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En effet, entre le 6 et le 4 siècle av. J-C, les historiens situent l’apogée de la
civilisation grecque.
1
Elle présente un héritage, comportant des éléments de droit public et des aspects
de droit privé.
2
Paragraphe 1 : Le régime républicain.
Comme chez les grecs, les romains considèrent la res publica comme étant la
chose publique.
Seulement cette conception était mise en pratique dans la cité, un faible territoire
à population réduite. De même la participation de tous nécessite des institutions
adaptées.
En 509, suite à la révolution qui a chassé les rois étrusques à Rome, les patriciens
viennent monopoliser l’exercice du pouvoir politique.
3
Toutefois, la plèbe réclamera l’égalité des pouvoirs pour une ouverture plus large
de participation aux affaires publiques, d’où la notion de citoyens, encore appelés
quirites.
Dérivé du latin « Civis »1, le mot « citoyen » traduit, dans l’Antiquité gréco-
romaine, le statut d’homme libre et l’appartenance à la communauté politique.
Donc, la qualité de citoyen romain implique la participation à la vie publique2.
Aristote peut ainsi écrire que « l’homme est par nature un animal politique »3.
Néanmoins si chez les grecs, la citoyenneté vise l’appartenance à une
communauté, à une entité territoriale, à Rome la citoyenneté correspond à un
ensemble de droits et de devoirs en fonction de la condition de la personne. Par
conséquent, pour y accéder il faut un certain nombre de conditions.
1
Dictionnaire historique de la langue française (sous la direction d’Alain Rey), Paris, Robert Laffont, 1998 ; Blaise
Alfred Ngando, La présence française au Cameroun (1916-1959). Colonialisme ou mission civilisatrice ? Thèse
de doctorat, Droit, soutenue à AIX-MARSEILLE III le 4 décembre 2006, p. 13 et s.
2
Jean Gaudemet, Les institutions de l’Antiquité, Paris, Montchrestien, 7 e édition, 2002 ; Michel Humbert,
Institutions politiques et sociales de l’Antiquité, Paris, Dalloz, 6 e édition, 1997.
3
Aristote, La politique, I, 2, 1253 a.
4
1° Les conditions d’acquisition de la citoyenneté romaine.
Quant aux pérégrins, ils n’avaient même pas le droit de la cité, a fortiori les
esclaves dépourvus, à cet effet, de toute protection juridique.
C’est ainsi qu’en 88 avant J. –C. tous les habitants des villes alliées d’Italie ont
obtenu, après la « guerre sociale », la citoyenneté.
L’ouverture à la citoyenneté a été plus large sous le régime impérial, avec
l’empereur Caracalla en 2126.
4
En réalité la femme n’est prise en compte que dans le cadre de la loi pérégrine. En Grèce, tous les deux parents
doivent être de citoyens athéniens (réforme de Périclès de 451 avant J. –C.).
5
A Athènes, les femmes, les étrangers, les métèques et les esclaves sont exclus de la citoyenneté. Voir à ce sujet,
Georges Rougemont et Pierre Pellegrin, « Cité grecque », in : Dictionnaire de l’Antiquité (sous la direction de Jean
Leclant), Paris, PUF, 2005, pp. 504-506.
6
Ainsi tous les hommes et femmes libres bénéficient de la citoyenneté. A ce sujet lire Jean Gaudemet, Les
Institutions de l’Antiquité, op. cit. Du même auteur, Les naissances du droit, Le temps, le Pouvoir et la Science au
service du droit, Montchrestien, Paris, 1997. Egalement Michel Humbert, Institutions politiques et sociales de
l’Antiquité, op. cit.
5
été le premier Etat à concevoir l’idée nationale par-delà les races, les religions,
les continents. Elle a su traiter des peuples vaincus en associés, en alliés, en
leur accordant le droit de la cité. Cette politique d’assimilation a,
jusqu’aujourd’hui, fait, de la langue latine et du droit romain, des instruments
efficaces de la mission civilisatrice »7.
Aussi le citoyen romain avait-il le jus civil, le droit de la cité ou droit quiritaire.
Ainsi, par exemple, seuls les citoyens ou les quirites, avaient le droit de plaider
devant les juridictions8.
7
Discours prononcé le 14 janvier 1980 à Rome au cours de la cérémonie organisée par le Maire de la capitale
italienne pour la remise à Léopold Sédar Senghor du titre de « citoyen romain », en la présence du Président de la
République, Sandro Pertini.
8
Les étrangers ou clients, comme les métèques athéniens, auront plus tard le droit de se marier suivant la loi
romaine (conubium) et celui de contracter (commercium) avec les citoyens romains.
9
A ne pas confondre avec le droit civil, en tant que branche du droit privé, car il s’agit de l’ensemble du droit des
citoyens.
6
Il s’agit du jus gentium, « étendu à l’ensemble du genre humain et dont tous les
hommes pouvaient se prévaloir comme membres d’une communauté juridique
universelle »10.
Ce droit commun, en dépassant le simple cadre d’un droit commun aux hommes,
devient à partir du 16e siècle le droit des relations internationales, plus précisément
le droit international public permettant de régir les rapports entre les Etats 11.
Qui plus est, les censeurs étaient chargés de veiller au respect des mœurs par les
citoyens, y compris la discipline religieuse.
10
L’expression est de Jean-Louis THIREAU, op. cit., p. 22, qui cite à la page 351 la vente comme un modèle de
contrat de droit commercial international. Ce droit a été étudié profondément par les jurisconsultes avertis,
notamment Ulpien et Gaius.
11
Cette discipline est enseignée en 3e année de licence à la faculté des sciences juridiques et politiques de Dakar.
12
L’actualité internationale informe que les anglais souhaitent indemniser les citoyens, dont un mineur de 17 ans,
qui avaient été fusillés pour avoir refusé de s’engager dans l’armée au moment de la guerre.
7
C’est dire qu’un citoyen qui violerait les usages de la cité, s’exposerait à des
sanctions, consistant, par exemple, en amendes, privation des droits politiques et
des marques d’infamie.
C’est en étudiant l’exercice du pouvoir à Rome que nous verrons dans quelle
mesure la Rome républicaine a pu protéger le citoyen contre les pouvoirs des
magistrats romains.
1° Le mécanisme institutionnel.
13
D’après la doctrine « Clisthénienne » (de Clisthène, fondateur de la démocratie), cette institution permet à
l’assemblée du peuple de bannir secrètement tout citoyen nuisible à la société.
8
Pendant la République romaine l’exercice du pouvoir politique a été partagé entre
plusieurs organes ayant chacun ses propres compétences : assemblées du peuple
ou comices, la magistrature et le sénat.
Le rôle des assemblées a été d’apprécier la qualité des lois initiées par les
magistrats14.
Quel que soit le nombre de membres composant l’assemblée, celle-ci compte une
voix.
14
En principe, le citoyen romain y participe à l’âge de dix-sept ans.
9
urbaines (4) et tribus rustiques (31), sont chargés d’élire les magistrats inférieurs
et de voter les lois.
b/ La magistrature :
Les magistrats ou honores sont chargés de l’administration et du commandement
de la cité15.
En théorie, ils ont pris la place des rois étrusques, ce qui explique l’importance
des attributions et pouvoirs qui leur sont dévolus, à savoir la potestas (la faculté
d’agir et d’exécuter les décisions, l’aptitude à agir au nom de l’Etat), et
l’impérium, qui est un pouvoir de commandement civil et militaire.
15
En provinces, ils prennent le titre de promagistrats, lorsque le mandat de la magistrature ordinaire est terminé.
10
A l’origine, ils sont coptés à l’origine par les magistrats qui sortaient de charge,
ensuite, ils sont désignés par le peuple romain16.
Ce sont en réalité les consuls, escortés par trente licteurs, équipés de faisceaux et
de la hache, qui incarnent l’image des rois étrusques, avec l’imperium et la
potestas.
Ces prêteurs étaient au nombre de deux : urbain qui est apparu en 367 av. J. –
C. pour les procès entre citoyens romains ; pérégrin en 242 av. J. –C. pour les
procès entre étrangers.
La fonction du juge est attribuée à une autre personne, un citoyen réputé pour son
honneur et sa connaissance du droit.
16
A Athènes le vote s’effectue par tirage au sort.
11
Ce juge est chargé d'accorder à chacun son dû conformément aux termes
consacrés par le préteur17.
De même, les romains ont prévu pendant la République un sénat qui exerce un
regard sur l'activité des magistrats.
c/ Le sénat :
Il était, à l’origine, formé des anciens patres ou seniors, il fut ouvert à d’autres
citoyens, même de provenance plébéienne, grâce à des réformes censoriales19.
17
D’où les deux phases de la procédure : in jus (devant le magistrat) et apud judicem (devant le juge).
18
Intermédiaire entre le peuple athénien et les magistrats, la Boulè était composée de cinq citoyens désignés pour
un an par tirage au sort.
19
En 318 et en 120 av. J. –C..
12
Les décisions du Sénat constituent des sénatus-consultes, c'est-à-dire des avis
relatifs aux projets de lois, à la nomination des magistrats, à la guerre, à la
diplomatie, à la finance, bref à toutes les grandes affaires politiques.
Par conséquent pour être efficace, pour avoir une force indiscutable, toute
décision concernant la vie de la cité doit revêtir l’auctoritas sénatoriale, encore
appelée auctoritas patrum.
C’est la raison pour laquelle les sénatus-consultes sont cités parmi les sources du
droit romain ayant un caractère légal.
1. Le concilia plébis.
Les décisions prises avaient le nom de plébiscites à portée limitée aux plébéiens.
13
Mais en 286 les plébiscites ont le même caractère que la loi au même titre que les
délibérations des comices.
Aussi faut-il souligner que le concilia plébis est présidé par un tribun de la plèbe.
2. Le tribunat.
A l’origine deux, les tribuns deviennent plus tard quatre, puis dix.
Ils n’avaient pas le pouvoir de commandement, mais ils avaient pour rôle de
défendre les plébéiens contre la puissance des magistrats patriciens.
Ce qui signifie que l’acte d’un tribun peut être dépourvu de tout effet du fait de
l’agissement contraire du collègue.
14
De surcroît, malgré leur efficacité, la portée de leurs décisions concerne
simplement Rome.
Aussi faut-il ajouter que les comices peuvent toujours ignorer l’intercessio des
tribuns de la plèbe.
C’est ainsi que le mécanisme institutionnel romain peut être considéré comme
fondamentalement juste mais politiquement erroné.
20
Que la loi Valeria rendra autonome en 300 av. J. –C.
21
Sauf dans le cadre de la dictature.
15
La constitution se situe au sommet de la hiérarchie des normes juridiques, parce
qu’elle contient des règles qui organisent les rapports entre les pouvoirs publics
et des règles qui définissent les principes fondamentaux de nature à protéger la
personne humaine contre l’arbitraire de ces pouvoirs publics.
Effectivement, élu par le peuple, le magistrat avait un mandat d’un an, excepté le
dictateur (6 mois) et le censeur (18 mois).
Il est vrai que cette recherche d’équilibre pourrait être annihilée par des abus de
pouvoirs susceptibles de bloquer le fonctionnement des institutions républicaines,
si bien qu’on assistera, plus tard, en 27 avant J. –C., à un dérèglement du
mécanisme institutionnel romain.
C’est pour cela que les différents organes étaient condamnés à aller de concert.
16
Donc, par exemple, la fonction de conseil du Sénat permettait de limiter la
puissance des magistrats.
La forme mixte de gestion des affaires publiques a été relevée par Aristote, décrite
par Polybe (200-118 av. J. –C.)22, qui explique la supériorité de Rome pendant la
république, puis par Cicéron (106-43 av. J. –C.)23, qui a vécu la crise de la
république romaine, entamée depuis 121 av. J. –C.
Mais il faut reconnaître que cette pratique institutionnelle romaine a été exaltée,
sous l’influence de la philosophie grecque.
Il suffit d’avoir dix-huit (18) ans pour avoir le droit de siéger en assemblée, la
fortune ou le statut social important peu.
22
Venu comme otage à Rome en 167 av. J. –C.
23
« De la République », 54-51 av. J. –C..
17
Puis, l’assemblée du peuple constituait un tribunal chargé d’apprécier les lois
contraires aux principes fondamentaux de la cité24.
C’est pourquoi Platon, Socrate et Aristote peuvent constater que pour être justes
et équitables les lois doivent se référer à la raison, à la volonté divine.
Aristote précise qu’au-dessus des lois de la cité existe en effet un droit naturel non
écrit, conforme à la nature, c’est à dire à l’ordre immuable de l’univers et aux fins
que cet ordre assigne à l’homme25.
Toutes ces raisons font que l’on situe la naissance de la science politique à
Athènes, chez les grecs.
24
Le tribunal est en réalité une cour composée de mille et un jurés (nomothètes).
25
Cité par Jean-Louis Thireau, op. cit., p. 38. Pour Aristote, la vie en société est impossible sans l’appropriation
individuelle des biens.
18
Ainsi, en comparant ce système au mécanisme institutionnel romain, il est permis
de relever que la pratique institutionnelle, si admirable soit-elle, est plus
aristocratique que démocratique, et, de ce fait, politiquement erronée.
Par exemple, pour les comices tributes, les grands propriétaires fonciers étaient
plus favorisés.
D’abord, Sylla (83-79 av. J. –C.), dictateur de façon illimitée, fut précédé par les
frères Gracques26 ; ensuite le triumvirat, c’est à dire le cumul de plusieurs
magistratures27.
Après, c’est au tour de Jules César (49-44 av. J. –C.) d’exercer simultanément les
fonctions de consul, de dictateur, de tribun de la plèbe et de censeur, avant d’être
assassiné en 44 par l’aristocratie romaine qui craignait le retour de la monarchie.
26
Tibérus (134-133) et Caïs (). Tibérus a voulu retirer à la noblesse les terres conquises, afin de relever la classe
moyenne paysanne. Egalement Caïs a mis l’accent sur des considérations sociales, notamment la distribution de
blé. Sylla viendra multiplier le nombre de sénateurs, en affectant l’exercice du pouvoir une marque personnelle.
27
Octave, Antoine et Lépide, et Octave sera finalement le maître de la République, puis fondera l’empire romain,
après que le Sénat lui a rendu tous les pouvoirs.
19
A sa suite, son fils adoptif Octave, le futur Auguste, tentera de pratiquer l’exercice
du pouvoir personnel, en cumulant également les différentes fonctions de
gouvernement et d’administration, d’où le Principat.
Après Egypte, Perse, Macédoine28, Rome adopte une forme politique dite
l’empire, sans négliger l’héritage républicain.
Il suffit pour s’en convaincre d’en étudier les fondements du pouvoir impérial et
les techniques fondamentales d’administration de cet immense territoire.
1° La tradition républicaine.
28
d’Alexandre le Grand, fils de Philippe II.
20
L’imperium et la puissance tribunicienne constituent en fait la tradition
républicaine.
L’imperium consulaire a été conféré à Octave par le Sénat. Ainsi il porta le titre
d’Auguste.
Il résulte de ce qui précède que les institutions délibérantes n’ont pas été
supprimées, elles sont restées pour légitimer l’exercice du pouvoir, quand bien
même Auguste est finalement dépositaire de fait de tous les pouvoirs.
21
qui s’arroge, à vie, l’imperium consulaire, la puissance tribunicienne et le
pontificat.
Cela est d’autant plus vrai que la survivance républicaine s’annihile, tombe en
désuétude.
En clair, les assemblées ne servent plus à rien ; les magistratures ne sont plus que
de simples titres honorifiques.
L’auctoritas du Sénat perd son prestige face à celle d’Auguste et devient une
assemblée de notables.
29
« Princeps legibus solutus est ». Cela signifie que le prince est absous des lois.
30
Avec Théodose 1er , le christianisme devient en 380 une religion d’Etat.
22
De là découle le caractère héréditaire du pouvoir. La transmission héréditaire a
été mise en pratique entre Octave et son fils adoptif Tibère, même si lex de
imperio, l’investiture, a été envisagée par les comices et le Sénat.
Ensuite, exceptés les cas où l’héritier fait défaut31 ou les coups d’Etat militaires,
toute une cascade de successions héréditaires s’en suivit, avec Caligula, Claude et
Néron de la dynastie julio-claudienne.
Mais l’efficacité administrative sera minée vers 285 par l’éclatement de l’empire.
Ainsi d’une organisation bien hiérarchisée Rome marcha vers un empire écartelé.
31
Aux quels cas c’est au Sénat en principe de désigner le candidat le plus indiqué. Même dans ces cas, l’armée a
eu à imposer ses candidats, notamment Vespasien.
23
La volonté centralisatrice de l’empereur tendait à cela. C’est ainsi que l’empereur
se dota d’un conseil du gouvernement, d’une chancellerie, des collaborateurs
privilégiés, y compris ses esclaves, ses domestiques.
Plus tard il y a des préfets (pour la ville et le trésor, par exemple), des ordres dont
les procurateurs, d’autres fonctions spécialisées, notamment des scriptes
rédacteurs, des comptables, des financiers.
Ensuite il faut noter les diocèses sous la direction d’un vicaire (vicarius), les
gouverneurs de provinces, des agents locaux (deux pour l’Orient et deux pour
l’Occident32) sous le contrôle du curator rei publicae.
2° Un empire divisé.
Mais c’est l’empereur Dioclétien qui a divisé Rome en deux zones : l’Orient
(capitale Constantinople sous la culture grecque) et l’Occident (Rome, capitale à
civilisation latine).
Cette séparation est définitivement consacrée par Théodose 1er en 395 mais sans
affecter l’unité de l’Empire, car l’exercice du pouvoir par les deux empereurs
repose sur le système collégial du consulat républicain.
32
Italie et Gaule au 5e siècle.
24
Cependant le dédoublement des institutions, y compris l’armée, contenait en
même temps les germes de la dislocation de l’universalisme romain.
De ce fait la fin de l’Occident est marquée par la victoire en 476 d’Odoacre sur
Romulus Augustule.
De surcroît, l’orient, Byzance précisément, alangui par les arabes et les ottomanes,
est conquis par les Turcs.
C’est surtout en droit privé que les romains ont marqué les esprits juristes. En
effet, le charme du droit romain est sa capacité d’évoluer de l’état pratique à une
véritable théorie juridique.
Cette évolution s’est effectuée parallèlement à celle de ses régimes politiques (de
la royauté à l’empire).
25
par la coutume, en tant que pratiques et usages, et la loi, comme droit écrit. Nous
allons étudier les sources et les caractères généraux de ce droit.
1° La coutume.
En particulier, il s’agit des usages des anciens (mos majorum, pater familias)
respectés par les membres de la famille (les membres des gentes, les praticiens).
Son oralité renforce l’autorité des magistrats, plus particulièrement des pontifes
qui monopolisent la connaissance de ces préceptes coutumiers, avant d’être
relayés plus tard par le préteur sur le plan judiciaire (367 av. J- C.).
Donc ces pratiques coutumières avaient un caractère religieux (fas)33. Aussi ces
caractères vont-ils constituer ceux du droit civil de l’époque. Voyons d’abord ce
à quoi correspond la loi à cette époque.
2° La loi.
33
Dans la Bible, le droit est confondu avec les lois de Dieu. Les dix commandements du Décalogue, Ancien
Testament, témoigne ce lien étroit entre droit et religion.
26
Sous la République, avec la mise en place des assemblées du peuple, la loi, en tant
qu’expression de la volonté populaire, apparaît comme source de droit écrit.
Ainsi également, sous l’influence d’un tribun de la plèbe, Terentilius Arsa, la loi
des douze tables (450-449 av. J. C., gravée sur des stèles de pierres), est citée
comme un célèbre et laïc instrument garantissant l’égalité et la liberté des
citoyens, suite à l’intégration de la plèbe35.
Outre les dispositions pénales dont le talion, la loi contient notamment, des
prescriptions relatives à la propriété des terres, au respect d’autrui et la protection
des biens.
L’ancien droit, le jus civile ou jus quiritium37, était considéré comme étant
archaïque, en raison de son caractère, à la fois, formaliste et patriarcal.
34
Cf Jean-Louis Thireau, op. cit., p. 57.
35
C’est pourquoi la loi des douze tables est considérée comme étant le fruit de la lutte entre patriciens et plébéiens.
36
Garrisson, Cours d’Histoire des institutions publiques et des faits sociaux…, op. cit., p. 54. Mais à ce stade du
droit romain, les obligations contractuelles sont rares.
37
Le droit des citoyens romains.
27
D’une part, le caractère patriarcal est retenu, parce qu’il repose sur la puissance
du pater familias (chef de famille), ayant seul la pleine capacité juridique, tant en
matière familiale qu’en matière contractuelle, voire même en ce qui concerne le
droit des successions qui privilégie l’agnation (parenté par les mâles seulement)38.
D’autre part, un droit est dit formaliste lorsqu’il subordonne la validité d’une
opération juridique à l’accomplissement d’un certain nombre de formalités.
Pour être valable l’acte juridique, exemple contrat, doit être conclu selon un rite
cérémonial et public.
38
Pas d’adventices, biens hérités par la mère. Toutefois, le préteur viendra plus tard rectifier l’ordre successoral,
tout en favorisant le testament, pour accorder la vocation à succéder au conjoint survivant et par conséquent aux
descendants de la femme (aux cognats). Egalement, sous l’empire, Justinien imposera un régime successoral fondé
sur la parenté cognatique. En outre, la propriété individuelle au sein de la famille est inconcevable. Le même
phénomène sera constaté en Afrique traditionnelle, ce qui, nous le verrons, gênera beaucoup le colonisateur
français.
39
A Rome on distinguait les jours fastes protégeant l’activité civile, des jours néfastes qui justifient les interdits.
28
C’est ainsi qu’en matière contractuelle, excepté les contrats réels, comme le prêt,
c’est à dire la remise d’une chose, les contrats devaient être conclus selon une
forme orale (verbis) ou écrite (litteris)40.
Aujourd’hui l’action en justice est une voie de droit général qui permet à tout
plaideur de faire reconnaître son droit, alors qu’en droit romain il existe une liste
limitée d’actions correspondant à des droits.
40
Nous le verrons dans le cours d’histoire du droit privé.
41
Jean-Louis Thireau, op. cit., p. 63. La sacralité des relations contractuelles avait inspiré la loi des Douze Tables
(III, 6), de sorte que l’inexécution d’un engagement contractuel implique le sacrifice du débiteur aux dieux pour
expier le sacrilège.
29
Il convient toutefois d’indiquer qu’il n’était pas pour autant un juge. Rappelons
qu’après avoir déterminé l’action, il est contraint de désigner un juge, un simple
particulier.
1° Le droit prétorien.
C’est la loi AEbutia qui a fixé les bases du développement du droit romain, en
assouplissant le droit des actions.
30
En effet, désormais les plaideurs soumettaient leurs prétentions au préteur qui
interprétait le droit, en complétant le jus civile. Ainsi le préteur dressait la
procédure formulaire. De lui dépendaient la recevabilité de la demande en justice,
l’appréciation du bien fondé de celle-ci et la désignation du juge. Effectivement,
de l’intérêt à agir dépend l’action en justice. Tout cela, la prétention, le juge
indiqué, se traduit par la rédaction d’une formule qui en même temps constitue le
cadre du procès42.
Dans ce cas, le juge désigné ne pourra que condamner ou libérer selon l’existence
ou non d’éléments de preuve.
Le cas échéant, le préteur est contraint de créer une action pour protéger
juridiquement une situation dont il a reconnu le bien fondé.
C’est le cas du créancier qui agit avec un protégé du paterfamilias. En effet, dans
l’ancien droit romain, les engagements pris sans l’accord de ce dernier lui étaient
inopposables.
42
Ce qui renvie en droit moderne au principe de l’immutabilité du litige qui concerne aussi bien les parties que le
juge chargé de trancher le litige..
31
Au fonds, le préteur a inventé une nouvelle base légale pour régulariser la situation
factuelle qui lui est soumise. C’est ainsi qu’il a admis la délivrance des exceptions,
en cas, par exemple, de vices de consentement (dol ou violence). C’est également
le préteur qui a favorisé la notion de bonne foi dans les contrats43.
Par ailleurs, si le débiteur ne s’exécute pas, la saisie des biens du débiteur a été
proposée par le préteur à la place de l’exécution sur la personne du débiteur. Là
on décèle l’origine des procédures collectives, à travers la faillite du débiteur44.
Toutes ces raisons font que la pratique prétorienne est assimilée à la jurisprudence
(considérée de fait, de nos jours, comme une source du droit).
En définitive, sous l’empire, l’édit du préteur est devenu une véritable source du
droit que les jurisconsultes romains se chargent de diffuser dans le cadre de leurs
enseignements du droit. Justement les jurisconsultes constituent essentiellement
la doctrine romaine qui, en s’inspirant de la philosophie grecque, a fait du droit
une véritable science, un art.
2° La doctrine.
43
D’ailleurs aujourd’hui l’action en justice est définie également comme étant un droit pour le défendeur d’assurer
sa défense en justice. Voir notre étude sur les exceptions, les fins de non recevoir et la péremption d’instance, dans
la revue africaine EDJA, septembre 2003, n° 58, p. 137.
44
C’est au préteur Rutilius Rufus que l’on réserve l’introduction de la procédure collective de venditio bonorum,
c’est à dire la vente en bloc du patrimoine du débiteur et le partage du prix entre ses créanciers, cf Jean-Louis
Thireau, op. cit., p. 72.
45
Jean-Louis Thireau, op. cit., p. 61.
32
dans la résolution de situations concrètes. On les appelait des « prudents », d’où
le nom de jurisprudence. Finalement l’enseignement du droit se développe à
travers beaucoup d’ouvrages, après le grand traité de droit civil de Quintus Mucius
Scaevola46, précisément par le biais des Institutes enseignés dans de grandes
écoles dont celle de Proculus, à laquelle s’oppose l’école des Sabiniens, fondée
par Masurius Sabinus qualifié de traditionaliste47. Après ces grands
jurisconsultes, on cite pour l’essentiel à l’apogée de la doctrine romaine Gaïus,
Paul, Papinien, Modestin et Ulpien, parce que dotés du brevet, le publice
respondere. Dans le compte de la doctrine, on enregistre particulièrement la
classification des contrats et des obligations identifiés souvent dans la pratique
prétorienne48. Ainsi, eu égard à l’objet de l’obligation, on différencie l’obligation
de donner (en transférant la propriété d’une chose) de l’obligation de faire et de
celle de ne pas faire. Il résulte, par conséquent, de ce qui précède que la
jurisprudence est une véritable source de droit.
46
(140-82 av. J. –C.), cité par Jean-Louis Thireau.
47
Plus tard, les hommes de droit, praticiens et professeurs, mettront à la disposition des étudiants des manuels au
sens de codes. Ainsi le Code grégorien. Ainsi également le code hermogénien. A cela il faut ajouter les Institutes
justiniens, de l’empereur Justinien nous verrons plus loin le dispositif législatif codifié.
48
La doctrine romaine est à la base de la théorie des sources des obligations que vous étudierez en 2e année licence
en droit. Ainsi, selon le mode de formation, on distingue les contrats solennels des contrats réels et des contrats
consensuels. En revanche, en fonction des effets, on relève des contrats unilatéraux pour l’engagement d’une
partie, des contrats synallagmatiques qui font naître des obligations à la charge des deux parties (par exemple,
échange, louage, vente). En droit romain, rappelle l’arrêt du Conseil d’administration n° 22 en date du 7 septembre
1855, la vente est définie comme un contrat par lequel une personne, le vendeur, s’oblige à livrer la possession
paisible et durable d’une chose à une autre personne, l’acheteur, qui s’engage à lui transférer la propriété d’une
somme d’argent, le prix. En matière de vente, notons au passage l’évolution des arrhes, une petite somme d’argent
que l’acheteur remettait au vendeur pour prouver que la conclusion du contrat est sérieuse. Cette somme n’était
pas déduite du prix réel de vente. Néanmoins les arrhes deviendront une part du prix d’argent non remboursable
ou remboursable au double, lorsque respectivement le dédit est imputable à l’acheteur ou au vendeur. Voilà
l’origine des dispositions du code civil français en la matière, que nous avons reprises après la colonisation dans
notre code des obligations civiles et commerciales.
33
et l’élaboration des sénatus consultes49 et des constitutions impériales50. Cette
implication a conduit à la phase de la codification du droit romain.
1° Le code théodosien.
49
Sous la République l’auctoritas patrum des sénateurs dominait.
50
Qui se traduisent en édits (des prescriptions générales), décrets (des jugements de l’empereur), des rescrits (des
réponses à des consultations) et des mandats (des sortes de circulaires administratives).
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Bréviaire d’Alaric, roi wisigoth. Puis en Orient, il sera complété par le code
justinien.
2° Le code Justinien.
En définitive, les codifications entreprises ont formé le corpus juris civilis romain,
magnifié particulièrement dans la période dite médiévale.
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