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FRN 278

1er trimestre 2021


Littérature
Enseignante : Dr Johanna Steyn

La versification française : une introduction


Introduction
Une bonne appréciation de la poésie française exige la compréhension des règles de versification. Il
est important de noter que ces règles ne sont pas nécessairement les mêmes qu’en anglais ou en
afrikaans.

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Quelques définitions
La poésie : La poésie est un art du langage, une façon de « sculpter » les phrases et les mots pour leur faire dire plus
qu’ils ne disent habituellement. Par la richesse des images poétiques, l’artiste donne à voir sa propre
vision du monde.
(http://www.assistancescholaire.com)

Un poème : Un poème est un texte en vers ou en prose qui procède de l’art de la combinaison des mots, des
rythmes et des sonorités, pour évoquer émotions, images et sensations.
(http://www.dicodunet.com/definitions/culture/poeme.htm)

Traditionnellement, un poème est écrit en vers réguliers qui riment. Mais il peut également être écrit en
prose : la force suggestive des images, le rythme et la musicalité des mots suffisent à en faire une œuvre
poétique.
(http://www.assistancescolaire.com)

La L’ensemble des règles et des techniques concernant l’écriture d’un poème.


versification :
Une strophe : La strophe est un groupement de vers. Dans la version imprimée, la strophe est réparable par les blancs
qui l’isolent. Les strophes se répètent habituellement dans un poème, bien qu’il existe des poèmes qui
consistent en une seule strophe. La plupart du temps, une strophe constitue une unité de sens
autonome.

Une strophe de 2 vers s’appelle un distique


Une strophe de 3 vers s’appelle un tercet
Une strophe de 4 vers s’appelle un quatrain
Une strophe de 5 vers s’appelle un quintil
Une strophe de 6 vers s’appelle un sizain
Une strophe de 7 vers s’appelle un septain
Une strophe de 8 vers s’appelle un huitain
Une strophe de 9 vers s’appelle un neuvain
Une strophe de 10 vers s’appelle un dizain
Une strophe de 11 vers s’appelle un onzain
Une strophe de 12 vers s’appelle un douzain

Un vers : Ne confondez pas « phrase » et « vers » : la phrase est une unité de sens alors que le vers est une unité
métrique. Ainsi la phrase peut-elle être plus courte qu’un vers ou se propager sur plusieurs vers.

Ne confondez pas non plus le « vers » français (« line » en anglais) et le « verse » anglais (strophe)

Les vers : La poésie française comporte un certain nombre de vers différents parmi lesquels les vers de :

Une syllabe ou monosyllabe


Deux syllabes ou dissyllabes
Trois syllabes ou trisyllabes
Quatre syllabes ou quadrisyllabes
Cinq syllabes ou pentasyllabes
Six syllabes ou hexasyllabes
Sept syllabes ou heptasyllabes
Huit syllabes ou octosyllabes
Neuf syllabes ou ennéasyllabes
Dix syllabes ou décasyllabes
Onze syllabes ou hendécasyllabes
Douze syllabes ou alexandrins
Treize syllabes (très rares)

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1. La mesure

À l’opposé de la langue anglaise, le français n’est pas une langue accentuée ou tonique. Il s’en suit
que le vers français ne peut pas mesurer en pieds (par exemple l’iambe,1 le trochée, l’anapeste, le
dactyle, le spondée), mais doit se mesurer en syllabes.

En anglais et en afrikaans, l’accent est déterminé par le mot lui-même, et chaque mot a un accent
d’intensité qui ne se déplace jamais :
Ex : laughter, neurophysiology, sopraan, digter, etc.

En français, les mots n’ont pas d’accent d’intensité. Mais il y a en français un accent de longueur, de
durée, qui tombe toujours sur la dernière syllabe d’un « groupe rythmique », c’est-à-dire d’un
ensemble de syllabes qui se prononcent d’un seul trait :

Ex : Un étudiant
Mais : Un étudiant américain.
Mais : Un étudiant américain est arrivé.

Dans la poésie française on ne compte pas les syllabes de ma même façon qu’en prose. Voici la règle
pour le compte des syllabes en poésie :

On compte toutes les syllabes SAUF


a. les « e » muets suivis d’une voyelle ou d’un « h muet »,
b. les syllabes muettes à la fin du vers.

Exemple 1 :
Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne
Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends.
[Victor Hugo]

De / main, / dès / l’aub(e), / à / l’heur(e) / où / blan / chit / la / cam / pagn(e)


1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

Je / par / ti / rai. / Vois /-tu, / je / sais / que / tu / m’a / ttends.


1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

Remarques :
a. les « e » de « aube » et de « heure » sont muets car ils sont suivis de voyelles,
b. le « e » de « campagne » est muet car il est à la fin du vers,
c. les « e » de « Je » et de « que » sont prononcés car ils ne sont pas suivis de voyelles.

1
(Iambe : Pied composé de deux syllabes, une brève et une longue, très commun dans la poésie
anglaise, par exemple :

“When I do count the clock that tells the time,


And see the brave day sunk in hideous night” [Sonnet 12, Shakespeare])

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Exemple 2 :

Vienne la nuit sonne l’heure


Les jours s’en vont je demeure

[Guillaume Apollinaire]

Vie/ nne / la / nuit / so / nne / l’heur(e)


1 2 3 4 5 6 7

Les / jours / s’en / vont / je / de / meur(e)


1 2 3 4 5 6 7

Remarques :

a. les « e » de « vienne » et de « sonne » sont prononcés car ils ne sont pas suivis de voyelles,
b. le « e » final de « heure » est muet car il est à la fin du vers,
c. les « e » de « je » et de « demeure » sont prononcés car ils ne sont pas suivis de voyelles,
d. le « e » final de « demeure » est muet car il est à la fin du vers.

2. Le rythme

Le rythme est déterminé par les syllabes accentuées qui sont suivies naturellement par des pauses
(appelées « coupes » ou « césures »). L’accent tombe toujours sur la dernière syllabe du « groupe
rythmique ». Mais il est important de noter qu’en poésie les groupes rythmiques sont plus courts
qu’en prose.

Exemple :

En prose : Un étudiant américain est arrivé.

En poésie : Un étudiant américain est arrivé.

Voici quelques exemples :

Exemple 1 :

Un pauvre bûcheron, / tout couvert de ramée…

[Jean de la Fontaine]

Exemple 2 :

Elle avait pris ce pli / dans son âge enfantin…

[Victor Hugo]

3
Exemple 3 :

La sotti / se, l’erreur, / le péché, / la lésine.


[Charles Baudelaire]

Exemple 4 :

Je marcherai / les yeux fixés / sur mes pensées.

[Victor Hugo]

Vous aurez remarqué que, dans les exemples qui précèdent, les vers comportent douze (12)
syllabes ; ce sont des alexandrins, les vers classiques les plus utilisés de la poésie française.
L’alexandrin a généralement une césure après la sixième syllabe (exemples 1 et 2), mais la césure
peut aussi se placer ailleurs (exemples 3 et 4). Les poètes romantiques coupaient souvent
l’alexandrin en trois parties (exemple 3).

3. La rime

Quand vous étudiez la poésie française, il y a 3 éléments qu’il faut considérer quand on analyse la
rime d’un poème :

a. la richesse de la rime
b. le genre de la rime
c. le schéma de la rime.

A. La richesse de la rime

En poésie française, la rime consiste en deux mots dans lesquels on prononce de la même façon la
voyelle finale et tous les éléments sonores qui la suivent. Notez que le « e » muet (ex parles) et
« ent » (parlent » ne comptent pas !!!).

Exemples :

bras / déjà ;
endort / encore ;
allure / aventure ;
parler/parlez/parlé

Selon la qualité de la rime on distingue les rimes « riches », « suffisantes » et « pauvres »


(« faibles »).

Rimes pauvres/faibles : rimes basées sur la voyelle finale seulement.

Exemple :

soldats/bras [a]
surpris/suivi [i]

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Rimes suffisantes : rimes basées sur la voyelle finale et d’un seul autre élément sonore.

mort/sort [ͻr]
aperçu/reçu [sy]

Rimes riches : rimes basées sur la voyelle finale et au moins deux autres éléments sonores.

Exemples :

morne/borne [ͻrn]
terre/héréditaire [tɛr]

C’est pour cette raison qu’il est très important de lire un poème à haute voix et de ne pas regarder
les lettres qui forment un mot. Il est possible qu’il y ait plusieurs lettres qui se ressemblent qui ne
sont pas forcément prononcées (ex mort/sort), ou des lettres qui ne se ressemblent pas du tout mais
qui ont la même prononciation (ex terre/héréditaire).

Si c’est seulement la voyelle prononcée qui rime et pas la consonne qui la précède ou qui la suit, il
n’y a pas de vraie rime, mais une « assonance ».

Exemple :

avare/mage
lutte/lune

B. Le genre de la rime

On distingue également entre les rimes « masculines » et les rimes « féminines ».

Rimes masculines : les rimes qui ne se terminent pas par un « e » muet.

Exemple :

toi/moi
surpris/suivi
bras/déjà
pensé/mêlé

Rimes féminines : les rimes qui se terminent par un « e » muet.

Exemples :

morne/borne
terre/héréditaire

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pensée/mêlée

Important : un mot d’une rime masculine ne peut jamais rimer avec un mot d’une rime féminine. Par
exemple, « toi » ne peut pas rimer avec « soie » ; « tout » ne peut pas rimer avec « boue ».

C. Le schéma de la rime

La rime ne doit pas nécessairement se limiter à deux vers successifs. On distingue plusieurs façons
d’organiser les rimes : les rimes « plates », les rimes « croisées » et les rimes « embrassées ».

Rimes plates : rimes qui suivent le schema a a b b, etc.

Exemple :

Elle avait pris ce pli dans son âge enfantin a


De venir dans ma chambre un peu chaque matin ; a
Je l’attendais ainsi qu’un rayon qu’on espère ; b
Elle entrait et disait : « Bonjour mon petit père ! » b
Prenait ma plume, ouvrait mes livres, s’asseyait c
Sur mon lit, dérangeait mes papiers, et riait. c

[Victor Hugo]

Rimes croisées : rimes qui suivent le schéma a b a b, etc.

Exemple :

Maître Corbeau, sur un arbre perché, a


Tenant en son bec un fromage. b
Maître Renard, par l’odeur alléché, a
Lui tint à peu près ce langage : b

[Jean de la Fontaine]

Rimes embrassées : rimes qui suivent le schéma a b b a, etc.

Exemple :

La Nature est un temple où de vivants piliers a


Laissent parfois sortir de confuses paroles ; b
L’homme y passe à travers des forêts de symboles b
Qui l’observent avec des regards familiers. a

[Charles Baudelaire]

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