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Introduction
Cet objectif d’ordre économique sera traduit avec force dans le préambule dudit traité.
le juge KEBA MBAYE, un des rédacteurs du traité rappelle cet objectif lorsqu’il déclare
ce qui suit : « Il me faut affirmer avec force, à l’adresse de certains de ses
détracteurs, que l’OHADA a une origine africaine et sa raison d’être est
économique, tout simplement. »1
1
KEBA MBAYE : « L’histoire et les objectifs de l’OHADA », Petites Affiches, numéro spécial 205 du 13
octobre 2004, page 4
- Commentant le traité, le professeur Jacqueline LOHOUES-OBLE peut écrire : « … C’est la première fois
qu’est mise en œuvre l’harmonisation des règles juridiques à l’échelle du continent. Il convenait de conforter,
dans toute la région, un état de droit favorable au développement économique. » OHADA, traités et Actes
uniformes commentés et annotés, Juriscope, 2e édition, 2002.
- Paul Gérard POUGOUE, François ANOUKAHA, Josette N’GUEBOU, dans leur ouvrage sur le « droit des
sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique » renchérissent : « Il s’agit , au sein d’un
espace économique, de créer un droit unique moderne qui dynamise l’économie et propulse le
développement. » Collection droit uniforme, Presses universitaires d’Afrique, page 2.
Introduction 1
Il fallait, dans ce cadre, envisager un élargissement de l’espace économique des Etats
parties en raison de l'ampleur des problèmes économiques de tous ordres auxquels ils
devaient faire face dus essentiellement à l’étroitesse des marchés nationaux, mais
aussi à des problèmes de gouvernance.
Il convient de rappeler que jusqu’à la fin de l’année 1997, le droit commercial applicable
en Côte d’Ivoire, comme dans les différents Etats anciennement colonisés par la
France, était le droit de tradition juridique française,
Les textes applicables étaient constitués par le code civil de 1804 tel que hérité du code
napoléon, le code de commerce de 1807, les lois régissant les sociétés notamment
celles de 1867 pour les sociétés par actions et 1925 pour les sociétés à responsabilité
limitée.
Il sera alors mis en place un droit des affaires harmonisé, simple, moderne et adapté à
la situation des économies des Etats parties, afin de faciliter l’activité des entreprises et
s’assurer que ce droit sera appliqué dans des conditions idoines à garantir la sécurité
juridique et judiciaire susceptible d’encourager l’investissement.
Pour réaliser toutes ces différentes tâches, il a été créé l’Organisation dénommée
Organisation pour l’Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique dite OHADA.
Et le 17 octobre 2008, à Québec, fut signé le traité portant révision du traité relatif à
l’harmonisation du droit des affaires en Afrique. Ce traité révisé modifie et complète
celui signé le 17 octobre 1993.
Le domaine du droit des affaires harmonisé est précisé par l’article 2 du traité OHADA
qui dispose : « … entrent dans le domaine du droit des affaires, l'ensemble des
2
(KEBA M’BAYE : l’histoire et les objectifs de l’OHADA, in Petites Affiches n°205 page 4
Introduction 2
règles relatives au droit des sociétés et au statut juridique des commerçants, au
recouvrement des créances, aux sûretés et aux voies d'exécution, au régime du
redressement des entreprises et de la liquidation judiciaire, au droit de l'arbitrage,
au droit du travail, au droit comptable, au droit de la vente et des transports et
toute autre matière que le Conseil des Ministres déciderait, à l’unanimité, d’y
inclure… »
Le droit commercial applicable entre ainsi dans un grand ensemble dénommé "Droit
des affaires".
Avec la réforme issue de l’acte uniforme portant sur le droit commercial général,
applicable depuis le 15 mai 2011, on peut dire que la définition et le domaine du droit
commercial ont connu une évolution par rapport à ce qui était en vigueur avant ladite
réforme. En effet, il convient de rappeler: que deux conceptions du droit commercial
avaient été développées : la première dite subjective, la seconde dite objective.
- Pour certains auteurs, en effet, le droit commercial serait le droit qui régit les
commerçants. C’est la conception dite subjective qui se prévalait donc de la profession;
en effet, disait-on, la plupart des actes juridiques que font les commerçants sont
exactement les mêmes que ceux qui sont accomplis dans la vie civile; par conséquent
s'ils ont la nature d'actes de commerce, cela ne peut être que du fait de la qualité de
leur auteur.
Mais cette conception se heurtait à des objections: d'abord tous les actes accomplis
par un commerçant ne se rapportent pas à l'exercice de sa profession; ensuite, des non
- commerçants peuvent accomplir des actes qui, par nature ou par la forme, sont
commerciaux. Ce qui implique l'analyse de la nature et de la forme des actes accomplis;
ce faisant on aboutissait à la conception objective.
- Celle-ci se prévalait d'une idée simple: compte tenu de l'égalité civile, si, à cette
époque, un code de commerce a été rédigé c'est qu'il était appelé à régir non pas une
classe particulière de sujets de droit mais une catégorie d'actes; d'ailleurs, disait-on, il
s'agissait d'un code de commerce et non d'un code des commerçants.
Cependant, tous les actes juridiques n'ont pas une nature déterminée par leur forme ou
par leur objet; il fallait alors considérer pour quelles fins ils ont été effectués; pour ce
faire, il est nécessaire d'analyser l'activité économique des parties en présence pour
dire qu'ils sont commerciaux parce que faits par des commerçants.
Introduction 3
Aucune des conceptions n'étant totalement satisfaisante pour appréhender le droit
commercial, on avait opté pour un mélange des deux. Ce faisant, le droit commercial
pouvait se définir comme l'ensemble des règles juridiques régissant les actes de
commerce, les commerçants et les sociétés commerciales ainsi que les opérations
juridiques qu'ils effectuent.
Mais désormais un professionnel dénommé entreprenant, qui peut accomplir des actes
de commerce ou non, est également régi par l’acte uniforme portant sur le droit
commercial général. Il en résulte un élargissement du domaine du droit commercial
avec une définition qui doit prendre en compte cette donnée.
Ces différents Actes uniformes ont vocation à régir l’ensemble du droit des affaires.
Mais en ce qui concerne le droit commercial, les Actes uniformes qui représentent ses
principales sources sont l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général qui se
présente comme le droit commun en matière commerciale et celui relatif aux sociétés
commerciales et au groupement d'intérêt économique.
- L'Acte uniforme relatif au droit commercial général (publié au J.O de l'OHADA du 1er
octobre 1997 et au J.O.N°53 du 22 décembre 1997 de la République de Côte d'Ivoire)
était applicable depuis le 1er janvier 1998. Il a été abrogé et remplacé par le nouvel
Introduction 4
Acte uniforme portant sur le droit commercial général adopté à Lomé le 15 décembre
2010 et publié au JO de l’OHADA le 15 février 2011. Aux termes des dispositions de
l’article 307 dudit acte uniforme : « … Il sera applicable quatre-vingt-dix jours à compter
de la date de sa publication au JO de l’OHADA conformément à l’article 9 du traité relatif
à l’Harmonisation du Droit des Affaires, signé à Port Louis le 17 octobre 1993, tel que
révisé à Québec le 17 octobre 2008. » La publication a été faite le 15 février 2011 au
JO de l’OHADA. En conséquence, il est entré en vigueur le 15 mai 2011.
3
- L'Acte uniforme portant sur l'organisation des sûretés publié au J.O. de l'OHADA du 1er octobre 1997 et
au J.O.N°53 ter du 22 décembre 1997 de la République de Côte d'Ivoire et applicable depuis le 1er janvier
1998. Cet acte uniforme a été abrogé et remplacé par l’Acte uniforme portant sur l’organisation des sûretés
adopté à Lomé le 15 décembre 2010 et publié au JO de l’OHADA le 15 février 2011. Il est donc applicable
depuis le 15 mai 2011.
-L’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution
publié au J.O.N°41 du 8 octobre 1998 de la République de Côte d’Ivoire mais en vigueur depuis le 10 Juillet
1998 ;
- L’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif publié au J.O. N°40
du 1er octobre 1998 de la République de Côte d’Ivoire et applicable depuis le 1er janvier 1999. Cet Acte
uniforme a été abrogé et remplacé par l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif du 25 septembre 2015 qui est entré en vigueur le 24 décembre 2015.
- L’Acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage adopté à Ouagadougou le 11 Mars 1999 et publié au journal
officiel de la RCI du 17 Juin 1999 ; il est en vigueur depuis le 11 Juin 1999.
Introduction 5
Ces actes uniformes ont abrogé toutes les dispositions antérieurement applicables en
matière commerciale. Ils laissent, cependant, subsister les dispositions antérieures qui
ne leur sont pas contraires.
En effet dans leur champ d'application, ils précisent que les commerçants, les
entreprenants et les sociétés commerciales de même que les groupements d'intérêt
économiques demeurent soumis aux lois non contraires applicables dans l'Etat partie
au traité.
Au plan pénal, il était prévu de sanctionner les infractions par application de la loi pénale
nationale ou par la loi pénale spéciale prise en application des Actes uniformes (article
69 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général)
La Côte d’Ivoire vient, à cet égard, de prendre une loi pénale spéciale pour réprimer les
infractions prévues par les différents Actes uniformes (l’Acte uniforme portant sur le
droit commercial général, l’Acte uniforme portant organisation des sûretés, l’Acte
uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt
économique, l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives
d’apurement du passif, l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées
de recouvrement et des voies d’exécution, l’Acte uniforme portant organisation et
harmonisation des comptabilités des entreprises, l’Acte uniforme relatif au droit des
sociétés coopératives) . Il s’agit de la loi n°2017 du 9 novembre 2017 portant répression
des infractions prévues par les Actes uniformes du Traité relatif à l’harmonisation du
Droit des Affaires en Afrique (J.O n°100 du jeudi 14 décembre 2017)
a- Le droit commercial
Au sujet de l’application des dispositions non contraires du droit commercial antérieur,
la République de Côte d’Ivoire a posé la question suivante à la Cour Commune de
Justice et d’Arbitrage : que faut-il entendre par loi contraire : une loi ou un
- L’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises qui est applicable
depuis le 1er janvier 2001 pour les comptes personnels des entreprises et depuis le 1er janvier 2002
pour les comptes consolidés et comptes combinés.
- L’Acte uniforme relatif aux contrats de transport de marchandises par route, applicable depuis le 1er janvier
2004.
- L’Acte uniforme relatif au droit des sociétés coopératives adopté à Lomé le 15 décembre 2010 et publié au
JO de l’OHADA le 15 février 2011. Il est donc applicable depuis le 15 mai 2011.
Introduction 6
règlement ayant le même objet que l’acte uniforme et dont toutes les dispositions
seraient contraires à cet acte ou une loi ou un règlement dont seulement l’une de
ses dispositions ou quelques-unes de celles-ci seraient contraires ?
Cet avis de la CCJA recèle pourtant une ambiguïté. En effet, il est indiqué que la loi ou
le règlement est contraire même lorsque l’une des dispositions ou quelques-unes
de celles-ci sont contraires. Mais dans ce cas, les dispositions non contraires à
celles de l’acte uniforme demeurent applicables.
On peut donc penser que dès lors qu’aucune disposition de la loi ou du règlement n’est
contraire à l’Acte uniforme, toute la loi devrait s’appliquer. Quel serait alors le sort de
l’Acte uniforme lui-même ?
En réalité, il convient de dire que, par principe, le droit commercial antérieur est abrogé
par les actes uniformes. Il en va de même de toutes les matières réglementées par les
actes uniformes. Autrement dit, La réglementation antérieure ayant le même objet qu’un
acte uniforme disparaît. Sauf cas de renvoi exprès à la loi nationale ou encore si une
disposition de cette réglementation régit une matière non régie par l’acte uniforme.
C’est-à-dire cas de renvoi tacite.
Exemple : aux termes des dispositions de l'article 140 de l'acte uniforme portant sur le
droit commercial général applicable depuis le 15 mai 2011, « Le locataire-gérant est
tenu d'indiquer en tête de ses bons de commande, factures et autres documents
à caractère financier ou commercial avec son n° d’immatriculation au RCCM, sa
qualité de locataire-gérant du fonds.
4
In recueil de jurisprudence de la CCJA, numéro spécial janvier 2003 page 74 et suivantes
Introduction 7
Toute infraction à cette disposition est punie par la loi pénale nationale. »
Dans ce cas de renvoi, on a recours aux peines prévues par la loi n°2017-727 du 9
novembre 2017 portant répression des infractions prévues par les Actes uniformes du
Traité OHADA.
Quant aux textes partiellement contraires aux actes uniformes, toutes les dispositions
partielles non contraires demeurent applicables.
b- Le droit civil
Dans notre conception du droit, le droit civil constitue le droit commun qui régit les
relations de droit privé; c'est lui qui édicte les principes généraux qui président aux
relations entre les individus et qui détermine le statut juridique des personnes.
En ce que le droit des affaires régit également les relations de droit privé, il subit
incontestablement l’influence du droit civil, c’est-à-dire, principalement, du code civil qui
en constitue l’une des sources.
Cependant, il faut bien en convenir, il s’agit plutôt des relations spéculatives entre les
personnes. C’est en cela que le droit commercial se caractérise et se distingue du droit
civil ; même si le statut du commerçant en tant que personne physique ou morale a une
influence déterminante sur son activité.
Ainsi, pour bien comprendre les règles de droit commercial, il faut se référer aux
principes généraux du droit civil et notamment aux règles relatives aux obligations en
général.
a- Les usages
Introduction 8
Ce sont des pratiques liées à la vie des commerçants qui, en raison de leur permanence
et de leur application régulière, prennent la valeur d’une règle de droit. La CCJA l’a
encore reconnu expressément. Certes ne s’agit-il pas de règles légales. Mais elles n'en
sont pas moins obligatoires. La CCJA avait été saisie de la question suivante : une
sentence arbitrale encourt-elle l’annulation si les arbitres, ayant pour mission de statuer
exclusivement en droit sur les demandes dont ils étaient saisis, ont rendu leur décision
en application des usages du commerce ?
Les usages tiennent une place importante en droit commercial car ils interviennent aussi
en complément des différentes réglementations. La loi, elle-même, renvoie aux usages;
ainsi aux termes des dispositions de l'article 1873 du code civil, « les dispositions
relatives aux sociétés de commerce ne s'appliquent que dans les points qui n'ont rien
de contraire aux lois et usages du commerce. »
Sauf conventions contraires des parties, celles-ci sont réputées avoir adhéré
(s'être tacitement référées dans le contrat de vente commerciale) aux usages
professionnels dont elles avaient connaissance ou auraient dû avoir
connaissance, et qui, dans le commerce, sont largement connus et régulièrement
observés par les parties à des contrats de même nature dans la branche d’activité
concernée (commerciale considérée)".
Il faut ainsi distinguer entre les usages de fait ou encore usages conventionnels et les
usages de droit ou encore coutume.
5
CCJA, 19 juillet 2007, recueil de jurisprudence de la CCJA n°10 page 12.
Introduction 9
- L'usage conventionnel se présente, à l'origine, comme une pratique restreinte, limitée
à un petit nombre de commerçants qui se conforment toujours à la même manière d'agir
lorsque les circonstances sont identiques. Puis par imitation, les mêmes actes
juridiques ou les mêmes actes matériels vont se généraliser pour conférer à ces usages
un caractère collectif.
Ainsi va se former une règle tacite qui, en s'incorporant dans des contrats de type
déterminé, bénéficie à tous ceux qui sont engagés dans des liens identiques.
Il résulte de tout ce qui précède que c’est la volonté des parties, qu’elle soit expresse
ou tacite, qui conduit à l’application de l’usage conventionnel. Tant que les parties n’y
ont pas consenti, l’usage conventionnel ne s’applique pas.
En cas de litige, il appartient à celui qui allègue un usage conventionnel d'en établir
l'existence6; par ailleurs le juge peut écarter l'application de l'usage en faisant état de la
volonté contraire des parties qui avaient la liberté de ne pas le respecter; enfin la
violation de l'usage conventionnel par le juge ne donne pas ouverture à cassation7 .
6
ORDONNANCE DE REFERE RG N° 2985/15 du 26/08/2015 : Il est constant comme résultant des pièces
de la procédure que le requérant a déposé son véhicule pour entretien dans les ateliers de la société IVOIRE
MOTORS.
Que plus de six mois après, le véhicule ne lui a pas encore été restitué, l’emmenant à solliciter à la mise à sa
disposition par la société IVOIRE MOTORS d’un véhicule similaire au sien dans l’attente de la réparation pour
selon lui respecter les usages en la matière.
Le demandeur ne rapporte cependant pas la preuve de l’usage qui veut qu’en matière automobile, le garagiste
a l’obligation de mettre à la disposition du client un autre véhicule de remplacement dans l’attente de la
réparation du sien.
En outre, aucune pièce du dossier ne conforte l’usage allégué ou n’établit cette obligation à la charge du
garagiste, Aussi en l’absence de preuves contraire, il y a lieu de dire que l’obligation de mise à dispositions
d’un véhicule par la société IVOIRE MOTORS n’a pas été rapportée et déclarer par conséquent la demande
mal fondée.
7
La CCJA a déjà eu à rappeler les conditions d’application de l’article 207 dans son arrêt n°064/2005 du 22
décembre 2005, ainsi qu’il suit : « Le juge ne peut se livrer à l’interprétation des usages et des habitudes en
application de l’article 207 que si l’intention des parties n’est pas ou est mal exprimé. » Qu’ainsi en adressant
un appel d’offres en se réservant le droit de ne pas y donner suite ou de n’y donner qu’une suite partielle,
Introduction 10
- L'usage de droit ou encore coutume se forme de façon identique à l'usage
conventionnel; mais il n'est pas admis par interprétation de la volonté des parties: il
s'impose par lui-même comme une norme objective; cependant les parties peuvent y
déroger par convention;
L'usage de droit permet de déroger à des dispositions impératives de droit civil; ainsi,
la solidarité est présumée en matière commerciale contrairement aux dispositions de
l'article 1202 alinéa 1 du code civil aux termes duquel : « La solidarité ne se présume
point ; il faut qu’elle soit expressément stipulée. » c’est un arrêt qui consacre cette
présomption de solidarité : Requ. 20 octobre 1920 (D. 1920 1 161) : « mais attendu,
d’une part, que l’article 1202 c. civ. invoqué par le pourvoi est sans application
dans l’espèce ; qu’en effet selon un usage antérieur au code de commerce et
maintenu depuis, les tribunaux de commerce sont conduits à considérer que la
solidarité entre débiteurs se justifie par l’intérêt commun du créancier qu’il incite
à contracter et des débiteurs dont il augmente le crédit… »
La Cour d’appel d’Abidjan le rappelle dans son arrêt en date du 6 mai 2005 ainsi qu’il
suit : « Les opérations de transit, de transport et de manufacture étant des actes de
commerce au sens de l’article 3 de l’Acte uniforme portant droit commercial, l’article
1202 du code civil n’est pas applicable en cette matière où la solidarité se présume… »
in répertoire quinquennal OHADA 2006-2010 T. 2 page 11.
l’auteur ne peut être tenue pour lié en cas d’absence de réponse. » Recueil de jurisprudence de la CCJA n°6,
juillet-décembre 2005, page 54
8
Georges Ripert et René Roblot : Traité de droit commercial T.1, Vol.1 18e édition p.30 n°43,
LGDJ.
9
Cass. Ch. Civ. Section commerciale 16 mai 1949 D. 1950 P. 629.
Introduction 11
Dans le cours d'une contestation, la preuve de l'usage de droit n'a pas à être rapportée
par celui qui l'invoque car le juge doit le connaître et l'appliquer comme la loi elle-même;
c'est pourquoi la doctrine soutient, à juste titre, que la violation d'un usage de droit par
le juge constitue la violation d'une règle de droit et qu'en conséquence la cour suprême
saisie de ce chef devrait casser la décision rendue.
b- La jurisprudence
Ce sont les décisions rendues par les tribunaux ainsi que les sentences arbitrales
rendues sous l’égide de la Cour d’Arbitrage de Côte d’Ivoire dite CACI, de même que
celles rendues en application du règlement d’arbitrage de la CCJA.
Elles sont importantes car c’est la jurisprudence commerciale qui intervient pour fixer
les usages dont le rôle est éminent dans le monde des affaires.
Désormais, les contestations relatives aux actes de commerce accomplis par les
commerçants à l’occasion de leur commerce et l’ensemble de leurs contestations
commerciales comportant même un objet civil sont de la compétence des juridictions
de commerce. Toutefois et en l’état, seul le Tribunal de commerce d’Abidjan est
opérationnel. Jusqu’à la mise en place effective des autres tribunaux de commerce, les
Tribunaux de droit commun conservent leur compétence en matière commerciale. Ils
sont dans tous les cas compétents lorsqu’ils sont saisis par un non commerçant opposé
à un commerçant.
En appel, les décisions sont rendues par les Cours d’appel ; en matière commerciale, il
s’agit des cours d’appel de commerce ; et en cassation par la Cour Commune de Justice
et d’arbitrage dite CCJA.
Introduction 12
L'application des Actes uniformes de l'OHADA, mais surtout la réforme issue du nouvel
Acte uniforme, laisse entrevoir la place prépondérante que va occuper la jurisprudence
dans notre droit commercial nouveau. En effet, comme toute disposition textuelle
récente, les actes uniformes de l'OHADA renferment des ambiguïtés et parfois même
des erreurs pour lesquelles il faut une décision d'une institution autorisée; à côté de
cela, les actes uniformes vont s'appliquer dans 17 pays avec tout ce que cela peut
comporter comme divergence dans l'interprétation des textes.
C’est pour résoudre ces problèmes, qu’il a été créé la Cour Commune de Justice et
d'Arbitrage (CCJA) dans le but d'harmoniser l'interprétation des textes et d'élaborer une
jurisprudence commune à tous les Etats Parties au traité. Ainsi la cour, saisie par la
voie du recours en cassation, se prononce sur les décisions rendues en dernier ressort
par les juridictions des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions
relatives à l'application des actes uniformes et de leurs règlements.
La Cour peut être également consultée par les Etats parties au traité, le conseil des
ministres de l’OHADA sur toute question relative à l’interprétation et à l’application du
traité et de ses règlements d’application ; de même elle peut être consultée par les
juridictions nationales saisies dans le cadre d’un contentieux relatif à l’application des
actes uniformes..
Dans l'application des actes uniformes, la jurisprudence et les avis, comme source du
droit en général, vont trouver toute leur expression.
c- La doctrine
Comme dans les autres disciplines juridiques, la doctrine interprète ou aide à interpréter
les textes de loi.
Avec les actes uniformes, le rôle de la doctrine sera renforcé car, plus que par le passé,
elle doit veiller à discerner et à analyser toutes les dispositions nouvelles pour
permettre, à travers sa contribution, d'asseoir un droit commercial cohérent dans son
application.
A l'issue de cette introduction, nous allons poursuivre notre étude par les commerçants
et les entreprenants (1ère partie) puis par les sociétés commerciales (2e partie).
Introduction 13
Première partie :
Aux termes des dispositions de l’article 2 dudit Acte uniforme: " est commerçant celui
qui fait de l’accomplissement d’actes de commerce par nature sa profession".
Cette définition est nouvelle mais elle ne bouleverse pas les principes déjà connus. En
effet elle précise les actes dont l’accomplissement confère la qualité de commerçant. Il
s’agit, comme par le passé, des actes de commerce par nature. Elle ne fait plus
référence à la profession habituelle. Quant aux actes de commerce, il est procédé, pour
certains, à leur définition, pour d’autres, à leur énumération.
Toujours est-il que pour avoir la qualité de commerçant, il faut accomplir en toute
autonomie, comme par le passé, des actes de commerce par nature à titre de
profession. Aucune autre condition n’a été prescrite par la loi.
Par dérogation à la règle qui précède, il y a l’entreprenant qui peut exercer une activité
commerciale ; c’est-à-dire qui peut accomplir les actes de commerce par nature à titre
de profession mais qui n’acquiert pas la qualité de commerçant tant qu’il a déclaré
vouloir être entreprenant et qu’il demeure un très petit entrepreneur au plan comptable
et financier.
10
Jacqueline LOHOUES OBLE : « Innovations dans le droit commercial général », in Petites Affiches n°205,
page 8
Les commerçants 14
Chapitre 1 : Les actes de commerce
La définition suivie de l’énumération des actes de commerce par nature ressort des
dispositions de l’article 3 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général ;
tandis que l’énumération des actes de commerce par la forme ressort des dispositions
de l’article 4 dudit Acte uniforme.
Cette liste n'était cependant pas exhaustive; le nouvel Acte uniforme n’a pas résolu le
problème de l’exhaustivité puisqu’il énumère aussi bien les actes de commerce par
nature que les actes de commerce par la forme en émettant des réserves.
Enfin, il y a les actes qui sont commerciaux pour l'une des parties et non commerciaux
pour l'autre et qu'on appelle actes mixtes.
La définition susvisée devrait donc permettre de classer les actes de commerce par
nature, telle que énumérée par l’article 3 de l’acte uniforme portant sur le droit
commercial général, en deux grandes catégories. Mais cette classification, si elle est
aisée pour certains actes, ne l’est pas pour plusieurs autres. Il en va ainsi, par exemple,
pour les contrats entre commerçants, de même que pour les actes des sociétés
commerciales qui n’ont pas une nature déterminée par avance ; il peut s’agir de
prestations de services ou d’actes d’entremise dans la circulation des biens. Il sera donc
retenu la catégorie des actes de commerce par nature en raison de leur auteur.
C’est dans le même sens qu’il faut entrevoir l’évolution résultant de la loi n°2019-576
du 26 juin 2019 instituant Code de la Construction et de l’Habitat (JO du 1er août 2019)
en ce qui concerne la vente d’immeuble à construire et la promotion immobilière.
En effet aux termes des dispositions de l’article 109 de la loi susvisée, « Le vendeur
d’immeuble à construire est un commerçant au sens des articles 2 et 3 de l’Acte
uniforme de l’OHADA portant sur le droit commercial général. Il doit être immatriculé au
registre du commerce et du crédit mobilier et tenir les livres comptables imposés aux
Et aux termes des dispositions de l’article 110 de la loi susvisée, « la vente d’immeuble
à construire est l’acte par lequel le vendeur s’engage à céder en toute propriété à
l’acquéreur tout ou partie d’un immeuble à édifier dans un délai fixé par un contrat. Cette
vente peut être conclue en l’état futur d’achèvement ou à terme. »
Quant au promoteur immobilier qui est un mandataire qui s’oblige envers le maître de
l’ouvrage à faire procéder à la construction, pour un prix convenu et au moyen de
contrats de louage d’ouvrage, d’un ou de plusieurs immeubles et à effectuer elle-même
ou à faire effectuer, moyennant une rémunération convenue, tout ou partie des
opérations juridiques, financières et techniques concourant à ce même objet (article
146 de la loi n°2019-576 du 26 juin 2019 instituant Code de la Construction et de
l’Habitat) l’article 154 alinéa 2 de la même loi dispose que : « le promoteur immobilier
est aussi habilité à procéder à la vente d’immeuble à construire pour le compte du
maître de l’ouvrage et de ce fait est considéré comme vendeur d’immeuble. Les
dispositions du titre 1er de la présente loi (relatives à la vente d’immeubles à construire)
lui sont donc applicables. »
- Il faut qu'il y ait achat préalable du bien à vendre; sinon, il n'y a pas acte de commerce;
ainsi en est-il des exploitations agricoles par exemple.
Les exploitations agricoles sont exclues du domaine commercial car l'agriculteur vend
les produits du sol; sans doute certains agriculteurs transforment les produits de leur
exploitation, par exemple en huile, en farine etc...; mais la jurisprudence maintient le
caractère civil à ce type d'exploitations agricoles; les actes qui y sont effectués
demeurent, par conséquent, des actes civils.
Toutefois lorsqu'un agriculteur achète les produits des autres pour les transformer et
les revendre dans une proportion plus importante que sa propre production, il accomplit
des actes de commerce; de même, lorsqu'il loue aux autres ses machines, il accomplit
des actes de commerce.11. On a aussi considéré comme étant un commerçant
l’horticulteur dont les plants achetés et revendus sont nettement supérieurs à ceux
vendus après culture (cass. Soc. 13 février 1959, bull IV n°220). Il en va de même du
pépiniériste qui achète des plants et les revend immédiatement sans transformation
11
Req.11 déc.1944 D.1944 p.213
Enfin, faute d'achat préalable, l'auteur d'une œuvre littéraire ou artistique ne fait pas
acte de commerce s'il cède son œuvre; il en est de même de l'inventeur d'une œuvre
brevetée.
En revanche l'éditeur ou l'exploitant d'un brevet qui utilise les œuvres d'autrui dans un
but lucratif fait un acte de commerce car il spécule sur le travail d'autrui.
- Il faut qu'il y ait une intention de revente de la part de l'acheteur; il faut et il suffit que
cette intention ait existé au moment de l'achat; peu importe que par la suite le bien n'ait
pas été vendu. Généralement, la preuve de l'intention de revente résulte de l'activité
professionnelle de l'auteur de l'achat.
Si l'achat n'a pas été effectué dans l'intention d'une revente, il constitue un acte civil;
ex. de celui qui achète un bien pour sa consommation personnelle.
Ainsi les associations, les syndicats, les coopératives qui achètent et revendent à leurs
membres sans intention de profit ne font pas des actes de commerce.
12
: Cass. Civ. 30 novembre 1931, D. H. 1932 P. 83 ; Voir de même : Cass. Civ. 27 juillet 1878 D. 1879 P.38
Il s’agit des biens produits soit de façon isolée soit industriellement. On peut citer
les opérations de manufactures, l’exploitation industrielle des mines carrières et
de tout gisement de ressources naturelles, l’édition et la production de
spectacles.
a- Les opérations de manufacture
Sous l’empire du code de commerce, elles ne revêtaient le caractère commercial
qu'effectuées dans le cadre d'une entreprise. Désormais elles ont un caractère
commercial parce qu’il s’agit d’une activité de production de biens
Il en résulte que les activités extractives ont un caractère commercial dès lors que la
production est faite industriellement c'est-à-dire dans des ateliers ou des usines avec
usage de machines et de matériel technique approprié; ce qui exclut les exploitations
artisanales ou villageoises.
c- L’édition
Le code de commerce n'avait pas prévu l'édition; mais la jurisprudence avait admis que
les entreprises d'édition sont des entreprises commerciales car elles sont des
intermédiaires intéressés dans la circulation des œuvres intellectuelles. L’édition est en
réalité une industrie de production des œuvres littéraires.
- les spectacles soient donnés dans un but de spéculation c'est-à-dire dans le but de
réaliser un bénéfice.
C'est pourquoi les associations qui organisent des spectacles publics dans un but
éducatif ou de divertissement n'accomplissent pas des actes de commerce.
En la matière, il s’agit, soit d’exécuter des travaux au profit de la clientèle, soit de mettre
des choses à sa disposition temporairement. On peut citer les opérations financières et
assimilées, les services matériels et les opérations d’intermédiation.
Sont considérés comme opérations de crédit les opérations de prêt, d'escompte des
effets de commerce, de prise en pension, d’acquisition de créances, de garantie, de
financements de vente à crédit et de crédit-bail.
Ce sont des transactions qui sont effectuées sur un marché public spécialisé dans les
opérations d'achat et de vente de valeurs mobilières; dans les Etats de l’UEMOA, il
s’agit de la Bourse Régionale des Valeurs mobilières (BRVM).
Les valeurs mobilières sont des titres représentant des droits d'associés ou de prêteurs
à moyen ou long terme, négociables suivant les formes simplifiées du droit commercial
et qui confèrent des droits identiques par catégories et/ou donnent accès à une quotité
du capital de la société émettrice.
Qu'en est-il des particuliers qui donnent des ordres pour l'achat et la vente des titres?
13
Req. 4 juillet 1881 Sirey 1882-1-15
Il s'agit de tous les actes liés au transport des personnes et des marchandises que ce
soit par terre, par mer où par air; désormais ces actes sont commerciaux lorsqu’ils sont
accomplis dans le but d’en tirer un profit pécuniaire; ainsi le particulier qui utilise son
véhicule personnel pour faire du transport en commun de personnes (wôrô-wôrô)
accomplit des actes de commerce.
En France, dans une telle hypothèse, on considère qu’il s’agit d’artisanat car c’est un
travailleur manuel qui utilise un seul véhicule. En l’état du droit ivoirien, selon la
déclaration qu’il a faite et le chiffre d’affaires annuel sur deux exercices consécutifs, on
pourra le qualifier de commerçant ou d’entreprenant.
Il s'agit de tous les actes liés aux moyens modernes de communication que sont le
téléphone, le fax, la télécopie, la téléphonie cellulaire, l’internet, etc...
Aux termes des dispositions de l'article 169 (137) de l'acte uniforme, "l'intermédiaire de
commerce est une personne physique ou morale qui a le pouvoir d'agir, ou entend agir,
habituellement et professionnellement pour le compte d'une autre personne,
commerçante ou non, afin de conclure avec un tiers un acte juridique à caractère
commercial".
Quant au courtier, c'est celui qui fait habituellement profession de mettre en rapport des
personnes en vue de faciliter, ou de faire aboutir, la conclusion de conventions entre
ces personnes"14.
C'est dans le domaine des assurances que le courtage est véritablement développé en
Côte d'Ivoire; la profession de courtier d'assurance est réglementée par le code issu de
la conférence interafricaine des marchés d'assurance (CIMA).
14
CCJA, 29 mars 2007 : « Une opération ponctuelle d’entremetteur ne suffit pas à conférer la qualité de
courtier à une personne qui en est l’auteur. Il faut qu’il s’agisse d’une personne dont la profession habituelle
est de servir d’intermédiaire. » Recueil de jurisprudence de la CCJA n°9, janvier-juin 2007, page 32.
Ces actes sont énumérés par l'acte uniforme; il s’agit de l'achat, de la souscription, de
la vente ou de la location d'immeubles, de fonds de commerce, d'actions ou de parts
de société commerciale ou immobilière.
En la matière, il s'agit des actes accomplis par les personnes qui se chargent
professionnellement de gérer les affaires d'autrui, d'administrer ses biens; notamment
les agences immobilières pour les opérations concernant l'achat, la vente ou la location
d'immeubles; les prestataires de services qui interviennent dans ces transactions
comme les agences de renseignements commerciaux et les cabinets ou agents
d'affaires pour la conclusion des contrats d’achats ou de vente d’actions, de parts
sociales ou de parts d’intérêt pour le compte de leurs clients.
Il en va ainsi des actes effectués par les sociétés commerciales par la forme que sont :
les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés anonymes, les sociétés en nom
collectif, les sociétés en commandite simple et les sociétés par actions simplifiée.
Il en va de même des actes effectués par les sociétés qui sont commerciales en raison
de leur objet.
On note ainsi que lorsque le contrat est conclu entre des commerçants pour leur
commerce respectif, il a le caractère d’acte de commerce par nature ; il n’y a pas lieu,
dans ce cas, de se demander si, à l’origine, l’acte était de nature civile ou commerciale.
En revanche, on peut considérer que dans les rapports entre commerçants et non
commerçants, ou même entre commerçants dont l’un n’agit pas pour les besoins de
son commerce, la commercialité de l’acte s’établit par accessoire.
Le billet à ordre est un titre par lequel une personne s'engage à payer une somme
déterminée à une date déterminée à un bénéficiaire ou à l'ordre de celui-ci.
Il résulte des dispositions du texte que toute personne même non commerçante et
quelle qu’en soit la cause qui signe une lettre de change un billet à ordre ou un warrant
accompli un acte de commerce et est tenue dans les conditions du droit commercial.
Cette règle a pour but de faciliter la circulation de ces effets. Toutefois, le fait de signer
habituellement ces effets pour honorer des engagements ne saurait conférer la qualité
de commerçant puisque non constitutif d'une profession. Au demeurant, c’est
l’accomplissement d’actes de commerce par nature à titre de profession qui confère la
qualité de commerçant.
Ainsi une société à responsabilité limitée constituée pour exploiter une entreprise
agricole est commerciale par la forme.
Il était admis que cette catégorie d'actes créée par la jurisprudence avait pour
fondement l'article 632 paragraphe 6 du code de commerce aux termes duquel:" la loi
Cette analyse est encore valable et peut être déduite de l'acte uniforme dont l'article 3
dispose:" Ont le caractère d'actes de commerce par nature notamment...les contrats
entre commerçants pour les besoins de leur commerce".
Mais pour qu’il en soit ainsi, Il faudrait remplir les conditions suivantes:
- l'auteur de l'acte doit être un commerçant c'est-à-dire qu'il doit accomplir des actes de
commerce par nature à titre de profession;
- l’acte doit avoir été accompli à l’occasion et/ou pour les besoins du commerce.
Il s'agit cependant d'une présomption simple dont la preuve contraire peut être
rapportée par le commerçant; il pourra démontrer qu'il s'agit d'un acte personnel; celui-
ci redevient, alors, civil.
Cette théorie de l'accessoire concerne aussi les actes civils; ainsi des actes
commerciaux deviennent civils dès lors qu'ils sont l'accessoire d'une activité principale
de nature civile. Ainsi le médecin exerçant une profession libérale qui achète pour
revendre à ses patients les médicaments qu’il prescrits accomplit des actes civils par
accessoire. Il en va de même de l’artisan qui achèterait pour revendre à ses clients des
accessoires nécessaires aux produits commandés par ces derniers.
A- Le domaine contractuel
Tous les contrats conclus par un commerçant sont commerciaux s'ils le sont pour les
besoins de son commerce; il en est ainsi des achats, des ventes de matériel, de fonds
de commerce, des contrats d'assurance, de transport etc... Même le contrat de travail
conclu avec un salarié est commercial pour le commerçant.
De même le commerçant qui donne ou prend à bail un immeuble pour les besoins de
son commerce accomplit un acte de commerce.
Il s’agira d’une commercialité par accessoire si le contrat est conclu avec un non
commerçant et d’une commercialité par nature si le contrat est conclu avec un
commerçant.
Au titre des garanties, le gage qui est le contrat par lequel un bien meuble est remis au
créancier ou à un tiers convenu entre les parties pour garantir le paiement d'une dette
et qui est de nature civile, devient commercial s'il garantit une dette commerciale.
Quant aux actes relatifs aux rapports de famille et aux actes à titre gratuit, ils ne sont
jamais commerciaux.
15
CAEN 12 juillet 1967 D. 1968, 208
16
Com.7juillet 1969 D.1970 p.14
Il en est de même du contrat de travail qui est commercial pour l'employeur commerçant
et civil pour les salariés.
L'intérêt que présentent les actes mixtes réside dans la détermination de leur régime
juridique: Faut-il appliquer à ces actes les règles du droit civil ou celles du droit
commercial? La solution varie selon le domaine envisagé.
- en revanche si c'est le commerçant qui fait preuve contre le non commerçant, les
règles du droit civil devront s'appliquer. C’est-à-dire qu’il doit faire la preuve par écrit.
17
Cass. Com. 7 avril 1967 D. 1968 p. 61
18
Requêtes 21 juillet 1936 GAZ.PAL.1936.II.609
Rappelons que le code commerce au lieu de définir l'acte de commerce avait procédé
par énumération; mais celle-ci était incomplète parce qu'elle ne visait pas tous les actes
de commerce.
Avec le nouvel Acte uniforme, il y a une définition de l’acte de commerce par nature.
Quant à l’acte de commerce par la forme il y a une énumération qui n’est pas exhaustive
à travers l'adverbe "notamment".
L'acte uniforme a-t-il épuisé le débat sur la détermination d'un ou des critères de l'acte
de commerce ?
A- Le critère de la circulation
L'acte de commerce par nature est l'acte d'entremise dans la circulation des richesses
depuis la production jusqu'à la consommation dans le but de réaliser un profit. C’est ce
que l’Acte uniforme retient expressément.
Pour une large part ce critère se révèle exact. Certes il renvoie un peu trop clairement
à l’idée d’achat et de revente ; mais, en l’état, même les biens produits figurent dans la
définition de l’acte de commerce par nature. En conséquence les critiques antérieures
portant sur les activités agro industrielles qui ne répondaient pas toujours à l'idée de
circulation des biens s’estompent.
L’acte de commerce par la forme n’a pas été défini par l’acte uniforme. Devrait-on
considérer qu’il s’agit là d’un acte de commerce par détermination de la loi ?
En attendant de trouver une réponse définitive à cette interrogation, on peut dire qu’il
n’est pas exclu que d’autres critères soient retenus comme le critère de l’entreprise par
exemple puisque l’énumération n’est pas exhaustive.
1) Faire des actes de commerce par nature à titre de profession confère en principe
la qualité de commerçant; c'est pourquoi en la matière, la qualité exigée est plus
stricte.
2) La prescription des créances commerciales est de 5 ans alors qu'elle est de 30 ans
pour les créances civiles. En effet, aux termes des dispositions de l’article 16 de
l’Acte Uniforme relatif au droit commercial général19. : « les obligations nées à
l’occasion de leur commerce entre commerçants, ou entre commerçants et non-
commerçants, se prescrivent par cinq ans si elles ne sont soumises à des
prescriptions plus courtes20.
3) La mise en demeure du débiteur résulte, en matière commerciale de toute
manifestation de volonté du créancier; alors qu'en matière civile, il faut une citation
en justice ou un acte extra-judiciaire.
4) Les intérêts moratoires sont plus élevés en matière commerciale qu'en matière
civile.
5) Pour certaines dettes commerciales comme celles résultant d'une lettre de change,
d'un billet à ordre ou d'un chèque, le délai de grâce est écarté.
6) Dans les contrats civils, la solidarité ne se présume pas; alors qu'elle se présume
en matière commerciale.
7) La preuve est libre en matière commerciale; en effet, les actes de commerce se
prouvent par tous moyens même par voie électronique à l’égard des commerçants.
Même à l’égard des non-commerçants, tout commencement de preuve par écrit
19
Au sujet de l’application de l’article 16 (18 ancien) de l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, la
Cour suprême de Côte d’Ivoire saisie a jugé, d’une part, que la prescription commence à courir à partir du
jour où l’action peut être exercée, d’autre part que la prescription quinquennale n’est pas applicable aux
obligations litigieuses nées avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme. CSCI, chambre judiciaire, 15 mars
2007, Revue Actualités juridiques 2008, n°57, page 150.
S’agissant de convention de compte courant, c’est à la clôture du compte que le solde est dressé et ouvre
droit aux contestations. En l’espèce, le point de départ des contestations est constitué par la date de la
réclamation de payer. CA de Ouagadougou, 3 décembre 2010, Répertoire annuel de jurisprudence OHADA
2012, page 47.
20
A la différence du délai de forclusion qui court, pour la durée fixée par la loi, à compter de
l’événement que celle-ci détermine, le délai de prescription court à compter du jour où le
titulaire du droit d’agir a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son
action. Elle est suspendue à l’égard de celui qui est dans l’impossibilité d’agir. La suspension
de la prescription a pour effet d’en arrêter temporairement le cours sans effacer le délai déjà
couru. Elle est interrompue par la reconnaissance de la part du débiteur, la demande en
justice, même en référé. L’interruption de la prescription a pour effet d’effacer le délai de
prescription acquis. Elle fait courir un nouveau délai de même durée que l’ancien.
Les actes de commerce ainsi analysés, il convient de s'intéresser à ceux qui les
accomplissent à titre de profession.
L’acte uniforme portant sur le droit commercial général ajoute à la profession de commerçant qu’il a
toujours régi, celle de l’entreprenant qui est un professionnel avec un statut tout à fait particulier.
Aux termes des dispositions de l’article 30 alinéa 1er de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial
général, « L’entreprenant est un entrepreneur individuel, personne physique qui, sur simple déclaration
prévue dans le présent Acte uniforme, exerce une activité professionnelle civile, commerciale, artisanale
ou agricole. »
L’acte uniforme réglemente de manière spéciale le statut d’un professionnel qui était inconnu de notre
droit commercial. Les activités de ce professionnel font pourtant déjà l’objet de textes particuliers en ce
compris les Acte uniformes. Qu’est ce qui caractérise donc ce professionnel et quelles sont les
obligations à sa charge ?
Il résulte des dispositions de l’article 30 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général que
trois conditions sont à remplir pour acquérir et conserver le statut d’entreprenant : une condition
personnelle, une condition de déclaration d’activité et une condition financière et comptable.
I) La condition personnelle
On note ainsi que ce n’est pas l’activité exercée qui détermine le statut de l’entreprenant. Tout
professionnel, personne physique, que son activité soit civile, commerciale, artisanale ou agricole peut
prétendre au statut d’entreprenant. Il faut néanmoins satisfaire aux deux autres conditions prescrites
par l’Acte uniforme.
L’entreprenant est soumis à une obligation de déclaration de son activité professionnelle. C’est une
obligation préalable à l’exercice de son activité. Ainsi en dispose l’article 62 de l’Acte uniforme relatif
au droit commercial : « l’entreprenant déclare son activité… sans frais, au greffe de la juridiction
compétente ou à l’organe compétent dans l’Etat Partie, dans le ressort duquel il exerce ». Que doit-il
déclarer et quels sont les effets de cette déclaration ?
A) Le contenu de la déclaration
1) Noms et prénoms ;
2) Adresse d’exercice de l’activité ;
3) Description de l’activité ;
4) Justificatif d’identité ;
5) Eventuellement, justificatif du régime matrimonial.
A l’appui de sa déclaration l’entreprenant doit fournir les pièces justificatives suivantes :
34
1) Un extrait de son acte de naissance ou de tout document administratif justifiant de son identité ;
2) Le cas échéant un extrait de son acte de mariage ;
3) Une déclaration sur l’honneur signée du demandeur et attestant :
a. S’il est commerçant qu’il n’est frappé d’aucune des interdictions prévues par l’article 10
ci-dessus (interdiction consécutive à une condamnation) ;
b. S’il n’est pas commerçant ; qu’il n’a fait l’objet d’aucune interdiction d’exercer en relation
avec sa profession et qu’il n’a fait l’objet d’aucune condamnation pour les infractions
prévues par l’article 10 ci-dessus.
La déclaration sur l’honneur est complétée dans un délai de 75 jours à compter de la
date de l’immatriculation (de la déclaration ?) par un extrait du casier judiciaire.
4) Un certificat de résidence ;
5) Le cas échéant, une autorisation préalable d’exercer l’activité du déclarant.
Les changements, les modifications d’activité ou du lieu d’exercice de l’activité doivent faire l’objet d’une
déclaration au greffe de la juridiction compétente.
B) Effets de la déclaration
Dès réception du formulaire de déclaration d’activité dûment rempli et des pièces prévues par le présent
Acte uniforme, le greffier ou le responsable de l’organe compétent dans l’Etat Partie délivre au déclarant
un accusé d’enregistrement qui mentionne la date de la formalité accomplie et le numéro de déclaration
d’activité.
Le numéro de déclaration d’activité est personnel. Nul ne peut être déclaré entreprenant à plusieurs
registres ou sous plusieurs numéros à un même registre.
L’entreprenant ne peut être en même temps immatriculé au RCCM. Il n’a pas le même statut que les
personnes immatriculées au RCCM.
La personne qui satisfait aux obligations de déclaration est présumée avoir la qualité d’entreprenant. A
ce titre, elle bénéficie des règles ci-après s’appliquant aux commerçants :
1) La liberté de la preuve. Ainsi ses actes se prouvent par tous moyens y compris par voie
électronique à l’égard des entreprenants. Tout commencement de preuve par écrit autorise
l’entreprenant à prouver par tous moyens contre un non entreprenant.
2) « les obligations nées à l’occasion de leurs activités entre entreprenants, ou entre entreprenants
et non entreprenants, se prescrivent par cinq ans si elles ne sont soumises à des prescriptions
plus courtes (article 33). Toutes les règles régissant les prescriptions et applicables aux
commerçants leur sont applicables (articles 17 à 19)
3) Ils bénéficient des dispositions relatives au bail à usage professionnel. Toutefois aux termes
des dispositions de l’article 134 alinéa 2 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial
général, « Sauf convention contraire entre le bailleur et l’entreprenant, ce preneur ne bénéficie
ni d’un droit au renouvellement du bail, ni d’un droit à la fixation judiciaire du loyer du bail
renouvelé. »
L’entreprenant pourra bénéficier des mesures incitatives que l’Etat partie au traité devra fixer,
notamment en matière fiscale et de charges sociales. C’est d’ailleurs l’intérêt qu’il y a à opter pour le
statut d’entreprenant.
35
III) La condition financière et comptable
Aux termes des dispositions de l’article 30 alinéa 2 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial
général, « l’entreprenant conserve son statut si le chiffre d’affaires annuel généré par son activité
pendant deux exercices successifs n’excède pas les seuils fixés dans l’Acte uniforme portant
organisation et harmonisation des comptabilités des entreprises au titre du système minimal de
trésorerie. »
En ce qui concerne les commerçants et les artisans, ce chiffre d’affaires est, aux termes des dispositions
de l’alinéa 3 de l’article 30 susvisé, d’une part, celui de leurs activités de vente de marchandises,
d’objets, de fournitures et denrées ou de fourniture de logement et, d’autre part, celui de leurs activités
de prestations de services et, en ce qui concerne les agriculteurs, celui de leurs activités de production.
Les seuils fixés par l’article 13 de l’Acte uniforme portant organisation et harmonisation des
comptabilités des entreprises sont les suivants :
Pour déterminer le chiffres d’affaires de celui qui fait à la fois du négoce et fournit des services, il faut,
en application de l’article 30 alinéa 3 l’Acte uniforme relatif au droit commercial général, cumuler les
seuils susvisés.
Il résulte de ce qui précède que ce sont les très petits entrepreneurs individuels qui peuvent avoir le
statut d’entreprenant. Ils conservent ce statut tant que les seuils susvisés n’ont pas été dépassés
pendant deux années consécutives.
Cela signifie qu’en réalité le professionnel qui se déclare entreprenant est cru sur sa simple déclaration
et conserve le statut d’entreprenant jusqu’à la fin de deux exercices successifs. Après quoi, il reprend
son véritable statut ou conserve celui d’entreprenant.
En conclusion on peut dire que l’entreprenant peut exercer une activité commerciale ou artisanale à titre
de profession sans acquérir la qualité de commerçant ou d’artisan tant que les conditions de déclaration
d’activité puis financière et comptable sont remplies.
Des obligations comptables pèsent sur l’entreprenant. Il doit les respecter tant qu’il conserve son statut.
En cas de perte de sa qualité d’entreprenant, il doit se conformer à la loi.
L’entreprenant doit tenir au jour le jour un livre mentionnant chronologiquement d’une part, l’origine et
le montant de ses ressources c’est-à-dire de ses entrées de fonds en distinguant les règlements en
espèces des autres modes de règlement, d’autre part la destination et le montant de ses emplois c’est-
à-dire de ses dépenses.
36
II) Les obligations en cas de perte du statut d’entreprenant
Lorsque l’entreprenant perd son statut suite au dépassement du seuil du chiffre d’affaires fixé par la loi,
il perd aussi le bénéfice de la législation spéciale issue de l’Acte uniforme. Il est tenu dès le premier jour
de l’année suivant celle du dépassement et avant la fin du premier trimestre de cette année de se
conformer aux textes régissant ses activités en qualité d’entrepreneur individuel.
Ainsi s’il s’agit d’une activité commerciale, il doit se conformer aux obligations des commerçants en
procédant notamment à son immatriculation au registre du commerce et du crédit mobilier.
A l’origine, ce principe a été consacré en France, non pas par la déclaration des droits de l'homme et
du citoyen de 1789, mais par la loi des 2 et 17 mars 1791 qui prescrivait qu’« il sera libre à toute
personne de faire tel négoce ou d’exercer telle profession, art ou métier qu’elle trouvera bon. »
La question s'était alors posée de savoir sur quel fondement juridique l'application de ce principe se
justifiait en Côte d'Ivoire; La Côte d’Ivoire avait proclamé son attachement à la déclaration des droits de
l’homme et du citoyen de 1789 et à la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948; mais ces
déclarations ne formulaient pas le principe de la liberté du commerce et de l'industrie de façon expresse.
Aussi, Certains auteurs comme le doyen Degni Segui ont-ils estimé qu'un certain nombre de principes
du droit public métropolitain, telle la liberté du commerce et de l'industrie, sont passés dans le patrimoine
législatif et réglementaire de la Côte d'Ivoire; par conséquent rien ne s'oppose à ce que la loi des 2 et
17 mars 1791 s'applique en Côte d'Ivoire et qu'on puisse la considérer comme le fondement textuel du
principe de la liberté du commerce et de l'industrie.
Mais de sérieuses réserves ont été émises par le professeur Assi Bénié dans sa thèse portant sur "la
liberté du commerce et de l'industrie en Côte d'Ivoire". Selon lui, en vertu du principe de la spécialité
législative, on aurait dû rendre le texte applicable dans les territoires d'Outre-Mer; ce qui n'a jamais été
fait. Par conséquent, il est difficile de soutenir que la loi des 2 et 17 mars 1791 est entrée dans l'ordre
juridique ivoirien.
Il a fallu, selon lui, avoir recours à la jurisprudence notamment à une décision du conseil d'état en date
du 20 décembre 1935(société des établissements Vezia R.D.P.1936 p.126) qui a consacré un principe
général de la liberté du commerce et de l'industrie pour soutenir que ce principe s'applique dans les
colonies même en l'absence de toute promulgation de la loi de 1791.
En France, le conseil constitutionnel a fini par décider, en 1982, que ce principe a une valeur
constitutionnelle qui s’enracine en tant qu’attribut de la liberté dans la déclaration de 1789 (C.C. 16
janvier 1982 Rev. Soc. 1982, P. 132).
Rien ne s’oppose à ce qu’en Côte D’ivoire les mêmes motifs de décision existent puisqu’il s’agit des
mêmes textes de référence, la Côte d’Ivoire ayant, au demeurant, proclamé son attachement à la
déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.
Ce principe est donc applicable en Côte d'Ivoire et l'acte uniforme le consacre en ce qu'il ne soumet
l'exercice de l'activité commerciale à aucune autorisation ni restriction particulières.
Sa vocation est d'ailleurs de consacrer la libéralisation afin de favoriser l'intégration économique des
Etats parties au traité OHADA.
37
Le corollaire de ce principe est le libre accès et la libre exploitation de l'activité commerciale.
Ainsi en Côte d'Ivoire, il n'existe pas de procédure générale d'agrément de l'activité commerciale. Toute
exploitation non expressément défendue est admise.
Sans doute aux termes de l’article 1er du décret N°97-175 du 19 mars 1997 portant institution de la carte
de commerçant, « L’exercice de toute profession commerciale en Côte d’Ivoire est subordonnée à la
détention d’une carte de commerçant délivrée par le Ministre chargé du commerce ».
Mais ce texte, qui est un décret, n’a pas pu avoir pour objet d’apporter une restriction au principe de la
liberté du commerce et de l’industrie qui a une valeur constitutionnelle ; il s’agit tout simplement d’une
disposition par laquelle l’administration entendait assurer un contrôle de l’activité commerciale sur le
territoire ivoirien en vue de l’assainissement de ce secteur.
La valeur légale de ce principe de la liberté du commerce et de l'industrie se manifeste par les deux
règles suivantes:
- Seule une loi peut interdire l'exercice d'une activité commerciale ou d'une industrie. Un décret ou
un arrêté ne peut, en prétextant assurer la police du commerce, interdire l'exercice d'une activité
commerciale.
- En cas d'interdiction légale, l'exploitant qui en est victime par la fermeture de son établissement a
droit à une indemnité pour le préjudice subi, si l'interdiction ne se justifie pas par un motif d'ordre
public21.
En dépit du principe de la liberté du commerce et de l'industrie il ne faut pas perdre de vue que l'exercice
de la profession commerciale comporte des dangers aussi bien pour celui qui se livre au commerce que
pour le public. C'est pourquoi, non seulement, il a été édicté des conditions d'exercice de la profession,
mais aussi certaines obligations ont été mises à la charge des commerçants.
I- L’accès à la profession
Aux termes des dispositions de l'article 2 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général, "Est
commerçant celui qui fait de l’accomplissement d’actes de commerce par nature sa profession".
De cette définition, on a relevé que pour accéder à la profession de commerçant, il faut remplir les
conditions suivantes:
Il convient de relever que la femme mariée était soumise à un régime particulier. Quant à la profession
commerciale, elle doit être distinguée de l’activité artisanale.
21
Georges Ripert et René Roblot : Traité de droit commercial T.1, Vol.1, 18e édition P 61 et 62 N° 78 et 79
38
Le nouvel acte uniforme précise que c’est l’accomplissement d'actes de commerce par nature à titre
professionnel qui confère la qualité de commerçant. Il ne fait, en réalité, que consacrer une règle déjà
connue sous l’empire des textes antérieurs lors même que la précision n’avait pas été faite.
Cette règle vaut pour les commerçants personnes physiques car en ce qui concerne les sociétés, à
l'exception notamment de la société en participation, elles sont commerciales par la forme.
Sans doute l’inverse n’est pas toujours vrai. En effet, on peut accomplir des actes habituellement sans
les faire professionnellement. Dans un tel cas, la personne qui accomplit ces actes n’acquiert pas la
qualité de commerçant. De même quelques actes isolés ne confèrent pas la qualité de commerçant Ce
dont il est question c’est que l’accomplissement des actes de commerce par nature doit constituer
véritablement une profession c'est-à-dire une activité suivie, avec les habitudes sociales qui y sont
attachées traduisant la volonté de tirer de celle-ci tout ou partie des ressources nécessaires à
l'existence.
C'est pourquoi, même si l'activité commerciale est clandestine, elle confère la qualité de commerçant;
ainsi celui qui fait le commerce par l'intermédiaire d'un prête-nom est un commerçant.
Par ailleurs, il importe peu que l'individu ne remplisse pas toutes les conditions d'accès à la profession
commerciale; ainsi celui qui, malgré une interdiction d'exercer un commerce à la suite d'une
condamnation par exemple, passe outre l'interdiction est un commerçant.
L'activité commerciale exercée n'a pas à être exclusive pour conférer la qualité de commerçant; ainsi
l'étudiant qui achète pour revendre des chemises en vue d'assurer sa subsistance et financer ses études
est un commerçant.
Mais il ne faut pas que les actes de commerce constituent l'accessoire d'une profession civile; sinon, il
s'agira d'actes civils par accessoire et ne donneraient pas à leur auteur la qualité de commerçant; ex.
Du directeur d'auto-école enseignant qui vendrait des codes de la route à ses élèves. En revanche, si
le directeur n’est pas enseignant, alors il va acquérir la qualité de commerçant : « Celui qui, sans
aucune connaissance ni aucune compétence spéciales en la matière, organise des cours de
coupe et de couture qu’il fait dispenser par des professeurs ou des techniciens recrutés et
appointés par lui, son rôle personnel se bornant à l’organisation purement matérielle des
cours…, n’a en fait aucun rôle d’enseignement dans cette entreprise dont le caractère est, en ce
qui le concerne, purement spéculatif et commercial. »22
Ceux qui, bien que participant à une activité commerciale, ne jouissent pas d'une indépendance
suffisante, ne sont pas commerçants.
22
CAEN 12 juillet 1967D. 1968, 208
39
Ainsi, les salariés d'un commerçant, liés par un contrat de travail, ne sont pas eux-mêmes commerçants;
peu importe leur niveau de responsabilité dans l'entreprise; ce sont des préposés qui agissent pour le
compte de leur employeur.
De même les mandataires qui agissent au nom et pour le compte d'un commerçant ne sont pas
commerçants car n'agissant pas pour leur compte. Sauf si l’Acte uniforme en dispose autrement (agents
commerciaux par exemple).
C'est la même situation en ce qui concerne les gérants des S.A.R.L. et les administrateurs des S.A.
Toutefois le prête-nom qui dissimule l'activité commerciale d'une personne est considéré comme
commerçant au même titre que celui pour qui il agit.
Désormais, il convient d’évoquer le couple puisque la loi tend à effacer toute disparité dans les relations
des conjoints. En effet, le mari n’est plus le chef de famille. Les biens communs ne sont plus administrés
exclusivement par le mari. La catégorie des biens réservés dont la femme avait seule la gestion a été
supprimée par la loi.
Les époux sont donc libres d’exercer une activité commerciale sans avoir besoin de l’autorisation de
l’un ou de l’autre époux. Il en va ainsi surtout que l’article 66 de la loi n°2019-570 du 26 juin 2019 relative
au mariage dispose que « chaque époux a la pleine capacité juridique. Toutefois, ses droits et pouvoirs
sont limités par l’effet du régime matrimonial et les dispositions ci-après. »
Cette disposition vaut aussi bien pour le mari que pour la femme. Autrement dit, le mari ou la femme
n’est commerçant que si son activité commerciale est séparée de celle de son conjoint.
Cet article 7 alinéa 2 part du postulat que l’un des époux est déjà commerçant. Il peut s’agir de l’homme
ou de la femme. Dès lors, l’autre ne peut être que collaborateur.
Quelle est la règle applicable en cas d’exercice en commun d’une activité commerciale ?
En droit ivoirien avant la réforme issue de la loi n°2013-33 du 25 janvier 2013 sur le mariage, on
considérait que si les deux époux exploitaient ensemble un fonds de commerce, le mari seul était
présumé commerçant parce que chef de la famille; en effet, en exploitant un fonds de commerce avec
son mari, chef de famille, on disait que la femme n'avait pas une indépendance suffisante propre à
l'exercice du commerce.
Avec la réforme qui a abrogé l’article 53 de la loi relative au mariage qui faisait du mari le chef de la
famille, il est difficile de soutenir la présomption résultant de cette qualité.
23
Jacqueline LOHOUES OBLE : innovation dans le droit commercial général, in Petites Affiches n°205 du 13 octobre 2004, page
8.
40
Pour la doctrine, dans un tel cas, le mari n’est pas présumé être seul commerçant, mais l’un ou l’autre.
C’est ce qu’écrit, à juste raison, le professeur AKUETE SANTOS dans sa note sous l’article 6 de l’Acte
uniforme relatif au droit commercial général (OHADA, traités et actes uniformes commentés et
annotés, juriscope 2002).
Il y a donc lieu dans l’hypothèse envisagée de faire la preuve de celui qui est le commerçant. Si c’est
l’un des époux qui revendique ce statut, c’est à lui de le prouver. La preuve étant faite, l’autre aura le
statut de salarié ou de collaborateur. Si c’est un tiers qui soutient que c’est l’un ou l’autre qui est
commerçant, c’est à lui de faire la preuve du fait qu’il allègue. Il n’est pas exclu que l’un ou l’autre
démontre avoir conclu un contrat de travail avec son conjoint. Dans ce cas, il aura le statut de salarié.
Mais si la femme sert de prête-nom au mari ou si celui-ci s'immisce habituellement dans la gestion de
l'affaire, il sera aussi considéré comme commerçant et responsable des dettes commerciales en
application de l’article 85 de la loi relative au mariage aux termes duquel « les dettes contractées par
les époux, agissant ensemble et de concert, qu’elles aient été dans l’intérêt commun ou dans l’intérêt
de l’un d’eux seulement peuvent être poursuivies sur les biens communs, y compris les biens réservés
de la femme et les biens propres de chacun des époux. »
Sous l'empire de la loi de 1964 relative au mariage, le mari pouvait s'opposer à l'exercice d'une activité
commerciale par sa femme sans formalisme particulier; à charge pour celle-ci de saisir le juge pour
obtenir la mainlevée de ladite opposition.
La loi de 1983 va l'affranchir de cette prérogative du mari; la loi de 2013 ira même plus loin en établissant
l’égalité entre l’homme et la femme. En effet aux termes de l'article 57 de la loi n°2019-570 du 26 juin
2019 relative au mariage, "chacun des époux a le droit d’exercer la profession de son choix à moins
qu'il soit judiciairement établi que l'exercice de cette profession est contraire à l'intérêt de la famille".
Désormais, il appartient au mari comme à la femme de saisir le juge s'il ou elle veut obtenir que sa
femme ou son mari cesse une activité qui s'avère contraire à l'intérêt de la famille : « Attendu qu’il
résulte du dossier des preuves suffisantes que la dame B. exerce une activité commerciale sans
aucune compétence et que les conséquences de ses agissements se révèlent désastreuses, à
la fois, pour les finances et pour l’honorabilité de la famille… Attendu, par conséquent, qu’il est
établi que l’exercice de la profession de commerçante par la dame B. est contraire à l’intérêt de
la famille ; qu’il échet de faire droit à la demande du requérant. »24
Dans l'exercice de son activité commerciale séparée, quels sont les pouvoirs qui sont reconnus à la
femme où à l’homme?
Quant aux biens communs autres que les gains et revenus, ils sont administrés par l’un ou l’autre des
époux.
Au regard de l’option faite par la loi de reconnaître tous pouvoirs de gestion des biens communs au mari
ou à la femme, il n’a pas été retenu la catégorie des biens réservés qui étaient une catégorie de biens
communs réservés à la seule administration de la femme.
Dès lors, quel est le sort des dettes contractées par le mari ou la femme dans le cadre de ses activités ?
24
T.P.I Abidjan 12 juillet 1985 R.I.D.1986 p.93
41
Au regard des dispositions relatives au passif de la communauté, on peut dire en application de l’article
76 2e de la loi relative au mariage que : « Les dettes contractées par chacun des époux peuvent être
poursuivies… sur les biens propres de l’époux qui les contractés si elles ne portent pas sur les besoins
et charges du ménage et, en cas d’insuffisance, sur les biens communs. »
Par ailleurs, l’article 77 de la loi relative au mariage dispose que « les dettes contractées par les époux,
agissant ensemble et de concert, qu’elles aient été dans l’intérêt commun ou dans l’intérêt de l’un d’eux
seulement peuvent être poursuivies sur les biens communs et sur les biens propres de chacun des
époux. »
En considérant qu’en l’absence d’opposition de la part du conjoint, l’activité commerciale est exercée
dans l’intérêt de la communauté, cet article 77 devrait s’appliquer au cas où l’activité professionnelle du
conjoint génère des dettes.
L'artisan est un professionnel qui a un travail essentiellement manuel; c'est un travailleur indépendant
qui vit surtout du produit de son travail et de celui de sa famille.
Aux termes des dispositions de l’article 6 du décret n°2001-426 du 18 juillet 2001 portant attribution,
organisation, fonctionnement et régime électoral de la chambre des métiers de Côte d’Ivoire, « est
considéré comme artisan, tout chef d’entreprise répondant aux critères suivants :
La loi n°2014-338 relative à l’artisanat (JORCI n° spécial 6 juin 2014) en son article 9 dispose que
« l’artisan est toute personne exerçant une activité dans le secteur de l’artisanat.
Il possède une qualification reconnue par son milieu professionnel ou sanctionnée par un certificat
d’apprentissage ou un diplôme d’un centre agréé. »
L’activité du secteur de l’artisanat est toute activité dont le mode de production, principalement manuel,
peut inclure l’utilisation de machines et d’outillages mécaniques, électriques ou électromécaniques et
appartenant à l’une des branches relevant de la ,nomenclature des métiers telle que déterminée par la
loi n°2014-338 relative à l’artisanat.
L'artisan peut donc exploiter une entreprise qu'on qualifierait, alors, d'entreprise artisanale. Mais il ne
doit spéculer ni sur le travail d'un trop grand nombre d'employés, ni sur des machines importantes, ni
sur des stocks trop importants, ni sur la vente de produits qu'il ne fabrique pas lui-même. « Sont
artisans ceux qui tirent l’essentiel de leurs ressources du travail manuel, qui ne spéculent ni sur
les matières premières, ni sur le travail de salariés trop nombreux » ; note sous Cass. Com. 4
octobre 1966
De même : Dijon, 30 octobre 1905 D.P. 1907, 2, 86 : « Que Mazan, modeste cordonnier sans
patente, ne s’annonçait au public que comme fabricant de chaussures sur mesure, et réparateur
de vieilles chaussures ; qu’il ne travaille que sur commande ; qu’il n’avait chez lui aucun
approvisionnement proprement dit, les marchandises qu’il se procurait pour satisfaire aux
exigences de sa fabrication ne pénétrant dans son atelier qu’en suite d’acquisitions par lui
effectuées au fur et à mesure des commandes reçues… Attendu que, dans ces circonstances, il
faut reconnaître que l’appelant n’est réellement qu’un artisan…De même voir Lyon, 22 novembre
1934, Sirey 1935, 2, 38.
42
Comme artisans, nous pouvons citer les tailleurs, les coiffeurs, les cordonniers, les menuisiers, les
blanchisseurs, les maçons, les peintres, les électriciens, les artisans d’art, les tanneurs, les garagistes
(dépanneurs) etc...
N'étant pas commerçant, l'artisan n'est pas soumis aux règles du droit commercial. Toutefois certaines
dispositions de l'acte uniforme leur sont applicables; ainsi les artisans ont droit au renouvellement de
leurs baux dans les mêmes conditions que le renouvellement des baux à usage professionnel. Celui qui
entend exercer une activité artisanale peut décider de se déclarer entreprenant. Dans ce cas, il est
soumis aux règles régissant les entreprenants. S’il perd cette qualité, il devra se conformer aux règles
réglementant la profession d’artisan.
La promotion et le développement de l'artisanat sont assurés en Côte d'Ivoire par la chambre nationale
des métiers créée par le décret N°93-01 du 7 janvier 1993, lequel a été abrogé par le décret n°2001-
426 du 18 juillet 2001 portant attribution, organisation, fonctionnement et régime électoral de la chambre
des métiers de Côte d’Ivoire.
En effet, aux termes des dispositions de l'article 6 de l'acte uniforme portant sur le droit commercial
général "Nul ne peut accomplir des actes de commerce à titre de profession, s'il n'est juridiquement
capable d'exercer le commerce".
A- Les mineurs
Aux termes des dispositions de l’article 1er de la loi n°2019-572 du 26 juin 2019 relative à la minorité :
« Est mineure, la personne qui n’a pas encore atteint l’âge de dix-huit ans accomplis. »
L’article 32 de la loi susvisée dispose que « Le mineur est incapable d’accomplir les actes de la vie
civile. » Il a nécessairement un représentant pour tous les aces de la vie civile. Celui-ci est soit un
administrateur légal, soit un tuteur. » (article 33 alinéa 1er)
Cependant, par dérogation aux dispositions prévues aux articles 32 et 33 et dans les autres cas prévus
par la loi, le mineur peut accomplir, seul, tous les actes conservatoires sur son patrimoine. Ainsi en
dispose l’article 34 de la loi relative à la minorité.
En matière commerciale, seul le mineur émancipé est capable de faire le commerce; c'est ce que traduit
l'article 7 alinéa 1 de l'acte uniforme lorsqu'il dispose que " Le mineur, sauf s'il est émancipé, ne peut
avoir la qualité de commerçant ni effectuer des actes de commerce".
Non émancipé, le mineur ne peut absolument faire le commerce. Ses représentants légaux ne peuvent
le faire en son nom; tous les actes de commerce qui pourraient être accomplis par lui-même ou en son
nom sont nuls de nullité relative. Les personnes capables de s’engager ne peuvent opposer l’incapacité
du mineur avec qui elles ont contracté. »25
Compte tenu de cette situation, le mineur non émancipé ne peut être associé dans une société en nom
collectif puisque tous les associés ont la qualité de commerçant.
25
Article 38 de la loi n°2019-572 du 26 juin 2019 relative à la minorité. Pour une application jurisprudentielle :
Cour suprême de Côte d’Ivoire, 4 mars 2010, in répertoire annuel de la jurisprudence OHADA 2012, page 44.
43
De même, si un mineur non émancipé reçoit un fonds de commerce par succession, il ne peut l'exploiter
lui-même; le fonds devra être soit vendu, soit mis en location-gérance.
En ce qui concerne les mineurs émancipés, peut-on, par une analyse a contrario de l'article 7 alinéa 1
précité, soutenir que la seule émancipation leur confère la capacité commerciale?
En droit ivoirien, il faut répondre à cette interrogation par la négative; ce par application de l'article 3
alinéa 3 du code civil aux termes duquel: "les lois concernant l'état et la capacité régissent les ivoiriens,
même résidant en pays étranger".
La capacité est donc souverainement déterminée par la Côte d'Ivoire; et en matière de capacité
commerciale il faut avoir recours aux articles 119 et 125 de la loi n°2019-572 du 26 juin 2019 relative à
la minorité.
Aux termes des dispositions de l’article 119, « L’émancipation est l’état du mineur qui est affranchi de
l’autorité parentale ou de la tutelle. Il devient capable d’accomplir tous les actes de la vie civile, et de
faire le commerce sous les réserves ci-après. »
Il en résulte que l’émancipation du mineur est soumise à certaines réserves quand il s’agit de faire le
commerce. Ces réserves sont prescrites par l’article 125 de la loi sur la minorité qui dispose que : "le
mineur émancipé peut faire le commerce s'il y a été autorisé par celui de ses père ou mère, ou par celui
qui exerce l’autorité parentale, ou par le conseil de famille.
L’autorisation de faire le commerce est donnée soit dans la décision d'émancipation, soit dans un acte
postérieur pris dans les mêmes formes. Elle doit être inscrite au registre du commerce et du crédit
mobilier. »
De ce qui précède, on doit dire qu'en plus de l’acte d'émancipation, il faut, pour qu'un mineur ait la
capacité commerciale:
Il convient de préciser que désormais c’est à l’âge de 16 ans qu’un mineur peut être émancipé
par ses père et mère ou ses parents adoptifs,
Le mineur émancipé et habilité est réputé majeur pour tous les besoins de son commerce.
Les interdits sont assimilés aux mineurs pour leur personne et pour leurs biens. Ils sont donc incapables
de faire le commerce; leurs représentants ne peuvent le faire en leur nom; les actes de commerce qu'ils
pourraient accomplir ou qu'on pourrait accomplir en leur nom sont nuls, de nullité relative.
A- Les incompatibilités
L'exercice de certaines professions a été déclaré incompatible avec l'exercice du commerce; en effet,
on estime que l'esprit de spéculation du commerce risque de nuire à la dignité de ces professions.
44
Ainsi par application de l'article 9 de l'acte uniforme, ne peuvent être commerçants, les fonctionnaires
et les personnels des collectivités publiques et des entreprises à participation financière publique qui
doivent avoir le souci de l'intérêt général.
Il en est de même des officiers ministériels et des auxiliaires de justice que sont les avocats, les
huissiers, les commissaires-priseurs (fusion de cette profession avec celle d’huissier de justice pour
donner la profession de commissaire de justice), les notaires, les greffiers, les administrateurs et
liquidateurs judiciaires.
Dans cette catégorie, l'acte uniforme cite les agents de change. Et pourtant ils ne sont ni fonctionnaires,
ni officiers ministériels, ni auxiliaires de justice; en plus de cela, ils sont chargés de réaliser les
opérations de change qui sont des opérations commerciales. On ne peut donc soutenir valablement
que leur activité est incompatible avec l'exercice du commerce.
De même, ne peuvent être commerçants les experts comptables agréés et les comptables agréés, les
commissaires aux comptes et aux apports, les conseils juridiques, les courtiers maritimes.
De façon générale, il s'agit de toutes les professions organisées qui interdisent le commerce; ex. Des
médecins, des architectes etc.. En tout état de cause, il n’y a pas d’incompatibilité sans texte et il
appartient à celui qui invoque une incompatibilité d’en apporter la preuve.
Cependant celui qui exerce une activité commerciale malgré l'incompatibilité acquiert la qualité de
commerçant et doit en assumer toutes les conséquences. Il peut aussi encourir des sanctions
disciplinaires comme la révocation, la destitution ou la radiation.
Les actes accomplis par une personne en situation d'incompatibilité restent cependant valables à l'égard
des tiers de bonne foi.
Ceux-ci peuvent, si bon leur semble, se prévaloir de ces actes; mais la personne en situation
d'incompatibilité ne peut s'en prévaloir. Exemple d’un vote à la chambre de commerce ; celui qui, de
bonne foi, est élu avec les voix de personnes en situation d’incompatibilité ne peut être déchu. Le tiers
doit donc être de bonne foi; a contrario, s’il est de mauvaise foi, il ne pourrait se prévaloir de cet acte.
Ainsi, sont frappées de déchéance les personnes condamnées à une peine privative de liberté pour un
crime de droit commun, ou à une peine d'au moins 3 mois d'emprisonnement non assortie de sursis
pour un délit contre les biens ou une infraction en matière économique ou financière.
Quant à l'interdiction, elle peut être prononcée par un tribunal de façon générale et définitive ou
temporaire; comme peine principale ou comme peine complémentaire.
Elle peut aussi être prononcée par une juridiction professionnelle; dans ce cas, elle ne s'applique qu'à
une activité commerciale considérée.
45
La déchéance et l'interdiction s'opposent à l'exercice de toute activité commerciale. Le déchu ou l'interdit
ne peut faire le commerce pour lui-même, ni par personne interposée, ni pour le compte d'autrui comme
mandataire; par exemple, il lui est interdit d'exercer les fonctions de gérant, d'administrateur ou de
directeur d'une société commerciale; il ne peut pas être commissaire aux comptes.
L'interdiction à titre temporaire d’une durée de plus de 5 ans et l’interdiction à titre définitif peuvent être
levées par la juridiction qui les a prononcées; mais la requête n'est recevable qu’après l’expiration d’un
délai de 5 ans à compter du jour où la décision prononçant l'interdiction est devenue définitive.
L'interdit qui continue d'exercer le commerce est un commerçant et devra en assumer toutes les
conséquences sans préjudice des poursuites pénales.
Les actes accomplis par un interdit sont inopposables aux tiers de bonne foi; ils sont toutefois
opposables à l'interdit.
Certaines de ces obligations sont d'ordre fiscal, d'autres d'ordre social. Mais les obligations qui
concernent l'activité privée des commerçants sont au nombre de 3:
- La loyale concurrence.
I- L'obligation d'immatriculation
L'immatriculation se fait au registre du commerce et du crédit mobilier.
Ce registre est réglementé par les articles 34 et suivants de l'acte uniforme portant sur le droit
commercial général.
Il s'agit d'un registre tenu, en ce qui concerne la Côte d’Ivoire et en l’état, au greffe du Tribunal de
commerce d’Abidjan pour les commerçants situés dans le ressort de compétence territoriale de ladite
juridiction et du tribunal de première instance et des sections détachées pour les juridictions hors du
ressort de compétence territoriale du Tribunal de commerce, destiné à recevoir les demandes
d’immatriculation des commerçants et des entreprises commerciales, les déclarations d’activité des
entreprenants établis dans le ressort du tribunal, les inscriptions modificatives, les demandes de
radiation et à mettre à la disposition de ceux qui en font la demande, les informations sur l'état, la
capacité des assujettis mais aussi l'objet des entreprises.
Les affaires étant basées sur le crédit, il est important que ceux qui veulent accorder leur confiance aux
commerçants et aux entrepreneurs puissent le faire à partir d'informations fiables. Le RCCM permet en
effet de satisfaire aux exigences de sécurité, de célérité, de transparence et de loyauté nécessaires au
développement des activités économiques.
46
Au niveau des juridictions, il y a le registre du commerce et du crédit mobilier. Au plan national il y un
fichier national, au plan international il y a le fichier régional. Il convient de noter que le RCCM et le
Fichier National peuvent être tenus et exploités soit sur support papier, soit sous forme électronique.
Le Fichier régional, lui, est tenu et exploité soit sur support papier, soit sous forme électronique.
Les formalités accomplies auprès des RCCM au moyen de documents électroniques et de transmission
électroniques ont les mêmes effets juridiques que celles accomplies avec des documents sur support
papier, notamment en ce qui concerne leur validité et leur force probatoire.
Un comité technique de normalisation des procédures électroniques institué au sein de l’OHADA est
chargé de la normalisation des procédures effectuées au moyen de documents et de transmissions
électroniques.
a- L'immatriculation
- Tout commerçant doit, dans le premier mois d'exploitation de son commerce, requérir du greffier du
tribunal dans le ressort duquel son fonds est exploité son immatriculation au registre du commerce
et du crédit mobilier.
- En ce qui concerne les sociétés, l'immatriculation doit être requise dans le mois de leur constitution
par les gérants ou administrateurs, dans le registre du commerce et du crédit mobilier du lieu du siège
social ou de leur principal établissement.
- En ce qui concerne les succursales ou les établissements, leur immatriculation doit être requise
dans le mois de leur ouverture si les commerçants ou les sociétés qui les ouvrent ne sont pas
immatriculés en Côte d'Ivoire.
En cas d'immatriculation en Côte d'Ivoire, la personne physique ou morale commerçante qui exploite
des établissements commerciaux secondaires ou des succursales doit souscrire, dans le délai d'un
mois à compter du début de l'exploitation, une déclaration d’immatriculation secondaire au registre du
commerce et du crédit mobilier du lieu d'exploitation. Cette déclaration doit mentionner la référence à
l’immatriculation principale.
Les mentions modificatives ou rectificatives doivent faire l’objet d’une demande de rectification ou de
modification au RCCM dans les 30 jours de cette modification.
L’immatriculation a un caractère personnel. Nul ne peut être immatriculé à titre principal à plusieurs
registres ou à un même registre sous plusieurs numéros.
A Abidjan, en principe, les immatriculations devraient se faire au Tribunal de commerce. Mais
désormais, c’est auprès du Centre de Promotion des Investissements en Côte d’Ivoire, dit
CEPICI, que ces formalités ont lieu, tandis qu’à l’intérieur du pays, c’est auprès des greffes des
juridictions du lieu où l’activité est exercée.
Fondement légal :
Article 36 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général : « Le registre du commerce
et du crédit mobilier est tenu par le greffe de la juridiction compétente ou l’organe compétent
dans l’Etat partie sous la surveillance du Président de ladite juridiction ou du juge délégué par
lui à cet effet ou de l’autorité compétente dans l’Etat partie. »
47
Décret n°2018-647 du 1er août 2018 fixant les modalités d’application de l’ordonnance n°2018-
646 du 1er août 2018 portant code des investissements (J.O numéro 12 du 11 février 2019) en son
article 2 : « L’agence chargée de la promotion des investissements est l’interlocuteur unique
des investisseurs étrangers et nationaux porteurs de projets qui souhaitent réaliser leurs
investissements en Côte d’Ivoire. A cet égard, tous les investisseurs privés sont orientés vers
son guichet unique. »
Le dépôt des actes et pièces ainsi que les informations prescrites par la loi ;
On parle de crédit mobilier parce que le registre du commerce a également pour objet de recevoir :
Les demandes d’inscription des sûretés prévues par l’acte uniforme portant organisation des sûretés ;
- sa nationalité;
- le cas échéant, le nom sous lequel elle exerce son activité, ainsi que l'enseigne utilisée;
- le cas échéant, la date et le lieu de mariage, le régime matrimonial adopté, les clauses opposables
aux tiers restrictives de la libre disposition des biens des époux ou l'absence de telles clauses, les
demandes en séparations de biens;
- les noms, prénoms, date et lieu de naissance, domicile et nationalité des personnes ayant le pouvoir
général d'engager par leur signature la responsabilité de l'assujetti;
48
- L’adresse du principal établissement et, le cas échéant celle de chacune des succursales et de chacun
des établissements exploités sur le territoire de l’Etat partie ;
Le cas échéant, la nature et l’adresse des derniers établissements qu’il a exploités précédemment avec
l’indication de leur numéro d’immatriculation au RCCM ;
- la date du commencement, par l’assujetti, de son activité et le cas échéant de celle des autres
succursales et établissements;
Pour les sociétés commerciales (article 46),, la demande doit mentionner notamment:
- le cas échéant, le montant du capital social avec l'indication du montant des apports en numéraire et
l'évaluation des apports en nature;
- l'adresse du siège social et le cas échéant celle du principal établissement et de chacun des autres
établissements;
- la durée de la société ou de la personne morale telle que fixée par ses statuts ou le texte fondateur ;
- les noms, prénoms et domicile personnel des associés tenus indéfiniment et personnellement des
dettes sociales avec mention de leur date de naissance, de leur nationalité, le cas échéant, de la date
et du lieu de leur mariage, du régime matrimonial adopté et des clauses opposables aux tiers restrictives
de la libre disposition des biens des époux ou l'absence de telles clauses ainsi que les demandes en
séparations de biens
- les noms, prénoms, date et lieu de naissance, domicile des gérants, dirigeants, administrateurs ou
associés ayant le pouvoir général d’engager la personne morale ou le groupement ;
- les noms, prénoms, date et lieu de naissance, domicile des commissaires aux comptes lorsque leur
désignation est prévue par l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du GIE ;
A la demande d'immatriculation doivent, à peine de rejet, être jointes les pièces justificatives de toutes
les déclarations faites.
Cette obligation renforce le rôle assigné au registre du commerce qui n'est plus, comme par le passé,
un simple registre de renseignements.
Avec le souci de l'intégration sous régionale, il importe que les informations contenues dans le registre
du commerce et du crédit mobilier soient fiables afin que les opérateurs économiques n'aient pas à
traiter avec des personnes déchues du droit d'exercer un commerce dans leur pays.
49
Le greffier reçoit les demandes. Sauf le cas d’utilisation de moyens électroniques, toutes les
déclarations sont établies sur un formulaire fourni par le greffe; ce formulaire est revêtu de la signature
du déclarant ou de son mandataire muni d’une procuration signée du demandeur lorsque le mandataire
n’est pas un avocat, un notaire, un huissier, un professionnel agréé, un syndic.
Pour ce faire, il y a un registre d'arrivée mentionnant dans l'ordre chronologique du dépôt, la date et le
numéro de chaque déclaration, demande ou dépôt d’actes ou de pièces reçus par le greffe. Le répertoire
mentionne également et suivant le cas les noms, prénoms, raison sociale, dénomination sociale, nom
commercial ou appellation du déclarant ou du demandeur ainsi que l’objet de la déclaration ou de la
demande ou du dépôt des actes ou des pièces.
Le greffier s'assure, sous sa responsabilité, que les demandes sont complètes et vérifie la conformité
de leurs énonciations aux pièces justificatives produites (article 66).
Dès réception du formulaire de demande dûment rempli et des pièces justificatives, le greffier délivre
au demandeur un accusé d’enregistrement qui mentionne la date de la formalité accomplie et le numéro
d’immatriculation. Il dispose d’un délai de trois mois pour contrôler la régularité et la conformité des
mentions du formulaire et des pièces produites et le cas échéant notifier à la partie intéressée le retrait
de son immatriculation et procéder à sa radiation (article 50). Cette décision motivée est notifiée à la
partie intéressée. Elle est susceptible de recours dans un délai de 15 jours à compter de sa notification
devant la juridiction compétente statuant à bref délai. La décision de la juridiction ayant statué est
susceptible de recours dans un délai de 15 jours à compter de la date de son prononcé devant la
juridiction de recours compétente statuant à bref délai.
S'il constate des mentions inexactes, s'il rencontre des difficultés dans l'accomplissement de sa mission,
il peut convoquer le demandeur ou le déclarant pour recueillir toutes explications et pièces
complémentaires. S’il refuse de recevoir une déclaration ou une demande ou de faire droit à une
demande de pièces ou d’information, il doit motiver sa décision et la notifier à l’intéressé. Cette décision
est susceptible de recours dans un délai de 15 jours à compter de sa notification devant la juridiction
compétente statuant à bref délai. La décision de la juridiction ayant statué est susceptible de recours
dans un délai de 15 jours à compter de la date de son prononcé devant la juridiction de recours
compétente statuant à bref délai
Le greffier conserve le formulaire dûment rempli. Une copie de ce formulaire avec le dossier individuel
constitué des pièces certifiées conformes est adressée dans un délai d’un mois au Fichier National qui
se chargera de transmettre, dans le même délai, une copie dudit formulaire et d’un extrait du dossier
au Fichier Régional.
- les personnes physiques dans le délai d’un mois à compter de la cessation de leur activité. Cette
formalité devra également être accomplie pour les succursales et pour les établissements. En cas de
décès, la demande de radiation doit être faite par les ayants-droit dans le délai de trois mois à compter
du décès s’ils ne veulent pas poursuivre l’activité. S’ils veulent la poursuivre, ils doivent, dans le même
délai, demander la modification de l’inscription au RCCM.
50
Si la demande de radiation n'est pas faite par l'intéressé ou ses ayants-droit dans le délai prescrit par
l'article 55 de l'acte uniforme (1 mois par l'intéressé et 3 mois par les ayants-droit) le greffier doit saisir
le juge pour obtenir l'autorisation de procéder à cette radiation. Cette radiation emporte la perte des
droits résultant de l’immatriculation
- Pour la personne morale, en cas de dissolution pour quelque cause que ce soit, il faut que la
déclaration en soit faite dans le délai d’un mois au RCCM auprès duquel elle est immatriculée. Il en va
de même en cas de nullité de la société à compter de la décision qui l’a prononcée.
Dans le délai d’un mois à compter de la clôture des opérations de liquidation la radiation doit être
demandée par le liquidateur.
2- Le fichier national.
Le Fichier National est organisé par chaque Etat partie au traité OHADA. Il est tenu sous la surveillance
du ministre de la justice et sert à l’information du public. Toute demande d’information doit recevoir une
réponse immédiate ou dans un délai de quarante-huit (48) heures à compter de la réception de la
demande. La demande peut être formulée par voie électronique ainsi que la réponse.
Ce fichier a pour objet de centraliser les renseignements et informations consignés dans chaque registre
du commerce et du crédit mobilier. Il permet d'éviter qu'un commerçant ne se fasse immatriculer dans
une autre ville alors qu'il est sous le coup d'une déchéance ou d'une interdiction ayant entraîné sa
radiation d'un précédent registre. Il est ainsi satisfait aux exigences de sécurité, de célérité, de
transparence et de loyauté nécessaires au développement des activités économiques.
3- Le fichier régional
C'est l'innovation majeure dans l'organisation du registre de commerce et du crédit mobilier.
Tenu auprès de la cour commune de justice et d'arbitrage qui se trouve à Abidjan (Côte d'Ivoire), ce
fichier a pour objet de centraliser les renseignements et informations consignés dans chaque fichier
national.
Ce fichier est, donc, au plan international ce qu'est le fichier national au plan interne. Ainsi les
informations contenues dans les formulaires transmis sont destinées à l’information du public. Toute
demande d’information formulée au fichier régional doit recevoir une réponse immédiate ou dans un
délai de quarante-huit (48) heures à compter de la réception de la demande.
Puisque l'un des objectifs majeurs du traité OHADA est de parvenir à l'intégration des économies
africaines, il va permettre d'éviter qu'un commerçant ne se fasse immatriculer dans un Etat partie au
traité alors qu'il est sous le coup d'une interdiction ou d'une déchéance dans un autre Etat. Il permettra
ainsi de satisfaire aux exigences de sécurité, de célérité, de transparence et de loyauté nécessaires au
développement des activités économiques
51
uniforme, de l’Acte uniforme relatif au droit des sociétés et du GIE ou d’une disposition légale
particulière."
Le registre de commerce n'est donc plus un registre administratif de renseignements; il fait présumer,
par principe, la qualité de commerçant; l'acte uniforme se range ainsi dans le giron de la conception
française du registre de commerce.
Mais du fait de l'immatriculation, le commerçant bénéficie de tous les avantages liés à la profession de
commerçant. De même il en assume toutes les obligations.
Pour éviter les ambiguïtés et faciliter l'application de la présomption, l’Acte uniforme fait obligation à
toute personne physique ou morale immatriculée d'indiquer sur ses factures, bons de commande, tarifs
et documents commerciaux, ainsi que sur toute correspondance, son numéro et son lieu
d'immatriculation.
Il faut répondre à cette interrogation par la négative d’autant que le registre du commerce n'est plus un
simple registre administratif de renseignements.
Et c'est bien ce que traduit l'article 61 de l'acte uniforme relatif au droit commercial général; en effet les
faits et actes sujets à mention ne sont opposables aux tiers et aux administrations que s'ils ont été
publiés au registre du commerce et du crédit mobilier.
Toutefois ce sont seulement les tiers de bonne foi qui peuvent invoquer cette inopposabilité; en effet
celle-ci ne peut valablement être invoquée si l’assujetti établi qu'au moment où il a traité le tiers avait
connaissance du fait ou de l'acte.
En ce qui concerne les tiers et les administrations, même si les actes et les faits n'ont pas été publiés,
ils peuvent s'en prévaloir dans leur rapport avec le commerçant.
Quelles sont les sanctions auxquelles s'expose l’assujetti qui ne requiert pas son immatriculation.
C- Sanctions de l'immatriculation
Compte tenu des effets de l'immatriculation, celui qui n'est pas immatriculé dans le délai prescrit, ne
peut se prévaloir, jusqu'à son immatriculation, de la qualité de commerçant. Par exemple dans un
procès, il ne pourra pas faire usage de ses livres de commerce comme moyen de preuve; il ne pourra
donner son fonds en location-gérance etc... La personne morale qui n’aura pas procédé à son
immatriculation ne pourra se prévaloir de la personnalité juridique jusqu’à son immatriculation.
Toutefois, l’assujetti ne peut se prévaloir du défaut d'immatriculation pour se soustraire aux obligations
inhérentes à la qualité de commerçant. On pourra lui opposer les preuves du droit commercial par ex.
Par ailleurs, aux termes des dispositions de l'article 69 de l'acte uniforme relatif au droit commercial
général, « Toute personne tenue d'accomplir une des formalités prescrites au présent Acte uniforme, et
qui s'en est abstenue, ou encore qui a effectué une formalité par fraude, est punie des peines prévues
par la loi pénale nationale, ou le cas échéant par la loi pénale spéciale prise par l'Etat Partie en
application du présent Acte uniforme.
S’il y a lieu, la juridiction qui prononce la condamnation ordonne la rectification des mentions et
transcriptions inexactes »
52
Aux termes des dispositions de l’article 2 de la loi n°2017-727 du 9 novembre 2017 portant répression
des infractions prévues par les actes uniformes du Traité OHADA (JORCI n°100 du 14 décembre 2017),
« est punie d’un emprisonnement de trois mois à trois ans et d’une amende de 100 000 à 1 000 000 de
francs ou de l’une de ces deux peines seulement, toute personne tenue d’accomplir une des formalités
prescrites par l’Acte uniforme portant droit commercial général et qui s’en abstient, ou encore qui
effectue une formalité par fraude.
La juridiction qui prononce la condamnation peut ordonner, s’il y a lieu, la rectification des mentions et
transcriptions inexactes. »
D'abord ces livres permettent aux commerçants de connaître l'état de leur caisse et de se souvenir des
opérations réalisées.
Ensuite les mentions servent de preuve des opérations commerciales; elles permettent de s'assurer
que ces opérations ont été régulières et sérieuses notamment en cas de liquidation des biens.
Enfin, puisque les impôts prennent en compte le chiffre d'affaires et les bénéfices réalisés, les livres de
commerce constituent un moyen de contrôle efficace.
- Le livre journal enregistre jour par jour les opérations de l'entreprise; notamment les paiements
effectués ou reçus, les achats, les ventes, les effets de commerce tirés etc... A défaut de tenir ce
livre au jour le jour, on peut récapituler au moins une fois par mois les totaux des opérations; mais
dans ce cas, il est fait obligation de conserver tous les documents permettant de vérifier les
opérations jour par jour.
A ce sujet, l’Acte uniforme relatif à l’organisation et à l’harmonisation des comptabilités des entreprises
dispose en son article 17-4 alinéas 3 et 4 "les mouvements sont récapitulés par période préalablement
déterminée qui ne peut excéder 1 mois.
Une procédure destinée à garantir le caractère définitif de l'enregistrement de ces mouvements devra
être mise en œuvre".
- Le livre d'inventaire: chaque année, le commerçant doit faire l'inventaire de son entreprise; cela
consiste en un recensement des éléments actif et passif en vue de l'établissement d'un tableau
descriptif et estimatif.
53
L'inventaire permet d'arrêter tous les comptes en vue de l'établissement du bilan et du compte de
résultat.
Une fois le bilan et le compte de résultat établis, ils doivent être transcrits sur le livre d'inventaire de
même que le résumé de l’opération d’inventaire.
L'inventaire permet d'établir un document utile à la fois au commerçant qui se rend compte de sa
situation et aux créanciers qui, en cas de liquidation des biens, pourront retrouver les éléments de l'actif
et les sources du passif.
- Le grand livre: il est constitué par l’ensemble des comptes de l’entreprise, où sont reportés ou
inscrits simultanément au journal, compte par compte, les différents mouvements de l’exercice.
- A la clôture de l’exercice, il y a un état récapitulatif qui fait apparaître pour chaque compte le solde
débiteur ou créditeur. Cet état fait aussi apparaître le cumul depuis l’ouverture de l’exercice des
mouvements débiteur et créditeurs, ainsi que le solde créditeur ou débiteur à la date considérée.
Cet état, c’est la balance générale des comptes qui est un support dont la tenue est obligatoire.
Mais pour l'activité privée du commerçant, à côté des livres obligatoires, il y a des livres facultatifs que
sont:
- Le livre des effets: il enregistre les effets de commerce à payer ou à recevoir avec leur échéance;
- Le livre brouillard ou main courante: il enregistre séance tenante toutes les opérations; lesquelles
seront inscrites, par la suite, et avec plus de soin dans le grand livre;
Les livres doivent être tenus chronologiquement sans blanc ni altération d'aucune sorte. Ils ne doivent
pas être raturés ni surchargés même en cas d'erreur.
Pour corriger une écriture passée à tort, on passe une écriture en sens inverse; c’est-à-dire en négatif
des éléments erronés. Cette opération est qualifiée de contre-passation d'écriture; cette règle a pour
but d'éviter les fraudes et les manipulations dans les écritures.
A ce sujet, l'acte uniforme relatif au droit comptable dispose en son article 22 alinéa 1 que "lorsqu'elle
repose sur un traitement informatique, l'organisation comptable doit recourir à des procédures qui
permettent de satisfaire aux exigences de régularité et de sécurité requises en la matière..." de sorte à
éviter les fraudes et les manipulations.
54
Les livres comptables, les documents ayant permis la récapitulation des opérations, les
correspondances reçues et les copies des lettres envoyées doivent être classées et conservées
pendant 10 ans (article 24 de l’acte uniforme relatif au droit comptable).
Le juge pourra seulement les retenir à titre de présomption en raison de la liberté de preuve en matière
commerciale. Mais si, en face, un autre commerçant a des livres régulièrement tenus, ceux-ci seront
préférés par rapport aux livres mal tenus.
Les livres irrégulièrement tenus peuvent, néanmoins, être invoqués par les tiers pour faire preuve contre
le commerçant.
Au plan pénal, aux termes des dispositions de l'article 4 de la loi N°64-292 relative aux obligations des
commerçants, est passible d’une peine d’emprisonnement de 1 à 6 mois et d'une amende de 50.000F
à 1.000.000F tout commerçant dont les livres et leurs annexes sont incomplets, irrégulièrement tenus
ou ne représentent pas sa situation active ou passive véritable.
Le commerçant est passible des mêmes peines s'il refuse de présenter ses livres de commerce alors
qu'il en a été régulièrement requis.
En cas de falsification des livres, les peines applicables sont celles du faux en écriture privée de
commerce prévues par les articles 479 et suivants du code pénal (loi n°2019-574 du 26 juin 2019 portant
code pénal - JO numéro spécial du 10 juillet 2019) à savoir 1 à 5 ans d'emprisonnement et une amende
de 300.000F à 3.000.000F.
Dans sa rédaction ancienne, il était prescrit que les livres de commerce pouvaient être admis par le juge
pour constituer une preuve entre commerçants. Le TGI de Ouagadougou avait appliqué cette règle dans
deux jugements en date des 4 mai 2005 et 9 avril 2008 ; in répertoire quinquennal OHADA 2006-2010
T. 2 pages 12 et 13 :
Dans le premier jugement, il décide ce qui suit : « La preuve en matière commerciale se fait par tous
moyens, et notamment par les livres comptables qui peuvent servir de moyens de preuve entre
commerçants pour faits de commerce. Le débiteur qui ne peut pas présenter ses livres comptables ne
saurait valablement denier les allégations de son contradicteur. »
Dans le second jugement, le Tribunal décide que : « En matière commerciale, les livres de commerce,
notamment le journal et le livre d’inventaire régulièrement tenus par le commerçant peuvent servir de
preuve entre commerçants. Il n’est nullement besoin que le document justifiant la créance soit
bilatéral… »
55
Mais une décision du juge ivoirien avait laissé perplexe. En effet un juge avait décidé ce qui suit :
« Attendu que le seul mode de preuve auquel recourt la société C. est son grand livre ; qu’à cet
égard, il y a lieu d’observer que l’article 15 de l’acte uniforme portant droit commercial général
tel que libellé donne la latitude au juge dans le cas d’espèce qui lui est soumis d’apprécier la
forme probante des livres de commerce.
Attendu qu’en l’espèce, la créance alléguée tirerait sa source dans les livraisons de bois ; que
ces opérations sont d’ordinaire matérialisée par des bons de commande et des bons de
livraison, lesquels cristallisent les liens d’obligation ainsi nées entre les parties ; que la
production du grand livre ne peut, en l’espèce, suppléer à leur absence, qu’il échet, la créance
n’étant pas certaine, de débouter la société C. de sa demande… »26
En l’espèce, sans se prononcer sur la valeur probante des mentions du grand livre, le juge a substitué
à celui-ci la preuve par les bons de commande et les bons de livraison.
Fort heureusement, désormais, il ne s’agit plus d’une faculté mais d’une disposition impérative.
En tout état de cause, en matière de valeur probante, Il faut distinguer suivant que la preuve est faite
contre le commerçant ou à son profit.
Mais par application des dispositions de l'article 1330 du code civil celui qui compte utiliser le livre contre
le commerçant ne peut retenir uniquement les mentions qui lui sont favorables. Il devra subir les
conséquences des mentions contraires à ses intérêts car les mentions du livre de commerce sont
indivisibles.
Il convient toutefois de relever qu’en raison de la liberté de la preuve en matière commerciale, le juge
ne donne pas toujours une force absolue aux mentions du livre de commerce. Ainsi la preuve contraire
peut être rapportée.
Même face à un non commerçant, l'usage des livres de commerce est désormais admis dès lors qu’aux
termes des dispositions de l’article 5 alinéa 2 du nouvel Acte uniforme « tout commencement de preuve
par écrit autorise le commerçant à prouver par tous moyens contre un non-commerçant.
L'article 5, dernier alinéa de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général indique que la
représentation des livres est faite « … à l'effet d'en extraire ce qui concerne le litige. » Ce qui signifie
que le commerçant ne représente que la partie des livres qui intéresse le litige ceci afin de sauvegarder
le secret des affaires.
26
TPI, jugement commercial n°599 du 17 avril 2002 (inédit)
56
Tous les ans, le commerçant doit établir ses états financiers de synthèse. Ces états comprennent le
bilan, le compte de résultat, le tableau financier des ressources et des emplois ainsi que l’état annexé.
Le bilan décrit séparément les éléments d’actif et les éléments de passif constituant le patrimoine de
l’entreprise. Il fait apparaître de façon distincte les capitaux propres.
Le compte de résultat récapitule les produits et les charges qui font apparaître, par différence, le
bénéfice net ou la perte nette de l’exercice.
Le tableau financier des ressources et des emplois retrace les flux de ressources et les flux d’emplois
de l’exercice.
L’état annexé complète et précise l’information donnée par les autres états financiers annuels.
Ces états financiers forment un tout indissociable et décrivent de façon régulière et sincère les
événements, opérations et situations de l’exercice pour donner une image fidèle du patrimoine, de la
situation financière et du résultat de l’entreprise.
Il est, en effet, sain que les commerçants se fassent concurrence pour s'attirer de la clientèle car cela
permet au marché d'accueillir de meilleurs produits à des prix compétitifs.
Toutefois la concurrence doit être loyale; faute de quoi des sanctions pourraient être prises à l'encontre
de l'auteur de la concurrence déloyale.
L’article 1er de cet accord dispose que « constitue un acte de concurrence déloyale tout acte ou pratique
qui, dans l’exercice d’activités industrielles ou commerciales, est contraire aux usages honnêtes. »
- D’une confusion avec l’entreprise d’autrui ou avec ses activités. Il s’agit, dans ce cas, de tout acte ou
pratique qui crée ou est de nature à créer une confusion avec l’entreprise d’autrui ou ses activités, en
particulier avec les produits ou services offerts par cette entreprise.
Que faire lorsque le concurrent a le même nom patronymique? On ne peut, certes, pas l'empêcher
d'utiliser son nom patronymique; mais il faut restreindre le droit qu'il a de porter son nom à raison de
l'antériorité d'emploi par un autre.
57
La jurisprudence décide, dans ce cas, que l'utilisation du nom doit être faite en prenant les mesures
utiles pour qu'il n'y ait pas de confusion possible; par ex. En faisant précéder ou suivre le nom d'un
prénom.
Sont protégés au même titre que le nom commercial, les titres de journaux ou de films.
Il en va de même d'une atteinte à l'enseigne. L'enseigne est une dénomination ou un emblème qui sert
à singulariser l'établissement; elle doit donc être spécifique et non générique; ex. : "chez Koudou" et
non "alimentation générale".
Cette condition remplie, l’antériorité d'emploi assure au commerçant le droit d'empêcher un autre
commerçant de se servir de la même enseigne pour un commerce semblable.
Suivant la nature de l'activité et sa notoriété, la protection peut s'étendre à une ville, à une région ou à
toute la Côte d'Ivoire; ex. Librairie de France: la protection pourrait s'étendre à toute la Côte d'Ivoire.
Mais il n'y a concurrence déloyale que si l'utilisation de l'enseigne crée une confusion entre deux
établissements du même genre s'adressant à la même catégorie de clients.
Si tel n’est pas le cas, notamment lorsqu’il y a usurpation d’une notoriété ou d’une technique par un non
concurrent, on peut considérer, en dehors de l’action en contrefaçon, qu’il y a agissement parasitaire.
L'action en concurrence déloyale tendant à la protection de l'enseigne est accordée sans qu'il soit
nécessaire de démontrer l'existence d'un préjudice déjà subi. Il suffit d'établir l'usurpation de l'enseigne
et le tribunal peut ordonner des mesures tendant à empêcher toute confusion dans l'avenir.
- D’une atteinte à l’image ou à la réputation d’autrui. Il s’agit, dans ce cas, de tout acte ou pratique qui
porte atteinte ou est de nature à porter atteinte à l’image ou à la réputation d’autrui, que cet acte ou
cette pratique crée ou non une confusion.
C'est le cas notamment lorsqu'un commerçant attaque un autre dans son honorabilité, sa compétence
ou sa solvabilité.
- Du dénigrement de l’entreprise d’autrui ou de ses activités. Il s’agit, dans ce cas, de toute allégation
fausse ou abusive qui discrédite ou est de nature à discréditer l’entreprise d’autrui ou ses activités, en
particulier des produits ou services offerts par cette entreprise.
- De la tromperie à l’égard du public. Il s’agit, dans ce cas, de tout acte ou pratique qui induit en erreur
au sujet d’une entreprise ou de ses activités, en particulier des produits ou services offerts par cette
entreprise.
Cette tromperie peut résulter d’une publicité mensongère sur l’origine ou l’aptitude d’un produit à un
emploi particulier.
C'est le cas notamment lorsqu'il y a incitation du personnel à la grève ou débauchage dudit personnel ;
De la suppression de la publicité ;
58
De la désorganisation générale du réseau de vente par la vente à perte, la vente par le procédé dit de
la boule de neige etc.
Contre la concurrence, de façon générale, le commerçant dispose de moyens d'action qu'il lui est loisible
de mettre en œuvre.
De même, il n'est pas exclu que les parties limitent conventionnellement la libre concurrence.
- un préjudice causé par cette faute qui consiste dans le détournement de la clientèle;
Toutefois, à l'analyse, on se rend compte que l'action en concurrence déloyale dépasse le cadre de la
responsabilité civile puisqu'elle est permise sans qu'il soit nécessaire de démontrer l'existence d'un
préjudice actuel.
Par ailleurs le tribunal peut, certes, accorder des dommages et intérêts mais les sanctions judiciaires
n'ont pas pour seul objet la réparation du préjudice; bien souvent ce sont des mesures préventives; par
ex. Le juge pourra ordonner à un commerçant de faire cesser la confusion en adjoignant un prénom à
son patronyme.
Un autre fondement a donc été proposé par la doctrine à l'action en concurrence déloyale: il s'agirait
plutôt d'une action qui protège la propriété du fonds de commerce c'est-à-dire le droit de conserver une
clientèle.
27
Cass. Com 30 janvier 1996 D. 1997 P.232 ; Cass. Com 18 avril 1958 D. 1959 P.87
59
A travers celle-ci, un employeur obtient ainsi d'un salarié qu'en cours ou à l'expiration de son contrat de
travail, il n'ouvrirait pas une entreprise concurrente ou alors n'offrirait pas ses services à une entreprise
concurrente.
Pour éviter les abus, dans l’hypothèse de rupture du contrat, la validité de ces clauses avait été soumise
à certaines conditions qui en restreignaient l'étendue. Il fallait une limitation dans le temps, dans l'espace
et dans la nature de l'activité.
Aujourd'hui, aucune clause de non concurrence ne peut, valablement, s’appliquer à l’expiration d’un
contrat de travail; en effet aux termes de l'article 16.5 de la loi N°2015-532 du 20 juillet 2015 portant
code du travail, "est nulle de plein droit toute clause d'un contrat portant interdiction pour le travailleur
d'exercer une activité quelconque à l'expiration du contrat".
Pour que cette clause soit valable, il faut qu'elle soit limitée soit dans le temps soit dans l'espace. Une
seule de ces limitations suffit pour rendre la clause valable.
Ainsi, un représentant de commerce peut recevoir d'un fabricant une exclusivité de représentation dans
un secteur déterminé.
Dans l'industrie de la brasserie, ce contrat est connu sous le nom de "contrat de bière"; dans ce cas, le
débitant de boisson s'engage à s'approvisionner exclusivement chez le brasseur.
Tous ces contrats d'exclusivité sont valables à condition qu'ils soient limités dans le temps ou dans
l'espace.
En sens inverse, un fabricant peut réserver à un client l'exclusivité de sa production; dans ce cas, pour
justifier le refus de vente aux autres commerçants, deux conditions doivent être remplies:
60
professionnel non commerçant. Aussi, pour rester conforme à la réalité pratique, s’agit-il, désormais, de
bail à usage professionnel.
Le bail à usage professionnel est réglementé par les articles 101 et suivants de l'Acte uniforme portant
sur le droit commercial. A quelles conditions se conclut-il et quelles sont les obligations qui en
découlent ?
Quels sont les immeubles qui entrent dans le champ d’application de l’Acte uniforme ?
Il s’agit des locaux ou immeubles à usage commercial, industriel, artisanal ou à tout autre usage
professionnel ;
Les locaux accessoires dépendant des locaux ou immeubles susvisés sont soumis au même régime.
Mais lorsque ces locaux accessoires appartiennent à des propriétaires différents, il faut que la location
ait été faite en vue de l'utilisation jointe que leur destinait le preneur et que cette destination ait été
connue du bailleur au moment de la conclusion du bail.
Les terrains nus sur lesquels ont été édifiés, avant ou après la conclusion du bail, des constructions à
usage industriel, commercial, artisanal ou à tout autre usage professionnel à condition que ces
constructions aient été élevées ou exploitées avec le consentement exprès du propriétaire ou portées
à sa connaissance et expressément agréées par lui.
Ces dispositions sont également applicables aux personnes morales de droit public à caractère
industriel ou commercial et aux sociétés à capitaux publics, qu'elles agissent en qualité de bailleur ou
de preneur.
En cours de contrat, des événements peuvent survenir qu’il convient d’identifier et résoudre les
problèmes qui peuvent y être liés
Le contrat de bail à usage professionnel peut être à durée déterminée, fixée librement par les parties,
ou à durée indéterminée. Mais lorsqu’il n’est pas écrit, il est à durée indéterminée. Il prend effet à
compter de sa signature sauf si les parties en décident autrement.
Le bail ne prend pas fin par la cessation des droits du bailleur sur les locaux donnés à bail. Dans un tel
cas, le nouveau bailleur est substitué de plein droit dans les obligations du bailleur et doit poursuivre
l’exécution du contrat de bail.
De même, le bail ne prend pas fin par le décès de l’une ou l’autre des parties. En cas de décès du
preneur, personne physique, le bail se poursuit avec les conjoints, ascendants ou descendants en ligne
directe, qui en ont fait la demande au bailleur par acte extra judiciaire ou notification par tout moyen
permettant d’établir la réception effective par le destinataire, dans un délai de trois mois à compter du
décès. Lorsqu’il y a plusieurs demandes, il appartient au juge statuant à bref délai, le juge des référés
61
donc, saisi par le bailleur, de désigner le successeur dans le bail. Faute de demande dans ce délai, le
bail est résilié de plein droit.
La dissolution de la personne morale preneuse n’entraîne pas, de plein droit, la résiliation du bail des
immeubles affectés à son activité. Le liquidateur est tenu d’exécuter les obligations du preneur dans les
conditions fixées par les parties. Le bail est résilié de plein droit après une mise en demeure adressée
au liquidateur, restée plus de 60 jours sans effet.
B) La cession et la sous-location
Sauf stipulation contraire du contrat, toute sous-location totale ou partielle est interdite. Au cas où la
sous-location est autorisée, il faut en aviser, à peine d’inopposabilité le bailleur par écrit.
Pour éviter les spéculations portant sur le prix des loyers, le bailleur a le droit de procéder à une
augmentation du prix du loyer lorsque le loyer de la sous-location est supérieur au loyer du bail principal.
A défaut d’accord entre les parties l’augmentation sera fixée par le juge des référés.
S’agissant d’un contrat synallagmatique, des obligations pèsent sur le bailleur et sur le preneur. Le
bailleur doit permettre une jouissance paisible des lieux au preneur qui devra, lui, payer les loyers et
faire les réparations d’entretien qui lui incombent.
A) Obligations du bailleur
Il doit délivrer un local fonctionnel et en bon état. Habituellement un état des lieux contradictoire est
établi à ce sujet. Mais si le bail est verbal, le local est présumé avoir été livré en bon état. Ni le bailleur,
ni ses ayant droits, ni ses préposés ne doivent troubler le preneur dans la jouissance des lieux.
Les grosses réparations nécessaires et urgentes sont à la charge du bailleur. Et le preneur en supporte
les inconvénients. Mais il peut obtenir la diminution du loyer en tenant compte du temps et de l’usage
pendant lequel il a été privé de la jouissance des locaux.
Si les réparations rendent impossible la jouissance des locaux, il peut demander la suspension ou même
la résiliation du bail.
Si le bailleur refuse de faire les grosses réparations, le preneur peut se faire autoriser par le juge des
référés à les faire. Le montant de ces réparations et les modalités du remboursement des frais exposés
sont fixés par le juge des référés.
B) Obligations du preneur
Le preneur doit payer les loyers aux époques et selon les modalités convenues par les parties. Le loyer
est librement fixé par les parties en accord avec la loi. Il est révisable dans les conditions prévues au
contrat ou à défaut lors de chaque renouvellement.
En cas de désaccord, le juge des référés fixe le nouveau montant en tenant compte :
- de la superficie,
- de l’état de vétusté,
62
Le preneur doit exploiter le local en bon père de famille suivant les termes du contrat de bail et veiller,
sous peine d’engager sa responsabilité, aux réparations d’entretien.
En cas d’adjonction d’activités connexes ou complémentaires, le preneur doit en aviser le bailleur qui
peut s’y opposer pour des motifs graves.
Quant à l’hypothèse de changement d’activité, il lui faut obtenir l’accord préalable et exprès du bailleur
qui peut s’y opposer pour des motifs sérieux : Tribunal de première Instance de Ngaoundéré,
ordonnance n°23/ord du 27 juillet 2012, in répertoire quinquennal OHADA 2013, page 41 : « En
matière de bail à usage professionnel, le locataire est tenu de respecter la destination du bail. Tout
changement d’activités entrepris par le locataire sans l’accord préalable et exprès du bailleur est un
motif de résiliation de son bail et légitime son expulsion de l’immeuble loué. »
Si, à l’expiration du bail, le preneur se maintient dans les lieux, il devra payer les loyers pour la période
sans préjudice de dommages et intérêts.
Compte tenu de l'importance du droit au bail, l'Acte uniforme a affirmé la propriété commerciale au profit
des commerçants, des industriels, des artisans et de tout professionnel, c'est-à-dire le droit qu'ils ont au
renouvellement de leurs baux arrivés à expiration; faute de quoi, ils ont droit à une indemnité d'éviction.
Peuvent prétendre au renouvellement de leurs baux arrivés à expiration, les locataires des immeubles
ou locaux à usage commercial, industriel, artisanal ou professionnel.
Les baux des locaux accessoires sont soumis au même régime. Le bénéfice de la propriété
commerciale a été étendu aux baux des terrains nus dans les conditions précédemment examinées.
Ces dispositions sont également applicables aux personnes morales de droit public à caractère
industriel ou commercial et aux sociétés à capitaux publics, qu'elles agissent en qualité de bailleur ou
de preneur.
En cas de renouvellement exprès ou tacite, la durée du nouveau bail est fixée à une durée minimale de
3 ans. En cas de renouvellement pour une durée indéterminée les parties doivent prévoir la durée du
préavis qui ne peut être inférieure à 6 mois.
Lorsque le bail a une durée de moins de 2 ans, les dispositions relatives aux baux à usage professionnel
ne sont pas applicables.
Lorsque le bail est à durée déterminée, le locataire qui veut obtenir le renouvellement de son contrat,
parce qu’il en a le droit, doit, sous peine de déchéance, en faire la demande par acte extrajudiciaire ou
notification par tout moyen permettant d’établir la réception effective par le destinataire, au plus tard 3
mois avant la date d'expiration du bail.
La CCJA avait décidé que « … la déchéance du droit au renouvellement du bail prévue par l’article
92 de l’acte uniforme… ne saurait entraîner automatiquement l’expulsion du preneur payant
63
régulièrement le loyer et respectant les clauses et conditions du bail, contrairement à ce que
semble croire le premier juge. »28.
Mais, un revirement est intervenu par l’arrêt n°005/2006 rendu par la 2e chambre de la CCJA. En effet
elle a décidé que le juge des référés a compétence pour constater la déchéance et prononcer l’expulsion
du preneur déchu : « … En concluant ¨qu’il s’agit en l’espèce d’un bail à durée déterminée, que
ce dernier étant arrivé à expiration, son renouvellement est régi par les dispositions d’ordre
public de l’article 92 de l’Acte uniforme ; que l’article 92 fait peser sur le preneur l’obligation de
demander le renouvellement du bail par acte extrajudiciaire au plus tard trois mois avant la date
d’expiration ; qu’il sanctionne par la déchéance de son droit au renouvellement du bail le preneur
qui a manqué à cette obligation ; que le juge des référés est compétent pour constater cette
déchéance et prononcer l’expulsion du preneur¨, pour confirmer l’ordonnance entreprise en
toutes ses dispositions, la Cour d’appel de Dakar n’a en rien violé les dispositions de l’article
101… »29
La CCJA décide, par ailleurs, que l’obligation qui incombe au bailleur de faire connaître sa réponse à la
demande de renouvellement du bail au plus tard un mois avant l’expiration dudit bail, faute de quoi il
serait réputé avoir accepté le principe du renouvellement de ce bail, ne peut produire effet que si le
preneur a formulé cette demande de renouvellement par acte extrajudiciaire au plus tard trois mois
avant la date d’expiration du bail30.
En cas de refus de renouvellement, le bailleur devra en assumer les conséquences.
Aux termes des dispositions de l'article 126 alinéa 1 de l'acte uniforme portant sur le droit commercial
général, "Le bailleur peut s'opposer au droit au renouvellement du bail à durée déterminée ou
indéterminée, en réglant au locataire une indemnité d'éviction". Mais pour pouvoir en bénéficier, il faut
avoir respecté, pour les contrats à durée déterminée, les dispositions de l’article 124 de l’acte
uniforme31, c’est-à-dire, sous peine de déchéance, en faire la demande par acte extrajudiciaire ou
notification par tout moyen permettant d’établir la réception effective par le destinataire, au plus tard 3
mois avant la date d'expiration du bail
Cette indemnité est égale au préjudice causé par le défaut de renouvellement; le taux de cette indemnité
d'éviction est égal à la valeur marchande du fonds déterminée suivant les usages de la profession. A
défaut d'accord sur le montant de cette indemnité, celle-ci sera fixée par le juge qui tiendra compte
notamment du montant du chiffre d'affaires, des investissements réalisés par le preneur, de la situation
géographique du local et des frais de déménagement imposés par le défaut de renouvellement.
28
CCJA arrêt n°014/2002 du 18 avril 2002, recueil de jurisprudence de la CCJA, janvier 2003, page 28
29
CCJA arrêt n°005/2006 du 30 mars 2006, recueil de jurisprudence de la CCJA, janvier-juin 2006, page 24. Voir, dans le même
sens : CCJA arrêt n°032 du 3 juillet 2008, recueil de jurisprudence de la CCJA, juillet décembre 2008, page 45.
30
CCJA arrêt n°030/2007 du 22 novembre 2007, recueil de jurisprudence de la CCJA, juillet-décembre 2007, page 44
31
CCJA arrêt n°032 du 3 juillet 2008 : « … La requérante qui n’a pas engagé en temps opportun la procédure du droit au
renouvellement du bail se trouve déchu du droit de réclamer une indemnité d’éviction. », recueil de jurisprudence de la CCJA,
juillet décembre 2008, page 45.
64
Cette indemnité d'éviction est également due par le propriétaire qui, après avoir vendu son fonds
exploité dans son immeuble, entend exercer son droit de reprise après avoir perçu intégralement le prix
du fonds.
Pour ne pas avoir à payer l'indemnité d'éviction, le bailleur doit avoir de justes motifs. Il en va ainsi:
- s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant : Inexécution par le locataire
d’une obligation substantielle du bail; ou encore cessation de l'exploitation du fonds de commerce.
Mais ce motif ne pourra être invoqué que si les faits se sont poursuivis ou renouvelés plus de 2 mois
après mise en demeure du bailleur, par acte extrajudiciaire ou notification par tout moyen permettant
d’établir la réception effective, d'avoir à les faire cesser32.
Dans cette hypothèse, il pourra même solliciter la résiliation judiciaire du contrat de bail par application
des dispositions de l’article 133 de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général33.
La CCJA a, toutefois, décidé que l’article 133 de l’Acte uniforme (relatif à la résiliation du bail) ne peut
s’appliquer que si l’une des parties contractantes ne respecte pas les clauses et conditions du bail, ce
qui n’est pas le cas pour celui qui ne respecte pas le formalisme du renouvellement du contrat à durée
déterminée prévu par l’article 124 de l’Acte uniforme34
- s'il est établi que l'immeuble doit être démoli en vue de sa restauration ou de sa rénovation parce
qu'étant vétuste ou insalubre et donc ne pouvant être occupé sans danger en raison de son état ou des
travaux à exécuter.
Dans ce cas, sauf péril, le locataire pourra rester dans les lieux jusqu'au commencement des travaux.
Si les locaux reconstruits ont une destination différente de celle des locaux, objet du bail, ou s'il n'est
pas offert au preneur un bail dans les nouveaux locaux, le bailleur devra lui verser une indemnité
d'éviction.
- en cas de refus de renouvellement du bail portant sur les locaux d'habitation accessoires des locaux
principaux, pour les habiter lui-même ou les faire habiter par son conjoint ou ses ascendants, ses
descendants ou ceux de son conjoint.
Toutefois cette reprise n'est pas possible si le preneur établit que la privation de jouissance des
locaux accessoires d’habitation lui cause un trouble grave à la jouissance du bail des locaux principaux
ou lorsque les locaux principaux et les locaux d'habitation forment un tout indivisible.
Comme pour tout contrat synallagmatique, chacune des parties est tenue de l’exécution des obligations
mises à sa charge. Faute de quoi l’autre partie pourra solliciter la résiliation du contrat de bail.
Il faut néanmoins respecter la procédure prévue par la loi. Celle-ci commence toujours par une mise en
demeure, par voie d’huissier ou par tout moyen permettant d’en établir la réception effective par le
destinataire, adressée à la partie défaillante d’avoir à respecter les clauses et conditions du bail.
32
Il a été ainsi jugé que le défaut de souscription d’assurance reproché au locataire ne figurant pas dans la mise en demeure qui
lui a été signifiée, ledit locataire ne peut être expulsé… » CCJA, arêt n°06 du 26 février 2009, RJCCA janvier-juillet 2009, page
45.
33
CCJA arrêt n°062 du 30 décembre 2008, recueil de jurisprudence de la CCJA, juillet décembre 2008, page 99
34
CCJA arrêt n°032 du 3 juillet 2008, recueil de jurisprudence de la CCJA, juillet décembre 2008, page 45.
65
Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, indiquer clairement les clauses et conditions du bail non
respectées et indiquer qu’à défaut d’exécution dans un délai d’un mois, le juge des référés sera saisi
aux fins de résiliation et d’expulsion du preneur et de tous occupants de son chef : « Le locataire qui
n’exécute pas ses obligations notamment qui ne paie pas les loyers malgré une sommation et une mise
en demeure de respecter les clauses et conditions du bail s’expose à la résiliation de son contrat de
bail. La résiliation du bail et son expulsion peuvent alors être demandés devant le juge des référés
conformément à l’article 133 nouveau de l’Acte uniforme OHADA sur le droit commercial général » :
Tribunal de première instance de Douala-Bonanjo, ordonnance n°674 du 30 novembre 2011 ; in
répertoire annuel de jurisprudence OHADA 2012, page 35. Voir ordonnance de la même
juridiction n°52 du 27 janvier 2011, in répertoire annuel de jurisprudence OHADA 2012, page 34.
Le contrat de bail peut prévoir une clause résolutoire de plein droit. Dans un tel cas, une fois la procédure
de mise en demeure observée, le juge des référés ne fera que constater la résiliation du contrat de
bail.
Les créanciers inscrits doivent être informés de la demande aux fins de résiliation du contrat de bail.
En tout état de cause, il convient de préciser, en ce qui est de la compétence des juridictions en matière
de contentieux relatifs aux baux à usage professionnel, les dispositions de l’article 132 de l’Acte
uniforme portant sur le droit commercial général aux termes desquelles : « sauf convention contraire
des parties, les contestations découlant de l’application des dispositions du titre I du présent livre (bail
à usage professionnel) sont portées à la requête de la partie la plus diligente, sauf dispositions
contraires du présent livre, devant la juridiction compétente, statuant à bref délai (référé) dans le ressort
de laquelle sont situés les locaux donnés à bail. »
De même la CCJA a rappelé ce qui suit dans son arrêt n°40 du 10 juin 2010 : « Bien que les contrats
soient conclus avant l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général, la
rupture desdits contrats étant intervenue après l’entrée en vigueur dudit Acte, c’est en application des
dispositions de cet Acte que la procédure de résiliation doit être faite conformément à l’article 10 du
Traité OHADA. » In répertoire annuel de jurisprudence OHADA 2011, page 27.
Il est réglementé par les articles 135 à 168 de l'acte uniforme portant sur le droit commercial général.
Aux termes des dispositions de l'article 135 "Le fonds de commerce est constitué par un ensemble de
moyens qui permettent au commerçant d'attirer et de conserver une clientèle".
Tout commerçant possède un fonds, lequel constitue une propriété cessible et transmissible.
66
A- Les éléments principaux du fonds de commerce
Aux termes des dispositions de l'article 136 de l'acte uniforme portant sur le droit commercial général,
"Le fonds de commerce comprend nécessairement la clientèle et l'enseigne ou la clientèle et le nom
commercial, sans préjudice du cumul de la clientèle avec l’enseigne et le nom commercial. »
1- La clientèle et l'achalandage
L'achalandage n'est pas cité par le texte; mais clientèle et achalandage signifient sensiblement la même
chose: il s'agit de l'ensemble des personnes qui s'approvisionnent chez un commerçant ou qui ont
recours à ses services.
Néanmoins la clientèle désigne soit la clientèle captive c'est-à-dire les personnes qui sont liées au
commerçant par un contrat d'approvisionnement, soit la clientèle attitrée, c'est-à-dire les personnes qui
s'adressent au commerçant de façon habituelle.
En ce qui concerne l'achalandage, il désigne les clients de passage qui s'approvisionnent parce que le
fonds est situé dans un endroit favorable; les achats sont toutefois occasionnels.
Ainsi, alors que le nom patronymique est hors du commerce, lorsque celui-ci est utilisé comme nom
commercial, il peut être cédé car il a une valeur patrimoniale.
Etant élément du fonds de commerce, il est protégé contre l'usurpation pour éviter les détournements
de la clientèle.
Elle peut être le nom commercial lui-même, une dénomination de fantaisie ou un emblème.
Lorsque l'enseigne est spécifique, celui qui justifie de l'antériorité de l'usage est protégé contre
l'usurpation par l'action en concurrence déloyale.
67
a- Les meubles servant à l'exploitation
Il s'agit du matériel, du mobilier, des installations, des aménagements et des agencements à condition
qu'ils conservent leur nature mobilière.
En effet, si un meuble devient immeuble par destination à raison des aménagements intervenus dans
le local, il ne fait plus partie du fonds.
a- Le droit au bail
Il peut paraître curieux que l'acte uniforme ait classé le droit au bail parmi les éléments secondaires du
fonds de commerce. Sans doute il y a des fonds de commerce sans droit au bail; mais de façon
générale, le droit au bail est un élément très important du fonds au point d'avoir fait l'objet d'une
réglementation spéciale : il s’agit des dispositions relatives au bail à usage professionnel.
Le commerçant peut être propriétaire des locaux dans lesquels est exploité son fonds; dans ce cas, le
droit à la jouissance du local est un droit immobilier qui est exclu du fonds de commerce.
Ce faisant, lorsque le commerçant, propriétaire de l'immeuble vend son fonds de commerce sans vendre
l'immeuble, il est amené à consentir un bail à usage professionnel à l'acquéreur.
Compte tenu de l'importance du droit au bail, l'acte uniforme a réaffirmé la propriété commerciale au
profit des commerçants, des industriels, des artisans et l'a affirmé au profit de tout professionnel, c'est-
à-dire le droit qu'ils ont au renouvellement de leurs baux arrivés à expiration; faute de quoi, ils ont droit
à une indemnité d'éviction.
Ces licences, lorsqu'elles ont un caractère personnel tenant compte de la qualification professionnelle
du requérant (ex. Du pharmacien), ne font pas partie du fonds de commerce parce que ne pouvant être
cédées.
En revanche, lorsqu'elles n'ont pas un caractère strictement personnel, elles peuvent être cédées avec
le fonds.
L'acte uniforme ayant distingué entre les éléments principaux et les éléments secondaires du fonds de
commerce, on pourrait considérer que seuls les éléments principaux sont essentiels.
68
Mais parmi ceux-ci, quel est l'élément dont la cession ou la réserve a pour effet de faire considérer que
le fonds a été cédé ou non?
La jurisprudence avait répondu à cette question en affirmant très nettement que la clientèle représente
l'élément le plus important du fonds de commerce: "Attendu que la clientèle représente l'élément le plus
important du fonds de commerce, qui ne peut exister sans elle..."35. De même décide-t-elle ce qui suit :
« … Il n’y a pas de fonds de commerce lorsqu’il n’y a pas ou lorsqu’il n’y a plus de clientèle qui s’y trouve
attachée. »36.
A côté de cette solution de principe dégagée par la jurisprudence, s'est développée une autre théorie
selon laquelle la détermination de l'élément essentiel d'un fonds de commerce devait se faire en fonction
de chaque cas particulier.
En effet, pour certains auteurs, il est impossible de déterminer d'une façon générale et abstraite
l'élément essentiel du fonds de commerce. Tout dépend du genre de commerce; car si on définit le droit
sur le fonds comme un droit de clientèle, il s'agira de découvrir quel est l'élément déterminant pour la
conservation de ladite clientèle: c'est tantôt le nom ou l'enseigne, tantôt le local, tantôt le matériel, les
brevets etc...
Pour d'autres auteurs, la position de principe de la jurisprudence attache trop d'importance à la clientèle;
or dans un régime de libre concurrence, la clientèle n'appartient pas au commerçant puisqu'elle peut lui
être enlevée par un concurrent qui rend un meilleur service à un meilleur prix.
La pertinence de ces analyses n'enlève, pourtant, pas à la clientèle son caractère essentiel.
En effet, toutes les analyses tendent à montrer que la clientèle présente, seule, un caractère essentiel
en ce que tous les autres éléments convergent pour sa constitution et son maintien. D’ailleurs dans sa
composition, il est toujours cité comme élément du fonds alors que les autres peuvent exister ou ne pas
exister
On peut concevoir un fonds de commerce sans droit au bail, sans enseigne, sans licence etc...mais on
ne peut imaginer un fonds sans clientèle ou sans achalandage. La clientèle est donc la substance même
du fonds de commerce.
Ainsi le fonds de commerce en tant qu'entité peut faire l'objet de conventions différentes de celles qui
porteraient sur chacun des éléments le composant.
Dans le même sens, on peut relever que la composition du fonds peut varier; par ex. il peut ne plus
avoir de droit au bail en cours d'exploitation par suite de l'acquisition de l'immeuble servant à
l'exploitation par le commerçant; et pourtant le fonds va demeurer en tant qu'entité.
Mais le fonds de commerce ne constitue pas un patrimoine d'affectation; c'est-à-dire que dans le
patrimoine du commerçant, on ne peut pas dire qu'il y a une masse de biens unis, distincte du reste du
patrimoine et affectés aux créanciers dont le titre se rattache à l'exploitation commerciale.
35
Com.29 mai 1953 J.C.P.53, II, 7720; de même voir Req.15-2-1937 Sirey 37-1-169
36
Cass. Com 31 mai 1988 ; bull. 4, n°180
69
Le fonds de commerce est un élément comme un autre du patrimoine du commerçant37.
Le fonds de commerce ne comprend que des éléments mobiliers; ainsi est-il lui-même un meuble
(C.A.A.29 mars 1994 Rev. Iv. de Sc. Jur. 1995 N°5 p.139) soumis aux règles applicables aux biens
meubles notamment en matière de régime matrimonial ou de succession.
Il s'agit d'un meuble incorporel car la propriété du fonds de commerce n'est, en réalité, qu'un droit de
clientèle.
- sa mise en location-gérance,
- sa cession,
- son nantissement.
En effet le propriétaire peut confier son fonds à un gérant salarié avec qui il est lié par un contrat de
travail; certes ce salarié dispose d'un certain pouvoir de représentation en ce qu'il peut conclure des
contrats pour le compte de son employeur; mais seul le propriétaire est commerçant.
Aux termes des dispositions de l'article 138 alinéa 3 de l'acte uniforme relatif au droit commercial
général, "La location-gérance est une convention par laquelle le propriétaire du fonds de commerce,
personne physique ou morale, en concède la location, en qualité de bailleur à une personne physique
ou morale, locataire-gérant, qui l'exploite à ses risques et périls. L’entreprenant ne peut être partie à un
contrat de location-gérance".
Le gérant libre exploite donc le fonds pour son compte à ses risques et périls moyennant paiement d'un
loyer ou d'une redevance souvent indexée sur le chiffre d'affaires.
La location-gérance du fonds de commerce est réglementée par les articles 138 à 146 de l'acte uniforme
portant sur le droit commercial général.
37
CCJA, arrêt n°40 du 30 juin 2009, RJCCJA janvier-juillet 2009, page 104.
70
A- Les conditions de la location-gérance
Elles tiennent d'une part au bailleur d'autre part au locataire-gérant.
- Le bailleur ne doit pas avoir été interdit ou déchu de l'exercice d'une profession commerciale;
- Il doit avoir exploité pendant deux ans au moins en qualité de commerçant le fonds mis en gérance.
Les conditions qui précèdent sont cumulatives; mais des exceptions sont prévues par l'acte uniforme.
Ainsi, le délai peut être réduit sans pouvoir être inférieur à un an par le tribunal lorsque le requérant
justifie qu'il est dans l'impossibilité d'exploiter son fonds personnellement ou par l'intermédiaire de ses
préposés.
- à l'Etat,
- aux incapables, en ce qui concerne le fonds dont ils étaient propriétaires avant la survenance de leur
incapacité,
- aux héritiers ou légataires d'un commerçant décédé, en ce qui concerne le fonds exploité par ce
dernier,
- aux mandataires de justice chargés de l'administration d'un fonds de commerce dûment autorisés par
la juridiction compétente et ayant satisfait aux mesures de publicité prescrites.
Quant au bailleur, il doit faire modifier son inscription personnelle avec la mention expresse de la
location-gérance.
En ce qui concerne le contrat, il doit être publié par la partie la plus diligente aux frais du locataire-gérant
sous forme d'extrait dans un journal d'annonces légales dans la quinzaine de sa date.
Le locataire-gérant est tenu d'indiquer en entête de ses bons de commande, factures et autres
documents à caractère financier ou commercial sa qualité de locataire-gérant ainsi que son N°
d'immatriculation au registre du commerce.
A défaut, il lui sera fait application des dispositions de l’article 3 de la loi n°2017-727 du 9 novembre
2017 portant répression des infractions prévues par les actes uniformes du Traité OHADA (JORCI n°100
du 14 décembre 2017), aux termes duquel : « est puni d’un emprisonnement de trois mois à trois ans
et d’une amende de 100 000 à 1 000 000 de francs ou de l’une de ces deux peines seulement, le
locataire-gérant qui n’indique pas en entête de ses bons de commande, factures et autres documents
71
à caractère financier ou commercial, avec son numéro d’immatriculation au Registre du commerce et
du crédit mobilier, sa qualité de locataire-gérant du fonds. »
Quant au bailleur, il cesse d'être commerçant et il doit, en ce sens, modifier son inscription au registre
du commerce et du crédit mobilier.
Le bailleur doit mettre le fonds à la disposition du locataire et ne pas le troubler dans sa jouissance;
notamment, il ne doit pas exploiter un commerce concurrent (Colmar 11 mai 1926 Gaz.pal.1926-2-303).
Quant au locataire, il doit payer un loyer qui correspond à la redevance due pour la jouissance des
locaux et un loyer pour la jouissance des éléments corporels et incorporels du fonds de commerce; ces
deux éléments de loyer doivent obligatoirement être déterminés de façon séparée dans le contrat de
location-gérance même si leurs échéances sont fixées aux mêmes dates. Le locataire-gérant doit
exploiter le fonds avec diligence; il ne doit pas en modifier la destination, en étendre l'objet.
Le contrat étant conclu intuitu personae, le locataire ne peut ni céder ses droits ni sous-louer le fonds
sans l'autorisation du bailleur.
- pour les dettes nées avant le contrat de location-gérance, le bailleur en est seul responsable;
- pour les dettes nées après la location et avant publication du contrat, le bailleur et le locataire-gérant
en sont responsables solidairement;
- pour les dettes survenues après publication du contrat, le locataire-gérant en est seul responsable.
Quant à la fin de la location-gérance, elle rend immédiatement exigibles les dettes afférentes à
l'exploitation du fonds, contractées par le locataire-gérant pendant la durée de la gérance.
A l'égard du bailleur des locaux dans lesquels le fonds est exploité, la mise en location-gérance du fonds
constitue-t-elle une sous-location du local?
72
La jurisprudence répond à cette interrogation par la négative en décidant que la gérance libre d'un fonds
de commerce ne constitue pas une sous-location, mais la location d'un meuble incorporel : Cour
suprême 29 janvier 1985 arrêt N°8.
Le locataire-gérant n'a donc aucun droit à l'égard du bailleur des locaux. Le renouvellement du bail du
local doit être le fait du propriétaire du fonds de commerce.
Enfin la question s'était posée de savoir si le contrat de location-gérance est opposable à l'acquéreur
du fonds de commerce.
En dehors d'une disposition textuelle consacrant une réponse affirmative, il est difficile de soutenir la
solution de l'opposabilité.
La solution consiste donc à mentionner dans l'acte de vente, l'existence du contrat de location-gérance
et de faire agréer le gérant par l'acquéreur; ou alors de stipuler dans le contrat de gérance qu'il prendra
fin de plein droit en cas d'aliénation du fonds.
Il faut répondre à cette interrogation par l'affirmative. Quel est le fondement de cette commercialité?
Pour la cour de cassation, il faut faire application de la théorie de la commercialité par accessoire. Ainsi
il y a acte de commerce si le fonds est vendu par le commerçant qui l'exploite à un autre commerçant
en vue de son exploitation38 .
En effet la vente du fonds de commerce n'étant pas prévue dans l'énumération des actes de commerce
par nature, il faut y voir un acte de commerce par application de la théorie de l'accessoire puisque toute
vente d'un fonds suppose nécessairement avoir été faite en vue de son exploitation.
La cession du fonds de commerce est soumise aux règles de droit commun régissant la vente. Mais
l'importance économique du fonds de commerce a justifié une réglementation issue de l'Acte uniforme
et de certains textes relatifs à l'exercice de certaines activités commerciales.
Les deux dernières conditions citées ne posant, en principe, aucune difficulté en matière de cession de
fonds de commerce, reste les deux premières.
La vente d'un fonds de commerce constituant un acte de commerce partant de l'idée que l'acquisition
est faite en vue de l'exploitation, il faut avoir la capacité de faire le commerce pour acquérir un fonds de
commerce.
38
cass.civ.19 nov.1924 Gaz.pal.1925-1-45
73
En ce qui concerne le vendeur, on suppose qu'ayant exploité le fonds, il a déjà la qualité de commerçant;
si tel n'est pas le cas s'agissant d'un héritier mineur par exemple, la vente sera faite par son représentant
légal avec l'autorisation du juge des tutelles.
En la matière, les tribunaux ont tendance à admettre plus facilement le dol et l'erreur car la chose objet
du contrat étant un meuble incorporel, ils considèrent qu'il est plus facile de se tromper ou d'être trompé
par réticence sur la clientèle ou le chiffre d'affaires.
Quant à la violence, on peut la concevoir lorsque par ex. La vente a été consentie suite à des actes de
chantage.
La réponse à cette interrogation est fournie par l'article 148 de l'Acte uniforme portant sur le droit
commercial général. Aux termes dudit article, "La cession du fonds de commerce porte nécessairement
sur les éléments énumérés à l’article 136 du présent Acte uniforme" c'est-à-dire la clientèle et l'enseigne
et/ou le nom commercial.
Les autres éléments peuvent être cédés. Mais tant qu’il n’y a pas cession simultanée des éléments
principaux, il n’y a pas cession du fonds de commerce.
Le prix du fonds est librement fixé par les parties sous réserve de la surenchère qui peut être faite par
les créanciers s'ils estiment que le fonds a été vendu à un prix trop bas.
L'écrit est indispensable pour l'accomplissement des formalités d'enregistrement, pour la publication de
la cession, pour l'inscription de l'acquéreur au registre du commerce et du crédit mobilier et pour
l'inscription du privilège du vendeur du fonds.
L'acte de cession doit contenir certaines mentions destinées à renseigner l'acquéreur sur la valeur réelle
du fonds vendu sous peine de nullité de la cession. L'acte doit, ainsi, énoncer:
- l'état civil complet du vendeur et de l'acheteur, s'il s'agit de personnes physiques; pour les personnes
morales, les nom, dénomination sociale, forme juridique, adresse et siège social;
- le chiffre d'affaires réalisé au cours de chacune des trois dernières années d'exploitation, ou depuis
son acquisition, si le fonds n'a pas été exploité depuis plus de trois ans;
- le bail annexé à l’acte avec l’indication de sa date, de sa durée, du nom et de l'adresse du bailleur et
du cédant s'il y a lieu;
74
- le prix convenu;
Au cas d'omission ou de mentions inexactes, l'acquéreur peut, dans le délai d'un an à compter de la
date de l'acte de cession, demander que soit annulée la vente s'il prouve que l'omission ou l'inexactitude
a substantiellement affecté la consistance du fonds et qu'il en est résulté un préjudice pour lui.
Tout ce qui précède tend à faire de la cession d'un fonds de commerce un contrat solennel.
b- Publicité de la vente
Quelles sont les modalités de cette publicité et quels sont ses effets?
Celle-ci a lieu, à la diligence de l'acquéreur, dans un délai de 15 jours francs à compter de la date de
l'acte sous forme d'avis dans un journal d'annonces légales paraissant dans le lieu où le vendeur est
inscrit au registre du commerce et du crédit mobilier.
L'exercice du droit d'opposition intéresse surtout les créanciers chirographaires, qu'ils aient une créance
exigible ou à terme.
Quant aux créanciers titulaires de sûretés, le droit de suite qui leur est accordé les protège contre toute
aliénation.
L'opposition doit, à peine de nullité, être notifiée par exploit d’huissier ou par tout moyen permettant
d’’en établir la réception effective :
- à l'acquéreur ;
- et au greffier qui devra procéder à l'inscription de cette opposition sur le registre du commerce et du
crédit mobilier.
Toujours à peine de nullité, l'acte d'opposition doit énoncer le montant et les causes de la créance et
contenir élection de domicile dans le ressort de la juridiction où est tenu le registre du commerce et du
crédit mobilier.
L'opposition produit un effet conservatoire; le produit de la vente est bloqué entre les mains du
séquestre. Elle empêche également la compensation et la cession de créance.
75
L'opposant peut alors saisir le juge pour obtenir paiement de son dû.
Le vendeur peut obtenir la mainlevée des oppositions soit par voie judiciaire soit par la voie amiable et
recevoir ainsi les fonds disponibles.
Les créanciers opposants de même que ceux titulaires de sûretés disposent, dans le mois de la
publication de l'acte de cession, du droit de former une surenchère du sixième du prix global du fonds.
Autrement dit ces créanciers peuvent demander au juge de remettre le fonds en vente aux enchères
publiques et offrir de se porter enchérisseur pour le prix initial augmenté du sixième.
Ce droit leur est reconnu, dans le même délai, lorsque la vente initiale est faite judiciairement aux
enchères publiques.
Dans un tel cas, c’est-à-dire en cas de surenchère, le surenchérisseur doit consigner, dans le délai d'un
mois, au greffe de la juridiction compétente, le montant du prix augmenté du sixième.
- l'obligation de délivrance et
- l'obligation de garantie.
a- L'obligation de délivrance
Le vendeur est tenu de mettre le fonds cédé à la disposition de l'acheteur à la date prévue dans l'acte
de cession. Il devra le présenter à la clientèle.
Cette mise à disposition est indépendante du transfert de propriété qui s'opère dans les conditions
prévues par l'article 166 de l'acte uniforme portant organisation des sûretés; en effet aux termes de ce
texte, "Pour produire son effet translatif et être opposable aux tiers, la vente doit être inscrite au registre
du commerce et du crédit mobilier à la demande de l'acquéreur immatriculé et dans le respect des
conditions prévues par l’Acte uniforme portant sur le droit commercial général".
b- L’obligation de garantie
Le vendeur doit la garantie des vices cachés, la garantie d'éviction et la garantie de son fait personnel:
- En ce qui concerne la garantie des vices cachés, c'est celle existant dans tous les contrats de vente;
l'acquéreur pourra demander la résolution de la vente si la diminution de jouissance qu'il subit est
d'une importance telle qu'il n'aurait pas acheté le fonds s'il en avait eu connaissance.
- S'agissant de la garantie d'éviction, elle signifie que le vendeur doit garantir l'acheteur contre les
troubles de droit provenant d'un tiers qui revendiquerait le fonds par exemple. Sinon il pourra
solliciter la résolution du contrat.
- Quant à la garantie du fait personnel, elle consiste pour le vendeur à ne rien faire qui puisse troubler
l'acquéreur dans l'exercice des droits qui lui ont été transmis.
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Etant donné l'incertitude existant à propos de cette garantie quant à sa durée et à son étendue, les
parties insèrent dans le contrat de vente une clause de non rétablissement que le vendeur doit respecter
sous peine de condamnation au paiement de dommages et intérêts.
Pour être valable, cette clause doit être limitée soit dans le temps soit dans l'espace.
Ce paiement a lieu entre les mains du notaire ou d'un établissement bancaire désigné d'accord parties.
Celui qui aura reçu les fonds devra les conserver en qualité de séquestre jusqu'à l'expiration du délai
accordé aux créanciers pour faire leurs oppositions. C’est-à-dire pendant un délai de 30 jours, ce délai
commençant à courir au jour de la parution dans un journal habilité à publier la vente au titre des
annonces légales.
Généralement, le vendeur accorde à l'acquéreur un délai pour le paiement d'une partie du prix qui sera
versé par acomptes successifs.
Aux termes des dispositions de l’article 183 de l’acte uniforme portant organisation des sûretés : « Le
vendeur a, sur le meuble vendu, un privilège pour garantie du paiement du prix non payé, s’il est encore
en la possession du débiteur ou sur le prix encore dû par le sous-acquéreur. »
Pour pouvoir bénéficier de ce privilège, le vendeur doit faire publier la vente et son privilège au registre
du commerce et du crédit mobilier (article 167).
b- L'action résolutoire
Le vendeur qui n'a pas reçu paiement peut, par application des articles 1184 et 1654 du code civil
demander la résolution du contrat de vente. Ainsi en dispose également l’article 168 de l’Acte uniforme
portant sur le droit commercial général
Cette action ne peut prospérer que si la vente a été publiée au registre du commerce et du crédit
mobilier. Elle doit être portée à la connaissance des créanciers inscrits à leur domicile élu, par acte
extrajudiciaire ou par tout moyen prouvant par écrit cette notification.
La demande tendant à la résolution amiable, judiciaire ou de plein droit doit faire l'objet d'une prénotation
au registre du commerce et du crédit mobilier à la diligence du vendeur. Celle-ci est autorisée par le
président de la juridiction du lieu où la vente a été inscrite.
La résolution ne peut être prononcée que par la juridiction compétente où est immatriculé le vendeur du
fonds;
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III- Le nantissement du fonds de commerce
Pour permettre à l'exploitant d'un fonds de commerce d'obtenir des fonds pour poursuivre ou étendre
son exploitation, les articles 162 et suivants de l'acte uniforme portant organisation des sûretés ont
prévu la possibilité de l’affecter en garantie par voie de nantissement..
Il s'agit d'une garantie offerte par l'exploitant à ses créanciers. Un tel nantissement est d'ordre
conventionnel.
A côté de ce nantissement conventionnel, l’article 164 a prévu la possibilité pour le juge d'autoriser un
créancier à prendre pour sûreté de sa créance une inscription de nantissement sur un fonds de
commerce. C'est le nantissement judiciaire.
Qu’il soit conventionnel ou judiciaire, le nantissement n’est opposable aux tiers qu’une fois inscrit au
RCCM.
A- Le nantissement conventionnel
Comment est-il constitué et quels droits confère-t-il au créancier nanti?
1- La constitution du nantissement
Le nantissement du fonds de commerce porte obligatoirement sur les éléments principaux le composant
c’est-à-dire sur la clientèle et l'enseigne ou le nom commercial.
Les autres éléments du fonds doivent faire l'objet d'une mention expresse.
Le nantissement doit faire l'objet d'un écrit qui peut être authentique ou sous seing-privé dûment
enregistré.
A peine de nullité, il devra comporter les mentions suivantes (article 163 de l’AUS):
- les éléments permettant l’individualisation de la créance garantie tels que son montant ou son
évaluation, sa durée et son échéance.
De même le déplacement du fonds de commerce rend ou peut rendre les créances immédiatement
exigibles suivant que le créancier nanti n'a pas été avisé ou l'a été. En effet au moins 15 jours avant le
déplacement du fonds, le créancier nanti doit être avisé par acte extrajudiciaire avec indication du nouvel
emplacement du fonds.
La demande de résiliation du bail dans lequel est exploité le fonds doit être porté à la connaissance du
créancier nanti par le bailleur par acte extrajudiciaire.
La décision de résiliation judiciaire, amiable ou de plein droit ne peut intervenir que deux mois après
notification.
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Enfin le créancier nanti muni d'un titre exécutoire peut faire ordonner la vente du fonds, 8 jours après
sommation faite de payer demeurée infructueuse.
Il bénéficie d'un droit de suite c'est-à-dire qu'il peut faire saisir et faire vendre le bien en quelque main
où il se trouve; il dispose aussi d'un droit de préférence sur le prix de la vente c'est-à-dire qu'il est payé
par préférence aux créanciers chirographaires.
Le créancier nanti et celui titulaire d'un privilège soumis à publicité comme le vendeur du fonds par
exemple, viennent, dans la procédure de distribution des fonds, chacun selon le rang de son inscription
au registre du commerce et du crédit mobilier (article 226 de l'acte uniforme portant organisation des
sûretés).
Quant aux créanciers chirographaires, en cas de vente ou de réalisation (vente forcée) du fonds, ils
peuvent obtenir en justice la déchéance du terme de leurs créances pour concourir à la distribution du
prix.
B- Le nantissement judiciaire
C'est une mesure qui peut être ordonnée par le juge au profit d'un créancier pour sûreté de sa créance
dont le recouvrement est en péril.
Ce nantissement porte sur les mêmes éléments que le nantissement conventionnel. Il n’est opposable
aux tiers que s'il est inscrit au registre du commerce et du crédit mobilier.
La décision judiciaire autorisant le nantissement doit comporter les mêmes énonciations que celles
exigées pour le nantissement conventionnel et prévues par l'article 163 de l'acte uniforme portant
organisation des sûretés.
Après la décision autorisant le nantissement le créancier doit procéder à une inscription provisoire;
l'inscription définitive interviendra après la décision de validation passée en force de chose jugée.
Au plan des droits, l'inscription a pour effet de placer le créancier bénéficiaire d'un nantissement
judiciaire dans la même situation que celui nanti à titre conventionnel.
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