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POSTÉ
LE 30/11/2021
PAR
BÉATRICE BON MICHEL
La question de la prise en compte des enjeux climatiques par les acteurs financiers s’invite prog ressivement
dans les débats. Le cadre de contrôle interne se doit d’intég rer ces nouveaux facteurs de risque qui peuvent
influer sur le business model.
Le comité de Bâle vient d’émettre un document consultatif quant aux bonnes pratiques sur la
gestion des enjeux climatiques[1]. Le thème est d’actualité et, dans la continuité des rapports sur
cette thématique[2]. Le comité de Bâle cherche ainsi à cadrer le dispositif de gouvernance sur ce
sujet.
Nous reprenons ci-après les principaux éléments de ce document, structuré autour de 18 principes,
en les traduisant en préconisations.
Les banques doivent gérer les risques financiers liés au climat d’une manière proportionnée à la
nature, à l’échelle et à la complexité de leurs activités et en fonction de leur appétence au risque.
Les risques liés au climat peuvent avoir des impacts très diversifiés en termes de secteurs et de
zones géographiques concernés.
De plus, les enjeux climatiques peuvent influer sur les risques sur des périodes plus longues que 2 à 3
ans, durée généralement liée à la planification des fonds propres.
La banque doit ainsi disposer d’un dispositif permettant de s’installer dans la durée tout en étant
flexible et réactif eu égard aux incertitudes futures.
Préconisations
S’assurer que le conseil et la direction générale ont une compréhension adéquate des risques
financiers liés au climat et que la direction générale dispose des compétences et de l’expérience
adéquates pour gérer ces risques. Si nécessaire, les banques doivent renforcer le niveau d’expertise
du conseil et des dirigeants.
Principe 3 : Les banques doivent adopter des politiques, procédures et contrôles appropriés et les
mettre en œuvre au sein de l’organisation, pour assurer une gestion efficace des risques financiers
liés au climat.
Préconisations
Inclure une définition et une attribution claires des responsabilités liées au climat et des lignes
hiérarchiques dans l’ensemble de l’organisation dans le cadre du contrôle interne.
Préconisations
Élaborer des processus permettant d’évaluer l’impact sur la solvabilité des risques financiers liés
au climat qui peuvent se manifester au cours de l’horizon de planification des capitaux (ICAAP).
Confidentialité
Evaluer si les risques financiers liés au climat sont susceptibles d’entraîner des sorties nettes de
trésorerie ou un épuisement des réserves de liquidités, dans l’hypothèse d’un maintien du statu
quo et de conditions de stress.
Construire des scénarii avec des horizons temporels pertinents afin d’évaluer l’impact éventuel sur
l’adéquation de la liquidité (ILAAP).
Préconisations
Intégrer ces enjeux dans le cadre d’appétence au risque (Risk Appetite framework – RAF) et suivi
de cette appétence.
S’assurer, en tant qu’instance de gouvernance, de la prise en compte de ces enjeux, selon leur
significativité.
Evaluer régulièrement les risques financiers liés au climat et fournir des définitions et des seuils
clairs (limites) relatifs à ces risques.
Intégrer les enjeux de concentrations, en particulier celles liées à l’industrie, aux secteurs
économiques et aux zones géographiques.
Elaborer des indicateurs clés de risque appropriés pour une gestion efficace des risques
significatifs liés au climat, indicateurs qui s’inscrivent dans le circuit d’information et de
communication (dispositif d’escalade).
Préconisations
Disposer de capacités d’agrégation des données sur les risques afin de faciliter l’identification et
la déclaration des expositions aux risques, des concentrations et des risques émergents.
Disposer de systèmes permettant de collecter et d’agréger les données relatives aux risques
financiers liés au climat dans l’ensemble du groupe bancaire, dans le cadre de la gouvernance
globale des données.
Trouver une situation intermédiaire lorsque des données fiables ou comparables sur le climat ne
sont pas disponibles ; possibilité d’utiliser des approximations et des hypothèses raisonnables
comme alternatives dans les rapports internes, afin d’améliorer la qualité des données.
Impliquer activement les clients et les contreparties et collecter des données supplémentaires
afin de mieux comprendre les risques financiers liés au climat.
Mettre en place des reportings adaptés et périodiques
Confidentialité
7. INFLUENCE DES ENJEUX CLIMATIQUES SUR LA
GESTION DU RISQUE DE CRÉDIT
Principe 8 : Les banques doivent prendre en compte l’impact des facteurs de risque liés au climat sur
leurs profils de risque de crédit et veiller à ce que les systèmes et processus de gestion du risque de
crédit tiennent compte des risques financiers importants liés au climat.
Préconisations
Disposer de politiques et de processus de crédit clairement définis pour intégrer ces facteurs de
risque dans le processus de gestion du risque de crédit (y compris risque de contrepartie).
Prendre en compte les risques financiers importants liés au climat dans l’ensemble du cycle de vie
du crédit ainsi que dans le processus d’intégration et du suivi continu des profils de risque des
clients.
Surveiller le risque de concentration lié aux enjeux climatiques : identifier, mesurer, évaluer,
surveiller, déclarer et gérer ces concentrations (concentration sur certaines zones géographiques
ou secteurs en lien avec les facteurs climatiques).
Préconisations
Identifier les facteurs de risque liés au climat qui pourraient influer sur la valeur des instruments
financiers des portefeuilles ; évaluer le risque potentiel de pertes et de volatilité accrue des
portefeuilles, et établir des processus efficaces de maîtrise de ces risques.
Elaboration éventuelle de stress scenarii dans le cadre du portefeuille de négociation (notamment
pour évaluer les enjeux en termes de liquidité des instruments).
Evaluation de l’influence des enjeux climatiques sur la valorisation et la liquidité des instruments
de couverture.
Principe 10 : Les banques doivent prendre en compte l’impact des facteurs de risque liés au climat
sur leur profil de risque de liquidité et s’assurer que le processus de gestion de ce risque les intègre
correctement.
Préconisations
Évaluer l’impact des risques financiers liés au climat sur les sorties nettes de trésorerie (exemple :
augmentation des tirages sur les lignes de crédit, accélération des retraits de dépôts) ou la valeur
des actifs constituant les réserves de liquidité.
Prendre en compte ces impacts, le cas échéant, dans le calcul des coussins de liquidité et dans
leur cadre de gestion du risque de liquidité.
Principe 11 : Les banques doivent comprendre l’impact des facteurs de risque liés au climat sur leur
risque opérationnel et s’assurer que les systèmes et processus de gestion des risques prennent en
compte les risques significatifs liés au climat. Confidentialité
Plus largement, l’ensemble des risques doit être pris en compte comme le risque stratégique et de
réputation ainsi que le risque de non-conformité.
Préconisations
Évaluer l’impact des facteurs de risque liés au climat sur les opérations en général et sur la
capacité à continuer à fournir des services essentiels.
Prendre en compte l’influence des risques liés au climat sur la continuité d’activité et évaluer la
pertinence des plans de continuité actuels.
Anticiper les enjeux stratégiques, réputationnels, de litige et/ou de responsabilité qui pourraient
naître de l’évolution du contexte réglementaire et des attentes des parties prenantes.
Intégrer ces enjeux en amont de la stratégie.
Ces analyses doivent prendre en compte les risques physiques et de transition en tant que facteurs
de risque de crédit, de marché, opérationnel et de liquidité en s’appuyant sur une série d’horizons
temporels pertinents.
Préconisations
Le ou les objectifs de l’analyse des scénarios climatiques, y compris les simulations de crise,
doivent être en lien avec les objectifs globaux de la banque en matière de gestion des risques
climatiques, tels que définis par les instances de gouvernance (rôle du Conseil et de la direction
générale).
Exemple d’objectifs (en lien avec ce qui a été présenté précédemment) :
Analyser l’impact du changement climatique et de la transition vers une économie à faible
émission de carbone sur la stratégie de la banque et la résilience de son modèle d’entreprise ;
Identifier les facteurs de risque liés au climat ;
Mesurer la vulnérabilité de la banque aux enjeux climatiques et estimer les expositions et les
pertes potentielles ;
Evaluer les limites des données et des méthodes de gestion des risques climatiques ;
Mettre en place un circuit d’information et de communication afin de faciliter le pilotage par la
direction de la banque sur l’évolution de la situation. Apporter une visibilité périodique sur la
maîtrise de ces enjeux.
Définir des scénarii adaptés en fonction du business model de la banque, son profil de risque et sa
stratégie commerciale.
Disposer de capacités et d’expertise suffisantes pour mener à bien l’analyse des scénarii
climatiques qui doivent être proportionnés à la taille, au modèle économique et à la complexité
des opérations.
Utilisation d’une gamme d’horizons temporels, du court au long terme, afin de cibler différents
objectifs de gestion des risques. Les périodes plus longues (niveaux d’incertitude plus élevés),
peuvent être utilisées pour évaluer la résilience des stratégies et des modèles d’affaires existants
face aux changements structurels de l’économie, du système financier ou de la répartition des
risques. Confidentialité
10. LES ENJEUX DE SUPERVISION
Enfin, des principes sont établis concernant le rôle et missions du superviseur vis-à-vis de ces enjeux.
Nous les présentons ci-après, sans que ces principes appellent de remarques particulières.
Principe 13 : Les superviseurs doivent déterminer si l’intégration par les banques des risques
financiers importants liés au climat dans leurs stratégies commerciales, leur gouvernance
d’entreprise et leurs cadres de contrôle interne est solide et complète.
Il s’agit notamment de s’assurer de la correcte prise en compte par les instances exécutives et
délibérantes de ces sujets.
Préconisations
Évaluer l’efficacité de la surveillance des risques financiers liés au climat par le conseil et la
direction générale et vérifier que le conseil et la direction générale reçoivent des rapports internes
précis et appropriés sur les risques financiers importants liés au climat afin d’exercer cette
surveillance.
Principe 14 : Les superviseurs doivent déterminer si les banques sont en mesure d’identifier, de
suivre et de gérer de manière adéquate tous les risques risques financiers significatifs liés au climat,
dans le cadre de leur évaluation de l’appétit pour le risque et des cadres de gestion des risques.
Principe 15 : Les superviseurs doivent s’assurer que les banques identifient et évaluent de manière
exhaustive l’impact des facteurs de risque liés au climat sur leur profil de risque et s’assurer que les
risques financiers importants liés au climat sont correctement pris en compte dans leur gestion des
risques de crédit, de marché, de liquidité, opérationnels et autres.
Principe 16 : Lors de l’évaluation de la gestion des risques financiers liés au climat par les banques
contrôlées, les autorités de contrôle devraient utiliser des techniques et outils appropriés et des
mesures de suivi adéquates en cas d’écart important par rapport aux attentes des autorités de
contrôle.
Principe 18 : Les superviseurs doivent envisager d’utiliser eux-mêmes des scénarii de risques liés au
climat, y compris les tests de résistance, afin d’identifier les enjeux selon les établissements,
d’appréhender les facteurs de risque pertinents, de dimensionner les expositions des portefeuilles,
d’identifier les lacunes en matière de données et de vérifier l’adéquation des approches de gestion
des risques.
11. CONCLUSION
Comme le souligne le document du comité de Bâle, les pratiques devraient évoluer rapidement, au
fur et à mesure de l’évolution de nos connaissances par rapport aux enjeux climatiques. A ce stade,
ce document est consultatif et sera potentiellement amené à évoluer, même si les principes eux-
mêmes peuvent difficilement être remis en question compte-tenu de la pertinence du contenu.
Confidentialité
Si tout un chacun est bien conscient de ces enjeux pour les générations futures, la mise en œuvre de
ces dispositifs vient s’ajouter à une liste déjà bien fournie des exigences de conformité.
A l’instar de la LCB-FT où les listes prolifèrent (Liste des pays tiers non coopératifs, liste des
Personnes Politiquement exposées, liste des pays selon indice de corruption publié par ONG TI
international etc.), les établissements utilisent des listes et en attendent d’autres pour adapter leur
approche par les risques (Liste du Global Coal Exit [5] – GCE, liste d’exclusion Pétrole & Gaz attendue
de la part de l’ONG Urgewald, Évaluation Trucost [6] etc.). Cela facilitera l’homogénéisation des
approches et ainsi la comparabilité.
Le dispositif de contrôle doit pouvoir s’appuyer sur des compétences adaptées. En matière de LCB-
FT, d’anciens policiers ont été recrutés. Va-t-on aller vers des recrutements d’ex-responsable de
plateforme pétrolière, des spécialistes des énergies fossiles issues de grandes sociétés liées à
Confidentialité
l’énergie en complément de ceux qui ont suivi des parcours orientés développement durable ?
Cela permettra aux instances de gouvernance de s’assurer que le profil de risque reste dans les
limites de leur appétence par rapport à ces thématiques.
[1] « Principles for the effective management and supervision of climate related financial risks »
Issued for comment by 16 February 2022 – November 2021 –
https://www.bis.org /bcbs/publ/d530.pdf
[2] Cf. News AFGES du 10.11.21 « Qu’en est-il des engagements financiers des acteurs financiers ? »
[4] Extrait de la News AFGES du 10.11.21 « Qu’en est-il des engagements financiers des acteurs
financiers ? »
[5] GCEL : Global Coal Exit List (liste mondiale de la sortie du charbon publiée pour la première fois
en 2017 lors du sommet de l’ONU (novembre 2017). Base de données lancée par l’ONG allemande
Urgewald sur les sociétés participant à la chaîne de valeur de l’industrie du charbon thermique (plus
de 770 sociétés concernées). Prochaine publication le 4 novembre sur site gogel.org.
[6] Trucost : agence de notation extra-financière. Elle note les entreprises en fonction de leurs
émissions de CO2. Elle travaille aussi sur leur empreinte « eau ».
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