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L’origine du statut privilégié de la conscience

Le mot « conscience » est formé du latin « con », qui signifie « avec » et « scientia », qui veut
dire science (ou savoir/sagesse). La conscience renvoie voit donc à l’état d’un être doué de
connaissance. Or pour les philosophes, notamment Socrate et Platon, la vie de l’homme doit
être gouvernée par la connaissance. L’idée du philosophe-roi qui gouverne la cité selon l’Idée
du Vrai, du Beau et du Bien l’illustre. Dès lors, si la conscience est ce qui permet de connaitre,
c’est que c’est elle qui fait l’homme (le sujet).
La conscience comme entité toute puissante
Pour Descartes, l’homme existe parce qu’il pense. C’est l’idée du cogito (« je pense, donc je
suis »). Or quand on pense, on sait que l’on est en train de penser. Dès lors, la pensée est
consciente d’elle-même. Ce qui se passe en elle ne lui échappe pas. De là, puisque la conscience
peut être entendue comme faculté de penser, et que la pensée permet de connaitre le monde et
distinguer le vrai du faux, on en déduit que la conscience peut tout savoir, ce qui se passe en
elle et ce qui se produit à l’extérieur d’elle. Il semble donc ne pas avoir de limites au pouvoir
de connaissance de la conscience.
Rousseau la perçoit comme le juge infaillible qui sait distinguer le bien du mal. Dans cette
perspective, la conscience renvoie à la conscience morale, c’est-à-dire la voie intérieure qui
juge nos actions et qui est alors susceptible de nous faire des reproches quand nous agissons
mal. Dès lors, c’est sur la conscience que repose l’institution de la justice. D’ailleurs à l’image
du sujet cartésien qui n’admet pour vrai que ce qui a résisté à son doute, le sujet rousseauiste
n’admet pour juste que la loi qu’il a examiné et avec laquelle sa raison est en accord.
Les failles de la conscience
Nietzsche considère que la conscience est ce qu’il y a de plus superficiel en l’homme. Cela
parce que, pour lui, l’homme n’est d’abord qu’un corps animé d’instincts et de pulsions, parfois
contradictoires. Dès lors, ce qui s’exprime dans ou à travers la conscience n’est que l’instinct
le plus puissant, la pulsion la plus forte. La conscience n’est donc que le résultat de
l’organisation de la vie instinctive et pulsionnelle ; vie qui est en majeure partie inconsciente,
selon Nietzsche.
Pour Freud, « le moi n’est pas maître dans sa propre maison ». Autrement dit, la conscience
n’a pas de maîtrise sur l’ensemble des phénomènes qui se produit en elle. Cette absence de
maitrise est due à l’existence de l’inconscient, qui renvoie aux désirs que l’homme refuse de
s’avouer à lui-même, par crainte de la société (les interdits/sanctions) ou par crainte de briser
l’image qu’il a de lui-même. Ces désirs, devant malgré tout s’exprimer, perturbent le
fonctionnement de la conscience, d’où les actes manqués, et aux cas le plus extrêmes, les
névroses. Au niveau moral, le refus de la conscience d’assumer les désirs peut être entendu
comme de la lâcheté. Shakespeare dira que « la conscience fait de nous des lâches ».
Critique de la thèse de l’inconscient
Pour Sartre, affirmer l’existence de l’inconscient, c’est priver l’homme de la liberté. Car,
effectivement, si la conscience ne maitrise pas les phénomènes qui se produisent en elle, alors
l’homme n’est plus maître de ses choix. L’inconscient apparait donc aux yeux de Sartre comme
une excuse pour ne pas assumer ses choix, sa liberté. Pour preuve, le déficient mental n’est
pas jugé au tribunal, car on considère qu’il n’est pas responsable de ses actes.
Autrui désigne l’autre, c’est-à-dire celui qui est différent de moi, mais qui comme moi possède
une conscience.

La connaissance d’autrui peut se faire par analogie, c’est-à-dire par la comparaison entre soi
et lui, qui permet d’établir les similitudes et les différences. C’est cette analogie qui nous fait
savoir que malgré nos différences, il agit et réagit de telle sorte que nous avons en commun la
conscience. Par ailleurs, le dialogue permet aussi de connaître l’autre, car il repose sur un
échange d’informations.

Cependant, la connaissance d’autrui est limitée, car il peut dissimuler sa personnalité, et


présenter un visage autre que le sien, tout comme il peut se refuser à exprimer ou à dire ce qu’il
pense et ce qu’il veut. En outre, puisque nous ne pouvons faire l’expérience de la vie d’un
autre, nous ne pourrions pas toujours comprendre ce qu’il éprouve ou a éprouvé, et cela même
lorsqu’il l’exprime. Ce qui fait dire qu’autrui demeure un mystère.

Idées négatives sur autrui

La présence et le regard d’autrui est source de souffrance

Sartre : « l’enfer c’est les autres ». C’est sur mot que s’achève la pièce de théâtre de Sartre,
Huis clos. Cette pièce met en scène trois individus contraint de rester dans la même pièce. Les
jugements que chacun portera sur la vie des autres révèleront à quel point le regard de l’autre
est un juge susceptible d’infliger des peines profondes. C’est ainsi que dans L’Etre et le Néant,
Sartre ajoutera que « la honte dans sa structure première est honte devant quelqu’un. ».

L’autre est un ennemi potentiel

Thomas Hobbes : « l’homme est loup pour l’homme ». Cette citation décrit l’animosité qui
peut exister entre les individus. Elle rappelle que dans une situation où chacun est à la recherche
de son bonheur, du profit, de la satisfaction de ses désirs, l’autre peut devenir un ennemi contre
qui l’on va devoir lutter pour parvenir à ses fins.

Idées positives sur autrui :

Autrui comme nécessité vitale

Seydou Badian dans Sous l’orage affirme que « L’homme n’est rien sans les hommes, Il
vient dans leur main et s’en va dans leur main ». Cela rappelle les conditions dans lesquelles
l’homme vient au monde et celles dans lesquelles il quitte le monde : elles ont toutes un point
commun, la présence de l’autre. Ainsi, autrui est une condition nécessaire à la vie de chacun,
condition sans laquelle la vie est impossible, voire serait infernale. C’est en ce sens qu’il est
possible d’affirmer que l’enfer serait d’être seul au Paradis

Autrui comme ami et médiateur à la connaissance de soi

Aristote : « la connaissance de soi est un plaisir qui n’est pas possible sans la présence de
quelqu’un d’autre qui soit notre ami ». Autrement dit, l’homme a nécessairement besoin
d’amitié pour se découvrir. C’est ainsi qu’un ami, ayant selon Aristote le devoir de vérité, nous
permettrait de nous regarder sans indulgence.
Ethnie : l’ethnie désigne un groupe culturel et biologique, ayant en commun, des ancêtres, des
traditions, une histoire et une langue. La nation : elle est la conscience d’appartenir à une
communauté liée par un projet politique qui prend en compte tous les citoyens, sans distinction.

L’opposition entre l’ethnie et la nation

L’ethnocentrisme : tendance à considérer son ethnie comme le modèle de référence absolu.


Claude Lévi-Strauss, l’exprime en affirmant que c’est une croyance qui consiste à penser que
« l’humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du
village ».

L’instrumentalisation du fait ethnique par le politique : il s’agit de l’exploitation de


l’affection ethnique par les leaders politiques pour conquérir ou conserver le pouvoir.
L’instrumentalisation de l’ethnisme au Rwanda a conduit au génocide tutsi.

Cela peut occasionner la géopolitique : gouvernement de l’Etat en fonction de l’appartenance


ethnique au profit d’intérêts ethniques. L’injustice : discriminations basées sur l’origine
ethnique. L’intolérance : négation du droit de l’autre à être différent, considération de l’autre
comme un barbare à civiliser, dominer voire exterminer.

Tout cela repose sur la réduction de la conscience à la compréhension des phénomènes aux
idées valables dans son ethnie.

La participation de l’ethnie à la nation

Le projet politique de l’Etat : il est question de rassembler les ethnies autour de buts et valeurs
communs qui transcendent les différences. Cela suppose de créer des discours (slogans,
idéologies, récits) unificateurs, mais également de proposer une éducation qui invite au vivre
ensemble et au respect de l’autre.

La création de nouvelles traditions : l’identité d’une nation se façonne progressivement avec


les autres, parmi les autres, grâce aux expériences partagées : à l’école, au travail, dans la vie
de tous les jours, dans les joies comme dans les peines. Les expériences vécues ensemble sont
le ciment de l’acceptation et de l’adoption de nouveaux codes sociaux aptes à garantir le vivre
ensemble.

Cela permet : l’enrichissement de la culture : la conscience collective est alimentée


d’enseignements et valeurs issues des diverses ethnies ; l’éducation à l’altérité : la
considération de l’autre comme un être aussi digne que soi, le développement : l’union des
intelligences en vue de l’amélioration de la société.

Tout cela repose sur la conscience : l’examen rationnel des valeurs de son ethnie afin de trier
le positif du négatif.
La société renvoie à un ensemble organisé d’individus qui partagent une culture (mode de vie
et valeurs) et qui sont liés par l’histoire (des expériences et évènements vécus qui alimentent
la mémoire collective). Pour Aristote, « l’homme est un animal politique », c’est-à-dire qu’il
est naturellement destiné à vivre en société. Dès lors l’existence de la société est perçue comme
une nécessité.
La raison de la nécessité de la société est la survie de l’homme. En effet, pour assurer la
sécurité des individus et la survie de l’espèce humaine dans le temps et à travers les âges, les
hommes ont besoin de s’associer, de collaborer, et donc de vivre en société. Rousseau
l’explique grâce à la théorie de l’état de nature. L’état de nature est l’hypothèse selon
laquelle avant l’avènement de la société, les hommes vivaient en solitaires, isolés les uns des
autres et uniquement préoccupés par leur survie individuelle.
Dans cet état, ils jouissaient d’une liberté totale, mais étaient constamment en danger, du fait
de l’hostilité de la nature, et de la possibilité de se faire dépouiller de ses biens et de sa vie par
les autres. Pour mettre fin à cet état précaire, ils ont donc décidé de vivre ensemble, de manière
à garantir la liberté et la sécurité de tous, grâce à des lois qui donnent les mêmes droits et
devoirs à tous. La société nous apporte donc le secours des autres.
Ainsi, la société est le lieu de réalisation de l’humanité. En effet, le développement des
facultés humaines se produisent dans et grâce à la société. D’où le rôle essentiel de la tradition.
La tradition renvoie, au niveau le plus élémentaire, à la transmission d’un héritage. Cet héritage
est la langue, les savoirs sur le monde, et les savoir-faire pour organiser voire transformer le
monde. C’est en ce sens que la société est perçue comme un ordre culturel, différent de l’ordre
naturel, en tant qu’il renvoie à ce qui existe par l’homme, avec l’homme et pour l’homme, et
ce grâce à quoi il se distingue de l’animal. Serge Moscovici affirmera que « la société est du
domaine de l’homme, la nature du domaine des choses ».
Le cas des enfants « sauvages » ayant vécu et grandit hors de la société donne raison à cette
idée du à l’absence de développement de leurs facultés cognitives et leur difficulté voire
incapacité à parler ou à apprendre le langage.
Cependant, les inégalités et conflits dans la société font qu’elle peut devenir un enfer.
Autrui, en tant qu’ennemi, et en tant que juge dont le regard produit la honte, peut expliquer
cela. Plus largement, la possibilité que les lois puissent être injustes et au service d’intérêts
personnels montre que la société peut entraver l’épanouissement des individus. Il semble que
l’association des hommes produit naturellement et automatiquement des rapports de dominants
à dominés au profit des premiers et au détriment des seconds.
C’est pourquoi, la réflexion philosophique à propos de la société a souvent porté sur la
recherche du meilleur gouvernement possible. Pour Aristote, la démocratie est le moins pire
des régimes. Dit ainsi, cela suppose qu’aucun régime politique ne peut suffisamment garantir
le bien-être de tous, et qu’en ce sens la démocratie est le régime dont les défauts sont les plus
limités et tolérables. Freud considérera que progrès social en tant que suppression des
contraintes, et cohabitation pacifique, ne pourra jamais être atteint. Cela repose sur l’insociable
sociabilité de l’homme pensé par Kant : la tendance naturelle de l’homme à s’associer autant
qu’à s’opposer à ses semblables. Pour Kant le développement des sociétés repose surtout sur
la tendance à s’opposer.
Le langage vient du latin « lingua » qui désigne la langue en tant qu’organe, mais aussi en tant
que parole. Plus largement, le langage est un système de signes qui permet de transmettre un
message. C’est la pensée et la vie en société qui rendent possible le langage. Car, d’une part,
il faut un être doué de conscience pour lier un signe à une idée, d’autre part, il faut une ou
plusieurs autres personnes à qui communiquer des informations ou idées.
Donc seul l’homme possède le langage. La nécessité de la pensée et de la vie en société pour
la production du langage laisse entendre que ce dernier un fait exclusivement humain. Cela
s’explique par le fait que les animaux ne produisent pas de signes mais des signaux. La
différence est que le signe est intentionnel et conventionnel : il est créé volontairement et sa
signification repose sur un accord entre les hommes ; or le signal est instinctif et produit des
réactions automatiques. Pour Rousseau, le caractère conventionnel du langage humain est ce
qui explique que l’homme puisse créer une diversité de langues.
Ainsi, le langage est le produit de la conscience humaine voire de la raison. Descartes
affirme que l’animal le plus doué n’égal pas l’enfant le plus stupide, car ce dernier est capable
de parler tandis que l’animal non. Pour Descartes, cela signifie que, contrairement à l’animal,
l’homme à des idées à organiser, et qu’ainsi la parole repose sur la capacité de la raison à
organiser les idées. D’où la supériorité de l’homme.
Le lien entre raison et langage indique que le langage traduit la pensée. En effet, pour
Hegel, « c’est dans les mots que nous pensons ». Autrement dit, les mots (le langage en
général) est le véhicule de la pensée : sans les mots, il n’y a pas de pensée. Ainsi, pour Hegel,
ce sont les mots qui donnent une existence concrète à la pensée. Aussi, la difficulté à formuler
clairement sa pensée à travers l’usage des mots suppose que la pensée en question est
incomplète et encore obscure ou floue.
Par conséquent, la méconnaissance des mots serait alors une limitation de la pensée. Dès
lors, puisque la pensée permet de comprendre le monde, selon Wittgenstein, « les limites de
mon langage signifient les limitent de mon propre monde ». Autrement dit, nous ne pouvons
pas exprimer ce que nous ne connaissons pas. Dès lors, ce qui est absent dans notre langage est
aussi absent dans notre représentation du monde. C’est pourquoi la langue d’un peuple traduit
ou véhicule la vision du monde de ce peuple. Les différences entre les diverses représentations
du monde expliquent alors le fait que certaines expressions dans une langue sont intraduisibles
dans une autre, à défaut de trahir le sens.
Parler la même langue assure donc la possibilité de se comprendre. Car, nous partageons
une connaissance commune des liens entre les signes et les idées, et nous partageons aussi une
même représentation du monde. Seulement, une différence dans le degré de maitrise de la
langue, entre des interlocuteurs, peut brouiller la communication. Tout autant que la volonté
de nuire grâce au langage. Sartre affirmait que « les mots sont des pistolets chargés » pour
dire qu’ils peuvent véhiculer une certaine violence qui nuit à la communication.
Enfin, selon Bergson, les mots, étant impersonnels, expriment faiblement ce qu’il y a de
personnel dans notre pensée, la richesse de notre vie intérieure, de nos sentiments. Mais encore,
ils peuvent être des étiquètes qui limitent notre connaissance des choses à leur aspect le plus
banal.
Le travail : il désigne une activité physique ou intellectuelle qui permet la production de biens
et de services, la transformation du monde et de soi-même.

Idées négatives sur le travail

Selon son étymologie : du latin tripalium, le travail renvoie étymologiquement à un instrument


de torture. Dès lors, du point de vue symbolique, en raison des efforts pénibles qu’il demande
le travail est assimilé à une torture

Selon la tradition judéo-chrétienne : dans la Genèse, le travail apparait comme la punition


infligée à l’homme en raison de sa désobéissance à Dieu. Selon cette perspective, le travail est
perçu comme une malédiction, car la situation initiale de l’homme, l’idéal, serait une vie sans
travail.

Selon la critique du capitalisme de Karl Marx : le travail est entendu comme exploitation
de l’homme par l’homme. Cette exploitation renvoie au pouvoir qu’exerce le bourgeois sur
l’ouvrier (ou sur le prolétaire). Car ce dernier travaille sans jouir du fruit de ses efforts, fruit
qui profite exclusivement au bourgeois.

Du point des relations sociales : le travail, lorsqu’il est orienté vers la recherche exclusive du
profit personnel peut engendre concurrence et compétition. Dans cette perspective, il oppose
les hommes, car chacun voudra se hisser au-dessus des autres en termes de profit.

Idées positives sur le travail

Du point de vue du développement : le travail permet de transformer la nature. C’est cette


transformation qui est la source les changements positifs que peut connaitre une société. De ce
point de vue, le travail permet de créer la technique et ainsi d’amorcer le progrès et le
développement.

Du point de vue social : le travail est un instrument d’intégration sociale. Cela signifie que
grâce à un métier, l’homme trouve sa place dans la société, il en tire des honneurs et
potentiellement des avantages. Cela est d’autant plus vrai qu’à force de travail il est possible
de gravir les échelons de la société, c’est-à-dire de changer de statut social. Par ailleurs, il
favorise les échanges entre les hommes et les sociétés. Il permet ainsi aux hommes de
collaborer afin d’améliorer ensemble leurs conditions de vie.

Du point de vue de la conscience : le travail permet de développer ses facultés. En effet, à


force de travailler l’on acquiert des connaissances, compétences et expériences, qui
enrichissent notre compréhension du monde.

Du point de vue de la liberté : les connaissances acquises grâce au travail peuvent servir à se
libérer de l’influence d’autrui. Dans cette perspective, le travail permet de devenir indépendant.
Cela d’autant plus qu’il fournit de quoi subvenir par soi-même à ses besoins. Mais encore, il
permet de créer un univers où les choses sont soumises à notre volonté.
Les échanges renvoient à une pratique qui se résume à donner et recevoir (des biens, des
services, des idées, des paroles, ses sentiments). La nécessité des échanges : Il apparait que
l’homme ne puisse survivre seul. Il a donc besoin d’échanger avec eux afin d’obtenir ce qu’il
ne possède pas et qui pourtant est nécessaire à sa survie.

Les échanges permettent d’unifier les hommes autour d’intérêts communs. C’est l’idée
d’Adam Smith. Pour lui, en ayant besoin de ce que l’autre produit, l’on est alors disposé à
définir les modalités qui permettront à chacun de tirer profit de l’autre. C’est ainsi que les
échanges créent le lien social.

On peut également considérer que les échanges favorisent le développement. Car il est
possible d’échanger des connaissances et des technologies, qui servent à améliorer les
conditions de vie.

Enfin, en privilégiant le contact humain, avec ses avantages et ses dangers, les échanges
peuvent permettre à chacun de développer sa personnalité et ses aptitudes. Dans cette
perspective, les échanges peuvent servir à se découvrir soi-même, mais également être une
invitation à découvrir les autres et à apprendre d’eux, afin de toujours s’améliorer.

L’aliénation dans les échanges :


La première source d’aliénation dans les échanges est l’escroquerie. L’escroquerie consiste
à tromper l’autre de manière à lui faire donner bien plus qu’il ne reçoit. C’est une violation du
principe de l’équivalence des valeurs, qui exige que ce que l’on donne et ce que l’on reçoit
soient de valeur équivalente.

La seconde source d’aliénation est le marchandage sans borne. Il renvoie à penser et à agir
avec la conviction que tout est achetable. Cela favorise aussi bien la prostitution que la
corruption.

La troisième source d’aliénation est la contrainte. Car un échange suppose un accord, un


contrat, tacite ou écrit. Or tout accord et donc tout échange doit être contracté librement pour
être valable. Enfin, il peut y avoir des échanges de coups, ou d’insultes, qui révèlent la
dégradation des rapports sociaux. Ainsi, on peut dire que les échanges deviennent aliénants
lorsqu’ils sont motivés par la volonté de nuire. C’est ainsi qu’ils peuvent être des marteaux qui
détruisent la société.

L’arbitraire dans les échanges :

Dans le commerce, la recherche du profit exige de vendre un produit à une valeur plus élevée
que celle qui a été dépensée pour l’obtenir. Dès lors, on achète presque toujours une
marchandise au-delà de sa réelle valeur. Dans le domaine artistique, la notoriété de l’artiste
peut considérablement influencer la valeur marchande de ses productions. Ainsi, plus un artiste
a de notoriété, plus il peut augmenter le prix de ses œuvres et prestations. Il peut arriver que
la valeur des choses soit fixée par l’affection qu’on leur porte. C’est pourquoi, il peut nous
sembler impensable de vendre un cadeau offert par une personne chère.
L’art : activité qui consiste à produire des œuvres exprimant le beau

Premier problème de l’art : sa nature ou sa définition. Est-il imitation ou création ?

L’art imitation
La nature comme modèle de beau. La nature, appelé cosmos par les grecs antiques,
représente un modèle d’ordre et de beauté. En ce sens, elle est considérée comme première
artiste et source d’inspiration suprême. Il en découle que l’artiste, pour exprimer le beau, doit
représenter les êtres naturels, déjà considéré beaux. L’art est alors représentation des belles
choses (issues de la nature).

L’art comme miroir du monde


Pour Aristote l’art consiste aussi à imiter les comportements, les caractères, les passions. Par
cela, l’art permet de représenter ce qui est vraisemblable, ce qui parait vrai. On peut donc voir
en l’art un mode d’expression de la vérité, de l’authenticité de l’homme, de ce que l’homme
sait du monde et de lui-même.

L’art création
L’art comme transformation du réel : Kant pense que « une œuvre d’art ce n’est pas la
représentation d’une belle chose, mais la belle représentation d’une chose ». Autrement
dit, l’art est idéalisation du réel, c’est-à-dire une manière particulière et originale de voir la
réalité ou le monde. Dans ce sens, les œuvres traduisent nos idées, nos valeurs, les jugements
que nous portons sur les choses et le monde.

L’art comme abstraction


L’abstraction consiste à ne pas tenir compte de la réalité. Dans ce sens, l’art abstrait ne présente
aucune forme reconnaissable, aucun objet ou être présent dans la nature. Cet art est l’expression
du monde intérieur de l’homme, de la puissance des émotions, réalisée à partir ou grâce à la
symbolique des couleurs. Cet art apparait en 1910 avec la Première aquarelle abstraite de
Vassily Kandisky. Il appartient au domaine de la peinture. Mais, on peut entendre la
musique comme un art abstrait dans la mesure où elle ne produit pas de formes.

Deuxième problème de l’art : les critères du beau. Le beau est-il objectif ou subjectif ?

L’idée du beau objectif


Le beau naturel est la première source de l’objectivité dans l’art. Le beau naturel renvoie à la
beauté des êtres et objets présents dans la nature. Dès lors, si l’artiste prend pour modèle la
nature, ses œuvres doivent être se rapprocher le mieux possible de ce que la nature offre comme
beauté. La technique dans l’art fait reposer la production des œuvres d’art sur des règles
précises. En effet, chaque art possède ses règles, ses codes et ses méthodes. L’apprentissage de
ces derniers est nécessaire pour pratiquer un art, pour produire des œuvres d’art.

L’idée du beau subjectif


Kant affirme que « les goûts et les couleurs ne se disputent pas, ils de discutent ». Autrement
dit, l’appréciation des œuvres d’art varient d’un individu à l’autre. Cette appréciation n’est pas
rationnelle, mais sensible. Les courants artistiques montrent que chaque artiste est en mesure
de définir les critères du beau. Dans cette perspective, il n’y a pas une idée du beau qui puisse
être la même pour tous.
La technique : elle désigne la fabrication et l’utilisation d’outils utiles pour accomplir une
tâche.

Idées positives sur la technique

Selon le mythe de Prométhée : l’origine de la technique est le don que Prométhée a fait aux
hommes pour garantir leur survie dans une nature hostile. Cela montre que sans la technique
l’homme ne peut survivre.

Selon la science : la technique est l’application des savoirs. Elle est l’expression de
l’intelligence et des connaissances de l’homme. Pour Heidegger, elle est un monde de
dévoilement de la vérité.

Par rapport au progrès : la technique apparait comme l’essence même du progrès. Car
généralement, lorsqu’on parle du progrès, on fait allusion au progrès technique, c’est-à-dire à
l’augmentation de la performance des outils.

Par rapport au développement : le progrès technique est un facteur non-négligeable du


développement. Car, la performance des outils permettent des changements positifs dans la
société : facilitation du travail, gain de productivité, mode de vie confortable.

Idées négatives sur la technique

Du point de vue du travail : l’automatisation du travail grâce à la technique a deux


conséquences négatives. La première : elle permet de se passer l’homme. Dès lors, cela peut
accentuer le chômage et le prolétariat. La seconde est utilisation de l’homme comme une
machine de production : il est formé et réduit à l’utilisation spécifique d’outils pour augmenter
la productivité.

Du point de vue du développement : le progrès technique engendre la crise écologique. Celle-


ci se traduit par la pollution et l’épuisement des ressources naturelles. Ce qui pose aujourd’hui
le problème du réchauffement climatique et celui de la possibilité du développement durable
(utilisation des ressources sans les épuiser).

Du point de vue de la liberté : la technique peut enfermer l’homme dans un univers où il


devient étranger aux rapports sociaux. On le voit avec la dépendance aux jeux vidéo et aux
réseaux sociaux. Cela rend l’homme esclave du plaisir procuré par les objets techniques. Par
ailleurs, elle peut entrainer la violation des libertés grâce à la collecte de données personnelles.
Dès lors la technique ouvre la porte à la cybercriminalité.
La religion : le terme religion vient du latin religare qui signifie relier. Il désigne un système
de croyances dont la vocation est de relier l’homme au divin (Dieu ou les dieux).

Idées positives sur la religion :

La religion rassemble les hommes dans la mesure où elle leur donne une origine
commune. En effet, en indiquant que le divin est à l’origine de tout, elle enseigne que les
hommes sont unis par des liens spirituels. Dans cette perspective, elle les invite à entretenir ces
liens de manière à ce que l’humanité, dans son ensemble, puisse s’épanouir.

La religion cultive le sentiment d’appartenance à une communauté. En effet, adhérer aux


mêmes croyances et pratiquer les mêmes rituels, dans les mêmes lieux de culte, favorisent
l’entente, le dialogue, l’entraide, le respect mutuel entre les hommes. Or, ces différents
comportements sont les piliers du vivre-ensemble.

La religion répond aux angoisses de l’homme. En effet, l’homme en proie aux soucis de
l’existence ne trouve son salut que par l’expérience religieuse dans laquelle il trouve du repos
et la possibilité de compter sur un être supérieur à lui et sur qui il peut espérer. C’est ainsi que
David Hume s’interroge : « Quelle ressource aurions-nous au milieu des maux innombrables
de la vie, si la religion ne nous fournissait quelques moyens expiatoires et ne calmait ces
terreurs qui nous troublent et nous tourmentent sans cesse ? »

Idées négatives sur la religion :

La religion divise les hommes car elle fait la différence entre le sacré et le profane. Dans
ce sens, au sein d’une même société, la religion peut faire exister une séparation entre l’homme
initié et l’homme profane. Cette séparation devient vicieuse lorsque les institutions religieuses
servent à entretenir la misère morale et intellectuelle des populations. C’est cela qui fit dire à
Karl Marx que « la religion est l’opium du peuple ». Autrement dit, la religion est une drogue
qui a pour effet d’endormir la conscience collective de telle sorte que le peuple devient
incapable de lutter pour se libérer de l’emprise de ceux qui l’oppriment.

Il y a dans les religions un fond dogmatique qui semble favoriser l’intolérance. Rappelons
que le dogmatisme est l’attitude qui consiste à considérer que nos idées et nos croyances sont
des vérités absolues, c’est-à-dire qu’elles ne peuvent souffrir d’aucune contestation. Or,
justement, chaque religion prétend détenir des vérités absolues, parfois révélées par Dieu lui-
même. Dans ce sens, celui qui n’appartient pas à la même religion que soi, est dans l’erreur. Il
est donc soit dénigré, soit évité, soit rejeté, à défaut d’être converti de force.

La religion serait une consolation trompeuse. La religion semble consoler les hommes de
leur misère, en leur faisant espérer un au-delà meilleur. Mais, cette espérance est mise en cause
car elle ne guérirait pas la misère, elle la masquerait simplement comme une drogue qui endort
le malade. C’est ainsi que pour Nietzsche, la religion est, pour les faibles, un moyen de fuir la
réalité qu’ils ne peuvent supporter.
La tradition : Elle est l’ensemble de coutumes, de valeurs, de techniques, d’opinions et de
croyances transmises de génération en génération. Elle peut être entendue comme un héritage
culturel (celui d’un peuple), spirituel (dans une religion), ou intellectuel (dans la science).

La critique adressée à la tradition : elle s’opposerait au progrès et au développement, dans


la mesure où elle favoriserait l’obscurantisme. L’obscurantisme est le maintien de l’homme
dans l’ignorance. La critique vient des modernes qui accusaient le Moyen Age, marqué par la
domination de l’Eglise et de ses traditions, d’avoir été une époque anti-scientifique.

Les raisons de la critique :

Par rapport à la science : le caractère sacré de la tradition empêche de la remettre en question.


Cela s’oppose à l’esprit scientifique qui repose sur le doute et l’analyse. C’est pourquoi, du
point de vue de la science, la tradition peut servir à transmettre des erreurs (vérités fausses).

Par rapport à la conscience : elle limite notre compréhension des phénomènes aux idées et
logique approuvées par la tradition. Dans ce cas, elle nourrit les préjugés (erreurs de
raisonnement ; jugement hâtifs). Mais, encore, elle peut alimenter notre conscience d’habitudes
anciennes parfois inutiles par rapport aux préoccupations actuelles.

Par rapport au développement : la tradition peut favoriser une attitude réfractaire aux
changements en raison de la volonté de maintenir des habitudes. Dès lors, les innovations
peuvent être rejetées, ce qui empêche l’amélioration de la société.

Par rapport à la liberté : l’autorité de la tradition peut être une entrave à la liberté d’opinion
et à la liberté d’expression. Cela signifie que le pouvoir de la tradition est sans limite de sorte
que la liberté de chacun et l’égalité de tous sont réduites au respect de la tradition.

Les contres arguments :

Par rapport à la science : il existe des traditions en science, dans la mesure où les idées, les
théories, les méthodes sont transmises d’une génération de scientifiques à une autre. Par
ailleurs, la science repose sur une tradition critique : celle qui consiste à douter pour rechercher
la vérité. C’est cette tradition qui favorise le progrès scientifique.

Par rapport à la justice : la tradition est souvent composée d’un ensemble de lois qui
permettent d’encadrer la liberté afin d’assurer le vivre-ensemble. Cela signifie que la tradition
peut véhiculer un idéal de justice sur lequel il est possible de fonder le droit d’un Etat.

Par rapport à la conscience : les mythes et l’histoire transmis dans une tradition renseignent
sur les origines. Elle permet donc de construire l’identité d’un peuple ou d’une personne. Elle
a un rôle éducatif car, elle inculque des valeurs et transmet des connaissances.

Par rapport au développement : chaque tradition est une réponse à un ou des problèmes
spécifiques. Dès lors, face à de nouveaux problèmes, l’homme peut créer de nouvelles
traditions, ou modifier les anciennes pour y faire face.
Le développement : amélioration des conditions de vie ; ensemble des changements positifs
d’une personne ou d’une société. Le progrès : idéal poursuivi par les Lumières, celui du
triomphe de la connaissance sur l’ignorance. Ce triomphe renvoie à la libération de l’homme
par rapport aux forces oppressantes de la nature et par rapport aux régimes politiques
tyranniques.

Lien entre le développement et progrès : On peut considérer le développement comme la


réalisation concrète de l’idéal du progrès. Chaque fois qu’un changement positif se produit, on
considère que le progrès est en marche.

Un progrès/ les progrès : les différentes évolutions, dans des domaines particuliers, qui
engendre des changements. Ces changements peuvent être positifs, on dira alors que ces
progrès participent au développement. Mais les changements peuvent aussi été négatifs, on dira
alors que ces progrès freinent le développement (la réalisation de l’idéal du progrès).

Problème : généralement, on réduit le progrès (et le développement donc) aux progrès


scientifique et technique. Car ces progrès rendent l’homme « comme maître et possesseur de
la nature », selon les mots de Descartes. Freud ira jusqu’à considérer qu’il n’y a de progrès
que dans « la conquête de la nature », dans la mesure où « la conduite des affaires humaines
» ne pourra se passer de la contrainte, et des mécontentements liés à la contrainte.

Les dérives des progrès scientifique et technique

Du point de vue de la nature et de la vie : création de produits toxiques qui polluent la nature
et détruit les autres espèces, la nôtre également ; surexploitation des ressources naturelles qui
conduit leur épuisement. Cela met en péril la survie de l’humanité. C’est pourquoi se pose
aujourd’hui la question de la crise écologique et du développement durable.

Du point de vue de la culture et des sociétés humaines : croyance selon laquelle toutes les
sociétés humaines doivent se développer de la même façon, de la société traditionnelle à la
société de consommation de masse, selon Rostow. Cela légitime la croyance en la supériorité
des races, en raison d’une hiérarchisation des peuples selon le degré d’utilisation de la
technique.

Les autres facteurs du développement

La culture : il faut entendre par culture l’ensemble des idées, valeurs, habitudes et croyances
à partir desquels s’organise et la vie d’un individu ou d’une société. Lorsqu’une culture
véhicule le goût de l’effort et la recherche de l’excellence, elle favorise le développement. Car
l’homme qui baigne dans cette culture cherchera toujours à s’améliorer. Par ailleurs, les
cultures, en proposant des réponses différentes aux problèmes humains, suggèrent plusieurs
modèles de développement.

L’éthique : il faut entendre par éthique l’ensemble des jugements moraux qui portent sur les
buts que nous nous fixons. La réflexion éthique sur l’utilisation des connaissances et des outils
techniques peut amorcer des changements positifs. On le voit à travers la prise de conscience
sur les enjeux environnementaux du développement. C’est cette réflexion qui permet d’établir
les normes environnementales et poussent vers la recherche de ressources renouvelables.
La vie, l’existence et la mort sont des concepts étroitement liés. Car, d’abord, dans le langage
courant, on a tendance à associer sans distinction de sens la vie et l’existence. Ensuite, parce
que la mort est généralement représentée ou perçue comme ce qui s’oppose à la vie. Cela
suppose la nécessité de clarifier deux choses : la distinction entre vivre et exister, et les
significations que peuvent revêtir la mort.
La distinction entre vivre et exister
La vie peut être définie comme la période qui va de la naissance à la mort. Cette période
se caractérise fondamentalement par la croissance, l’alimentation, la reproduction, et
l’interaction avec son environnement. Dans ce sens, vivre peut avoir le sens de survivre, dans
la mesure où il renvoie à la satisfaction de besoins et exigences liés à chacune des
caractéristiques énumérées. Cette vie est instinctive est marquée du sceau du déterminisme,
qui affirme que notre constitution organique est la base et la cause fondamentales de nos
actions.
Or, Il est admis que l’homme doit pouvoir s’élever au-dessus d’une vie de survie, sans quoi
il serait plus proche de l’animalité que de l’humanité. C’est pourquoi Karl Marx considère
que le travail, qui est censé assurer la dignité de l’homme, ne remplit pas cette mission s’il ne
permet que de satisfaire les nécessités vitales. D’où sa critique du capitalisme en tant que
système d’exploitation, c’est-à-dire de déshumanisation.
Aussi, le concept de l’existence permet de désigner une vie authentique et pleinement
humaine, c’est-à-dire une vie qui va au-delà de la survie. Il renvoie à la possibilité de modeler
sa vie, lui donner une signification et une direction mûrement réfléchies. Exister, c’est donc à
la fois élaborer et concrétiser un projet de vie. Sartre l’exprimera en affirmant que l’homme est
un projet. Autrement dit, sa vie est marquée du sceau de la liberté, au sens où il a la
responsabilité de ses actes et que ce sont ses derniers qui le définissent.
Les significations de la mort.
D’abord, on considèrera que mourir est l’opposé de naître. En ce sens, puisque la naissance
est le début de la vie, la mort est donc la fin de la vie. Au plan scientifique, la mort renvoie à
l’arrêt des fonctions vitales. Ensuite, du point de vue de la foi religieuse, on dira que la mort
est une renaissance. Il s’agit de quitter la vie terrestre faite de souffrances pour vivre à nouveau
dans un au-delà meilleur. Cela a un double sens : le premier, celui du passage d’un état à un
autre ; le second, celui d’une libération.
Au-delà du contexte religieux, la mort comme passage, sur le plan symbolique, peut renvoyer
aussi aux épreuves vécues qui permettent de faire mourir en soi ce qui est désuet, vieux,
inadaptés, petit, afin de se renouveler et devenir meilleur. La mort en tant que libération peut
être vue comme le choix du suicide en raison d’un mal être insupportable.
Enfin, La mort comme motivation pour exister. Pour Heidegger, la conscience de sa propre
finitude pousse l’homme à vivre authentiquement. Pour lui, c’est cette conscience qui fait de
l’homme un « Daisen », un être-là, c’est-à-dire une présence au monde qui s’interroge sur ce
que signifie être dans le monde, de telle sorte qu’il travaille à y laisse son empreinte.
Le temps, comme l’espace, est la condition nécessaire qui permet le déroulement et la
succession des évènements. Seulement, à la différence de l’espace, il ne permet pas de retour
en arrière. C’est pourquoi, le temps peut être définit comme le mouvement continu et
irréversible qui se produit dans l’espace. Ce mouvement est exprimé par Héraclite en ces
termes : « on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve ». Autrement dit, à l’image
d’un fleuve, le temps s’écoule continuellement.
La mémoire est la faculté de conserver les souvenirs. Aussi, permet-elle de constater les
changements qui se sont produits entre deux instants, de distinguer ce qui passé de ce qui est
présent. Cela fait imaginer un futur. Ainsi, c’est notre conscience qui, par sa faculté de
mémorisation (et d’anticipation), permet de savoir que le temps passe, et qui découpe
donc le temps en trois moment : le passé, le présent, le futur.
Cela laisse entendre que le passé et le futur n’existent pas réellement, mais seulement dans
notre esprit. Aussi, Saint-Augustin affirme que « le présent des choses passées, c’est le
souvenir », et « le présent des choses futures, c’est l’attente ». Or, le souvenir et l’attente
n’existent qu’en nous. Bergson fera alors la différence entre le temps subjectif, celui vécu par
la conscience dont la perception dépend de nos sentiments et pensées, et le temps objectif,
mesurable, quantifiable, et dont la perception dépend des montres et horloges.
La représentation de l’écoulement du temps comme destruction : dans la mythologie
grecque, Chonos, le dieu du temps (il est donc la personnification temps), est présenté comme
un tyran. Car, pour conserver sa place sur le trône des dieux, il dévore ses enfants par peur que
ceux-ci le renversent. C’est une manière poétique de dire que le temps nous tue, car son
mouvement continue nous fait vieillir et nous conduit à la mort.
Le poète Lamartine montre que l’écoulement du temps peut-être la source de nos chagrins et
désespoirs. Dans le poème intitulé Le Lac, il exprimera ainsi : « O temps ! Suspends ton vol ».
Cela pour dire la douleur de perdre un être cher (sa bien-aimée), car l’écoulement du temps
l’aura emporté à la mort, car l’écoulement du temps efface les évènements heureux et en
apporte de malheureux. Cela montre aussi que le souvenir de l’être perdu ou des évènements
heureux peut accentuer la douleur.
Les enseignements à tirer de la question du temps : premièrement, puisque le temps est
irréversible, il ne faut pas s’attacher à ce qui est passé et accepter le changement. Car, si
effectivement, « on ne se baigne pas deux fois dans un même fleuve », l’essentiel est de se
baigner et non de retrouver le même fleuve.
Deuxièmement, ne pas s’inquiéter de l’avenir, mais plutôt « cueillir le jour », comme dit
Epicure, c’est-à-dire, profiter du présent pour cultiver notre bonheur. Donc, ne craindre ni la
mort ni les évènements malheureux, car « quand nous sommes, la mort n’est pas, et quand
la mort est, nous ne sommes plus » (Epicure), et parce que le malheur est aussi emporté par
le temps.
Troisièmement, il faut organiser son temps, c’est-à-dire utiliser le temps objectif pour vivre
au mieux son temps subjectif. Ainsi, les projets élaborés par notre conscience doivent l’être
dans une durée déterminée, qui permet l’action et la patience, plutôt que l’inaction et
l’impatience.
La foi désigne la confiance accordée à quelqu’un ou à quelque chose. Elle s’exprime à travers
la croyance, c’est-à-dire l’adhésion à une opinion, une idée ou des valeurs. C’est en ce sens
qu’elle peut devenir une conviction ou un dogme, c’est-à-dire une certitude concernant la
véracité d’une idée à laquelle on adhère. La foi renvoie donc à une manière de juger la réalité
qui est basée sur le sentiment, c’est-à-dire sur une appréciation purement subjective. Autrement
dit, la foi nous fait juger la réalité telle que nous croyons qu’elle est, plutôt que telle qu’elle est.
En ce sens, elle est capable de produire l’un des contraires de la vérité : l’illusion.
Or, la raison est la faculté de distinguer le vrai du faux. Cela signifie qu’elle a pour rôle d’éviter
que nous prenions pour réel, ce qui est apparent ou illusoire. C’est en ce sens qu’on considère
que la raison doit combattre la foi, notamment en privilégiant l’objectivité : juger les faits tels
qu’ils sont et à partir de ce qu’ils sont, plutôt qu’en fonction de nos désirs ou convictions
personnelles. L’objectivité de la raison s’oppose donc à la subjectivité de la foi.
L’un des premiers combats de la raison contre la foi est celui d’Epicure contre la superstition
de son époque, l’Antiquité. Une superstition est une croyance fondée sur la crainte ou
l’ignorance. A l’Epoque d’Epicure, les Grecs croyaient que les évènements malheureux qu’ils
pouvaient vivre étaient des punitions divines. C’est pourquoi le premier principe du
Tetrapharmakos (les quatre remèdes qui guérissent l’âme) élaboré par Epicure pour atteindre
le bonheur stipule : « Ne craignez pas les dieux ». Car, ceux-ci sont heureux et ne s’occupent
pas des affaires humaines.
Cependant, après l’Antiquité, la période du Moyen-Age a été une époque très religieuse, où la
foi était au centre de tout, car l’Eglise régnait sur le monde (européen). La raison a alors été
mise au service de la foi : son rôle n’était plus tant de distinguer le vrai du faux, mais
plutôt de justifier les convictions religieuses. Cela rappelle l’apôtre Pierre qui demandait
aux premiers chrétiens : « Soyez toujours prêts à vous défendre, devant quiconque vous
demande raison de votre espérance ». Partant de cette demande, la position dominante de
l’Eglise au Moyen-Age a conduit à une instrumentalisation de la science et de la philosophie
au profit de la religion.
Puis, vient l’époque moderne où la modernité, en tant que mode de penser, remet en question
l’autorité de l’Eglise, c’est-à-dire la puissance de la tradition religieuse, car cette dernière
entrave l’épanouissement de la science. La modernité renvoie donc à une glorification de la
raison et de la science au détriment de la foi et de la religion, ainsi que de la tradition.
L’hostilité de la raison à la foi se lit dans les travaux de philosophie politique. Pour expliquer
l’origine de la société, Hobbes et Rousseau ont théorisé un état de nature, une situation initiale
de l’homme, où Dieu est absent. Conséquence : ce n’est pas sur la foi, mais sur la raison que
doit se fonder l’ordre social.
Mais, la modernité nous montre une transformation de la manifestation de la foi. La modernité
se caractérise par une foi en la raison, une foi en l’homme, en la science et au progrès de
l’humanité. De même que le Moyen-Age a présenté une foi en Dieu qui a besoin de la raison
pour prospérer. Benoît XVI pensait que séparer raison et foi c’est courir à la catastrophe : sans
la foi, la raison devient pure technique capable de chosifier l’homme ; sans la raison, la foi
dérive vers le fanatisme. Avant lui, Kant pensait que la foi et la raison répondent à deux besoins
distincts et fondamentaux de l’homme : le besoin de croire et le besoin de connaitre. Ainsi,
elles sont complémentaires : la foi prend le relai de la raison, quand celle-ci devient
impuissante face au réel.
La logique vient du grec logos, qui renvoie à l’intelligence ou l’art de raisonner. En tant que
science, on parle de logique formelle : science qui détermine les formes correctes de
raisonnement et les lois nécessaires de la pensée. Il s’agit donc de déterminer la validité des
discours, de dire s’ils sont conformes à la raison.
L’origine de la logique : la logique a été inventée par Aristote, qui voulait réfuter les
raisonnements éloquents et persuasifs des Sophistes. Les Sophistes étaient des maîtres de la
rhétorique qui pouvaient convaincre d’une chose et de son contraire. Ce qui a pour conséquence
de rendre la vérité inaccessible et la science impossible. Aussi, Aristote va s’atteler à définir
les formes de raisonnements corrects.
Le syllogisme est la forme d’un raisonnement correct. Il s’agit d’une suite de trois
propositions valides, dont si les deux premières (prémisses) sont vraies, la troisième
(conclusion) est alors irréfutable. Exemple : tous les hommes sont mortels. Or Socrate est
un homme. Donc Socrate est mortel.
Pour Aristote, une proposition valide se compose d’un sujet (ce de quoi on parle), d’un prédicat
(ce qui est affirmé) et d’un copule (ce qui lie le sujet et le prédicat). Exemple : dans la
proposition « le travail est une malédiction », « travail » est le sujet, « malédiction » le prédicat,
et « est » le copule. Les propositions peuvent être affirmatives ou négatives.
Cela conduit à trois principes auxquels les raisonnements doivent obéir : Le principe
d’identité : une affirmation est toujours identique à elle-même (A = A). Le principe de non-
contradiction : une affirmation ne peut être à la fois vraie et fausse (soit A est vrai ; Soit A
est faux) Le principe du tiers exclu : une affirmation et sa négation ne peuvent être toutes les
deux fausses (si A est vrai, alors non A est faux ; si A est faux alors, non A est vrai).
L’intérêt de la logique est d’être un instrument pour la science. Aristote a conçu la logique
pour être un outil de la science. Dans cette perspective, la logique est une technique
scientifique. Son utilité est essentiellement relative à la démonstration. Ainsi, les sciences
recourent à la logique pour démontrer leurs théories, donc mettre en forme les idées. La logique
devient une science à part entière à partir de l’exploitation des symboles mathématiques
(L’algèbre de Boole) pour représenter les propositions de manière à calculer la valeur de
vérité. On appelle cela le calcul des propositions. Cette mathématisation de la logique trouve
des applications dans la création de programmes informatiques.
Mais, la logique ne fournit pas de connaissances sur le monde. Elle ne concerne que le
raisonnement lui-même, la forme du discours et non son contenu. Ce qui peut constituer une
faille. Car, un discours peut être correct mais faux. Exemple : l’homme est un mammifère.
Or le chien est un mammifère, donc l’homme est un chien. Dans cet exemple, les principes
logiques sont respectés, mais l’information à laquelle on aboutit est matériellement faux.
Par ailleurs, il s’est développé plusieurs types de logique fondés des principes différents
de ceux d’Aristote. C’est ainsi que Hegel a mis en place la logique dialectique où une
affirmation et sa négation ne sont pas des opposés absolus, la négation étant le dépassement de
l’affirmation. Dans cette perspective, le vrai n’est ni l’affirmation (thèse), ni sa négation
(antithèse), mais est leur réconciliation (synthèse), alors que chez Aristote, le vrai est soit
l’affirmation, soit la négation. Cette différence montre qu’un raisonnement peut être dit vrai ou
faux en fonction du cadre logique de référence. Il y a donc plusieurs formes possibles de
rationalité.
Les mathématiques sont ensemble d’études qui portent sur les nombres et les figures
géométriques. Ces derniers sont des abstractions, c’est-à-dire des créations de l’esprit. C’est
pourquoi on dit des mathématiques qu’elles sont une science formelle, c’est-à-dire un ensemble
de connaissances et d’études dont l’objet est relatif aux opérations de la pensée ou de l’esprit.
La grandeur des mathématiques est exprimée par Galilée en ces termes : « la nature est un
livre écrit en langage mathématique ». Cela signifie qu’il y a une correspondance entre les
opérations de la pensée humaine et les lois de la nature. Cette correspondance vient du fait que
la nature fonctionne par des relations de causes à effets, qui sont le principe de la logique et de
la démonstration mathématique.
Cela rejoint la thèse de Pythagore, qui bien avant Galilée, affirmait que « tout est nombre ».
Autrement dit, le nombre est le principe fondateur du monde. Le nombre dont il est question
est « 1 », qui traduit le concept de l’unité, qui suppose que le monde est une unité où tout est
lié. C’est ce lien entre tout ce qui existe qui justifierait les relations de causes à effets (puisque
tout à une cause, qui serait l’effet d’une autre cause) et qui expliquerait la correspondance entre
les opérations de la pensée humaine et les lois de la nature.
L’exemple patent qui donne raison à Pythagore et Galilée est que les mathématiques sont le
sang et la chair des autres sciences. Autrement dit, les autres sciences se servent et ont besoin
des mathématiques pour expliquer les phénomènes qu’elles étudient, et donc pour livrer des
connaissances sur le monde.
Platon avait certainement, lui aussi, compris la valeur des mathématiques, dans la mesure où
il considérait que l’accès à la connaissance, au monde intelligible, nécessite une initiation aux
mathématiques. Pour lui, l’enjeu était de permettre à l’apprenti philosophe de se détourner des
jugements fondés sur les sens, et ainsi, au contact des abstractions mathématiques, le préparer
à la contemplation de l’Idée du Vrai. D’où la formule à l’entrée de son école : « nul n’entre
ici s’il n’est géomètre ».
Cependant, il faut déconstruire le mythe de l’absolu exactitude et fiabilité des
mathématiques.
D’abord comme toutes les autres sciences, les énoncés mathématiques peuvent être remis
en question. Par exemple, Lobatchevski et Riemann ont remis en question le postulat
d’Euclide sur les droites parallèles, ce qui a donné naissance aux géométries non-euclédienne.
Ils ont mis en lumière qu’au-delà d’un espace en 2 dimensions, une infinité de droites parallèles
peut passer par un même poinr M extérieur à une droite D.
Ensuite, les mathématiques ne sont qu’un jeu de l’esprit avec lui-même. Cela signifie
qu’elle ne repose pas sur des faits, mais sur des conventions. « 1 + 1 = 2 » n’est pas un fait réel,
mais une convention, un accord entre les esprits (la communauté scientifique) afin de permettre
les calculs et la démonstration. Aussi, les mathématiques ne donnent aucune connaissance sur
la réalité. Sans les autres sciences, elles n’auraient pas d’applications concrètes.
Enfin, les mathématiques ne peuvent résoudre les problèmes affectifs et moraux des
hommes. Face aux 3 questions fondamentales qui donnent sens à la vie humaine, question de
l’origine (d’où viens-je ?), de l’identité (qui suis-je ?), de la destination (où vais-je ?), elles sont
muettes.
Les sciences de la matière sont l’ensemble des études qui portent sur la matière, ses propriétés
et les lois qui régissent son mouvement. La matière est ce qui constitue les objets et les êtres
vivants, ce à partir de quoi les choses sont faites. De fait, l’étude de la matière peut permettre
de comprendre la nature et le fonctionnement du monde, de la nature, de l’univers.
L’origine des études sur la matière : Du point de vue de l’histoire de la philosophie, l’étude
de la matière commence avec les physiologues. En effet, pour comprendre l’origine du monde,
rationnellement, des penseurs nommés physiologues ont pris l’initiative d’observer la nature.
Aussi, l’étude de la matière commence dès lors qu’on applique le principe suivant : les
phénomènes du monde ont des causes naturelles qu’on peut connaitre grâce à
l’observation de la nature.
La progression dans l’étude de la matière : Aristote pensait que la matière est une substance,
c’est-à-dire ce qui reste, ce qui subsiste, malgré les changements. Cette idée repose sur
l’opposition qu’il fait entre la matière à la forme. Autrement dit, pour lui, la matière est
indéterminée. Ce qui explique qu’elle puisse composer une diversité d’objets et d’êtres ayant
des formes diverses. Aussi, de ce point de vue, on ne connaitra jamais la matière elle-même,
mais les différentes formes par lesquelles elle affecte nos sens.
Démocrite, Leucippe et Epicure (les atomistes), ont considéré que tout ce qui existe est
composé d’atomes, c’est-à-dire, de petits corps incasables, invisibles, qui en s’assemblant
forment les objets et les êtres. Dès lors, contrairement à Aristote, il donne à la matière une
réalité concrète et déterminée, connaissable. Il faut préciser qu’à cette époque (antiquité) aucun
outil ne pouvait confirmer l’existence des atomes. De manière générale donc, l’étude de la
matière relevait de l’observation, de la déduction et surtout de l’argumentation, d’un
point de vue théorique. L’étude de la matière était encore entendue comme philosophie de
la nature.
La grande révolution dans l’étude la matière s’opère avec Copernic et Galilée et leur
démonstration de l’héliocentrisme (le fait que la terre tourne autour du soleil). Cette
démonstration est basée sur des calculs et équations. Ce qui montre qu’on peut dépasser
l’argumentation théorique et expliquer les phénomènes à partir de formules mathématiques. A
ce fait, s’ajoute la réaction de Descartes contre la philosophie spéculative enseignée dans les
écoles, au profit d’une philosophie pratique qui rendrait l’homme « comme maitre et
possesseur de la nature ». Enfin, vient la méthode expérimentale qui a permis de confronter
les théories à la réalité afin de les confirmer ou de les infirmer. C’est ainsi que la science
moderne est née avec comme modèle et porte étendard la science physique.
Les limites de l’étude de la matière : imprécision ou absence d’outils d’observation, défaut
de raisonnement dans l’argumentation, erreur de calcul ou dans le protocole expérimentale.
L’influence de l’étude de la matière se manifeste par le recul de la superstition et des
dogmes. La connaissance qu’elle procure libère l’homme de sa peur à l’égard de la nature et
affaiblit l’emprise des pouvoirs religieux sur lui.
Mais, elles peuvent aussi alimenter des croyances et justifier des valeurs. Les atomistes
croyaient que la mort est séparation des atomes, donc il n’y a pas de vie après. David Bohn,
pour qui, du point de vue de la physique quantique, l’univers serait une structure infinie
d’ondes, pensait que la mort est un changement de fréquence, et donc qu’il y a une vie après la
mort.
Les sciences du vivant renvoient à l’ensemble des études qui portent sur le vivant. Il faut
entendre par « vivant » les êtres qui sont doués de vie. L’origine de l’étude du vivant :
l’ancêtre des sciences du vivant est la biologie. Composé des mots grecs « bio », qui signifie
« la vie » et de « logos », qui renvoie au discours savant, le terme « biologie » apparait pour la
première fois au 19ème siècle sous la plume du naturaliste français Lamark. Alors que la vie ne
faisait pas encore l’objet d’une étude particulière, il définit la biologie comme la science des
facultés qui sont propres aux animaux et aux végétaux.

Dès lors, la question de l’âme est mise hors du champ d’étude du vivant. La compréhension
du vivant se limitait à la distinction entre l’être animé et l’être inanimé. Le premier, vivant,
étant perçu comme celui qui possède une âme. L’âme vient du grec anima qui signifie, ce qui
animé ou ce qui met en mouvement. Chez Aristote, l’âme est entendue comme le principe
régulateur d’un organisme vivant, voire la cause première de son existence : l’âme végétative
associée à la faculté de croitre et d’engendrer, l’âme animale ou sensitive, associée à la faculté
de sentir, et l’âme humaine associée à la faculté de connaitre. Une telle perception du vivant
est peu productive pour constituer une science.

L’étude du vivant est donc celle des trois facultés essentielles communes à tous les êtres
vivants : la relation constante avec le milieu extérieur, qui renvoie aux interactions avec les
autres êtres vivants ainsi qu’à l’alimentation et l’occupation du milieu ; la reproduction, qui
renvoie aux comportements sexuels et la relation des géniteurs à leur progéniture ;
l’autorégulation, qui suppose de comprendre le fonctionnement interne des organismes
vivant, ainsi que leur croissance. L’étude de ces trois facultés se réalise par l’observation,
l’analyse des données et l’expérimentation, comme dans les sciences de la matière.

Aussi, l’étude du vivant est possible à partir du postulat selon lequel le vivant peut être
connu comme un objet dans les sciences de la matière. Ce postulat prend appui sur la
conception mécanique de Descartes. Pour lui, les animaux sont comme des machines dont les
organes sont les rouages qui ont été mis en mouvement par une impulsion initiale. Le corps
humain est lui aussi perçu comme une machine en mouvement. Cela suppose une
désacralisation du corps, humain notamment, ce qui a permis de réaliser des dissections de
manière à faire évoluer la connaissance anatomique. Aujourd’hui, l’approche mécanique du
vivant a muté en approche génétique. Le vivant est perçu comme étant le produit de son code
génétique ou ADN. En ce sens, l’ensemble de ses facultés seraient compréhensible grâce au
décodage des gènes.

Les limites des sciences du vivant sont d’abord l’absence de connaissance sur l’origine de
la vie, le passage de la matière inanimée à la matière animée reste un mystère, ensuite aucune
science du vivant n’étudie le vivant dans sa totalité, chacune se spécialise sur l’étude d’une
partie et peut se retrouver en face d’objets inanimés, enfin les expériences faites en
laboratoire ou dans le milieu naturel peuvent modifier le comportement des êtres vivants.

L’influence des sciences de la matière se perçoit par les progrès en médecine. Car plus l’on
aura de connaissances sur le vivant, plus les pratiques médicales seront performantes. Leur
influence se manifeste aussi à travers l’avènement des biotechnologies, qui donnent la
possibilité d’exploiter le vivant à fin de produire des biens et services, notamment dans le
domaine pharmaceutique (création de médicament et vaccins), cosmétiques (création de peau
artificielle pour éviter des tests sur les animaux), agroalimentaires (création de plantes plus
résistantes), etc.
Les sciences de l’homme ou sciences humaines et sociales sont l’ensemble de connaissances
et études qui portent sur l’homme, c’est-à-dire sa réalité individuelle et collective. Il s’agit de
comprendre les rapports que l’individu entretient avec la société, et de saisir les différentes
manières possibles d’organiser et la société.
L’origine des sciences de l’homme peut être située dans le questionnement philosophique des
penseurs comme Socrate, Platon et Aristote. En effet, tour à tour, ils se sont efforcés de
répondre à la question relative à la gouvernance d’une société : quelle est la meilleure forme
de gouvernement ? Or, pour répondre à cette question il faut pouvoir rendre compte de ce qu’est
la société et plus fondamentalement de ce qu’est l’homme.
Seulement, le questionnement philosophique sur l’homme n’est pas à proprement parler
un questionnement scientifique. Aussi, les sciences humaines et sociales vont réellement
éclore lorsque la réflexion sur l’homme et la société va se détacher de la philosophie pour
épouser, ou s’efforcer d’épouser, la méthode des sciences de la nature (matière). Il s’agit donc
de pourvoir ou de vouloir penser et étudier l’homme comme le scientifique en face d’un objet
matériel. Cela suppose une objectivité (pure) : faire taire ses croyances, valeurs et convictions
pour ne considérer que les faits tels qu’ils sont.
Le problème que pose l’étude scientifique de l’homme et de la société est que l’homme est
à la fois le sujet et l’objet d’étude. En effet, celui qui entreprend d’étudier l’homme est aussi
un homme engagé dans un contexte social et produit d’une culture déterminée. Le risque est
donc grand que son contexte social et sa culture influencent sa lecture des faits. C’est dans ce
sens que des idéologies, comme le nazisme, ont souvent eu tendance à produire des études qui
justifient leurs valeurs. Par ailleurs, l’homme n’est pas un objet matériel, il est en constante
mutation, il peut changer. De plus, il peut, à certains points de vue, demeurer un mystère dans
la mesure où il peut masquer, dissimuler ses intentions, et même agir imprévisiblement.
Aussi, la méthode la plus utilisée dans l’étude de l’homme est l’herméneutique. Alors que
dans les sciences de la nature, il s’agit d’expliquer les phénomènes à l’aide de rapport de causes
à effets, dans les sciences de l’homme il est question de comprendre la signification des actes
et comportements. Cette compréhension relève d’une interprétation des faits. L’interprétation
elle-même relève d’une argumentation reposant sur les principes logiques qui structurent de
discours scientifiques.
Par ailleurs, l’étude de l’homme peut parfois obéir à un protocole expérimental. En effet,
en psychologie, des tests sont réalisés avec des groupes de personnes afin d’observer leurs
réactions. Les données issues de cette observation sont analysées afin d’en déduire des
conclusions, connaissances relatives à ce qui faisait l’objet de l’expérience. Aussi,
l’échantillonnage, c’est-à-dire le nombre de personnes testées, ainsi que la répétition de
l’expérience, permettent d’indiquer le degré de fiabilité des données recueillies et des
conclusions auxquelles on aboutit. Plus le nombre de personnes testées est grand et plus la
répétition apporte les mêmes données, plus on considérera qu’elles sont fiables. Enfin, l’étude
de l’homme peut recourir aux données issues des sciences de la nature. Car nos
comportements correspondent parfois à des réactions chimiques, physiologiques, et
instinctives, liées à nos gènes et à notre constituions organiques.
La vérité. Il existe plusieurs définitions de la vérité, qui renvoient aux différentes manières de
la concevoir. Les Sceptiques pensaient que la vérité est ce qui est démontrable. Aussi
pratiquait-il le doute afin d’exiger des preuves irréfutables. Seulement, à force de douter de
tout, ils ont fini par considérer que la vérité n’existe pas. Les Sophistes affirmaient « à chacun
sa vérité ». Autrement dit, la vérité est une opinion ou une conviction qui a été défendue de
manière à convaincre. Le problème est qu’un discours peut-être trompeur, mais convainquant.
Les thèses sceptiques et sophistes imposent de clarifier les critères de vérités, c’est-à-dire les
éléments fondamentaux à partir desquels on peut reconnaitre la vérité. Les voici :

La vérité formelle : elle est la conformité du discours avec les règles de la raison ou du
raisonnement. Cette vérité est le propre de la logique et des mathématiques. Elle est arbitraire.
Arbitraire, car les règles du raisonnement sont des créations de l’esprit. Une vérité formelle ne
repose pas sur des données issues du monde naturel. Elle est aussi conventionnelle. Cela veut
dire que les hommes doivent se mettre d’accord pour valider et respecter ces règles afin de
permettre la démonstration, l’échange de connaissances, et de donner une forme précise au
discours scientifique.

La vérité matérielle : elle est l’adéquation entre le discours et la réalité. Cela signifie que ce
que l’on dit doit être conforme à ce qui est ; le discours doit décrire ou traduire le plus
fidèlement possible le réel, ce qui est observable. Elle est dite objective, car elle est basée sur
des faits vérifiables par tous plutôt que sur des convictions ou des expériences personnelles.
La vérité matérielle est considérée comme devant être universelle. Cela signifie qu’elle est
valable partout.

La vérité formelle et la vérité matérielle constituent les vérités scientifiques. La


caractéristique fondamentale des vérités scientifiques est qu’elles sont provisoires, c’est-à-
dire qu’elles sont considérées vraies tant que rien (idées ou expériences) n’apporte la preuve
de leur invalidité.

La vérité de foi : elle est la conformité du discours avec les dogmes religieux. Autrement dit,
ce que l’on dit doit être en accord avec les principes sur lesquels repose la religion de notre
choix. Elle est subjective dans la mesure où sa véracité repose sur l’assentiment, c’est-à-dire
la valeur morale qu’on lui donne. Aussi, elle n’a de valeur que pour ceux qui y croient. Elle est
aussi absolue. Autrement dit, elles sont considérées comme étant toujours vraies et ne peuvent
être remises en question.

Les contraires de la vérité : l’erreur, défaut de raisonnement, non-respect involontaire des


règles du discours, incohérence dans le processus d’argumentation ou de démonstration.
L’erreur peut être considérée comme une limite de la connaissance. L’illusion : On peut
considérer que l’illusion découle de l’erreur. Généralement, on parle d’illusion par opposition
à la vérité matérielle. Dès lors, elle apparait comme un défaut de perception voire comme une
croyance qui dénature la réalité. Cela peut créer un déni de la vérité, c’est-à-dire le refus
d’accepter la vérité, car elle heurte nos croyances. Le mensonge : discours qui masque la
réalité ou la présente autrement que ce qu’elle est. Il est intentionnel. C’est pourquoi le
mensonge s’oppose à la vérité du point de vue de la morale, en tant que faute à blâmer.
Les passions : le mot « passion » vient du grec pathos qui signifie « souffrance », supplice.
Dans un sens plus large, les passions sont l’ensemble des pulsions instinctives et émotionnelles
de l’homme.

Les passions comme obstacles au bonheur

Pour les anciens grecs, les passions renvoient à un état de passivité de la volonté. Cela signifie
que l’on est plus maître de soi, que l’on subit des forces extérieures à notre volonté. Or pour
les Stoïciens, le bonheur consiste à se concentrer sur ce qui dépend de soi, et à délaisser ce qui
ne dépend pas de soi. C’est pourquoi eux, le bonheur est apathos, c’est-à-dire absence de
passions.

De même chez Epicure, les passions s’apparentent à des désirs vains, par oppositions aux
désirs naturels. Alors que les désirs naturels sont nécessaires et faciles à satisfaire, les désirs
vains sont non nécessaires et difficiles à combler. La conséquence est qu’ils agitent l’âme
d’inquiétude et insatisfaction, ce qui entrave le bonheur. Car ce dernier est pour lui ataraxie,
paix de l’âme.

Les passions comme obstacles à la raison

Pour Kant « l’inclinaison que la raison du sujet ne peut pas maîtriser ou n’y parvient
qu’avec peine est la passion ». Autrement dit, la passion est un désir qui fait obstacle à
l’exercice normal de la raison. L’exercice normal de la raison se caractérise par la tempérance
et l’objectivité, tandis que la passion s’exprime par l’emportement et la subjectivité. Autrement
dit, l’être passionné va lire la réalité de manière à toujours justifier sa passion. C’est ainsi que
la raison se met au service de la passion et que la passion plonge dans l’illusion.

Les passions comme sources d’épanouissement

Pour Nietzsche, « attaquer les passions à la racine, c’est attaquer la vie à la racine ». En
disant cela, il affirme que les passions constituent la force vitale de l’homme. Nietzsche fait
allusion à cette force en termes de volonté de puissance, c’est-à-dire l’élan naturel à vivre et à
interpréter le monde de manière à s’en rendre maître, à l’organiser à son avantage. Dès lors,
c’est parce que l’homme est passionné qu’il est capable de se fixer des buts et de les réaliser.
Hegel le confirmera à travers cette citation : « Rien de grand ne s’est accompli dans le monde
sans passion »

Ce sont nos jugements sur les passions qui sont bons ou mauvais

Pour David Hume « ce n’est pas la passion qui est déraisonnable, c’est le jugement ».
Autrement dit, c’est ce que nous disons d’elle qui la rend malheureuse et non le contraire. Cela
suppose que ceux qui dénigrent la passion en ont une mauvaise compréhension. En effet,
Epicure voulant limiter le bonheur de l’homme à la satisfaction des désirs naturels (manger,
boire, dormir), n’a pas réalisé que les passions portent l’existence de l’homme au-delà de la
survie. De même, Kant, en dénigrant la passion parce qu’elle produit des illusions, a manqué
de voir qu’elle est la source de la créativité de l’homme.
L’Etat est l’institution qui gouverne un peuple donné selon des lois déterminées à l’intérieur
d’un territoire délimité. Les caractéristiques fondamentales d’un Etat sont donc le peuple, le
droit et le territoire. Elles fondent sa souveraineté, c’est-à-dire son indépendance vis-à-vis
d’autres Etats.

L’origine de l’Etat :

Selon les théoriciens du contrat social, l’Etat provient de la nécessité de faire cesser « la
guerre de tous contre chacun » due à l’absence de lois dans l’état de nature. L’état de nature
est une théorie (une hypothèse) philosophique. Chez Rousseau, l’état de nature sert à montrer
que le peuple se forme lorsque les hommes décident de s’organiser autour d’un pouvoir
politique et juridique. L’Etat est ce pouvoir, entendu comme expression du besoin d’établir une
société où les hommes sont égaux, où chacun a les mêmes droits et les mêmes devoirs que
tous.

Selon Hegel, puisque l’état de nature n’a jamais existé, l’Etat est fondé sur l’histoire et les
traditions d’un peuple. Il est donc l’expression de l’idéal de justice d’un peuple. C’est pourquoi,
l’Etat garantit la liberté : chacun est libre de s’exprimer dans le cadre prévu la loi. Car la liberté
se manifeste essentiellement et concrètement par les droits accordés par l’Etat.

Les missions de l’Etat :

Selon les philosophes modernes, le rôle de l’Etat est d’assurer la sécurité du peuple (Hobbes),
l’égalité des hommes devant la loi (Rousseau), la liberté de chacun (Hegel). Pour y parvenir,
l’Etat est en droit d’utiliser la violence si nécessaire.

Selon les philosophes de l’antiquité (Platon, Aristote), le but de l’autorité politique est
d’éduquer les hommes à la vertu, c’est-à-dire à la disposition à faire le bien. Autrement dit,
l’Etat doit mettre en place les conditions d’un développement moral des individus. Cela
s’observe aujourd’hui avec le droit à l’éducation pour tous dans les Etats démocratiques.

Les dérives de l’Etat :

Le gouvernement du plus fort : il renvoie à l’utilisation des ressources de l’Etat et de la justice


pour les intérêts des gouvernants au détriment des gouvernés. Machiavel décrit l’institution de
ce gouvernement par l’utilisation de la peur et de violence pour soumettre le peuple. Chez Karl
Marx, cela passe par la soumission de l’Etat à la force du capital qui s’observe par
l’exploitation du prolétaire par le bourgeois.

La déchéance de l’homme : elle est la corruption de l’homme, c’est-à-dire la mort de sa


volonté à s’autodéterminer. Chez Nietzsche cela renvoie au fait que l’Etat s’apparente à une
divinité à qui l’homme doit tout, de telle sorte qu’il se soumet aveuglément à sa propre création.
Pour Rousseau, cela tient au fait que la vie sociale cultive en l’homme des désirs dont il
devient esclave. C’est pourquoi pour lui « l’homme est partout dans les fers ».
La justice : Il faut distinguer la justice au sens de droiture morale et la justice au sens de
l’institution juridique. La première est un ensemble de recommandations non écrites sur ce
qui est permis et interdit de faire. Leur transgression n’est pas punie. La seconde renvoie à
l’ensemble des textes, de lois écrites (qu’on appelle droit positif) dont l’application est garantie
par la force publique, et dont la transgression entraîne des sanctions.

Les voies de la justice chez Platon : Pour Platon, l’institution juridique est purement
l’expression de la droiture morale. Les lois servent à corriger la nature humaine, qui a tendance
à pencher pour l’injustice sitôt qu’on peut la commettre sans être puni. Les voies qui mènent à
la justice sont : la vérité, parce que l’on ne peut être juste en tenant des discours mensongers
et trompeurs ; l’ordre, parce que sans le respect absolu des lois, l’homme peut se laisser aller
à l’injustice en recherchant son bien personnel ; la paix, car dans un état de guerre les exigences
de vérité et d’ordre ne sont plus valables.

L’application de la justice par l’institution juridique : On distingue la justice cumulative


qui renvoie au principe selon lequel les hommes sont égaux devant la loi : ils possèdent les
mêmes droits et les mêmes devoirs ; la justice distributive qui est la redistribution des biens
et des honneurs dans une société. Elle est fondée sur la protection du droit de propriété et sur
l’idée selon laquelle les biens et les honneurs s’obtiennent à force de travail et de droiture.
Selon cette justice, chacun reçoit ce qu’il mérite ; la justice répressive : son but est de s’assurer
que chacun observe son devoir et respecte les droits de tous. Elle sanctionne donc ceux qui
transgressent la loi. Elle sert à réparer les dommages liés à une infraction ou à un crime par des
sanctions jugées de même valeur (amendes, peines de prison, etc.)

La transgression de la justice par l’institution juridique : Si les lois transgressent les


valeurs morales, alors elles peuvent être déclarées injustes. Cela signifie que les lois qui
portent atteintes à la vérité, à la paix, à l’ordre, plus largement, à la dignité humaine, sont des
lois injustes. Si la loi est au service d’intérêts privés au détriment de l’intérêt général, elle
sera dite injuste. Cela signifie qu’un système judiciaire qui ne fait pas preuve d’impartialité
est injuste. Jean de Lafontaine exprimait le manque de partialité de la justice avec ces propos
: « selon que vous soyez puissant ou misérable, les jugements de cours vous rendront blanc
ou noir ».

La conciliation de la justice avec l’intérêt personnel : Epicure simplifie l’idée de justice en


affirmant qu’elle est un contrat entre des individus qui cherchent la préservation de leurs
intérêts. Elle renvoie à la défense et à la préservation de sa vie contre toute menace. On peut
dire que cette approche de la justice est au fondement de l’Etat de droit. Car, l’appareil juridique
de ce dernier met l’accent sur la protection des libertés individuelles.

La relativité de l’idéal moral de justice : On a tendance à considérer injuste ce qui n’est pas
conforme à nos croyances, ou simplement à nos intérêts. Nietzsche insiste sur le fait que la
justice soit fondée sur un rapport de force. Autrement dit, ce qui est déclaré juste n’est
généralement que l’expression des valeurs ou des croyances dominantes, voire de ceux qui ont
une influence majeure dans la société. C’est pourquoi on peut remarquer que les lois et la
morale peuvent être différentes d’un pays à l’autre, en fonction des valeurs dominantes propre
à chaque culture.
Le devoir peut être définit comme ce qui est recommandé de faire et de ne pas faire. Il est
associé aux notions de dette (ce qu’il faut rendre), et d’obéissance (ce qu’il faut respecter).
L’idée de nécessité (il faut ; ce qui est nécessaire de faire) inscrite dans le devoir permet de le
présenter souvent comme une obligation, ce qui est exigé de faire, mais aussi comme un
interdit, ce qui est exigé de ne pas faire.

Idées négatives sur le devoir

Il apparait souvent que le devoir s’oppose au plaisir. Cela signifie qu’il procure du déplaisir,
voire de la souffrance. C’est le point de vue des libertins qui pensent que les obligations
morales et religieuses sont basées sur des croyances erronées, qui empêchent l’homme de jouir
de son esprit et de son corps, conformément à sa nature d’être de désir. Par conséquent, le
respect scrupuleux des obligations morales peut rendre malheureux. C’est l’une des idées
présentées par le Marquis de Sade dans Sophie ou les malheurs de la vertu où la protagoniste
va de malheur en malheur en raison de son penchant à respecter la morale religieuse sans tenir
du vice de la société.

L’opinion commune pense généralement que le devoir est exclusivement un ensemble de


règles que l’on nous impose, sans notre consentement. Dans ce sens, le devoir peut
commander d’agir tel que nous ne le voulons pas, ou alors, il peut interdire d’agir comme nous
le désirons. C’est ainsi que le devoir peut apparaître comme une injustice, c’est-à-dire une
contrainte qui ne respecte ni notre volonté, ni nos valeurs, ni nos croyances. L’injustice du
devoir peut être comprise avec les anarchistes, notamment Joseph Proudhon, pour qui les
devoirs civiques sont des chaînes d’esclavage du peuple au profit des puissants.

Idées positives sur le devoir

Dans les sociétés démocratiques, les devoirs sont des engagements. Un engagement renvoie
à ce que l’on accepte de faire ou de ne pas faire en contrepartie des droits et avantages que l’on
nous accorde. Kant exprime cette relation entre le devoir et le droit à travers l’impératif
catégorique : « agis de telle sorte que la maxime de ta volonté puisse en même temps valoir
comme principe de législation universelle ». Autrement dit, nous devons avoir la bonne
volonté de reconnaître que ce que nous exigeons des autres s’applique à nous-mêmes. La
conséquence est que ce qui est exigé de nous est ce que nous pouvons naturellement exiger des
autres. Ainsi, sans le devoir, aucun droit n’aurait de valeur, et la liberté serait menacée.

On peut considérer que le devoir est une responsabilité envers soi-même. Cela signifie
qu’il y a des obligations à respecter afin de garantir l’épanouissement personnel. La notion du
devoir peut être liée à celle de la dignité. Par dignité, on peut entendre le sentiment qu’une
personne peut avoir de sa propre valeur. Pour Nietzsche, le devoir est véritablement au service
de la dignité lorsqu’il permet d’éteindre ce qui en soi et autour de soi entrave l’expression du
sentiment de grandeur. Dans ce sens, celui qui a un talent particulier doit, pour exprimer la
grandeur que lui confère ce talent, respecter les obligations qui lui permettront d’exploiter ce
dernier au maximum de ses potentialités.
La violence : le terme violence vient du latin « vis » qui veut dire force. Elle désigne le fait de
soumettre quelqu’un ou un groupe de personnes, de s’attaquer à son intégrité, d’exercer une
pression contre sa volonté, par le recours à la force.

Légitimation de la violence

La légitime défense autorisée par le droit. La loi reconnait à chaque individu le droit d’user
de violence pour se défendre contre toute agression qui menace sa vie et ses biens. Lorsque
l’usage de violence pour légitime défense a été prouvé et que le degré de violence utilisée pour
se défendre est jugée proportionnel à l’agression, l’auteur de l’acte n’est pas condamnable.

Le monopole de la violence par L’Etat : dans la théorie du contrat social de Thomas Hobbes,
l’Etat a été institué pour mettre fin à « la guerre de chacun contre tous » qui avait lieu dans
l’état de nature (situation de l’homme avant l’avènement de société). Cela signifie que l’Etat a
pour rôle d’assurer la sécurité des individus, préserver leur vie et leurs biens de toutes menaces,
afin d’assure l’ordre social. L’Etat peut donc utiliser la violence pour dissuader les hommes
d’être violents ou pour les punir de les avoir été.

Machiavel affirme que « La violence politique est nécessaire car les hommes sont méchants
». Autrement dit, pour garantir l’ordre dans son pays, ainsi qu’assurer la conservation de son
pouvoir, le gouvernant est contraint d’utiliser la violence, en raison des prédispositions de
l’homme à être violent. Dès lors, Machiavel pose l’usage rationnel de la violence comme
moyen de conquérir et de conserver le pouvoir. Cela veut dire que l’usage de la violence ne
doit pas être l’expression d’une émotion, mais le résultat d’une décision mûrement réfléchit,
qui sert une ambition liée à la grandeur d’un pays.

Condamnation de la violence

Pour Sartre, « la violence, sous quelque forme qu’elle se manifeste, est un échec ». L’échec
dont il est question est celui de la réalisation de la cohabitation pacifique des hommes. En effet,
l’homme étant condamné à vivre avec ses semblables se doit de bannir ses comportements
violents pour sa propre sécurité et celle des autres. Ainsi, parce qu’il faut préserver la paix
civile, la violence n’est pas à encourager dans l’état social.

Pour Rousseau, « le plus fort n’est jamais assez fort pour rester le plus fort ». Cela signifie
qu’un pouvoir basé sur la violence ne peut durer. C’est pourquoi il vaut mieux fonder le pouvoir
sur le droit. Dans cette perspective, Rousseau invite les hommes à délaisser la force pour fonder
les rapports sociaux sur le respect des lois élaborées avec la participation de chacun.

Le concept de la non-violence Il s’agit de privilégier d’autres valeurs comme la tolérance, la


bienveillance et l’amour du prochain au détriment de la violence. L’humain étant fait de valeurs
nobles et humanistes, il n’est plus question de recourir à la violence pour régler un quelconque
problème. C’est pourquoi Gandhi affirme : « l’humanité court à sa perte si le monde
n’adopte pas la non-violence ». Autrement dit, la violence n’est pas une solution, au contraire,
elle détruit l’homme.
La liberté : elle renvoie à la possibilité d’agir sans contrainte, c’est-à-dire à vivre selon sa
propre volonté. Problème de la liberté : elle est souvent considérée comme absolue, totale,
c’est-à-dire absence totale de contrainte. Or, nous faisons tous les jours l’expérience de la
contrainte. Dès lors, quelle est la nature de la liberté ? (quelles sont les différentes conceptions
de la liberté ?)

La liberté naturelle (absence de lois) : dans la théorie de l’état de nature, on suppose qu’avant
l’avènement de la société, il n’y avait pas de loi. Car chaque homme vivait seul et uniquement
préoccupé par la satisfaction de ses besoins. La liberté renvoie alors à la capacité de se satisfaire
par tous les moyens. Toutes les actions sont légitimes.

La liberté anarchique (absence de pouvoir) : selon les anarchistes, L’Etat et la religion sont
utilisés par les puissants afin d’exploiter le peuple et le priver de liberté. Les anarchistes,
notamment Joseph Proudhon, font la promotion d’une société où il n’y a « ni maitre ni Dieu
». Autrement dit, une société où chacun est son propre chef. Cela pour permettre aux individus
de s’organiser, par eux même, sans l’influence d’un pouvoir suprême (Etat ou religion).

Le libertinage (absence de morale) : selon les libertins, la morale est un ensemble de règles
inventées qui empêche l’homme d’être heureux. Pour eux, le bonheur est la satisfaction de tous
les besoins et désirs. En clair, les libertins sont partisans de la liberté naturelle. Car, pour eux,
le vice c’est refuser de satisfaire un désir sous prétexte qu’une loi morale l’interdit. Ainsi, la
liberté est recherche du plaisir, sans recours à la morale, et même au détriment d’autrui.

La liberté civile (respect des lois) : selon les théoriciens du contrat social, elle renvoie à
l’abandon de la liberté naturelle afin de garantir l’égalité. Aussi, se manifeste-t-elle par les
droits accordés par la loi. Selon Rousseau, la liberté civile préserve la liberté naturelle, car la
loi est l’expression de la volonté générale. Cela signifie qu’elle est un accord entre les hommes
de sorte qu’en obéissant à la loi, chacun obéit à lui-même, puisqu’il a (ou peut) participer à
l’élaboration de la loi.

La responsabilité (autonomie) : selon les existentialistes, la liberté se caractérise


fondamentalement par la capacité de choisir. Cette capacité met l’homme face à la nécessité
d’assumer ses choix, sans excuse. La liberté renvoie donc à agir sans mauvaise foi. La mauvaise
foi consisterait à dire que nos actions sont le résultat d’une force extérieure à notre volonté
(inconscient, Dieu, destin, société). Dans cette perspective, l’homme est toujours libre, car il a
toujours le choix.

La libération (augmentation de la puissance d’action) : selon les vitalistes, la liberté est


pensée comme l’élan naturel de tout être vivant à conquérir son environnement, à l’organiser à
son avantage. Aussi la liberté renvoie à une puissance d’action sur le monde. Pour Nietzsche,
cette puissance augmente en fonction des résistances qu’elle rencontre. C’est pourquoi dit-il :
« ce qui ne tue pas rend plus fort ». Autrement dit, c’est dans l’adversité que la liberté
s’exprime en tant que plaisir de vaincre.
Le bonheur : état de satisfaction durable, voire permanent.

Recherche du plaisir ou de la satisfaction totale des désirs comme absence de bonheur


Le bonheur et le désir s’opposent. En effet, le désir renvoie à un sentiment de manque, tandis
que le bonheur à un état de satisfaction. Donc, aussi longtemps que l’on désire, l’on est pas
heureux. Platon exprime cette idée dans le Gorgias, avec l’image d’un tonneau percé. Ce
tonneau représente la tendance de l’homme à désirer sans cesse. De fait, l’impossibilité de le
remplir illustre l’impossibilité de parvenir au bonheur en recherchant à satisfaire
continuellement nos désirs. Par conséquent une vie vouée à la recherche du plaisir
(satisfaction des désirs) est une vie malheureuse.

Recherche du plaisir ou satisfaction rationnelle des désirs comme voie vers le bonheur
Pour Epicure, il existe trois types de désirs : les désirs naturels et nécessaires (manger, dormir,
boire), les désirs naturels et non nécessaires (sexuels et esthétiques), les désirs vains (richesse,
gloire, honneur, pouvoir). Savoir les distinguer et privilégier les désirs naturels et
nécessaires est la voie royale qui mène au bonheur. Car, ils sont plus aisés à satisfaire et
permettent d’atteindre l’ataraxie, c’est-à dire la paix de l’âme (absence d’inquiétudes et
d’insatisfaction dans la conscience). Or, les désirs vains sont plus difficiles à satisfaire et sont
sources d’agitation constante. En clair, pour Epicure, le bonheur est plaisir au sens de
satisfaction des désirs naturels et nécessaires. Ce plaisir n’est possible que par une limitation
des désirs grâce à la raison.

Le bonheur comme satisfaction du désir d’affirmation de soi


En affirmant que le désir est l’essence de l’homme, Spinoza indique que c’est à partir et grâce
à ses désirs que l’homme se construit. Cela signifie que le désir peut être perçu comme la
motivation fondamentale de nos actions. C’est le sentiment de manque qui incite au travail, à
la transformation du monde et de soi-même. Le désir apparaît alors comme une force qui porte
l’homme. Nietzsche fait allusion à cette force en termes de volonté de puissance, c’est-à-dire
l’élan naturel à repousser ses limites. Dans cette perspective, le désir n’est plus recherche de
ce que l’on ne possède pas encore, mais volonté d’exprimer son potentiel, de le libérer, de le
développer. Ainsi, le bonheur devient sentiment de puissance, c’est-à-dire plaisir
d’exprimer ses qualités.

La question de la souffrance
Freud a déterminé que l’homme est animé par deux tendances fondamentales : éviter la
souffrance et rechercher le plaisir. On peut considérer que la conception négative des désirs (et
donc du plaisir), ainsi que la limitation des désirs (qui réduit le plaisir à la satisfaction des désirs
naturels et nécessaires), correspondent exclusivement à la volonté d’éviter la souffrance.
Bernard Werber exprime cela en affirmant que « les hommes ne veulent pas construire leur
bonheur, ils veulent seulement réduire leur malheur ». La cause serait la croyance selon
laquelle le bonheur est un état de satisfaction permanent. Or, pour Abraham Maslow, une
satisfaction est toujours temporaire. L’expérience de la souffrance, elle aussi temporaire,
permettrait donc de comprendre ce qui peut faire notre bonheur, et devrait nous motiver à le
conquérir.

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