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Chapitre I 

: Evolution historique

Il sera question dans ce chapitre de traiter, dans un premier temps, de l’apparition du


droit commercial et de son affirmation, de sa consolidation puis de son dépassement. Ensuite,
nous tenterons de donner une définition du droit des affaires avant de distinguer ce champ
disciplinaire des autres matières juridiques et nous finirons par présenter les particularismes
de cette discipline.

I- De l’apparition au dépassement du droit commercial

Le droit commercial est passé par plusieurs étapes avant de donner naissance au droit
des affaires.

1- Apparition du droit commercial

Le droit commercial est né avec l’apparition des sociétés marchandes de l’Orient


méditerranéen de l’Antiquité. Et Les sources les plus anciennes sont l’œuvre des Babyloniens
et des Phéniciens. En effet, les premiers ont laissé des règles pour le commerce de terre
(relatées par les tablettes de Warka) ou gravées dans la pierre du code d’Hammourabi. Dans
ces documents, on trouve des éléments de droit bancaire (prêt à intérêt, contrat de dépôt,
contrat de société…). Quant aux seconds, grands navigateurs, ils établirent essentiellement
des règles pour le commerce maritime.

Ces règles et techniques anciennes ont été reprises et perfectionnées par les Grecs. Ainsi,
des règles ont été inventées en matière maritime (prêt nautique). Alors que chez les Romains,
le terme marchand qui dérive de Mercure : dieu des trafiquants et des voleurs reflète un
jugement défavorable à l’égard des gens exerçant le commerce.

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Cependant, l’origine véritable du droit commercial remonte au Moyen Âge qui s’est
caractérisé essentiellement par :

- Une accentuation des échanges commerciaux en Europe, notamment dans les grandes cités
maritimes d’Italie et des Flandres ;

- Dans les villes où se tenaient les foires les plus importantes, des usages propres au monde
des commerçants et des règles applicables aux transactions commerciales ont été établies et
les opérations de banque et de change ont été réglementées.

L’apparition du code commercial dans ces villes s’explique par le fait que le pouvoir
politique y était exercé par des marchands et des boutiquiers appelés « consuls ». Ils tenaient
le rôle de conseillers municipaux et de juges, d’où le nom de juridictions consulaires donné
aux premiers tribunaux de commerce. On note également la naissance de juridictions foraines
pour trancher rapidement les litiges naissant pendant une foire.

Mais, c’est au XVIème siècle que le droit commercial s’est affirmé en tant que
discipline indépendante avec les premières tentatives de codification : d’un droit oral
coutumier, le droit commercial devient un droit écrit.

2- Consolidation du droit commercialrtt

La Révolution de 1789 en France va ouvrir une ère de consolidation du droit


commercial. Le décret d’Allarde posant le principe de la liberté de commerce et d’industrie
(1791) ouvre la voie au libéralisme économique et au développement des affaires. Il a
également aboli les corporations.

Toutefois, la codification des textes existants en France a été vite dépassée par le
développement des activités économiques au XIXe siècle, liées à la révolution industrielle.
Par conséquent, des lois spéciales intéressant le monde des affaires ont commencé à voir le
jour: loi sur les brevets d’invention, loi sur le chèque, loi sur les sociétés anonymes, loi sur le
fonds de commerce, etc.). Cette tendance s’est poursuivie aboutissant à l’éclatement du droit
commercial.

3- Dépassement du droit commercial

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L’activité économique qui s’exerçait pendant longtemps dans le cadre du droit
commercial a commencé à se développer dans un cadre plus large. Ce qui va entrainer
l’autonomisation de certaines sous disciplines : droit bancaire, droit de propriété industrielle,
littéraire et artistique, droit de la concurrence, …

Par conséquent, une nouvelle appellation sera retenue pour désigner cet éventail de
plus en plus large de législations : c’est le droit des affaires.

II/ Tentative de définition

La substance du droit des affaires ne fait pas l’unanimité des auteurs, d’où l’existence
de définitions divergentes :

- Pour certains, l’appellation droit des affaires est remplacée par le droit commercial, mais
cette confusion ne peut être autorisée. Le droit commercial est un sous ensemble du droit des
affaires.

- Pour d’autres, le droit des affaires est défini comme l’ensemble des règles juridiques
applicables aux entreprises et à leurs activités économiques (production, distribution,
prestation de services). Mais cette définition est synonyme du droit des entreprises.

- D’autres confondent le droit des affaires avec le droit économique en ce sens qu’il édicte
des règles spéciales qui régissent les relations entre personnes exerçant une activité
économique par dérogation au droit civil qui a vocation à s’appliquer à toutes les personnes de
droit privé.

La définition que nous retiendrons est la suivante : « Le droit des affaires est
l’ensemble des règles juridiques applicables aux acteurs, aux activités et aux structures
du monde des affaires », c’est donc l’ensemble des règles juridiques qui régissent les
rapports juridiques qui s’établissent dans le cadre d’activités commerciales, financières,
industrielles…

III/ Distinction du droit des affaires des autres matières juridiques

Nous tenterons de faire la distinction du droit des affaires avec le droit civil, puis avec le
droit économique, ensuite avec le droit des entreprises et enfin avec le droit commercial.

1- Droit des affaires et droit civil

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Le droit des affaires est une branche du droit privé en ce qu’il règle principalement les
rapports entre les personnes privées (commerçants, associés, concurrents, sociétés, etc.), alors
que le droit civil régit les rapports entre les particuliers.

Dans le système juridique marocain, le droit civil est constitué :

- D.O.C qui constitue le droit commun pour toutes les branches du droit privé qui ne
prévoient pas une règle spéciale pour un cas donné ;

- Complété par le code de la famille qui régit le statut des personnes pour le mariage, la
filiation, le divorce, les successions…

Il est important de souligner que le droit des affaires peut influencer le droit civil dans
certains systèmes juridiques. Les institutions du droit des affaires sont de plus en plus
étendues aux activités civiles : à titre d’exemple, les professionnels civils doivent tenir une
comptabilité et le droit de redressement et de la liquidation s’applique aux artisans, aux
agriculteurs….

Il en résulte que le droit des affaires dont l’existence se justifie par les besoins spécifiques
du commerce, ne peut être envisagé indépendamment du droit civil. Et que le droit civil est
également influencé par le droit des affaires.

2- Droit des affaires et droit économique

Concernant le droit économique, nous pouvons dire que c’est le droit par lequel les
pouvoirs politiques interviennent pour réguler ou influencer l’économie du marché privé
(politique fiscale, contrôle des prix, protection du consommateur, droit de la concurrence…).
Il ne s’intéresse pas aux sociétés mais au marché.

3- Droit des affaires et droit de l’entreprise

Le domaine du droit de l’entreprise est plus restreint que celui du droit des affaires, et
souffre, en plus, du manque de précision de son objet (considérée comme un bien ? Comme
un acteur de la vie économique ? Désignant l’ensemble des formes juridiques d’exploitation
d’une activité économique, forme civile, commerciale, industrielle… ?)

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Le droit d’entreprise est un droit qui intègre l’ensemble des règles relatives à la création
de l’entreprise, aux personnes qu’elle emploie et à celles qui en assurent la gestion, à son
capital, à ses fournisseurs….

C’est dire que par son étendue, le droit des affaires dépasse largement le droit de
l’entreprise.

4- Droit des affaires et droit commercial

Le droit commercial régit les relations juridiques entre commerçants, personnes physiques
ou morales et entre les commerçants et les tiers dans le cadre de l’activité professionnelle des
premiers.

Le droit commercial marocain adopte les deux conceptions objective et subjective pour la
définition du champ du droit commercial :

Dans la conception subjective, le droit commercial a pour objet d’étude les rapports entre
les commerçants ; c’est alors un droit de professionnels en fonction de la personnalité qui
accomplit l’acte (commerçant ou non) ou qui appliquera ou pas le droit commercial.
L’évolution historique semble retenir cette conception.

Dans la conception objective, le droit commercial va s’appliquer à une activité, à des actes
déterminés :les actes de commerce.

Ce n ‘est pas la personnalité de l’auteur de l’acte, mais la nature de l’acte qui gouvernera
ou pas l’application du droit commercial. Le droit commercial devient un droit applicable à
des opérations juridiques particulières.

IV/ Particularismes du droit des affaires

Le droit des affaires présente plusieurs particularismes. Il s’agit de la rapidité et simplicité,


de la technicité, du recours au crédit, de l’exigence de sécurité, de la présomption de la
solidarité passive, du pragmatisme et de la pluridisciplinarité.

i- rapidité et simplicité

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La rapidité et la simplicité exigées par le monde des affaires se trouvent entravées par le
formalisme qui risque de faire perdre les opportunités.

Par conséquent, il y a intérêt de l’adoption du consensualisme dans la conclusion des


contrats : Selon ce principe, seul l’échange de deux volontés et de deux engagements
conduit à la conclusion d'un contrat. Il en résulte qu'un seul échange oral suffit à
l'établissement d'un contrat.

Le seul respect du consensualisme permet de conclure rapidement des contrats, ce qui est
un atout en matière de relations économiques. Sur le plan moral, le consensualisme se fonde
sur le seul respect de la parole de l'autre.

ii- technicité

Le droit des affaires se caractérise par sa technicité dans la mesure où les spécialistes
du domaine doivent mettre à contributions des connaissances qui touchent aux différentes
disciplines : contrats, fiscalité, comptabilité…

iii- recours au crédit

La réalisation de la majeure partie des opérations commerciales repose sur le recours au


crédit. Cela a donné naissance à des techniques de mobilisation des créances dont la plus
ancienne est la lettre de change qui est un écrit par lequel une personne, créancier d'origine,
dénommée tireur, donne à un débiteur, appelé tiré, l'ordre de payer à l'échéance fixée, une
certaine somme à une troisième personne appelée bénéficiaire ou porteur.

iv- exigence de sécurité

Cette exigence de sécurité impose plus de rigueur dans l’exécution des obligations.

En effet, une livraison par exemple doit être ponctuelle pour éviter les mauvaises
conséquences pour la chaine toute entière. Par ailleurs, pour les paiements, la ponctualité est
également de rigueur.

Une autre sécurité d’ordre juridique est recherchée permettant aux partenaires de disposer
des informations utiles et nécessaires :publicité assurée par le registre de commerce, bulletin officiel,
etc.

v- la présomption de la solidarité passive


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C’est une règle qui déroge au droit commun, car en droit civil cette solidarité ne se
présume pas, mais doit résulter expressément de l’acte ou du titre constitutif de l’obligation,
de la loi, ou doit être la conséquence nécessaire de la nature de l’affaire.

vi- le pragmatisme

Le pragmatisme conduit à entériner des solutions ou des créations nées de la pratique :


affacturage, franchise, crédit-bail, groupes de sociétés…

vii- la pluridisciplinarité

C’est une autre caractéristique du droit des affaires. Il arrive que pour l’analyse du même
problème de droit il est fait appel à plusieurs branches.

V- Instruments d’analyse du droit des affaires

1-L’analyse économique du droit

Elle consiste à utiliser les outils et critères de jugements des économistes afin d’étudier
des questions relevant de la sphère juridique. Il s’agit d’une analyse :

- Critiqueen ce sens qu’elle vise à déterminer les effets non attendus d’une loi ;

- Normative en ce sens qu’elle permet d’indiquer la législation qui devra être adoptée.
Elle produit des recommandations sur la base de comparaison et de calcul d’efficience.

- Prédictive dans la mesure où elle prédit les effets des règles de droit sur les
comportements des agents, annonçant donc la législation qui sera retenue.

2- L’approche Law & Management

Cette approche désigne un courant d’analyse s’intéressant au droit comme facteur de


succès des entreprises. Elle vise à comprendre comment les entreprises peuvent utiliser le
droit à leur profit et en faire un facteur décisif de leur développement. Le droit en général,

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et le droit des affaires en particulier, sont un facteur de succès des entreprises, à la
condition pour tout entrepreneur et/ou manager de déceler préventivement les
opportunités et les menaces que recèle le droit et de disposer de services de juristes
compétents capables d’exploiter les ressources juridiques pour une meilleure sécurité
juridique de l’entreprise et d’élaborer des stratégies juridiques permettant d’accroître la
compétitivité de l’entreprise.

Il ne faut pas oublier qu’en matière de management, le droit est considéré comme un


facteur de compétitivité de l’entreprise dans un environnement concurrentiel. En somme,
l’approche L&M vise à mettre en évidence les performances juridiques des entreprises en
tenant compte des lois qui leur sont applicables.

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