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UNIVERSITÉ DE DOUALA

THE UNIVERSITY OF DOUALA

Faculté des Sciences Juridiques et Politiques


Faculty of Law and Politicals Sciences
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Département de droit des affaires
Année académique 2022-2023
Level 3/Licence 3

Cours de
Droit commercial général

par :

NGOUE WILLY JAMES


Professeur Titulaire
Assisté de :
Louis Jean Bedel TCHOUAMBIA TOMTOM
Ph.D en Droit privé, Chargé de Cours, Maître-Assistant CAMES
Et
André William TCHIADEU NGALEU
Ph.D en Droit privé, Chargé de Cours,

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Bibliographie sélective
- AKAM AKAM (A.) et VOUDWE BAKRO, Droit des sociétés commerciales
OHADA, Harmattan 2017 ;
- AKUÉTÉ (P. S.) et YADO TOÉ (J.) OHADA Droit commercial général,
Bruylant, Bruxelles, 2002 ;
- AKUÉTÉ (P. S.) et AGBENOTO (K. M.), Acte uniforme du 15 décembre
2010 portant sur le droit commercial général in OHADA Traité et Actes
uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2018 ;
- ANOUKAHA (F.) (sous la direction de), Les grands arrêts de la
jurisprudence civile camerounaise, éd. du LERDA, 2008, 643 pp ;
- DEKEUWER-DÉFOSSEZ (F.), Droit commercial, 8e édition,
Montchrestien, Paris, 2004 ;
- MODI KOKO BEBEY (H. D.), Droit communautaire des Affaires, Tome
I, édition TIANOIA P.U.F, 2008
- MOHO FOPA (E. A.), « L’intérêt commun dans le contrat d’agence
commerciale OHADA », Revue de la Recherche Juridique n° 3, Presses
Universitaires d’Aix-Marseille, 2016, pp. 1393-1409 ;
- NGUEBOU TOUKAM (J.), Droit commercial Général dans l’Acte
uniforme OHADA, P.U.A, 1998
- PÉDAMON (M.) et KENFACK (H), Droit commercial, 4e édition, Dalloz,
paris, 2015 ;
- POUGOUE (P.-G.) et FOKO (A.) : Le statut de commerçant dans l’espace
OHADA P.U.A, 2005 ;
- Répertoire civil Dalloz 2019 ;
- Répertoire commercial Dalloz 2019.

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Introduction

Le Droit commercial est une branche du Droit Privé. Contrairement à


d’autres branches de ce droit (droit civil, droit pénal, droit du travail), le droit
commercial n’est pas facile à définir à cause de l’ambivalence de son objet. Il
s’agit en effet d’un droit qui régit à la fois des catégories professionnelles
particulières ainsi que des actes de nature particulière. De même, le domaine
de la discipline est difficile à cerner en de sa constance évolution.
Toutefois, de manière large, on peut considérer le droit commercial
comme l’ensemble des règles qui déterminent le statut des commerçants, le
régime applicable à l’activité commerciale ainsi qu’aux actes de commerce.
Comme on peut le voir à travers cette définition, le droit commercial s’inscrit
à la fois dans une conception subjective et dans une conception objective. La
controverse doctrinale jadis existante sur la question et qui opposait la thèse
objective ou réelle (cette thèse considérait le droit commercial comme étant
essentiellement le droit des actes de commerce) à la thèse subjective (pour cette
thèse, le droit commercial est le droit des commerçants) a perdu de son
importance. Le droit commercial est à la fois le droit des commerçants et celui
des actes de commerce. Ces actes de commerce peuvent être parfois être
accomplis par des non-commerçants. Le droit commercial continuera de les
régir, sans tenir compte de la personne de leur auteur.
Mais, pourquoi parler de droit commercial général ? Ce qui est général
s’oppose au spécial. Le droit commercial général est l’ensemble des règles qui
régissent les activités commerciales compte non tenu de leur forme ou de leur
prospérité. De ce point de vue, l’organisation simplifiée de la structure
commerciale demeure l’entreprise individuelle qui est dirigée par le
commerçant, personne physique. Les organisations commerciales plus
complexes font intervenir des structures de type sociétaire. Ces structures
seront alors particulièrement régies par le droit des sociétés commerciales. En
tenant compte de la santé de la structure, les entreprises bien portantes se
verront appliquer les règles générales du droit commercial et les entreprises
en difficulté seront traitées par des règles spécifiques.
Le commerce qui est ici visé dans ses actes et ses acteurs doit être
entendu au sens large. Il recouvre non seulement les activités commerciales
proprement dites (distribution, achat et revente…) mais aussi les activités de
création des richesses (production) et de prestation des services divers
(banque, assurance, courtage, transport…). C’est la raison pour laquelle pour
certains auteurs, le terme droit commercial général doit être dépassé, pour
laisser place à celui de droit des affaires ou de droit économique. Mais, les
deux dernières expressions sont plus larges et englobent la première. En effet,
certaines règles du droit qui intéressent la vie des affaires ne se rattachent
pas nécessairement au droit commercial. Ainsi en est-il du droit social (statut
des personnes travaillant avec le commerçant), le droit fiscal (régime

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d’imposition des commerçants) et même le droit public économique (statut des
sociétés publiques et parapubliques). Pour des raisons pédagogiques,
l’ensemble des règles qui, au départ, régissent l’activité commerciale
individuelle, demeure regroupée dans cet enseignement appelé droit
commercial général.
Le droit commercial a certainement commencé à apparaître en même
temps que le commerce, c’est-à-dire qu’il est intimement lié à l’apparition et
au développement des civilisations marchandes. Les plus anciens documents
connus sont les tablettes de Warka (vers 2000 avant JC) et, surtout, le célèbre
Code d’Hammourabi (vers 1700 avant JC) issue de la civilisation
mésopotamienne (F. Dekeuwer-Défossez, Droit commercial, 8ème édition,
Montchrestien, Paris, 2004, pp. 1 et suivantes).
Mais, le droit commercial s’est surtout façonné en Europe, au moyen âge.
Plusieurs institutions commerciales de notre droit contemporain comme les
contrats de banque, la lettre de change, la faillite, datent de cette époque. Elles
ont pris naissance dans les républiques d’Italie du nord où le commerce
maritime était très florissant à partir du XIIe siècle. À cette période, les
commerçants ayant réussi à accéder au pouvoir, ont pu rédiger et insérer dans
les statuts municipaux leurs pratiques et usages (M. Pédamon et H. Kenfack,
Droit commercial, 4ème édition, Dalloz, paris, 2015, n° 2).
Mais, ces institutions se sont surtout imposées dans des grandes foires
d’occident, notamment celle de champagne ou des Flandres en France. Dans
ce contexte, une tentative de codification a été opérée par l’ordonnance de
Colbert (Ministre des finances de Louis XIV) de 1673 sur le commerce de terre.
Celle-ci sera suivie par le Décret d’Allarde des 2-17 mars 1791 proclamant la
liberté de du commerce et de l’industrie et la loi Chapelier des 14-15 juin 1791
abolissant le système des corporations. Cependant, il faudra attendre 1807
pour que soit codifié l’ensemble des règles de droit applicables à l’exercice
d’une activité commerciale, à travers le Code de commerce adopté en 1807 et
entré en vigueur en 1808. La révolution industrielle et le libéralisme
triomphant du siècle dernier viendront étendre le domaine d’application de ce
droit, en créant les instruments juridiques sur la base desquels viendra se
développer le capitalisme moderne.
Le droit commercial applicable au Cameroun est le fruit de son double
passé colonial français et anglais.
Dans la partie francophone du pays, appelé à l’époque Cameroun
oriental, le Code de commerce français de 1807 y sera rendu applicable par la
loi du 7 décembre 1850. Il sera par la suite complété avec les principaux textes
suivants :
- La loi du 30 juin 1926 sur les baux commerciaux ;
- Le décret du 17 février 1930 instituant un registre du commerce ;
- Le décret du 26 juillet 1932 relatif à la vente et au nantissement
du fonds de commerce.

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Dans la partie anglophone du pays, appelé Cameroun occidental, le droit
commercial était régi par deux séries de règles :
- Les règles d’origine prétoriennes qui dérivaient des règles de la
Common Law façonnées par les juridictions anglaises ;
- Les règles issues du Sale of Goods act de 1873 applicable en
Angleterre.
Ces dispositions seront rendues applicables dans cette partie du pays en
vertu de l’article 11 de la Southern Cameroons High Court Law de 1955.
Après l’indépendance du Cameroun le 1er janvier 1960 et la réunification
des deux Cameroun, le législateur national, tout en conservant les textes de
l’époque coloniale, va s’engager à les densifier. Dans ce sillage, sera adoptée,
la loi n° 80-25 du 27 novembre 1980 fixant l’orientation de l’activité
commerciale. Cette loi sera abrogée par la loi n° 90/031 du 10 août 1990
régissant l’activité commerciale au Cameroun. Ce dernier texte sera lui-même
abrogé par la loi n° 2015/018 du 21 décembre 2015, régissant l’activité
commerciale au Cameroun. De même, sera adopté la loi n° 2016/004 du 18
avril 2016 régissant le commerce extérieur au Cameroun.
Sur le plan communautaire et international, les traités et accords
internationaux signés ou ratifiés par le Cameroun vont notablement
influencer le droit commercial applicable sur le territoire. L’influence majeure
dans ce sens est sans doute apportée par le Traité de l’OHADA (Organisation
pour l’harmonisation en Afrique du Droit des Affaires), institué par le Traité
de Port-Louis en Île Maurice du 17 octobre 1993. À travers ce traité, 14 États
africains membres de la zone Franc ont choisi d’abandonner leur souveraineté
sur le large domaine du droit des affaires au profit de l’OHADA qui est
désormais la seule institution en charge de légiférer en la matière (Cameroun,
Gabon, Congo, Centrafrique, Tchad, Côte d’Ivoire, Bénin, Mali, Burkina Faso,
Sénégal, Togo, Niger, Comores, Guinée Équatoriale). Trois États ont ensuite
intégré l’OHADA à savoir Les Comores, la Guinée et la République
Démocratique du Congo.
La terminologie utilisée par les auteurs n’est pas du tout neutre. En effet,
les auteurs de la réforme du droit des affaires africains n’ont pas entendu se
limiter uniquement au droit commercial, mais couvrir un domaine plus large
qu’est le droit des affaires, partie du droit privé qui prévoit les règles spéciales
applicables aux personnes physiques et morales qui ont pour profession des
activités commerciales, ce qui englobe toutes les questions juridiques liées à
l’organisation et à l’environnement des entreprises. L’article 2 du Traité
OHADA adopte ainsi une conception large du droit des affaires en dressant
une liste non exhaustive de matières qui devront être régies par les Actes
uniformes OHADA. Il s’agit entre autres du droit commercial général, du droit
des sociétés commerciales, du droit des entreprises en difficultés, des voies
d’exécution, du droit des sûretés, du droit du travail, du droit de l’arbitrage
ou encore du droit des transports. Si certaines de ces matières attendent

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toujours leur premier Acte Uniforme, le droit commercial général a fait l’objet
d’un des premiers Actes uniformes adoptés en 1997 et entrés en vigueur en
1998. L’Acte uniforme relatif au droit commercial général a par la suite subi
une refonte totale le 15 décembre 2010.
Le législateur OHADA fait toutefois une large place aux usages en tant
que source de droit commercial. Ainsi fait-il référence à elles dans la
règlementation des intermédiaires de commerce (article 177, 193 de l’AUDCG)
la vente commerciale (articles238, 239, 244 de l’AUDCG…).
En réalité, de tout temps, les usages ont toujours été une source
privilégiée du droit commercial. Ce sont elles qui lui ont donné naissance et
qui par la suite ont été codifiées, pour certaines d’entre elles. Il faut cependant
distinguer deux catégories d’usages :
- La première est constituée par des usages conventionnels ou
usages de fait. Il s’agit des règles qui tirent leur force de l’autonomie de
la volonté. Les parties à un contrat qui ont connaissance de l’existence
d’un usage susceptible de s’appliquer, ont la faculté de l’accepter ou de
le récuser. Si elles ne l’ont pas écarté, elles sont censées l’avoir adopté
(Akuété Pedro Santos et J. Yado Toé, OHADA Droit commercial général,
Bruylant, Bruxelles, 2002, p. 39).
- La seconde catégorie est constituée des usages impératifs. Ce sont
des usages qui sont imposées par la nécessité du commerce et vont
parfois à l’encontre du droit commun. Il en est ainsi de la solidarité
présumée entre codébiteurs contractuels commerçants, de la mise en
demeure sans acte extrajudiciaire, de la capitalisation des intérêts dans
les comptes bancaires.
Au regard de ces différentes sources, on s’aperçoit que le droit commercial
traite à la fois des personnes et des transactions qu’elles sont appelées à
effectuer. Les personnes dont il s’agit sont des acteurs du commerce (1ere
partie). Ces acteurs disposent d’un certain nombre de biens (2e partie) leur
permettant d’exercer les opérations de commerce parmi lesquelles la vente
commerciale (3ème partie) occupe une place de choix.

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1ère Partie : Les acteurs du droit commercial

Classiquement, les commerçants sont les principaux acteurs de la vie


commerciale (Chapitre 1).Toutefois, après la révision de l’Acte uniforme relatif
au droit commercial général (AUDCG) intervenu le 15 décembre 2010, un
nouvel acteur important du droit commercial a été consacré : il s’agit de
l’entreprenant (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Les commerçants, acteurs classiques

L’identification des commerçants (Sous-chapitre 1) est un préalable


nécessaire à la présentation de leur profession (Sous-chapitre 2).

Sous chapitre 1 : L’identification des commerçants

Au regard de l’AUDCG, il existe plusieurs types de commerçants


répondant à des critères de qualification différents. Ainsi distingue-t-on
habituellement le commerçant personne physique du commerçant personne
morale. En plus de cette distinction fondamentale, le législateur a conféré la
qualité de commerçant aux associés de certaines personnes morales ainsi
qu’aux intermédiaires de commerce.

Section 1 : Le commerçant personne physique


Aux termes de l’article 2 de l’Acte uniforme portant sur le droit
commercial général « Est commerçant, celui qui fait de l’accomplissement
d’actes de commerce par nature sa profession ». Cette définition s’applique
aussi bien aux personnes physiques qu’aux personnes morales fait ressortir
deux critères cumulatifs de la commercialité : l’accomplissement des actes de
commerce par nature (P1) à titre professionnel (P2).

P1 : L’accomplissement des actes de commerce par nature


Contrairement à sa première version, l’AUDCG de 2010 fixe comme
critère d’acquisition de la qualité de commerçant, l’accomplissement des actes
de commerce par nature à titre de profession. Les autres actes de commerce
(acte de commerce par la forme, acte de commerce par accessoire) ne sont plus
visés. Toutefois, cerner la notion d’acte de commerce par nature (A) permettra
de mieux la distinguer de ces dernières (B).

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A- La notion d’acte de commerce par nature
L’AUDCG énonce une définition et donne une énumération des actes de
commerce par nature. Cette énumération permet d’en faire une classification.

1- La définition des actes de commerce par nature


D’après l’article 3 de l’AUDCG, « l’acte de commerce par nature est celuipar
lequel une personne s’entremet dans la circulation des biens qu’elle
produit ou achète ou par lequel elle fournit des prestations de service avec
l’intention d’en tirer un profit pécuniaire ». De cette définition, on retient
deux critères essentiels de définition de l’acte de commerce : l’entremise dans
la circulation des richesses et le but spéculatif.
L’acte de commerce par nature est ainsi celui qui permet d’assurer la
transmission et la distribution des biens et services. Il permet de faire avancer
les richesses de leur lieu d’origine jusqu’au consommateur. Toutefois, toute
activité de circulation des richesses n’est pas forcément une activité
commerciale. C’est pourquoi on en déduit que le critère de la circulation des
biens et services est limité et ne saurait fonder à lui seul la commercialité d’un
acte. En effet, quoiqu’intervenant dans la circulation des biens, l’artisan n’est
pas un commerçant.
Le commerçant accomplit ses actes dans un but spéculatif, c’est-à-dire
dans la recherche du profit (au risque d’essuyer des pertes).Il s’agit d’un critère
traditionnel de l’acte de commerce parce que l’activité du commerçant est
essentiellement motivée par la recherche du gain. Ce qui n’est pas toujours le
cas pour l’artisan par exemple (En droit français, c’est souvent l'absence de
spéculation qui permet de rejeter la qualification de commerçant au profit de
celle d'artisan : voir Cour de cassation, chambre des requêtes, 22 avril 1909,
Dalloz Périodique 1909. 1. Page 344 ; Chambre commercial 11 mars 2008,
JCP E 2008, Page 2050, note Lebel). C’est en considérant ce critère que l’acte
d’achat en vue de revendre a toujours été considéré comme un acte de
commerce.Mais, le critère de la spéculation est insuffisant à lui seul pour
différencier l'activité commerciale d'une autre activité : d'autres professions ne
sont pas insensibles au profit. Les agriculteurs et les personnes exerçant une
profession libérale ne pratiquent pas leurs activités par intention libérale ; or,
ils ne relèvent traditionnellement pas du droit commercial.
Face à l’insuffisance de ces critères, la doctrine a proposé le critère de
l’entreprise. D’après ce critère, l’acte de commerce est celui qui s'exerce dans
une entreprise commerciale. Mais, ce critère est également limité puisque
n’englobe pas toutes les catégories d’acte de commerce énumérées par
l’AUDCG.

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2- La classification des actes de commerce par nature
Après la définition des actes de commerce par nature, l’article 3 de
l’AUDCG procède à leur énumération. Mais, en utilisant l’adverbe
« notamment », ce texte confère à son énumération un caractère purement
indicatif. Au regard de la liste fournie, on peut déduire que les actes de
commerce en nature sont soit l’achat pour revendre, soit les opérations de
service, soit l’exploitation industrielle des ressources naturelles, soit les
contrats entre commerçants pour les besoins de leur commerce.
a- L’achat pour revendre
L’achat des biens, meubles ou immeubles en vue de leur revente est l’exemple
type de l’acte de commerce. Pour que cet acte soit constitué, il faut forcément
un achat destiné à la revente, peu important la nature du bien acheté. La
commercialité de l'acte exige ainsi un achat mû par la volonté de revendre et
portant sur un bien meuble ou immeuble. Autrement dit, l'achat ne suffit pas
à la qualification d'acte de commerce : l'élément matériel doit être coloré d'un
élément psychologique : le marchand doit avoir l'intention de revendre et ne
pas avoir acquis le bien pour son propre usage. Ce critère intentionnel
distingue le commerçant de l'acheteur ordinaire, ou encore du consommateur
qui achète le bien pour retirer lui-même l'utilité.
b- Les opérations de service
Les opérations de service énoncées par l’AUDCG sont nombreuses. Il
s’agit des opérations financières, telles les opérations de banque, de bourse,
d’assurance. Il s’agit également des opérations d’entremise comme les
opérations de change, de courtage et les opérations des intermédiaires de
commerce. Il s’agit enfin des opérations de transport et de télécommunication.
c- L’exploitation industrielle des ressources naturelles
Avant l’adoption de l’AUDCG, il était acquis que les activités extractives
échappaient au droit commercial : exploitation des carrières, marais salants,
eaux minérales… Il en était ainsi parce que le Code du commerce ne les
réputait pas actes de commerce. Avec l’avènement du droit OHADA et plus
précisément de l’AUDCG, s’arrête la dissociation : toute exploitation
industrielle de tout gisement de ressource naturelle est un acte de commerce.
Toutefois, l’exploitation visée est une exploitation industrielle, qui s’oppose à
une exploitation artisanale.
d- Les actes effectués par les sociétés commerciales et les contrats
entre commerçants pour les besoins de leur commerce
L’AUDCG considère également comme actes de commerce, les actes accomplis
par les sociétés commerciales. Il s’agit certainement des actes effectué en vue
de la réalisation de l’objet social. S’agissant des contrats entre commerçants
pour les besoins de leur commerce, il est à noter que certains peuvent en
réalité rentrer plutôt dans la catégorie des actes de commerce par accessoire.

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B- La distinction des actes de commerce par nature
des autres actes de commerce
Les actes de commerce par nature se distinguent des actes de commerce
par la forme et des actes de commerce par accessoire.
1- Les actes de commerce par la forme
D’après l’article 4 de l’AUDCG, les actes de commerce par la forme sont
la lettre de change, le billet à ordre et le warrant.
- La lettre de change, encore appelée traite est un écrit par lequel
une personne appelée tireur, donne l’ordre à une autre personne
appelée tiré, de payer une certaine somme d’argent à une troisième
personne appelée bénéficiaire, à une date déterminée.
- Le billet à ordre est un écrit par lequel une personne appelée
souscripteur s’engage à payer à une époque déterminée une somme
d’argent déterminée à une personne appelée bénéficiaire.
- Le warrant est une variété de billet à ordre souscrit par un
commerçant et garanti par un stock de marchandises disposées dans
un magasin.
Ces actes de commerce par la forme constituent ce qu’on appelle
couramment les effets de commerce. Il s’agit des instruments de mobilisation
de crédit car ils ont tous pour effet de reporter le paiement d’une créance à
une date ultérieure. Le chèque ne figure pas parmi ces actes de commerce par
la forme. Cela se comprend car le chèque est un ordre donné à une banque de
payer à l’instant ou du moins dès présentation une somme d’argent au porteur
tiré. Il est donc un instrument de paiement et non un instrument de crédit
comme les effets de commerce.
2- Les actes de commerce par accessoire
Un acte à caractère civil est parfois qualifié d'acte de commerce parce
qu'il se rattache à un acte de commerce ou qu'il est accompli par un
commerçant. C’est le cas des actes civils effectués par un commerçant pour
son commerce. Il en est ainsi également de toutes les obligations entre
commerçants qui sont considérées comme des actes de commerce.
3- Les actes mixtes
Tout acte conclu entre un commerçant et un non-commerçant est un acte
mixte. Cet acte présente un caractère commercial pour le commerçant et civil
pour l’autre partie.

P2 : L’exercice professionnel d’une activité commerciale


Des actes de commerce par nature accomplis de façon isolé ou
occasionnellement ne confère pas à leur auteur la qualité de commerçant. De
même, l’accomplissement des formalités imposées au commerçant ne suffit
pas à établir la qualité de commerçant si l’intéressé n’accomplit pas les actes
de commerce par nature de manière professionnelle.

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L’accomplissement à titre de profession implique une activité régulière
présentant une continuité suffisante pour permettre à celui qui l’exerce d’en
retirer les moyens où une partie substantielle des moyens nécessaires à
l’existence. L’activité professionnelle implique en outre que l’exercice du
commerce revête une réalité concrète et non pas seulement formelle. L’activité
réelle ne signifie cependant pas que le commerçant soit tenu de mettre en
place une organisation particulière ou un cadre spécifique en terme de local,
d’équipements, de marchandises etc. La jurisprudence française a d’ailleurs
considérée que le spéculateur en bourse qui ne dispose d’aucune installation
matérielle ni même de clientèles propres a néanmoins la qualité de
commerçant dès lors qu’il a fait des opérations de bourses sa profession (Cour
de cassation, 30 Juillet 1912, Dalloz périodique 1914, 1ère partie Page 86.).
Dans tous les cas, le commerçant doit exercer cette profession de manière
personnelle et indépendante.
L’accomplissement professionnel des actes de commerce au nom et
pour le compte du commerçant.
Le commerçant est un professionnel qui agit pour son compte personnel ;
à ses risques et périls. La personne qui exerce les actes de commerce ne doit
pas le faire pour une autre personne. Par conséquent, le salarié d’un
commerçant n’a pas la qualité de commerçant puisque ce n’est pas lui qui
supporte les risques de l’activité. Ce qui n’est pas le cas du locataire-gérant
qui effectue les actes de commerce pour son propre compte.
L’accomplissement professionnel des actes de commerce de
manière indépendante.
Celui qui exerce les actes de commerce ne doit pas les exercer sous
l’autorité d’une autre personne. Il doit les accomplir en toute indépendance.
C’est pourquoi le conjoint d’un commerçant qui collabore simplement à
l’activité de celui-ci ne devient pas lui-même commerçant quand bien même
cette collaboration est rémunérée. Cette solution est reprise ou consacrée par
l’article 7, alinéa 2 de l’Acte uniforme selon lequel « le conjoint du commerçant
n’a la qualité de commerçant que s’il accomplit les actes visés aux articles 3 et
4 ci-dessus, à titre de profession et séparément de ceux de l’autre conjoint ».

Section 2 : La qualité de commerçant liée à la personne morale


Après leur consécration par le droit, les personnes morales bénéficient des
mêmes attributs que les personnes physiques. Ainsi peuvent-elles être
commerçantes (P1). Le simple fait que de certaines personnes morales soient
commerçantes suffit à conférer cette même qualité à leurs associés (P2).

P1 : Le commerçant personne morale


Une personne morale peut être commerçante. Il s'agit principalement des
sociétés. Aux termes de l’article 6 de l’Acte uniforme relatif au droit des

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sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE), le
caractère commercial d’une société est déterminé soit par sa forme, soit par
son objet. Sont ainsi commerciales indépendamment de leur objet social, les
Sociétés en nom collectif, les Sociétés en commandite simple, les sociétés à
responsabilité limitée, les sociétés anonymes et les Sociétés par actions
simplifiées. L’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives
(AUSCOOP) dispose également dans le même sens à l’article 21. Il en ressort
que l’objet de la société coopérative détermine son caractère civil ou
commercial. C’est dire que l’exercice d’une activité commerciale par une
personne morale dépend de son acte de création. L’exercice de l’activité
commerciale doit avoir été intégré dans l’acte de création. L’existence juridique
de ces sociétés commerciales commence à partir de leur immatriculation au
RCCM, qui est la condition d’acquisition de la personnalité juridique.

P2 : L’associé tenu indéfiniment et solidairement du passif de


la société
En principe, une personne n'est commerçante que si son activité
personnelle répond aux conditions posées pour acquérir cette qualité. Or, les
associés des sociétés en nom collectif (SNC) et les associés commandités des
sociétés en commandite simple (SCS) présentent la caractéristique d'avoir la
qualité personnelle de commerçant (voir article 270 AUSCGIE) et , alors même
qu'ils n'accomplissent aucune opération commerciale. Il en résulte que nul ne
peut faire partie d'une SNC ou être commandité d’une SCS, s'il n'a pas la
capacité spéciale requise pour faire le commerce. Corrélativement, l'adhésion
à une telle société en qualité d'associé confère de plein droit la qualité de
commerçant. Cette règle semble a priori surprenante, dans la mesure où,
comme dans tout groupement commercial, c'est la personne morale
commerçante qui fait le commerce. Or, les associés et même les dirigeants des
autres sociétés commerciales, ne sont pas eux-mêmes commerçants. La
situation de la société en nom collectif s'explique par le fait que celle-ci
constitue un groupe de commerçants agissant en commun et qu'il n'existe pas
une séparation absolue entre la personne morale et ses membres. En effet,
dans une telle société, les associés sont tenus indéfiniment et solidairement
des dettes de la société, comme s’il s’agissait de leurs dettes propres.

Section 3 : Les intermédiaires de commerce


Pour toucher la plus large clientèle possible, les commerçants personnes
physiques et morales recourent souvent aux services d’intermédiaires. Il s’agit
selon l’article 169 de l’Acte uniforme de personnes physiques ou morales
également ayant le pouvoir d’agir habituellement et professionnellement pour
le compte des commerçants afin de conclure avec des tiers des actes à
caractère commercial. D’après l’article 170 de l’AUDCG, « l’intermédiaire de

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commerce est un commerçant ». Il est soumis à cet effet aux conditions
requises pour l’accès à cette profession. Le régime particulier des contrats
d’intermédiation commerciale est construit autour de la théorie juridique du
mandat. La nature et l’étendu de ce mandat étant clairement définis pour
chacune des trois catégories d’intermédiaires dans les articles 192 et suivant
de l’Acte uniforme. Le texte de l’OHADA réglemente tour à tour le statut du
commissionnaire, du courtier et des agents commerciaux.

P1 : Le courtier
Selon l’article 208 de l’Acte uniforme « le courtier est un professionnel qui
met en rapport des personnes en vue de faciliter ou de faire aboutir la
conclusion de convention entre ces personnes ».
L’Acte uniforme a expressément mentionné les opérations de courtage dans
l’énumération par l’article 3 des actes de commerce par nature. La mission du
courtier en qualité d’intermédiaire consiste donc simplement à rapprocher
deux parties en vue d’un contrat en mettant tout en œuvre pour faire aboutir
les négociations. À la différence du commissionnaire, le courtier qui agit certes
en son nom propre n’a pas le pur de conclure des contrats pour le compte de
son commettant. Il doit se borner à rechercher des clients, à préparer les
documents contractuels et entreprendre toutes les démarches nécessaires,
administrative notamment pour faciliter l’accord. L’article 209, alinéa 2 de
l’Acte uniforme prévoit néanmoins qu’il peut exceptionnellement intervenir
dans l’accord entre les parties d’un commun accord de celles-ci. Le statut de
courtier se caractérise par une stricte indépendance à l’égard des parties qu’il
rapproche ; ce qui lui interdit selon l’article 211 de l’Acte uniforme de réaliser
des activités de commerce autre que le courtage pour son propre compte,
directement ou par personne interposée. A l’instar du commissionnaire, le
courtier tenu à un devoir de loyauté doit fournir aux parties toutes les
informations susceptibles d’éclairer leur consentement. Il répond
personnellement de toute faute préjudiciable à son client notamment lorsqu’il
lui propose sciemment la conclusion d’un contrat avec une personne
notoirement insolvable ou dont l’incapacité est connue.
En contrepartie de ses obligations exécutées correctement, le courtier a
droit à une rémunération librement fixée dans le contrat ou déterminée
conformément aux tarifs en vigueur et à défaut par les usages. Seule la
déloyauté à l’égard de son client lui ferait perdre ce droit à la rémunération et
le cas échéant au remboursement de ses dépenses et frais divers. L’article 215
de l’Acte uniforme considère comme un acte déloyal le fait pour un courtier
d’être payé par le tiers contractant à l’insu de son donneur d’ordres.

P2 : Le commissionnaire
Selon l’article 192 de l’Acte uniforme « le commissionnaire est un
professionnel qui, moyennant le versement d’une commission, se charge
13
de conclure tout acte juridique en son nom propre mais pour le compte
du commettant qui lui en donne mandat » le contrat de commission peut
porter sur diverses opérations et engendre des droits et des obligations
déterminés pour chacune des parties.

A- L’activité du commissionnaire
De manière générale, le commissionnaire s’engage à acheter ou à vendre des
marchandises en son nom propre mais pour le compte d’un commerçant. Mais
outre la commission d’achat ou de vente, l’Acte uniforme prévoit également en
matière de transport, la commission d’expédition en vertu de laquelle le
commissionnaire intermédiaire se charge d’expédier ou de réexpédier les
marchandises pour le compte de son commettant. De son côté, le
commissionnaire en douane également mentionné dans l’Acte uniforme est
chargé de procéder aux déclarations d’usages en matière de douane et
d’acquitter pour le compte de son client le montant des droits et taxes dus
(article 204 et 206 de l’Acte uniforme). La commission recouvre ainsi des
opérations très diverses auxquels l’acte uniforme ne consacre cependant que
quelque disposition. La préoccupation essentielle du législateur ayant été de
déterminer droits et obligations des parties.

B- Les droits et obligations du commissionnaire


Comme tout mandataire, le commissionnaire est tenu d’accomplir
correctement l’opération dont il est chargé en se conformant aux instructions
reçues. La distinction est faite en la matière entre les instructions précises ou
impératives et des instructions simplement indicative. Dans le 1er cas, aucune
marge d’appréciation n’est laissée au commissionnaire tenu d’exécuter
rigoureusement les instructions reçues. Ainsi, l’article 200 de l’Acte uniforme
prévoit-il, s’agissant de la commission de vente que le commissionnaire ayant
reçu instruction fermes de vendre à un prix déterminé sera personnellement
tenu de payer la différence s’il vend à un prix inférieur. Il ne peut demander
dans la commission d’achat prétendre à aucune récompense s’il achète à un
prix plus bas que celui fixé par le commettant ; la différence ne lui étant pas
acquise, pas d’avantages que lorsqu’il vend plus chère que le prix fixé. En
présence d’instructions indicatives, le commissionnaire a l’obligation d’agir en
bon père de famille c'est-à-dire au mieux des intérêts du commettant et
comme on le ferait pour lui-même. La commission d’expédition de
marchandises destinées à la vente impose une diligence particulière au
commissionnaire. Il doit dans ce cas sauvegarder tous les recours du
commettant contre le transporteur en faisant constater les avaries subis et en
prenant toutes les mesures nécessaires à la conservation des marchandises
dont l’état fait craindre une détérioration rapide. Dans tous les cas, le
commissionnaire doit agir avec loyauté cette exigence de l’article 194 de l’Acte
uniforme lui interdit notamment de se porter acquéreur des marchandises
14
qu’il est chargé de vendre ou de vendre au commettant ses propres
marchandises.
Le contrat peut néanmoins déroger de façon expresse à cette interdiction.
La loyauté commande également au commissionnaire de communiquer au
commettant toute information utile relative à l’opération envisagée et de lui
rendre compte de l’exécution de la mission. Mais le commissionnaire n’est pas
garant de l’exécution des obligations du tiers avec lequel il contracte pour le
compte du commettant sauf cause de ducroire. En contrepartie de ses
obligations, le commissionnaire a droit à une rémunération ou commission
correspondant généralement à un pourcentage du montant de l’opération
réalisée. Il a droit également selon l’article 197 de l’Acte uniforme au
remboursement des dépenses et frais divers occasionnés par l’exécution de
son mandat sur présentation de pièces justificatives. L’article 198 lui
reconnaissant pour cela un droit de rétention sur les marchandises qu’il
détiendrait encore.

P3 : L’agent commercial
Selon l’article 216 de l’AUDCG, l’agent commercial est « un mandataire
professionnel chargé de façon permanente de négocier et éventuellement, de
conclure des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services,
au nom et pour le compte de producteurs, d’industriels, de commerçants, ou
d’autres agents commerciaux, sans être lié envers eux par un contrat de
travail ». L’agent commercial est le seul intermédiaire de commerce qui peut
être considéré comme un mandataire au sens classique. Il agit « au nom » et
« pour le compte » des producteurs, industriels et commerçants. Cette
représentation doit être permanente. La Cour de cassation décide ainsi qu’un
prestataire de service qui ne dispose pas de façon permanente d’un pouvoir
de négocier des contrats au nom et pour le compte de son mandant n’est pas
un agent commercial (Cass. Com., Arrêt n° 384 du 27 avril 2011, pourvoi n°
10-14.851). Il en est de même pour un prestataire de service, distributeurs
d’abonnement, qui s’était engagé à n’apporter aucune modification de quelle
que nature que ce soit aux tarifs et conditions fixés par le mandant (Cass.
Com., 15janvier 2008, RTDCom. 2008, p. 495). L’agent commercial se
distingue ainsi du concessionnaire (celui-ci est un commerçant direct, v. Cass.
Com. 7 oct. 1977, RTDciv., 1998, p. 150, obs. Yves Gautier) qui achète et
revend en son nom et pour son compte. Dans la pratique, l’agent commercial
prospecte la clientèle, provoque les commandes, et transmet les commandes
reçues à son mandant qui conserve la liberté de les accepter ou de les refuser.
Parfois, il peut être le dépositaire des produits du mandant. Dans ce cas, après
la conclusion du contrat, il se charge de la livraison des produits moyennant
une rémunération particulière (on parle dans ce cas d’agent dépositaire).
Le contrat d’agent commercial est un contrat consensuel. Il ne doit pas
nécessairement être conclu par écrit. Selon la jurisprudence, son existence

15
peut être établie des documents produits (CA du Centre, Arrêt n° 4/civ. du 6
janv. 2010, ohadata J-12-240). Ce contrat est conclu dans l’intérêt commun
des deux parties. Cet intérêt commun justifie l’imposition d’une obligation
particulière de loyauté aux parties tant au moment de la conclusion du contrat
qu’au moment de son exécution (E. A. Moho Fopa, « L’intérêt commun dans le
contrat d’agence commerciale OHADA, Revue de la Recherche Juridique n° 3,
Presses Universitaires d’Aix-Marseille, 2016, pp. 1393-1409). Pour l’agent
commercial, elle se traduit par une obligation de non concurrence. Par
conséquent, il ne peut représenter des entreprises concurrentes sans l’accord
du mandant, mais peut représenter des mandants non concurrents (toute la
question va être de savoir ce qu’on entend par produit concurrent. En cas de
doute, il revient aux juges de fond d’apprécier s’il s’agit ou non des produits
identiques). De même, il ne peut développer sans rompre la communauté
d’intérêts qui le lie au mandant une activité concurrente pour son propre
compte. Mais dans le silence des textes, une clause contractuelle limitant cette
liberté du mandataire serait souhaitable, à l’instar de la clause de non-
concurrence qui figure régulièrement dans le contrat en cas de rupture des
relations commerciales. Le mandataire est aussi tenu du secret professionnel
pendant et après son mandat (art. 219 AUDCG).
L’obligation de loyauté implique pour le mandant de respecter
l’exclusivité accordée à l’agent commercial. Il doit en outre payer la
commission promise et pour les opérations négociées avant, mais conclues
après la cessation de son contrat, l’article 222 permet à l’agent commercial de
percevoir une commission. Le contrat d’agence commerciale n’est pas
seulement reconnu d’utilité commune en cours d’exécution. À la fin du contrat
d’agence commerciale, le législateur OHADA (art. 229) permet à l’agent
commercial de réclamer dans un délai d’un an une indemnité compensatrice
correspondant à l’augmentation du chiffre d’affaires que son activité a procuré
au mandant (Cass. Com., Arrêt n° 42 du 18 janv. 2011, pourvoi n° 09-72-
510). Le montant de cette indemnité est d’un mois de commission pour la
première année d’exécution du contrat, deux mois de commission pour la
deuxième année, et trois mois à partir de la troisième année avec possibilité
pour les parties de fixer librement le montant de cette indemnité (art.
231).Pour la chambre commerciale de la Cour de cassation française,
l’indemnité de cessation de contrat due à l’agent commercial a pour objet de
réparer le préjudice subi qui comprend la perte de toutes les rémunérations
acquises lors de l’activité dans l’intérêt commun des parties sans qu’il y ait
lieu de distinguer selon leur nature (8 oct. 2013, pourvoi n° 12-26544).L’agent
commercial perd le droit de réclamer l’indemnité compensatrice en cas de
cessation du contrat provoqué par sa faute grave, en cas de cessation du
contrat à son initiative à moins que la rupture ne soit justifiée par des
circonstances imputables au mandant. Il perd également son droit à

16
indemnisation lorsqu’il cède à un tiers, en accord avec le mandant, les droits
et obligations qu’il détient en vertu du contrat de mandat.
Les deux parties sont en outre tenues d’une obligation d’information
comme dans tout contrat d’intermédiaire de commerce.

17
Sous chapitre 2 : La profession de commerçant

La profession de commerçant est une profession sensible. Elle est au


cœur des économies des États. C’est pourquoi elle est particulièrement
encadrée par les textes qu’il s’agisse de l’accès à la profession (Section 1) ou
des obligations et privilèges du commerçant (Section 2).

Section 1 : L’accès à la profession commerciale


L’accès à la profession de commerçant est dominé par le principe de la
liberté de commerce et d’industrie (P1). Mais, cet important principe du droit
commercial est assorti de limites nécessaires à l’encadrement de la profession
(P2).

P1 : Le principe de la liberté de commerce et d’industrie


Le principe de la liberté de commerce et de l’industrie est affirmé par loi
n° 2015/018 du 21 décembre 2015, régissant l’activité commerciale au
Cameroun. L’article 5 de cette loi dispose : « l’exercice de l’activité commerciale
sur l’étendue du territoire national par toute personne physique ou morale, sous
réserve du respect des lois et règlements en vigueur ».
La liberté de commerce et d’industrie suppose au moins deux choses. Elle
renvoie d’abord à la liberté d’entreprendre, c’est-à-dire le droit pour toute
personne physique ou morale de se livrer aux activités commerciales ou
industrielles de son choix. Toute personne est alors libre soit de créer une
nouvelle entreprise, soit d’acquérir ou de prendre le contrôle d’une déjà
existante.
La liberté de commerce est ensuite la liberté d’exploiter, c’est-à-dire le
droit pour tout commerçant ou industriel de conduire son affaire comme il
l’entend, de gérer son entreprise comme il le désire, sous réserve cependant
de certaines limites.

P2 : Les limites au principe de la liberté de commerce et


d’industrie
Si toute personne est libre d’exercer un commerce sur le territoire du
Cameroun, toutes les activités ne sont pas permises. Il existe des activités qui
ne sauraient être exercées. L’article 1128 du Code civil prévoit en ce sens qu’il
n’y a que les choses qui sont dans le commerce qui peuvent faire l’objet de
conventions. À titre d’exemple, on ne saurait devenir commerçants d’hommes,
car le corps humain et l’état des personnes en général est indisponible. Bien
plus, certaines choses peuvent être dans le commerce et réservées aux
transactions des opérateurs économiques bien précis. Il s’agit des situations
de monopoles ou d’exclusivité. Enfin, certaines activités peuvent être
soumises à autorisation ou agrément. C’est dire que des limites à la

18
commercialité peuvent être tirées de l’activité dont l’exploitation est prévue et
qui s’avère relativement impossible.
Plus nombreuses sont cependant les limites à la liberté de commerce
tirées de la situation personnelle du postulant à l’activité commerciale. Il s’agit
notamment des situations d’incapacité (A), des incompatibilités (B), des
déchéances (C) et de l’extranéité du candidat à la profession commerciale (D).

A- L’incapacité d’exercer le commerce


Aux termes de l’article 6 de l’AUDCG, « Nul ne peut accomplir les actes
de commerce à titre de profession s’il n’est juridiquement capable d’exercer le
commerce ». La question de la capacité se pose très souvent en présence des
mineurs et des majeurs qui ne sont pas sains d’esprit. La question de la femme
mariée a été réglée par l’AUDCG.
En ce qui concerne le mineur, il s’agit de toute personne qui n’a pas
encore 21 ans révolus. L’article 7 al.1 de l’AUDCG dispose que « le mineur sauf
s’il est émancipé, ne peut avoir la qualité de commerçant, ni effectuer des actes
de commerce ». A la lecture de cet article, seul le mineur émancipé peut avoir
la qualité de commerçant. L’émancipation découle du mariage ou d’une
décision de la juridiction compétente, à la demande de ses parents ou tuteurs
légaux. Le mineur non émancipé ne peut avoir la qualité de commerçant ni
exercer les actes de commerce par personne interposée. Il s’agit d’une
incapacité d’exercice absolue qui est sanctionnée par la nullité relative des
actes accomplis, par conséquent, seul l’incapable peut s’en prévaloir. Il en
résulte qu’en cas d’héritage ou de legs, un mineur non émancipé recueille un
fonds de commerce, il ne pourra que le vendre à moins qu’il ne le mette en
location gérance, ou n’en fait un apport à une société dans laquelle il ne pourra
avoir la qualité de commerçant. Cette location gérance ou l’apport en société
ne peuvent être conclus que par son représentant légal.
En ce qui concerne les personnes majeures, l’AUDCG est muet sur la
question. Pour résoudre la question, il faut se référer au droit commun de la
capacité tel que régi par le Code civil applicable au Cameroun. Au regard de
ce texte, le majeur sous protection judiciaire, considéré comme un faible
d’esprit, a la possibilité de devenir commerçant sans aucune restriction. En
revanche, le majeur sous tutelle est considéré sur le plan juridique comme
étant un mineur non émancipé et, par conséquent, il ne saurait avoir la qualité
de commerçant ni accomplir valablement les actes de commerce. Quant au
majeur en curatelle, il peut avoir la qualité de commerçant, à condition d’être
assisté de son curateur, et notamment pendant les périodes de crises.
En ce qui concerne la femme mariée, la question ne se pose plus
aujourd’hui avec l’AUDCG qui a bilatéralisé l’accès à la profession dans un
foyer en précisant à l’article 7 al.2 que « Le conjoint du commerçant n’a la qualité
de commerçant que s’il accomplit les actes visés aux articles 3 et 4 ci-dessus, à

19
titre de profession et séparément de ceux de l’autre conjoint ». Il s’agit ici de
l’aboutissement d’une longue histoire de quête du droit d’accès au commerce
par la femme. En effet partant de l’article 223 du Code civil encore en vigueur
au Cameroun, selon lequel le mari avait le droit de s’opposer à l’exercice d’une
profession séparée (Ceci est d’ailleurs la traduction de d’article 213 qui donne
au mari l’autorité parentale et la puissance maritale. Le mari avait autorité sur
la femme et celle-ci n’avait aucune capacité pour faire les actes juridiques sans
autorisation du mari, encore moins pour ester en justice.
18 fév. 1938 : la femme mariée peut faire les actes de commerce isolés et aussi
ester en justice, ce qui n’était pas le cas avant même si elle était commerçante.
22 sept. 1942 : modification de l’article 4 du code de commerce. « La femme
mariée peut être marchande publique à moins que le mari ne s’y oppose ».
13 juill. 1965 : égalité complète entre les conjoints), l’article 4 du Code de
commerce subordonnait l’exercice de la profession commerciale par une
femme mariée à l’autorisation de son mari.
Désormais avec l’article de 7 de l’AUDCG, le conjoint du commerçant,
qu’il s’agisse de l’époux ou de l’épouse, peut exercer au même titre que l’autre,
l’activité commerciale. La seule condition exigée est que ses actes de commerce
soient séparés de ceux du conjoint.

B- Les incompatibilités avec l’exercice du commerce


Aux termes de l’article 8 de l’Acte uniforme « Nul ne peut exercer une
activité commerciale lorsqu’il est soumis à un statut particulier
établissant une incompatibilité ». Ce texte précise dans l’alinéa suivant qu’il
n’y a pas d’incompatibilité sans texte. Il faut ensuite se reporter à l’article 9
qui énumère de façon non limitative revoyant également aux dispositions
législatives internes des États membres de l’OHADA, les professions déclarées
incompatibles avec le commerce. Sont concernés, les fonctionnaires et
personnels des collectivités publiques et des entreprises à participation
publique, les officiers ministériels et les auxiliaires de justice (Avocats,
Huissier, Agents de change, Notaire, Greffiers, Administrateurs et liquidateurs
judiciaires), les experts comptables et les comptables agréés, commissaires
aux comptes et aux apports, conseils juridiques ; courtiers maritimes. Les
incompatibilités se justifient principalement par le souci de préserver chez les
professionnels concernés la conscience professionnelle et le sens de l’intérêt
général tout en les mettant à l’abri d’éventuels conflits d’intérêts. La
satisfaction de l’intérêt général et des exigences d’ordre éthiques ou le
désintéressement qui doit caractériser certaines professions s’accommoderait
mal en effet de la recherche permanente du gain qui anime le commerçant.
L’exercice du commerce au mépris de l’incompatibilité légale empêchera le
contrevenant de se prévaloir de la qualité de commerçant et d’en revendiquer
les avantages statutaires. En revanche, toutes les sanctions prévues à
l’encontre du commerçant lui seront applicables et les actes accomplis
irrégulièrement lui seront opposable par les tiers ‘article 8 de l’Acte uniforme).

20
C- Les déchéances ou interdictions
L’article 10 de l’Acte uniforme est le fondement légal des interdictions
d’exercer le commerce directement ou par personne interposée. L’interdiction
peut alors être générale ou spéciale, définitive ou temporaire.
L’interdiction générale n’autorise l’exercice d’aucune activité commerciale
et peut être prononcée par une juridiction nationale à titre de peines
principales ou complémentaires.
L’interdiction spéciale au contraire qui relève de la compétence des
juridictions professionnelles ne concerne que l’activité commerciale
considérée.
Les interdictions judiciaires se justifient principalement par le souci de mettre
à l’écart des personnes condamnées pour une infraction de droit commun, à
une peine d’au moins trois (03) mois d’emprisonnement non assorti de sursis
pour un délit contre les biens ou de nature économique ou financière. L’article
10 de l’Acte uniforme qui le prévoit n’énumère pas les infractions visées, mais
il est constant tant en doctrine qu’en jurisprudence que l’interdiction fait suite
à une condamnation des infractions de la nature du vol et notamment l’abus
de confiance, l’escroquerie, l’émission de chèques sans provisions ainsi que
pour la banqueroute frauduleuse et les atteintes aux intérêts ou à la sécurité
économique de l’Etat. L’exercice du commerce au mépris d’une interdiction
judiciaire ou professionnelle emporte les mêmes sanctions de celles prévues
en matière d’incompatibilité (article 12 de l’Acte uniforme). Il faut préciser
cependant que le législateur fixe à 5 ans la durée maximale d’une interdiction
temporaire et prévoit après ce délai la possibilité d’une réhabilitation. Cette
dernière étant également admise en cas d’interdiction définitive par une
requête adressée à la juridiction ayant prononcée la sanction.

D- L’extranéité
En principe, l’extranéité n’est pas un obstacle à l’exercice d’une activité
commerciale au Cameroun. Mais, l’article 5, alinéa 2 de la loi de 2015 précitée
prévoit qu’un étranger désirant exercer une activité commerciale au
Cameroun doit obtenir au préalable un agrément délivré par l’autorité
compétente. L’autorité compétente est le Ministre chargé du commerce.

Section 2 : Les obligations et les privilèges du commerçant


La qualité de commerçant est tributaire d’un statut juridique particulier.
En application des règles commerciales, le commerçant, qu'il soit personne
physique ou morale, est tenu d'exécuter certaines obligations afférentes à cette
qualité. À l'opposé, il bénéficie de plusieurs règles de faveur spécifiques,
parfois anciennes, et adaptées aux particularités de la vie du commerce
(V. infra, nos 130 s.) et plus globalement à la vie des affaires (sous-section 2).

21
Sous-section 1 : Les obligations du commerçant
Les commerçants doivent respecter la règlementation en vigueur. Celle-
ci met à leur charge un certain nombre d’obligations. Les obligations du
commerçant peuvent être regroupées en trois rubriques. La première est
l’immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) (P1).
La deuxième impose au commerçant de tenir une comptabilité selon des règles
édictées (P2). La troisième est liée au respect de l’éthique (P3).

P1 : L’immatriculation au RCCM
De façon générale, l’immatriculation est l’action d’inscrire sur un registre,
sous un numéro d’ordre, le nom d’une personne ou d’une chose en vue de
l’identifier à des fins précises. Plus spécialement, l’immatriculation au RCCM
vise à la fois l’identification de la personne et le souci d’établir sa qualité de
commerçant. À cet effet, le RCCM apparaît comme l’outil essentiel de
cristallisation de la situation personnelle et patrimoniale du commerçant. Bien
plus, d’après l’article 34 de l’AUDCG, le RCCM est institué aux fins de
satisfaire aux exigences de sécurité, de célérité, de transparence et de loyauté
nécessaires au développement des activités économiques. C’est dire comment
ce registre est important pour le commerçant, mais également pour tous qui
désirent se renseigner sur la profession commerciale d’une personne. C’est
pourquoi l’immatriculation du commerçant est une obligation (A) qui produit
des effets importants (B).

A- L’obligation d’immatriculation au RCCM


Avant de faire ressortir les règles qui gouvernent l’immatriculation des
personnes assujetties, il convient au préalable de présenter succinctement le
RCCM.
1- La présentation du RCCM
Le RCCM est organisé sous une forme pyramidale allant du fichier local au
fichier régional, en passant par le fichier national.
Au niveau local, le RCCM est tenu par le greffe de la juridiction
compétente ou l’organe compétent dans l’Etat partie sous la surveillance du
Président de ladite juridiction ou du juge délégué par lui à cet effet ou de
l’autorité compétente dans l’Etat partie (article 36 AUDCG). Les informations
figurant dans les formulaires remis au greffe ou à l’organe compétent dans
l’Etat partie et dans les registres et répertoires du RCCM sont destinées à
l’information du public.
Le Fichier National est organisé par chaque Etat membre de l’OHADA et
est tenu au Cameroun au greffe de la Cour suprême. Il a pour but de
centraliser les renseignements et informations consignés dans chaque RCCM,
de permettre l’accès des assujettis et des tiers aux informations conservées
par le Fichier National, de permettre de satisfaire aux exigences de sécurité,

22
de célérité, de transparence et de loyauté nécessaires au développement des
activités économiques, et de recevoir les déclarations relatives aux
hypothèques faites à la diligence de l’autorité en charge de la publicité des
hypothèques.
En ce qui concerne le Fichier Régional, il est tenu au siège de la Cour
Commune de Justice et d’Arbitrage (CCJA) à Abidjan en Côte d’Ivoire. Il est
organisé aux fins de centraliser les renseignements et informations consignés
dans chaque Fichier National, de permettre l’accès des assujettis et des tiers
aux informations conservées par le Fichier Régional et de permettre de
satisfaire aux exigences de sécurité, de célérité, de transparence et de loyauté
nécessaires au développement des activités économiques. Pour faciliter les
diverses procédures tant de consultation que d’inscription ou
d’enregistrement au RCCM, les articles 79 à 100 de l’AUDCG prévoient la
possibilité d’informatiser les divers fichiers. Mais cette informatisation n’est
pas encore obligatoire, certainement parce que tous les pays de l’espace
OHADA n’ont pas encore un niveau de développement qui leur permet
d’informatiser tout leur service public de la justice.

2- L’inscription des commerçants au RCCM


Toute personne physique dont l’inscription au RCCM est exigée doit,
dans le premier mois de l’exercice de son activité, demander son
immatriculation au greffe de la juridiction compétente ou à l’organe compétent
dans l’Etat partie, dans le ressort de laquelle son activité se déroule (article 44
de l’AUDCG). La demande est faite selon un modèle de formulaire mis à la
disposition des commerçants à cet effet par le greffe ou l’organe compétent
dans l’Etat partie, sauf les cas d’utilisation des moyens électroniques. Ce
formulaire qui est différent suivant qu’il s’agit d’un commerçant personne
physique ou d’un commerçant personne morale, est signé suivant le cas par
le déclarant, le demandeur ou son mandataire. Cette demande doit indiquer
pour les personnes physiques toutes les informations relatives à l’identité du
commerçant, à son état civil et notamment son régime matrimonial ; à son
activité et aussi à l’identité des personnes ayant le pouvoir général d’engager
par leur signature la responsabilité de l’assujetti.
En ce qui concerne les personnes morales, les principales mentions sont
la dénomination sociale, l’objet social, le siège social, l’identité des associés
tenus solidairement et indéfiniment du passif social etc. Une fois le dossier
complet reçu, le greffier l’ayant reçu, attribue un numéro d’immatriculation et
doit transmettre au commerçant concerné ou à son représentant un
bordereau sur lequel est mentionné ledit numéro. Ce commerçant est
désormais tenu d’indiquer sur toutes ses factures, bons de commande, et tous
documents relatifs au commerce, son numéro et le lieu d’immatriculation. En
cas de déplacement du fonds de commerce dans le ressort d’une même
juridiction, le commerçant est tenu de procéder à une simple correction de la

23
mention correspondante au RCCM ; cette exigence s’étend à toute modification
qui intervient dans la vie du commerçant et qui rendrait caduques les
informations données au moment de l’immatriculation. Par contre lorsque le
fonds de commerce est déplacé dans le ressort d’une autre juridiction, il lui
faudra radier la première immatriculation et procéder à une nouvelle
immatriculation. L’article 55 de l’AUDCG impose un délai d’un mois pour
accomplir cette double formalité ; délai qui doit être aussi respecté en cas de
cessation d’activité. Si le commerçant ne le fait pas, le greffier de la juridiction
compétente pourra procéder à cette radiation après une décision de la
juridiction compétente ayant siégé à la demande de tout intéressé. Aux termes
de l’article 57, cette demande doit être faite par l’ayant droit en cas de décès
du commerçant dans le même délai d’un mois à compter du décès.

B- Les effets de l’immatriculation au RCCM


L’inscription au RCCM produit des effets différents suivant qu’il s’agisse
d’une personne morale ou d’une personne physique.
A l’égard des personnes physiques, l’immatriculation au RCCM a
strictement un caractère personnel. L’article 49 interdit ainsi à une même
personne de s’inscrire sous plusieurs numéros dans un même registre ou
dans plusieurs registres. Il peut y avoir une inscription principale et des
inscriptions secondaires. L’effet principal de cette inscription est le
renversement de la charge de la preuve car elle fait présumer aux termes de
l’article 59 de l’AU la qualité de commerçant. Il s’agit toutefois d’une
présomption simple, puisque la qualité de commerçant n’est acquise qu’avec
l’exercice des actes de commerce à titre de profession. Autrement dit, on
devient commerçant avant de s’immatriculer au RCCM. L’obligation
d’immatriculation pèse sur celui qui exerce déjà le commerce.
Selon les termes de l’article 60 de l’AUDCG, toute personne physique
assujettie à l’immatriculation au RCCM qui n’a pas demandé celle-ci dans les
délais impartis, ne peut se prévaloir, jusqu’à son immatriculation, de la qualité
de commerçant.
En ce qui concerne les personnes morales, c’est-à-dire les sociétés
commerciales, l’immatriculation au RCCM est la condition même de leur
existence juridique. Ce qui veut dire qu’une société commerciale qui n’est pas
immatriculée au RCCM, n’a simplement pas la personnalité juridique et ne
peut par conséquent fonctionner comme une personne morale. C’est
l’économie de l’article 98 de l’AUDSCGIE. Cette immatriculation n’a donc pas
pour effet, comme c’est le cas pour la personne physique de faire présumer la
qualité de commerçant. Selon la CCJA, la production d’un extrait du RCCM
prouve la personnalité juridique de la société commerciale jusqu’à inscription
de faux (CCJA, Arrêt n° 044/2010 du 1er juillet 2010, aff. APC Sarl c/ Chevron
TEXACO Cameroun et al., JURIDATA n° J044/2010).

24
Toutefois, qu’il s’agisse de la personne physique ou de la personne
morale, elle ne peut invoquer son défaut d’immatriculation pour se soustraire
aux responsabilités et obligations inhérentes à la qualité de commerçant.
Par ailleurs, toute personne assujettie à l’immatriculation au RCCM ne peut,
dans l’exercice de ses activités, opposer aux tiers et aux administrations
publiques, qui peuvent toutefois s’en prévaloir, les faits et actes sujets à
transcription ou mention que si ces derniers ont été publiés au RCCM.
Cependant, cette disposition n’est pas applicable si l’assujetti établit qu’au
moment où ils ont traité, les tiers ou administrations en cause avaient
connaissance des faits et actes dont il s’agit.
Selon l’article 69 de l’AUDCG, toute personne tenue d’accomplir une des
formalités prescrites par cet Acte uniforme, et qui s’en est abstenue, ou encore
qui a effectué une formalité par fraude, est punie des peines prévues par la loi
pénale nationale. L’absence d’immatriculation est sanctionnée par
l’interdiction de se prévaloir de la qualité de commerçant, qui peut toutefois
être retenue à son encontre à titre de sanction.

P2 : La tenue d’une comptabilité


Aux termes de l’article 1er de l’Acte Uniforme relatif au droit comptable
et à l’information financière, toute entreprise commerciale doit mettre en
place, pour l’information externe et pour son propre usage, une
comptabilité générale. L’obligation de tenir une comptabilité ainsi formulée
était déjà contenue dans le code de commerce dont les dispositions ont été
reprises presque littéralement par l’Acte Uniforme portant sur le Droit
Commercial Général. Ce dernier doit cependant être complété s’agissant de la
tenue d’une comptabilité par des dispositions pertinentes de l’Acte Uniforme
relatif au droit comptable et à l’information financière. L’article 2 de cet Acte
uniforme impose l’obligation de tenir une comptabilité à toute entreprise
soumise au Droit Commercial, aux entreprises publiques et parapubliques,
aux coopératives, et de façon générale à toutes les entreprises qui produisent
des biens et services destinés au non à la vente, à l’exception de celles
soumises aux règles de la comptabilité publique. Dans le cas particulier des
commerçants, personnes physiques et morales, l’article 13 alinéa 1er de l’Acte
Uniforme sur le Droit Commercial Général prescrit « Tout commerçant,
personne physique ou morale doit tenir tous les livres de commerce
conformément aux dispositions de l’Acte Uniforme relatif à
l’organisation et à l’harmonisation des comptabilités des entreprises » ;
Les livres de commerce dont la tenue obligatoire est ainsi rappelée sont
constitués par le journal, le grand livre, la balance générale des comptes
et le livre d’inventaires. Le journal est la mémoire comptable de l’entreprise.
Tous les mouvements qui affectent le patrimoine de la personne morale ou le
fonds de commerce s’agissant des personnes physiques doivent y être
enregistrés au jour le jour dans l’ordre de leur date de valeur comptable. Le

25
législateur autorise cependant le commerçant à récapituler sur une pièce
unique, toutes les opérations de même nature réalisées le même jour en un
même lieu. Il a également le droit de récapituler dans le journal les
mouvements enregistrés sur une période ne pouvant excédée cinq semaines.
Le grand livre regroupe quant à lui l’ensemble des comptes de
l’entreprise. Il constitue une sorte de répertoire des inscriptions portées sur le
livre journal. En réalité, chaque opération sera enregistrée sur deux livres
distincts, une première fois sur l’ordre chronologique dans le livre journal et
la seconde fois à titre de récapitulatif sur le grand livre.
La balance générale des comptes fera ensuite apparaître le solde
débiteur ou créditeur du début de l’exercice, le cumul des mouvements de
débiteur et créditeur de l’exercice et le solde débiteur ou créditeur en fin
d’exercice.
Le livre d’inventaire enfin sur lequel doivent être transcrit le bilan et le
compte de résultat de chaque exercice résume l’opération d’inventaire
physique qui porte sur les stocks, les immobilisations et les titres etc. et qui
constitue le relevé et l’évaluation de tous les éléments actifs et passifs de
l’entreprise. Les livres de commerce doivent être tenus sans blanc ni altération
de toute sorte. De même, toute correction d’erreurs s’effectue exclusivement
par inscription négative des éléments erronées, l’enregistrement exact est
ensuite opéré ». Cette technique est connue en comptabilité sous le nom de la
contre passation d’écritures.
Les documents comptables ont une fonction probatoire, ils bénéficient
d’une présomption de sincérité. Il convient toutefois de préciser la force d’un
tel mode de preuve.
- Il faut rappeler que la comptabilité n’est pas opposable à un non
commerçant.
- La comptabilité fait preuve contre le commerçant qui la tient mais les
documents comptables sont indivisibles, on ne peut se prévaloir de
certains éléments de la comptabilité et en écarter d’autres.
- La comptabilité régulièrement tenue peut faire preuve en faveur de celui
qui la tient mais uniquement entre commerçants.
En cas d’inobservation des règles relatives aux obligations comptables du
commerçant, il peut être sanctionné surtout dans le cadre d’une procédure
collective ouverte à l’encontre du commerçant. Dans ce cas, l’Acte uniforme
OHADA sur les procédures collectives d’apurement du passif retient à son
encontre des infractions de banqueroute simple ou de banqueroute
frauduleuse qui sont punies des peines d’emprisonnement d’un an à deux ans
pour la première et de cinq ans à dix ans pour la seconde.

P3 : Le respect de l’éthique commerciale


L’éthique commerciale suppose le respect des règles de la concurrence
entre commerçants (P1) et la protection des consommateurs (P2).

26
A- La soumission aux règles de concurrence
La concurrence peut se définir comme la compétition qui se joue sur un même
marché pour atteindre une fin économique déterminée : l’offre de produits ou
de services qui satisfont des besoins identiques ou similaires ou, si l’on
préfère, la conquête et la conservation d’une clientèle. Pour que la concurrence
ne soit pas faussée sur le marché, certaines pratiques sont interdites sous
peine de sanctions
1- Les pratiques interdites
Il est interdit au commerçant de s’adonner à la concurrence déloyale et aux
pratiques restrictives de concurrence.
a- La concurrence déloyale
Il n’existe pas de définition proprement juridique de la concurrence déloyale.
La concurrence loyale est celle qui est conforme aux usages commerciaux. Le
caractère déloyal de la concurrence évolue selon les usages commerciaux.
Cependant en pratique, on peut dénombrer quatre comportements qui
relèvent les actes de concurrence déloyale.
- Le dénigrement et la publicité comparative : c’est le fait de jeter un
discrédit sur le concurrent en répandant des informations péjoratives et
malveillantes. Il y a une concurrence déloyale quand bien même les
informations seraient fondées à condition que le concurrent soit
nommément désigné ou soit simplement identifiable. Tel est le cas par
exemple lorsqu’un commerçant fait connaître les difficultés du concurrent
en informant que ce concurrent est à bord de la faillite ou encore présente
les produits du concurrent comme mauvais ou dangereux.
- La désorganisation de l’entreprise concurrente : La désorganisation
de l’entreprise concurrente peut être révélée par exemple par le débauchage
du personnel d’une entreprise concurrente. Ce débauchage peut être
sanctionné s’il vise à s’approprier la clientèle ou le savoir-faire de
l’entreprise.
- La confusion ou l’imitation d’un concurrent : Ce mode de
concurrence déloyale consiste à créer dans l’esprit de la clientèle une
confusion sur le produit vendu afin d’attirer à soi la clientèle du concurrent.
Exemple : le nom commercial, la marque, l’enseigne, les publicités.
- Le parasitisme : Sous le thème générique de parasitisme se retrouve
l’idée selon laquelle toute appropriation injustifiée du commerce d’autrui
doit être sanctionnée. C’est le fait pour une entreprise de se glisser dans le
domaine économique d’une autre entreprise pour profiter de sa réputation
et gagner des parts de marché à moindre frais, sans rien dépenser de son
effort et son savoir-faire. Le parasite tente de profiter des acquis et renom
d’autrui sans faire un investissement.

27
b- Les pratiques restrictives de concurrence
Les pratiques restrictives de concurrence sont le fait d’une entreprise seule
dénuée de toute position dominante sur le marché en cause qui utilise des
manœuvres maladroites pour s’approprier la clientèle de ses concurrents et
éliminer à terme ceux-ci. Le droit camerounais interdit ainsi un certain
nombre de pratiques depuis la loi de 1990. La loi n°2015/018 du 21 décembre
2015 régissant l’activité commerciale au Cameroun les a reprises. Il s’agit pour
l’essentiel des pratiques discriminatoires et de la revente à perte.
- La revente à perte : Il ressort de l’article 72, alinéa 1 de la loi de 2015
qu’ « Il est interdit de revendre un bien à un prix inférieur à son prix de
revient effectif». Le prix de revient effectif est défini par le même texte
comme le prix d’achat unitaire figurant sur la facture, majoré des droits
et taxes et, le cas échéant, des frais de transport.
- Les pratiques discriminatoires : Aux termes de l’article 78 de la loi de
2015, « Il est interdit à un commerçant de pratiquer, à l’égard d’un autre
commerçant, ou d’obtenir de lui, des prix, des délais de paiement, des
conditions de vente ou d’achat discriminatoires et non justifiées par des
contreparties réelles, conformes aux usages commerciaux loyaux et
honnêtes ». Trois critères permettent d’apprécier les « ventes
discriminatoires ». Il s’agit des prix, des délais de paiement et des
conditions de vente. On peut par exemple parler de pratique des
conditions de vente discriminatoires en cas de différence de traitement
au niveau des modalités de paiement et des délais de livraison ou
d’exécution des commandes.
2- Les sanctions
Plusieurs sanctions peuvent être retenues à l’encontre des commerçants
reconnus coupables de pratique de concurrence déloyale :
- La cessation des agissements déloyaux, peut être ordonnée sous
astreinte.
- La suppression de dénomination illicite.
- Le retrait à la vente des produits imités.
- L’interdiction de poursuivre une campagne publicitaire.
- L’imposition des dommages et intérêts.
- La publication du jugement aux frais du commerçant condamné peut
être ordonnée.
B- La protection des consommateurs
Le législateur assure la protection du consommateur à travers un certain
nombre de prescriptions ou d’interdictions faites au commerçant sous peine
de sanctions.

28
1- L’obligation d’information du consommateur
Le législateur fait reposer sur le commerçant une obligation expresse de
renseignements. Cette obligation réside dans la publicité des conditions de
vente des produits. Elle a trait :
- D’abord au prix : l’article 46, alinéa 1 de la loi n° 2015/018 du 21
décembre 2015, régissant l’activité commerciale au Cameroun prévoit
que « tout vendeur ou tout prestataire de service doit obligatoirement
informer les clients sur les prix, les tarifs » ;
- Ensuite aux conditions de vente et caractéristiques de la marchandise
vendue ;
- Enfin à l’existence des garanties : la notice délivrée doit préciser
l’étendue et la durée de la garantie accordée au client.
2- Les pratiques interdites
Sont interdites, sous peine de sanctions, les pratiques commerciales illicites
les pratiques commerciales trompeuses et les pratiques commerciales
agressives.
a- Les pratiques commerciales illicites
Elles sont régies par les articles 68 et suivants de loi n° 2015/018 précitée.
Ces articles interdisent :
- La vente des produits périmés, impropres à la consommation ou
susceptibles de porter atteinte à l’environnement ;
- La vente des produits ou substances prohibés ;
- Le refus de vente ou de prestation d’un service sans motif légitime
(article 69) ;
- La subordination de la vente à l’achat d’une quantité imposée ou à
l’achat concomitant d’un autre bien ou service ;
- Les prix illicites (article 76).
b- Les pratiques commerciales trompeuses
Les pratiques commerciales trompeuses sont celles qui contiennent des
informations fausses ou qui, d’une manière quelconque induisent ou sont
susceptibles d’induire le consommateur en erreur (article 79, alinéa 2 de la loi
n° 2015/018 précitée). Il s’agit notamment :
- Des publicités trompeuses ;
- Du refus de présenter au consommateur les articles ayant fait l’objet
d’une publicité ;
- De la présentation d’un échantillon défectueux ;
- De déclarer ou de donner l’impression que la vente d’un produit est licite
alors qu’elle ne l’est pas ;
- D’affirmer d’un produit qu’il augmente les chances de gagner à un jeu
de hasard ;
- Les opérations publicitaires présentant les caractéristiques d’une
publicité, sauf si elles n’imposent aux participants aucune obligation

29
d’achat ou aucune contrepartie financière de quelque nature que ce
soit…

c- Les pratiques commerciales agressives


Une pratique commerciale est réputée agressive lorsqu’elle altère ou est
susceptible d’altérer de manière significative, du fait du harcèlement, de la
contrainte ou d’une influence injustifiée, la liberté de choix ou de conduite du
consommateur à l’égard d’un bien ou d’un service et, par conséquent, l’amène
ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il
n’aurait pas prise (article 84, alinéa 1, loi de 2015 précitée).

Sous-section 2 : Les privilèges du commerçant


Plusieurs privilèges jadis réservés aux seuls commerçants ont été
étendus à d’autres catégories professionnelles. Il en est ainsi du régime
favorable du bail à usage professionnel, des procédures collectives préventives
et l’utilisation de la clause compromissoire. Seuls quelques privilèges
demeurent propres au commerçant (liberté de preuve, délai de prescription
réduit, mise en demeure simplifiée et solidarité). Quoiqu’il en soit, les
privilèges du commerçant sont soit d’origine légale, soit d’origine
jurisprudentielle (P3). Parmi les privilèges d’origine légale, le bail usage
professionnel sera étudié (P1) à côté des autres privilèges légaux (P2).

P1 : Le droit au renouvellement du bail à usage professionnel


Aux termes de l’article 103 de l’AUDCG, « est réputé bail à usage
professionnel toute convention, écrite ou non, entre une personne investie par la
loi ou une convention du droit de donner en location tout ou partie d’un immeuble
compris dans le champ d’application du présent Titre, et une autre personne
physique ou morale, permettant à celle-ci, le preneur, d’exercer dans les lieux
avec l’accord de celle-là, le bailleur, une activité commerciale, industrielle,
artisanale ou toute autre activité professionnelle ».
Le droit au renouvellement du bail à usage professionnel est un privilège
légal très important du commerçant. Pour diverses raisons, au premier rang
desquelles il faut ranger les considérations financières, le commerce est le plus
souvent exercé dans un local loué. Or, cette situation fait courir au
commerçant le risque de perdre son fonds de commerce s’il est expulsé de son
local. La protection du commerçant-locataire est donc apparue nécessaire. La
première loi française sur la question date du 30 juin 1926. Depuis lors, il a
été institué un droit au renouvellement en faveur du preneur. Allant dans le
même sens, l’AUDCG de 2010 a étendu le domaine d’application de ce privilège
à toute personne qui loue un immeuble en vue d’y exercer une activité
professionnelle. Mais, pour bénéficier du droit au renouvellement, l’intéressé

30
doit remplir un certain nombre de conditions (A). Toutefois, le bailleur garde
la possibilité de refuser le renouvellement (B).

A- Les conditions d’exercice du droit au renouvellement du


bail à usage professionnel
Ces conditions peuvent s’analyser en conditions de fond (1) et en conditions
de procédure (2).
1- Les conditions de fond
Ces conditions sont liées aux titulaires du droit au renouvellement (a) et à
l’exploitation du local (b).
a- Les titulaires du droit au renouvellement
Le droit au renouvellement du bail professionnel appartient au preneur.
Mais dans certaines situations, d’autres personnes peuvent vouloir en
bénéficier. Tel est notamment le cas lorsque le preneur initial a fait des
transactions sur le fonds de commerce.
Le sous-locataire peut ainsi, aux termes de l’article 130 de l’AUDCG
demander le renouvellement auprès du locataire principal dans la mesure des
droits que celui-ci tient du propriétaire. Mais la sous-location doit avoir été
faite régulièrement, c’est-à-dire avec le consentement du bailleur. Selon la
CCJA, viole les termes de son contrat et encourt expulsion, le locataire qui
procède à la sous-location des locaux pris à bail sans en avoir été autorisé ou
que ladite sous-location ait été notifiée au bailleur (CCJA, Arrêt n° 011/2012,
Affaire YAO NGUESSAN Irène c/ Okou Goubo, Juridata n° J011-03/2012).
Elle considère en outre que l’action en réclamation des loyers au sous-
locataire ne vaut pas reconnaissance implicite de la sous-location et les sous-
locataires demeurent des occupants sans droits à l’expiration du bail du
preneur (CCJA, Arrêt n° 101/2013 du 22 novembre 2013 aff. Veuve
NTOUTOUME c/ Jaber Ghali).
Le droit au renouvellement peut aussi être invoqué par le cessionnaire.
Il dispose des mêmes droits que le preneur initial. En cas de cession
régulièrement signifiée au bailleur par acte extrajudiciaire ou tout autre
moyen écrit, il doit faire valoir son droit au renouvellement directement contre
le bailleur. Le cessionnaire, contrairement au sous-locataire traite directement
avec le bailleur car il remplace le preneur par l’effet du contrat de cession.
C’est ainsi que la jurisprudence française affirme que le bailleur ne peut
relever comme motif grave et légitime de refus de renouvellement que des faits
imputables au locataire sortant (Cass. civ. 3e, 4 oct. 2000, Bull. civ., III, n°
155, p. 109, P. A., du 19 oct. 2001, n° 2009, p. 13, note crit. J.-L. Tixier.).
N’est pas considéré comme une cession, l’attribution, lors de la liquidation du
régime matrimonial pour cause de divorce, du droit au bail à l’époux qui en
était cotitulaire. Il s’agit, selon la 3e chambre civile de la Cour de cassation

31
(arrêt du 23 mars 2011, pourvoi n° 10-30.495), d’un simple partage. Le
locataire-gérant n’a pas droit au bail. Il gère le fonds de commerce pour son
propre compte mais n’en est pas le propriétaire. Depuis l’ancien article 4 du
décret n° 53-960 du 30 septembre 1953, le droit au renouvellement du bail
commercial n’est reconnu qu’au « propriétaire du fonds qui est exploité dans
les lieux ». Il va donc de soi qu’il ne peut en principe se prévaloir du droit au
renouvellement du bail des locaux qu’il exploite (ROUQUET (Y.), « De
l’impossibilité, pour le locataire-gérant, de revendiquer une indemnité
d'éviction auprès du bailleur », note sous Cass. civ., 26 sept. 2001, D. 2001,
Actualité jurisp. p. 3352). Seul le preneur à bail peut demander le
renouvellement pour son compte car il n’est pas exigé que celui-ci exploite
personnellement les lieux (Cass. civ. 3e, 28 mars 1973, Bull. civ., III, n° 237 ;
Cass. civ. 3e, 17 juill. 1981, Bull. civ., III, n° 145, Gaz. Pal., 1982, 1, Panor. p.
88, obs. J. D.).

b- Les conditions tenant à l’exploitation du local


Les parties sont libres de conclure le contrat de bail professionnel qui peut
être à durée déterminée ou indéterminée, écrit ou verbal et de fixer le montant
du loyer. Le preneur ne peut cependant se prévaloir du renouvellement du bail
que s’il justifie avoir exploité une activité continue dans l’immeuble pendant
une durée de deux ans, qu’il a exécuté le contrat conformément aux
stipulations contractuelles. Cette condition ne s’applique qu’aux obligations
essentielles du contrat. En l’absence de convention contraire, les obligations
essentielles sont le paiement régulier du loyer (Viole ainsi son obligation
principale et s’expose à la résiliation du bail le locataire qui ne s’acquitte pas
du loyer (CCJA A. n° 011/2012, Aff. YAO NGUESSAN Irène c/ OKOU GOUBO,
Juridata n° J011-03/2012), l’entretien courant de l’immeuble et le strict
respect de l’affectation des lieux prévus au contrat. Le plus souvent, le contrat
de bail définit le genre d’activités qui peuvent être exercés dans les locaux
loués. Si on retenait les solutions du droit commun, le locataire serait tenu de
respecter cette destination fixée par les parties. Cette règle est contraignante
pour les commerçants, car ils ne pourraient étendre leurs activités au-delà de
celles déterminées par le bail. Pour éviter de bloquer le développement des
activités d’un commerçant, on lui permet de faire une déspécialisation qui
peut être partielle ou totale, à condition d’aviser le bailleur dans la première
hypothèse ou obtenir son consentement dans la deuxième hypothèse (article
113 AUDCG). Quel que soit le cas, le bailleur ne peut reprocher au preneur
l’inexécution d’une obligation essentielle, et prétendre avoir droit à une
indemnité d’éviction que s’il apporte la preuve d’une mise en demeure faite au
preneur par acte extra-judiciaire d’avoir à payer ses loyers et que ladite
inexécution se soit poursuivie ou renouvelée plus de deux mois après la mise
en demeure (CCJA, A. n° 017/2006 du 26 octobre 2006).

32
2- Les conditions de procédure
Le preneur qui remplit ces conditions ne bénéficie pas de manière automatique
du renouvellement du bail commercial. Il ne s’agit que d’une faculté que lui
offre la loi. Pour en bénéficier, il doit adresser, conformément aux articles 124
et 125 de l’AUDCG, une demande au bailleur par acte extra-judiciaire,
notamment acte d’huissier. Lorsque le contrat est un contrat à durée
déterminée, cette demande doit être faite par le preneur au moins six mois
avant l’échéance du contrat. Faute de le faire, il est déchu de son droit au
renouvellement du bail professionnel (Dans l’espèce Société PONTY SARL c/
Société PONTY IMMOBILIERE SA, une clause du contrat de bail commercial liant les
deux parties prévoyait qu’à la fin de chaque période de six ans, la partie qui entendait
y mettre un terme devait prévenir l’autre par lettre recommandée ou par acte
extrajudiciaire au moins trois mois avant l’expiration de ladite période. Or à la fin de la
première période de six ans, aucune partie ne fit connaître à l’autre son intention de
mettre un terme au contrat. Le bailleur a même accepté le payement par le preneur du
premier mois de la deuxième période de six ans avant de faire machine arrière et
demander à ce dernier de libérer les lieux pour ne pas s’être prévalu de la faculté de
renouvellement que lui reconnaît les articles 91 et suivants de l’AUDCG. Les conditions
d’une reconduction tacite étaient pourtant réunies à partir du moment où les parties
avaient continué l’exécution du contrat après la fin de la durée initiale. Cependant, la
CCJA ne fit pas droit à la demande du preneur motifs pris de ce que les dispositions
de l’article 92 de l’AUDCG relatif à la déchéance du droit au renouvellement du bail
commercial sont d’ordre public et que les parties ne sauraient y déroger par convention.
Plus explicitement, la CCJA écarte en toute hypothèse la possibilité de faire recours à
la reconduction tacite en jugeant qu’ « il ne saurait être déduit d’un quelconque
comportement de la PONTY IMMOBILIERE SA et notamment de l’encaissement d’un
loyer, la volonté de celle-ci de reconduire tacitement ou implicitement le contrat de bail
litigieux en violation desdites dispositions d’ordre public de l’article 92 de l’Acte
uniforme susvisé ». CCJA, arrêt n° OO5/2006 du 30 mars 2006, Juridis Périodique, n°
70, avr., mai, juin 2007, p. 73, comm. F. Anoukaha. Dans le même sens, CCJA, A. n°
030/2007 du 22 novembre 2007, aff. SCI Golf de Guinée c/ Marine Atlantic SARL,). Le
bailleur qui reçoit cette demande est tenu de donner son avis au plus tard un
mois avant la fin du bail, faute de quoi, son silence vaudra acceptation.
Lorsque le contrat est un contrat à durée indéterminée, chaque partie a
le droit d’y mettre fin en respectant un délai de préavis d’au moins six mois.
Lorsque l’initiative de la rupture émane du bailleur, le preneur a le droit de
s’opposer au congé et de faire prévaloir son droit au renouvellement. Il doit
pour ce faire informer le bailleur par acte extra-judiciaire ou par tout moyen
laissant trace écriteau plus tard avant la fin de la période de préavis (six mois).
Selon la CCJA (Arrêt n° 041/2009 du 30 juin 2009), le preneur peut s’opposer
au congé jusqu’à la date de prise d’effet de celui-ci. Par conséquent, toute
contestation élevée en dehors de ce délai est tardive et le bail cesse à la date
fixée.

33
B- Le refus de renouvellement du bail à usage professionnel
Aux termes de l’article 126 de l’AUDCG, le bailleur peut s’opposer au
renouvellement du bail commercial en payant au preneur une indemnité
d’éviction dont le montant est fixé, à défaut d’accord entre les parties, par la
juridiction compétente en fonction du montant du chiffre d’affaires, des
investissements réalisés par le preneur, de la situation géographique du local
et des frais de déménagement imposés par le défaut de renouvellement. Selon
la CCJA (A. n° 030/2007 du 22 novembre 2007, aff. SCI Gof de guinée c/
Marina Atlantique SARL, juridata n° J030-11/2007), le preneur ayant acquis
le droit au renouvellement de son bail, toute opposition du bailleur au
renouvellement dudit bail, doit s’accompagner du versement d’une indemnité
d’éviction chaque fois que le bailleur ne justifie as d’un motif grave et légitime.
Les juges de fond jouissent d’un pouvoir d’appréciation souverain en la
matière. La CCJA y garde cependant un contrôle actif. Elle sanctionne par
exemple une Cour d’appel qui octroie une indemnité d’éviction en tenant
compte des investissements réalisés sur le local loué tout en accordant une
seconde fois une somme au titre de remboursement des investissements
réalisés. Car ce dernier remboursement ne pouvait être accordé qu’au preneur
sans droit au renouvellement du bail (CCJA, Arrêt n° 017/2006 du 26 oct.
2006, aff. SONATEL Sénégal c/ Clinique SOKHNA FATMA, Juridata n° J017-
10/2006).
Dans certaines circonstances, le bailleur peut ne pas renouveler le bail
sans avoir à régler une indemnité d’éviction. C’est le cas :
- lorsque le preneur n’a pas exécuté le contrat conformément aux
stipulations et qu’il a continué à violer le contrat malgré une mise en demeure ;
- s’il veut démolir l’immeuble loué et le reconstruire. Dans ce cas, le bailleur
doit justifier de la nature et de la description des travaux. Le preneur a le droit
de rester dans les lieux jusqu’au début des travaux de démolition (CCJA, arrêt
n° 033/2005 du 26 mai 2005, Juridis périodique n° 121, 2020, pp. 50 et 51note
B. Kem Chekem). Il bénéficie d’un droit de priorité pour se voir attribuer un
nouveau bail dans l’immeuble reconstruit.
- s’il veut y habiter en personne ou y loger les membres de sa famille dans les
locaux d’habitation accessoires au local principal. Mais ce droit de reprise peut
lui être refusé si le preneur établit que la privation de jouissance des locaux
d’habitation accessoires apporte un trouble grave à la jouissance du bail dans
les locaux principaux, ou lorsque les locaux principaux et les locaux
d’habitation forment un tout indivisible.
En dehors de ces hypothèses, le bailleur qui refuse de renouveler le
contrat de bail à usage professionnel devra verser au preneur une indemnité
d’éviction. Toutefois, la CCJA précise que l’indemnité d’éviction n’est pas
acquise de manière automatique. Le preneur doit s’en prévaloir dans les délais
prévus par l’Acte uniforme. Lorsque le congé lui est délivré par le bailleur, il
doit s’y opposer au plus tard à la date de prise d’effet, conformément aux

34
dispositions de l’article 125, al. 2 de l’AUDCG. Le non-respect de ce délai
emporte déchéance du droit à l’indemnité d’éviction (CCJA, Arrêt n° 032/2008
du 03 juillet 2008, aff. Sté Métalux SARL c/ Cheick Basse, Juridata N° J032-
07/2008).

P2 : Les autres privilèges d’origine légale


Parmi ces privilèges, on peut mentionner la liberté de la preuve (A) et la
réduction des délais de prescription (B).

A- La liberté de la preuve
Elle est exprimée par l’article 5 de l’AUDCG en ces termes : « les actes de
commerce se prouvent par tous moyens même par voie électronique à l’égard
des commerçants ». Le principe est donc celui de la liberté de preuve en matière
commerciale alors qu’en matière civile le principe reste la preuve par écrit
(CCJA, arrêt n° 053/2005 du 15 décembre 2005, Juridis périodique n° 121,
janvier-mars 2020, p. 51, note B. M. Kem Chekem). Cette solution est ancienne,
car elle permet le dénouement rapide des opérations commerciales qui sont
souvent répétitives, c'est-à-dire conclues entre les mêmes personnes et aux
mêmes conditions. En principe, elle est d'application générale. Par
conséquent, pour l'écarter, une règle spéciale doit le prévoir. Il en est ainsi du
nantissement du fonds de commerce (voir article 163 de l’Acte uniforme
portant organisation des sûretés) ou de la vente du fonds de commerce
(articles 149 et suivants de l’AUDCG).

B- La réduction des délais de prescription


D’après l’article 16 de l’AUDCG, « les obligations nées à l’occasion de leur
commerce entre commerçants, ou entre commerçants et non-commerçants, se
prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions plus
courtes ». Cette prescription abrégée en matière commerciale constitue
également une dérogation aux règles du droit civil. La rapidité de la conclusion
des opérations commerciales, et parfois leur répétition, a justifié l’institution
par l’AUDCG de la prescription extinctive quinquennale en matière
commerciale, sauf prescription spéciale en général plus courte. Exemple, en
matière de vente commerciale, la prescription est de deux ans (article 301,
alinéa 2 de l’AUDCG).

P2 : Les privilèges de source jurisprudentielle


La jurisprudence a consacré l’application aux commerçants de la règle de
la présomption de la solidarité (A) et celle de la mise en demeure (B).

35
A- La présomption de solidarité
Aux termes de l’article 1202 du Code civil, la solidarité ne se présume pas, elle
doit être expressément stipulée. En revanche, en droit commercial, selon une
règle établie par la jurisprudence, les commerçants sont présumés solidaires
pour l’exécution des obligations commerciales qu’ils contractent ensemble
(Req. 20 octobre 1920 et Civ. 18 juillet 1980, Grands arrêts de la jurisprudence
commerciale, pp. 3 et suivants, observations Pédamon). De manière plus claire,
lorsque plusieurs commerçants contractent une même dette, ou même que
certains se portent caution pour d’autres, ils sont tenus solidairement de la
dette et le créancier peut saisir n’importe quel débiteur pour le paiement de la
totalité de la dette, quitte à ce que celui qui paie se retourne contre les autres.
Cette solidarité est de droit : s'il y a plusieurs débiteurs, ils sont solidaires. Il
s’agit cependant d’une présomption simple dans la mesure où elle peut être
écartée soit par la volonté contraire des parties, soit en considération des
circonstances dans lesquelles l’obligation a été contractée.

B- La mise en demeure
Il s’agit de l’acte par lequel un créancier demande à son débiteur d’exécuter
son obligation et qui a notamment pour effet de faire courir les intérêts de
retard. D’après l’article 1139 du Code civil, le débiteur est en principe mis en
demeure par une sommation. La sommation est un acte d’huissier par lequel
le créancier invite formellement le débiteur à s’exécuter lorsqu’il ne dispose
pas d’un titre privé.
Mais, en matière commerciale, la jurisprudence a admis que même une lettre
ordinaire puisse valoir mise en demeure lorsqu’il en résulte une interpellation
suffisante (Cass. civ. 19 février 1878, Dalloz 1878, II, p. 261.). Prolongeant en
quelque sorte cette conception extensive de la mise en demeure, il est jugé
qu’en matière commerciale, par rapport aux actes accomplis dans son activité
professionnelle, le débiteur commerçant peut valablement être mis en
demeure par tous les moyens (Req. 28 octobre 1903, Dalloz 1904, I, p. 14).

36
Chapitre 2 : L’entreprenant, nouvel acteur

L’entreprenant est un nouvel acteur de l’environnement des affaires de


l’OHADA. Sa consécration en droit de l’OHADA constitue une innovation de la
révision de l’AUDCG intervenue le 15 décembre 2010 à Lomé. Son statut, bien
que proche de celui du commerçant ne manque pas de faire ressortir sa
spécificité et son autonomie. En le définissant, le législateur de l’OHADA a fait
ressortir les conditions à remplir pour acquérir cette qualité (Section 1) et par
la suite, n’a pas manqué de préciser ses droits et obligations (Section 2).

Section 1 : Les conditions d’acquisition de la qualité


d’entreprenant
D’après l’article 30 AUDCG, « L’entreprenant est un entrepreneur
individuel, personne physique qui, sur simple déclaration prévue dans le
présent Acte uniforme, exerce une activité professionnelle civile, commerciale,
artisanale ou agricole ». De cette définition, il ressort que l’entreprenant remplit
au moins deux conditions. D’abord une condition liée à la personne :
l’entreprenant doit être un entrepreneur individuel, personne physique (P1) ;
ensuite une condition liée à l’accès à la profession d’entreprenant : une
déclaration (P2). Mais, pour être entreprenant, ce professionnel doit également
remplir une condition liée au chiffre d’affaire (P3).

P1 : La condition liée à la personne : l’entreprenant, un


entrepreneur individuel personne physique
De l’article 30 précité, il apparaît clairement que «l’entreprenant est un
entrepreneur individuel, personne physique… ». Cette exigence exclue d’office
de cette qualité les groupes de personnes et les personnes morales. Cette
disposition semble confirmer l’idée selon laquelle la consécration de
l’entreprenant est une réponse du législateur de l’OHADA au développement
excessif du secteur informel dans sa zone géographique. Le secteur informel
étant généralement dominé par des initiatives individuelles, le législateur a
cru bon devoir confiner la qualité d’entreprenant aux seules personnes
physiques prises individuellement. Par ailleurs, l’exclusion des personnes
morales est de nature à les obliger à prendre des formes plus organisées
notamment les formes de sociétés commerciales prévues par l’Acte uniforme
relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique, des sociétés coopératives et autres formes prévues par les
législations nationales.

P2 : La déclaration d’activité de l’entreprenant


En disposant que « l’entreprenant… sur simple déclaration prévue dans le
présent Acte uniforme, exerce une activité professionnelle… », l’article 30
37
AUDCG conditionne l’accès à cette profession à une déclaration. Dès lors, trois
questions nous préoccupent : quand se fait la déclaration ? Où se fait la
déclaration ? Quelle est la conséquence du défaut de déclaration ?
-Le moment de la déclaration. La définition susmentionnée ne précise
pas le moment de la déclaration. Il faut se référer aux dispositions de l’article
62 al. 3 aux termes desquelles « l’entreprenant ne peut commencer son activité
qu’après réception de ce numéro de déclaration d'activité… ». Ceci revient à dire
que la déclaration est préalable à l’activité de l’entreprenant. Elle conditionne
le début de l’exercice de sa profession. Il doit le faire avant d’accomplir une
quelconque activité en cette qualité. Autrement dit, la déclaration n’est pas
une obligation de l’entreprenant, mais une condition de validité de sa qualité.
- Le lieu de la déclaration. Le titre 3 du livre 2 de l’AUDCG est intitulé
« déclaration d’activité de l’entreprenant au Registre du commerce et du
crédit mobilier ». Cet intitulé permet de voir que la déclaration est faite au
RCCM. Il s’agit du RCCM tenu au greffe de la juridiction compétente ou à
l’organe compétent de l’Etat partie, dans le ressort duquel il exerce (art. 62 al.
1).
- La conséquence du défaut de déclaration. Comme nous l’avons relevé,
la déclaration d’activité de l’entreprenant n’est pas une obligation découlant
de son statut, mais une condition de validité de son statut. En clair, la
déclaration n’est pas une simple publicité de sa qualité comme l’est
l’immatriculation du commerçant au RCCM. En effet, l’immatriculation ne
confère pas la qualité de commerçant, mais permet simplement à cette qualité
d’être connue de tous et contrôlée par les pouvoirs publics. Son absence
n’efface pas la qualité de commerçant, elle empêche simplement au
contrevenant d’opposer cette qualité aux tiers et de se prévaloir des privilèges
reconnus aux commerçants. Toutefois, il est considéré comme un commerçant
de fait contre qui on impose les obligations et les sanctions dues aux
commerçants réguliers. Par contre, dire de la déclaration qu’elle est préalable
revient à dire que sans elle, nul ne peut se prévaloir d’une quelconque qualité
d’entreprenant, même pas celle d’entreprenant de fait (qui ne devrait pas
exister). Dans une telle situation, tout laisse penser que le contrevenant ne se
verra pas appliquer les règles applicables aux entreprenants, mais plutôt
celles régissant l’activité correspondant à celle exercée dans le cadre de son
entreprise. Il sera ainsi agriculteur de fait, commerçant de fait ou artisan de
fait selon la nature de son activité.

P3 : Les conditions liées au chiffre d’affaire


De l’article 30 al. 2 de l’AUDCG, il ressort que « l’entreprenant conserve
son statut si le chiffre d’affaires annuel généré par son activité pendant
deux exercices successifs n’excède pas les seuils fixés dans l’Acte uniforme
portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises au
titre du système minimal de trésorerie ». Il faut donc se référer à l’Acte

38
uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des
entreprises pour définir les seuils sus-indiqués. L’article 13 de cet AU parle de
très petites entreprises soumises au « système minimal de trésorerie ». Ces très
petites entreprises, pour rester soumises à ce système minimal doivent avoir
un chiffre d’affaire inférieur ou égal aux seuils suivants : trente (30) millions
de F CFA pour les entreprises de négoce, vingt (20) millions de F CFA pour les
entreprises artisanales et assimilées, dix (10) millions de F CFA pour les
entreprises de services.
Par ailleurs, de l’al. 3 de l’article 30, il ressort que chaque Etat devra fixer
un chiffre d’affaire à ne pas franchir par l’entreprenant sous peine de perdre
sa qualité. C’est dire que pour être entreprenant et le demeurer, l’intéressé
doit éviter de réaliser un chiffre d’affaire supérieur aux seuils définis dans
l’Etat partie, sous peine d’être traité comme un entrepreneur individuel dans
son domaine d’activité. (Lire l’article 30 al. 3 qui dispose « Lorsque, durant deux
années consécutives, le chiffre d’affaires de l’entreprenant excède les limites
fixées pour ses activités par l’État partie sur le territoire duquel il les exerce, il
est tenu, dès le premier jour de l’année suivante et avant la fin du premier
trimestre de cette année de respecter toutes les charges et obligations
applicables à l’entrepreneur individuel. Dès lors, il perd sa qualité
d'entreprenant et ne bénéficie plus de la législation spéciale applicable à
l'entreprenant ».)

Section 2 : Les droits et obligations de l’entreprenant


Les droits (P1) et les obligations (P2) de l’entreprenant sont parfois
calqués sur ceux du commerçant.

P1 : Les droits de l’entreprenant


L’entreprenant, à l’instar du commerçant, a certains avantages :
- Il peut utiliser les preuves purement commerciales,
- Ses actes sont soumis à la prescription courte de 5 ans (art. 33 de
l’AUDCG) ;
Il peut bénéficier du droit au renouvellement du bail commercial. Mais
contrairement au commerçant qui bénéficie de plein droit de ce
renouvellement, l’entreprenant doit avoir inséré une telle clause dans le
contrat de bail pour pouvoir en bénéficier (art. 134, al.2). Il en est même pour
la fixation judiciaire du montant du loyer du bail renouvelé.

P2 : Les obligations comptables de l’entreprenant


Ces obligations sont de deux ordres :
- L’entreprenant est tenu d’établir, dans le cadre de son activité, au jour
le jour, un livre mentionnant chronologiquement l’origine et le montant de ses
ressources en distinguant les règlements en espèces des autres modes de

39
règlement d’une part, la destination et le montant de ses emplois d’autre part.
Ledit livre doit être conservé pendant cinq ans au moins (art. 31);
- En outre, l’entreprenant qui exerce des activités de vente de
marchandises, d’objets, de fournitures et denrées ou de fourniture de
logement doit tenir un registre, récapitulé par année, présentant le détail des
achats et précisant leur mode de règlement et les références des pièces
justificatives, lesquelles doivent être conservées.

40
2èmee Partie : Les biens du commerçant : le fonds de commerce

Le commerçant utilise, pour son activité, un ensemble de biens corporels


et incorporels. L’entreprise n’ayant pas de personnalité juridique, ces biens
demeurent la propriété de la personne physique ou morale qui exerce le
commerce. Néanmoins, les biens affectés à l’exploitation forment un ensemble
auquel le droit applique un régime juridique particulier : c’est le fonds de
commerce.
Dans le langage courant, le fonds de commerce désigne parfois
l’établissement ou l’entreprise qu’un commerçant exploite. Mais la notion
d’entreprise est beaucoup plus large que celle de fonds de commerce. Elle
englobe des éléments tels que le travail et le capital qui ne font pas parties
du fonds de commerce. Il en est de même des immeubles, les créances et les
dettes de l’entreprise qui ne sont pas des éléments du fonds de commerce. On
pourrait ajouter que la notion d’entreprise ne se limite aux seules activités
commerciales alors que le fonds de commerce est un instrument du
commerce. Le fonds de commerce n’est qu’un élément de l’entreprise
individuel ou sociétaire lui permettant de capter la clientèle. C’est d’ailleurs la
définition qu’en donne l’article 135 de l’Acte Uniforme selon lequel « le fonds
de commerce est constitué par un ensemble de moyens qui permettent aux
commerçants d’attirer et de conserver une clientèle ». Au regard des moyens mis
en œuvre pour son exploitation, le fonds de commerce apparaît souvent
comme l’investissement le plus important du commerçant. Cela justifie son
régime juridique particulier et la protection dont il bénéficie. Ce régime
répondant lui-même à une nécessité historique. Le législateur s’est en effet
efforcé au fil des ans à reconnaître un véritable statut juridique au fonds de
commerce et à en faire un important élément de crédit à travers le
nantissement ; gage sans dépossession du fonds de commerce. Cette nécessité
historique a parfaitement été perçue par les rédacteurs de l’Acte Uniforme qui
contrairement aux législations antérieurs établie un statut juridique
d’ensemble du fonds de commerce. On pourrait cependant se demander
pourquoi le texte de l’OHADA consacre un titre a part au bail commercial alors
que le droit au bail constitue un élément du fonds de commerce. Mais
l’évolution de la notion restrictive de bail commercial dans la première version
de l’Acte Uniforme à celle de bail professionnel dans la nouvelle version
apporte certainement une réponse à cette interrogation dans la mesure où les
commerçants ne sont plus seuls à bénéficier du droit au renouvellement de
leur bail. Cette prérogative est désormais reconnue à tout professionnel,
commerçant, industriel, artisan ou autres.
Le statut juridique du fonds de commerce tel que définie par l’Acte
Uniforme de l’OHADA peut être appréhendé au regard de la notion même du
fonds de commerce (section 1) et des différents contrats portant sur le fonds

41
de commerce dont peut faire l’objet d’un fonds de commerce d’autre part
(section 2).

Chapitre 1 : la notion de fonds de commerce

De l’article 135 de l’AUDCG, il ressort que « le fonds de commerce est


constitué par un ensemble de moyens qui permettent au commerçant d'attirer et
de conserver une clientèle ». Sa composition dépend en réalité de la nature de
l’activité exercée par le commerce. Il n’existe dont pas d’homogénéité dans la
composition des fonds de commerce (section 1). Le législateur a néanmoins
retenu sans doute du fait de leur existence dans la plupart des fonds de
commerce certains éléments généralement considérés comme en faisant
partie. Ces éléments étant chacun soumis à un régime juridique particulier
distinct de celui applicable à l’ensemble que constitue le fonds de commerce
dont il importe de préciser la nature juridique (section 2).

Section 1 : La composition du fonds de commerce


L’Acte uniforme présente les éléments constitutifs du fonds de commerce
sans en faire une classification. Il énonce indistinctement les éléments
corporels et les éléments incorporels. Mais, parmi ces éléments, certains sont
obligatoires, parce qu’incontournables dans chaque fonds de commerce (P1)
alors que d’autres ne sont que facultatifs (P2).

P1 : Les éléments obligatoires du fonds de commerce


L’article 136 de l’AUDCG dispose que « le fonds de commerce comprend
nécessairement la clientèle et l'enseigne ou la clientèle et le nom commercial,
sans préjudice du cumul de la clientèle avec l’enseigne et le nom commercial ».
On comprend vite que la clientèle est l’essence du fonds de commerce (A) à
laquelle il faut associer soit le nom commercial soit l’enseigne commercial (B).

A- La clientèle, élément essentiel du fonds de


commerce
Le Code de commerce utilisait parfois la double expression « clientèle et
achalandage ». De là, certains auteurs en ont conclu que la clientèle désignait
les personnes attirés par les qualités personnelles du commerçant alors
l’achalandage était constituée par des personnes attirées par l’implantation de
l’établissement commercial. Mais, la jurisprudence n’a jamais consacré cette
distinction vu qu’aucune conséquence pratique ne s’y attachait. C’est
pourquoi la clientèle sera définie ici comme comme l’ensemble de personnes
qui s’approvisionnent habituellement ou occasionnellement auprès d’un

42
commerçant déterminé en raison de ses qualités personnelles ou
l’implantation de son commerce.
La clientèle est au cœur de la notion de fonds de commerce. Elle est
d’abord un élément constitutif du fonds de commerce. Mais, loin d’être un
simple élément du fonds, la clientèle constitue aussi la valeur que représente
l’espoir de maintenir le chiffre d’affaire réalisé au cours des mois précédents,
en continuant d’utiliser les mêmes structures d’exploitation. C’est pourquoi
l’article 135 de l’AUDCG en fait la finalité du fonds de commerce, ce qui veut
dire que la clientèle est attachée au fonds, et pas à la personnalité du
commerçant. Ce qui n’est pas le cas dans le domaine civil (profession libérale)
où la clientèle d'un médecin ou avocat est plus attachée à la personne de celui
qui exerce l'activité (puisque les contrats conclus entre commerçants ou entre
commerçants et non commerçants ne sont pas des contrats conclus intuitu
personae, contrairement à ceux conclus par les médecins et avocats). La
conséquence en est qu’il n’y a pas de fonds de commerce sans clientèle propre.
D’une part un fonds de commerce n’est créé que lorsqu’une clientèle existe.
C’est à dire le plus souvent après le début de l’exploitation du fond. La
question a une importance en droit de régimes matrimoniaux. Sous le régime
légal, les biens créés par les époux avant leur mariage restent des biens
personnels à ces époux et ceux créés après leur mariage sont des biens
communs. Pour définir à quel moment a été créé le fonds de commerce, il faut
rechercher à quel moment le commerçant a eu une clientèle. D’autre part pour
définir si un commerçant exploite un ou plusieurs fonds de commerce, il faut
se demander si la clientèle est distincte.
La clientèle doit présenter certaines qualités :
- La clientèle doit être réelle et certaine. Une clientèle simplement
virtuelle ne suffit pas pour considérer qu’un fonds a été créé. Ainsi, la
jurisprudence décide constamment que la location d'un immeuble
comprenant un four et un matériel complet de boulangerie n'est pas une
location de fonds de commerce dès l'instant que le propriétaire n'avait
utilisé le four que pour des besoins familiaux ou l'entraide entre voisins
et n'avait pas créé de clientèle (CA Rennes, 4 janv. 1951, S. 1952.2.145,
note Lagarde). Il en est de même pour la location d'un cinéma,
entièrement équipé mais non encore ouvert au public (T. civ. Marseille,
23 mai 1952, JCP 1953. II. 7777, note Béraud, RTD com. 1954.76, no
5-III, obs. Jauffret). Elle fait cependant exception lorsqu’il s’agit des
stations-service créées, aménagées et aussitôt louées par les sociétés
pétrolières pour lesquelles la Cour de cassation a estimé qu’il existait
tout de même réelle et certaine attachée à la société exploitante (Cass.
com. 27 févr. 1973, D. 1974.283, note J. Derruppé)
- La clientèle doit être personnelle au titulaire du fonds de commerce.
La question se pose principalement pour ce que l’on appelle le commerce
intégré. Ex : Vendeur des journaux qui se situe dans une galerie

43
commerciale. La question peut se poser pour savoir s’il peut bénéficier
du statut de baux commerciaux. Arrêt de la cour de cassation, 3ème
chambre civile, arrêt 19/01/2005. JCP 2005, 2ème partie N° 10.040.
Selon la Cour d’appel de Bobo Dioulasso (Arrêt n° 68 du 68 du 6
décembre 2004, ohadata J-07-209), le commerçant non titulaire du
droit au bail, qui exerce son activité sous le nom commercial et
l’enseigne d’autrui, ne peut prétendre à la propriété de la clientèle même
si la marchandise et les matériels concourant à l’exploitation du fonds
de commerce lui appartiennent.
- La clientèle doit être licite. Une clientèle illicite n’a aucune valeur
juridique. La clientèle d’une maison de tolérance ou d’une salle de jeu
clandestine n’est pas valable.

B- La combinaison de la clientèle au nom commercial


et/ou à l’enseigne
Avec le nouvel Acte uniforme, les commerçants peuvent combiner la
clientèle avec le nom commercial ou avec l’enseigne, ou alors aux deux.
Cependant, le texte ne dit pas expressément par quel moyen on devrait
constater la volonté du commerçant d’associer sa clientèle avec l’un ou l’autre
de ces éléments. Ce qui est sûr, c’est que la clientèle à elle seule est
insuffisante pour constituer un fonds de commerce. On pense que c’est lors
des transactions qui se font sur le fonds de commerce que le commerçant
devra préciser quels sont les éléments du fonds de commerce qu’il entend
inclure dans la transaction.
En ce qui concerne le nom commercial, il désigne et singularise le
commerçant personne physique ou morale. Il s’agit de l’appellation sous
laquelle un commerçant exerce une activité. Quand le commerçant est une
personne physique, le nom commercial ne doit pas être confondu au nom du
propriétaire du fonds de commerce. Il faut nécessairement que le commerçant
trouve un nom commercial avec des additifs qui vont permettre de faire la
distinction entre sa personne et son nom commercial. Les personnes morales
doivent également avoir un nom commercial qui est leur dénomination sociale.
Quoiqu’il en soit, le nom commercial doit faire l’objet d’une inscription au
RCCM et doit figurer dans tous les documents de l’entreprise. Le nom
commercial bénéficie d’une protection légale car son titulaire peut exercer une
action en concurrence déloyale en cas d’usurpation ou imitation susceptible
de créer une confusion et pourra obtenir réparation sur la base des articles
1382 et suivants du Code civil.
En ce qui concerne l’enseigne, elle peut servir à la localisation de
l’établissement. Elle désigne généralement l’ensemble des supports et
emblèmes qui singularisent l’établissement (signe, objet, symbole etc…). Sa
réglementation est identique à celle du nom commercial.

44
P2 : Les éléments facultatifs du fonds de commerce
Suivant la nature de l’activité commerciale exercée, le fonds de commerce
peut comprendre en plus des éléments obligatoires (l’article 136 de l’Acte
Uniforme) les éléments facultatifs dont l’énumération est donnée de façon non
exhaustive par l’article 137. Il s’agit des installations, aménagement et
agencements du matériel et du mobilier, des marchandises en stock, des
licences d’exploitation, brevet d’invention, marques de fabrique ou de
commerce, dessins et modèles et tout autre droit de propriété intellectuelle
nécessaire à l’exploitation. Cette énumération comprend des éléments
susceptibles d’être classés selon la distinction traditionnelle entre les éléments
incorporels et les éléments corporels. Il faut préciser également dans cette
optique que tous les éléments obligatoires visés à l’article 135 sont des
éléments incorporels du fond commercial.

A- Les éléments incorporels


La catégorie des éléments incorporels du fonds de commerce regroupe
dans l’énumération donnée par l’article 137 le droit au bail, le droit de
propriété incorporelle, les licences d’exploitation et autres autorisation
administratives.
Le droit au bail est juridiquement défini comme un droit de créance ou
un droit personnel du preneur ou locataire-commerçant contre le bailleur. Il
confère à son titulaire le pouvoir d’exiger le renouvellement du contrat de bail
sous peine d’indemnité d’éviction comme tout droit de créance, le droit au bail
a une valeur pécuniaire et peut donc faire l’objet de convention particulière.
Aussi les commerçants stipulent-ils régulièrement dans leur contrat de bail le
droit de céder le bail en même temps que les autres éléments du fonds de
commerce pour la durée restant à courir. Le cessionnaire du fonds de
commerce acquérant à son tour un véritable droit au renouvellement du bail.
Dans de nombreuses activités commerciales, la valeur économique du fonds
de commerce repose sur son emplacement. Le bail revêt dans ces cas une
importance toute particulière et la Cour de Cassation a eu à décider que la
seule cession du bail pouvait constituer une véritable cession du fonds de
commerce. Le droit au bail qui est une contrepartie des loyers payés par le
commerçant est un droit mobilier essentiel au ralliement de la clientèle. Il
existe cependant des fonds de commerce sans droit au bail, l’hypothèse étant
celle du commerçant-propriétaire ou usufruitier de l’immeuble dans lequel est
exploité le fonds de commerce. Dans ce cas, le droit réel immobilier ou le droit
à a jouissance du local ne fera pas partie du fonds de commerce, les
immeubles étant exclus de sa composition.
Les droits de propriété intellectuelle (incorporelle) sont des droits
incorporels portant sur des créations de l’intelligence et qui confèrent à leur
titulaire un monopole d’exploitation ou d’utilisation protégé par la loi. La
protection consiste principalement à sanctionner toute contrefaçon d’une
45
œuvre originale. En visant les droits de propriétés incorporelles tel que les
brevets d’invention, les marques de fabrique et de commerce, les marques
industrielles ainsi que les dessins et modèles, l’article 137 de l’Acte Uniforme
reconnaît l’importance que de tels éléments peuvent revêtir dans l’exploitation
d’un fonds de commerce dont ils constituent parfois toute la valeur
économique. Les droits de propriété intellectuelle compris dans un fonds de
commerce peuvent être cédés séparément ou avec les autres éléments du
fonds. L’article 148 de l’Acte Uniforme exigeant en cas de cession d’un fonds
de commerce la stipulation expresse que celle-ci englobe également les droits
de propriété incorporelle.
D’autres éléments incorporels proche de ces droits peuvent être compris
dans un fonds de commerce c’est le cas de licences d’exploitation ou
d’autorisation administratives requises pour certaines activités commerciales
telles que les transports, l’exploitation d’une pharmacie ou des débits de
boisson etc. Ces licences et autorisations qui ont un caractère personnel sont
théoriquement dépourvues de valeur pécuniaire et ne devraient pas être
considérés comme des éléments du fonds de commerce. Mais dans la
pratique, les commerçants qui cèdent leur fonds de commerce ont coutume
de présenter ou de recommander leur successeur à l’administration et d’exiger
pour ce service particulier le paiement d’un prix parfois élevé. Cette pratique
a ainsi conférée un véritable caractère patrimonial aux autorisations
administratives que consacre le droit positif.

B- Les éléments corporels du fonds de commerce


Les éléments corporels du fonds de commerce énumérés à l’article 137
de l’Acte Uniforme sont constitués par les installations, aménagements et
agencement, le matériel, le mobilier et les marchandises en stock. Seuls le
matériel et les marchandises revêtent cependant un véritable intérêt juridique.
Le matériel : l’Acte Uniforme n’a pas repris en ce qui concerne le
matériel l’énumération de la loi de 1909 qui associait matériel et outillage. En
réalité, les deux termes désignent la même chose c'est-à-dire tous les objets
corporels et mobiliers servant à l’exploitation du fonds de commerce. Il s’agit
en l’occurrence des machines et du matériel roulant. Le matériel attaché à
perpétuel demeure à l’immeuble et étant devenu immeuble par destination est
quant à lui exclu de la composition du fonds de commerce. Le matériel a
beaucoup plus importance dans l’industrie que dans la vente distribution et
dans la grande distribution. Il doit être distingué du mobilier au sens stricte
servant à l’aménagement d’un local ou d’un immeuble et non à la production
des biens et servies elle-même.
Les marchandises en stock : au sens général, les marchandises
peuvent désignées tous les stocks de produits-finis ou de matière première
destinées à la vente. Les marchandises en stocks se distinguent des
marchandises stricto sensu qui sont envisagées comme corps certain ou

46
individualisé et qui ne feront pas partis du fonds de commerce au sens de
l’article 137 de l’Acte Uniforme, seuls les stocks composés de marchandises
fongibles dont constamment variable constituent les éléments du fonds de
commerce. La variabilité des stocks permet aussi de les distinguer du matériel
qui constitue l’élément le plus stable du fonds de commerce. La distinction
peut néanmoins être malaisée lorsque le commerçant utilise pour
l’exploitation de son fonds de commerce les objets semblables à ceux qu’il met
en vente. Le critère de distinction dans ce cas sera la destination de l’objet et
non pas leur nature. Ainsi, un micro-ordinateur peut être une marchandise
ou un matériel selon qu’il est destiné à la vente ou à l’usage professionnel du
commerçant.

Section 2 : la nature juridique du fonds de commerce


Le fonds de commerce est-il un patrimoine affecté à l’activité commerciale
d’une personne physique ou morale ? La doctrine a pendant longtemps nourri
de nombreuses controverses autour de la nature juridique du fonds de
commerce. Si on peut y voir une universalité, le fonds de commerce se
présente davantage comme un bien meuble incorporel, autrement dit, un
élément du patrimoine du commerçant.

P1 : Le fonds de commerce est une universalité


Le fonds de commerce est à n’en point douter une universalité. Il est
constitué, malgré les apparences, d’un ensemble d’éléments qui, malgré leur
disparité, présente une même finalité. Il y a une cohérence certaine, un fil
rouge qui réunit tous ces biens, tous ces éléments d'actif. Cette cohérence est
la captation, l'exploitation et le maintien d'une clientèle. Tout ce qui sert cet
objectif fait partie du fonds de commerce. C'est l'outil de production et de
travail du commerçant qui peut faire l’objet de transactions différentes de
celles qui peuvent se réaliser sur des éléments du fonds pris distinctement
telles que la location-gérance, le nantissement ou encore la vente. En cela, le
fonds de commerce est une universalité. Mais s’agit-il d’une universalité de
droit ou de fait ?
Une universalité juridique est constituée d’un ensemble de droits qui sont
liés les uns aux autres. Le droit civil connaît une universalité de droit : le
patrimoine qui comporte deux compartiments. À l'actif, figurent tous les
droits, les éléments qui ont une valeur positive. Au passif, figurent toutes les
obligations, les éléments qui ont une valeur négative. Or le fonds de commerce
ne présente pas une telle indivisibilité. Les dettes nées de l’exploitation du
fonds ne sont pas en principe transmises avec le fonds qui n’est pas d’ailleurs
le seul gage des créanciers. Ceux-ci peuvent saisir n’importe quel autre
élément du patrimoine du commerçant qu’il soit personne physique ou
personne morale. Cela veut dire qu’un commerçant n’a pas deux patrimoines
dont un répondrait des dettes commerciales et l’autre des dettes civiles. Le
47
fonds de commerce n’est qu’un élément du patrimoine. La théorie classique
d’Aubry et Rau s’oppose à ce qu’une personne ait deux patrimoines.
Le fonds de commerce est ainsi plus une universalité de fait. En effet, il
n’est qu’un assemblage de biens réunis par une personne pour servir une
destination commune, et exclusive de toute idée de passif propre. C’est un
ensemble d’éléments qui visent le même objectif qui est d’attirer la clientèle.
Pour cette raison, tous ces éléments vont être appréhendés de manière
unitaire à l’occasion d’une opération unique. Cette qualification est toutefois
discutée car le fonds n’est pas toujours traité comme un bien unique. A
l’occasion de la vente du fonds de commerce, le vendeur dispose ainsi d’un
privilège qui va s’exercer séparément sur les marchandises, sur le matériel et
sur des éléments incorporels.

P2 : Le fonds de commerce est un bien meuble incorporel


Le fonds de commerce est uniquement composé de biens meubles. On ne
saurait en aucun cas rattacher ce bien à la catégorie des immeubles car y sont
exclus mêmes les immeubles par destination. La jurisprudence a toujours
retenu cette solution. Il s’agit d’un bien mobilier et incorporel. Il est vrai qu’il
est composé d’éléments corporels et d’éléments incorporels. Mais si l’on se
réfère à l’article 136 de l’AUDCG, on constate que les principaux éléments du
fonds de commerce, ceux qui sont obligatoires, sont la clientèle, le nom
commercial et l’enseigne, qui sont tous de nature incorporelle. On peut donc
en déduire, en se basant sur la théorie de l’accessoire que le fonds de
commerce est de nature incorporelle car il s’agit en fin de compte d’une
enveloppe abstraite qu’il n’est pas possible d’appréhender physiquement.
Cette qualification n’est pas sans conséquence juridique. Parce qu’il s’agit d’un
bien incorporel, la règle « En fait de meuble, la possession vaut titre » ne pourra
pas s’appliquer au fonds de commerce. En cas de conflit entre deux
acquéreurs successifs du même fonds de commerce, seule, la date de la
convention des parties sera prise en compte indépendamment de la mise en
possession.

48
Chapitre 2 : Les contrats portant sur le fonds de commerce

Le fonds de commerce est un bien. En tant que tel, il peut être l’objet de
divers contrats. Il est ainsi un bien productif pouvant faire l’objet d’une
location-gérance (section 1). Il peut également être un objet de garantie des
opérations de crédit à l’instar du nantissement (section 2). Il peut enfin faire
l’objet d’aliénations (section 3).

Section 1 : La location-gérance du fonds de commerce


Aux termes des dispositions de l’article 138 de l’AUDCG, la location-
gérance est une convention par laquelle le propriétaire du fonds de commerce,
personne physique ou morale, en concède la location, en qualité de bailleur,
à une personne physique ou morale, locataire-gérant, qui l’exploite à ses
risques et périls. Cet article dispose également que « l’entreprenant ne peut être
partie à un contrat de location-gérance ». En d’autres termes, l’entreprenant
commerçant est obligé d’exploiter lui-même son fonds de commerce.
Le contrat de location-gérance s’analyse comme un contrat dont l’objet
est de concéder l’exploitation d’un fonds de commerce à une personne autre
que le propriétaire. Pour sa conclusion, les parties doivent respecter des
conditions précises (P1) pour permettre au contrat de produire ses effets (P2).

P1 : Les conditions de formation du contrat de location


gérance
Les parties doivent respecter les conditions de fond (A) et les conditions
de forme (B).

A : Les conditions de fond


Le contrat de location-gérance est d’abord soumis aux conditions
générales de l’article 1108 du Code civil à savoir un consentement non vicié,
la capacité des parties, un objet et une cause licites. De manière particulière
cependant, on distingue des conditions liées au locataire gérant de celles à
remplir par le bailleur.
Le locataire-gérant a la qualité de commerçant ; il est alors soumis tant
aux obligations qui en découlent (art. 139 AUDCG) qu’aux dispositions des
articles 6 et 12. Il ne doit donc pas souffrir d’interdictions d’exercer les
activités commerciales ni d’incompatibilités.
Le bailleur quant à lui doit avoir exploité, pendant deux ans au moins en
qualité de commerçant, le fonds de commerce mis en location. Mais ce délai
peut être réduit à un an par la juridiction compétente, si le commerçant
justifie qu’il était dans l’impossibilité d’exploiter son fonds personnellement ou
par l’intermédiaire de ses préposés. L’article 143 de l’AUDCG atténue

49
également cette exigence en cas de décès du commerçant ou pendant la
minorité de ses héritiers. Enfin, le bailleur qui concède la location-gérance ne
doit pas être interdit d’exercer la profession commerciale ou avoir été
sanctionné par une déchéance.

B : Les formalités de publicité


Le contrat de location-gérance est un contrat consensuel dont la validité
ne dépend pas de la rédaction d’un écrit. Mais pour les besoins de publicité et
de preuve, le contrat de location-gérance doit être publié, par la partie la plus
diligente, et aux frais du locataire-gérant, dans la quinzaine de sa date, sous
forme d'extrait dans un journal habilité à publier les annonces légales et
paraissant dans le lieu où le fonds de commerce est inscrit au Registre du
Commerce et du Crédit Mobilier. Le propriétaire du fonds, s'il est commerçant,
est tenu de faire modifier à ses frais son inscription au RCCM par la mention
de la mise en location-gérance de son fonds.
En plus, l’article 140 dispose que le locataire-gérant est tenu d'indiquer
en tête de ses bons de commande, factures et autres documents à caractère
financier ou commercial, avec son numéro d'immatriculation au Registre du
Commerce et du Crédit Mobilier, sa qualité de locataire-gérant du fonds.
Toute infraction à cette disposition est punie par la loi pénale nationale.

P2 : Les effets du contrat de location gérance


Le contrat de location-gérance produit des effets soit entre les parties (A)
soit à l’égard des tiers (B).

A- Effets entre les parties


Comme dans tout contrat de location de meuble, le bailleur doit mettre
le fonds de commerce à la disposition du locataire et garantir une jouissance
paisible au locataire-gérant (garantie d’éviction et des vices cachés). Le bailleur
profite des améliorations apportées au fonds de commerce par le locataire
gérant. Il doit respecter la clause de non concurrence si elle est inclue dans le
contrat. L’article 139 al. 4 impose au bailleur l’obligation de modifier son
inscription au RCCM.
Quant au locataire-gérant, il doit :
- payer au bailleur du fonds un loyer correspondant à la redevance due
pour la jouissance des locaux, et un loyer pour la jouissance des éléments
corporels et incorporels du fonds de commerce tels que décrits dans le contrat
de location-gérance. Ces deux éléments de loyer sont obligatoirement
déterminés de façon séparée dans le contrat de location-gérance, même si
leurs échéances sont fixées aux mêmes dates.
- Le locataire-gérant ne doit pas étendre l’objet, ni détourner la clientèle
à son profit.

50
- Il ne peut ni céder ses droits, ni sous louer, parce que le contrat est
conclu intuitu personae.
- Il est tenu de continuer les contrats de travail en cours car les
travailleurs sont des tiers par rapport au contrat de location-gérance.
- il devient commerçant. Par conséquent, il doit se soumettre à toutes
les obligations qui incombent aux commerçants. Notamment, il doit dans le
mois qui suit le début de l’exploitation s’immatriculer au RCCM.

B- Effets à l’égard des tiers


Les tiers intéressés par le contrat de location-gérance sont les créanciers
du bailleur. Ils ont accordé du crédit au bailleur en considération du fonds de
commerce. A partir du moment où le bailleur a laissé l’exploitation du fonds
de commerce à une autre personne, ils doivent le savoir car les risques que le
bailleur éprouve les difficultés de remboursement sont réels. C’est la raison
pour laquelle, l’article 144 de l’AUDCG dispose que les dettes nées de
l’exploitation du fonds de commerce par le bailleur peuvent être déclarées
immédiatement exigibles par la juridiction compétente, à la demande de toute
personne intéressée, si elle estime que la location gérance met en péril leur
recouvrement.
Jusqu’à ce que les parties procèdent à la publication du contrat de
location-gérance au RCCM, le propriétaire reste solidaire des dettes nées de
l’exploitation du fonds par le locataire-gérant.

Section 2 : Les opérations de crédit garanties par le fonds de


commerce
Le commerçant peut utiliser le fonds de commerce comme garantie pour
les dettes qu’il sollicite. Le fonds de commerce sert alors de moyen pour obtenir
du crédit. Les principales garanties obtenues à partir du fonds de commerce
sont le nantissement et le privilège du vendeur du fonds. Mais, cette dernière
garantie qui est spécifique à la vente du fonds de commerce sera étudiée dans
ce cadre. Dès lors, seul le nantissement du fonds de commerce retiendra
l’attention ici à travers la présentation de ses conditions de formation (P1) et
de ses effets (P2).

P1 : La formation du nantissement du fonds de commerce


Deux principales conditions sont requises s’agissant de la constitution
du nantissement. Elles concernent la détermination de l’assiette de la sûreté
et le respect des exigences de forme ainsi que de publicité.

51
A- L’assiette du nantissement
A l’instar de la cession du fonds de commerce, le nantissement porte
nécessairement sur la clientèle et l’enseigne ou le nom commercial. Les autres
éléments du fonds de commerce ne peuvent être compris dans l’assiette du
nantissement au sens des articles 162 de l’Acte Uniforme qu’en vertu d’une
stipulation expresse de la convention. Une mention particulière devra
également être faite à cet effet au R.C.C.M. L’Acte Uniforme exclu cependant
du nantissement du fonds de commerce les droits réels immobiliers conférés
ou constatés par des baux ou des conventions soumises à la publicité foncière.

B- La forme et la publicité de l’acte de nantissement


Le nantissement conventionnel du fonds de commerce doit être constaté
dans un écrit contenant les mentions obligatoires énumérées à l’article 163 de
l’Acte uniforme des Sûretés :
- la désignation du créancier, du débiteur et du constituant du
nantissement si celui-ci n’est pas le débiteur lui-même.
- la désignation précise et le siège du fonds de commerce et s’il y a lieu
de ses succursales.
- Les éléments du fonds nantis
- Les éléments permettant l’individualisation de la créance garantie tels
que son montant ou son évaluation, sa durée et son échéance.
Toutes ces mentions sont requises à peine de nullité de l’acte qui peut
indifféremment être authentique ou sous seing privé. Le nantissement peut
dans certains cas être judiciaire lorsque le créancier sollicite directement du
tribunal l’inscription de cette sûreté sur le fonds de commerce de son débiteur.
Cette possibilité est prévue par l’article 164 de l’Acte Uniforme qui impose au
juge de faire figurer dans sa décision toutes les mentions obligatoires de l’acte
de nantissement énumérées à l’article 163.
Qu’il soit conventionnel ou judiciaire, le nantissement ne sera opposable
aux tiers que s’il fait l’objet d’une inscription au R.C.C.M.
La publicité spéciale devra également être faite en vertu de l’article 170
de l’Acte Uniforme auprès de l’organisme compétent en matière de propriété
intellectuelle lorsque des droits de cette nature sont inclus dans le
nantissement. L’inscription des sûretés conserve les droits du créancier nantis
pendant une durée de 05 ans à compter de sa date. Cet effet cesse lorsque
l’inscription n’est pas renouvelée à l’expiration de ce délai. Les créanciers
inscrits bénéficient aussi en vertu des articles 177 et 178 de l’Acte uniforme
d’un droit de surenchère de 1/6, d’un droit de suite et d’un droit de réalisation
assorti du droit de préférence sur le prix de vente du fonds de commerce. Afin
d’éviter qu’un déplacement du fonds de commerce n’affecte la valeur de celui-
ci au détriment des créanciers inscris, les articles 175 et 176 de l’Acte
Uniforme imposent une obligation d’information au propriétaire du fonds qui
envisage de le déplacer ou au bailleur qui entend pour suivre la résiliation du
52
bail. Le propriétaire du fonds de commerce doit notifier aux créanciers inscrit
15 jours au moins à l’avance par acte extrajudiciaire soin intention de déplacer
le fonds en indiquant le nouvel emplacement, faute de quoi il encourt la
déchéance immédiate du terme des créances concernées. Cependant au
bailleur poursuivant la résiliation du bail de l’immeuble dans lequel est
exploité le fonds de commerce nantis, il est tenu de notifier aux créanciers
inscrits par acte extrajudiciaire sa demande de résiliation. L’article 176 alinéas
2 précise que « la décision de résiliation judiciaire ou une résiliation amiable
en vertu d’une clause du contrat ne produira effet qu’à l’expiration d’un délai
de deux mois suivant la notification ».
Le créancier nantis qui ne s’oppose pas au développement du fonds dans
le délai de 15 jours ou qui y consent expressément doit faire rapporter son
inscription à la date initiale en cas de transfert du fonds de commerce dans le
ressort d’une autre juridiction sur le R.C.C.M du lieu de transfert.

P2 : Les effets du nantissement du fonds de commerce


Le nantissement étant une sûreté réelle confère par définition une double
prérogative au créancier inscrit à savoir le droit de suite et de réalisation du
gage d’une part et un droit de préférence permettant d’être payé en cas de
concours avec d’autres créanciers avant ces derniers sur le prix de vente du
fonds de commerce nantis. Il faut néanmoins préciser s’agissant de l’exercice
du droit de préférence qu’en présence d’autres créanciers privilégiés sur les
meubles du débiteur, l’article 226 de l’Acte uniforme sur les Sûretés classe les
créanciers nantis au 4ème rang après les créanciers des frais de justice, des
frais de conservation et les créanciers de salaires super privilégiés. Entre les
créanciers nantis sur le même bien c'est-à-dire le fonds de commerce, l’ordre
de préférence sera déterminé par la date des inscriptions. Le créancier inscrit
le 1er exercera d’abord son privilège pour l’intégrité de sa créance puis dans la
mesure du solde disponible, le second créancier se fera payer et ainsi de suite.
A ces prérogatives traditionnelles, il faut ajouter le droit de surenchère de 1/6
prévu par l’article 177 de l’Acte Uniforme portant organisation des Sûretés
(A.U.S) qui s’exerce dans les mêmes conditions qu’en matière de cession du
fonds de commerce s’agissant du privilège du vendeur non payé à terme.
L’article 178 quant à lui ne retenant que les effets déjà mentionnés (article
suite, droit de réalisation et droit de préférence) n’est pas revenu sur la
garantie de deux années d’intérêts prévu par l’ancien article 90 alinéa 1er de
l’Acte Uniforme.

Section 3 : L’aliénation du fonds de commerce


Le commerçant peut aliéner le fonds de commerce en le cédant (P1) ou
en l’apportant en société (P2).

53
P1 : La cession de fonds de commerce
Selon l’article 148 de l’AUDCG, la vente ou la cession du fonds de
commerce porte nécessairement sur les éléments obligatoires à savoir, la
clientèle et le nom commercial ou la clientèle et l’enseigne ou alors la clientèle
et les deux. A ces éléments, les parties choisiront certains ou la totalité des
éléments facultatifs qui vont être cédés avec le fonds. Pour que cette vente soit
valide, il faut que certaines conditions soient remplies (A). Ce n’est que lorsque
le contrat est valablement conclu qu’il produit des effets (B).

A- Les conditions de la vente du fonds de commerce


La vente du fonds de commerce obéit à des conditions de fond (1)
et de forme (2).

1- Les conditions de fond de la vente du fonds de


commerce
Les conditions de fond ici sont celles prévues par l’article 1108 du code
civil à savoir, le consentement, la capacité, l’objet et la cause.
En ce qui concerne le consentement, il ne doit pas être vicié par l’erreur,
le dol ou encore la violence. La rencontre des volontés se fait comme en droit
commun par la rencontre entre une offre suffisamment précise et l’acceptation
de l’acheteur. Selon l’article 241 de l’AUDCG, l’offre doit indiquer la volonté de
l’auteur d’être lié en cas d’acceptation. C’est ainsi que la CCJA refuse de
reconnaître la qualification d’offre de contracter à un appel d’offre par lequel
l’auteur « se réserve le droit de ne pas donner suite ou de ne donner suite que
partiellement à cet appel d’offre » (Arrêt n° 064/2005 du 22 décembre 2005,
Aff. Sany Quincaillerie c/ Subsahara services NC, Juridata n° J064-12/2005).
N’est pas non plus une offre de contracter un appel d’offre qui ne comporte
pas la volonté de l’auteur de celle-ci d’être lié en cas d’acceptation et
l’indication précise du prix (CCJA, Arrêt n° 002/2012 du 02 février 2012, Aff.
Subsahara services c/ Sany Quincaillerie, Juridata n° J002-02/2012.)
Quant à la capacité, il s’agit d’un acte de commerce. Par conséquent, elle
est réservée aux personnes ayant la capacité de faire le commerce. Lorsque le
fonds de commerce appartient à une personne morale, la cession nécessitera
un pouvoir spécial donné au représentant de la société. Ce pouvoir peut être
donné suivant le cas par l’assemblée générale ou par le conseil
d’administration.
Quant à l’objet, il faut dire que le prix est librement fixé par les parties
ainsi que les éléments qui font partie du fonds cédé. La cession porte aux
termes de l’article 148 de l’AUDCG sur les éléments obligatoires du fonds, et
les parties doivent faire mention expresse des éléments facultatifs inclus dans
la vente. Le prix doit être connu des parties et déclaré dans l’acte de vente. Il
doit être déterminé ou tout au moins déterminable. Dans la pratique, la

54
détermination du prix se fait généralement sous trois rubriques différentes
correspondant aux éléments incorporels, aux éléments matériels et aux
marchandises. La dissimulation du prix par les parties est sanctionnée par
l’article 158 de l’AUDCG qui rend nulle et de nul effet toute contre-lettre.

2- Les conditions de forme de la vente du fonds


de commerce
Le contrat de vente du fonds de commerce est un contrat solennel. Il ne
suffit pas pour les parties de se mettre d’accord sur les termes du contrat. Il
leur faut en outre satisfaire aux exigences légales. L’art. 149 de l’AUDCG exige
que le contrat soit constaté par la rédaction d’un acte authentique ou d’un
acte sous seing privé. Dans l’un ou l’autre cas, les parties doivent s’assurer
que certaines mentions figurent impérativement dans le contrat. L’article 150
de l’AUDCG dresse une liste exhaustive des informations qui doivent figurer
dans l’acte de vente et qui permettent de déterminer avec exactitude les parties
contractantes, la valeur du fonds à céder, le prix, les éléments facultatifs cédés
etc… Cette exigence vise à protéger l’acquéreur contre une éventuelle fraude
du vendeur qui peut être tenté d’exagérer les performances du fonds de
commerce pour le vendre à un prix élevé. C’est pour cette raison qu’obligation
lui est faite par l’article 150 de l’AUDCG d’indiquer le chiffre d’affaire réalisé
depuis sa création ou son acquisition et lorsqu’il s’agit d’un fonds de
commerce ayant fait l’objet d’une exploitation prolongée, il doit fournir les
informations des trois dernières années.
L’omission ou l’inexactitude de l’une des informations obligatoires
entraîne la nullité du contrat de vente si l’acquéreur prouve que cette omission
ou cette inexactitude a substantiellement affecté le fonds cédé. L’article 151
précise alors que l’acquéreur dispose d’un délai d’un an à compter de la date
d’établissement de l’acte de cession pour en demander l’annulation.
La vente du fonds de commerce est soumise à publicité obligatoire au
RCCM à la diligence du vendeur ou de l’acquéreur. L’un et l’autre ont
l’obligation d’y faire procéder aux modifications correspondantes, c’est-à-dire
pour le vendeur demander sa radiation et pour l’acquéreur son inscription ou
son enregistrement s’il souhaite exploiter lui-même le fonds de commerce (art.
152 AUDCG).
En plus dans les 15 jours suivant la date du contrat, l’acquéreur est tenu
de procéder à l’insertion de la vente pour publicité dans un journal habilité à
publier les annonces légales et paraissant dans les lieux où le vendeur est
inscrit au RCCM. Cette annonce qui doit reprendre les mentions essentielles
de l’acte de cession est destinée à informer le public de la vente et ouvrir ainsi
la voie à des oppositions. Elles peuvent être le fait des créanciers du cédant
qu’ils soient nantis de sûretés ou simplement chirographaires. Ils peuvent
faire opposition au paiement du prix et demander que celui-ci soit versé entre

55
leurs mains lorsque la créance est exigible. La procédure de cette opposition
est prévue par l’article 159 de l’AUDCG.
Aucune sanction du défaut de publicité n’est prévue par l’AUDCG. Il
convient de se retourner au droit commun de la publicité légale pour dire que
l’acte de cession sera alors inopposable aux tiers. Le créancier sera ainsi admis
à poursuivre l’acquéreur qui a payé le prix du contrat sans accomplir
l’exigence de publicité pour réparer le préjudice qu’il a subi du fait de la perte
d’un élément important du patrimoine de son débiteur.

B- Les effets de la cession du fonds de commerce


La vente commerciale produit normalement les mêmes effets que tout
contrat de vente. Toutefois, certains effets spécifiques sont prévus par l’Acte
uniforme.

1- Les effets issus du droit commun des obligations


Conformément aux dispositions des articles 250 et suivants de
l’AUDCG, qui ne sont pas d’ailleurs très loin de celles des articles 1582 et
suivants du Code civil, le contrat de vente du fonds de commerce, qui est un
contrat synallagmatique, crée des obligations à l’égard du vendeur et de
l’acheteur.
a- Les obligations du vendeur
Le vendeur du fonds de commerce a les mêmes obligations que celles
prévues par l’article 1603 du Code civil pour le vendeur de tout bien meuble.
Il est tenu de deux principales obligations :
- L’obligation de délivrance de la chose : elle découle de l’article 154 de
l’AUDCG qui prévoit que le vendeur doit mettre le fonds commercial à la
disposition de l’acheteur à la date prévue au contrat. Cette délivrance s’étend
à tous les éléments inclus dans l’acte de vente et à défaut de précision, aux
éléments obligatoires. En se référant à l’article 1135 du Code civil selon lequel
les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais également
à toutes les suites que la loi, les usages et l’équité leur donnent, le vendeur
pourra être astreint si possible par injonction du juge compétent, à délivrer
les données techniques et informations diverses de nature à faciliter le
transfert de la clientèle et l’exploitation du fonds de commerce. Lorsque les
droits de propriété intellectuelle sont compris dans une cession de fonds de
commerce, l’acquéreur devra prendre une inscription auprès de l’OAPI pour
les marques de fabrique, brevets d’invention et licence d’exploitation cédés.
Parfois certaines créances peuvent être cédées en même temps que le fonds
de commerce. Dans ce cas, l’acquéreur devra s’assurer que les formalités de
l’article 1690 du Code civil sont accomplies.
- L’obligation de garantie : Le vendeur doit garantir l’acquéreur contre
l’éviction et contre les vices cachés de la chose.

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En ce qui concerne l’éviction, elle peut être le fait du vendeur lui-même
ou des tiers. Le vendeur doit donc se garder de tout acte de nature à gêner
l’acquéreur lors de sa jouissance. De même, il doit s’assurer que les tiers ne
pourront pas le nuire dans la jouissance de la chose, par exemple par une
action en revendication du fonds de commerce justifiée par une action en
résolution ou en nullité d’une vente antérieure. L’acquéreur est autorisé
conformément à l’article 156 AUDCG, lorsqu’il est évincé partiellement, à
demander la résolution de la vente, à condition que la diminution de
jouissance qui en découle soit « d’une importance telle qu’il n’aurait pas acheté
le fonds s’il en avait eu connaissance ». On peut en déduire que la garantie des
vices cachés couvre dans la cession du fonds de commerce les défauts de
nature à diminuer la clientèle.
En ce qui concerne la garantie des vices cachés, le vendeur est obligé de
déclarer toutes les charges qui pèsent sur le fonds de commerce et qui sont
de nature à diminuer la valeur de ce fonds. La garantie des vices cachés est
appréciée objectivement et sanctionne le défaut de la chose à répondre à
l’usage auquel elle est normalement destinée (TERRE (F.), SIMLER (Ph.) et
LEQUETTE (Y.), op. cit., n° 255). La mise en œuvre de la garantie du vendeur
pour vices cachés suppose par conséquent que le vendeur ait effectivement
respecté son engagement en livrant la chose objet du contrat, mais qu’après
l’acheteur se soit rendu compte que l’objet livré est impropre à l’usage auquel
il est normalement destiné à cause d’un défaut qui n’était pas apparent au
moment de la livraison (Ce qui suppose que les vices en question doivent être
antérieurs à la vente). Tel est le cas lorsqu’il découvre l’existence des charges
grevant le fonds. Les vices cachés se rapprochent ainsi de l’obligation de
conformité qui est mise à la charge du vendeur. Le droit de la vente
commerciale OHADA ne fait plus la différence entre l’action en garantie des
vices cachés et l’action pour non-conformité. Dans les deux hypothèses, le
commerçant acheteur est fondé, selon les termes des articles 283 et 284 de
l’AUDCG, à demander soit le remplacement, soit la réparation.

b- Les obligations de l’acheteur


L’acquéreur est tenu de prendre livraison du fonds de commerce ; de
payer le prix convenu et de se faire immatriculer au RCCM.
L’obligation de prendre livraison est prévue par l’article 269 de l’AUDCG.
L’acquéreur doit accomplir les actes permettant au vendeur de livrer le fonds
de commerce et d’en prendre possession. En cas de manquement à cette
obligation, lorsque ce manquement n’est pas justifié par la constatation d’un
défaut de conformité, ou de tout autre motif légitime, le vendeur du fonds de
commerce peut faire sanctionner l’inexécution de son obligation par l’acheteur
en sollicitant du tribunal compétent, soit la résolution, soit l’exécution forcée
du contrat. Mais un délai supplémentaire peut être accordé à l’acquéreur pour
exécuter son obligation.

57
L’obligation de payer le prix convenu au jour et lieu fixés dans l’acte de
vente et de payer ce prix entre les mains de la personne désignée comme
séquestre. Il peut s’agir du notaire ou de l’établissement bancaire. Le
séquestre ne peut reverser cette somme au vendeur avant le délai de 30 jours,
délai pendant lequel les créanciers du vendeur peuvent faire opposition au
paiement du prix de la vente. Le vendeur est tenu de payer les accessoires du
prix. C’est ce qui ressort des articles 1593 et suivants du Code civil. En
l’absence des stipulations contractuelles contraires, l’acheteur est tenu de
payer les droits de timbres et d’enregistrement de l’acte de vente, des frais
occasionnés par les publications, par la cession du droit au bail, la
transmission des brevets et marques, les honoraires du rédacteur de l’acte de
vente et le cas échéant les frais d’expertise du matériel et des marchandises.
L’acheteur a enfin l’obligation de se faire immatriculer ou enregistrer au
RCCM en respectant les conditions prévues par l’AUDCG lorsqu’il entend
exploiter lui-même le fonds de commerce.

2- Les effets particuliers de la vente du fonds de


commerce
L’impératif de protection des parties au contrat de cession du fonds de
commerce a conduit le législateur à aménager des effets particuliers pour
protéger à la fois l’acquéreur et le vendeur du fonds de commerce.

a- Les règles particulières protégeant le vendeur


Le vendeur du fonds de commerce bénéficie d’un privilège sur le fonds et
d’une action résolutoire.
En ce qui concerne le privilège, il permet au vendeur impayé d’être
prioritaire en cas de revente du fonds de commerce. L’article 166 de l’AU relatif
aux sûretés prévoit que le vendeur doit inscrire ce privilège au RCCM. Le
vendeur dispose alors d’un droit de préférence, il sera payé avant tous les
autres créanciers si l’acquéreur revend le fonds de commerce. L’article 177 de
cet Acte uniforme dispose à cet effet que « Les créanciers ont un droit de
surenchère qu’ils exercent conformément aux dispositions prévues pour la vente
du fonds de commerce ». La valeur de la surenchère est mentionnée à l’article
163 paragraphe 1er de l’AUDCG qui prévoit que « tout créancier ayant inscrit
un privilège ou un nantissement, ou ayant régulièrement fait opposition peut,
dans le mois de la publication de la vente dans un journal habilité à recevoir les
annonces légales, former une surenchère du sixième du prix global du fonds de
commerce figurant à l’acte de vente ». Ce privilège du vendeur constitue une
exception au droit commun de la vente puisque le privilège du vendeur du
meuble ne confère pas un droit de suite à son titulaire.
En ce qui concerne l’action résolutoire, elle permet au vendeur de
reprendre le fonds de commerce en cas non-paiement du prix. Toutefois, si le

58
vendeur a procédé à l’inscription d’un privilège sur le fonds de commerce, il
doit s’être réservé dans cette inscription la possibilité d’intenter l’action
résolutoire. S’il l’exerce, il doit informer les créanciers inscrits sur le fonds par
acte extrajudiciaire ou par tout autre moyen (article 168 AUDCG). Pour la
conservation de ces droits, le vendeur impayé qui entend exercer l’action
résolutoire doit également procéder à la prénotation au RCCM de celle-ci selon
les termes de l’article168 AUS. Les créanciers inscrits sur le fonds ont alors
un délai d’un mois pour paralyser l’action en payant à la place de leurs
débiteurs. Si la résolution est prononcée, le vendeur va reprendre l’ensemble
des éléments du fonds. En cas de paiement partiel du fonds, le vendeur sera
comptable de ce prix payé.

b- Les règles particulières protégeant l’acquéreur


L’acquéreur du fonds de commerce a le droit d’intenter une action en
nullité lorsqu’il constate après la prise de livraison que les mentions contenues
dans l’acte de vente sont inexactes ou qu’il y a eu des omissions. Il n’est pas
nécessairement question ici de sanctionner un dol dont aurait été victime
l’acquéreur à la suite du manquement à l’obligation d’information qui pèse sur
le vendeur. Par conséquent, pour cette action en nullité, il n’est pas nécessaire
que l’omission ou l’inexactitude d’une mention ait entraîné une erreur sur les
qualités substantielles du fonds. Il suffit tout simplement qu’elle affecte la
consistance du fonds cédé. Cette action, tout comme l’action résolutoire doit
être exercée dans un délai d’un an à compter de la date d’établissement de
l’acte de vente. Si le vendeur avait connaissance de l’erreur, il peut de plus
être condamné à verser des dommages et intérêts. Les ventes de fonds de
commerce sont le plus souvent conclues par le biais d’intermédiaires. Les
agents d’affaire, courtiers, notaires vont participer à la rédaction de contrat de
vente. Leur responsabilité peut être recherchée dans l’inexactitude des
mentions figurant dans les actes de vente.

P2 : L’apport du fonds de commerce en société


Bien que constituant aussi une aliénation à titre onéreux, l’apport en
société de fonds de commerce présente une grande différence avec la vente : il
n’y a pas de prix, mais attribution à l’apporteur des droits sociaux. De même,
ce sont les règles du droit des sociétés qui s’appliquent à cette opération. C’est
peut-être pour cette raison que l’AUDCG n’a pas prévu l’apport en société du
fonds de commerce. Toutefois, au regard de l’article 40 de l’AUSCGIE, un
associé peut apporter à la société des droits portant sur des biens en nature
meubles ou immeubles, corporels ou incorporels. Le fonds de commerce étant
un bien meuble incorporel, rien ne s’oppose que son propriétaire puisse
l’utiliser comme sa part de contribution à la constitution d’une société. Au
demeurant, l’apport d’un fonds de commerce en société obéit aux règles
générales sur les apports en nature et opère transfert de propriété comme la
59
vente. L’apport est soumis à la même publicité que la vente que l’apport soit
fait à une société en constitution ou à une société existante.
La nécessité de protéger les créanciers du commerçant s’impose ici. Aux
termes de l’article 48 de l’AUDSCGIE, l’apport d’un bien ou d’un droit soumis
à publicité, pour son opposabilité aux tiers, peut être publié avant
l’immatriculation de la société. La formalité ne prend effet rétroactif à la date
de son accomplissement qu’à compter de l’immatriculation de la société. En
cas d’opposition des créanciers, la société doit soit prendre en charge des
dettes déclarées soit renoncer à l’apport en société. En cas de silence des
associés, la société sera solidairement tenue avec l’apporteur du fonds de
commerce des dettes que ce dernier a contactées.

60
3ème Partie : La vente commerciale

La vente commerciale peut être définie comme la convention par laquelle deux
commerçants, personnes physiques ou morales s’obligent l'un à livrer des
marchandises et l’autre à en payer le prix. Elle est prévue par les articles 234 et
suivants de l’AUDCG et par les règles de droit commun régissant la vente qui ne
sont pas contraires à l’Acte uniforme.
Les éléments caractéristiques de la vente commerciale sont donc les parties
d’une part et l’objet d’autre part. Les parties sont obligatoirement les commerçants.
Sont donc exclus les ventes faites aux consommateurs. L’article 234 de l’AUDCG
précise que l’objet de la vente est d’abord une marchandise, y compris les contrats
de fourniture de marchandises destinées à des activités de fabrication ou de
production. Ce faisant, l’article 235 de l’AUDCG exclu de son champ d’application
la vente de marchandises achetées pour un usage personnel, familial ou
domestique. De même, ne constituent pas des ventes commerciales les ventes sur
saisie, par autorité de justice et les ventes aux enchères. Par ailleurs, les dispositions
relatives à la vente commerciale ne régissent pas certaines ventes soit parce que la
réglementation résulte d’un texte particulier, soit en raison de la particularité de la
marchandise. Ainsi, en est-il des ventes de valeurs mobilières, d'effets de commerce,
de monnaies ou devises, les cessions de créances, les ventes de navires, de bateaux,
d'aéroglisseurs, d'aéronefs…
Le régime juridique de la vente commerciale permet d’envisager sa formation
(chapitre 1) et ses effets (chapitre 2).

61
Chapitre 1 : La formation de la vente commerciale

Le contrat de vente commerciale n’est soumis à aucun formalisme. Il peut être


verbal ou écrit. Il se prouve par tous moyens. Comme pour tout contrat, la formation
du contrat de vente commerciale nécessite la rencontre des consentements des
parties contractantes. Il s’agit de la rencontre de l’offre (Section 1) et de l’acceptation
(section 2).

Section 1 : L’offre
L’offre est la proposition ferme pure et simple de conclure un contrat déterminé
à des conditions déterminées. Pour prendre effet (P2), l’offre de vente doit présenter
un certain nombre de caractéristiques (P2).

P1 : Les caractéristiques de l’offre


Aux termes de l’article 241 de l’AUDCG, l’offre de contracter doit être
suffisamment précise. Une offre est suffisamment précise lorsqu’elle désigne les
marchandises et, expressément ou implicitement fixe la quantité et le prix ou donne
des indications permettant de les déterminer.
L’offre doit également traduire la volonté de son auteur d’être liée en cas
d’acceptation. Par contre, une proposition adressée à des personnes indéterminée
n’est pas une offre. Elle est simplement considérée comme une invitation à l’offre, à
moins que la personne que la personne qui a fait la proposition n’ait clairement
indiquée le contraire. De même, la CCJA a jugé qu’une invitation adressée à
plusieurs personnes de soumettre leur meilleure offre dans le cadre d’une
concurrence n’est pas une offre, mais une simple proposition de conclure (CCJA,
arrêt n° 002/2012 du 02 février 2012, Juris Ohada 2012, n° 4, p. 7).

P2 : La prise d’effet de l’offre


L’offre prend effet dès qu’elle parvient à son destinataire. Elle est donc soumise
à la théorie de la réception. Par essence, l’offre est révocable. Elle est insuffisante
pour lier par elle-même celui qui l’a faite. Elle peut donc faire l’objet de rétractation
tant qu’elle n’a pas été acceptée valablement. De même, l’offre peut être révoquée
tant qu’elle n’est pas parvenue à son destinataire.
Toutefois, l’alinéa 3 de l’article 242 AUDCG prévoit que l’offre ne peut être
révoquée si elle indique, en fixant un délai déterminé pour l’acceptation, qu’elle est
irrévocable ou si le destinataire était raisonnablement fondé à croire que l’offre était
irrévocable et a agi en conséquence. Cette offre irrévocable s’inspire de la Convention
de Vienne sur les contrats de vente internationale des marchandises (article 16).
L’irrévocabilité ici est compréhensible dans la mesure où en fixant un délai, l’auteur
de l’offre se trouve contraint par le temps accordé. De même, s’il révoque l’offre avant

62
l’expiration du délai, son attitude pourrait nuire aux destinataires qui se sont
organisés en considération du temps accordé.

Section 2 : L’acceptation
L’acceptation est toute déclaration ou de tout autre comportement du
destinataire de l'offre indiquant qu’il acquiesce à l’offre. Elle doit présenter un certain
nombre de manifestations (P1) pour produire des effets (P2).

P1 : Les manifestations de l’acceptation


L’acceptation doit intervenir dans le délai stipulé par l’auteur de l’offre ou, à
défaut d’une telle stipulation, dans un délai raisonnable. Le caractère raisonnable
du délai doit tenir compte des circonstances, notamment de la rapidité des moyens
de communication utilisés par l’auteur de l’offre. Une offre verbale doit être acceptée
immédiatement, à moins que les circonstances n’indiquent le contraire.
L’acceptation peut être expresse, dans ce cas, elle est verbale ou écrite. L’écrit
englobe toutes les formes, y compris les messages électroniques. L’acceptation peut
également être tacite. Elle résulte alors de tout comportement du destinataire
indiquant qu’il acquiesce à l’offre. Mais, le silence et l’inaction ne suffisent pas pour
valoir acceptation. Pour être considérés comme acceptation, ils doivent être entourés
de faits ou circonstances qui révèlent une volonté de contracter : on parle de silence
circonstancié.
Dans tous les cas, l’acceptation doit être conforme à l’offre, c’est-à-dire pure et
simple, et donc, non assortie de réserves. En cas d’acceptation avec réserves, c’est-
à-dire celle contenant des additions, des limitations ou autres modifications altérant
substantiellement les termes de l’offre, il y aura refus de l’offre assortie de contre-
proposition.
L’acceptation avec paiement partiel du prix est valable. Dans ce cas, le contrat
de vente est définitivement formé. L’engagement de payer ultérieurement le prix ne
saurait valoir une contre-offre (CCJA, arrêt n° 028/2011 du 6 décembre 2011, Juris
Ohada 2012/1, n° 1, p. 44).

P2 : La prise d’effet de l’acceptation


L’acceptation prend effet au moment où l’expression de l’acquiescement
parvient à l’auteur de l’offre. C’est l’application de la théorie de la réception comme
pour la prise d’effet de l’offre. Cependant, en vertu des dispositions de l’offre, des
pratiques établies entre les parties ou des usages, le destinataire peut, sans
notification à l’auteur de l’offre, exprimer qu’il acquiesce en accomplissant un acte.
L’acceptation prendra alors effet au moment où cet acte est accompli.

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Chapitre 2 : Les effets de la vente commerciale

Comme toute vente, l’effet essentiel de la vente commerciale est le transfert de


propriété de chose vendue (section 1). En plus, les parties sont obligatoirement
tenues d’exécuter le contrat (section 2).

Section 1 : Le transfert de la propriété et des risques de la chose


vendue
Le transfert de propriété de la chose vendue (P1) et son corollaire, le transfert
des risques (P2) s’opère en principe automatiquement dès la prise de livraison de la
chose vendue.

P1 : Le transfert de propriété de la chose vendue


Aux termes de l’article 275 de l’AUDCG, le transfert de propriété s’opère dès la
prise de livraison par l’acheteur des marchandises (A), à moins que les parties
n’aient convenu de le différer en application d’une clause de réserve de propriété (B).

A- Le principe du transfert de propriété dès la livraison de la


marchandise
Le droit OHADA s’écarte donc du principe de transfert de propriété solo
consensu, lequel s’appliquait pourtant dans la plupart des États membres de
l’OHADA avant l’entrée en vigueur de l’AUDCG. Le principe du transfert de propriété
solo consensu veut que le transfert de propriété s’opère immédiatement et de plein
droit à l’acquéreur du seul fait de la formation du contrat, le transfert de propriété
se réalisant donc par le seul fait de l’ échange des consentements et à l’instant même
où celui-ci s’opère.
Or, la vente commerciale se caractérise par des besoins de souplesse, de
rapidité et de sécurité, lesquels s’accommodent mal de l’imprécision quant au
moment du transfert de propriété qui découlent du principe du transfert solo
consensu. Compte tenu de cette situation, le législateur a préféré adopter la règle
selon laquelle le transfert de propriété a lieu au moment de la livraison effective de
la chose. La question de la détermination du moment où s’opère le transfert de
propriété est essentielle, notamment pour les créanciers du vendeur puisque c’est à
partir de cette date que les biens vendus sortent du patrimoine de ce dernier.

B- La possibilité de différer le transfert de propriété à travers la


clause de réserve de propriété
Si, en principe, la prise de livraison entraîne le transfert de propriété des
marchandises vendues, le législateur OHADA reconnait cependant aux parties au
contrat de vente commerciale la possibilité de différer le transfert de propriété. Le
transfert de propriété peut être différé par une clause de réserve de propriété ou par

64
le biais d’autres formes d’aménagement pour autant que ces dernières ne
contreviennent pas aux dispositions légales.
La clause de réserve de propriété a pour effet de retarder le transfert de
propriété au jour du paiement complet du prix. La vente est bien formée, mais seul
le transfert de propriété est retardé jusqu’à complet paiement du prix. Une telle
clause a pour but de protéger le vendeur. Le vendeur demeure propriétaire de la
chose tant que le prix n’aura pas été intégralement payé. Cela lui permet, en cas de
défaillance de l’acquéreur, de revendiquer la chose. Encore faut-il, lorsque l’acheteur
est sous le coup d’une procédure collective, que la clause ait été clairement stipulée,
au plus tard lors de la livraison, que la chose se retrouve en nature et que le vendeur
la revendique dans les délais prévus.

P2 : Le transfert des risques


Parallèlement au transfert de propriété, la vente réalise également un transfert
des risques du vendeur à l’acheteur. Cette question est importante puisqu’elle
détermine qui du vendeur ou de l’acheteur devra supporter les conséquences d’une
perte fortuite, totale ou partielle des marchandises vendues entre le moment de la
conclusion du contrat et celui de la prise de possession.
À cet égard, l’AUDCG prévoit que le transfert de risques a lieu au moment du
transfert de propriété, soit en principe, au moment de la prise de livraison par
l’acheteur des marchandises. Il ressort de ce principe que la charge des risques en
cas de perte ou de détérioration des marchandises est intimement liée à la
possession matérielle des marchandises. C’est donc en principe lors de la livraison
que la charge des risques passe du vendeur à l’acheteur. Cette solution s’explique
par le fait que le législateur a estimé qu’il convenait de faire peser les risques sur le
cocontractant qui est le plus à même de prévenir le sinistre et de prendre les mesures
conservatoires destinées à sauvegarder les marchandises.
Toutefois, l’Acte uniforme prévoit des aménagements à ce principe lorsque le
contrat de vente commerciale implique un transport de marchandise. Dans ce cas,
les risques seront transférés à l’acheteur à partir de la remise des marchandises au
premier transporteur. À cet égard, l’autorisation donnée au vendeur de conserver
les documents représentatifs des marchandises est sans incidence sur le transfert
des risques.
Il résulte de ce qui précède que, sauf stipulations contraires, tous les dommages
causés aux marchandises postérieurement à ce moment devront être supportés par
l’acheteur.

Section 2 : L’exécution de la vente commerciale


L’exécution du contrat de vente commerciale s’opère à travers la soumission
des parties aux obligations à leur charge (P1). L’inexécution de ces obligations est
source de diverses conséquences (P2).

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P1 : Les obligations des parties à la vente commerciale
La vente commerciale étant un contrat synallagmatique, elle met des
obligations aussi bien à la charge du vendeur (A) qu’à la charge de l'acheteur (B).

A- Les obligations du vendeur


Le vendeur est astreint au moins à trois obligations essentielles : l’obligation de
livraison, l’obligation de conformité et l’obligation de garantie.

1-L’obligation de livraison
À défaut de convention particulière, la livraison consiste en la mise à la
disposition de l’acheteur de la marchandise vendue. Elle porte sur la marchandise
elles même ainsi que ses accessoires. Les accessoires peuvent être matériels,
juridiques, administratifs, sanitaires ou fiscaux.
Lorsque le vendeur n’est pas tenu de livrer la marchandise en un lieu
particulier, il doit la tenir à la disposition de l’acheteur soit au lieu de fabrication ou
de stockage, soit au siège de son activité.
Le vendeur doit livrer la marchandise à la date fixée par le contrat ou
déterminée selon ses spéculations. En l’absence de stipulation, la livraison doit être
faite dans un délai raisonnable.

2-L’obligation de conformité
Le vendeur doit livrer les marchandises dans la quantité, la qualité, la
spécification, le conditionnement et l'emballage correspondants à ceux prévus au
contrat (article 255 AUDCG). Autrement dit, pour savoir si le vendeur a rempli à son
obligation de conformité, il faut procéder à une comparaison entre ce qui a été prévu
au contrat et ce qui a effectivement été livré. S’il y a concordance, la livraison est
conforme.
En cas de silence, le législateur recommande de juger la conformité par rapport
à l’usage habituel du type de marchandise concerné. Pour l’emballage et le
conditionnement, soit il existe des usages en la matière et on y recourt, soit il n’y a
pas d’usage et on évalue l’aptitude de l’emballage ou du conditionnement à conserver
et protéger la marchandise.

3-L’obligation de garantie
Le vendeur doit livrer les marchandises libres de tout droit ou prétention d'un
tiers, à moins que l'acheteur n'accepte de prendre les marchandises dans ces
conditions. Il doit également garantir l’acheteur de toute éviction de son fait
personnel.

B- Les obligations de l’acheteur


L’acheteur doit payer le prix et prendre livraison de la marchandise.

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Le paiement du prix porte non seulement sur le prix stipulé mais aussi sur les
frais et les accessoires. En effet, d’après l’article 263 de l’AUDCG, le prix exprimé
dans le contrat est présumé convenu hors taxe.
Le lieu du paiement est soit le siège de l’activité du vendeur, soit le lieu de
livraison si le prix est payable au comptant ou si la livraison est effectuée contre
remise des documents. Dès lors, on peut déduire que le paiement est portable, car
c’est à l’acheteur d’aller payer le prix. Mais cette règle est inversée en cas de vente à
crédit.
L’acheteur doit accomplir les actes juridiques et matériels permettant au
vendeur d’effectuer la livraison, puis il doit retirer les marchandises.

P2 : Les conséquences de l’inexécution de la vente


En cas d’inexécution, d’exécution partielle ou de mauvaise exécution des
obligations contractuelles, les parties peuvent opter pour la rupture du contrat de
vente ou opposer l’exception d’inexécution. Si l’inexécution cause par ailleurs un
préjudice, la victime peut mettre en œuvre la responsabilité de l'autre partie et
solliciter des dommages et intérêts.

A- La rupture du contrat
Prévue par l’article 281 de l’AUDCG, la rupture du contrat peut résulter d’une
décision de justice ou d'une décision unilatérale de l'une ou de l'autre partie au
contrat.
La rupture unilatérale qui est une exception à la rupture judiciaire du contrat,
intervient lorsque l’auteur de la rupture constate un comportement grave de la part
de l’autre partie. Mais, l’auteur de la rupture unilatérale le fait à ses risques et périls.
Ainsi, lorsque le comportement ou le motif invoqué pour la rupture n’a pas un degré
de gravité suffisant, il pourra être amené à réparer le préjudice causé par cette
rupture. L’appréciation de la gravité du motif incombe au juge.

B- L’exception d’inexécution
En principe dans les contrats synallagmatiques, les prestations promises par
les contractants doivent être exécutées comme prévu au contrat. Ainsi, l’acheteur
doit payer le prix en même temps qu'il prend livraison des marchandises. Il en
résulte que si l’un des contractants réclame l’exécution de ce qui lui est dû sans
pourtant payer ce qu'il doit, l’autre contractant peut refuser d’exécuter sa propre
prestation en lui opposant l'exception d’inexécution ou l’exceptio non adimpleti
contractus. Tel est le droit commun applicable. En la matière celui qui invoque
l'exception d'inexécution le fait sans décision préalable du juge. Ainsi, apparaît-elle
comme une voie de justice privée.
Mais, l'acte uniforme a prévu que cette exception d’inexécution puisse être
invoquée par anticipation, sur la seule vraisemblance. En effet, aux termes des

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dispositions de l’article 282 de l’AUDCG, « Si le vendeur ne paraît pas en mesure
d’exécuter dans les délais convenus l’intégralité de son obligation de livraison des
marchandises en raison d'une insuffisance de ses capacités de fabrication ou d’une
inadaptation de ses moyens de production, l'acheteur peut obtenir de la juridiction
compétente, statuant à bref délai, l’autorisation de différer l’exécution de son
obligation de payer... »
Pour éviter les abus toujours possibles, la mise en œuvre de cette exception
d’inexécution est subordonnée à une décision de justice. Les tribunaux peuvent
même assortir leur autorisation de l'obligation de consigner tout ou partie du prix
de vente.
Cette possibilité est aussi offerte au vendeur. Ainsi aux termes des dispositions
de l’article 285 de l’AUDCG, « Si l’acheteur ne paraît pas en mesure de payer
l'intégralité du prix en raison de son insolvabilité ou de la cessation de ses paiements
ou encore de ses retards dans les échéances convenues, le vendeur peut obtenir de la
juridiction compétente, statuant à bref délai, l’autorisation de différer l'exécution de
ses obligations de livraison...».

C- Les dommages et intérêts


Les dommages et intérêts dus correspondent, non seulement, à la perte subie,
mais également au gain manqué. Ainsi en cas de retard dans la livraison des
marchandises, ou de livraison de marchandises non conformes, l'acheteur peut
réclamer des dommages et intérêts au vendeur qui a obtenu des délais
supplémentaires d'exécution de ses obligations et qui ne les a pas respectés.
Il en va de même du vendeur qui peut réclamer des dommages et intérêts s’il a
accordé un délai supplémentaire d'exécution à l'acheteur et que l'obligation n’a pas
été exécutée pendant cette période.
Il importe cependant que celui qui invoque l'inexécution pour réclamer des
dommages et intérêts prenne toutes les mesures raisonnables pour atténuer et sa
perte et le gain qu’il manque. Faute de quoi la partie poursuivie peut se prévaloir de
sa négligence pour obtenir réduction des dommages et intérêts jusqu’à concurrence
de ce ²qui aurait pu être évité.

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