faut être né de deux parents athéniens pour pouvoir être citoyen.
Mais la citoyenneté implique aussi des obligations, notamment dans le domaine militaire (participation à la défense
de la cité) et religieux (participation aux fêtes religieuses). Les citoyens les plus riches financent des liturgies (des
dépenses de la cité : armée, fêtes…)
Une indemnité, le misthos, est mise en place afin de faciliter la participation à la vie politique. La plupart des charges
étant annuelles et non cumulables, tous les citoyens exercent au moins une fois une fonction politique dans leur vie.

B. Une démocratie cependant restreinte.


Les citoyens ne forment que 10 à 15 % de la population athénienne, soit 30 000 à 40 000 personnes. Seuls les hommes
libres participent aux assemblées et au tribunal, et seule 10% de la population exerce son droit de vote.
Les femmes, les métèques (étrangers domiciliés à Athènes) et les esclaves sont exclus de la citoyenneté). Néanmoins,
ce propos est à nuancer car ils ne sont pas totalement exclus de la vie de la cité.
Les femmes athéniennes conservent toute leur vie le statut de mineures. Soumises à la tutelle d’un homme de leur
famille, elles n’ont pas de droit politique. Le terme « citoyenne » est d’ailleurs peu utilisé. Il correspond néanmoins à
la reconnaissance du statut des femmes nées de deux parents athéniens et leur confère un rôle politique, celui de
transmettre la citoyenneté aux enfants.
Les métèques sont soumis à des obligations qui les font participer à la vie et à la défense de la cité. Certaines sont
financières (impôt personnel, liturgies pour les plus riches), d’autres militaires : les riches métèques servent
comme hoplites (fantassin), les pauvres comme rameurs.
Les métèques les plus fortunés peuvent devenir des personnalités importantes de la cité.
Enfin, 1 000 à 2 000 « esclaves publics » gèrent les administrations. Ils organisent le tirage au sort des juges, gèrent les
archives, tiennent les comptes de certaines magistratures ou encore sont chargés de la police.
Par ailleurs, si la démocratie athénienne reconnaît le principe d’égalité de droits entre les citoyens, le régime ne
reconnaît pas d’égalité sociale. En effet, depuis les réformes de Clisthène, les citoyens sont classés dans quatre classes
censitaires (répartition des citoyens dans différents groupes en fonction de leurs richesses) qui définissent leur
implication dans la vie de la cité. Ainsi les riches citoyens sont élus aux magistratures les plus importantes et doivent
financer des liturgies qui leur permettent de se distinguer dans la cité. Les citoyens les plus modestes servent comme
rameurs. S’ils peuvent participer aux séances de l’Ecclésia, celle-ci reste majoritairement fréquentée par des citoyens
urbains riches.
Enfin, au sein même de la communauté des citoyens, des critiques de la démocratie apparaissent dès le
IVe siècle. Certains philosophes comme Platon, doutes des capacités du peuple pour diriger la cité. Il pointe également
le risque de la démagogie, de la part d’orateurs professionnels cherchant plus à contenter leur auditoire qu’à servir
l’intérêt collectif.

II. La démocratie et l’individu : le renouveau démocratique du XIXe siècle.


A. La naissance de la démocratie moderne.
Après l’expérience athénienne, la fin de l’Antiquité et le Moyen-âge sont essentiellement marqués par la monarchie
et l’absolutisme. Mais les XVIIe et XVIIIe siècles marquent un basculement et le renouveau démocratique.
Les démocraties occidentales naissent de révolutions remettant en cause la monarchie absolue et instaurant le
principe d’égalité des droits. Tout d’abord en Angleterre, deux révolutions aboutissent à la rédaction de deux textes
démocratiques garantissant des libertés fondamentales :
• l’Habeas Corpus qui interdit les arrestations arbitraires en 1679
• la Déclaration des Droits ou Bill of Rights qui partage les pouvoirs entre le Parlement et le souverain en 1689.
En 1787, à la suite de la révolution américaine, la jeune république des États-Unis d’Amérique élabore une constitution
basée sur le modèle démocratique qui instaure la liberté et l’égalité devant la loi dans un système de démocratie
libérale représentative, c’est-à-dire fondé sur le respect des libertés fondamentales et la représentation des citoyens
dans le cadre d’une assemblée de représentants élue qui exercent la souveraineté.
En France, le philosophe des Lumières, Montesquieu, énonce le principe de séparation des pouvoirs comme critère
essentiel d’un régime démocratique. Puis durant la Révolution, Le 26 août 1789, la Déclaration des Droits de l’Homme
et du citoyen instaure la souveraineté nationale. Les hommes sont reconnus libres et égaux en droits. Le
gouvernement représentatif est choisi pour concilier la volonté générale tout en déléguant le pouvoir à des élites
politiques capables d’administrer la nation.

B. Participer ou être représenté : Benjamin Constant.

Né en 1763, Benjamin Constant, témoin de la Révolution française et de l’Empire (et de leurs dérives autoritaires) pose
les bases de sa réflexion sur l’exercice du pouvoir en politique, dans son discours prononcé à Paris en 1819 « De la
liberté des Anciens comparée à celle des Modernes ».
Pour lui, la liberté des Anciens repose sur la participation des citoyens au gouvernement de la cité et à la défense de
l’autonomie de celle-ci. Elle exige donc du temps et implique une volonté de participer à la politique.
En revanche la liberté des modernes, définit par les révolutions anglaises, américaines, française, repose sur la
protection des droits des individus. De tel droit protège du pouvoir plus qu’il n’incite à y prendre part.
La liberté des Modernes se traduit donc par des libertés individuelles : détenir une propriété, travailler et commercer,
penser (liberté religieuse, d’expression…).
Pour Constant, l’abandon de l’idéal ancien de participation au profit du gouvernement représentatif s’explique donc
également par la transformation de la société (notamment au XIXe siècle). Les citoyens, évoluant dans une société
orientée vers la recherche de la prospérité et du bien-être matériel, sont accaparés par l’activité économique et n’ont
plus le temps pour participer à la vie politique. Constant considère alors que la représentation est la forme moderne
de la démocratie puisque les hommes préfèrent leur vie privée à l’engagement politique. Il est donc logique qu’ils
délèguent à des représentants élus à la majorité le pouvoir d’agir publiquement à leur place.
Néanmoins, Constant, conscient des dérives possible d’un modèle libéral dominé par l’économie, alerte sur la
possibilité d’une société individualiste où les citoyens qui, préférant jouir de leurs libertés individuelles, se
désintéresseraient des questions de société et délaisseraient la sphère politique au profit de l’Etat. Il est donc
nécessaire d’aboutir à un équilibre entre politique et économie.
Au début du XIXe siècle, les libéraux, à l’image de Benjamin Constant, imposent alors leur conception du suffrage
censitaire. Ils sont attachés à la souveraineté nationale, mais pensent que seule une élite de l’argent ou des talents est
capable de décider.

Débat conclusif :
Devenu à la fin du XXe siècle le régime majoritaire dans le monde, la démocratie prend cependant des formes variées,
parfois critiquées et encore évolutives.
A partir des années 1980, la montée des inégalités économiques et sociales engendre une nouvelle crise du modèle
démocratique : celle de la représentativité. Les citoyens ne se sentent plus représentés de manière juste par leurs élus
et les démocraties libérales sont accusées de réduire la souveraineté du peuple au profit des élites dirigeantes.
Le débat actuel se centre donc à nouveau sur l’exercice de la souveraineté.
Ces dernières années le débat entre confiance aux assemblées parlementaires élues et action élargie du peuple sur la
vie politique, agite l’opinion. Le mouvement des Indignés en Espagne en 2011, ou celui des gilets jaunes fin 2018 en
France, souligne la volonté d’un retour à une démocratie directe d’une partie de l’opinion publique.
Des expériences de démocratie participative, des pratiques plus fréquentes de démocratie directe (assemblées locales,
référendum d’initiative citoyenne) ou encore l’exemple de la Suisse où les fréquentes consultations des citoyens
associent plus activement le peuple à la prise de décision politique, sont présentés comme de possibles remèdes aux
crises des démocraties libérales.
Par les débats qu’elle suscite, la démocratie prouve sa vitalité aujourd’hui dans le monde. Néanmoins, les menaces de
reculs démocratiques, y compris en Europe, incitent les penseurs et les citoyens à la faire évoluer à l’image de la
réflexion de l’économiste et philosophe Indien Amartya Sen : « Les défauts de la démocratie exigent plus de
démocratie et non pas moins ».

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