Vous êtes sur la page 1sur 14

L3

 DROIT  PUBLIC  (AP)  


DROIT  COMMERCIAL  

Introduction Générale
Il n’est pas simple de dire ce qu’est exactement le droit
commercial car, cette discipline se trouve encore à la recherche de son identité.

Le terme « commerce » a un sens usuel qui est différent de son sens juridique ou
économique. Dans le langage courant, le commerce entre les hommes désigne
simplement les rapports qu’ils entretiennent. Pour les économistes par contre, le
commerce vise la circulation et la distribution des richesses. Ils excluent la production
et par conséquent l’industrie.

En droit, le commerce conserve un sens plus large car, il concerne aussi bien les
productions des biens et des services que la distribution. Ainsi, l’industriel au sens
juridique du terme est considéré comme un commerçant. En définitive, s’il faut retenir
une définition du droit commercial, on peut se contenter de considérer qu’il s’agit
d’une branche du droit privé, qui a pour objet l’étude des règles qui régissent le
monde des échanges économiques en excluant les entreprises agricoles,
artisanales et les professions libérales.

Le droit commercial général, concerne les règles applicables au commerçant,


personne physique qui exploite une entreprise individuelle, c’est-à-dire, une entreprise
qui n’est pas constituée sous forme de société. L’originalité du droit commercial peut
être appréciée à travers les circonstances qui ont justifié son émergence, à travers ses
sources et son domaine d’application.

SECTION I : L’EMERGENCE DU DROIT COMMERCIAL

Le droit commercial est apparu avec le développement des civilisations marchandes. Il


faut attendre l’époque de la renaissance entre le XII et XVI siècle pour assister à un
développement fulgurant des échanges économiques notamment avec la
multiplication des foires en Italie du nord. A cette époque, le droit commercial, était
réservé à une classe bien déterminée. La naissance du droit commercial, à côté du

  1  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
droit civil, se justifie par la nécessité de satisfaire des besoins spécifiques : la rapidité
dans les transactions mais également une sécurité.

PARAGRAPHE 1 : LA RAPIDITE DANS LES TRANSACTIONS

On a l’habitude de dire que les bonnes affaires se font dans de brefs délais, c’est-à-
dire, qu’il faut aller vite en affaire.

Les règles du droit civil, ne peuvent pas satisfaire cette exigence car, c’est un droit
lourd, conservateur avec une organisation méticuleuse. Pour que les transactions
soient conclues plus rapidement, il fallait des règles plus souples dans une sphère de
liberté. C’est dans ce cadre, qu’après la révolution française de 1789, deux textes
furent adoptés en France, en réaction contre le système des corporations.

- Le décret d’Allarde du 2 mars 1791 proclamant la liberté du commerce (qui


est devenu un principe général de droit).
- La loi le Chapelier des 14 et 15 juin 1791 abolissant le système des
corporations.- (ensemble de professionnels exerçant une même activité-)

Ainsi libéré, le monde du commerce et de l’industrie allait pouvoir entrer dans la voie
de l’industrialisation et dans la construction du système économique capitaliste. Ce
souci de rapidité se manifeste à travers certaines règles originales. En effet, alors qu’en
droit civil, il y a une exigence d’une preuve écrite lorsque le contrat porte sur un
certain montant ; en matière commerciale, par contre, le principe est celui de la
liberté de la preuve. De même le formalisme de validité exigé dans certains contrats
civils n’est pas requis en matière commerciale. Au contraire, on assiste à des
contrats commerciaux conclues par téléphone, télécopie et de plus en plus à
l’informatisation des signatures. La rapidité exigée en droit commercial se manifeste
aussi par la brièveté des délais de prescription, (la prescription extinctive), ils sont
plus courts qu’en droit civil (5ans au lieu de 10ans). De même la mise en demeure,
résulte en droit commercial de toute manifestation de volonté réclamant paiement sans
aucune forme obligatoire, alors qu’en matière civile, il faut un acte d’Huissier. Cette
rapidité doit s’accompagner d’une sécurité des transactions.

  2  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
PARAGRAPHE 2 : LA SECURITE DES TRANSACTIONS

Le risque que comporte la vie des affaires nécessite une sécurité particulière pour les
personnes qui y participent. La sécurité est nécessaire pour protéger le crédit et le
créancier. C’est ainsi, que le droit commercial est sévère à l’égard des débiteurs qui
n’honorent pas leurs engagements. Ils peuvent être déclarés en faillite s’ils sont en
situation de cessation de paiement. Egalement, et, contrairement au droit civil, où la
solidarité doit être prouvée ; elle se présume en matière commerciale. En effet,
lorsqu’il y a plusieurs débiteurs commerçants tenus de payer la même dette, ils sont
présumés être solidaires entre eux. Cela permet au créancier de poursuivre l’un
quelconque des débiteurs pour lui réclamer les paiements de la totalité de sa créance.
Le besoin de sécurité a aussi donné naissance en droit commercial, à un
développement des suretés qui permettent aux créanciers de se protéger contre
l’insolvabilité de leurs débiteurs (ex. : gage, nantissement, le cautionnement, la
garantie autonome, etc.). On peut rattacher à la sécurité, le particularisme du
contentieux commercial qui est de plus en plus réglé à travers le recours à
l’arbitrage. Le passage de l’échange de proximité (entre villes) à l’échange marchand
généralisé (entre pays) est à la base des règles fondées sur la rapidité et sur la sécurité
qui font du droit commercial un droit original. Cette originalité peut également se
vérifier lorsqu’on examine ses sources.

SECTION II : LES SOURCES DU DROIT COMMERCIAL

L’originalité des sources du droit commercial, se remarque par l’existence à coté du


droit émanant des autorités publiques, de sources privées de droit commercial. Par
ailleurs, en approfondissant l’analyse, on constate une prépondérance accrue des
sources privées qui concurrencent fortement les sources publiques ; et dans les sources
publiques elles-mêmes, on constate un déclin de la loi nationale au profit de la loi
internationale.

PARAGRAPHE 1 : LE DROIT EMANANT DES AUTORITES PUBLIQUES

  3  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
Lorsqu’on parle de la loi comme source du droit commercial, on
pense à la loi au sens large. La loi ainsi entendue, recouvre plusieurs réalités. Elle
désigne d’abord, la constitution et les principes fondamentaux du droit. Ces normes
supérieures sont certes exceptionnellement appliquées en matière commerciale mais,
il arrive qu’on fasse appel à elles pour trancher certains litiges mettant en cause les
libertés fondamentales ; par exemple : la liberté de commerce.

La loi vise ensuite, la loi nationale englobant la loi parlementaire, le règlement, la loi
internationale représentée par la loi communautaire et les traités internationaux.

A. LE DECLIN DE LA LOI NATIONALE

La règlementation des obligations commerciales relève en principe du domaine de la


loi parlementaire. Les règlements émanant de l’exécutif, doivent être pris pour
exécuter les principes posés par la loi. Mais, depuis quelques années, les textes à
caractère règlementaire, c’est-à-dire, d’origine gouvernementale commencent à
occuper une place importante dans le droit commercial. En effet, ils interviennent dans
des domaines qui sont en principe réservés à la loi. Cela atteste un recul du parlement
en tant que lieu de formation de la norme juridique.

Par ailleurs, les exigences de la construction de l’Afrique ont amplifié et légitimé le


mouvement de recul de la loi nationale au profit de la loi internationale.

B. LA PREPONDERANCE DE LA LOI INTERNATIONALE

Le droit commercial ne pouvait pas ignorer la mondialisation des échanges


économiques. Ainsi, sur le plan strictement africain la nécessaire intégration juridique
et économique en vue de la construction de grands ensembles régionaux afin de faire
face aux difficultés a justifié l’élaboration d’un droit africain commun aux pays
appartenant à tel ou tel ensemble. Il s’agit de l’émergence d’un droit communautaire
avec le traité de l’UEMOA, le traité de l’OHADA et le traité de la CEMAC.

a- LE TRAITE DE L’UEMOA

  4  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
Il a été signé le 10 janvier 1994 entre les différents Etats de l’ancienne UMOA. Le
traité se fixe dans son préambule, l’objectif de favoriser le développement économique
et social des Etats membres grâce à l’harmonisation de leurs législations, l’unification
de leur marché intérieur et la mise en œuvre de politique sectorielle commune dans les
secteurs essentiels de leur économie. Les organes directeurs mis en place par le
traité sont la commission et le parlement de l’union chargés de participer au
processus décisionnel. Le traité a crée deux juridictions :

La cour des comptes et la cour de justice.

La cour des comptes a pour mission d’assurer le contrôle de


l’ensemble des organes de l’union alors que la cour de justice est chargée de veiller
au respect du droit quant à l’interprétation et l’application du traité. Plusieurs types
d’actes peuvent être adoptés dans le cadre de l’UEMOA.

-­‐ Le règlement : qui est la principale source dérivée du droit communautaire.


Les règlements ont une portée générale. Ils sont obligatoires dans tous leurs
éléments et, sont directement applicables dans tout Etat membre.
-­‐ La directive communautaire : elle repose sur une répartition des tâches et une
collaboration entre les organes communautaires et les autorités nationales. Au
terme de l’article 43 al.2 du traité de l’UEMOA, les directives lient tous les
Etats membres ; quant aux résultats à atteindre ; cela signifie que la directive
fixe un résultat obligatoire pour les Etats mais, leur laisse une marge de
manœuvre quant à la forme et quant aux moyens ou instrument de réception. A
ce titre la directive apparaît comme un instrument de rapprochement,
d’harmonisation des législations à la différence du règlement qui uniformise
le droit.
-­‐ La décision : c’est un acte obligatoire en tous ses éléments pour les
destinataires qu’elle désigne mais elle n’a pas une portée générale lorsqu’elle
est adressée à un particulier (individu/entreprise). Elle vise à l’application du
traité à un cas particulier. Elle peut aussi s’adresser aux Etats membres qui
doivent prendre des mesures d’application comme pour les directives.

  5  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
Cependant, dans ce cas, les Etats ne conservent pas le choix des formes
juridiques de la mise en œuvre dans l’ordre national.
-­‐ Les avis et les recommandations : à la différence des précédents actes, ils
n’ont pas un effet contraignant ou décisoire. Ils formulent de simples
propositions sans pouvoir exprimer des prescriptions.
b- LE TRAITE DE L’OHADA

Signé à Port-Louis le 17 octobre 1993 et révisé au Québec le 17 octobre 2008, le


traité de l’OHADA intéresse particulièrement les activités commerciales. Il a pour
objectif principal de favoriser l’harmonisation du droit des affaires dans les Etats
signataires par l’élaboration des règles communes simples et adaptées à la situation de
leur économie, par la mise en œuvre de procédures judiciaires appropriées, et enfin,
par l’encouragement au recours à l’arbitrage pour le règlement des différends
contractuels. La réalisation des objectifs précisés par le traité est assurée par une
organisation supranationale dénommée OHADA comprenant, un conseil des ministres
et une cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA). Le conseil des ministres est
assisté d’un secrétariat permanent auquel est rattaché une école régionale de
magistrature. Dans le cadre du traité de l’OHADA, les actes qui sont adoptés, sont des
actes uniformes qui représentent le droit communautaire dans cette organisation. La
préparation et l’adoption de ces actes uniformes obéissent à des règles particulières. Il
ressort des articles 5 à 12 du traité, que l’harmonisation du droit des affaires est
préparée par le secrétariat permanent en concertation avec les gouvernements des Etats
signataires qui disposent d’un délai de 90 jours pour faire leurs observations écrites sur
les projets d’actes uniformes qui leur sont soumis. A l’expiration de ce délai, le
secrétariat permanent met au point le texte définitif et inscrit sa discussion à l’ordre du
jour du prochain conseil des ministres.

L’adoption des Actes Uniformes par le Conseil des ministres requiert l’unanimité des
représentants des Etats parties présents et votant. L’adoption des Actes Uniformes
n’est pas valable que si les 2/3 des Etats parties sont représentés. Une fois adopté,
l’Acte Uniforme entre en vigueur, 90 jours après sa publication au Journal Officiel de
l’OHADA.

  6  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
En vertu de l’article 10 du traité de l’OHADA à partir de ce moment, les Actes
Uniformes sont obligatoires et s’appliquent directement dans les Etats parties,
nonobstant, toute disposition de droit interne contraire antérieure ou postérieure.

Au total, l’internationalisation croissante du droit commercial se


fait à travers deux techniques :

-­‐ La première technique est l’harmonisation qui est l’opération consistant à


rapprocher les systèmes juridiques d’origines différentes en cherchant à
supprimer leur différence et leur contradiction de façon à atteindre les objectifs
communautaires recherchés.
-­‐ La seconde technique est l’unification de droit, qui consiste à instaurer dans
une matière juridique donnée, une législation unique dans laquelle, il n’y a plus
de place pour la différence ou les divergences. C’est un procédé brutal et sévère
d’intégration juridique car elle implique, que les Etats renoncent à leur
souveraineté dans l’édiction des normes. C’est cette dernière technique qui a été
appliquée en droit commercial à travers l’adoption d’un acte uniforme portant
droit commercial général applicable dans tous les Etats parties au traité de
l’OHADA.

PARAGRAPHE 2 : LA CONCURRENCE DES SOURCES PRIVEES.

L’espace juridique n’est pas seulement occupé par le droit étatique, d’autres ordres
viennent compléter l’ordre étatique. Le monde des affaires apparaît comme étant un
milieu favorable à l’apparition d’un ordre juridique spontané, c’est-à-dire, des règles
émanant du milieu lui même. Il faut distinguer deux types de règles d’origine privée :

_ D’une part, les usages des commerçants ;

_ D’autre part, les règles élaborées par les ordres professionnels et les organes de
régulation de l’économie.

A. Les Usages

  7  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
Ils constituent une source importante du droit commercial. D’abord, parce que le droit
commercial dans ses origines était un droit non écrit et ensuite, le législateur ne peut
pas suivre le rythme d’évolution des échanges économiques. Il préfère souvent laisser
aux commerçants eux-mêmes, le soin de règlementer leurs propres rapports. Les
usages sont des pratiques notoires, répétés et constantes et qui finissent par acquérir un
caractère obligatoire.

En matière commerciale, on distingue deux catégories d’usage :

_ Les usages conventionnels encore appelés usages de fait.

_ Les usages de droit appelés coutumes

Les usages conventionnels tirent leur force ou autorité de la volonté des parties.
Ils ne sont en principe applicables qu’entre professionnels (commerçants) supposés les
connaître. Ils ne sont donc pas opposables aux non commerçants et aux professionnels
relevant d’une autre branche d’activité, à moins que ces usages ne soient portés à leur
connaissance et qu’il y ait une acceptation expresse. Quant aux usages de droit ou
coutume, ils tirent leur force d’une reconnaissance de la jurisprudence ou d’un renvoi
de la loi.

Il existe trois différences essentielles entre usage de droit et usage conventionnel.

D’abord, en matière de preuve, celui qui invoque un usage de droit ou coutume n’a
pas besoin de prouver son existence (le juge est censé le connaître). Par contre, il
appartient à celui qui invoque un usage de fait d’en apporter la preuve. Cela se fera au
moyen d’une attestation appelée parère délivrée par les chambres de commerce.

Ensuite, sur le plan procédural, la violation d’un usage de droit par les juges du fond
peut servir de motif à un pourvoi en cassation alors qu’un tel recours est irrecevable
lorsqu’il s’agit des usages conventionnels car dans ce domaine les juges du fond
disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation.

  8  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
Enfin, par rapport à leur opposabilité, l’usage de droit ou coutume a un caractère
impératif. Toutes les parties sont censées le connaître et elles ne peuvent pas y
déroger.

En revanche, l’opposabilité d’un usage conventionnel est subordonnée à l’acceptation


tacite ou expresse des parties.

L’usage conventionnel a un caractère supplétif. Les professionnels qui contractent


dans leur branche d’activité sont censés connaitre tous les usages qui y sont admis.
S’ils veulent écarter un usage conventionnel. Ils doivent le faire de façon expresse.

B. LES AUTRES SOURCES PRIVEES

Il arrive que des personnes appartenant à la même profession élaborent des normes de
portée internationale qui s’imposent aux professionnels du milieu. Il s’agit des codes
de conduite, qui constituent une sorte de déontologie nécessaire à l’harmonisation de
la pratique de certains métiers. Ces codes de conduite constituent un système de
contrôle par le milieu lui-même, et traduisent l’existence d’un ordre privé économique
contemporain à côté de l’ordre étatique. Par ailleurs, on rencontre d’autres règles qui
émanent des organismes de régulation de l’économie. Ces organismes, composés de
magistrats professionnels et des personnalités de la société civile font des suggestions
et prennent des directives qui ne peuvent pas être ignorés par les praticiens du droit
commercial.

PARAGRAPHE 3 : LA JURISPRUDENCE

Elle peut être définie comme étant l’ensemble des décisions rendues par les
juridictions sur une question de droit déterminée. Certains auteurs ont soutenu que la
jurisprudence n’est pas une source de la règle de droit. Trois arguments ont été mis en
avant :

-D’abord, le principe de la séparation des pouvoirs s’oppose au pouvoir normatif du


juge. Il y a trois (3) pouvoirs : le pouvoir législatif, exécutif et le pouvoir judiciaire. Le

  9  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
rôle du pouvoir judiciaire n’est pas de créer une norme mais d’appliquer une norme
préalablement établie.

-Ensuite, il est interdit au juge de rendre des arrêts de règlement.

-Enfin, le caractère relatif de l’autorité de la chose jugée est incompatible avec


le caractère général de la règle de droit.

Malgré la force de ces arguments, on est obligé de considérer que le juge a un pouvoir
normatif. En effet, le juge ne peut pas s’abriter derrière le silence, l’absurdité ou les
lacunes de la loi pour se soustraire à l’obligation de trancher le conflit qui lui est
soumis. S’il le faisait, il commettrait ce qu’on appelle un déni de justice. Dans ces
conditions, le juge est amené parfois à créer la régler de droit dans les hypothèses où
la loi n’a rien prévu. Il faut souligner, par ailleurs qu’il existe une juridiction
supérieure chargée d’unifier l’interprétation de la règle de droit (Cour de cassation ou
Cour Suprême). Les juridictions inférieures ne sont, certes, pas tenues de suivre
l’interprétation de la Haute juridiction, mais dans la pratique, elles suivent cette
interprétation pour ne pas voir leurs décisions censurées. Dès lors, la jurisprudence est
une source de droit même si c’est une source indirecte.

Au-delà de ce problème général, il y a une spécificité de la jurisprudence commerciale.


Cela tient au fait que la plupart des décisions en la matière ne sont pas rendues par les
autorités publiques, mais par des particuliers qu’on appelle des arbitres. L’arbitrage est
très développé en matière commerciale parce qu’il présente deux avantages : la
rapidité et la discrétion.

L’arbitrage présente une particularité par rapport à la justice étatique. Cette


particularité tient au fait que les arbitres tirent leur pouvoir de la volonté des parties.

Ce mode de règlement des litiges peut être utilisé aussi bien par les personnes
physiques ou morales que par l’Etat, les autres collectivités territoriales les
établissements publics et toute personne morale de droit public (voir article 2 de l’acte
uniforme). L’article 3 de l’acte uniforme relatif au droit de l’arbitrage précise toutefois
que l’arbitrage peut être fondé sur une convention d’arbitrage ou sur un instrument

  10  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
relatif aux investissements notamment un code des investissements ou un traité
bilatéral ou multilatéral relatif aux investissements. Lorsque l’arbitrage résulte d’une
convention d’arbitrage celle-ci peut prendre deux formes : le compromis et la clause
compromissoire.

Le compromis est la convention par laquelle deux personnes qui ont un litige décident
de le soumettre à un arbitre. Pour que le compromis soit valable, il faut un certain
nombre de conditions :

- Les parties doivent avoir le droit de disposer du droit litigieux ;


- elles doivent avoir la capacité d’ester en justice ;

- l’objet du compromis doit être dans le commerce juridique1.

La clause compromissoire quant à elle est la clause par laquelle les parties à un
contrat s’engagent à soumettre à des arbitres les litiges pouvant résulter de l’exécution
de ce contrat. En raison des dangers qu’elle présente, la clause compromissoire n’était
considérée comme valable que si elle était insérée dans un acte passé entre les
commerçants. En droit OHADA le législateur ne se réfère pas à la qualité des parties
pour déterminer les conditions de validité de la clause compromissoire. Celle-ci est
soumise aux mêmes conditions que le compromis et est donc valable aussi bien en
matière commerciale qu’en matière civile ou lorsqu’elle est insérée dans un acte mixte.

S’il y a une convention d’arbitrage valable, les juridictions étatiques sont


incompétentes. Mais cette incompétence est relative puisque le juge saisi ne pourra se
déclarer incompétent que si le défendeur soulève une exception d’incompétence in
limine litis, c’est-à-dire avant la conclusion au fond. Si le défendeur commence par
opposer une défense au fond, il ne pourra plus soulever l’exception d’incompétence.
Lorsque les arbitres sont saisis, ils doivent respecter les règles de procédure, sauf si les
parties en ont décidé autrement. Ils doivent aussi trancher le litige en appliquant les
règles de droit. Mais les parties peuvent les autoriser à statuer en équité ; on dit dans ce
cas qu’ils ont statué en amiables compositeurs.

                                                                                                                       
1
Les litiges liés à l’état et à la capacité des personnes ne peuvent être soumis à des arbitres.

  11  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
La sentence arbitrale c’est-à-dire la décision rendue par les arbitres est dotée de
l’autorité de la chose jugée, mais, elle n’a pas une force exécutoire c’est-à-dire, qu’elle
ne peut pas faire l’objet d’une exécution forcée. Toutefois, cette faiblesse peut être
corrigée. En effet, la partie qui a gagné le procès peut obtenir du président du tribunal
de grande instance ou du président de la CCJA une ordonnance d’exéquatur qui
permet de procéder à une exécution forcée. L’autre particularité de la sentence
arbitrale est qu’elle ne peut pas faire l’objet de recours ordinaires tels que l’appel,
l’opposition et le pourvoi en cassation. Certains recours exceptionnels restent
possibles dans certaines circonstances :

_ recours en annulation (recours en contestation de validité)

_ recours en révision (si un élément n’est pas pris en considération)

_ La tierce opposition

SECTION III : LE DOMAINE DU DROIT COMMERCIAL

Pendant longtemps, la détermination du domaine du droit commercial a fait l’objet


d’une controverse. On s’est demandé si le droit commercial est le droit des
commerçants, ou celui des actes de commerce. Il y a eu une opposition entre une
conception objective et une conception subjective.

Selon les partisans de la conception objective, le droit commercial est le droit des actes
de commerce, car, la loi détermine un certain nombre d’actes auxquels, elle donne le
caractère d’acte de commerce ; et c’est l’accomplissement des ces actes de commerce
qui permet d’identifier les commerçants. En revanche, selon la conception subjective,
le droit commercial est en fait, le droit des commerçants car seules les personnes qui
ont cette qualité sont assujetties à ce droit particulier. Aujourd’hui, cette controverse
est quelque peu atténuée. Un compromis semble être trouvé. On considère que le droit
commercial est à la fois, celui des commerçants et celui des actes de commerce.

On dit alors que le droit commercial s’applique aux activités commerciales en général,
qu’elles soient ou non le fait d’un commerçant. Le champ d’application du droit

  12  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
commercial s’est étendu de telle sorte qu’il est devenu difficile de dresser les frontières
du droit commercial. On assiste à une commercialisation de la vie publique et à une
commercialisation de la vie civile.

PARAGRAPHE 1 : LA COMMERCIALISATION DE LA VIE PUBLIQUE

Pendant longtemps, l’Etat, garant de l’Intérêt Général, n’avait


aucune raison d’intervenir dans le domaine des activités économiques sauf pour les
règlementer. Mais, aujourd’hui, l’Etat et les collectivités publiques interviennent dans
la vie économique, soit en se réservant le monopole de certaines activités lucratives,
soit comme concurrent du secteur privé. C’est cela qui a justifié l’application du droit
commercial aux personnes publiques. L’article 1 de l’AUDCG prévoit : « l’Acte
Uniforme est applicable à tout commerçant personne physique ou morale y compris les
sociétés commerciales dans lesquels un Etat ou une personne morale de droit public
est associée ».

PARAGRAPHE 2 : LA COMMERCIALISATION DE LA VIE CIVILE

Il y a toujours eu une séparation nette entre le droit civil et le droit commercial. Mais,
le droit privé contemporain se caractérise par une extension du champ d’application du
droit commercial à certaines activités qui, autrefois, relevaient du droit civil. Ce
phénomène peut être d’abord, être constaté à travers l’introduction des opérations
immobilières dans les actes de commerce (l’achat pour la revente d’immeuble), ensuite
certaines activités liées à l’exploitation de la terre peuvent se voir appliquer des règles
de droit commercial. Il en est ainsi de l’agriculture, de l’élevage exercé avec une
spéculation (la recherche d’un profit) de même l’exploitation des mines, des carrières
des gisements des ressources naturelles est devenue une activité commerciale,
lorsqu’elle est effectuée de façon industrielle.

Au total, il apparaît que le droit commercial est un droit mouvant,


c’est-à-dire, qu’il change selon le contexte économique et technique. Il nécessite une
permanente adaptation et il est ouvert aux influences internationales. Etudier le droit
commercial général, consiste à examiner l’ensemble des règles qui s’applique à

  13  
L3  DROIT  PUBLIC  (AP)  
DROIT  COMMERCIAL  
l’entreprise individuelle exerçant une activité commerciale, c’est-à-dire, celle qui est
exploitée par une personne physique.

Pour cela, il faut d’abord envisager l’étude des acteurs de l’entreprise à savoir, les
entreprenants et les commerçants avant d’envisager ensuite, celle de l’exercice de la
profession commerciale.

PREMIERE PARTIE :

LES ACTEURS DE L’ENTREPRISE COMMERCIALE :

LES COMMERCANTS

INTRODUCTION

Aux termes de l’article 2 de l’Acte Uniforme sur le droit commercial général : « est
commerçant celui qui fait de l’accomplissement d’actes de commerce par nature
sa profession ». En lisant cette disposition, on peut avoir l’impression qu’il suffit
d’accomplir des actes de commerce pour accéder à la profession commerciale, en
vertu du principe de la liberté de commerce et de l’industrie. Cependant, il faut
préciser que l’accès à la profession commerciale est strictement réglementé, même si
l’acquisition de la qualité de commerçant requiert simplement le respect de certaines
conditions liées à l’exercice d’une activité commerciale.

  14  

Vous aimerez peut-être aussi