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UNIVERSITE INTERNATIONALE DE TUNIS

COURS

DROIT COMMERCIAL

2ème année Licence Fondamentale en Droit Privé

Mme Chams MELLOULI

ANNEE UNIVERSITAIRE : 2019-2020


INTRODUCTION

Pour simplifier, droit commercial est la partie du droit privé relative aux opérations juridiques
faites par les commerçants soit entre eux, soit avec leurs clients, par dérogation au droit civil. Le
droit commercial est alors, le droit qui s’applique aux commerçants mais en réalité dans la vie des
affaires, les choses se compliquent. En effet, le développement et la diversité des activités
commerciales et l’évolution constante du monde des affaires et des échanges économiques, font
que la définition et les contours du droit commercial ont évolués à travers le temps.
La détermination du domaine du droit commercial permet d’avancer une définition de la notion
(Section1), il conviendra par la suite de retracer l’évolution historique de cette branche du droit
privé (Section 2), d’en déterminer ses sources (Section 3) ainsi que ses spécificités qui nous
permettront de traiter la question de son autonomie (Section 4).

Section 1 : Le domaine du droit commercial

La notion de « commerce », correspondant au mot latin « commercium » qui vise les activités
permettant aux richesses de passer du producteur au consommateur 1.

Pourquoi définir le droit commercial ?


Le définir nous permet de délimiter le contenu de cette branche du droit privé, de connaître son
domaine d’application : à qui s’applique-t-il ? Il concerne quelle branche d’activité ?
Aujourd’hui le droit commercial fait partie du droit privé. Il est la partie spéciale du droit civil qui
est le droit commun.

Deux conceptions s’affrontent : Une conception objective et une conception subjective.

La conception objective : Est celle qui analyse le droit commercial sous l’angle de son objet et
spécialement sous l’angle juridique. Le droit commercial est donc réduit au droit des actes de
commerce.
La conception subjective : Elle analyse le droit commercial comme un droit des commerçants plus
généralement des professions commerciales indépendamment des actes passés.

L’article 1er du code de commerce dispose que : le code s’applique aux commerçants et aux actes
de commerce.

Le législateur tunisien semble opter pour deux théories en les regroupant dans une même
définition.

Ainsi ces deux conceptions sont complémentaires Selon Mme Nabila MEZGHANI2. Et le code de
commerce a opté pour les deux critères, de cette dualité résulte un droit aux contours imprécis
qui peut concerner des personnes non commerçantes.

Le droit commercial pourrait ainsi se définir comme une branche du droit privé regroupant
des règles applicables aussi bien aux commerçants, qu’aux activités commerciales ; que
celles-ci soient accomplies par des commerçants ou des non commerçants 3.

1
Cornu G., Vocabulaire juridique association Henri CAPITANT, éd. PUF, Paris, 1987, p.153.
2
N. MEZGHANI, Droit Commercial, CPU, 2006.
3
Cours Mme Salma KHALED, Droit commercial, FDSPT, 2013/2014 ; Manuel de droit commercial, Maison du livre, 2015.
Section 2 : L’évolution du droit commercial.

A. Historique du droit commercial

A l’origine, le droit commercial n’est pas un droit formaliste, donc n’a pas laissé de traces écrites.
C’est un droit qui s’est formé dans les usages et qui a été codifié au début du 19éme siècle.

Le droit commercial a des origines très anciennes qui remontent jusqu’à l’antiquité, aux Babyloniens,
ayant élaborés le code D’Hammourabi (2000 Avant J-C) qui est une stèle en pierre taillée qui se
trouve au musée du Louvres à Paris, qui mentionnait déjà certaines activités commerciales
pratiquées par les Babyloniens.
Après les Babyloniens, les Phéniciens étaient de grands navigateurs et ont connu des usages
spécifiques au commerce maritime. Chez les Grecs et les Romains on parlait du prêt à la grosse
aventure qui était un prêt pour développer le commerce maritime du blé, il s’agissait d’une opération
de financement. C’est pour des besoins commerciaux qu’on a commencé à créer de la matière
juridique.
Les carthaginois étaient par ailleurs de grands commerçants, ils importaient du cuivre, bronze et
autres métaux et exportaient des produits agricoles. Influencés par les carthaginois, les romains
ont créé plusieurs institutions relatives au commerce (commerce bancaire, de la lettre de change,
de faillites, etc.) et c’est à cette époque que la distinction entre le droit civil et le droit commercial
a commencé à s’établir.
L’antiquité nous a donc laissé quelques documents relatifs au commerce maritime entre des villes
qui ne connaissaient pas les mêmes lois. Il s’agissait d’échapper aux législations qui étaient
différentes d’un pays à un autre. On a donc élaboré un droit commun supérieur et différent des
systèmes juridiques propres à chacune des villes. Cette pratique du droit commercial a perduré
jusqu’au moyen-âge.

Au moyen âge, avec la pratique des foires qui permettaient de réunir des marchands venus de
différentes régions, an a créé un droit spécifique aux foires qui s’appliquait aux échanges nés à
l’occasion de ces foires ainsi que des institutions chargées de régler les litiges nés à l’occasion de
ces foires. Le droit des foires a été par la suite codifié.
Origine étymologique du mot banqueroute, le commerçant qui faisait faillite par la rupture du ban,
on passait le ban à la hache. L’idée de rompre le ban et de banqueroute vient de là. On dit d’ailleurs
mettre au ban de la société le failli.

La lettre de change, a été inventée pour éviter que l’on se déplace avec des valeurs pour éviter le
risque de se faire détrousser. D’où la création d’un effet de commerce pour l’usage commercial.

Entre le 16ème et le 18ème siècle deux ordonnances importantes ont été rendues, la première
l’ordonnance de COLBERT relative au commerce terrestre datée de 1673 et le deuxième relative
au commerce maritime datée de 1681.

Au moment de la révolution française deux principes ont été posés : Le décret d’Allarde est celui
de la liberté du commerce et de l’industrie promulgué par la loi n°2 du 17/3/1791 et qui constitue
une incitation à la création d’entreprise ; et le deuxième celui de la suppression des corporations
et leur interdiction par la loi le CHAPPELIER des 14-17/6/1791.
Quant à la codification de règles propres aux commerçants et à leurs activités, celle-ci a vu le jour
en 1807, date de l’apparition du code de commerce français, qui entra en vigueur le 1er/1/1808,
il consistait en une reproduction de l’ordonnance de 1673.
En Tunisie, le commerce était régi par le droit musulman et la majorité des règles commerciales
n’étaient pas écrites ; les usages ont par la suite été consignés par écrit et ont servi de base pour
élaborer un projet de code qui n’a pas pu alors, voir le jour.
En 1906, seul le code des obligations et des contrats fut promulgué, toutefois, ce code a établi
quelques règles relatives aux sociétés civiles et commerciales.

B. Le code de commerce

Les travaux préparatoires ont commencé en 1955, ce n’est qu’en 1959 que le premier code de
commerce tunisien fut promulgué, d’inspiration essentiellement françaises il était composé de 746
répartis en 5 livres (Livre 1 : du commerce en général, Livre 2 : Du fonds de commerce, Livre 3 :
De la lettre de change, du billet à ordre et du chèque, Livre 4 : Du concordat préventif et de la
faillite, Livre 5 : Des Contrats commerciaux).

Ce code a connu des modifications successives, les plus marquantes sont celles du 17/5/1995, loi
relative au redressement des entreprises en difficultés économiques (abrogée par la loi du 29 avril
2016, relative aux procédures collectives), la loi n°93-2000 du 3/11/2000 relative à la promulgation
du code des sociétés commerciales instituant le CSC, la loi n° 95-43 du 2/5/1995 relative au
registre du commerce (abrogée par la Loi n° 2018-52 du 29 octobre 2018 relative au registre
national des entreprises), la loi portant renforcement de la sécurité des transactions financières
n°2005-96 du 18/10/2005 et celle relative à l’initiative économique n°2007-69 du 27/12/2007 ou
encore la loi du 12 aout 2009 relative au commerce de distribution, loi n°2015/36 relative à la
concurrence et aux prix.

C. Le droit commercial après le code.

Le code de commerce a évolué en même temps que la libéralisation de notre économie nationale.
Le mouvement de libéralisation de notre économie nationale a eu un impact direct sur notre
système législatif. Le capitalisme marque l’amoindrissement de l’interventionnisme étatique. Le
législateur est intervenu dans de nombreux secteurs, le droit commercial a ressenti cette
évolution.
Le code de commerce a subi les influences des droits étrangers et des recommandations
internationales (OMC - GATT) qui ont fortement inspiré le droit interne.

Le code a connu des modifications successives, les plus marquantes sont celles du 17/5/1995, loi
relative au redressement des entreprises en difficultés économiques, la loi n°93-2000 du
3/11/2000 relative à la promulgation du code des sociétés commerciales instituant le Code des
Sociétés Commerciales, et plus récemment la loi n°36-2016 du 29 avril 2016, relative aux
procédures collectives.

Section 3 : Les sources du droit commercial.


Elles sont généralement réparties en deux catégories : les sources écrites (notamment la loi
nationale et internationale) et sources non écrites (les us et coutumes).
A. La Loi :

1. La loi nationale :
- Le code de commerce (tel que récemment modifié, notamment par la loi relative aux procédures
collectives), la loi relative au commerce de distribution, la loi relative à la concurrence et aux prix
et le Code des sociétés commerciales constituent les principales sources du droit commercial
tunisien. D’autres questions relevant du droit commercial sont contenues dans des textes autres
telle que par exemple : la réglementation des changes, des valeurs mobilières, les sociétés de
Commerce International et celle relative aux banques et aux activités bancaires, le registre de
commerce, le marché financier etc…
- Le Code des Obligations et des Contrats contient des dispositions applicables en matière
commerciale. On peut citer à titre d’exemple : L’article 175 C.O.C. relatif à la présomption de la
solidarité en matière commerciale, l’article 478 C.O.C. al. 2 : la preuve testimoniale entre
commerçants et l’article 1098 et 1100 concernant le prêt à intérêt en matière commerciale. D’autre
part, le code de commerce renvoie expressément au C.O.C. En effet, le C.O.C. étant le droit commun
par exemple l’article 597 C.Com. dispose que les contrats commerciaux sont régis par le Code à
défaut par le C.O.C. à défaut par l’usage. Les articles 1249 et suivants du C.O.C. s’appliquent aussi
tant aux sociétés civiles qu’aux sociétés commerciales. Le C.O.C. reste alors le texte général et les
dispositions commerciales sont spéciales (C.Com. + CSC).

2. Les sources internationales :

Il convient de souligner que la Tunisie a adhéré à certaines conventions internationales, citons à


titre d’exemple : les accords du GATT (General Agreement on Tarifs & Trade) signés à la HAVANE
en 1947, cet accord a été modifié et renégocié en 1996.
Rappelons que les Conventions internationales ont une autorité supérieure à celle des textes
internes et suppose l’adaptation des législations internes aux dispositions des Conventions
Internationales.

Par ailleurs, la Lex mercatoria dite également loi marchande, désigne le Droit élaboré par les
milieux professionnels du commerce international ou spontanément suivi par ces milieux
indépendamment de tout droit étatique et dont l’application échapperait à la méthode du conflit
des lois4. Le juge s’y réfère, comme un droit qui est commun à tous les pays.

B. Les usages.

L’usage est l’une des sources les plus importantes du droit commercial à côté de la loi. En effet,
pendant longtemps, le droit commercial a été un droit purement coutumier sans aucune rédaction
de ses coutumes. Les commerçants ont forgé leurs propres règles qui sont adaptées à leurs besoins,
des règles plus souples que celles qui sont écrites, à l’instar du droit des marchands à l’échelle du
Commerce International : la « lex mercatoria »5.

L’usage se définit comme une pratique commerciale constante et acceptée. Cette pratique
doit présenter un caractère de généralité.

4
Cornu G., Vocabulaire juridique association Henri CAPITANT, 7è éd. PUF, Paris, 1998, p.493.
5
Cette pratique de création de règles propres aux commerçants s’est étendue même aux modes des règlements des litiges
d’où la création de la pratique de l’arbitrage qui consolide le recours à l’usage en droit commercial.
La difficulté que pose l’usage est celle de déterminer sa nature, car celle-ci n’est pas homogène.
L’usage est limité à une profession ; une localité ou à une opération déterminée, etc.
Il existe deux sortes d’usage : l’usage conventionnel (ou de fait) et l’usage de droit (ou impératif).

- L’usage conventionnel ou de fait : est un usage supplétif usage qui peut être écarté par
la convention des parties ou inversement qui s’applique lorsque les parties n’ont pas
manifesté la volonté de l’écarter par leurs conventions.
- L’usage impératif ou de droit : s’applique de plein droit et a une véritable force obligatoire,
il s’applique même si les parties ignorent son existence. L’usage de droit est une règle qui
s’impose aussi bien aux parties, qu’au juge.

La preuve d’un usage de fait doit être rapportée par celui qui l’invoque (preuve par tous moyens)
alors que celle d’un usage impératif n’a pas besoin d’être rapportée car il suffit de l’invoquer. Le
juge est censé connaître la loi. L’application de l’usage conventionnel peut être écartée si l’une des
parties prouve qu’elle l’ignorait. Par contre, l’usage de droit s’impose même à ceux qui l’ignorent.
Cette règle est bien évidemment relative car l’usage est propre à une profession déterminée.

Une question se pose est-ce que l’usage peut-il prévaloir contre une loi écrite ?
L’article 543 C.O.C. prévoit que : « La coutume et l’usage ne sauraient prévaloir contre la loi
lorsqu’elle est formelle ».

En revanche, l’usage et la coutume peuvent suppléer la loi en cas de silence. Ils sont d’ailleurs une
source importante du droit commercial puisque plusieurs règles écrites trouvent leurs origines
dans des règles coutumières.

B. La jurisprudence

A côté des lois et usages, les décisions jurisprudentielles en matière commerciale sont une source
importante. La jurisprudence est encore peu développée au point d’occuper la place d’une source
importante. Les décisions jurisprudentielles en matière commerciale sont trop timides, dispersées
et inédites. Toutefois, la spécialisation du contentieux par la création des chambres commerciales
permettra certainement à une jurisprudence commerciale plus élaborée de voir le jour.

Section 4 : L’autonomie du droit commercial et ses conséquences


Il convient d’abord d’étudier les rapports du droit commercial avec les autres disciplines (§1) et
d’exposer ensuite les règles qui lui sont spécifiques (§2).

§ 1. La place du droit commercial

Il convient de se demander quelle est la place du droit commercial par rapport aux autres
disciplines ? Nous étudierons sa place par rapport à la notion plus moderne de droit économique
(A) et par rapport à la matière civile (B).
A. Droit commercial et droit économique :

Dans son ouvrage « Droit économique » le professeur Farjat G., le défini comme la branche du droit
qui envisage l’organisation collective de l’économie tant par les pouvoirs privés que par les pouvoirs
publics.

C’est un droit moderne qui s’oppose à la distinction classique caractérisée par la séparation entre
les deux grandes branches du droit : public et privé.
Le droit économique est donc une branche du droit très large qui régit l’activité économique dans
son ensemble et avec toutes ses variétés qu’il s’agisse d’une relation civile ou commerciale. Il régit
aussi bien l’activité des commerçants, des industriels que l’activité des agriculteurs, des artisans,
des professions libérales, des institutions à but lucratif ou non lucratif, à caractère public ou privé,
etc. dès lors qu’ils exercent une activité économique.

LE DROIT COMMERCIAL EST TRADITIONNELLEMENT CONSIDERE COMME UN DROIT SPECIAL PAR RAPPORT
AU DROIT CIVIL QUI CONSTITUE LE DROIT COMMUN. IL IMPORTE DONC DE DETERMINER LE DOMAINE
PROPRE DU DROIT COMMERCIAL. AUJOURD’HUI, LE DROIT COMMERCIAL EST DEVENU LE DROIT
ECONOMIQUE CAR SON CHAMP D’APPLICATION A ETE ETENDU A DES ACTIVITES ECONOMIQUES NON-
COMMERÇANTES.
UNE APPROCHE SUBJECTIVE TRADITIONNELLE TENANT AUX PERSONNES SE CONJUGUE AVEC UNE
APPROCHE OBJECTIVE PLUS REALISTE, REGISSANT LES ACTES, LES BIENS ET LES INSTITUTIONS.

B. Droit commercial et droit privé : De l’unité à la pluralité du droit privé

Cette question de l’autonomie du droit commercial se pose par rapport à son articulation avec la
matière civile. Un débat oppose les partisans de la thèse de l’autonomie du droit commercial, aux
partisans de la thèse de l’unité du droit privé.

Est-il un droit indépendant des règles du droit civil ?


 La théorie de l’unité du droit Privé :
Les partisans de cette thèse optent pour la fusion entre le droit civil et le droit commercial voire
l’intégration de ce dernier dans le droit civil 6. En effet, avant la promulgation du code de commerce
et en l’absence de règles commerciales, les commerçants avaient recours aux principes généraux
du droit civil.
Par ailleurs, il est à souligner que certains pays, n’établissent pas de distinction entre le droit civil
et le droit commercial, c’est le cas des Etats-Unis, et de l’Angleterre par exemple.
Enfin, certaines activités ne sont plus réservées aux seuls commerçants, tels que les activités de
bourse ou de banque, la frontière entre les deux domaines s’estompe alors.

Le droit commercial devient d’ailleurs de plus en plus un droit formaliste comme le droit civil, d’où
l’exigence de l’écrit pour la validité de certains actes (contrat de société, de vente de fonds de
commerce etc…).
 La théorie de l’autonomie du droit commercial :
Les règles commerciales doivent être plus souples que celles du droit civil, car elles doivent
s’adapter au monde des affaires qui connait sans cesse des changements.

6
De Juglart M. & Ippolito B., op.cit., p.28.
Il est à souligner que le droit commercial demeure attaché au droit civil ; qui constitue le droit
commun, le socle du droit. Il est donc difficile de séparer les deux disciplines bien que le droit
commercial demeure marqué par ses propres spécificités.

La question de savoir si le droit commercial a acquis son autonomie ou s’il demeure rattaché
au droit civil est désormais désuète. Certes, le droit commercial n’est pas autonome par
rapport au droit civil, car on en revient toujours aux règles du droit commun, on dit que le
droit civil est le droit-mère : lex specialia generalibus derogant ; et le droit civil de son
côté évolue il est de plus en plus influencé par le monde des affaires.

Toutefois, le droit commercial conserve son autonomie par rapport au droit civil car c’est un
droit spécial. Le droit commercial a ses propres spécificités qui le distinguent du droit civil.
Les causes de cette émancipation sont liées aux besoins spécifiques du droit commercial qui est
un droit très attaché à : la rapidité et à la sécurité.

-Nécessité de sécurité : Les transactions effectuées en matière commerciale ne doivent pas


être contestées. Et les paiements ne doivent pas être menacés. Afin de favoriser le
développement des opérations commerciales, de se détacher du formalisme du droit civil, et
d’accorder aux créanciers en contre partie du crédit qu’ils donnent une certaine sécurité ; des
principes de droit commercial ont été consacrés par le législateur à cet effet (présomption de
solidarité, chambre commerciale et procédures collectives).

-Nécessité de rapidité : Le droit civil jugé comme trop formaliste et trop long a inspiré la mise
en place de règles et de procédures propres plus rapides. En raison de la fréquence et de la
rapidité des rapports commerciaux qui naissent entre les professionnels, les partenaires font
souvent recours à des moyens simples qui leur permettent de traiter sans retard, tels que les
emails, le commerce électronique etc… La rapidité des transactions, a engendré la nécessité
d’élaborer certaines règles régissant les relations commerciales, il en découle ce qui suit (La
Liberté de preuve, le régime de prescription, la technique de l’arbitrage, etc.)

§2- Les spécificités du droit commercial :

Quelles sont les spécificités du droit commercial ?


Les exigences de rapidité et de sécurité entrainent des conséquences particulières : du point de
vue des règles de preuve et de fond (la capacité juridique est différente, la solidarité est
présumée, le principe de la liberté de la preuve est essentiel) (A) ; et des particularités du point
de vue juridictionnel (une juridiction propre, des modes alternatifs de résolution des litiges, des
procédures collectives) (B).

A. Les particularités en matière des règles:


Nous verrons le principe de la liberté de la preuve (1) ; la présomption de solidarité (2) et la
prescription (3).
1. Le principe de la liberté de la preuve :

En matière commerciale la preuve est libre, la preuve par tout moyen est admise. En effet, l’article
598 C.Com dispose : « Les engagements commerciaux se constatent : par acte authentique, par
acte sous seing privé, par le bordereau ou arrêté d’un agent ou courtier dûment signé par les
parties, par une facture acceptée, par la correspondance, par les livres des parties, par la preuve
testimoniale et par présomption dans le cas où le tribunal croira devoir les admettre.
Le tout sauf les exceptions établies par la loi ».

Ainsi, le principe de la preuve en matière commerciale déroge au droit commun, en droit civil l’écrit
est exigé lorsque la valeur de l’acte dépasse la somme de mille dinars (1000D) 473/474 C.O.C. 7.

Toutefois, ce principe de la liberté de la preuve connaît des exceptions :


L’article 3 al.1er C.S.C. exige l’écrit pour la validité du contrat de société.
L’article 190 C. Com. exige l’écrit pour la vente ou la promesse de vente du fonds de commerce (ces
articles exigent l’écrit à peine de nullité).

2. La présomption de solidarité :
Qu’est-ce-que la solidarité ? La solidarité implique l’existence d’une créance dont le paiement peut
être demandé dans sa totalité à n’importe quels codébiteurs solidairement tenus de la dette.

Contrairement au droit civil, en droit commercial, la solidarité est présumée. L’article 175 C.O.C.
dispose : « La solidarité est de droit dans les obligations contractées entre commerçants, pour
affaires de commerce, si le contraire n'est exprimé par le titre constitutif de l'obligation ou par
la loi ». Entre commerçants la solidarité « est de droit ». Celui qui a payé a le droit d’agir contre
les autres débiteurs solidaires pour se faire rembourser.

3. Le régime de la prescription en matière commerciale :

La prescription est le mode d’extinction de l’action en justice lorsqu’aucune action n’a été intentée
dans les délais prévus par la loi8.

En principe en droit commun, les actions se prescrivent par 15 ans (article 402 C.O.C). En droit
commercial, ce délai est abrégé pour certaines opérations, ce délai varie entre 1 et 15 ans (Voir
art. 403/404/406 et 410 C.O.C.).

B. Les particularités du point de vue juridictionnel

Nous verrons : la chambre commerciale (1) ; les procédures collectives (2) et l’arbitrage commercial
(3).

1. La chambre commerciale :

La loi du 2/5/19959 a institué des chambres commerciales au sein des tribunaux de première
instance compétentes pour trancher les litiges en matière commerciale. Cette loi est venue
modifier l’article 40 du code de procédures civiles et commerciales.
Le législateur tunisien a opté pour la technique dite de l’échevinage, en effet, la chambre
commerciale est composée à la fois de commerçants et de juges 10. Cette technique est inspirée du
droit Allemand, elle permet de soumettre les litiges commerciaux à des magistrats professionnels
et à des commerçants. Les commerçants exercent leur fonction gratuitement et n’ont qu’une
fonction consultative.

2. Les procédures collectives :

En matière civile, lorsqu’un débiteur ne peut plus payer ses dettes on dit qu’il est en état de
« déconfiture », les créanciers peuvent agir en justice pour obtenir le paiement de leurs dettes :

7
Art. 474 C.O.C. modifié par la loi n° 57-2000 du 13 juin 2000 portant modification du C.O.C.
8
Vocabulaire juridique Henri Capitant, par Cornu G.
9
Loi 95-43 du 2/5/1995, les chambres commerciales sont créées par décret, elles seront composées par deux commerçants
pour une période de trois ans, avec un avis consultatif, V° art. 40 Nv. CPCC.
10
Pour de plus amples détails sur la désignation des juges et la composition des chambres, veuillez consulter : Dahdouh Ch-
L. et Dahdouh H., op.cit., p.81 et svts.
celui qui assigne le premier le débiteur a plus de chances d’être payé en exerçant ses droits sur
ses biens personnels (on parle de course au paiement).
En matière commerciale, la procédure est dite collective : Avant la cessation des paiements du
débiteur une procédure de règlement amiable est aménagée par la loi n°2016/36 du 29 aout 2016
relative aux procédures collectives. La procédure du règlement judiciaire s’ouvre sur simple
demande formulée par le créancier à partir du moment où le débiteur a été déclaré en état de
cessation des paiements.
En cas d’échec de cette procédure judiciaire, le débiteur sera considéré comme failli et c’est la
procédure de faillite qui sera ouverte à son encontre : il s’agit du regroupement des créanciers en
une procédure collective et qui agissent ensemble pour recouvrer leurs créances, de se faire payer
sur les biens du débiteur failli. Ces procédures de recouvrement des créances sont propres au
droit commercial.

3. L’arbitrage commercial :

L’arbitrage est un procédé privé de règlement des litiges, qui consiste à porter le différend devant
une ou plusieurs personnes que les parties choisissent comme juges en vertu d’une convention
d’arbitrage. Cette convention peut avoir deux formes :

Elle peut prendre la forme d’une clause compromissoire, clause figurant dans un contrat et
prévoyant de soumettre les litiges qui pourraient survenir au tribunal arbitral.
Elle peut également prendre la forme d’un compromis qui interviendra après la survenance du litige.

L’arbitre ou le collège arbitral rend une sentence arbitrale contenant une décision permettant de
mettre fin au litige.
Le recours à l’arbitrage est fréquent en matière commerciale et particulièrement en matière de
commerce International.

Annonce plan :
Il faut d’abord identifier les critères de commercialité (Partie 1) pour ensuite étudier le
support de cette activité commerciale : Le fonds de commerce (Partie 2).

Plan :

Partie 1 – LA COMMERCIALITE

Titre 1 – LA COMMERCIALTE PAR L’ACTIVITE

Chapitre 1- Les différents actes de commerce


Chapitre 2 – Les actes mixtes

Titre 2 – LA COMMERCIALITE PAR LA QUALITE DE LA PERSONNE

Chapitre 1 – Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie


Chapitre 2 – La qualité de commerçant
Chapitre 3 – Les obligations du commerçant

Partie 2 – L’ACTIVITE COMMERCIALE


Titre 1 – LE FDC : LE SUPPORT DE L’ACTIVITE COMMERCIALE
Chapitre 1 – La clientèle
Chapitre 2- Le droit au bail

Titre 2 – LE FDC : UNE VALEUR ECONOMIQUE

Chapitre 1 – La vente
Chapitre 2 – La location-gérance
Chapitre 3 – Le nantissement

Travaux dirigés :

Thème 1. Les spécificités du droit commercial (1 séance).


Thème 2. Les actes de commerce (2 séances)
Exercices :
-Commentaire de l’article 2 du Code de commerce
-Les actes de commerce par la forme (Dissertation).
Thème 3. Les commerçants (2 séances)
Exercices :
-Commentaire de l’article 16 de L. 2018/52
-Consultation relative à l’article 40 CPCC.
Thème 4. Le FDC
-Clientèle (2séances) : Séance théorique et commentaire arrêt.
-Droit au bail (2séances) : Commentaire de l’article 1er Loi 1977 et commentaire d’arrêt.
PREMIÈRE PARTIE - LA COMMERCIALITE

Pour déterminer le domaine de l’activité commerciale il faut une délimitation des frontières de la
commercialité. C’est-à-dire, une délimitation de ce qui est commercial et de ce qui est soumis au
droit commercial. Or, la qualité de commerçant sans activité habituelle donc sans acte de
commerce ne signifie rien. De même, l’acte de commerce isolé ne permet pas en principe d’appliquer
à une personne un corps de règles dérogatoires du droit commun.
La commercialité résulte donc à la fois de l’activité (Titre 1) et de la qualité de la personne (Titre
2).

Titre 1 : LA COMMERCIALITE PAR L’ACTIVITE

La commercialité par l’activité suppose l’accomplissement d’un ou plusieurs actes de commerce. Les
actes de commerce sont nombreux et se distinguent des actes civils. La notion d’actes de commerce
n’a pas fait l’objet d’une définition légale, cependant le Code de commerce contient une énumération
des différents actes (article 1 à 4 du CC) (Chapitre 1).
A côté des actes de commerce et des actes civils il existe une catégorie intermédiaire : les actes
mixtes. Cette situation particulière conduit à une spécificité des solutions (Chapitre 2).

Chapitre 1 : Les différents actes de commerce

Le législateur considère comme actes de commerce, les activités qui sont accomplies par les
commerçants et qui de par leur nature sont commerciales (Section1), ou celles qui ne le sont pas
par nature mais qui le deviennent à titre accessoire parce que le commerçant les accomplit lors de
l’exercice de son activité (Section 2). D’autres actes sont réputés commerciaux en raison de leur
forme (Section 3).

Section 1 : Les actes de commerce par nature (ou par l’objet)

L’article 2 du Code de commerce donne une liste non exhaustive (non complète) des actes
considérés comme des actes de commerce par nature :
« Est commerçant, quiconque, à titre professionnel, procède à des actes de production, circulation,
spéculation, entremise, sous réserve des exceptions prévues par la loi.
Notamment, est commerçant, quiconque, à titre professionnel, procède :

 à l'extraction des matières premières ;


 à la fabrication et à la transformation des produits manufacturés ;
 à l'achat et à la vente ou à la location des biens quels qu'ils soient ;
 à des opérations d'entrepôt ou de gestion de magasins généraux ;
 au transport terrestre, maritime et aérien des biens et des personnes ;
 à des opérations d'assurance terrestre, maritime et aérienne, quelles qu'en soient les
modalités ;
 à des opérations de change, de banque ou de bourse ;
 à des opérations de commission, de courtage ;
 à l'exploitation d'agences d'affaires ;
 à l'exploitation d'entreprises de spectacles publics ;
 à l'exploitation des entreprises de publicité, d'édition, de communication ou de
transmission de nouvelles et renseignements.

Toutefois n'est pas commerçant, quiconque exerce une profession agricole dans la mesure où
l'intéressé ne fait que transformer et vendre les produits de son fonds ».

Ainsi il ressort de cet article que de nombreux actes de commerce ne sont pas visés par cet article,
par ailleurs, il ressort également de cet article qu’un certain nombre d’activités sont exclues du
domaine du droit commercial. Ainsi, nous verrons : le principe de commercialité (§1) et les
exceptions au principe de commercialité (§2).

§1. Le principe de la commercialité :


D’après l’alinéa premier de l’article 2 du Code de commerce susvisé, tout acte de production, de
circulation, de spéculation et d’entremise constitue un acte de commerce.

Attention : Pour que ces actes soient qualifiés d’actes de commerce, il faut qu’ils soient
effectués à titre professionnel.

A- Les actes de production :

De manière générale le terme produire vise la création d’une richesse économique qu’elle soit
matérielle (marchandise) ou immatérielle (la fourniture de services). La production ainsi définie se
distingue de la consommation et de la distribution (ex. métallurgie, industrie pharmaceutique,
activités d’édition, etc.).

Cependant, il convient de souligner que toute activité de production, n’est pas nécessairement une
activité commerciale, telles que par exemple les productions littéraires et artistiques.

Le législateur cite à l’article 2 du C Com, un certain nombre d’activités de production, il en est ainsi
par exemple : de l’extraction de matière première, de la fabrication et de la transformation des
produits manufacturés, l’exploitation d’entreprise de spectacle public, d’édition de publicité et
d’information.
B - Les actes de circulation :

Au sens économique du terme, la circulation signifie le mouvement des richesses, ce mouvement


s’opère par des échanges ou des transactions. Ce critère combiné avec celui de l’entremise a été
proposé par Thaller11, comme critère de la commercialité.

L’article 2 prévoit un certain nombre d’activité de circulation, on cite à titre d’exemple : les
opérations d’entrepôt ou de gestion de magasins généraux, le transport des biens et des personnes,
etc.

11
E. Thaller, Traité de droit commercial, 1898, Hachette.
C- Les actes de spéculation :

La signification du mot « spéculation » a connu une évolution à travers les temps. Ce terme vise
l’opération financière ou commerciale (on parle par exemple de spéculation financière dans le
secteur boursier, qui consiste à profiter des fluctuations sur marché pour réaliser un bénéfice).

La spéculation constitue le fondement même de la commercialité. L’intention de réaliser un


bénéfice est à la base de tout acte de commerce. Tous les actes de commerce sont des actes
de spéculation. D’ailleurs, c’est ce qui distingue les activités commerciales des activités
désintéressées c'est-à-dire à but non lucratif.

Toutefois, l’article 2 du C Com vise les actes de spéculation comme des actes de commerce en eux-
mêmes, comme tout autre acte de commerce par nature. On peut citer notamment : Achat vente
ou location des biens quels qu’ils soient ; les opérations de banque, de change ou de bourse 12 ; les
opérations d’assurance.

D - Les actes d’entremise13 :

Parmi les intermédiaires on peut citer : le courtier et le commissionnaire.


L’article 609 du C.Com. définit le contrat de courtage comme : « La convention par laquelle le
courtier s’engage à rechercher une personne pour la mettre en relation avec une autre en vue de
la conclusion d’un contrat ». Le courtier procède donc au rapprochement de deux personnes qui ne
se connaissent pas pour conclure une opération sans que le courtier n’y prenne part.
Quant à l’article 601 C.Com., il dispose : « Le contrat de commission est le mandat par lequel un
commerçant reçoit pouvoir d’agir en son propre nom pour le compte de son mandant, dit
commettant ».Le commissionnaire intervient alors dans l’opération qu’il accompli en son nom pour
le compte de la personne qu’il représente, il s’agit d’un mandat commercial rémunéré. Parmi les
opérations de commission on peut citer à titre d’exemple l’intermédiaire en bourse qui agit en son
nom et pour le compte de ses clients, le commissionnaire de douane ou « transitaire », etc.

§2 – Les exceptions au principe de commercialité

Le dernier alinéa de l’article 2 du Code de commerce exclue du domaine du droit commercial


l’activité agricole (A). Par ailleurs, outre le code de commerce d’autres textes prévoient que les
activités artisanales (B) et les professions libérales (C) ne sont pas des activités commerciales.

A - L’activité agricole

12
Les opérations de change consistent à acheter ou à vendre de la monnaie étrangère contre un prix fixé en monnaie
nationale. Les opérations de banque consistent à recevoir des fonds du public sous forme de dépôt ou autrement et à les
prêtés moyennant un bénéfice. Les opérations de bourse sont des transactions et des négociations portant sur les valeurs
mobilières, elles sont effectuées par des intermédiaires en bourse en leurs noms et pour leur le compte de leurs clients
(se sont des commerçants personnes physiques ou morales.)
13
S’entremettre c’est jouer le rôle d’intermédiaire, entre le producteur et le consommateur afin de favoriser la conclusion
de certaines opérations. Ces intermédiaires sont considérés comme commerçants.
C’est le cas du commerce de distribution, par exemple, le grossiste est un intermédiaire entre l’industriel et le détaillant
qui est lui-même intermédiaire entre le grossiste et le consommateur. Cependant, ce critère de commercialité n’est pas
suffisant, l’entremise n’est commerciale que lorsqu’elle est spéculative.
Le dernier alinéa de l’article 2 du Code de commerce dispose : « n’est pas commerçant, quiconque
exerce une profession agricole dans la mesure où l’intéressé ne fait que transformer et vendre les
produits de son fonds ».

Cette activité consiste à extraire les produits du fonds de l’agriculteur, cette activité est civile
quel que soit la technique utilisée et peu importe que l’exploitant soit propriétaire de la terre ou
locataire, il en est ainsi de l’agriculteur qui transforme les olives qui proviennent de son fonds en
huile d’olive.

Mais, si l’agriculteur se contente d’acheter des produits en vue de les revendre sans qu’ils ne
proviennent de son propre fonds, l’activité est alors commerciale, par exemple : l’agriculteur qui
achète des olives et les mets en boites en vue de les revendre, accompli une activité commerciale.

Le législateur tunisien rattache les activités d’élevage et de pêche à l’activité agricole.

Le pêcheur exploite les fonds marins comme l’agriculteur exploite la terre. Mais, il faut distinguer
la pêche des activités assimilées telles que les producteurs de conserves de sardine ou de thon,
qui représentent des activités commerciales.

Pour l’activité d’élevage, que les animaux soient nourris avec les produits du sol ou qu’il s’agisse
d’élevage industriel, l’activité doit être soumise au même régime que l’activité agricole, car le
législateur tunisien ne distingue pas entre élevage traditionnel et élevage industriel.

B. L’activité artisanale

L’article 16 de la loi n° 15-2005 du 16/2/2005 relative à l’organisation du secteur des métiers 14


dispose : « Au sens de la présente loi, s’entend par artisanat, toutes les activités de production,
de transformation ou de réparation essentiellement manuelles et qui répondent à des besoins
utilitaires, fonctionnels ou de décoration portant un aspect artistique et culturel inspiré de
l’identité et du patrimoine national. »

Ainsi, les revenus de l’artisan proviennent essentiellement de son travail manuel et il ne spécule
(considérations de gain d’argent) ni sur le travail d’autrui (nombre réduit de salariés) ni sur les
matières premières ni sur les machines.

Il est à souligner que l’activité d’artisanat peut être exercée sous forme de SARL pour les
entreprises de métiers. Toutefois la loi exclue de manière expresse à l’alinéa 2 de l’article 5
l’exercice de cette activité sous la forme de société anonyme, car cette forme convient surtout
pour les grandes entreprises.

Quoique soumise au droit civil le statut de l’activité artisanale tend à s’aligner sur celui de l’activité
commerciale. Ainsi, l’artisan bénéficie du droit au renouvellement 15, il bénéficie aussi des crédits
prévus pour aider les petites entreprises et peut bénéficier des règles régissant le redressement
des entreprises en difficulté16.

C - Les professions libérales

14
JORT n° 14 du 18/2/2005, p. 420 à 423.
15
L’article 1er de la loi du 25/5/1977.
16
Loi n°2016/36, relative aux procédures collectives.
Les professions libérales se distinguent des activités commerciales car elles revêtent un caractère
intellectuel.

La rémunération se fait sous forme d’honoraires. Car, l’exercice d’une profession libérale, n’a pas
pour finalité la recherche du profit, la considération de la personne est en effet, essentielle.

Nous pouvons citer notamment : le médecin, l’avocat, le notaire, l’architecte, l’expert-comptable


etc…,

Pour les activités littéraires et artistiques, elles relèvent également du domaine civil. Les écrivains,
les sculpteurs, les peintres les musiciens exercent en effet une activité libérale.

Ces professions sont régies par des textes particuliers et par le droit commun.

Section 2 : Les actes de commerce par accessoire (ou par relation)

Les actes de commerce par accessoire sont des actes à priori civils par nature, mais qui sont
qualifiés d’actes de commerce parce que passés par des commerçants pour les besoins de leur
commerce. Il convient de délimiter le domaine de la théorie de l’accessoire (§1), puis d’étudier les
limites de la théorie de l’accessoire (§2).

§1- La théorie de l’accessoire


L’alinéa 2 de l’article 4 du code de commerce dispose : « Sont présumés accessoires, sauf preuve
contraire, les faits et actes accomplis par un commerçant, tel qu’il a été défini à l’article 2 ». Le
législateur prévoit donc une présomption (simple) de commercialité des actes accomplis par un
commerçant pour les besoins de son commerce.
La règle est que les actes accomplis par un commerçant à l’occasion de l’exercice de son activité
sont des actes de commerce, la nature ou l’objet de l’acte est civil, mais il devient commercial parce
qu’il est fait par un commerçant dans le cadre de sa profession, il en est l’accessoire. Par exemple :
un distributeur en produits alimentaires achète un camion pour transporter ses produits en vue de
leur revente, l’acte d’achat du camion est civil, mais il devient commercial parce qu’il est fait par
un commerçant pour les besoins de son commerce.
Il s’agit de la théorie de l’accessoire selon laquelle l’accessoire suit le principal : accessorium
sequitur principal. La théorie de l’accessoire trouve sa raison d’être, dans la nécessité de supprimer
les difficultés nées de la distinction des actes de commerce et des actes civils, et de regrouper
les actions d’un même commerçant devant une même juridiction, la chambre commerciale du
tribunal de première instance territorialement compétent.
§2 - Les limites à la théorie de l’accessoire :

L’acte accompli doit concerner le commerce, c’est ainsi que seront exclus les contrats étrangers
au commerce, comme ceux relatifs à la vie familiale du commerçant (achat d’une voiture pour des
besoins domestiques, contracter une assurance vie, d’achat de vêtements ou de produits
alimentaires etc…). L’acte est présumé commercial jusqu’à preuve contraire (présomption simple),
c’est à celui qui invoque le caractère civil de l’acte de prouver qu’il n’a pas été fait pour les besoins
du commerce et qu’il est seulement relatif à l’activité civile du commerçant.

Attention : la théorie de l’accessoire s’applique uniquement pour les actes accomplis par un
commerçant dans le cadre de son activité, mais ne peut valoir pour les actes de commerce par la
forme qui ne peuvent jamais conférer la qualité de commerçant ou le qualificatif de commercial
a un acte. Par exemple, l’activité civile d’une société commerciale par la forme ne pourra devenir
commerciale par application de la théorie de l’accessoire.

Section 3 - Les actes de commerce par la forme

C’est la forme utilisée et non la nature ou l’objet de l’acte qui va déterminer la commercialité. Les
actes de commerce par la forme ont toujours un caractère commercial, quel que soit l’objet et le
but de l’acte et quelle que soit la personne qui les accomplis, même si c’est un non-commerçant. Il
s’agit des sociétés par actions et des sociétés à responsabilité limitée (§1) et de la lettre de
change (§2).

§1 - Les sociétés commerciales par la forme


La nature d’une société dépend de sa forme et de son objet. Ainsi, une société dont l’objet porte
sur des immeubles est une société civile et une société dont l’objet est commercial est
commerciale.
La commercialité par la forme concerne les sociétés de capitaux et les sociétés à responsabilité
limitée, mais ne concerne pas les sociétés de personnes. En effet, l’article 7 alinéa 2 du C.S.C.
dispose : «Sont commerciales par la forme et quel que soit l’objet de leur activité, les sociétés en
commandites par action, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés anonymes. »

Cependant, l’article 4 du C.Com. consacrant la commercialité par accessoire ne renvoie pas à


l’article 7 C.S.C. relatif à la commercialité par la forme, en d’autres termes les actes passés par
une société commerciale par la forme ayant un objet civil ne peuvent être considérés comme des
actes de commerce par accessoire.

§2 - La lettre de change

Nous allons définir la lettre de change (A) puis, nous verrons le mécanisme (B) et le mode de
circulation de la lettre de change (C).

A. Définition
L’alinéa 1er de l’article 269 C.Com dispose : « La loi répute acte de commerce entre toute personne,
la lettre de change »17.

C’est un effet de commerce, définit comme un écrit par lequel une personne, le tireur
(créancier) donne l’ordre à une autre personne, le tiré (débiteur) de payer une somme
déterminée à l’ordre d’une tierce personne, appelée bénéficiaire ou porteur (le créancier, le
tireur lui-même ou une banque par exemple).
Cet écrit prend une forme particulière dans la mesure où le législateur détermine les mentions
que doit contenir une lettre de change à peine de nullité.

17
Vu l’absence de textes similaires, on ne peut considérer que les autres effets de commerce sont des actes de commerce
par la forme (billet à ordre, warrant), par conséquent on leur applique la commercialité par accessoire.
Ces mentions sont prévues à l’article 269 c.com, il s’agit de : la dénomination, l’ordre de payer,
la date d’émission, le lieu d’émission, l’échéance, le montant, la monnaie de paiement, le lieu de
paiement, la signature du tireur.

D’une façon générale, toute personne qui signe une lettre de change accomplit un acte de commerce
et s’oblige dans les conditions du droit commercial, elle est soumise à la compétence des chambres
commerciales en cas de litige.
Mais, la présomption légale (irréfragable) suivant laquelle la lettre de change est un acte de
commerce, n’implique pas que le fait de signer habituellement des lettres de change confère la
qualité de commerçant.

C’est un effet de commerce, il s’agit d’un titre négociable qui constate l’existence d’une créance
de somme d’argent, à court terme d’une personne à l’égard d’une autre. La négociabilité du titre
implique la transmissibilité et la cessibilité du titre, selon des procédés simplifiés du droit
commercial.

C’est également un instrument de crédit à court terme représentant des caractéristiques qui
permettent de la distinguer d’autres titres similaires, la création et la circulation de la lettre de
change obéit à des principes posés par les textes régissant les effets de commerce appelé : droit
cambiaire.
C’est enfin, un instrument de paiement : en effet le but de tout instrument de crédit, outre celui
de réaliser un crédit, il permet aussi d’assurer le paiement d’une dette, il s’agit d’exécuter une
obligation de payer une somme d’argent.

B. Le mécanisme

Le mécanisme répond aux principes du droit cambiaire :

-Le principe du formalisme cambiaire : une lettre de change n’est valable que si elle est rédigée
par un écrit contenant toutes les mentions obligatoires requises par la loi, le titre ne contenant
pas ces mentions ne vaut pas comme une lettre de change, c'est-à-dire comme un titre cambiaire.
-Le principe de la solidarité cambiaire : signifie que toute personne ayant apposé sa signature
sur le titre est solidairement tenue avec les autres de son paiement.
-Le principe de l’inopposabilité des exceptions : l’obligation cambiaire est une obligation
abstraite, c'est-à-dire que le titre donne naissance à une obligation indépendante du rapport
fondamental qui lui a donné naissance. L’effet de commerce se suffit à lui-même, c'est-à-dire que
l’obligation des différents signataires doit être exécutée sans avoir à rechercher les causes qui
lui ont donné naissance. Les exceptions tirées des rapports personnels des signataires ne sont
pas opposables au porteur de bonne foi.

C. L’émission et la circulation
Pour que la créance du tireur sur le tiré constitue une provision, il faut que celle-ci ait une cause
licite, qu’elle constate une somme d’argent, et qu’elle soit disponible exigible et fixe. La propriété
de la provision est transmise de droit aux porteurs successifs de la lettre de change à condition
que le titre soit valable en tant que lettre de change et que la provision soit régulièrement
constituée.
L’acceptation doit émaner du tiré (débiteur) et être écrite sur le titre lui-même (Art 283 §1 CCom).
Elle ne peut être conditionnée, elle doit être pure et simple. Une fois donnée l’acceptation est
irrévocable.
Une personne (endosseur) peut endosser la lettre de change, en apposant sa signature au verso du
titre. Par cette signature il permet de transférer la propriété du titre au nouveau porteur.
L’endossement transfère la propriété de la provision aux porteurs successifs de la lettre de
change.

Chapitre 2 : Les actes mixtes

Les actes mixtes sont ceux qui présentent un caractère commercial pour une partie et un caractère
civil pour l’autre partie. Par exemple : un distributeur qui achète du blé à un fournisseur, le
transforme en farine et le revend à un consommateur. Pour le distributeur, il y a achat en vue de
la revente et l’acte est alors commercial. Mais, pour le consommateur il s’agit d’un acte civil. Le
problème posé par ces actes c’est celui de savoir à quel régime sont-ils soumis en cas de litige ?
Aucun texte en droit tunisien ne répond à cette interrogation.

La solution proposée par la doctrine consiste à appliquer les règles de droit civil à la partie à l’égard
de qui l’acte est civil et les règles du droit commercial à la partie à l’égard de qui l’acte est
commercial.

Ainsi, en matière de preuve, chacun des partenaires se voit appliquer ses propres règles : Si l’action
est dirigée contre un commerçant se sont les moyens de preuve admis en matière commerciale qui
seront pris en considération : preuve libre, preuve par tout moyen. Si l’action est dirigée contre un
non-commerçant, la preuve suit es règles du droit civil. En droit civil l’écrit est exigé lorsque la
valeur de l’acte dépasse la somme de mille dinars (1000D) 473/474 C.O.C. 18.

Quel tribunal est compétent ?


L’article 40 al. 4 et 5 nouveaux du CPCC dispose : « Est considérée commerciale en vertu du présent
article, toute action relative à un litige entre commerçants en ce qui concerne leur activité
commerciale ». Selon la doctrine le texte paraît restrictif les litiges concernant des actes mixtes
devraient donc rester en dehors de la compétence de la chambre commerciale.

18
Art. 474 C.O.C. modifié par la loi n° 57-2000 du 13 juin 2000 portant modification du C.O.C.
Titre 2 : LA COMMERCIALITE PAR LA QUALITE DE
LA PERSONNE

Le commerçant peut être une personne physique ou une personne morale. Il se distingue du non
commerçant, en raison du statut particulier que lui réserve le législateur. Les personnes morales
exerçant le commerce sont soumises à un régime juridique faisant l’objet d’un droit particulier
celui des sociétés commerciales et des groupements 19. Le commerçant exerce alors son activité
individuellement, son entreprise est dite : entreprise individuelle, il peut aussi exercer sous forme
sociétaire (SUARL). Nous nous attarderons dans ce titre sur le développement du statut du
commerçant personne physique.

Les développements porteront d’abord sur : Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie


(Chapitre 1), ensuite les conditions d’acquisition du statut de commerçant (Chapitre 2) et enfin
les conséquences d’acquisition de cette qualité à savoir les obligations mises à la charge du
commerçant (Chapitre 3).

Chapitre 1 : La liberté du commerce et de l’industrie

Dans une économie libérale l’accès à la profession commerciale est en principe libre. Le principe
de la liberté du commerce et de l’industrie est en effet, reconnu dans plusieurs pays 20 (Section
1). Toutefois, cette liberté n’est pas sans limites, l’évolution économique et l’intervention des
pouvoirs publics dans l’économie, tend à tracer les limites (Section 2).

Section 1 - Le principe de la liberté du commerce et de l’industrie

La constitution tunisienne de 1959 n’énonce pas ce principe dans le cadre de l’article 8 relatif aux
libertés publiques, l’article 14 reconnaît et garantit le droit de propriété, mais pas le principe de
la liberté du commerce et de l’industrie. La constitution de la république tunisienne de 2014,
prévoit dans son article 40 que : « le travail est une droit pour chaque citoyen et citoyenne….. ».

Par ailleurs, l’article 5 C.Com. dispose que : « toute personne capable de s’obliger peut exercer le
commerce ». Ainsi, la capacité est une condition nécessaire et suffisante pour exercer le
commerce. L’article 5 exige la capacité commerciale et consacre la liberté du commerce.
Et l’article 1er de la loi n° 2009-69 du 12/8/2009, relative au commerce de distribution prévoit
expressément ce principe en effet il énonce que : « La présente loi fixe les règles régissant
l’exercice des activités du commerce de distribution en vertu desquelles la liberté constitue le
principe et l’autorisation constitue l’exception ».

19
V° Dahdouh H. et Dahdouh Ch.-L., Droit commercial, Volume 2, Tome 1, Entreprises sociétaires, Règles communes et Tome
2, Groupements, éd. INE, 2003 ; Mellouli S. et Frikha S., Les sociétés commerciales, Impression IME, éd.2008.
20
En France, ce principe date de 1791 : Décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791 : « A compter du 1er avril prochain, il sera
libre à toute personne de faire tel négoce ou d’exercer telle profession, art ou métier qu’elle trouvera mais elle sera tenue
auparavant de se munir d’une patente ». Ce principe a été repris par la loi « Royer » du 27/12/1973 voir : Dekeuwer Défossez
F., op. cit., p. 133 et svts.
La liberté n’est toutefois pas absolue en raison de l’intervention de l’Etat dans l’économie de
plusieurs manières. L’Etat a le monopole de certaines activités, telle que l’industrie du tabac et des
allumettes, blé, pétrole, gaz, pharmacie centrale etc.

La nécessité de respecter les règles de concurrence (loi 2015/36) et la sanction de la concurrence


déloyale constitue à son tour une limite au principe 21.

Certaines autorisations sont par ailleurs requises pour l’exercice de quelques activités
commerciales, l’activité bancaire, l’assurance.

Pour d’autres activités dans le cadre du commerce de distribution par exemple ; le législateur a
expressément soumis les commerçants à l’obligation de respecter un cahier des charges établi par
arrêté du ministre du commerce. 22

Section 2- Les limites à la liberté d’exercer le commerce

Les limites à la liberté d’exercer le commerce sont principalement des limites d’ordre contractuel
et légal.

§1- Les limites contractuelles à la liberté d’exercer le commerce

Des restrictions peuvent être insérées dans les contrats, afin de satisfaire des intérêts divers
tels que par exemple l’intérêt de l’acheteur d’un fonds de commerce ou l’intérêt d’un locataire
gérant.

L’acheteur d’un fonds de commerce n’a pas intérêt à ce que le vendeur s’établisse à proximité du
fonds de commerce vendu, car en cas d’établissement à proximité, le vendeur conserverait la
clientèle qu’il est censé avoir cédé avec le fonds de commerce. C’est la raison pour laquelle,
l’acheteur peut insérer dans le contrat une clause qui interdit au vendeur d’exercer le même
commerce ou un commerce similaire (une clause de non-concurrence).

Dans les contrats de location-gérance de fonds de commerce, cette clause profite au locataire, et
interdit au propriétaire de lui faire concurrence.

Le problème se pose également dans les centres commerciaux, chaque locataire s’engage envers le
propriétaire à ne pas concurrencer les autres locataires. En contrepartie, chaque locataire
bénéficie de l’exclusivité pour le type de commerce qu’il exerce dans le centre commercial.

§2- Les limites légales à la liberté d’exercer le commerce

Il s’agit de limites23 qui tiennent essentiellement à la situation du commerçant telles que : les
incapacités (A), les incompatibilités (B) et les déchéances (C).

21
L’article 92 du code des obligations et des contrats
22
L’article 3 de la loi n° 2009-69 du 12/8/2009, relative au commerce de distribution, J.o.r.t n°65 du 14/8/2009, p.2349.
23
On cite à titre d’exemple le décret- loi n°61-41 du 3/8 /1961 relatif aux conditions d’exercice de certaines activités
commerciales par les étrangers, qui les soumet à une autorisation préalable du ministre du commerce : Voir article 2 du
décret –loi.
A. Les incapacités

L’article 5 C.Com dispose : « Toute personne capable de s’obliger peut exercer le commerce ».
Cette disposition pose le principe de la liberté pour toute personne capable d’exercer le commerce.
Elle pose aussi implicitement la limite à ce principe : une lecture a contrario nous permet de dire
que toute personne incapable ne peut pas exercer le commerce.

L’incapacité d’exercer le commerce tient à l’âge de la personne, elle peut aussi concerner son état
mental. Il existe alors deux catégories de personnes interdites d’accéder à la profession
commerciale : L’incapable mineur et l’incapable majeur. L’incapable mineur, c’est celui qui n’a pas
atteint l’âge de la majorité, l’article 5 C.O.C. prévoit que les mineurs de moins de 13 ans sont
incapables de contracter. L’article 6 C.O.C. ajoute que les mineurs de moins de 13 ans et
jusqu’à 18 ans non assistés et les interdits pour faiblesse d’esprit ou prodigalité et les
interdits pour insolvabilité ont une capacité limitée.

L’article 7 du C.O.C. prévoit que l’âge de la majorité est de 18 ans. Seul le majeur âgé de 18 ans
pourra alors exercer le commerce. Cependant, il y a des exigences relatives à l’émancipation et à
l’autorisation à prendre en compte. Seule l’émancipation absolue par le mariage permet au mineur
d’exercer le commerce sans recourir à l’autorisation du juge des tutelles, en effet l’article 153
alinéa 224 CSP prévoit que : « Le mineur devient majeur par le mariage s’il dépasse l’âge de 17ans
et ce quant à son statut personnel et à la gestion de ses affaires civiles et commerciales. ».

Toutefois, le mineur ne pourra exercer le commerce que par le biais de son représentant légal
dument autorisé par le juge des tutelles et si l’intérêt du mineur le justifie. Le mineur peut être
autorisé (par le juge), à exercer le commerce (art. 11 et 12 C.O.C.) il doit dans ce cas se conformer
aux limites prévues par l’autorisation accordée. (V° art. 153-157-158 C.S.P.). Les articles 11 et 12
du C.O.C. prévoient dans ce cas une précision quant à l’autorisation du juge. En effet, le législateur
a prévu que l’autorisation d’exercer le commerce peut être révoquée à tout moment pour motifs
graves.

Quant à l’incapable majeur, il s’agit du dément du faible d’esprit et du prodigue. Ces personnes
sont considérées incapables aux termes des articles 160 à 170 du CSP, elles ne peuvent donc
exercer le commerce, le droit commun leur est applicable. Cependant, le tuteur de l’incapable peut-
il exercer le commerce pour le compte de ce dernier ?
L’article 17 COC répond par l’affirmative, à condition qu’il soit autorisé par le juge des tutelles, qui
ne donne pareille autorisation que si l’exercice du commerce a une utilité évidente pour l’incapable.

B. Les incompatibilités

Il n’y a pas d’incompatibilité générale entre le commerce et les autres activités ou professions. Il
est donc permis d’être en même temps commerçant et agriculteur. En cas de cumul les créanciers
peuvent saisir tous les biens du débiteur même ceux qui ne sont pas affectés à l’exercice du
commerce, Chaque personnalité juridique dispose d’un seul et unique patrimoine : C’est le
principe de l’unicité du patrimoine.

24
Loi n° 93-74 du 12/7/1993, portant modification du Code du statut personnel.
Certaines professions sont toutefois, incompatibles avec l’exercice du commerce, pour des raisons
qui tiennent à l’éthique de ces professions ou à la protection des personnes qui sont en relation
avec ces professions.

Il s’agit de la fonction publique : incompatibilité prévue à l’article 5 loi 12/12/1983 portant statut
du personnel de l’Etat et des collectivités publiques locales et les Etablissement Public à caractère
Administratif (ex. CNSS, …).
Les professions des agents, des officiers des Etablissements Publics à caractère Industriel et
Commercial (ex, théâtre municipal, Transtu, etc…) des sociétés dans lesquelles l’Etat ou une
collectivité publique locale détient directement ou indirectement le capital (art. 6 loi 5/8/1985).

Les incompatibilités se retrouvent aussi au niveau de la profession d’avocat, de magistrat, de


notaire, d’huissier, d’interprète assermenté, etc…

C. Les déchéances

Ce sont des sanctions attachées par la loi à la commission de certaines infractions pénales, mais
il faut noter, qu’il n’existe pas de texte en droit tunisien interdisant de manière absolue aux
personnes ayant fait l’objet d’une condamnation pénale d’exercer le commerce : Il s’agit d’une peine
complémentaire (art. 5 code pénal qui vise l’interdiction d’exercer les professions d’avocat,
médecin, notaire, officier public, sage-femme, etc.).

Le commerçant déclaré en faillite, ne peut plus exercer le commerce, en raison du dessaisissement


qui le frappe tant qu’il est en état de faillite ( à partir de sa date, le jugement déclaratif de faillite
dessaisit de plein droit le failli de l'administration et de la disposition de tous ses biens), par
application des articles 446 C.Com et suiv.. Cependant, le commerçant peut obtenir sa réhabilitation
conformément à certaines conditions prévues par la loi (581 à 586 C.Com.).

L’interdiction de gérer ou d’administrer une entreprise commerciale est prévue par l’article 20 de
la loi du 7/12/1967 relative à la profession bancaire, prévoit que nul ne peut diriger administrer,
gérer ou contrôler une banque ou même une agence de banque s’il a fait l’objet d’une condamnation
pour vol, fausse écriture ou abus de confiance, pour escroquerie, pour émission de chèques sans
provision.
Dans le même contexte la loi du 9/3/1992 25, portant promulgation du code des assurances prévoit
dans son article 85 que nul ne peut administrer, gérer contrôler ou engager une entreprise
d’assurances s’il a fait l’objet de condamnations.

Chapitre 2 – L’acquisition du statut de commerçant

Le législateur tunisien a défini le commerçant à l’article 2 C.Com, comme étant celui qui effectue à
titre professionnel des actes de commerce26.
Trois éléments essentiels sont nécessaires pour qu’une personne acquière la qualité de
commerçant :
* L’accomplissement d’actes de commerce (il faut avoir la capacité requise par la loi pour le faire).
* L’accomplissement de ces actes à titre professionnel.

25
Loi n°92-24 du 9/3/1 2 portant promulgation du code des assurances.
26
L’article 1er du C.Com français précise que : « sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font
leur profession habituelle ».
En plus de ces deux critères prévus à l’article 2, un troisième doit obligatoirement exister :
* L’accomplissement de ces actes en son nom et pour son propre compte.
Nous développerons dans le cadre de ce chapitre : L’accomplissement d’actes de commerce à titre
professionnel (Section 1) ; L’accomplissement de ces actes en son nom et pour son propre compte
(Section 2) et enfin, la preuve de la qualité de commerçant (Section 3).

Section 1- L’accomplissement d’actes de commerce à titre professionnel

Le législateur a conditionné l’acquisition de la qualité de commerçant par l’accomplissement d’actes


de commerce de manière habituelle (§1) et à titre professionnel (§2).

§1 - L’accomplissement d’actes de commerce à titre habituel

L’article 3 du C. Com dispose : « Est soumis aux lois et usages du commerce, quiconque, de manière
habituelle, procède aux opérations visées à l'article 2, en vue de réaliser un bénéfice.»

De quels actes de commerce s’agit-il ? Il s’agit des actes de commerce par nature cités à l’article
2 C.Com. Sont donc exclus les actes autres actes de commerce et notamment les actes de
commerce par accessoire. Puisque, ces derniers ne peuvent conférer la qualité de commerçant à
celui qui les accomplit27.

Ainsi, l’exercice du commerce doit se faire à titre habituel et non occasionnel. Il doit être répété
et constant. Une personne n’ayant exercé qu’un seul acte de commerce ne saurait être considérée
comme un professionnel et donc, comme un commerçant. Par exemple : La personne qui organise un
voyage unique pour un groupe de personnes, même s’il a été amené à conclure une série de contrats,
relatifs à ce voyage comme le transport, logement nourriture, etc. ne peut être qualifié de
commerçant. En revanche, certains particuliers spéculant habituellement en bourse ont pu être
qualifiés de commerçants.

Attention : L’acte de commerce ne peut être effectué que par un commerçant qui doit accomplir
des actes de commerce à titre habituel. Ainsi d’une part, est exigée pour la mise en œuvre des
règles du droit commercial, une répétition des actes de manière à en faire une profession.
L’accomplissement d’actes de commerce de manière isolée ne peut conférer la qualité de
commerçant.
D’autre part, le commerçant doit être animé par une volonté de spéculer, de réaliser un bénéfice
(Article 3 C. Com) en accomplissant cet acte de commerce.

§2 - L’exercice professionnel du commerce

27
Paris, 13 janv. 1976, JCP 1977 II. 1856, note Boitard.
L’habitude n’est pas suffisante à elle seule. Il est nécessaire que les actes de commerce soient
accomplis au titre d’une profession. Les articles 2 et 3 du C.Com sont donc complémentaires.

Par exemple : le fait de tirer, même habituellement, des lettres de change ne confère pas la qualité
de commerçant.

D’après Ripert et Roblot28 : « Exercer une profession c’est consacrer d’une façon principale et
habituelle son activité à l’accomplissement d’une certaine tâche dans le dessein d’en tirer un
profit.» La profession peut donc être définie comme le fait de tirer ses ressources ordinaires
et principales de l’exercice de l’activité commerciale (idée de spéculation – but lucratif).

Cette définition nous permet d’ajouter deux autres éléments à l’habitude, en effet, la profession
est exercée à titre principal et dans un but lucratif.

La profession est un état de droit (on parle alors de commerçant de droit), alors que l’habitude est
un état de fait (on parle de commerçant de fait), ce dernier état, engendre des obligations et non
des droits.

Cet état de fait, peut avoir lieu en dehors de la légalité, il en est ainsi de l’exercice clandestin ou
occulte du commerce (on entend souvent parler de commerce parallèle) ou encore l’exercice d’une
activité commerciale incompatible avec une autre profession (un étranger qui n’a pas le droit
d’exercer le commerce, un fonctionnaire public, etc.). L’habitude ne crée pas la profession, mais
elle peut soumettre son auteur aux lois et usages du commerce, donc aux rigueurs et sanctions du
droit commercial.

Section 2- L’exercice du commerce en son nom et pour son propre compte

Quand bien même elle n’a pas été prévue par le législateur, cette condition est nécessaire, car le
commerce suppose l’indépendance du commerçant. Le commerçant agit à ses risques et périls, il
s’engage personnellement en son nom et pour son propre compte. C’est la raison pour laquelle la
qualité de commerçant est incompatible avec celle de salarié et celle de mandataire.

L’article 6 du Code du Travail prévoit que le travailleur salarié est placé dans une situation de
subordination juridique vis-à-vis de son employeur. Dans ce cas le salarié ne peut être commerçant
parce qu’il n’exerce pas le commerce en son nom et pour son propre compte.

Par ailleurs, l’article 1104 du COC prévoit que le mandataire est celui qui reçoit mandat en vue d’agir
pour le compte du mandant et selon ses instructions. Sont ainsi, exclus de la qualité de commerçant,
les dirigeants sociaux qui agissent au nom et pour le compte d’une société ou encore les
mandataires, tels que les agents commerciaux qui représentent un commerçant.

28
Traité de Droit Commercial, Tomes 1 et 2.
Toutefois, certaines règles applicables aux commerçants leur sont étendues. Exemple : l’article
213 CSC prévoit que le Président Directeur Général de la société anonyme est considéré comme
commerçant. Cet article prévoit une fiction légale suivant laquelle le P.D.G. est commerçant, alors
qu’en réalité le P.D.G. n’effectue pas d’actes de commerce en son nom et pour son propre compte,
donc il n’a pas la qualité de commerçant. Mais la loi lui confère le statut de commerçant, il est donc
soumis aux lois et usages du commerce.
De même, le commissionnaire agit en son nom personnel et pour le compte de son client, pourtant
c’est un professionnel, auquel le législateur (articles 601 à 608 du C. Com) confère la qualité de
commerçant (mandataire commerçant).

Section 3- La preuve de la qualité de commerçant

Rappel : En matière commerciale la preuve est libre, la preuve par tout moyen est admise. En
effet, l’article 598 C.Com dispose : « Les engagements commerciaux se constatent : par acte
authentique, par acte sous seing privé, par le bordereau ou arrêté d’un agent ou courtier dûment
signé par les parties, par une facture acceptée, par la correspondance, par les livres des parties,
par la preuve testimoniale et par présomption dans le cas où le tribunal croira devoir les
admettre.

Le tout sauf les exceptions établies par la loi ».

La preuve de la qualité de commerçant peut être faite par tous les moyens :

Cette qualité peut être prouvée, par l’accomplissement d’actes de commerce à titre professionnel,
toute personne qui prétend être commerçant doit prouver la réunion des conditions prévues à
l’article 2 C.Com.

L’inscription au RNE29 constitue également une présomption suffisante pour prouver la qualité de
commerçant (sauf preuve contraire). Outre, l’immatriculation au registre, l’ouverture d’une
patente est aussi une preuve de la qualité de commerçant (loi 2018-52).

S’agissant d’un commerçant personne morale, l’écrit exigé à l’article 3 C.S.C. est un moyen de preuve
de l’existence de la personne morale.

29
Le registre National des Entreprises (RNE) remplace le système actuel du registre de commerce. La nouvelle loi 2018—
52 du 29 octobre 2018 est entrée en vigueur le 06 février 2019.

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