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PROCÉDURE PÉNALE
Introduction
Cette phase consiste à interroger des témoins, des suspects, recueillir des indices… Cette
première phase du procès pénal qui est tourné vers la preuve, qui est destiné à recueillir la preuve on
l’appelle fréquemment la phase de mise en état des affaires pénales. La mise en état implique
d’instruire l’affaire afin de la mettre en état d’être jugée, afin que la juridiction de jugement puisse se
prononcer sur la culpabilité d’un individu. Cette phase de mise en état des affaires pénales fait
apparaitre un acteur central qui est le juge d’instruction. Une fois que l’affaire est mise en état d’être
jugée, débute une seconde phase.
2. Phase de jugement
Cette seconde phase de jugement qui suit ainsi la phase de mise en état des affaires pénales, va
se dérouler devant une juridiction de jugement. /!\ Il n’y a pas que des juridictions de jugement ! Il y
a des juridictions d’instruction = le juge d’instruction compose une juridiction d’instruction et ici cette
seconde phase se déroule non pas devant une juridiction d’instruction mais devant une juridiction de
jugement. Il existe 3 grands types de juridictions en matière pénale :
Le but de cette seconde phase du procès pénale est tout simplement de déterminer la culpabilité
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de l’individu qui comparait. Est-il coupable ou ne l’est-il pas ? Si le suspect est déclaré non coupable,
il sera acquitté si la décision est rendue par une Cour d’assise et il sera relaxé si la décision est rendue
par un tribunal de police ou un tribunal correctionnel. Après cette seconde phase peut débuter une
troisième phase du procès pénal.
Une fois qu’un individu a été condamné, il faut encore déterminer comment il va exécuter sa
condamnation et donc, il faut déterminer comment il va exécuter sa peine. Cette 3ème phase donne
naissance à une discipline pratiquement en tant que telle qui est le droit de la peine.
S’interroger sur ce caractère servant consiste en réalité à se pencher sur les rapports
qu’entretiennent les règles de droit pénal de fond et les règles de procédure pénale. Dire que la
procédure pénale revêt un caractère sanctionnateur revoie à une idée extrêmement simple : elle va
faire sanctionner les règles de droit pénal de fond. Il ne sert à rien de prévoir / d’envisager les règles
de droit pénal de fond s’il n’existe pas des règles de procédure pour permettre de faire appliquer une
sanction. Donc, dire que la procédure pénale revêt un caractère sanctionnateur signifie simplement
que la procédure pénale va assurer la sanction / l’application des règles de droit pénal de fond.
Plutôt que de dire que la procédure pénale revêt un caractère sanctionnateur on peut en dire
que c’est un droit servant. C’est exactement la même idée puisque cela revient à dire que la
procédure pénale est là au service du droit pénal de fond. Mais il faut bien voir que la procédure
pénale est tout à fait essentielle pour l’application du droit pénal de fond. Il est évident que les règles
de droit pénal de fond vont avoir des conséquences sur la procédure pénale.
Exemple : la division tripartite des infractions > les infractions sont classées en 3 catégories =
les crimes, les délits et les contraventions. Cette classification produit des conséquences en
procédure pénale.
Ces conséquences on les retrouve quotidiennement puisque l’une des conséquences de cette
classification tripartite des infractions pénales concerne la répartition des compétences de juridiction
pénale. Comment déterminer la compétence de chacune de ces juridictions ? Justement, en
s’appuyant sur la classification tripartite des infractions.
Autre conséquence de cette classification, pour les contraventions et les délits la saisine d’un
juge d’instruction n’est plus obligatoire, elle devient simplement facultative. Là encore, même sur les
modalités de mise en état d’une affaire pénale, la classification tripartite des infractions produit des
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conséquences puisque la saisine d’un juge d’instruction est obligatoire en cas de crime mais elle ne
l’est pas en cas de délit ou de contravention.
La procédure pénale existe pour permettre de sanctionner les règles de droit pénal de fond
et ça produit cette conséquence : elle va être influencée dans une certaine mesure par un certain
nombre de concept de fond.
Procédure accusatoire
C’est une procédure qui est fondée sur une idéologie assez libérale. C’est une procédure
fondée sur une espèce de laissez-faire. On va donc ici laissez faire les parties. Dans ce modèle
accusatoire les parties vont avoir les premiers rôles, les personnes privées mêmes vont avoir les
premiers rôles. Ce sont elles qui vont saisir le juge, décider de comment va être orientée la
procédure, réunir les éléments de preuves et finalement, ce sont elles qui vont impulser leur rythme
à la procédure.
Les parties vont diriger la procédure. Si les parties dirigent la procédure il y a en
conséquence un autre acteur qui va se mettre en retrait quelque part et c'est le juge. Dans le modèle
accusatoire, le juge en effet a un rôle secondaire en ce sens que ce n’est pas lui qui va donner
l’impulsion à la procédure. Le juge va avoir un rôle : trancher le litige, mais il ne va pas mener/diriger
la procédure. C’est sur la base des éléments fournis par les parties que le juge va trancher. Son rôle
sera ici moins important.
Cette procédure accusatoire est également publique puisque les débats vont se dérouler
publiquement et oralement. Il s’agirait de conséquences que l’on retrouve dans ces systèmes
accusatoires, bien que ce ne soit pas systématique.
Procédure inquisitoire
En réalité cette procédure inquisitoire se fonde sur une idée assez simple : contrairement à la
procédure accusatoire, le premier rôle = la direction de la procédure va incomber au juge et à un
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représentant de l’état. Ce ne sont donc plus les parties qui vont donner l’impulsion au procès mais
ce sont des représentants de l’état et plus spécifiquement le juge. Selon le dictionnaire de
l’association Henri Capitant, la procédure inquisitoire est définie comme étant celle dans laquelle
toute initiative vient du juge. Si toute initiative vient du juge cela signifie que c’est un juge qui va
réunir les preuves, qui va décider d’orienter l’affaire dans un sens ou dans l’autre et décider s’il a lieu
ou non à un procès.
Dans cette procédure inquisitoire les parties vont occuper un second rôle beaucoup plus
modeste. C’est une procédure placée sous le contrôle de l’état et du juge.
On ajoute parfois que cette procédure inquisitoire serait écrite et secrète, contrairement aux
procédures accusatoires.
Il n’y a pas de réponse absolue puisque en réalité dans la procédure pénale française,
certains éléments tendent vers une procédure accusatoire et d’autres à l’inverse vers une procédure
inquisitoire. Si on examine la phase de mise en état des affaires pénales qui se déroule devant un
juge tout à fait particulier dans certains cas qui est le juge d’instruction, on aurait tendance à dire que
la procédure pénale française revêt un caractère inquisitoire. C’est en effet le juge d’instruction qui
va donner son rythme à la procédure.
Mais si on regarde d’autres aspects de la procédure pénale française, on peut remarquer
également que les parties peuvent avoir un certain rôle très important en matière de procédure
pénale. Les parties peuvent mettre en mouvement l’action publique qui va être à l’initiative du
déclenchement de poursuites judiciaires. Donc les parties, notamment la victime, ont un rôle assez
important en matière de procédure pénale.
Exemple : lorsqu’une personne est placée en garde à vue, lorsqu’elle subit une perquisition,
lorsqu’elle est interpellée … la personne subit des pouvoirs de contraintes qui vont nuire
dans une certaine mesure à certains de ses droits fondamentaux.
A cause des pouvoirs de contraintes particulièrement importants dont disposent les autorités
judiciaires, les libertés fondamentales que constituent la liberté d’aller et venir et le droit au respect
de la vie privé et de son domicile son particulièrement mis à mal.
Ce qui le justifie c’est tout simplement l’enjeu de la procédure pénale. Le procès pénal a pour
finalité la répression des atteintes, des violations de la loi pénale qui sont considérées comme
particulièrement graves. La procédure pénale assure la protection de l’intérêt général, l’intérêt de la
société. Pour cette raison on admet, dans une certaine mesure, que pour la mettre en œuvre les
autorités judiciaires puissent porter atteintes aux droits fondamentaux de particuliers. On peut
donner 2 illustrations de ces très larges pouvoirs de contrainte dont dispose les autorités judiciaires
en matière de procédure pénale :
1. Première illustration que l’on peut trouver dans l’article 81 du Code de procédure pénale :
cet article définit de manière très générale les pouvoirs du juge d’instruction. Cet article dit
que le juge d’instruction procède conformément à la loi à tous les actes d’information qu’il
juge utile à la manifestation de la vérité. Ce texte exprime que le juge d’instruction dispose
ainsi de très larges prérogatives pour parvenir à la manifestation de la vérité. Sur la base de
ce texte, le juge d’instruction va pouvoir ainsi placer des personnes en garde à vue, ordonner
des perquisitions, des placements sur écoute…
En réalité il y a des limites : pour porter atteinte à la vie privée d’autrui il faut une
assise légale suffisamment claire et donc il ne peut pas tout faire complètement à
partir de ce texte. Mais en tout cas le juge d’instruction grâce à ce texte dispose de
très larges prérogatives pour parvenir à la manifestation de la vérité.
2. Seconde illustration : le statut de la personne poursuivie avant que cette personne ne soit
jugée. Une personne qui viole la loi pénale peut encourir des peines d’emprisonnement. Le
problème est que dans l’attente de son jugement, on peut avoir peur qu’elle prenne la fuite
ou qu’elle commette une nouvelle infraction.
Il faut donc bien adapter le statut de la personne poursuivie à cette éventuelle dangerosité
qu’elle peut avoir. Et donc, avant même que la personne ne soit jugée, elle va pouvoir être mise
en détention. Détention que l’on qualifie généralement de provisoire = parfois elle n’est pas tout
à fait provisoire puisqu’elle va durer quelques années. Mais cette détention provisoire montre là
encore le caractère coercitif liée à la mise en œuvre des règles de procédure pénale puisque
avant même que l’on statue sur la culpabilité d’une personne, on va pouvoir la détenir dans
l’attente de son jugement.
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Exemple : lorsqu’une perquisition est menée, il est porté atteinte au droit au respect de la vie
privée ainsi qu’au droit au respect du domicile. Lorsqu’est mené une garde à vu, il va être
porté atteinte non seulement ici encore au droit et respect de la vie privé mais aussi à la
liberté d’aller et venir.
Tous ces pouvoirs de contraintes qui sont laissés aux autorités judiciaires risquent de mener à
des violations de droits fondamentaux. Tout l’objet de la procédure pénale est donc de tenter de
réaliser un équilibre. Equilibre entre d’un côté les droits fondamentaux des particuliers et de l’autre
l’efficacité de la répression pénale. Il faut donc tenter cet équilibre.
/!\Si l’on n’autorisait pas aux autorités judiciaires de porter atteinte à aucun droits fondamentaux
des particuliers, on leur interdit de mener des perquisitions… la conséquence directe serait que
l’efficacité de la répression pénale en serait fortement diminuée. A l’inverse, si on laisse tous les
pouvoirs aux autorités judiciaires, il en résulterait de trop grandes atteintes aux droits fondamentaux
des particuliers. Donc tout l’intérêt de la procédure pénale est d’essayer de réaliser cet équilibre, qui
n’est jamais parfait.
Il y a en procédure pénale aujourd’hui deux grandes variétés de sources qui doivent être
prises en compte. Il y a des sources internes qui constituent les sources traditionnelles de la
procédure pénale, et des sources qui tendent aujourd’hui à se développer considérablement qui sont
les sources internationales.
La loi
La première grande source est la loi. La loi c’est la source traditionnelle de la procédure
pénale. Ici on entend la loi au sens formel, l’ensemble des textes votés par le Parlement. En effet, il
revient au Parlement (Assemblée Nationale + Sénat) de fixer l’ensemble des règles de la procédure
pénale. C’est l’article 34 de la Constitution qui le prévoit. Les règles de procédure pénale dans leur
mise en œuvre sont susceptibles de léser les droits fondamentaux des particuliers. En conséquence,
comme il y a un risque il appartient au législateur, au parlement de les fixer.
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Par conséquent, c’est en principe le parlement qui doit fixer les règles de procédure pénale.
Il lui appartient de concilier l’efficacité de la répression pénale et la protection des droits
fondamentaux. C’est une tâche que l’on considère trop importante pour la laisser au pouvoir
réglementaire. C’est précisément cette idée qu’avait énoncé le Conseil Constitutionnel dans une
décision du 30 juillet 2010. Cette décision portant sur la garde à vu, nous a dis que le législateur tient
de l’article 34 de la Constitution l’obligation de fixer lui même le champ d’application de la loi pénale
et que s’agissant de la procédure pénale cette exigence s’impose notamment pour éviter une rigueur
non nécessaire lors de la recherche des auteurs d’infractions. En soi, le Conseil Constitutionnel nous
dit que si le législateur doit fixer les règles de la procédure pénale c’est pour éviter une rigueur non
nécessaire afin de protéger les droits fondamentaux.
Le parlement en la matière est très actif. A peu près à chaque nouvelle législature, à chaque
nouvelle fois qu’un nouveau Parlement est élu, il a pour ambition de révolutionner la procédure
pénale. Cela ce traduit par une modification des textes et donc par conséquent le Code de
procédure pénale n’est pas d’une très grande clarté à la fin. En général, cette permanence des
réformes en matière de procédure pénale s’effectue un peu à la manière d’un balancier. Tantôt on va
avoir une législature qui va dire que l’important c’est la répression pénale > donc accroissement des
pouvoirs des autorités judiciaires, tantôt une autre va essayer de renforcer la protection des libertés
individuelles ce qui va passer par l’octroi de nouvelles prérogatives aux personnes qui sont suspectes
ou aux personnes poursuivies. Donc classiquement, on peut représenter l’ensemble des réformes de
la procédure pénale comme fonctionnant à la lumière d’un balancier.
Mais aujourd’hui il émerge également des lois qui sont en quelque sorte un troisième type
puisque ce sont des lois techniciennes. Ce ne sont pas des lois marquées d’une idéologie
particulière. Ce ne sont pas des lois qui promeut la protection des libertés individuelles, ni qui ont
vocation à renforcer l’efficacité de la procédure pénale. Ce sont des lois qui vont techniquement
essayer d’améliorer la procédure pénale. La loi la plus grosse loi récente en matière de procédure
pénale c’est la loi de programmation 2018/2022 de réforme pour la justice qui est une loi du 23
mars 2019. Cette loi c’est une loi technicienne.
Toutes ces lois qui sont votées par le parlement ont l’avantage (en tout cas pour la plupart)
d’être codifiées dans le Code de procédure pénal. Ce code contient également d’autres séries de
textes et notamment il va comprendre des décrets et des arrêtés. Pour l’essentiel, ils vont avoir pour
objet de préciser le contenu des lois. L’ambition de la loi n’est pas de rentrer dans les détails des
choses. Une fois que la loi fixe les grandes vues d’orientation de la matière en procédure pénale, il
appartient à des décrets ou des arrêtés de la préciser, de la mettre concrètement en œuvre.
Cette DDHC qui date de 1789 concerne des textes qui potentiellement peuvent avoir une
grande influence, une grande portée en matière de procédure pénale.
Exemple : article 7 de la DDHC nul homme ne peut être arrêté, accusé ou détenu que dans
les cas déterminés par la loi et selon les formes qu’elle a prescrites.
Rien qu’en interprétant cet article, on pourrait en induire des conséquences en matière pénale.
Grâce à la décision de 1971 qui est fondatrice du bloc de constitutionnalité, le Conseil
Constitutionnel s’est donné la possibilité d’apprécier la conformité des lois de procédure pénale par
rapport à des textes à valeur constitutionnelle. Aujourd’hui, le Conseil Constitutionnel joue un très
grand rôle en matière de procédure pénale puisqu’il va apprécier la conformité des différentes lois
de procédure pénale qui lui sont déférées à l’ensemble de ces textes à valeur constitutionnel. Et ce
contrôle de constitutionnalité s’est d’ailleurs développé puisqu’aujourd’hui le Conseil
constitutionnel peut être saisi avant la promulgation d’une loi mais également après que celle-ci ait
été promulguée dans le cadre d’un litige et ce dans le cadre d’une QPC.
Grâce à la création de la QPC le Conseil Constitutionnel a été plus facilement saisie d’une
question de constitutionnalité de la procédure pénale. Là encore son rôle s’est renforcé en matière
de procédure pénale.
Aujourd’hui l’ensemble des textes internationaux ont une valeur supra législative et cela
résulte de l’article 55 de la Constitution. Donc l’ensemble de ces engagements internationaux qui
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sont des traités, des conventions, des pactes… ont une valeur supérieure à la loi = aux textes votés
par le Parlement. Le rôle de ces sources internationales s’est particulièrement développé en matière
de procédure pénale. Elles se sont tellement développées qu’un auteur, monsieur Pradel disait
qu’on assistait en matière de procédure pénale à une espèce de « défrancisation ». L’idée étant de
montrer que la procédure pénale ne trouvait plus ses sources uniquement dans la loi française mais
de plus en plus dans les sources internationales. En effet, de plus en plus la procédure pénale trouve
sa source dans des textes internationaux ou dans des institutions internationales. L’un des symboles
de cette internationalisation de la procédure pénale réside dans l’instauration d’une Cour pénale
internationale. Elle siège à la Haye et elle est compétente pour juger de certains crimes qui sont
particulièrement graves (génocides et autres crimes contre l’humanité). Au-delà de ce symbole, on
retrouve un très grand nombre de traités conclus entre les états qui peuvent avoir pour
conséquences d’édicter des règles qui influence la procédure pénale.
Exemple : les traités d’extradition > depuis très longtemps ils existent entre les états.
Cette convention contient un grand nombre de dispositions qui intéressent très directement
les droits fondamentaux des individus et donc qui vont avoir pour conséquences d’influencer la
procédure pénale.
Exemple : article 3 de cette convention > elle prohibe les traitements inhumains et
dégradants, la torture.
Tous ces textes en ce qu’ils protègent des droits et des libertés fondamentales des individus
vont avoir une influence sur la procédure pénale française. Cette importance de ces articles est
d’autant plus grande que la Cour Européenne des Droits de l’Homme (juridiction spécialisée dans
l’application et le respect de la convention de sauvegarde) développe une interprétation
extrêmement évolutive de la convention et une interprétation extrêmement extensive des
dispositions de la convention. Elle essaye de donner à la Convention européenne des droits de
l’homme la portée la plus considérable qu’il soit. Ce qui fait qu’aujourd’hui la convention de
sauvegarde constitue sans doute un instrument tout à fait primordial quant aux sources de la
procédure pénale.
nous avez épinglé sur la garde à vue et plus récemment sur les conditions de détention des individus
en soulignant que la loi française n’était pas suffisamment protectrice des personnes détenues en ce
qu’elle ne leur permettait pas d’exercer un recours lorsque leurs conditions de détention n’étaient
pas dignes.
Le droit de l’Union Européenne acquiert petit à petit une importance tout à fait considérable
en matière de procédure pénale. A l’origine, l’Union Européenne n’a pas véritablement vocation à
s’intéresser à la procédure pénale. Selon l’arrêt Casati du 11 novembre 1981, la Cour de justice des
communautés européennes nous indiquait que les règles de la procédure pénale restent de la
compétence des états membres. En d’autres mots, le droit de l’Union Européenne ne concernait pas
la procédure pénale. Mais depuis 1981 les choses ont particulièrement changées en la matière à la
suite de l’adoption du Traité de Lisbonne signé le 13 décembre 2007 et entré en vigueur en 2009. Ce
traité à fait suite à un référendum sur une Constitution européenne où la France avait répondu
« non ». Les états ont donc repris le texte, rayés le terme Constitution et l’on remplacé par « Traité
de Lisbonne » et ils l’ont fait passer. Même si les modalités de son adoption peuvent être discutées,
ce traité a eu pour effet de renforcer assez considérablement le rôle de l’Union Européenne en
matière de droit pénal et en matière de procédure pénale. En effet afin de faciliter la
reconnaissance des jugements, la coopération judiciaire… il était prévu que des directives pouvaient
être adoptées afin d’établir des règles minimales qui portent notamment sur l’admissibilité des
preuves, sur les droits des personnes dans la procédure pénale ou encore sur les droits des victimes
des la criminalité. Donc, ces directives vont instaurer un minimum requis dans les 3 matières
précédemment citées. Cela a conduit à l’adoption d’un certain nombre de directives qui intéressent
directement la procédure pénale.
Exemple : une directive du 25 octobre 2012 a fixé des règles qui sont relatives aux droits des
victimes en matière de procédure pénale. Cette directive a dû être transposée par l’état
français qui a crée un nouveau titre préliminaire dans le Code de procédure pénal.
Grâce à cet exemple, on constate que le droit de l’Union Européenne petit à petit prend une
importance de plus en plus grande en matière de procédure pénale.
Conclusion
Aujourd’hui les sources de la procédure pénale sont en réalité plurielles. Elles ne résultent
plus d’une seule source mais de sources assez diversifiées. Il faut garder à l’esprit que les sources de
la procédure pénale s’internationalisent de plus en plus au fur et à mesure du temps.
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Ces principes directeurs vont diriger la procédure pénale, en ce sens qu’ils vont révéler
l’essence de la procédure pénale. Ce sont ces principes directeurs les grands principes. Ils vont
former une espèce d’ossature à la procédure pénale. Pour qu’ils aient cette capacité de fixer ce cadre
général, ces grands principes ont également dans leur formulation un énoncé qui est assez vague,
assez peu précis.
Exemple : article préliminaire du Code de procédure pénal qui contient un grand nombre de
ces principes. Cet article nous dit que la procédure pénale doit être équitable et
contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties.
Ils proviennent essentiellement de textes. Le premier texte qui contient ces grands principes
de la procédure pénale est l’article préliminaire du Code de procédure pénale. Cet article n’est pas si
vieux que ça, il remonte à une loi du 15 juin 2000. Cet article préliminaire a une valeur un peu
particulière dans l’ordonnancement juridique. Etant donné que c’est un article du Code de procédure
pénale, cet article préliminaire en principe (étant donné qu’il résulte d’une loi) n’a pas d’autre valeur
que celle d’une loi. Donc la valeur normative de cet article préliminaire et des différents principes qui
y sont énoncés c’est celle d’une loi comme la plupart des textes du Code de procédure pénal. Même
si cet article n’a que la valeur d’une loi, il va influencer l’interprétation et l’analyse de l’ensemble des
autres dispositions du Code de procédure pénale issu de règles législatives. Il va donc conduire à
interpréter les autres textes du Code de procédure pénale issus de lois à la lumière de ces principes
contenus dans l’article préliminaire.
C’est ce que nous dit le Conseil Constitutionnel dans une décision du 2 mars 2004. Dans
cette décision, le conseil dit qu’il appartient à l’autorité judiciaire de veiller au respect des principes
rappelés à l’article préliminaire du Code de Procédure Pénale dans l’application des règles de
procédures pénales spéciales appliquées par la loi. Autrement dit, ces différentes dispositions de
l’article préliminaire vont se diffuser dans l’interprétation de l’ensemble des autres textes du Code de
Procédure Pénale issus de lois. Donc la valeur du contenu de cet article préliminaire dépasse à
certains égards celle d’une simple loi dans le sens où il va influencer l’interprétation des autres
textes. Pour montrer la place particulière de cet article préliminaire on peut citer Jacques Leroy qui
disait que les principes directeurs avaient « une valeur quasi constitutionnelle ». La formule est un
peu excessive mais elle montre bien l’autorité particulière qui est attachée aux principes directeurs
du Code de Procédure Pénale.
Ces principes directeurs ont une double vocation. D’une part ils vont permettre d’interpréter
à leur lumière les autres règles contenues dans le Code de Procédure Pénale et d’autre part, ils vont
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parfois permettre de créer des règles très techniques qui vont en découler. Cet article préliminaire
constitue la source essentielle des principes directeurs de la procédure pénale. Mais cet article
préliminaire ne constitue pas la seule source des principes directeurs de la procédure pénale. Il y a
d’autres textes qui également contiennent des principes directeurs de la procédure pénale. On
retrouve principalement 3 autres sources de principes directeurs.
D’abord la Cour de cassation parfois va découvrir des principes généraux du droit et parmi
eux, découvrir des principes directeurs de la procédure pénale.
Exemple : la Cour de cassation se réfère fréquemment aux principes du respect des droits de
la défense. Ainsi, en recourant aux principes généraux du droit la Cour de cassation découvre
parfois d’autres principes directeurs.
Exemple : le respect de la présomption d’innocence qui est garanti par l’article 9 de la DDHC.
Cette présomption constitue un principe directeur de la procédure pénale qui trouve une
assise dans un texte de valeur constitutionnelle.
L’article préliminaire du Code de Procédure Pénale : il constitue le 1er article qu’on trouve
dans ce Code.
En réalité même s’il y a 4 sources que l’on peut identifier des principes directeurs, il faut bien voir
que parfois ces 4 sources vont toutes êtres d’accord pour identifier un même principe directeur.
Exemple : la présomption d’innocence > les 4 sources l’ont découverte, tout comme le
principe du respect des droits de la défense qu’on peut retrouver dans les 4 sources.
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Chapitre I
Les premiers principes directeurs du procès pénal portent en effet sur le déroulement du
procès pénal. Ces principes sont non seulement assez nombreux mais également assez touffus en ce
sens qu’ils se diffusent très largement et qu’ils ont de nombreuses ramifications.
Le premier droit des parties au procès pénal c’est celui de pouvoir accéder à un juge.
/!\ Ici il y a une ambigüité car le terme de juge surtout en procédure pénale revêt quelque chose
d’ambigu. Il faut faire attention à la distinction entre magistrat et juge qui ne sont pas des termes
synonymes. En effet, dans le procès pénal interviennent (tout comme dans le procès civil mais de
manière beaucoup moins accrue) des magistrats que l’on ne peut pas qualifier de juges. Il y a en effet
des magistrats qui vont composer le parquet, que l’on appelle aussi le ministère public. Ces
magistrats n’ont pas la qualité de juge mais jouent en réalité dans le procès pénal le rôle de parties
poursuivantes. Ces magistrats du parquet ou du ministère public (exemple : le Procureur de la
République ou le Procureur général) sont des magistrats qui agissent en qualité de parties
poursuivantes. Ce ne sont donc pas des juges au sens où l’on peut l’entendre lorsque l’on parle de
droit aux juges. En étudiant le contenu de ce droit au juge, on verra que les magistrats du parquet ne
peuvent pas être qualifiés de juges.
Le droit au juge en procédure pénale comporte une double dimension. C’est d’abord le droit
à ce qu’un juge examine le bien fondé d’une accusation en matière pénale. C’est l’aspect que l’on
entend le plus naturellement et qui vient à l’esprit immédiatement c’est lui qui nous dit si on est
coupable ou non. Mais en amont de cette question, le droit au juge à une seconde dimension qui est
tout à fait primordial : c’est l’idée qu’on a le droit à un juge dès lors que l’on fait l’objet d’une mesure
restrictive de liberté. On a donc ainsi 2 dimensions bien distinctes du droit au juge :
Le principe c’est que les personnes sont libres. Elles sont libres de leurs mouvements. De
très nombreux textes rappellent cette liberté de l’individu, notamment l’article 5 paragraphe 1 de la
Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Cet article dit que
toute personne a le droit à la liberté et à la sureté. Il ajoute même que nul ne peut être privé de sa
liberté.
Ce principe de liberté comporte néanmoins des exceptions qui sont également prévues par
cet article 5 § 1 de la Convention. Ces exceptions sont assez nombreuses. Elles peuvent intéresser la
procédure pénale (exemple : lorsqu’une personne va être arrêtée pour être conduite devant une
autorité judiciaire). Mais les exceptions prévues par cet article ne concernent pas exclusivement la
procédure pénale. Cet article prévoit des exceptions en dehors du champ strict de la procédure
pénale.
Exemple : parmi les exceptions envisagées par cet article, on peut retrouver la finalité de
protection de la santé publique > cette protection de santé publique peut justifier de priver
une personne de sa liberté.
Dans tous les cas, si une personne est privée de sa liberté il faut que certaines garanties lui soi
assurer. On ne peut pas priver une personne de liberté sans que cette privation ne fasse l’objet d’un
contrôle minimum. C’est la Convention de Sauvegarde qui prévoit ce contrôle. Ces contrôles il y en a
en réalité 2 qui sont bien distants.
1. Le premier contrôle mis en place et prévu par la Convention de sauvegarde c’est le contrôle des
seules personnes qui sont arrêtées et détenues dès lors qu’il existe des raisons plausibles de
soupçonner qu’elles ont commis une infraction ou qu’il existe des motifs raisonnables de croire à la
nécessité de commettre une infraction.
L’article 5 § 3 dit que ce contrôle ne peut pas être effectué par n’importe qui mais
qu’il ne peut être effectué que par un juge ou par un autre magistrat habilité par la
loi à exercer des fonctions judiciaires. La mise en œuvre de ce principe ne pose
aucune difficulté lorsque le contrôle est effectué par un magistrat du siège comme
par exemple un juge d’instruction ou un juge des libertés et de la détention. Dans ces
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En revanche la question s’est posée de savoir si les membres du parquet, du ministère public
et notamment le Procureur de la République pouvaient assurer ce contrôle prévu par l’article 5 § 3.
Le problème c’est que le ministère public non seulement n’a pas pour fonction de juger mais en
outre il ne présente pas de garanties d’indépendance suffisante au regard notamment de
l’organisation hiérarchique au sein de laquelle il s’insère et du fait qu’il peut recevoir des instructions
du ministre de la justice. Donc le Procureur de la République, certes c’est un magistrat mais il ne jouit
pas de véritables garanties d’indépendance car il a un supérieur hiérarchique et tout en haut de
cette hiérarchie on retrouve le ministre de la justice qui peut diffuser des instructions qui vont devoir
être appliquées par le Procureur. Parce que le Procureur de la République ne dispose pas
d’indépendance suffisante eh bien la Cour Européenne des Droits de l’Homme a indiqué dans l’arrêt
Moulin contre France du 23 novembre 2010, qu’il ne pouvait pas effectuer ce contrôle des
personnes qui sont privées de liberté.
Dans cet arrêt il faut retenir que la CEDH affirme qu’un magistrat du parquet parce qu’il n’est
pas suffisamment indépendant, ne peut pas effectuer un contrôle : le contrôle prévu par l’article 5 §
3 lorsque des personnes sont privées de liberté parce qu’on pense qu’elles ont commis une infraction
ou parce qu’on pense qu’elles s’apprêtent à en commettre une. Les seuls magistrats qui peuvent
effectuer ce contrôle en France sont les magistrats du siège. C’est l’une des raisons pour laquelle on
envisage périodiquement une réforme du parquet afin de donner une plus grande indépendance au
parquet. Ce n’est pas la seule conséquence qu’il y aurait de cette réforme du parquet mais c’est une
des raisons qui peut expliquer cette volonté de réformer le parquet. Cette volonté a été réaffirmée
par le présent garde des sceaux monsieur Dupond-Moretti puisque son cheval de bataille c’est la
matière pénale, mais c’est surtout la réforme du parquet qu’il entend mener avant la fin du
quinquennat de monsieur Macron.
Si on lit l’article 5 § 3 qui régit ce contrôle, la réponse à la question est évidente. L’article
nous dit que la personne soupçonnée d’avoir commis une infraction doit être aussitôt présentée à un
juge ou un autre magistrat habilité. Le terme aussitôt en français on le tient pour équivalent
d’immédiat. Donc, le contrôle est systématique et il faut qu’il ait lieu immédiatement après que la
personne ait été interpellé et privé de sa liberté. En réalité, le terme aussitôt qui constitue une
traduction un peu approximative de la version anglaise de la Convention de sauvegarde, ne donne
pas une interprétation aussi stricte. La CEDH1 n’interprète pas ce terme « aussitôt » comme
synonyme d’immédiatement. La CEDH laisse une certaine marge aux états pour qu’ils puissent
mettre en place ce contrôle et ensuite présenter la personne privée de sa liberté à une autorité
judiciaire ou un magistrat du siège. Et la CEDH nous a dit qu’un délai de 4 jours entre la privation de
1
CEDH : Cour Européenne des Droits de l’Homme
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la liberté d’une personne et sa présentation à un juge ou à un magistrat était trop long, elle nous a
dit à l’inverse que en deçà de 4 jours cela peut dans certains cas être conforme à l’article 5 § 3.
Donc au-delà de 4 jours c’est totalement interdit, mais en deçà il peut être admis qu’un
contrôle puisse être exercé au sens de l’article 5 § 3. Généralement dans sa jurisprudence la CEDH
nous dit qu’en général un délai de 2 jours entre la privation de liberté de la personne et sa
présentation devant un juge ou un magistrat habilité constitue un contrôle qui est conforme à
l’article 5 § 3. Donc il en résulte de la jurisprudence de la CEDH que le contrôle ne s’impose
réellement que lorsque la privation de liberté excède une certaine durée. Elle ne s’impose donc
réellement que lorsque la personne est privée de liberté pendant à peu près 2 jours. La CEDH n’a
jamais donné un seuil précis mais c’est ce qui semble globalement ressortir de sa jurisprudence.
Le second contrôle c’est le droit de chaque individu privé de sa liberté peut former un
recours devant un tribunal afin que celui-ci examine la légalité de la mesure privative de liberté. Ce
second type de contrôle est prévu par l’article 5 § 4 de la Convention de sauvegarde assure à chaque
individu détenu ou privé de sa liberté de pouvoir former un recours devant un tribunal pour que
celui-ci examine le bien fondé / la légalité de la mesure privative de liberté.
Le droit d’accéder à un tribunal qui va décider du bien fondé de l’accusation, c’est un droit
qui découle également en grande partie de la Convention de Sauvegarde mais d’un autre article,
l’article 6 § 1 de cette Convention. Cet article 6 § 1 est relatif au droit à un procès équitable. Cet
article énonce que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal
indépendant et impartial qui décidera du bien fondé de toute accusation en matière pénale dirigée
contre elle. En effet cet article 6 § 1 qui énonce le droit à un procès équitable implique
nécessairement / préalablement la possibilité même de pouvoir saisir un juge. Ca ne sert à rien de
garantir l’impartialité, l’indépendance d’un juge si on ne peut pas y accéder. C’est à cette conclusion
tout à fait logique qu’a abouti la CEDH dans un important arrêt : arrêt Golder contre Royaume-Unis
du 21 février 1975. Dans cet arrêt la CEDH a déduit de l’article 6 § 1 la possibilité, le droit à chacun
d’accéder à un juge auquel il peut s’adresser.
Ce droit à un juge exprime le droit de toute personne de s’adresser à un juge pour pouvoir
contester une sanction pénale ou éventuellement administrative. Devant une cour d’Assises, la
personne accusée va pouvoir faire valoir sa défense et plaider sa cause en s’adressant devant un
juge, donc l’article 6 § 1 en ce sens n’a pas vraiment d’intérêt. Mais il faut bien voir qu’il existe
certaines infractions qui donnent lieu à des sanctions pénales sans qu’un juge intervienne. Le plus
grand nombre des sanctions pénales sont des sanctions qui sont prises alors qu’aucun juge ne va
examiner le bien fondé de l’accusation. C’est le cas de toutes les infractions mineures pour lesquelles
sont prévues des procédures d’amendes forfaitaires.
Procédure d’amende forfaitaire : elle se passe totalement de l’intervention d’un juge. C’est une
procédure quasi automatisée puisqu’une amende forfaitaire va être adressée au contrevenant sans
qu’un juge intervienne.
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Dans ces cas de figure, le droit à un juge retrouve toute sa portée puisque le droit à un juge
implique que la personne qui est condamnée à une telle amende forfaitaire puisse s’adresser à un
juge afin de contester la sanction pénale dont elle a fait l’objet. C’est ce qu’a rappelé la CEDH
notamment dans un arrêt Célice contre France du 8 mars 2012 : la France a été condamnée car un
automobiliste avait été condamné par un système d’amende forfaitaire et qu’il n’avait pas eu la
possibilité ultérieurement d’accéder à un juge afin de lui soumettre une requête afin d’être exonéré
de sa condamnation = requête en exonération.
Avocat au conseil : la Cour de cassation va comme le Conseil d’état juger un certain nombre de
contentieux, la plupart des contentieux la représentation est obligatoire. On est obligé d’avoir un
avocat si on veut s’exprimer devant la Cour de cassation. Mais, il ne faut pas n’importe quel avocat.
Un certain nombre d’avocats ont le « privilège », la compétence pour plaider et rédiger des
écritures devant la Cour de cassation. Ce sont ce qu’on appelle les avocats au conseil. Ces avocats
fonctionnent un peu sur le système des notaires les notaires ont un office. Les avocats au conseil
sont titulaires d’un office crée par la loi et après ils peuvent éventuellement céder cet office…
Ce droit à un juge offre un second aspect. Ce droit à un juge offre en effet le droit à un
recours et ce droit est énoncé de manière assez ambigüe par l’article préliminaire du Code de
Procédure Pénale. Cet article nous dit que toute personne condamnée a le droit de faire examiner sa
condamnation par une autre juridiction. Donc toute personne qui a été condamné a le droit de saisir
une autre juridiction pour qu’elle examine à nouveau le bien fondé de cette condamnation. Ce texte
est ambigu car à l’époque où il a été adopté c'est-à-dire en 2000, le droit français ne connaissait pas
encore d’appel à propos des décisions rendues par les Cours d’Assises.
Ce droit à un recours est également assuré par un autre texte : l’article 2 § 1 du protocole
additionnel de la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des libertés fondamentales.
Cet article 2 nous dit que toute personne déclarée coupable d’une infraction pénale par un tribunal a
le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la
condamnation. Donc toute personne déclarée coupable d’une infraction pénale par un tribunal a le
droit à un recours. C’est le même principe que l’on retrouve dans l’article préliminaire. Ce
qu’expriment ces deux textes c’est le droit a une seconde juridiction. Mais ce droit a une seconde
juridiction n’est pas tout à fait absolu. 2 observations peuvent être faites par rapport à cela.
1ère observation
Il faut bien voir que ce droit à une seconde juridiction n’implique pas nécessairement que
cette seconde juridiction examine le fond de l’affaire. En effet un simple contrôle de la bonne
application du droit peut être conforme à cette exigence du droit à un recours. Le plus fréquemment
ce droit à un recours va se matérialiser par un appel. Dans le cadre de cet appel on pourra discuter
du fond du litige et du droit. Mais un simple recours devant une juridiction qui n’examinerait que la
légalité de la convention, qui n’examinerait que si les règles de droit ont bien été appliquées pourrait
être conforme aux dispositions de l’article 2 § 1 du protocole additionnel et à l’article préliminaire. En
effet l’examen par une juridiction supérieure peut se limiter à un contrôle de l’application du droit.
2nd observation
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Ce droit à un double degré de juridiction est assorti de limitations. Ces limitations sont
possibles et d’autant plus possibles s’agissant des infractions mineurs.
Exemple : lorsque l’enjeu du litige est tout à fait modique, certes je peux accéder à un juge
mais de là à accéder à une juridiction d’appel cela peut sembler excessif.
Donc ce droit à un recours peut être exclu lorsqu’on est condamné pour une infraction mineure.
Conclusion
1. Droit au juge = droit d’accéder à un juge pour qu’il détermine si l’accusation était ou non
bien fondée lorsqu’une sanction pénale à été prononcée sans intervention d’un juge
Le droit au juge c’est le droit à un bon juge et on veut que les personnes qui accèdent à un
juge puissent accéder à un juge qui présente certaines qualités. Les qualités que doit présenter ce
juge sont énoncées par l’article 6 § 1 de la Convention de Sauvegarde. Cet article nous dit que toute
personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial. Donc les
deux qualités que l’on attend d’un juge c’est qu’il soit indépendant et qu’il soit impartial. Ces
qualités que l’on attend du juge, on les attend non seulement lorsqu’il doit statuer sur le bien fondé
d’une accusation en matière pénale mais on attend également ces qualités du juge lorsqu’il va
assurer un contrôle d’une mesure restrictive de liberté.
Le droit à un juge indépendant renvoie à cette notion d’indépendance du juge. Dire d’un juge
qu’il doit être indépendant c’est simplement dire du juge qu’il doit être imperméable au pouvoir
extérieur. Pour le juge être indépendant c’est donc être imperméable au pouvoir exécutif et
législatif. Il ne doit pas pouvoir subir de pression, d’injonctions de ces autres pouvoirs. A l’égard des
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Le Conseil constitutionnel n’a pas tout à fait partagé cette manière de voir les choses
puisque dans une décision du 8 décembre 2017 il a au contraire souligné que la Constitution
garantissait l’indépendance des magistrats du parquet. En réalité, il n’est pas certain que le Conseil
constitutionnel entende ainsi se heurter frontalement à la CEDH. Le fait que le Conseil
constitutionnel reconnaisse ainsi que les magistrats du parquet sont indépendants n’a pas en réalité
de portée pratique qui pourrait conduire à ce que sa jurisprudence heurte celle de la CEDH. Donc, la
décision de 2017 n’a pas pour conséquence de heurter fondamentalement la jurisprudence de la
CEDH puisque il reste néanmoins très exigeant quant au droit d’accéder à un magistrat du siège.
Le droit à un juge impartial c’est le droit à un juge qui n’est pas partisan, qui n’est pas parti.
Il faut faire attention car naturellement à un moment donné le juge va prendre parti, il est là pour ça
en fait il doit trancher. Mais il faut néanmoins qu’il n’ait pas un parti pris avant d’avoir entendu les
différents arguments qui sont avancés devant lui. En fait quand on attend du juge qu’il soit impartial
on attend de lui qu’il tranche le litige au regard des éléments qui lui sont avancés par les parties et
non pas au regard de présupposés qu’il pourrait avoir.
Là encore exiger d’un juge qu’il soit impartial est complètement incompatible avec les
membres du ministère public. Ces membres sont partiaux par nature, c’est leur fonction même qui
implique qu’ils sont partiaux. En effet les membres du ministère public nécessairement interviennent
dans le procès pénal en tant que parties. Naturellement puisqu’ils agissent en tant que parties
poursuivantes, nécessairement on ne peut pas dire d’eux qu’ils sont impartiaux.
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Donc, cette exigence d’impartialité va concerner plus spécifiquement les membres du siège.
C’est ce que juge classiquement la Cour de cassation. Elle dit que le moyen tiré de la partialité d’un
magistrat du ministère public est inopérant. Tout simplement car ce magistrat est nécessairement
partial, on ne peut pas lui reprocher d’être partial c’est son rôle. Donc les membres du ministère
public sont des parties. Ce qui va donc poser des difficultés c’est l’impartialité des magistrats du
siège. Ce sont d’eux dont on attend qu’ils soient impartiaux. On va alors procéder en deux temps.
Démarche subjective :
L’illustration la plus connue concerne un arrêt rendu par la 2ème chambre civile de la Cour
de cassation (donc pas répressif). C’est un arrêt qui a été rendu le 14 septembre 2006. Dans cet
arrêt, il s’agissait d’une affaire tranchée par un juge de proximité. L’affaire opposait le propriétaire
d’une caravane à un locataire de cette caravane. Le juge de proximité pour donner raison au
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locataire s’est fondé sur des termes injurieux vis-à-vis du propriétaire de la caravane. Par exemple le
juge de proximité à jugé « la propriétaire de la caravane était dotée d’un caution intellectuel aussi
restreint que la surface habitable de sa caravane ». Là le juge de proximité s’est lâché et du coup
dans son jugement il a exprimé son sentiment vis-à-vis des parties et notamment la propriétaire de la
caravane. Se faisant, en se basant sur les propriétés intellectuelles de la propriétaire de la caravane,
le juge de proximité a motivé son jugement en s’appuyant sur une sorte de préjugé. Il a donné raison
à une partie parce qu’elle était plus intelligente que l’autre apparemment. Forcément la Cour de
cassation n’a pas pu laisser passer cette méconnaissance flagrante du principe d’impartialité et donc
elle a censuré cette décision.
On a à peu près les mêmes cas de figure en matière répressive. On peut prendre l’exemple
d’un arrêt rendu par la CEDH le 23 avril 1996 dans une affaire Remli contre France. Ici une personne
d’origine magrébine était citée devant une cour d’assise en tant qu’accusée. Elle était donc jugée par
la Cour d’Assises. Un certain nombre de témoins sont appelés à la barre. L’un de ces témoins alors
qu’il déposait à la barre du tribunal a entendu l’un des jurés de cette Cour d’Assises dire « de toute
façon je suis raciste ». Là encore si le juré s’est présenté comme raciste, on peut douter de son
impartialité. On peut en douter car il a manifestement fait part d’un parti pris.
Il y a donc quelques cas comme ceux là où on un juge, publiquement, va faire part de son
parti pris. Le problème c’est que ce n’est pas très fréquent et du coup cette démarche d’impartialité
subjective est relativement peu protectrice des justiciables car il suffit au juge ne de pas exprimer
publiquement son préjugé pour qu’il échappe à cette démarche subjective. C’est pourquoi à côté de
cette démarche subjective a été également mise en place par la CEDH une démarche objective.
Démarche objective :
Elle ne s’attache plus (comme c’était le cas pour la démarche objective) à la manifestation
d’un parti pris par le juge. La démarche objective va s’attacher à l’image du juge : à l’apparence
d’impartialité que dégage le juge. L’idée c’est qu’il faut que les parties aient raisonnablement pu
penser du juge qui examine leur cas qu’il est effectivement impartial.
En réalité cette impartialité objective va prohiber qu’un juge intervienne lorsque l’on peut
penser (même si ce n’est pas véritablement établi) qu’il ne peut être impartial.
Dans quels cas peut-on penser qu’un juge ne peut pas être impartial
alors que pourtant il n’a pas publiquement pris un parti pris ?
Ça va être le cas lorsqu’un juge noue une relation avec l’une des parties ou avec son
représentant (un avocat par exemple). Ici on peut se dire que le juge va nécessairement favoriser les
intérêts de la personne avec laquelle il a noué une relation. Publiquement le juge ne va pas dire qu’il
le fait, peut être qu’il ne le ferait pas mais objectivement il ne revoie pas l’image d’un juge impartial.
Donc lorsque le juge noue ainsi une relation avec une partie ou un représentant d’une partie, on
peut douter objectivement de son impartialité.
C’est ce qu’à dit la CEDH dans un cas où le juge était l’oncle de l’avocat de l’une parties. C’est
un arrêt de la CEDH du 15 octobre 2009, arrêt Micallef contre Malte. Ici la CEDH dit qu’on peut
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objectivement douter de l’impartialité du juge puisqu’on va se dire qu’il va favoriser la cause qui est
défendue par son neveu.
En France une telle éventualité est peu probable (qu’un magistrat tranche une affaire où
l’avocat est un des membres de sa famille). Mais à Malte, le territoire est plutôt petit et donc
forcément tout le monde se connait plus ou moins dans le monde judiciaire. Il peut donc très vite y
avoir des gens qui doivent juger des personnes qu’ils connaissent, ou au moins indirectement. On
peut donc remarquer que dans des petits états cette exigence d’impartialité peut être assez
complexe à mettre en œuvre.
Il y a une deuxième série de cas où l’on peut douter de l’impartialité du juge. Cette seconde
série de cas s’appuie sur les fonctions qu’a pu occuper un juge antérieurement dans une même
affaire. Imaginons qu’une personne soit condamnée par un tribunal correctionnel en 1ère instance et
qu’elle interjette appel. En appel, la personne retrouve les mêmes juges qu’en 1ère instance qui l’avait
déclarée coupable et condamnée. Dans un tel cas de figure cette personne peut raisonnablement
avoir des doutes sur le fait que son affaire soit jugée avec impartialité la seconde fois. Dans un tel cas
de figure les fonctions occupées par les juges en 1ère instance les empêchent de présenter toutes les
garanties d’impartialité dans la même affaire. Donc les fonctions occupées par un juge dans une
affaire peuvent s’opposer à ce qu’il connaisse à nouveau, ultérieurement, de la même affaire. Pour
cette raison on parle parfois d’impartialité fonctionnelle. On dit que l’impartialité découle des
fonctions du juge et donc on parle d’impartialité fonctionnelle.
Par exemple la CEDH a énoncé que méconnaissait l’exigence d’impartialité le fait qu’un
magistrat qui instruis une affaire en tant que juge d’instruction soit ensuite désigné pour statuer en
Cour d’Assises.
Ici l’impartialité fonctionnelle tend à éviter qu’un juge ne connaisse d’une même affaire en
qualité de titre de plusieurs fonctions. Ce qui compte pour que le juge soit considéré comme étant
partial c’est que dans une même affaire il ait eu à apprécier plusieurs fois la culpabilité d’un individu,
d’une personne poursuivie. En effet, dès lors que le juge a apprécié une première fois la culpabilité
d’un individu, il ne peut plus apprécier une seconde fois la culpabilité de ce même individu. C’est ce
qui résulte d’un arrêt rendu par la CEDH le 24 mai 1989, l’arrêt Hauschildt contre Danemark la CEDH
a énoncé qu’une personne magistrate qui a apprécié la culpabilité d’une personne poursuivie dans
une affaire ne peut plus ensuite être amenée à nouveau à apprécier sa culpabilité même si c’est en
une autre qualité. Cette exigence d’impartialité fonctionnelle est prolongée dans le Code de
Procédure Pénale français. L’impartialité fonctionnelle fait l’objet d’un certain nombre de
dispositions qui vont prolonger son existence, et donc dans le Code de Procédure Pénale on a un
certain nombre d’incompatibilité de fonctions qui sont prévues. Par exemple l’article 49-2 du Code
de Procédure Pénale dit que le juge d’instruction ne peut pas participer au jugement des affaires
pénales dont il a connu en tant que juge d’instruction.
La Cour de cassation applique strictement les textes. D’abord, pour rechercher s’il n’y a pas
un cas de partialité fonctionnelle, elle va rechercher s’il n’existe pas un texte dans le Code de
Procédure Pénale qui prohibe tel cumul de fonction. A défaut de textes prohibant le cumul de
fonctions, elle recherche si le juge dans l’affaire qui lui est soumise n’a pas été conduit à apprécier la
23
Donc 2 cas :
1. Les cas où le juge à noué une relation avec une des parties ou avec un de ses
représentants.
Il faut voir qu’il existe 2 séries de mécanismes pour lutter contre la partialité d’un juge. On a
des mécanismes préventifs et des mécanismes curatifs.
Ils servent à éviter qu’un juge dont l’impartialité est douteuse, connaisse d’une affaire et
rende une décision dans cette affaire. Ils sont préventifs car ils visent à prévenir le prononcé de la
décision, ils vont éviter que le juge qui est sans doute partial ne rende sa décision. Ils préviennent
l’existence d’une décision rendue par un juge partial. Ces mécanismes préventifs sont au nombre de
deux.
La récusation :
Exemple : on peut déposer une requête en récusation si le juge est parent ou allié de l’une
des parties (article 668).
Cette requête en récusation est donc possible dans 9 cas prévus par l’article 668 du Code de
Procédure Pénale. Il faut noter que le dernier cas prévu par cet article 668 est assez large puisqu’on
peut déposer une requête en récusation dans tous les cas où il existe à l’égard du juge des
manifestations assez graves pour faire suspecter son impartialité. On peut déposer assez largement
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une requête en récusation. Cette requête en récusation vise à obtenir le remplacement d’un
magistrat. C’est ça qui oppose la requête en récusation avec le second mécanisme préventif qui est
la procédure de renvoie pour cause de suspicion légitime.
C’est le second mécanisme préventif. Cette procédure est prévue par l’article 662 du Code de
Procédure Pénale. Cette procédure s’applique lorsqu’un fait ou une circonstance fait douter de
l’impartialité de toute une juridiction. Donc à l’inverse de la procédure de récusation, la procédure
de renvoie doit être utilisée lorsqu’on peut douter de l’impartialité de toute une juridiction. En
réalité il y a deux cas de figure où cela peut se présenter.
1. Le cas où une juridiction est composée d’un unique magistrat. Lorsqu’il y a un unique
magistrat on peut obtenir son remplacement en utilisant une procédure de renvoie pour
cause de suspicion légitime. En réalité lorsqu’une juridiction est composée d’un unique
magistrat comme c’est le cas par exemple dans les juridictions d’instructions
(traditionnellement), on peut utiliser alternativement soit la procédure de récusation soit la
procédure de renvoie.
2. En dehors du cas précédant, il se peut que la procédure de renvoi pour cause de suspicion
légitime doit être mise en œuvre parce que notamment la victime appartient à un lien avec
un tribunal donné. On en a eu un exemple dans un arrêt du 30 novembre 1994 rendu par la
chambre criminelle. Dans cet arrêt, un automobiliste avait eu un accident/ une altercation
avec un substitut du Procureur. Ce substitut exerçait auprès du Tribunal correctionnel de
Melun. L’automobiliste en question avait été assez brutal puisqu’il a été cité dans le Tribunal
correctionnel de Melun. Autrement dit, l’automobiliste s’est dit légitimement qu’au fond il
allait être jugé par des magistrats qui étaient des collègues de la victime. Donc il pensait que
les personnes n’allaient pas être impartiales avec lui. En conséquence l’automobiliste a
déposé une demande de renvoie pour cause de suspicion légitime et la chambre criminelle
de la Cour de cassation a estimé que effectivement, la juridiction du tribunal correctionnel de
Melun dans son ensemble n’offrait pas de garanties suffisantes d’impartialité. En
conséquence, la Cour de cassation a fait droit à cette requête. Ils ont donc délocalisé l’affaire.
En fait la procédure de renvoie abouti à ce que l’affaire soit jugée par un autre tribunal
correctionnel, ailleurs en France.
Ces deux mécanismes sont donc préventifs car ils vont être mis en œuvre avant que le juge ne
statut sur l’affaire. Donc avant que le juge partial ne rende une décision.
Mais peut se dire que cette partialité d’un juge ou d’une juridiction peut très bien conduire à
ce que le juge finalement rende une décision parce que les mécanismes préventifs n’auraient pas été
mis en œuvre. On peut très bien imaginer que dans l’affaire précédente par exemple, l’automobiliste
n’ait pas demandé le renvoi pour cause de suspicion légitime. Dans un tel cas de figure se pose la
question de savoir si :
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On peut la critiquer, on peut exercer une voix de recours à l’encontre de cette décision. C’est
là où on arrive au mécanisme curatif.
Ils ne visent plus à éviter que le juge partial ne rende une décision. Ils visent à supprimer
cette décision. Cette suppression de la décision de la suppression passe par l’exercice d’une voix de
recours. Pour demander l’annulation d’une décision qui aurait été rendue par un magistrat partial, il
faut encore qu’on ne puisse pas reprocher à la partie d’avoir mis en œuvre les mécanismes
préventifs. Autrement dit, ces mécanismes curatifs ne peuvent être mis en œuvre que par une
partie à l’encontre de laquelle on ne peut pas reprocher de ne pas avoir recouru aux mécanismes
préventifs. En fait, si on peut reprocher à la partie de ne pas avoir utilisé les mécanismes préventifs
alors qu’elle pouvait le faire, on refusera d’annuler les décisions qui ont été rendues par le magistrat.
Les mécanismes curatifs ne peuvent donc être mises en œuvre que si la partie qui sollicite leur
application n’a pas pu, n’a pas eu la possibilité de mettre en œuvre la procédure de récusation ou la
procédure de renvoie pour cause de suspicion légitime avant que le juge ou le tribunal statut. L’idée
c’est qu’on doit éviter que la personne qui estime qu’un juge ou qu’une juridiction est partiale ne
conserve cet argument dans le cas où il apparaitrait que la décision rendue lui est défavorable et
sollicite ainsi son annulation.
Le respect des droits de la défense constitue sans doute l’un des droits si ce n’est le droit le
plus fondamental du procès pénal. Pourtant si on lit la convention de sauvegarde, ou l’article
préliminaire du Code de Procédure Pénale, aucun d’eux ne se réfère expressément à la notion de
droit de la défense. En réalité, c’est un peu trompeur. Même si ces 2 textes ne se réfèrent pas à cette
notion de droit de la défense, il reste néanmoins que ces textes garantissent un certain nombre de
droits qui découlent du principe du respect des droits de la défense. Donc même si on ne retrouve
pas l’expression de droit de la défense, l’article préliminaire et la convention de sauvegarde
garantissent un certain nombre de droits qui découlent de ces droits de la défense. Le Conseil
constitutionnel dans une décision du 2 décembre 1976 a considéré que le respect des droits de la
défense avait valeur constitutionnelle. Elle l’a déduit d’une application de l’article 16 de la DDHC.
En réalité les droits de la défense ne protègent pas une unique partie au procès pénal, ils ne
protègent pas uniquement le défendeur. Les droits de la défense protègent toutes les parties dans le
procès pénal. Ils vont donc protéger la personne qui est poursuivie mais ils bénéficient également à
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la partie civil s’il y en a une ou au ministère public. Les droits de la défense garantissent donc les
droits de toutes les parties au procès pénal.
2nd difficulté : cette notion de droits de la défense est assez vague, difficile à définir. Cette
notion de droits de la défense est une norme fondamentale puisqu’elle a valeur constitutionnelle.
Pour autant, il est difficile précisément de définir ce que sont ces droits de la défense. En réalité, on
doit considérer que les droits de la défense se manifestent dans le procès pénal par un certain
nombre de mécanismes protecteurs des parties.
A- Le principe du contradictoire
1er aspect : il suppose une information parfaite des parties en litige. Les parties doivent
mutuellement se faire connaitre les différents éléments qu’elles vont invoquer au cours du
procès. Par exemple il faut que les parties s’échangent les pièces qui concernent le dossier
afin de pouvoir en connaitre.
2nd aspect : il implique pour chaque partie le droit de discuter les différents éléments
invoqué dans le cadre du procès.
En résumé, le principe du contradictoire est une information aux fins de discussion. Ce principe
du contradictoire joue un rôle extrêmement important dans le cadre de la procédure pénale.
Concernant l’application des règles de droit : le juge lorsqu’il est saisi en matière pénale à la
droit ou le devoir de requalifier les faits de la cause. Cela signifie que si les faits lui ont été présentés
sous une catégorie juridique, il lui appartient (c’est une obligation) s’il estime que ces faits relèvent
d’une autre catégorie juridique de procéder à une requalification juridique.
Exemple : si une Cour d’Assises est saisie par un juge d’instruction de personnes qui sont
poursuivies pour meurtre, si la Cour d’Assises estime qu’en réalité au-delà d’un meurtre
c’est un assassinat qui a été commis, il appartient à la Cour d’Assises de procéder à cette
requalification. Ce faisant, la Cour d’Assise va en réalité opérer une substitution des
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règles de droit applicable = les règles relatives au meurtre ne s’appliquent pas, ce sont
celles relatives à l’assassinat.
La requalification consiste à dire que des faits ne relèvent pas d’une qualification juridique
donnée mais d’une autre qualification juridique. De cette requalification découle généralement une
substitution des règles de droit applicables. La requalification est un devoir pour le juge ! Il lui
appartient de requalifier les faits de la cause. S’il estime qu’une affaire qui est présentée par le
ministère public ou une partie sous une qualification donnée n’est pas correcte, il doit requalifier. Le
problème c’est que fréquemment le juge s’aperçoit de la nécessité de requalifier assez tardivement.
En général il s’en aperçoit lorsque les débats sont terminés et qu’il est en train de délibérer. Le
problème c’est qu’à ce stade les parties ne sont plus en mesures de présenter leurs observations
puisqu’elles n’y sont pas invitées : les débats sont clos et le juge délibère. Le gros risque c’est que le
juge s’appuie sur une qualification qui n’avait pas été discutée lors des débats. Ce risque doit être
combattu. La chambre criminelle de la Cour de cassation énonce de manière tout à fait constante
que si le juge répressif doit procéder à une requalification, il doit restituer aux faits leurs véritables
qualifications, il faut néanmoins que les parties aient été en mesure de présenter leurs observations
aux nouvelles qualifications qu’il entend appliquer. Concrètement, si le juge est en train de rédiger
son jugement avant de le prononcer et qu’il estime qu’une nouvelle qualification s’impose, il va
devoir rouvrir les débats afin de permettre aux parties de pouvoir présenter leurs observations sur
cette nouvelle qualification appliquée. S’il n’y procède pas, sa décision sera censurée par une
juridiction supérieure.
Cette exigence du contradictoire est tout à fait fondamental mais pourtant elle ne va pas
s’appliquer identiquement à des phases du procès pénal. Elle ne joue pas de façon identique tout au
long du procès pénal. Au stade de l’enquête (stade d’investigation) lorsque les services de polices
judiciaires recherchent des éléments de preuves, le principe du contradictoire est dans une très large
mesure écartée. Il faut privilégier l’efficacité des investigations. Respecter le principe du
contradictoire à ce stade reviendrait à nuire cette efficacité de l’enquête pénale. Au-delà de ça au
stade de l’enquête il est extrêmement difficile de faire appliquer le principe du contradictoire.
Souvent au stade de l’enquête on n’a pas encore véritablement identifié le suspect et donc on ne
peut pas appliquer le contradictoire.
En revanche une fois qu’on quitte l’enquête et qu’on entre dans l’instruction ou dans la
phase de jugement, là le principe du contradictoire joue pleinement. Autrement dit, ce principe va
se renforcer au fur à et mesure de l’écoulement du procès pénal. Il est tout à fait embryonnaire au
stade de l’enquête et petit à petit, il va se renforcer pour trouver pleinement à se manifester au
stade de la phase de jugement.
B- Le droit à l’information
Ce droit à l’information consiste pour l’essentiel à éviter qu’une personne ne subisse une
mesure restrictive de liberté ou ne subisse une mesure d’investigation ou voir ne soit poursuivie
sans savoir exactement ce qui lui est reproché. Autrement dit ce droit à l’information va
essentiellement permettre aux personnes de connaitre ce qui leur est reproché lorsqu’elles sont
poursuivies ou lorsqu’elles font l’objet d’une mesure restrictive de liberté. Ce droit à l’information va
28
Ce droit fait aujourd’hui partie intégrante des droits de la défense. Et ce droit d’être assisté
par un avocat va dans une certaine mesure lui aussi conforter le principe du contradictoire. L’avocat
parce qu’il maitrise à priori le droit, va pouvoir faire en sorte de tirer profit des informations
transmises ce qui va épauler le principe du contradictoire. Ce droit d’être assisté par un avocat fait
parti des droits de la défense mais ce droit n’est pas expressément garantie par l’article préliminaire
du Code de Procédure Pénale. En revanche, on le retrouve dans l’article 6 § 3 de la Convention de
Sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Cet article 6 § 3 nous dit en effet
que « tout accusé à le droit de se défendre lui même ou d’avoir l’assistance d’un défenseur de son
choix ». L’article poursuit en indiquant que s’il n’a pas les moyens de rémunérer un défenseur, il
pourra être assisté gratuitement par un avocat qui lui sera commis d’office. Donc cet article garanti
le droit à l’assistance d’un avocat même si la personne n’a pas les moyens de le payer.
Le droit à un avocat, là encore, ne joue pas identiquement au cours de toutes les phases du
procès pénal. Le droit à un avocat va pleinement se manifester et pleinement jouer lors de la phase
de jugement et devant le juge d’instruction. Au cours de la phase de jugement, le droit à l’assistance
d’un avocat va pleinement se manifester. Devant le juge d’instruction (juridictions d’instructions) on a
l’article 116 du Code de Procédure Pénale qui permet à chaque personne de bénéficier de
l’assistance d’un avocat et les autres parties à la phase d’instruction (par exemple les personnes qui
se constitueraient partie civile) ont de la même manière la possibilité d’être assistées d’un avocat.
Devant les juridictions de jugement types tribunal correctionnel ou tribunal de police, l’article 417 du
Code de Procédure Pénale garantie la possibilité d’être assisté par un défenseur. Donc devant les
juridictions de jugements et d’instructions la possibilité d’être assisté par un avocat joue pleinement.
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Devant la Cour d’Assise, cette possibilité d’être assisté par un avocat se transforme
véritablement en devoir. Devant la Cour d’Assises on a l’obligation d’être assisté par un avocat. C’est
l’article 317 du Code de Procédure Pénale qui pose cette exigence. Cet article nous dit « à l’audience,
la présence d’un défenseur auprès de l’accusé est obligatoire ». Cette présence obligatoire est
expliquée parce que les peines prononcées risquent d’être très lourdes et donc la gravité de ces
peines justifie que la personne soit nécessairement assistée d’un avocat. D’autre part le fait que la
Cour d’Assise implique la présence de jurées, de personnes qui ne sont pas des professionnels
supposent là encore un certain degré de complexité et donc ce degré de complexité peut être
surmonté par la présence d’un avocat. C’est pour ces 2 raisons en autres que la présence d’un avocat
est obligatoire.
Il peut arriver que certaines personnes ne veuillent pas d’avocats devant la Cour d’Assises.
Dans ce cas un avocat est néanmoins désigné pour les assister et il se tient en silence à leurs côtés.
Dans un tel cas de figure l’avocat interviendra uniquement si l’accusé le lui demande au cours de
l’audience ou s’il apparaît que la procédure est gravement méconnue. Mais dans tous les cas un
avocat doit se tenir, même en silence à côté de l’accusé.
Ce droit d’être assisté par un avocat a même donné lieu il y a quelques années à une
condamnation de la France par la CEDH. En matière pénale une personne peut être jugée en son
absence, on appelle ça la procédure par contumace (ancienne expression) ou par défaut (expression
actuelle). La procédure par défaut est menée en l’absence de la personne qui est poursuivie. Le droit
français accepte ainsi de juger une personne malgré son absence. Mais pendant très longtemps la
position traditionnelle du droit français c’était de dire si la personne est absente, elle n’a pas le
droit être assisté par un avocat. Il y a d’ailleurs une certaine logique à cela. Cette solution du droit
français a été condamnée par la CEDH dans un arrêt Krombach contre France qui date du 13 février
2001. Cet arrêt concerne une affaire qui a eu un certain retentissement médiatique. Cette affaire
concernait un docteur allemand qui était parti en vacances avec sa belle-fille et sa femme et au cours
de ces vacances sa belle-fille a été retrouvée morte dans des circonstances douteuses qui laissaient
même entendre qu’elle avait été abusée sexuellement. Mr Krombach était donc poursuivi par le
parquet français et il a été renvoyé devant une Cour d’Assises. Comme il était allemand, il s’est
réfugié en Allemagne et ne s’est pas présenté à son procès qui avait lieu en France. Mais il avait
néanmoins demandé à un avocat d’aller le représenter devant les juridictions françaises. Cependant,
conformément à leur position traditionnelle les juridictions françaises n’ont pas accepté. La CEDH a
condamné cette application du droit français et elle nous a dit qu’un accusé ne perd pas du seul fait
de son absence aux débats le bénéfice d’un avocat. Cette décision de la CEDH a donc condamné le
système français qui interdisait la personne absente d’être défendue par un avocat. Le législateur
français en a donc tiré les conséquences en modifiant le Code de Procédure Pénale en admettant
désormais qu’une personne absente à son procès a le droit d’être défendue par un avocat de son
choix.
Ce droit à être assisté à un avocat au stade de l’enquête joue de manière beaucoup moins
importante. En effet, ce droit tend généralement à être écarté. C’est la tendance traditionnelle mais
les choses tendent progressivement à s’inverser. Désormais au stade de l’enquête on admet qu’une
personne a le droit d’être assistée par un avocat. L’exemple typique concerne la garde à vue. La
garde à vue même si elle est menée au stade de l’enquête, on considère aujourd’hui que les
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personnes gardées à vue ont le droit d’être assistées d’un avocat dès le 1er interrogatoire qui est
mené par la police. Ce n’était pas forcément le cas auparavant mais la législation française
concernant la garde à vue à beaucoup évolué au cours des 10 dernières années. Donc même au
stade de l’enquête, de plus en plus l’avocat tend à s’imposer afin d’assister les personnes qui sont
éventuellement soupçonnées et qui peuvent alors faire l’objet de mesures restrictives de liberté. On
considère de plus en plus aujourd’hui que cette possibilité qu’on les personnes de se faire assister
par un avocat dès le début d’une enquête peut permettre d’éviter certaines erreurs judiciaires. Il
arrive en effet que les personnes qui sont suspectes vont raconter tout et n’importe quoi sous la
pression de l’enquête. Par conséquent on considère de plus en plus que la présence d’un avocat
même au cours de l’enquête peut être salutaire pour la bonne administration de la justice.
Au cours de la procédure pénale les droits des parties doivent être équilibrés. Cette
exigence d’équilibre des droits des parties se trouve formulée dans l’article préliminaire du Code de
Procédure Pénale. Cet article nous dit que la procédure pénale doit préserver l’équilibre des droits
des parties. La CEDH déduit de l’article 6 § 1 qui concernent le droit à un procès équitable un
principe d’égalité des armes qui est extrêmement similaire au principe d’équilibre des droits posés
par l’article préliminaire du Code de Procédure Pénale. Ces deux articles renvoient à la même idée.
L’idée c’est que le procès pénal c’est un combat entre plusieurs parties : la partie poursuivante
représentée et incarnée par le ministère public et la partie poursuivie qui est incarnée par l’accusé
devant la Cour d’Assises ou la personne suspecte devant les autres juridictions. Pour que ce combat
soit régulier, il faut que chacune des parties disposent de droits équivalents. Il faut nous dit la CEDH
dans plusieurs décisions que chaque partie ait une possibilité raisonnable de présenter sa cause
dans des conditions qui ne la place pas dans une situation de désavantage par rapport aux autres
parties. Cette définition de la CEDH est constante. On en trouve une illustration dans l’arrêt Foucher
contre France du 18 mars 1997. Dans cet arrêt la CEDH nous a dit que le principe d’égalité des armes
implique que chaque partie dispose d’une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des
conditions qui ne la place pas dans une situation de désavantage par rapport aux autres parties.
Le principe est respecté dans 2 séries d’hypothèses. D’abord le principe d’égalité des armes
est respecté nécessairement lorsque toutes les parties au procès disposent de prérogatives
identiques. Si toutes les parties disposent exactement des mêmes droits, le principe d’égalité des
armes est respecté.
Mais le principe d’égalité des armes est également respecté lorsque les droits des parties ne
sont pas identiques mais qu’il n’en résulte pas pour autant de désavantages. Même lorsque les droits
des parties ne sont pas identiques, il n’en résulte pas nécessairement une méconnaissance du
principe d’égalité des armes dès lors que cette absence d’équivalence et d’identité des droits ne
donne pas naissance à des désavantages. Donc lorsque les droits des parties identiques et pour
déterminer si le principe d’égalité des armes a ou non était méconnu, il faut rechercher si de cette
absence d’identité des droits il résulte ou non un désavantage. Il y a des hypothèses où l’absence
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d’identité de droit peut déboucher sur un désavantage. C’était le cas en droit français s’agissant
notamment d’un certain nombre de prérogatives qui étaient offertes au Procureur général. On
considérait qu’il était là pour assurer la bonne application de la loi pénale. De ce fait on lui offrait des
possibilités d’interjeter appel dans des cas où les autres parties ne pouvaient pas interjeter appel.
Autrement dit on permettait au Procureur général d’interjeter appel de certaines décisions alors que
cela était exclu pour toutes les autres parties au procès pénal. La jurisprudence et notamment la
Cour de cassation dans un arrêt rendu le 6 mai 1997 a considéré que permettre ainsi au Procureur
était contraire au principe d’égalité des armes car celui conduit le Procureur à solliciter un ré
examen de la cause alors que la personne poursuivie ne peut pas solliciter ce même ré examen.
Donc la chambre criminelle de la Cour de cassation en 1997 a considéré que cette absence
d’identité des droits débouchait sur un désavantage vis-à-vis de la personne poursuivie et par
conséquent était contraire au principe d’égalité des armes.
En revanche il peut arriver que d’une absence d’identité des droits ou d’une absence
d’identité de traitement ne découle aucun désavantage. Il est tout à fait possible que les droits
accordés aux différentes parties ne soient pas identiques, que les parties ne soient pas
identiquement traitées mais pour autant qu’il ne résulte aucun désavantage pour l’une ou l’autre des
parties. Cette possibilité on peut la constater au travers de l’examen de la jurisprudence qui concerne
l’architecture des salles d’audience. En effet, le Procureur de la République ou plus généralement les
représentants du ministère public sont placés sur une petite estrade sur le côté gauche de la salle. Au
contraire les personnes poursuivies n’ont pas le droit d’être sur une petite estrade. Donc bien
évidement, un avocat a tenté de souligner que cette disposition des salles d’audience entraînait une
méconnaissance du principe de l’égalité des armes. La CEDH a jugé que tel n’était pas le cas. Elle a
estimé que ces positions différentes de la personne poursuivie et des personnes poursuivantes
n’entrainaient aucune méconnaissance du principe d’égalité des armes. Cela dit la CEDH dans un
arrêt du 2 octobre 2003 Morillon contre France, a jugé que cette organisation des salles d’audience
n’avait pas pour conséquence de porter atteinte au principe d’égalité des armes.
Il faut donc toujours rechercher au cas par cas en cas de disparités de traitement entre les
parties s’il en résulte ou non un désavantage pour une partie vis-à-vis d’une autre.
Ce principe a une importance tout à fait décisive dans les sociétés démocratiques. En effet ce
principe garanti à chaque citoyen la possibilité de contrôler le travail des juges. Donc il va
permettre de garantir le bon déroulement du procès pénal. Le principe de publicité va éviter qu’une
décision soit rendue au terme d’une procédure secrète. Il va donc éviter des décisions arbitraires.
Ce principe de publicité n’est pas garanti expressément pas l’article préliminaire du Code de
Procédure Pénale. Mais ce principe de publicité peut néanmoins être déduit de certaines
dispositions de la DDHC. Surtout ce principe trouve sa source principale dans l’article 6 § 1 de la
Convention de sauvegarde. Cet article 6 § 1 garantie à toute personne le droit à ce que sa cause soit
entendue publiquement et le droit à ce qu’un jugement soit rendu publiquement. Donc au final le
principe de publicité se dédouble à la lecture de cet article 6 § 1, non seulement il garantie le droit
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que sa cause soit entendue publiquement par un tribunal mais également que le prononcé de la
décision soit rendu publiquement. Les débats et le prononcé de la décision par le juge doivent être
publics. En fait les personnes publiques ont le droit de se rendre dans les salles d’audience, c’est ce
que garantie le principe de publicité. Ce principe de publicité est doublement circonscrit dans le
cadre du procès pénal.
D’abord cette exigence de publicité ne concerne pas toutes les phases du procès pénal. Ce
principe de publicité s’applique essentiellement à la phase de jugement, c'est-à-dire à cette phase
où va être apprécié la culpabilité. Cela signifie qu’au cours de l’enquête ou de l’instruction le principe
de publicité est dans une très large mesure écartée. Il ne concerne donc pas toutes les phases du
procès pénal. En fait au cours de l’enquête et de l’instruction il y a un autre principe qui s’applique
et qui est presque l’antithèse, le contraire du principe de publicité c’est le principe du secret. Ce
principe de secret explique que dans une large mesure le principe de publicité est alors écarté. Le
principe du secret n’exclut pas que toutes les décisions prises au cours de l’enquête et de
l’instruction soient publiques, il n’exclut pas que le législateur puisse prévoir que des décisions soient
rendues publiquement mais il ne découle pas de l’article 6 § 1 que cela est obligatoire. Donc le
principe de publicité ne s’applique pas aux phases d’enquête et d’instruction. C’est le 1er élément qui
permet à circonscrire l’application du principe de publicité.
En second lieu, l’exigence de publicité est parfois écartée même au cours de la phase de
jugement. Elle est écartée lorsque d’autres intérêts vont l’exiger. Cette possibilité d’écarter le
principe de publicité découle de l’article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde. Cet article nous dit
que l’exigence de publicité des débats peut être écartée notamment pour protéger l’ordre public
ou pour protéger les intérêts de parties au procès. Donc l’exigence de publicité n’est pas tout à fait
absolue, d’autres intérêts peuvent conduire à l’écarter. Ces dérogations au principe de publicité sont
prolongées dans le Code de Procédure Pénale. Le Code de Procédure Pénale nous dit en effet :
1°) Que le juge peut décider d’écarter le principe de publicité et décider que les débats se
déroulent à huis clos lorsque la publicité est dangereuse pour l’ordre ou pour la sérénité des débats.
Le juge peut le faire grâce à une décision motivée. Cette mise à l’écart du principe de publicité ne
concerne que les débats. En revanche la décision que rendra le juge doit être rendue
publiquement.
2°) Le droit français permet à certaines victimes d’exiger que les débats se déroulent à huis
clos. Devant la Cour d’Assises les victimes de certaines infractions peuvent exiger (c’est un droit
pour elle) que les débats se déroulent à huis clos. Par exemple pour les victimes de viol ou d’actes
de tortures comme en dispose l’article 306 du Code de Procédure Pénale. Le but est d’éviter que
cette victime qui est a priori assez douloureuse ne soit tenue de raconter devant une salle
totalement comble ce qui pourrait la paralyser. Donc la victime peut exiger que les débats se
déroulent à huis clos. Là encore seuls les débats seront à huis clos, le prononcé de la décision sera
quant à lui public.
Devant les juridictions des mineurs il n’y a pas de huis clos au sens strict du terme mais le
principe de publicité est aménagé puisque devant les juridictions pour mineur, lorsqu’un mineur est
jugé on parle de publicité restreinte (à peu près la même idée que le huis clos sauf que certaines
personnes pourront assister aux débats : par exemple les représentants de la personne mineure).
Pour qu’une décision soit comprise par les parties il faut que la personne qui rend cette
décision expose d’une manière ou d’une autre son raisonnement. Il faut qu’elle explique ce qui
concrètement l’a amenée à appliquer telle ou telle peine. Donc il faut qu’elle expose dans une
certaine mesure son raisonnement. C’est une exigence qui est assez élémentaire. Une des exigences
fondamentales du procès est que la personne puisse comprendre les décisions qui sont rendues et
qui la concerne. Cette exigence de compréhension de la décision suppose que les magistrats ou
éventuellement les jurés exposent les termes de leur raisonnement. Il faut qu’ils expliquent leur
raisonnement au moins de manière assez schématique. Cette exigence d’explication a été énoncée
par la CEDH notamment dans un arrêt du 16 novembre 2010, l’arrêt Taxquet contre Belgique. Ici la
CEDH a énoncé que l’accusé doit être à même de comprendre le verdict qui a été rendu. Cette
exigence d’explication va constituer une garantie contre une justice arbitraire.
Le plus souvent elle va passer par la rédaction de motifs dans la décision qui sera rendue par
les juges. Ils vont expliquer pourquoi ils ont rendu telle décision. Le plus important c’est le but : que
la personne comprenne la décision, et non pas les moyens employés. D’ailleurs, cette exigence de
compréhension de la décision se manifeste assez différemment devant les différentes juridictions.
S’agissant des jugements rendus par les tribunaux correctionnels ou les tribunaux de polices, les
décisions sont motivées, cela implique que les juges de ces tribunaux dans le corps de leur décision
expliquent ce qui les a poussés à retenir leur décision. Cette exigence est posée à l’article 485 du
Code de Procédure Pénale. Cet article nous dit que « tout jugement doit contenir des motifs qui
constituent la base de la décision ». Cet article impose donc aux juges des tribunaux correctionnels
ou de police de motiver leur décision. Traditionnellement cette exigence de motivation de ces
tribunaux ne s’impose qu’en ce qui concerne la déclaration de culpabilité de l’individu. En fait seule
la déclaration de culpabilité de l’individu doit faire l’objet d’une motivation spécifique. Les
décisions de ces tribuanaux quant au choix de la peine en revanche n’ont pas à être
traditionnellement motivées. (Une entorse importante existe puisque normalement les peines
d’emprisonnement doivent être motivées mais elles ne le sont pas). Néanmoins, toutes les peines
retenues par les tribunaux correctionnels ou les tribunaux de polices doivent être motivées.
Aujourd’hui, toutes les décisions doivent être motivées tant en ce qui concerne la déclaration de
culpabilité qu’en ce qui concerne le choix de la peine d’emprisonnement.
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Exemple : la décision d’un tribunal de police qui condamne un individu à une peine
d’amende doit être motivé en ce qui concerne ce choix de la peine d’amende.
S’agissant des Cours d’Assises, les choses sont plus complexes. Traditionnellement on
considère que les Cours d’Assises n’ont pas à motiver leurs décisions. En effet parce qu’on considère
qu’il est compliqué pour ces Cours de parvenir à un consensus sur des motifs car elles sont
composées en partie de magistrats professionnels et en partie d’un juré populaire, donc c’est
compliqué pour eux de trouver un consensus sur des motifs. Donc plutôt que de mettre en place des
mécanismes qui leur permettrait de trouver un consensus, traditionnellement on dit qu’ils n’ont pas
à motiver leurs décisions. C’est un peu problématique pour les droits des personnes qui seraient
condamnées par une Cour d’Assises. Pour autant il faut voir que même si les décisions des Cours
d’Assises n’ont pas d’explications, elles peuvent néanmoins être comprises en raison de l’existence
d’un autre mécanisme qui est le mécanisme des questions. En effet, le Président de la Cour
d’Assises va poser un certain nombre de question aux jurés. Il va dresser une liste de question
auxquels les jurés vont répondre par la positive ou la négative. Ces questions qui sont publiques,
vont être générales et simples (exemple : est-ce que l’individu est coupable de telle chose…). Si ces
questions sont extrêmement nombreuses et détaillées, en fonction des réponses que les jurés vont
apporter on va comprendre la décision de la Cour d’Assises même si elle n’est pas motivée. La liste
de questions est communiquée à la personne qui est condamnée et aux différents acteurs du procès.
C’est précisément ce qu’avait énoncé la CEDH quand elle dit que le mécanisme des questions
permet aux personnes poursuivies de comprendre leur condamnation lorsque les questions ont été
suffisamment nombreuses et suffisamment précises. La CEDH ne condamnait donc pas par principe
l’absence de motivation de la décision rendue par la Cour d’Assises.
Le problème c’est qu’il faut que le nombre de question soit important. S’il y a trop peu de
question la personne condamnée ne comprendra pas le verdict de la Cour d’Assises. Cela a donné
lieu à une condamnation de la France où le nombre de questions était très faible. Il s’agit de l’affaire
Agnelet contre France du 10 janvier 2013. Monsieur Agnelet était un avocat qui avait une amante
mais son amante a disparu tragiquement (on n’a jamais su ce qui lui était arrivé car pas de corps)
mais monsieur Agnelet voulait curieusement récupérer les affaires de son exemple conjointe. Le
problème c’est qu’une affaire sans cadavre en général il est délicat de trouver des preuves
intangibles. L’affaire c’est donc joué sur une question d’argumentation. Non seulement monsieur
Agnelet a fait l’objet d’une 1ère ordonnance de non lieu et la Cour d’Assises ensuite l’a acquitté. Mais
cette décision de la Cour d’Assises a fait l’objet d’un appel du ministère public et donc a été réuni une
seconde Cour d’Assises. Cette seconde Cour a été saisi et au contraire de la 1ère a condamné
monsieur Agnelet à 20 de réclusion criminelle. Le problème c’est que cette Cour d’Assises saisi en
appel n’a pas motivée sa décision mais les jurés n’avaient à répondre qu’à 2 questions :
Là, quand l’affaire est arrivée devant la CEDH ça n’a pas plu. Quand il y a trop de questions
comme dans l’affaire Papon contre France où il y avait 300 questions, là l’accusé peut comprendre
pourquoi il est condamné. Mais là il n’y a que 2 questions et en plus la personne était acquittée
35
avant ! Donc il ne peut pas comprendre pourquoi en appel il a été condamné alors qu’en 1ère instance
il ne l’a pas été. Logiquement, la CEDH a condamné la France.
Le législateur français a donc réformé l’article 365-1 du Code de Procédure Pénale. Il l’a fait
au travers de la loi du 23 mars 2019, le législateur français exige des Cours d’Assises qu’elles
motivent leurs décisions non seulement quant à la déclaration de culpabilité de l’individu mais
également quant au choix de la peine. Mais cette motivation passe toujours par le mécanisme un
peu spécial que constitue la feuille de motivation. C’est toujours dans une feuille séparée de la
décision que va être contenu le ou les motifs qui justifie le prononcé de la décision tant en ce qui
concerne la déclaration de culpabilité de l’individu qu’en ce qui concerne le choix de la peine.
On se rend compte qu’aujourd’hui tant en ce qui concerne les Cours d’Assises et les
Tribunaux correctionnels et de polices, l’exigence de motivation est identique et qu’au fond par des
chemins différents l’exigence de motivation s’est imposée dans les mêmes termes devant chacune
de ces juridictions. Aujourd’hui qu’il s’agisse des décisions rendues par les tribunaux correctionnels
ou de polices ou encore par la Cour d’Assises, tant en ce qui concerne la déclaration de culpabilité de
l’individu ou au choix de la peine, ils doivent motiver.
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Chapitre II
Ce principe du droit au respect de la vie privée joue une certaine importance en procédure
pénale. En effet les mesures d’investigation, la détention des individus va nécessairement porter
atteinte à leur vie privée. Si une personne est détenue, sa vie privée va être « mal menée ». De la
même manière si l’on a une mesure d’investigation comme par exemple la perquisition, ces mesures
vont également porter atteinte à la vie privée de la personne qui en fera l’objet. Donc beaucoup de
mesures en procédure pénale sont ainsi susceptibles de porter atteinte au droit au respect de la vie
privée et familiale, au droit au respect du domicile et de la correspondance. Toute la question est de
savoir :
Dans quelle mesure on a le droit de porter atteinte à la vie
privée d’une personne ?
1. 1ère condition : l’ingérence, l’atteinte à la vie privée soit prévue par la loi.
Cette expression « prévue par la loi » laisse entendre qu’il faut qu’un texte prévoie
expressément une atteinte à la vie privée pour que celle-ci soit licite. On pourrait se dire qu’au fond
c’est l’idée qu’un principe de l’égalité s’applique en matière de procédure pénale. Ce n’est pas tout à
fait exact car au sens de l’article 8, cette expression « prévue par la loi » doit être entendue de
manière assez compréhensible. Pour la CEDH la notion de « loi » employée par le texte, désigne
autant les textes que d’éventuelles jurisprudences. De ce fait, le terme de loi renvoie de manière
beaucoup plus compréhensive au-delà des textes à une éventuelle position jurisprudentielle.
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Cependant, il faut que l’atteinte soit prévue de manière suffisamment claire et précise par
le texte ou la jurisprudence pour être licite.
Exemple : une atteinte qui résulterait d’un texte général et qui permettrait au juge
d’instruction de prendre toutes les mesures qu’il souhaite prendre en vu de la
manifestation de la vérité, ne serait pas licite. En effet le certes dirait que le juge peut
prendre toutes les mesures qu’il souhaite pour parvenir à la vérité mais au fond la base
de son intervention ne serait pas suffisamment claire. Donc le juge d’instruction ne
pourrait pas porter atteinte au droit au respect de la vie privée d’autrui ou au droit à la
protection des correspondances en se fondant sur un texte aussi général.
Le texte doit être suffisamment précis, il doit prévoir de façon précise l’atteinte pour
que celle-ci soit licite.
Cela résulte d’une jurisprudence tout à fait constante des droits de l’homme qui notamment
a été illustré par un arrêt du 24 avril 1990, qui est l’arrêt Kruslin contre France. Dans cet arrêt la
CEDH nous a montré qu’il fallait que l’ingérence dans la vie privée d’autrui soit prévue de manière
suffisamment claire par un texte. Il faut que les individus puissent s’attendre à cette ingérence. Cela
implique donc un certain degré de précision soit des textes, soit de la jurisprudence.
Cette exigence de clarté de prévision de l’atteinte par un texte ou par la jurisprudence est la
ère
1 condition.
3. 3ème condition : l’ingérence, l’atteinte à la vie privée doit être nécessaire dans une société
démocratique.
Cela implique que la mesure mise en place s’avère véritablement nécessaire. L’article
préliminaire du Code de Procédure Pénale poursuit cette idée en disant que les mesures
attentatoires à la vie privée doivent être nécessaire à la manifestation de la vérité. Autrement dit les
mesures d’investigations menées doivent être nécessaire à la manifestation de la vérité. Si elles ne
l’étaient pas elles ne seraient pas licites. Cette exigence de nécessité implique un rapport de
proportionnalité entre le moyen mis en œuvre et le but poursuivi. Pour des infractions très peu
graves (faibles contraventions), on doit si on suit cette logique de nécessité mettre en œuvre des
mesures d’investigations qui porteraient atteintes très largement à la vie privée.
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Il peut arriver que les 3 conditions ne soient pas réunies pour une mesure d’investigation
donnée car le législateur a souvent un petit temps de retard. Donc il y a souvent des mesures
d’investigation dont il ne prévoit véritablement le régime qu’avec un petit temps de retard. Il arrive
donc très fréquemment qu’avant même que le législateur prévoit un recours à ces mesures, celles-ci
ont déjà été utilisées par les services judiciaires. C’est là dans ces cas où le législateur a fait preuve
d’un peu de retard qu’on peut se demander si l’utilisation de ces mesures par les services judiciaires
n’est pas contraire à l’article 8 de la convention. Cela a été le cas par exemple pour les écoutes
téléphoniques. Pendant longtemps ces écoutes étaient pratiquées notamment par le juge
d’instruction mais aucun texte précis ne le prévoyait. Le juge d’instruction prend toutes les mesures
d’investigation nécessaire à la manifestation de la vérité (article 81 du Code de Procédure Pénale),
on fondait ces écoutes téléphoniques sur ce texte très vague, très général. En réalité il n’était pas du,
tout établit que ce texte puisse ainsi justifier des atteintes à la vie privée. De ce fait l’atteinte n’était
pas véritablement prévue par la loi.
Ce principe est un principe qui a aujourd’hui une très haute valeur dans l’ordonnancement
juridique. Le Conseil constitutionnel a consacré la valeur constitutionnelle de dignité de la
personne humaine dès une décision du 27 juillet 1994. Mais depuis cette décision, ce principe de
dignité a été réaffirmé par le Conseil constitutionnel. Par exemple dernièrement dans une décision
du 2 octobre 2020 ce dernier a réaffirmé la valeur constitutionnelle de ce principe de dignité de la
personne humaine.
Cette dignité de la personne humaine se prolonge par une seconde prohibition qui est la
prohibition des traitements inhumains et dégradants. Les deux principes sont liés. Cette prohibition
des traitements inhumains et dégradants est prononcée et garantie par un texte de la convention
de sauvegarde : l’article 3. La CEDH a fait le lien entre les 2 principes en soulignant que la prohibition
des traitements inhumains et dégradant constitue « une valeur de civilisation étroitement liée au
respect de la dignité de la vie humaine ». La CEDH a fait se lien notamment dans une décision du 25
avril 2007, l’arrêt REZMIVES contre Roumanie. La dignité est donc protégée par le Conseil
constitutionnel mais également par le biais de cet article 3 de la convention de sauvegarde par la
Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Première direction : le principe de dignité interdit dans une certaine mesure le recours à la
brutalité pour obtenir des éléments de preuve.
Les violences physiques ou morales qui seraient faites contre une personne pour obtenir des
éléments de preuves sont assurément prohibées. La CEDH a déjà donné plusieurs exemples de ce
type, notamment dans un arrêt SELMOUNI contre France. Dans cet arrêt qui date du 28 juillet 1999,
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la CEDH a énoncé qu’à l’égard d’une personne privée de sa liberté l’usage de la force physique qui
n’est pas rendue strictement nécessaire par le comportement de la dite personne, porte atteinte à la
dignité humaine. En fait l’usage de la force physique est autorisé dans le seul cas où le
comportement de la personne en cause est violent. C’est l’apport même de cet arrêt SELMOUNI
contre France : limiter les cas de recours à la violence physique ou la force physique.
La CEDH l’a dit dans des cas où une personne subissait des interrogatoires musclés par les
services de police. La chambre criminelle de la Cour de cassation a eu à connaitre un cas de violence
morale. Cette violence morale consistait à interroger une personne qui était nue au milieu d’une
pièce de garde à vue.
Cette prohibition de l’usage de la force physique ou d’une violence morale pose une question
à propos du recours à des traitements médicaux.
Aujourd’hui de plus en plus d’interventions médicales peuvent être pratiquées dans le cadre
d’une procédure pénale. Par exemple si on n’a une prise de sang pour nous prélever un échantillon
de sang, c’est une intervention médicale. Le prélèvement d’un échantillon de salive est aussi une
intervention de nature médicale qui même si elle parait bénigne reste médicale. Certaines
interventions sont plus violentes. Par exemple il existe des moyens de faire vomir les individus qui
auraient de la drogue dissimulée dans l’œsophage.
énonce qu’une intervention médicale en vu de recueillir des éléments de preuve n’est pas en elle
même constitutive de traitement inhumain et dégradant dès lors qu’elle est justifiée, notamment au
regard de la gravité de l’infraction qui a été commise et qu’elle n’entraine pas de souffrances
physiques ou morales particulières. La CEDH a ainsi pu juger qu’un prélèvement d’un échantillon de
salive par un médecin alors que l’individu n’était pas consentent n’est pas une faute. C’est autorisé.
En effet un prélèvement de salive ou de sang n’est pas constitutif d’une souffrance physique ou
morale très importante. Ce type de prélèvement peut donc être recueilli même sans le
consentement de l’individu concerné.
En revanche la CEDH a considéré le fait que faire ingérer de force à un individu un vomitif
alors que la personne était maintenue par les services de police, était constitutif d’un traitement
inhumain et dégradant. C’est ce qu’a dit la CEHD dans l’arrêt JALLOH contre Allemagne du 11 juillet
2006. Il faut bien voir que si les services de police allemand ont fait cela ce n’était pas par plaisir pour
torturer la personne, c’est parce qu’ils pensaient que la personne avait des sachets de drogue
disséminé dans son œsophage. Le tort des services de police allemand c’est d’avoir considéré, de
s’être placé d’un point de vu de recherche des éléments de preuve et non pas d’un point de vu
thérapeutique. Les officiers allemands n’ont pas justifié cette ingestion d’un vomitif pour des fins
thérapeutiques alors que ces dernières auraient certainement justifié la prise de ce vomitif. Mais les
services de police ne se sont pas fondés sur cela, ils se sont fondés sur la recherche d’éléments de
preuve pour voir si la personne se livrait à un trafic de stupéfiants. La CEDH a pris quelque part les
services de police allemand à la lettre et a dit que sur le terrain thérapeutique peut être que
l’intervention aurait été justifiée, mais ne se plaçant pas sur ce terrain l’intervention ne peut être
justifiée. En conséquence la CEDH dans cet arrêt JALLOH contre Allemagne a condamné l’Allemagne.
Grâce à ce principe de dignité, tous les moyens ne sont pas bons pour prouver.
Seconde direction : Ce principe de dignité de la personne humaine va aujourd’hui assurer que les
personnes détenues le soit dans des conditions qui paraissent dignes.
Il est inévitable qu’une fois qu’une personne est privée de sa liberté par exemple parce
qu’elle a fait l’objet d’une peine d’emprisonnement, il est inévitable qu’une certaine contrainte pèse
sur elle. Néanmoins il faut éviter que cette contrainte ne conduise l’individu contraint à un niveau de
souffrance qui serait trop élevé. Pour éviter que cette contrainte ne dégénère en une trop grande
souffrance, la CEDH estime que les personnes qui sont privées de détention et qui sont détenues
dans des cellules collectives (aujourd’hui très fréquent) doivent disposer au moins de 3 mètres ² de
surface au sol (les sanitaires étant exclus du calcul de la surface). Cela correspond à 3 mètre sur 1
donc c’est une petite surface. Si les détenus qui se trouvent dans les cellules collectives ne disposent
pas de 3 mètres ² de surface au sol, ils ne disposent plus de conditions dignes de détention. Il faut
considérer que cette personne doit être présumée détenue dans des conditions contraires à la
dignité de la personne humaine. C’est ce qu’a dit la CEDH dans une très longue série d’arrêts. Il
résulte alors une présomption que l’état doit alors renverser. Il incombe à l’État de prouver cela
mais ce n’est pas évident pour lui. Il doit alors démontrer que la détention de cette cellule très
petite a duré soit très peu de temps donc il n’y aurait pas d’atteinte véritable à la dignité, soit que le
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détenu jouissait de sorties journalières fréquentes. Toujours est-il que c’est une présomption difficile
à renverser pour l’État.
La CEDH encadre les conditions de détention et elle considère que si les détenus d’une cellule
collective dispose de moins de 3 mètres ² de surface au sol, leurs conditions de détention sont
présumées être contraire au principe de dignité de la personne humaine. La France a été condamnée
sur ce principe. En effet, dans un arrêt du 30 janvier 2020 la France a été condamnée par la CEDH
car l’État français ne parvenait pas à établir que la personne qui avait été détenue dans une cellule
de moins de 3 mètres ² pouvait jouir de conditions de détention qui respectaient le principe de
dignité de la personne humaine. Il s’agit de l’arrêt JMB contre France.
Dans l’arrêt JMB contre France la CEDH a également souligné que la France ne prévoyait pas
expressément dans ses recours de possibilités de mettre fin à des conditions de détention qui
seraient contraire à la dignité de la personne humaine. Autrement dit la CEDH a souligné que notre
système procédurale était entaché d’une omission puisqu’il n’a pas prévu de moyens spécifiques qui
permettraient aux personnes détenues de saisir un juge lorsqu’elle considère qu’elle font l’objet
d’une détention qui serait contraire au principe de dignité de la personne humaine.
Ce second aspect de cet arrêt contre France a occasionné une double réaction en France.
D’abord elle a occasionné une réaction de la chambre criminelle de la Cour de cassation. Cette
dernière a jugé que lorsqu’une personne est placée en détention provisoire, il appartient à la
chambre d’instruction lorsque cette personne allègue de façon suffisamment précise et crédible
qu’elle ne bénéficie de conditions de détention respectant le principe de dignité, de vérifier la réalité
de ces allégations. Donc la Cour de cassation a tiré les conséquences de l’arrêt rendu par la CEDH du
30 janvier 2020 en soulignant que lorsqu’une personne allègue qu’elle est détenue de manière
provisoire dans des conditions qui sont contraires au principe de dignité de la personne humaine, il
appartient à la chambre de l’instruction de vérifier la réalité de ces allégations. C’est ce que nous a
dit un arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 8 juillet 2020. Cette
chambre va plus loin puisqu’elle dit que si les conditions de détention sont illicites, la chambre de
l’instruction doit ordonner la libération de la personne. Ordonner la libération ne veut pas dire
relâcher dans la nature. Cela peut vouloir dire placer la personne sous contrôle judiciaire.
La solution de la chambre criminelle de la Cour de cassation est tout à fait originale car la loi
ne prévoyait pas expressément ainsi la possibilité de saisir la chambre de l’instruction pour lui
demander d’être libéré parce que les conditions de détention ne seraient pas dignes. Donc la Cour
de cassation a crée au-delà de ce qui été prévu par la loi. C’est la 1ère conséquence de cet arrêt du
30 janvier 2020. Mais il y a eu une deuxième conséquence car le Conseil constitutionnel s’en est
mêlé. Le Conseil constitutionnel dans une décision du 2 octobre 2020 a considéré que la loi
française, en ce qui concerne les recours qui sont ouverts aux individus placés en détention
provisoire, est inconstitutionnelle car elle ne prévoit pas expressément au titre des recours ouverts à
ces personnes un recours qui leur permettrait de mettre fin aux atteintes à la dignité de la personne
humaine qu’ils subiraient. Donc le Conseil constitutionnel de manière beaucoup plus brutale que la
Cour de cassation a dit que la loi française était inconstitutionnelle dans une décision du 2 octobre
2020.
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Chapitre III
Intérêt de la vérité
Intérêt des personnes qui sont amenées à subir les éventuelles mesures d’investigation.
L’attribution de la charge de la preuve est un problème qui se pose dans tous les types de
contentieux. C’est vrai en matière civile, en matière administrative aussi, ainsi qu’en matière pénale.
En matière pénale se problème est résolue grâce à un grand principe qui est celui de la présomption
d’innocence. Cette présomption d’innocence est peut être le plus grand principe de la procédure
pénale. C’est un principe qui est consacré par presque tous les textes qui consacrent des droits
fondamentaux en matière pénale. On le retrouve donc dans l’article 9 de la DDHC qui a valeur
constitutionnelle et qui nous dit de manière extrêmement claire que tout homme est présumé
innocent jusqu’à ce qu’il soit déclaré coupable. On retrouve aussi une consécration de cette
présomption à l’article 6 de la convention de sauvegarde. Enfin on la retrouve dans l’article
préliminaire du Code de Procédure Pénale. On se rend donc compte que cette présomption
d’innocence est consacrée par à peu près tous les instruments internationaux qui consacrent des
principes fondamentaux en matière de procédure pénale.
1. Dimension probatoire : permettant de garantir qu’une personne soit jugée selon certains
types.
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2. Aspect droit subjectif : la présomption d’innocence constitue l’objet en elle même d’un droit
subjectif = on a le droit d’exiger de ne pas être présenté comme un coupable tant que l’on ne
l’a pas été déclaré par une juridiction.
A cette question il est répondu très simplement qu’il faut se référer à la présomption
d’innocence. En raison de cette présomption c’est à la partie poursuivante de faire la preuve. La Cour
de cassation l’a énoncé dans une décision assez vieille dans un arrêt de la chambre criminelle du 24
mars 1949. Dans cet arrêt la Cour de cassation nous a dit que tous les éléments constitutifs de
l’infraction doivent être prouvés par l’autorité poursuivante.
Tous les éléments constitutifs = le texte qui fonde les poursuites, l’élément matériel = fait ou acte
qui correspond au texte d’incrimination et enfin il faut prouver l’élément moral.
2) Que doit-on faire lorsque l’autorité poursuivante échoue à rapporter la preuve qui
lui incombe ?
La présomption d’innocence connait des limites. Ces limites prennent deux formes en
procédure pénale qui vont limiter dans les 2 cas la preuve qui doit être rapportée par l’accusation.
44
1ère limite : elle est constituée par les présomptions qui peuvent être établie par la loi.
En effet la loi pose un certain nombre de présomption qui vont dans tous les cas faciliter la
preuve qui incombe sur l’accusation. Ces présomptions d’un point de vue strictement technique
peuvent jouer un peu différemment, elles peuvent avoir différents objets. Parfois il s’agira
uniquement de déplacer l’objet de la preuve. L’accusation au lieu de prouver un fait X va pouvoir
prouver un fait Y pour rapporter la preuve.
Il est beaucoup plus simple de rapporter cette double preuve que de prouver que la
personne bénéficie effectivement de revenus issus de la prostitution. Si la personne
veut renverser cette présomption elle va devoir prouver que son train de vie n’est
pas issus de la prostitution ou de revenus de la prostitution mais qu’il est issu
d’autres sources de revenus. Par exemple d’une donation, d’un travail…
Il faut donc par exemple que le titulaire du certificat d’immatriculation puisse rapporter la preuve
que ce n’est pas lui qui a commis l’infraction. Si la présomption était irréfragable, on devrait
considérer que la présomption posée serait contraire à la convention de sauvegarde.
2nd limite : cette limite résulte du fait que la loi comme le juge, la jurisprudence, tendent à
cantonner la preuve qui doit être rapportée par l’autorité poursuivante dans des limites
rationnelles pour ne pas lui imposer de rapporter une preuve impossible.
Par conséquent la loi et surtout la jurisprudence tendent à dire que la preuve des faits
justificatifs qui pourrait être invoquée mais également de toutes les situations exceptionnelles qui
pourraient faire disparaitre un élément constitutif de l’infraction, doivent être rapportées par la
personne poursuivie. En conséquence, si une personne est poursuivie et qu’elle invoque l’existence
de faits justificatifs, il n’appartiendra pas à l’autorité poursuivante de prouver que ce fait justificatif
n’existe pas, au contraire il appartiendra à la personne poursuivie de prouver l’existence de ce fait
justificatif. L’idée étant d’éviter que la preuve ne devienne un fardeau tellement lourd que le
ministère public ne parvienne plus à établir aucune infraction. C’est typiquement ce qu’à dit la
chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 28 février 1990. Dans cet arrêt la
chambre criminelle a dit que c’est au prévenu lorsque qu’il soulève une exception qu’incombe la
preuve de la charge des faits allégués au soutient de cette exception. Ce que voulait dire la chambre
criminelle dans cet arrêt c’est que lorsqu’est invoqué un fait exceptionnel qui permettrait de faire
disparaitre l’élément légal de l’infraction, il incombe au prévenu / à la personne poursuivie de
rapporter la preuve de cet élément exceptionnel. Si par exemple quelqu’un invoque un État de
légitime défense, il lui appartiendra de prouver cet État de légitime défense.
véritable droit de la personnalité. Pour assurer cette présomption d’innocence il existe deux séries de
mécanismes.
1er mécanisme : empêcher la diffusion d’articles de textes, de tous supports qui présenteraient une
personne comme étant coupable avant qu’elle ait été déclarée comme telle par un tribunal.
L’article 9-1 du Code civil nous en donne une première illustration. Il nous dit que le juge
peut prescrire toutes les mesures utiles pour faire cesser une atteinte à la présomption d’innocence.
Au titre de toutes ces mesures utiles, le juge va pouvoir ordonner la diffusion d’un communiqué.
Une autre mesure utile peut être d’ordonner le versement de dommages et intérêts. En réalité ça va
ne fera qu’à moitié respecter cette présomption d’innocence car son rôle sera plus de porter
réparation de l’atteinte à la présomption d’innocence.
Toute la question qui se pose c’est de déterminer à partir de quand on considère qu’il est
porté atteinte à la présomption d’innocence. La Cour de cassation constate qu’il y a atteinte à la
présomption d’innocence lorsqu’une personne, avant que celle-ci ait été déclarée coupable par une
décision de justice, est décrite coupable par des écrits ou tout autres documents contenant des
propos qui contiennent des conclusions définitives et donc manifestement un préjugé tenant pour
acquise la culpabilité de la personne visée à l’intention du public. C’est interdit selon la Cour de
cassation.
A partir de quand peut-on considérer qu’il y a des conclusions définitives qui tiennent
pour acquise la culpabilité d’un individu ?
La Cour de cassation en a donné une bonne illustration dans un arrêt du 20 mars 2007. Cet
arrêt concernait un Procureur de la République et plus spécialement celui de Bayonne. Ce Procureur
avait fait l’objet de 2 articles de journaux dont l’un d’eux était intitulé « La prostituée accable le
Procureur de Bayonne». Dans ces 2 articles il était raconté que le Procureur avait subtilisé une carte
de crédit à l’un de ses collègues allemands et c’était offert « un joyeux divertissement avec une
prostituée ». En gros le Procureur était accusé d’avoir volé une carte de crédit pour payer une
prostituée. Ce qui caractérisait ces articles c’est que les termes de « coupables » étaient accolés au
nom du Procureur de la République et que ces articles ne présentaient aucun élément à décharge et
aucun usage du conditionnel. Ils présentaient donc la chose comme étant établie. Ils présentaient le
vol de la carte bleue et la prostituée comme étant quelque chose d’établi. La 1ère chambre civile de la
Cour de cassation dans cette affaire en a déduit que ces 2 articles portaient atteinte à la présomption
d’innocence du Procureur de la République. C’est pourquoi la Cour de cassation en a déduit que le
droit à la présomption d’innocence du Procureur de la République était méconnu.
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La liberté d’expression garantie aux journalistes la possibilité de parler d’une affaire en cours.
Ce qui est interdit c’est d’utiliser certaines formes. Il faut, tant que la personne n’a pas été déclarée
coupable, laisser entendre qu’elle est innocente. Par exemple il faut employer du conditionnel. De la
même manière dans les émissions de télévision ou de radio on ne parle pas de l’auteur d’un fait, on
parle de l’auteur présumé d’un fait. L’expression est affreuse car si on est présumé de quelque chose
en procédure pénale ce n’est pas d’avoir commis un meurtre. Si on est présumé quelque chose a
priori c’est de notre innocence, pas d’avoir commis un meurtre ou d’avoir commis un assassinat. Cela
montre néanmoins la bonne volonté des auteurs de ces journaux télévisés ou de radio d’essayer de
montrer que la culpabilité de la personne n’est pas encore établie par une juridiction. C’est pour cela
qu’on parle de « l’auteur présumé ». Cela montre une simple nuance de présentation.
Ce droit à la présomption d’innocence afin d’être garanti a donné lieu à des règles
particulières s’agissant du port de menottes. Par exemple photographier un individu menotté est
considéré comme portant atteinte à sa présomption d’innocence. Donc le législateur à juste titre a
voulu éviter que les personnes ne soient photographiées avec des menottes ou autre tant qu’elles ne
sont pas reconnues coupables. Cette volonté législative s’est concrétisée au travers de 2 textes :
1. D’abord du côté des journalistes il a été prévu par la loi de 1881 sur la liberté de la presse,
qu’était prohibées les diffusions d’images d’une personne menottée ou portant des entraves
tant qu’elle n’a pas fait l’objet d’une condamnation. C’est une infraction punie de 15 000€
d’amende.
2. Prolongeant cette loi de 1881, il y a l’article 803 du Code de Procédure Pénale qui tend à
éviter que les services de police ne fassent un usage abusif du port de menottes. Cet article
indique que le port de menottes ou d’entrave est légitime que si l’individu est considéré
comme dangereux ou s’il est susceptible de prendre la fuite. Donc 2 seuls cas de figure sont
possibles pour que les menottes ou entraves soient utilisées.
2ème mécanisme : il consiste à diffuser largement les décisions qui déclarent un individu innocent ou
en tout cas un individu non coupable pour les faits pour lesquels il était poursuivi.
Le problème c’est que fréquemment lors des reportages télévisés, les journaux télévisés vont
s’intéresser essentiellement à la phase d’investigation. On verra donc les personnes soupçonnées
photographiées. Une fois que la personne a été déclarée innocente, les journaux sont beaucoup
moins intéressés. C’est une des difficultés. Pour y remédier, il s’agira de diffuser largement les
décisions qui déclarent qu’un individu n’est pas coupable. En principe cette diffusion est assurée par
le principe de publicité des débats et le principe de publicité du prononcé de la décision. Comme la
décision pénale est rendue publiquement, en principe cela va mettre en lumière l’absence de
condamnation de l’individu. Il y a quelques décisions qui restent méconnues car elles seront moins
médiatisées et qu’elles ne sont pas nécessairement toujours publiques. Pour ces autres décisions le
Code de Procédure Pénale prévoit qu’il est possible dans certains cas de les diffuser largement afin
de garantir le respect de la présomption d’innocence.
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En procédure pénale toutes les preuves sont recevables. Cette idée selon laquelle toute
preuve est en principe recevable est incarnée par un principe fondamental : le principe de liberté de
la preuve pénale. Ce principe veut que tous les types de preuve puissent en principe être reçus en
justice. Ce principe de liberté de la preuve pénale s’applique autant aux autorités poursuivantes (au
Ministère public) qu’à la partie civile et qu’aux personnes poursuivies. A priori le juge peut se fonder
sur n’importe quel élément de preuve. Il serait assez difficile de demander la pré constitution des
preuves produites en matière pénale à la différence du civil. Ce principe sert en outre les intérêts de
la vérité car écarter certains types de preuves a priori par principe pourrait nuire dans une certaine
mesure à la manifestation de la vérité. La preuve pénale est donc fondée sur un principe de liberté
de la preuve pénale. Ce principe comporte néanmoins des exceptions qui font naitre un autre
principe qui est celui de l’égalité de la preuve pénale.
On ne trouve pas de trace de ce principe dans les textes généraux ou dans les textes
fondamentaux qui encadrent la procédure pénale. On peut simplement trouver à la lecture de
l’article 427 du Code de Procédure Pénale un texte qui devant le tribunal correctionnel prévoit que
les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve, sauf les cas où la loi prévoirai l’inverse.
Ce principe même s’il n’est énoncé qu’à cet article, peut être décliné devant les autres juridictions
qu’il s’agisse de la Cour d’Assises ou du Tribunal de police.
1ère conséquence : le juge logiquement peut se fonder sur n’importe quel type de preuve pour fonder
sa décision.
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Il peut se fonder sur un rapport d’expertise, sur des témoignages, des indices, des aveux. Bref
sur une liste non exhaustive sauf dans les cas où la loi prévoit certaines preuves bien précises. Dans
ces cas la loi prévoit une liste limitative de preuves admises.
2nd conséquence : lorsque la loi prévoit un procédé de preuve particulier pour établir une infraction,
les autres modes de preuves ne sont pas par nature et nécessairement exclus.
Ne sont exclus les autres preuves que si la loi prévoit expressément cette exclusion. Donc
même si la loi prévoit de recourir à un procédé de preuve particulier, les autres modes de preuve ne
sont exclus que si la loi le dit expressément.
Il est prévu par le Code de la route qu’en cas d’ivresse manifeste, il faut néanmoins
procéder à des vérifications de l’État alcoolique de l’individu qui conduit le véhicule.
Ces vérifications sont faites soit par des examens médicaux soit grâce à un
éthylomètre. La question s’est posée de savoir si on peut néanmoins poursuivre et
condamner un individu pour conduite en État d’ivresse manifeste alors que les
résultats des examens médicaux ou de l’éthylotest s’avèreraient négatifs ou encore
que ces résultent ne puissent être obtenus à cause d’une erreur de manipulation. La
Cour de cassation a toujours admis qu’il était possible de prouver sur d’autres
éléments pour entrer en voix de condamnation contre un individu pour conduite en
État d’ivresse manifeste.
Dès 1973 la chambre criminelle de la Cour de cassation indiquait qu’on pouvait condamner
une personne pour conduite en État d’ivresse manifeste « lorsque la personne paressait
endormie au volant, que son halène sentait fortement l’alcool et qu’elle avait les yeux éteints
et un comportement bourru ». Les constations effectuées par les officiers de police judiciaire
suffisent à entrer en voix de condamnation et à condamner la personne pour conduite sous
l’empire d’un État d’ivresse manifeste, et ce même s’il n’y a pas eu de vérifications.
Ce principe de la liberté de la preuve pénale est encadré par un autre principe très important
qui est celui de l’égalité de la preuve pénale. On parlera plus précisément le principe d’égalité dans
l’obtention des preuves pénales.
Ce principe de l’égalité de la preuve veut que la preuve soit encadrée par un certain nombre
de règles. En matière de procédure pénale, la preuve est très encadrée concernant son obtention. La
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conduite des services de police va être sévèrement encadrée par des règles. Ils ne peuvent pas tout
faire pour obtenir des éléments de preuve. On peut en avoir plusieurs exemples en lisant le Code de
Procédure Pénale. Par exemple les perquisitions permettant de recueillir des indices vont être
encadrées par des règles extrêmement strictes qui vont déterminer dans quel cas la perquisition est
possible et quelles sont les diligences qui doivent être accomplies lorsqu’est menée une perquisition.
Toutes les interventions des services de polices qui sont susceptibles de porter atteintes aux droits
fondamentaux d’autrui sont très précisément et strictement encadrées par des règles du Code de
Procédure Pénale.
Au-delà de ces règles particulières qui vont encadrer chaque méthode d’investigation, il y a
un certain nombre de principes généraux. Ils vont encadrer la manière de recueillir des éléments de
preuve. Parmi ces principes généraux, il y en a un qui est aujourd’hui très important : le principe de
loyauté dans la recherche des preuves. Ce principe interdit d’user de certains procédés déloyaux
pour obtenir des éléments de preuve. Ce principe de loyauté n’est consacré par aucun texte. C’est
la jurisprudence qui a consacré ce principe général. Elle y a fait référence dès 1888. Dans l’arrêt
Wilson du 31 janvier 1888 la Cour de cassation s’est référée à l’idée de loyauté. Etait en cause dans
cette affaire un juge d’instruction qui s’était fait passer pour un complice en vu d’obtenir des
révélations d’une autre personne. La Cour de cassation a considéré que se faisant le magistrat s’était
écarté des règles de la loyauté. Elle l’a donc sanctionné (la Cour de cassation sanctionne de manière
disciplinaire). C’est dans cet arrêt que la loyauté fait une première incursion en matière de procédure
pénale. Depuis 1888 ce principe de loyauté n’a pas cessé. Aujourd’hui ce principe a des
conséquences tout à fait importantes. Chaque année un certain nombre d’arrêts sont rendus
concernant ce principe de loyauté.
On peut dire que l’application du principe de loyauté prohibe tout recours à un stratagème
pour recueillir des éléments de preuve. Ce principe de loyauté en réalité va prohiber 2 séries de
comportement de la part des autorités judiciaires (services de police, magistrats notamment ceux du
service public et éventuellement les services de gendarmerie).
La frontière est fixée de manière relativement simple par les juges. Ils recherchent à chaque
fois si l’infraction aurait été commise sans l’intervention des services de police. Si l’infraction avait
été commise sans cette intervention on considère qu’il n’y a pas de provocation à l’infraction. La
provocation à l’infraction est prohibée comme étant contraire au principe de loyauté. C’est ce qu’à
énoncé la jurisprudence au terme de ses arrêts. La Cour de cassation a dis dans un arrêt de la
chambre criminelle du 22 avril 1992 que par exemple le fait pour deux policiers de se cacher dans un
placard afin de surveiller une conversation n’est pas une provocation à l’infraction, ce n’est donc pas
une habitude contraire au principe de loyauté.
En revanche il peut y avoir des cas où le principe de loyauté est méconnu. Une affaire a
notamment défrayé la chronique en matière de stupéfiants. Cette affaire a donné lieu à un arrêt du 5
mai 1999 rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Cette affaire concernait un trafic
de stupéfiants, et plus spécifiquement elle concernait une opération menée par l’administration des
douanes. Cette administration des douanes avait mené une vaste opération pour essayer
d’incriminer des individus pour trafic de stupéfiants. Elle avait acheminé 2 tonnes de cocaïne de
Toulouse. En se présentant comme trafiquants de stupéfiants et non comme administration de
douanes, elle avait recruté des individus afin de charger un camion avec les stupéfiants. Ainsi au
moment où les individus ont chargé le camion, l’administration des douanes a interpellé les
individus. La Cour de cassation a dit que dans une telle hypothèse le principe de loyauté était
méconnu. Sans cette intervention de l’administration des douanes l’infraction n’aurait certainement
pas été commise par les personnes recrutées.
L’un des cas les plus complexes est l’affaire de la sextape de Mathieu Valbuena. Cette affaire
a donné lieu à des répercussions récentes puisqu’on a Monsieur Benzema qui a été renvoyé devant
un tribunal correctionnel. Cette affaire a donné lieu à pas moins de 2 arrêts rendus par la Cour de
cassation. 2 arrêts qui intéressent tous les 2 la loyauté de la preuve. En gros, cette sextape a été
recueillie par une personne qui exerçait auprès de lui du à un chantage. En fait le deal s’était que soit
Valbuena paye, soit les maitres chanteurs diffusaient la vidéo. Valbuena s’en est référé auprès de la
police. Un enquêteur est intervenu. Il a donc pris contact avec les personnes qui détenaient la
sextape pour négocier directement avec eux le prix qui devait être versé pour que la vidéo ne soit
pas diffusée sur internet. Cet enquêteur en abordant spontanément le montant de la rançon a
méconnu le principe de loyauté. C’est ce qu’a jugé la chambre criminelle dans un arrêt du 11 juillet
2017. Mais la Cour d’appel de renvoi a résisté et a considéré que non il n’y avait pas de déloyauté
dans ce comportement. Ce nouveau pourvoit en cassation pour le même motif a fait se réunir
l’Assemblée Plénière. Là l’Assemblée Plénière a déjugé ce qu’avait dit la chambre criminelle en 2017.
Dans un arrêt du 9 décembre 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation a considéré que
même sans l’intervention de l’enquêteur l’infraction se serait de toute façon commise. Donc
l’Assemblée Plénière de la Cour de cassation dans cet arrêt de 2019 a considéré que l’intervention
de l’enquêteur n’était pas contraire au principe de loyauté.
52
La frontière entre ce qui relève de la déloyauté qui est interdite et de ce qui est permis est
extrêmement vague. Elle va dépendre au fond des circonstances de chaque espèce.
Contournement = volonté de contourner les règles de procédure afin le plus fréquemment de nuire
et d’éviter toute contrainte liée aux droits de la défense.
Dans tous les cas, contournement détournement ou provocation, sont des contraires au
principe de loyauté. Donc tous les éléments qui pourraient être recueillis par les autorités judiciaires
en contravention avec ce principe de loyauté seront exclus par le juge.
/!\ Il y a des cas où la police peut fouiller le véhicule lors d’un contrôle mais pas si elle constate
uniquement une contravention. Ce n’est pas un cas suffisant. Si la fouille de véhicules est possible il y
a des conditions précises qui doivent être réunies pour recourir à cette fouille.
Dans ce cas de figure le principe de loyauté joue beaucoup moins franchement. En principe
ce principe de loyauté ne s’applique pas entre les particuliers. Les particuliers lorsqu’ils réunissent
des éléments de preuve ne sont pas soumis au principe de loyauté. La raison principale qui justifie
cela est que les particuliers ont plus de difficultés pour réunir des éléments de preuve. En effet ils ne
peuvent pas pratiquer de perquisition, de fouille ou encore d’écoutes téléphoniques. Donc à leur
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égard on fait preuve d’une certaine mansuétude. On applique donc strictement l’article 427 du Code
de Procédure Pénale. S’agissant des particuliers, tous les modes de preuve sont en principe admis.
Cependant il peut y avoir des cas délicats car les particuliers parfois collaborent avec les
services de police. Il y a des cas où cela arrive, ils collaborent pour recueillir des éléments de preuve.
La question c’est de savoir en cas de collaboration entre les particuliers et les autorités judiciaires si
on doit ou non appliquer le principe de loyauté. La réponse n’est pas évidente puisqu’on sait que
pour les particuliers en principe le principe de loyauté ne s’applique pas alors que pour les autorités
judiciaires il s’applique. La réponse qu’apporte la Cour de cassation consiste à savoir si les autorités
judiciaires ont eu ou non un rôle actif dans la constitution de la preuve et dans la constitution de
l’infraction. Si les autorités judiciaires ont eu rôle actif, le principe de loyauté va s’appliquer. En
revanche s’ils n’ont pas eu un rôle actif et qu’ils se sont bornés à intervenir pour constater l’existence
d’une infraction le principe de loyauté ne s’appliquera pas.
Exemple : arrêt de la chambre criminelle du 1er octobre 2003 c’est présenté le cas d’un
individu qui surfait sur internet et auquel il avait été proposé la remise de photos à
caractère pédopornographique. Cet individu avait fixé un rendez-vous avec la personne
détentrice de ces photos et avait dans le même temps avertis les autorités judiciaires.
Celles-ci sont arrivées au rendez-vous et ont pu interpeller la personne qui était
détentrice de ces documents. Dans un tel cas de figure la Cour de cassation a indiqué
qu’il n’y avait pas d’atteinte au principe de loyauté car au fond les autorités judiciaires
n’ont pas eu de véritable rôle actif.
Tout dépend du rôle actif que vont avoir les autorités judiciaires.
Le principe de liberté de la preuve est prolongé en procédure pénale par un principe de libre
appréciation des éléments de preuve. Cela signifie que les juges ou les jurés vont pouvoir librement
apprécier la valeur des éléments qui sont versés au départ. Ils vont pouvoir donner aux éléments
produits le crédit qui leur semble être le bon. Ce principe de liberté d’appréciation des preuves
pénales est énoncé sous une expression un peu plus commune, celle de l’intime conviction. On parle
alors de principe de l’intime conviction.
Ce principe implique que le juge ou les jurés sont libres d’accorder aux éléments de preuve le
crédit qui leur parait le bon. Autrement dit, les juges apprécient librement les éléments qui sont
versés au départ. Ce principe de l’intime conviction on ne le retrouve pas dans les principes de la
procédure pénale qui sont énoncées par l’article préliminaire. On le retrouve d’avantage dans les
textes fondamentaux comme par exemple dans la convention de sauvegarde. Cependant le principe
est posé par différents textes du Code de Procédure Pénale. On a d’abord l’article 427 du Code de
Procédure Pénale qui nous dit que le juge décide d’après son intime conviction. Cet article proclame
donc le principe de libre appréciation des éléments de preuve. Il s’applique tant en matière
54
Les limites de l’intime conviction vont jouer dans 2 sens. Ces limites vont conduire dans
certains cas à ce que le juge ne puisse pas se fonder exclusivement sur certain élément de preuve.
S’ils paraissent douteux on va interdire au juge de se référer uniquement à ces éléments pour rendre
sa décision. A l’inverse il y a des éléments de preuve qui paraissent dotées d’une force probante
importante et auxquels le juge devra s’attacher dans sa décision sauf à les écarter dans certaines
circonstances prévues par la loi.
1er sens : il est parfois fait interdiction au juge de se fonder exclusivement sur certains éléments de
preuve.
Ces éléments de preuve le juge pourra les prendre en considération mais ne pourra pas
exclusivement fonder sa décision dessus. Il faudra donc que ces éléments de preuve soient
corroborés par d’autres éléments. Certains éléments de preuve ont une fiabilité un peu douteuse,
donc la loi considère que le juge ne doit pas se fonder exclusivement sur ces éléments douteux. C’est
le cas par exemple dans l’article préliminaire du Code de Procédure Pénale puisqu’il est indiqué
qu’aucune condamnation ne peut être prononcée contre une personne sur le seul fondement de
déclaration qu’elle a faite sans avoir pu s’entretenir avec un avocat et être assisté par lui. Autrement
dit on ne peut pas entrer en voix de condamnation contre un individu sur seul fondement de ses
déclarations. De la même manière la CEDH interdit aux juges de se fonder exclusivement sur des
déclarations de témoins anonymes car il est impossible pour la personne accusée de pouvoir réfuter
les accusations comme il ne connait pas le témoin. Le Code de Procédure Pénale et la CEDH
considèrent que le juge ne peut pas se fonder exclusivement sur ces déclarations de témoins
anonymes. C’est ce qui est prévu par l’article 706-62 du Code de Procédure Pénale.
55
A côté de ces éléments de preuve sur lesquels le juge ne peut pas se fonder exclusivement, il
y a l’inverse des éléments de preuve que le juge ne pourra pas écarter. Il ne pourra les écarter qu’à
certaines conditions.
Quels sont les éléments qui ont une forte valeur probante renforcée ?
En matière de contravention il y a un principe qui est que les contraventions ne peuvent être
prouvées que par procès verbaux ou par rapports ou à défaut par témoins. Donc ici la preuve est
limitée puisqu’il faut l’établir soit par procès verbaux, rapports ou témoignages. S’agissant de ces
contraventions, il est prévu que lorsqu’elles sont établies par des procès verbaux le juge ne peut pas
écarter ces procès verbaux pour refuser d’entrer en voix de condamnation. Les contraventions ne
peuvent donc être établies que par certains moyens de preuve mais en outre une fois qu’un procès
verbal est produit pour établir cette contravention, le juge ne peut pas l’écarter des débats, tout du
moins en principe. Il ne peut l’écarter que si une preuve contraire est rapportée. Donc en matière
contraventionnelle, le principe de liberté de la preuve est limité puisque le juge ne peut pas admettre
tout type de preuve. Le principe de l’intime conviction est ici écarté puisque le juge ne peut pas
écarter le procès verbal, sauf si une preuve contraire est rapportée.
56
En procédure pénale comme en procédure civile on retrouve ce qu’on appelle des actions en
justice. Ce concept d’action en justice peut être défini relativement simplement.
L’action en justice : c’est le droit pour une personne de soumettre au juge une demande afin que
celui-ci la dise bien ou mal fondée.
Ce qui fait l’originalité de la procédure pénale c’est qu’il n’y a pas une mais deux actions. La
première action qui est la plus importante en procédure pénale, celle qui fait son essence c’est
l’action publique. Cette action publique s’oppose à la seconde action qui est l’action civile. En
procédure pénale il y a deux actions car il y a deux variétés d’intérêts à protéger.
D’abord il y a toujours l’action publique dans le procès pénal. Cette action publique est
exercée par un acteur en principe qui est le ministère public. Il exerce l’action publique au nom de la
société. Cette action publique a pour finalité que la personne qui est suspectée d’avoir commis une
infraction par le ministère public d’être condamné à une peine. Donc ce qui constitue le ciment de
cette action publique c’est une violation de la loi pénale, l’action publique constitue donc une
manifestation, une réaction de la société à la violation de la loi pénale. C’est le Ministère public qui
représente la société et qui va requérir le prononcé d’une peine à l’encontre de la personne
suspectée d’avoir violé la loi pénale.
A côté de cette action publique il y a l’action civile. Elle est exercée par un justiciable afin
d’obtenir réparation du préjudice que lui a causé l’infraction. Si on prend l’exemple d’un vol, le vol
en tant qu’infraction pénale va porter atteinte aux intérêts de la société. La société en guise de
réaction va engager des poursuites à l’encontre du voleur. Ces poursuites seront engagées par le
Ministère public. Mais ce vol a aussi lésé les intérêts du propriétaire du bien. Donc le propriétaire va
pouvoir également en mettant en œuvre une action en justice solliciter la réparation du préjudice
qu’il a subi.
Si la première action, l’action publique, est systématiquement présente dans le procès pénal,
l’action civile en revanche n’est pas automatique. On ne la retrouve que si une personne se trouve
victime de l’infraction et en conséquence sollicite réparation. Ces deux actions obéissent à des
régimes assez différents.
57
Chapitre I
L’action publique
L’action publique est donc celle qui fait l’originalité du procès pénal. Cette originalité du
procès pénal passe par cet exercice d’une nature un peu particulière parce qu’elle va être exercée
pour le compte de la société.
Il y a d’un côté le demandeur à l’action publique qui va l’exercer et de l’autre il y a celui qui
va quelque part la subir, celui qui va défendre à l’action. Le demandeur à l’action publique est le plus
souvent le Ministère public. Le défendeur à l’action publique est le plus souvent celui qui est désigné
comme délinquant.
Le plus souvent c’est le Ministère public. Si le principe est que le demandeur à l’action
publique est le Ministère public, celui-ci comporte des limites. Ce principe comme ses limites sont
énoncés par un même texte : l’article 1er du Code de Procédure Pénale. Cet article nous dit que
l’action publique pour l’application d’une peine est mise en mouvement et exercée par les magistrats
ou par les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi. Donc le principe fondamental est que
l’action publique est exercée par le Ministère public.
En réalité il faut voir que l’identité de la personne qui représente le Ministère public dépend
de la juridiction devant laquelle le contentieux est engagé. Devant les Cours d’appel le Ministère
public est incarné par un homme : le Procureur Général. C’est donc le représentant du Ministère
public qui exerce devant la Cour d’appel, il va exercer dans tout le ressort de cette Cour d’appel. Ce
Procureur général est rarement seul puisqu’il ne peut pas effectuer le travail seul. Il sera assisté par
d’autres magistrats qui sont les substituts du Procureur général.
de Procédure Pénale qui nous le dit. Devant le Tribunal correctionnel le Ministère public est
représenté par un unique acteur, c’est le Procureur de la République. C’est lui qui va diriger le
parquet devant le Tribunal correctionnel. Ce Procureur de la République n’est pas tout seul, il va être
assisté par des procureurs adjoints et par des substituts, ils sont appelés les substituts du Procureur.
C’est l’article 39 du Code de Procédure Pénale.
Devant la Cour d'assises, la chose est un peu plus complexe. Cette Cour est quelque part une
institution qui peut être déplacée. Elle peut être institué tantôt au siège du ressort d’un tribunal
judiciaire donc au même endroit qu’un Tribunal correctionnel, tantôt va être institué au siège du
ressort de la Cour d'appel. C’est donc une juridiction un peu mouvante. En fait tout va dépendre du
lieu où siège la Cour d'assises. Si elle siège auprès du Tribunal judiciaire, c’est alors le Procureur de la
République ou ses substituts qui vont représenter le Ministère public. En fait au même endroit que le
Tribunal correctionnel car ce dernier n’est qu’une émanation du tribunal judiciaire. En revanche
lorsque la Cour d'assises siège au même endroit qu’une Cour d'appel dans ce cas là c’est le Procureur
général qui va endosser le costume de représentant du Ministère public.
Donc si :
Ce Ministère public est organisé autour de 2 grands principes qui pour l’instant continuent
de l’organiser :
On dit classiquement que le Ministère public est indivisible. Cela veut dire que tous les
membres du parquet appartiennent à un même corps. Tous les membres du parquet qui
appartiennent à une même juridiction vont pouvoir être interchangeable. Ainsi dans une affaire
devant un Tribunal correctionnel il est tout à fait possible que ce soit un substitut du Procureur qui
d’abord prenne certaines réquisitions et que ce soit ensuite un autre substitut ou le Procureur de la
République lui même qui prenne la suite du dossier. Donc tous les membres du parquet sont
interchangeables devant la même juridiction. Un substitut peut se substituer à un autre substitut et
le Procureur de la République peut dans la même affaire même si préalablement ce sont ses
substituts qui ont débuté le suivi de l’affaire. Ce principe ne pose pas de grandes difficultés.
Le Ministère public est en effet organisé selon une structure hiérarchisée. Cette structure
hiérarchisée implique que le Ministère public est en quelque sorte organisée de manière pyramidale
et donc un peu comme les juridictions. Cette organisation si on la développe un petit peu, on
s’aperçoit très vite qu’elle comporte deux aspects :
59
1er aspect : tout en haut de l’organisation hiérarchique on trouve quelqu’un qui n’est pas un
magistrat en tant que tel, c’est le Ministre de la justice. En effet ce ministre va assurer le corps de la
politique pénal sur le territoire. Il va donc conduire la politique pénale sur le territoire, il va veiller à
sa bonne application. Cette politique pénale a été décidée par le Gouvernement. C’est ce que nous
dit l’article 30 du Code de Procédure Pénale. Cette bonne application de la politique pénale sur
l’ensemble du territoire passe par la diffusion d’instructions générales. Le Ministre de la justice va
diffuser des instructions générales qui vont indiquer aux différents membres du parquet, par
exemple « il faut mettre l’accent sur tel type d’infraction, donc poursuivez les infractions de
proxénétisme parce que le gouvernement veut qu’on fasse une lutte de ça de manière forte en ce
moment »…
Jusqu’à une loi du 25 juillet 2013, le Ministre de la justice pouvait en plus demander aux
magistrats du Ministère public de poursuivre une affaire individuellement. Autrement dit le Ministre
de la justice pouvait outre de ces instructions générales donner des instructions individuelles. C’était
permis auparavant. Cette possibilité offerte au Ministre de la justice a été abrogée par la loi du 25
juillet 2013. Désormais le Ministre de la justice ne peut plus diffuser des instructions dans des
affaires individuelles. C’est ce que nous dit l’article 30 du Code de Procédure Pénale.
2ème aspect : ces instructions générales vont se diffuser grâce à l’organisation hiérarchique interne du
Ministère public. Le premier à recevoir ces instructions générales c’est le Procureur général. Il va en
assurer la diffusion. Le Procureur général et le Procureur de la République ensuite vont diffuser les
instructions et les mettre en œuvre dans les juridictions auxquelles ils appartiennent. Le Procureur
général va mettre en œuvre les instructions dans le ressort de la Cour d'appel, et le Procureur de la
République va mettre en œuvre les instructions dans le ressort du Tribunal correctionnel. Chacun des
membres qui assistent le Procureur général ou le Procureur de la République pourra recevoir des
ordres de sa part pour appliquer telle ou telle consigne. Donc un membre du parquet, un substitut du
Procureur par exemple peut tout à fait recevoir un ordre/une instruction dans une affaire donnée et
il devra donc mettre en œuvre l’instruction qu’il a reçu de son supérieur. La hiérarchisation va
permettre la diffusion et la bonne application des instructions générales délivrées par le Ministre de
justice. Chaque membre du parquet doit respecter les instructions qu’il reçoit de son supérieur.
Ce principe comporte 2 exceptions. La première exception est une fausse exception, c’est
une exception apparente mais ce n’est pas une vraie.
1ère fausse exception : on s’en rend compte en lisant l’article 1er du Code de Procédure Pénale. Cet
article nous dit que l’action publique peut être aussi mise en mouvement par la partie lésée. Donc on
peut se dire qu’à la lecture de cet article que l’action publique peut également être exercée par la
partie lésée. /!\ Il est faux de dire que la partie lésée exerce l’action publique ! En réalité il faut bien
dissocier l’exercice de l’action publique et sa mise en mouvement. Ce que peut faire la partie lésée
c’est mettre en mouvement l’action publique mais en aucun cas elle ne peut l’exercer.
contrôle. C’est lui qui va prendre le contrôle en sollicitant ou non le prononcé d’une
peine à l’encontre d’un individu.
Exemple : l’administration des douanes ne pourra exercer l’action publique qu’en ce qui
concerne les infractions de nature douanière. S’il y a un meurtre, ce n’est pas
l’administration des douanes qui va exercer l’action publique, jamais, elle n’est pas
compétente.
Exemple : de la même manière l’administration des eaux et forêts ne pourra agir qu’en
ce qui concerne les infractions liées au respect des forêts domaniales par exemple.
Ces administrations ont un domaine limité. En cela ces fonctionnaires et ces administrations
se distinguent du Ministère public. Le Ministère public n’a pas de limite à l’exercice de l’action
publique et donc il peut intervenir dans n’importe quel domaine. En revanche ces fonctionnaires eux
ne peuvent intervenir que dans des matières spécifiques.
Le défendeur à l’action publique n’est pas difficile à identifier, c’est le délinquant, désigné
comme tel par le Ministère public. Ce principe emporte une conséquence importante, c’est que
l’action publique ne peut être dirigée que contre la personne qui est présentée comme délinquante.
Si la personne qui est présentée comme délinquante meurt, l’action publique s’éteint donc on ne
peut plus agir à l’encontre des héritiers de cette personne. Très concrètement si un des parents est le
meurtrier et qu’il meurt avant d’avoir été jugé, plus personne ne pourra mener l’action publique
contre ses enfants. C’est ici une différence fondamentale entre le droit pénal et le droit civil. En
matière civile il se peut que l’action civile soit transmise aux héritiers et que la dette de réparation
leur soit transmise.
Ce principe qui veut que seule la personne qui est désignée comme délinquant puisse être
visée et défenderesse à l’action publique comporte quelques exceptions. Ces quelques exceptions
résident dans l’existence d’immunités. On va distinguer 2 variétés d’immunités.
1ère variété : il y a des immunités qui font disparaitre le caractère délictueux d’un comportement.
Autrement dit le comportement qui normalement est contraire à la loi pénale ne l’est plus à
cause ou grâce d’une immunité. C’est en conséquence, un comportement qui n’est plus fautif. La
conséquence directe c’est qu’étant donné qu’il n’y a plus de comportement délictueux, le Ministère
61
public ne peut plus engager de poursuites. Ces immunités on en retrouve certaines en matière
familiale.
L’hypothèse dans laquelle on connaitrait la preuve de l’innocence d’une personne qui serait
détenue provisoirement ou qui serait appelée à être jugée pour un crime. Lorsqu’on détient la
preuve de l’innocence d’une personne qui est détenue à titre provisoire le principe est que
normalement on doit apporter spontanément cette preuve. Si on ne le fait pas on peut être
condamné pénalement. Cette infraction connait une immunité dans le cas où pour rapporter cette
preuve de l’innocence de la personne détenue, on serait amené à mettre en cause un de nos
proches.
Exemple : je sais qu’une personne qui est jugée actuellement pour crime n’a pas commis
l’infraction parce qu’elle était avec moi, mais je sais très bien que la personne ayant commis
l’infraction est un membre proche de ma famille. Dans ce cas je bénéficie d’une immunité afin
de ne pas mettre en cause ce proche. De ce fait je ne serai pas tenu de rapporter la preuve de
l’innocence de cette personne détenue provisoirement.
/!\ La ligne des proches est donnée par la loi. Il s’agit de nos parents en ligne directe, nos ascendants
en ligne directe, nos descendants en ligne directe, nos frères et nos sœurs.
2nd variété : le comportement reste fautif mais l’immunité va empêcher le Ministère public
d’engager des poursuites.
Exemple : le vol qui serait commis au préjudice d’un descendant ou d’un ascendant ou d’un
conjoint ne peut ainsi donner lieu à aucune poursuite pénale, c’est l’article 311-12 du Code
pénal.
Cette immunité n’est pas du tout morale. C’est ce qu’on appelle une immunité irrecevabilité.
En revanche elle répond à certains impératifs sociologiques car il est difficile de déterminer lorsqu’il y
a eu vol ou non entre ascendant ou entre conjoint. Mais il faut retenir que le comportement
délictueux ne disparait pas. Le vol continue de constituer une faute, c’est un comportement
répréhensible. Dans le cas présent il ne peut pas donner lieu à des poursuites mais cela reste un
comportement répréhensible. En conséquence, d’un point de vu civile il est tout à fait possible de
saisir une juridiction civile afin de faire réparer les conséquences de ce comportement délictueux.
62
C’est donc presque tout le temps le Ministère public qui va exercer l’action publique. Le
Ministère public va recevoir d’éventuelles plaintes, il va qualifier juridiquement les faits qui sont
portés à sa connaissance, il va apprécier leur réalité et il va se demander si ces faits qualifiés
juridiquement peuvent donner lieu à des poursuites. A ce stade où le Ministère public qu’un fait peut
donner lieu à des poursuites, 2 systèmes sont concevables :
1er système : il implique en quelque sorte une certaine automaticité. C’est le système de légalité des
poursuites.
C’est un système qui est caractérisé par son automaticité. Le Ministère public ne dispose
d’aucun pouvoir d’appréciation. Dès lors qu’il constate une infraction à la pénale il va devoir engager
des poursuites. C’est un système qu’a connu le droit français juste après la Révolution française, bien
que ce ne soit plus le cas aujourd’hui. Ce système est assez séduisant car au fond tous les délinquants
sont poursuivis de la même manière, quelque soit le rang du délinquant, quelque soit sa fonction
dans la société, il a commis une infraction pénale il sera donc poursuivi. Il existe néanmoins un autre
système.
2ème système : il est celui qui est aujourd’hui pratiqué en droit français. C’est le système dit de
l’opportunité des poursuites.
Ce qui caractérise ce système c’est qu’est laissée au Ministère public une marge
d’appréciation. Donc lorsque le Ministère public constate l’existence d’une infraction à la loi pénale,
il n’est pas tenu d’exercer l’action pénale, il peut le faire mais ce n’est pas une obligation. De ce fait le
Ministère public dispose d’une marge de manœuvre, d’une marge d’appréciation. Ce système
comporte donc un risque : celui d’inertie du Ministère public. On a peur que le Ministère public reste
inerte et que malgré un certain nombre de faits qui mériteraient des poursuites il n’agisse pas. Donc
ce système de l’opportunité des poursuites comporte un certain nombre de palliatifs, de remèdes qui
permettent d’éviter une telle inertie du Ministère public. Le principal remède c’est la mise en œuvre
de l’action publique par une partie. Ce risque est donc contrebalancé par des correctifs. En général si
le Ministère public n’agit pas c’est pour des infractions mineures. Ce système ne porte pas atteinte
au droit à un procès dans la mesure où la victime va pouvoir mettre en mouvement l’action publique
si jamais le Ministère public n’agirait pas. Cela va avoir pour effet de déclencher l’action publique et
dans ce cas le Ministère public n’aura plus le choix.
Ce principe veut que le Ministère public puisse décider d’engager des poursuites ou non
quand il constate l’existence d’une infraction ou lorsqu’il constate ce qu’il pense être une infraction.
Donc le Ministère public jouit d’une certaine opportunité. Cette opportunité d’engager les poursuites
on la trouve révélée par deux textes : l’article 40 du Code de Procédure Pénale et l’article 40-1 de ce
même code. Ces deux textes rappellent et montrent que le Ministère public jouit d’une certaine
opportunité dans le choix d’engager ou non des poursuites.
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D’un point de vue un peu candide on peut se dire que le Ministère public ne dispose que de
deux options : il a le choix d’engager des poursuites ou son contraire, de ne pas engager de
poursuites. Quand il n’engage pas de poursuites, il va alors prendre une décision de nature
administrative c’est le classement sans suite.
Mais aujourd’hui entre l’engagement de poursuites et le classement sans suite il existe une
espèce de 3ème voix. Cette troisième voix consiste à recourir à des mesures alternatives aux
poursuites. Il n’y a plus 2 options mais bien 3 :
Engagement de poursuites
Mesures alternatives aux poursuites C’est 3 options sont résumées par l’article 40-1
du Code de Procédure Pénale.
Classement sans suite.
1. L’engagement de poursuites
L’engagement de poursuites pas le Ministère public passe par des systèmes variés. Le plus
souvent cet engagement de poursuites va passer par une décision du Ministère public, et plus
spécifiquement par une décision du Procureur de la République. Le Procureur de la République va
décider soit de saisir une juridiction de jugement (une Cour d'assises, un Tribunal correctionnel, un
Tribunal de police) soit de saisir une juridiction d’instruction (un juge d’instruction). Mais il existe
aujourd’hui des procédures qui vont permettre d’exercer l’action publique sans aucune décision
préalable, sans aucune intervention du Procureur de la République. Donc pratiquement
automatiquement les poursuites vont être engagées sans que le Procureur de la République ne
prenne de décisions. Ce sont donc des espèces de procédures automatiques. Ces procédures sont
par exemple celles des contraventions au Code de la route = procédure d’amende forfaitaire qui
passe par un engagement de poursuites puisque des poursuites sont engagées mais cela se fait
automatiquement, sans décisions du Procureur de la République. Cela se passe pratiquement
entièrement de façon informatisée.
Donc 3 possibilités : 2 cas où le Procureur de la République va prendre une décision : saisir
une juridiction d’instruction ou saisir une juridiction de jugement, et 1 troisième cas où l’engagement
de poursuite se fait de manière quasi automatique.
Le Ministère public peut saisir une juridiction d’instruction afin qu’elle instruise l’affaire.
Autrement dit le Procureur de la République va pouvoir saisir un juge d’instruction. Pour saisir ce
juge, le Procureur de la République va prendre ce qu’on appelle un réquisitoire introductif.
64
Réquisitoire : ordre écrit, une instruction écrite prise par un membre du Ministère public.
Le réquisitoire introductif est donc une instruction écrite qui va permettre de saisir le juge
d’instruction. Cette saisine s’impose pour les affaires les plus complexes. Elle s’impose donc lorsque
des investigations poussées sont nécessaires.
La loi nous dit qu’en matière criminelle, donc si le Procureur de la République constate une
infraction de nature criminelle, il doit nécessairement prendre un réquisitoire introductif et saisir un
juge d’instruction. C’est l’article 79 du Code de Procédure Pénale qui l’impose. C’est obligatoire mais
il y a toujours la possibilité de « tricher ». On triche par exemple en correctionnalisant une affaire. La
correctionnalisation consiste à faire apparaitre sous une qualification délictuelle une infraction qui
normalement revêtirait une qualification criminelle.
Exemple des infractions de nature sexuelle : le viol se caractère par une pénétration. S’il n’y a
pas de pénétration il n’y a pas de viol. En dessous du viol on retrouve l’agression sexuelle qui
n’a pas de pénétration. Il suffit au Procureur de la République d’occulter dans une affaire
l’élément de la pénétration pour que d’un coup ce qui était un viol devient une agression
sexuelle.
Le viol qui est de nature criminelle suppose nécessairement une instruction, donc
une procédure longue et fastidieuse. En revanche l’agression sexuelle ne suppose
pas nécessairement une instruction. Face à une agression sexuelle le Procureur de la
République est tout à fait libre de saisir directement une juridiction de jugement.
Ce qui s’impose pour les infractions de nature criminelle ne s’impose pas pour les
infractions de nature délictuelle ou contraventionnelle. Donc ce qui était obligatoire, c'est-à-dire la
saisine d’une juridiction d’instruction en matière criminelle ne l’est plus lorsque l’infraction est de
nature contraventionnelle ou délictuelle. Dans ces 2 hypothèses le Procureur de la République peut
saisir un juge d’instruction mais c’est pour lui une simple faculté.
principal reste néanmoins le gain de temps et d’argent au monde de la justice. Cela permet aussi une
réponse pénale adaptée.
Il faut tout de même retenir que la correctionnalisation est illégale et contraire à la loi
lorsqu’elle est l’œuvre du Procureur de la République. Si elle est l’œuvre du juge d’instruction, elle
peut dans certains cas être acceptée. En effet la loi prévoit dans un cas de figure précis cette
correctionnalisation de l’affaire. Elle le prévoit mais il faut que la victime soit d’accord, que la
personne suspecte soit d’accord… Il y a un certain nombre de conditions qui doivent être remplies.
+ Réquisitoire introductif acte peu formel dans lequel le Procureur de la République va indiquer les
faits que le juge d’instruction doit instruire. Le juge d’instruction sera saisit par ces faits. On dit en
effet que le juge d’instruction est saisi « in rem », c'est-à-dire par les faits portés à sa connaissance
par le Procureur de la République. Si le Procureur oublie certains faits dans son réquisitoire, le juge
d’instruction ne pourra pas informer sur ces faits.
Cette saisine est possible par le Procureur de la République sauf en matière criminelle. En
matière criminelle le Procureur de la République saisit obligatoirement une juridiction d’instruction,
ce sera alors au juge d’instruction de saisir une juridiction de jugement. Donc saisine d’une juridiction
de jugement que si les faits sont constitutifs d’un délit ou d’une contravention.
Il dispose d’un certain nombre de modalités, de voix pour saisir ces juridictions de jugement.
D’un côté il dispose de procédures que l’on pourrait qualifier d’ordinaires, et que d’un autre il
dispose de procédures rapides.
Elles ne sont possibles qu’en matière de délits et de contraventions. Pour ces procédures
ordinaires qui vont permettre de saisir une juridiction de jugement, il y en a 2 variétés de mode
d’introduction.
1. La citation directe
66
C’est la variété la plus lourde d’un point de vue procédurale. C’est un acte très formel qui
comme son nom l’indique va avoir pour effet de citer le destinataire à comparaitre devant une
juridiction. Cette citation directe est donc un document écrit dont le contenu et les modalités de
délivrance vont être précisément encadrés par les textes et par la loi. Le contenu de la citation
directe est précisé par les textes, ce contenu est presque imposé par le bon sens. Il faut indiquer dans
l’acte la date de l’audience, le lieu de l’audience ainsi que le jour et l’heure de celle-ci. Comme au
jour de l’audience la personne va être jugée, il faut qu’elle puisse préparer sa défense. Pour préparer
sa défense il faut là encore lui indiquer le fait pour lequel elle est poursuivie et le texte qui réprime ce
fait.
Exemple : indiquer que la personne a été vue entrain de voler tel bien et le texte qui réprime ce
fait est le texte qui réprime le vol.
S’il manque une mention dans la citation directe, celle-ci pourra être frappée de nullité. Si et
seulement si cette omission d’une indication a porté atteinte aux droits de la défense. Il faudra alors
pour le destinataire de l’acte prouver que l’absence d’une mention qui est prévue par la citation, a
porté atteinte aux droits de la défense.
Le contenu de la citation directe est prévu par l’article 390 et l’article 390-1 du Code de
Procédure Pénale. Une fois que le contenu de l’acte est bien fixé, il faut le remettre à son
destinataire. Là encore les modalités de délivrance de l’acte sont étroitement encadrées par les
textes. Pour que la personne puisse préparer sa défense, cette citation directe doit lui être remise au
moins 10 jours avant la date prévue de l’audience.
Au-delà de ces modalités de délivrance dans le temps de la citation directe, il faut bien voir
que concrètement la manière de donner, de transmettre la citation directe à l’individu est également
précisément encadrée par les textes. Le principe c’est que normalement la délivrance de la citation
directe est réalisée par l’huissier de justice. Le Procureur de la République va s’adresser à l’huissier
de justice afin que celui-ci signifie (= notifie) cette citation directe à son destinataire. Mais le
problème du recours à un huissier de justice est que c’est couteux. De ce fait le législateur a prévu
d’autres modalités de délivrance de cette citation directe. Plus spécifiquement le Procureur de la
République plutôt que de recourir à un huissier de justice, va pouvoir recourir à une convocation. Ici
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2. La comparution volontaire
C’est une procédure plus souple mais qui présente moins de garanties. Moins de garanties
signifie que la transmission de l’acte à son destinataire est moins bien assurée. Comme il y a moins
de garanties, cette seconde procédure s’appuie sur le consentement de la personne à être jugée.
Pour que cette procédure soit efficace il va falloir que la personne consente à être jugée au jour de
l’audience.
Cette procédure est une procédure qui passe par la volonté de la personne qui est amenée à
être jugée. Cette procédure passe par une procédure en 2 temps :
1er temps : un avertissement préalable est délivré à la personne poursuivie. Cet avertissement
préalable sera délivré sans qu’aucune modalité rigoureuse ne soit suivie, donc sans passer
notamment par l’emploi des services d’un huissier de justice. Le Procureur de la République pourra
adresser cet avertissement par lettre simple à la personne par exemple. Cet avertissement va
comprendre un certain nombre de mentions exactement comme la citation directe.
1ère possibilité :
Soit au jour de l’audience qui était indiqué dans l’avertissement, la personne comparait. Si
elle comparait et qu’elle accepte d’être jugée, dans ce cas elle pourra être jugée. Le Procureur de la
République n’aura plus qu’à prendre ses réquisitions devant le Tribunal correctionnel ou le Tribunal
de police ce qui permettra de saisir ce tribunal.
2ème possibilité :
Si la personne ne comparait pas ou refuse au jour de l’audience d’être jugée, dans ce cas la
procédure s’arrête et la juridiction n’est pas valablement saisie. Cela signifie que la personne ne
pourra pas être jugée selon cette modalité de saisine de la comparution volontaire. Si la personne
doit néanmoins être poursuivie par le Ministère public, le Procureur de la République devra recourir
à d’autres modalités de saisine. Par exemple il pourra recourir à la citation directe.
Ce n’est que si la personne comparait et donne son consentement à être jugée que la
juridiction pourra être saisie et que la personne pourra être jugée. Encore fau-il que le Procureur de
la République prenne des réquisitions au jour de l’audience. Cela va permettre de saisir le tribunal. Si
le Procureur de la République ne prend pas de réquisitions le jour de l’audience, le tribunal n’est pas
valablement saisi. La Cour de cassation l’a dit à plusieurs reprises. La chambre criminelle de la Cour
de cassation nous l’a dit dans un arrêt du 1er mars 2016.
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La finalité de ces procédures rapides est double : elles déchargent les juridictions, donc elles
libèrent du temps aux magistrats et d’autre part elles permettent une réponse pénale rapide. On
retrouve 2 variétés de procédures rapides :
Ce sont des procédures qui vont accélérer le procès pénal. Donc le jugement et la procédure
de saisine de la juridiction vont être accélérés. Il y a plusieurs sortes de ces procédures. Le point
commun de toutes ces variétés de procédures accélérées c’est d’accélérer le rythme de la procédure
et d’ainsi permettre une réponse pénale plus rapide. Dans le cadre du Code de Procédure Pénale il
existe 3 sortes de procédures accélérées. Il y en a 2 qui sont relativement anciennes : la comparution
immédiate et la convocation par procès verbal. La dernière est relativement récente puisqu’elle
résulte d’une loi du 23 mars 2019 qui est la comparution à délai différé. Ces 3 procédures
comportent un certain nombre de traits communs.
1er trait commun : Affaires simples. Elles ne pouvoir être appliquées que pour des affaires
qui se veulent simples. Donc les infractions qui peuvent faire l’objet de ces procédures sont
relativement restreintes. Les crimes sont bien évidemment exclus. Certains délits sont également
exclus, car par exemple les délits commis par les mineurs ne peuvent pas faire l’objet de ces
procédures accélérées. Il faut donc retenir que ces procédures ne conviennent qu’aux affaires assez
simples. L’identification des affaires « simples » est encore plus réduite s’agissant de la comparution
immédiate et de la comparution à délai différé puisque dans les 2 cas, elles ne peuvent être utilisées
que si les peines encourues par l’auteur de l’infraction répondent à certains seuils. Donc les 2
procédures de comparution ne peuvent être utilisées lorsqu’a été commis un délit flagrant, c'est-à-
dire un délit qui vient d’être commis, sauf si la peine encourue est comprise entre 6 mois et 10 ans.
A l’inverse si le délit n’est pas flagrant et qu’il date un peu, que si la peine encourue est comprise
entre 2 et 10 ans.
2nd trait commun : Déferment. Ces procédures supposent un déferment. Le déferment c’est
la présentation de la personne suspecte au Procureur de la République. Très fréquemment, à la fin
d’une garde à vue le Procureur de la République va demander à ce que la personne gardée à vue lui
soit présentée. Lorsque la personne est ainsi présentée, le Procureur de la République va recueillir les
déclarations de cette personne. Ensuite il va pouvoir choisir de faire comparaitre la personne selon la
procédure de la comparution immédiate, ou comparution à délai différé ou encore selon la
procédure de convocation par procès verbal. Donc dans tous les cas avant ces 3 procédures il y a un
déferment.
Comparution immédiate
C’est une procédure extrêmement utilisée en procédure pénale. Cette procédure trouve sa
volonté dans le fait d’apporter une réponse pénale à certaines infractions. Ce qui fait l’originalité de
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cette procédure de comparution immédiate c’est que la personne est en principe jugée le jour même
de son déferment devant le Procureur de la République.
Exemple : le matin une personne qui est en garde à vue, à midi elle rencontre le Procureur de la
République et l’après midi elle est devant le juge pour comparaitre immédiatement.
La plupart des règles qui concernent la comparution immédiate sont contenues dans l’article
395 du Code de Procédure Pénale. Le problème de cette procédure c’est que le jour où la personne
est présentée au Procureur de la République, il n’y a pas forcément de juridiction qui se réunit. On ne
réunit pas les juridictions d’une heure sur l’autre. Les juridictions ont un calendrier prévu où elles
doivent tenir des audiences et où il est prévu qu’elles se réunissent. Ce n’est pas le Procureur de la
République qui va appeler et réunir 3 magistrats pour composer une juridiction. Donc il peut arriver
que le jour où la personne est déferrée devant le Procureur de la République, aucun Tribunal
correctionnel ne se réunisse pour une audience de comparution immédiate. Cela peut poser
quelques difficultés. On a donc 2 hypothèses :
1ère hypothèse : celle du « jour de chance » où la juridiction, le Tribunal correctionnel se réunit le jour
même pour une audience de comparution immédiate. Dans ce cas il n’y a pas véritablement de
difficulté. Entre les quelques heures ou minutes où la personne rencontre le Procureur de la
République et le moment où elle sera jugée, la personne peut être retenue.
2ème hypothèse : c’est un « jour de malchance », aucun tribunal, aucune audience de comparution
immédiate ne se tient. Le Procureur de la République va très simplement le constater en examiner le
calendrier de la juridiction. Si le Procureur de la République constate ainsi une impossibilité du
tribunal de se réunir le jour même, il peut solliciter du juge des libertés et de la détention afin que la
personne poursuivie soit placée en détention provisoire. Ce n’est pas une obligation pour le
Procureur de la République, il peut tout à fait estimer que la personne poursuivie peut être remise en
liberté. Lorsque la personne est placée en détention provisoire, sa comparution devra intervenir
rapidement. Le tribunal doit se réunir au plus tard dans les 3 jours ouvrables qui suivent le
placement en détention provisoire. Si la personne ne comparait pas dans les 3 jours ouvrables qui
suivent elle sera remise en liberté.
Exemple : une personne est déferrée le 23 décembre, le 24 décembre compte comme 1 jour
ouvrable mais pas le 25 car c’est férié. Le 3ème jour ouvrable sera donc le 27 décembre.
Une fois que la personne va être présentée devant le tribunal, la difficulté est qu’elle n’a pas
forcément eu le temps nécessaire pour préparer sa défense. Comme elle n’a pas disposé de ce
temps, on va lui laisser une option, on va lui laisser le droit d’exiger un report, un renvoi de
l’audience. Il y a deux possibilités, soit elle accepte d’être jugée sur le champ, soit :
- Soit la personne refuse d’être jugée le jour même lorsque le tribunal se réunit. Elle va
pouvoir bénéficier d’un renvoi d’audience qui va lui permettre de préparer sa défense. De
droit, sans qu’elle ait à le justifier, l’audience sera renvoyée dans un délai qui est compris
entre 2 et 6 semaines. Ce délai peut être porté au-delà de 2 et 6 semaines lorsque l’infraction
est relativement grave. C’est ce que dit l’article 397-1 du Code de Procédure Pénale. La
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question qu’on doit se poser c’est pourquoi la personne accepterait-elle d’être jugée
sur le champ si elle peut ainsi de droit bénéficier d’un délai supplémentaire
pour préparer sa défense ? Tout simplement parce que son sort dans l’attente de cette
nouvelle audience n’est pas forcément très enviable. Dans le cas où la personne sollicite un
délai, le tribunal peut si les conditions sont remplies la placer en détention provisoire, et
donc privée de sa liberté de mouvement.
Toutes ces règles relatives à la comparution immédiates sont énoncées aux articles 397-1 et
suivants du Code de Procédure Pénale.
Cette procédure implique que la personne ne puisse pas être placée dans l’attente de
l’audience, en détention provisoire. Ce qui va justifier que le Procureur de la République recourt à la
convocation par procès verbal plutôt qu’à la comparution immédiate, c’est cette nécessité qui lui
parait de placer ou non la personne en détention provisoire. S’il estime que la personne est
dangereuse ou qu’elle est susceptible de prendre la fuite, le Procureur de la République ne va pas
recourir à cette procédure, il lui préférera la comparution immédiate.
C’est une procédure récente. Elle résulte d’une loi du 23 mars 2019. Cette procédure est née
d’un constat relativement simple : c’est que parfois le Procureur de la République dispose de charges
suffisantes pour renvoyer un individu devant le Tribunal correctionnel mais que pour autant toutes
les investigations qui étaient en cours ne sont pas encore terminées. Par exemple le Procureur de la
République avait ordonné une expertise ou que lui soit transmis certains documents, mais ce n’était
pas achevé. Dans ce cas, c’est ennuyeux que le Procureur de la République ordonne la comparution
immédiate de l’individu car il se prive d’un certain nombre d’éléments d’information. C’est pour
remédier à ce « vide » juridique qu’a été crée cette procédure de comparution à délai différé.
Cette procédure implique que des investigations soient en cours lorsque la personne est
déferrée devant le Procureur de la République. Comme les investigations sont en cours, le Procureur
de la République va pouvoir décider de recourir à cette procédure. Cela va permettre de placer la
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personne en détention provisoire le temps que les investigations se terminent. Ce n’est jamais
directement le Procureur de la République qui place le suspect en détention provisoire mais il va
pouvoir saisir le juge des libertés et de la détention afin qu’il puisse placer l’individu en détention
provisoire afin de laisser le temps aux investigations d’aboutir. La détention provisoire n’est possible
que si la peine encourue par la personne poursuivie est supérieure ou égale à 3 ans. En de ça de 3
ans on ne peut pas recourir à cette procédure de comparution à délai différé. Là encore le but n’est
pas que la personne reste indéfiniment en détention dans l’attente des éventuels résultats des
mesures ordonnées par le Procureur de la République. Le Procureur de la République pourra recourir
à cette procédure afin de terminer ses investigations. Dans tous les cas la personne devra
comparaitre dans un tribunal dans un délai maximum de 2 mois. Si la personne ne comparait dans ce
délai de 2 mois, il sera automatiquement mis fin à ça détention provisoire.
Toutes ces procédures accélérées ont un trait commun, elles limitent le temps laissé à la
personne pour préparer sa défense. C’est sa le gros risque de ces procédures accélérées.
L’autre manière d’accélérer le cours de la procédure pénale c’est d’occulter une phase de
débat devant le juge. Pour occulter cette phase de débat il y a 2 moyens et donc 2 procédures
spécifiques qui sont mise en œuvre.
Cette procédure s’inspire en partie de ce qui se pratique aux États-Unis, des mécanismes
américains de plaider coupable. La personne va reconnaitre l’infraction qui lui est reproché, elle va
reconnaitre l’existence de l’infraction et sa qualification. Après cette reconnaissance des faits, le
Procureur va lui proposer une peine que la personne va pouvoir accepter.
Le déroulement de cette procédure est prévu par les articles 495-7 et suivants du Code de
Procédure Pénale. Elle passe par une initiative du Procureur de la République qui va solliciter du
prévenu son accord pour recourir à cette procédure. L’initiative va constituer dans un 1er temps à ce
que soit obtenu l’accord du prévenu pour recourir à cette procédure. Cet accord de la personne
poursuivie va passer par une reconnaissance de sa part des faits qui lui sont reprochés. Non
seulement elle va devoir reconnaitre les faits mais elle va aussi devoir reconnaitre leur qualification
juridique. Si la personne reconnait ainsi les faits, le Procureur de la République va lui proposer une
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peine qui doit être individualisée à la personne. Cette peine est relativement légère car le Procureur
de la République n’aura pas totalement libre choix dans la peine. Il ne peut proposer une peine qui
ne peut qu’être inférieure à 3 ans d’emprisonnement ou à la moitié de la peine d’emprisonnement
qu’elle encourt. C’est un avantage pour la personne poursuivie.
Exemple : une personne qui risque une peine d’emprisonnement de 4 ans ne se verra proposée
une peine par le Procureur de la République qui ne sera que de 2 ans.
La personne poursuivie est libre ou non d’accepter la proposition que lui a faite le Procureur
de la République. Elle peut toujours essayer de négocier, de faire une sorte de contre proposition
même si ce n’est pas expressément prévu par les textes. Dans tous les cas après cette proposition de
peine, il y a 3 possibilités qui peuvent se présenter.
1ère possibilité : la personne ne parvient pas à se décider sur la proposition qui lui est faite par le
Procureur de la République. Dans ce cas la personne peut demander à bénéficier d’un délai de
réflexion de 10 jours. Comme en matière de contrat de la consommation. Au bout de ces 10 jours
elle devra indiquer si elle accepte ou non la proposition.
2ème possibilité : la personne refuse la proposition. Dans ce cas cette procédure s’arrête et le
Procureur de la République devra s’il souhaite qu’elle soit poursuivie, recourir à un autre mode
d’exercice de l’action publique : par exemple la citation directe ou recourir à une mesure alternative.
3ème possibilité : la personne accepte la proposition. Ici va pouvoir débuter une seconde phase de la
procédure. Cette 2nd phase va se dérouler devant le Président du Tribunal judiciaire. Le Président de
ce tribunal va devoir homologuer, valider l’accord qui a été passé entre le Procureur de la République
et la personne poursuivie. Il va donc se tenir une audience d’homologation au cours de laquelle le
président va homologuer cet accord qui a été scellé. Le président du tribunal judiciaire va contrôlait
qu’on pouvait effectivement recourir à cette procédure de CRPC. Ensuite il va devoir vérifier que la
personne a effectivement reconnu sa culpabilité. Au-delà de ce contrôle le président du tribunal va
également vérifier que la proposition qui a été faite est manifestement fondée, il va donc vérifier que
la peine proposée est manifestement opportune. Si le président homologue l’accord, tout ce passe
comme si la peine avait été prononcée par un tribunal. L’accord scellé constatera la peine.
Autre intérêt = la personne va elle même fixer sa peine, donc surement elle sera mieux à même de
l’accepter.
L’ordonnance pénale
Permettre au juge de rendre une décision sans avoir à entendre la personne poursuivie.
Cette ordonnance a un champ d’application relativement important puisqu’elle peut s’appliquer à
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toutes les contraventions de police (article 524 du Code de Procédure Pénale), et elle peut
s’appliquer à de petits délits = délits listés par l’article 95 du Code de Procédure Pénale. L’originalité
de cette ordonnance pénale est l’enchainement de la procédure. Le juge va rendre une décision en
ayant une unique version des faits et ensuite on va discuter s’il y a lieu. Cette procédure va se
dérouler en 2 temps :
1er temps : le juge va être saisi par le Procureur de la République. Sur les seuls éléments fournit par le
Procureur de la République il va décider d’une peine qui doit être prononcée à l’encontre de l’auteur
de l’infraction. Une fois saisit le juge va disposer de 3 options :
1) Il estime que l’affaire est trop compliquée pour passer par cette procédure de
l’ordonnance pénale et qu’il faudrait entendre la personne poursuivit. Dans ce cas il indique au
Ministère public qu’il doit suivre une autre procédure.
2) Le président du tribunal estime que la personne poursuivie n’a pas commis les faits qui lui
sont reprochés et donc elle doit être relaxée.
3) Le président du Tribunal estime que l’auteur des faits est effectivement coupable de
l’infraction qui lui est reproché. Dans ce cas le président va fixer la peine que devra accomplir
l’auteur des faits.
Cette ordonnance va avoir les mêmes effets qu’un jugement. Ce qui fait l’originalité de cette
ordonnance c’est qu’à aucun moment la personne poursuivie n’a été entendue par le juge. Le juge
s’est prononcé au regard des seuls éléments que lui a fournis le Ministère public. L’article 95-5 du
Code de Procédure Pénale nous dit que l’ordonnance a les mêmes effets qu’un jugement. Cette
ordonnance va être rendue par le juge sans que la personne poursuivie ait été entendue.
2nd temps : si la personne n’est pas d’accord avec l’ordonnance qu’a rendue le juge et avec la peine
infligée, elle pourra disposer d’une espèce de voix de recours qu’on appelle l’opposition à
l’ordonnance. Cette opposition va pouvoir être formée soit par le Ministère public soit par la
personne qui a été condamnée par l’ordonnance. En effet le Ministère public peut avoir intérêt à
contester l’ordonnance. Par exemple imaginons que le juge ait relaxé la personne, le Ministère public
va peut être trouvé un intérêt à contester et à s’opposer à l’ordonnance. Donc le Ministère public
comme la personne poursuivie peuvent s’opposer à l’ordonnance. S’il y a une opposition à
l’ordonnance, une audience devra se tenir devant le Tribunal. Au cours de cette audience va
s’instituer un véritable débat contradictoire où pour le coup on entendre la personne prévenue.
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La procédure la plus connue est celle de l’amende forfaitaire. Cette procédure est
extrêmement dépouillée puisque non seulement il n’y a pas d’audience mais le Ministère public, le
Procureur de la République en l’occurrence n’a même pas besoin d’intervenir. Tout se déroule en
quelque sorte de manière automatisée. Le champ de procédure de cette amende forfaitaire tend
petit à petit à s’étendre et donc a entrer dans le terrain délictuel. Le Conseil constitutionnel a admis
que le législateur recourt à ces procédures d’amendes forfaitaires pour tous les délits dès lors que
ceux-ci ne sont pas punis d’une peine d’emprisonnement supérieure à 3 ans. Donc pour toute peine
inférieure ou égale à 3 ans d’emprisonnement, le législateur a le loisir de recourir à cette procédure
de l’amende forfaitaire.
Cette procédure à l’origine est née dans le domaine de la contravention. C’est une procédure
qui était même applicable à certaines contraventions et notamment à certaines contraventions en
matière de Code de la route. Mais petit à petit cette procédure quitte ce berceau originel car en effet
le législateur trouve que c’est un moyen relativement commode de recourir à cette procédure pour
désengorger les tribunaux. C’est une procédure peu couteuse pour le service public et l’État.
Aujourd’hui cette procédure est étendue à d’autres infractions, notamment à d’autres
contraventions. Depuis une loi du 18 novembre 2016, cette procédure a même été étendue à
certains délits. Le champ d’application de la procédure d’amende forfaitaire s’étend
progressivement.
C’est une procédure extrêmement simple. Le principe de cette procédure est le suivant : si
l’infraction est constatée par un officier de police judiciaire ou éventuellement un agent de police
judiciaire, un avis d’infraction va être remis ou adressé au contrevenant et à compter de cette date
de remise ou d’envoi va s’ouvrir un délai de 45 jours pour que le contrevenant règle le montant de
l’amende. Donc si tôt l’infraction constatée il va s’ouvrir un délai de 45 jours pour que le
contrevenant paye le montant de l’amende. Si ce dernier paye dans les temps la procédure se
termine et l’action publique s’éteint, sans que le Ministère public n’ait à aucun moment mis son nez
dedans. Tel que décrite, cette procédure ne donne pas lieu à une quelconque contestation. En
réalité, la personne qui serait soumise à cette procédure n’est pas du tout privée de la possibilité de
solliciter un débat contradictoire. Elle va pour pouvoir solliciter ce débat contradictoire de 2 façons :
1. Elle va devoir adresser au Ministère public une requête en exonération pendant les 45 jours
ou
2. Dans les 30 jours qui suivent le jour où lui a été adressé l’avis envoyer une réclamation
motivée.
Ces mesures alternatives aux poursuites constituent une réponse pénale à part entière en ce
sens que la personne qui va être soumise à ces mesures va devoir accomplir une mesure qui
s’apparente à une peine. Donc les mesures alternatives aux poursuites vont permettre une réponse
pénale aux infractions. Simplement, elles n’impliquent aucunement une mise en mouvement de
l’action publique. Même si elles ressemblent à des peines, ce ne sont pas des peines au sens strict du
terme. Ces mesures ont pour vertu si elles sont exécutées par la personne qui y est soumise,
d’empêcher à son égard toutes poursuites. Autrement dit si ces mesures qui sont ordonnées sont
exécutées par le délinquant, l’action publique va s’éteindre. On voit bien grâce à ce mécanisme que
les mesures alternatives aux poursuites font obstacle à l’exercice de poursuites. Il ne peut pas y avoir
de mesures alternatives aux poursuites et des poursuites, les deux mécanismes ne peuvent pas
coexister s’agissant d’un même individu. On ne peut pas faire les 2 cumulativement sauf dans le cas
où la personne qui serait soumise à des mesures alternatives aux poursuites n’accomplirait pas les
mesures qui ont été prévues et qui ont été fixées par le Procureur de la République.
Essentiellement pour deux raisons. La principale raison c’est que ces mesures si elles sont
correctement exécutées par le délinquant, vont éviter la tenue d’un procès au sens traditionnel du
terme. Donc elles vont être source d’une certaine économie. De ce fait le législateur a tendance à
promouvoir de telles mesures. C’est là le 1er intérêt de ce mécanisme. Le 2nd intérêt c’est que le
délinquant va assez souvent adhérer à la mesure qui lui a été proposé et il va assez spontanément
exécuter cette mesure alternative aux poursuites pour éviter à défaut d’être poursuivi par le
Ministère public.
Le législateur a souvent pleins d’idées à la fois. Il a donc eu l’idée de créer plusieurs mesures
alternatives aux poursuites, un peu différentes à chaque fois. Et donc pendant une dizaine d’années
la tendance a été à la multiplication des variétés de mesures alternatives aux poursuites. Aujourd’hui
la tendance est un peu inverse et on s’aperçoit qu’il y a une mesure alternative aux poursuites tout à
fait centrale : la composition pénale. A côté il y a quelques autres mesures mais qui sont tout à fait
marginales, ce sont la transaction pénale et la convention judiciaire d’intérêt public. Elles ne
concernent que certaines infractions très spécifiques. Par exemple la transaction pénale ne va
concerner que le droit douanier ou le droit fiscal. Donc aujourd’hui on assiste à « un recentrage
autour de la composition pénale ». En effet, depuis une loi du 23 mars 2019, la composition pénale
apparait comme étant la pièce maitresse des mesures alternatives aux poursuites.
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2. 2ème phase : c’est celle de la validation de la composition pénale. Cette validation ressemble à
la procédure d’homologation qui est mise en œuvre lorsqu’il est recouru à une CRPC. Cette
mesure de validation va être effectuée par un magistrat du siège. Ce magistrat va donc
devoir valider l’accord passé entre le Procureur de la République et le suspect. Cette
validation de l’accord a été pendant très longtemps systématique, il y avait nécessairement
une phase de validation. Autrement dit il ne pouvait pas y avoir d’accord s’il n’était pas
ensuite validé. Mais toujours dans un souci d’économique la loi du 23 mars 2019 a permis
que pour les infractions les moins graves, cette phase de validation soit occultée. Donc pour
les délits punis d’une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à 3 ans, il est possible que
le Procureur de la République et le suspect concluent leur accord sans qu’une validation soit
ensuite effectuée par un magistrat du siège. Lorsqu’elle demeure, cette phase de validation
va impliquer qu’un magistrat du siège examine juridiquement si d’une part la mesure de
composition pénale était effectivement possible et d’autre part il va procéder à un contrôle
d’opportunité : il va vérifier que la mesure de composition est véritablement adaptée à
l’infraction qui a été commise. Une fois la composition pénale validée il y a 2 possibilités :
L’auteur de l’infraction exécute les obligations, les mesures de composition qui ont été mises
à sa charge. Dans ce cas là, l’action publique s’éteint, ce qui implique que la personne ne
pourra plus être poursuivie.
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Le classement sans suite c’est l’hypothèse dans laquelle le Procureur de la République décide
de ne pas engager de poursuites. Ce classement sans suite peut être justifié par plusieurs séries de
considération. Parfois le classement sans suite va s’imposer car le Procureur de la République estime
que les faits tels qu’ils ont été présentés et les faits tels qu’ils ont été révélés par les investigations ne
peuvent pas donner lieu à des poursuites : soit par qu’il estime qu’aucune infraction n’a jamais été
commise ou parce qu’il estime que l’action publique est prescrite. Dans ces 2 cas de figure les
Procureurs de la République n’ont d’autre choix que de classer l’affaire sans suite. Le classement sans
suite peut résulter de la prescription de l’action publique, de son extinction dans le temps.
Les Procureurs de la République ont également tendance à classer sans suite des affaires qui
sont peu importantes car elles concernent des infractions mineures, et donc ne troublent pas de
manière flagrante la société. Donc les Procureurs de la République en vertu de leur pouvoir
d’appréciation d’engager ou non des poursuites, ont tendance parfois à classer sans suite des affaires
concernant des petites infractions. Dans tous les cas, un classement sans suite doit être motivé. Le
Procureur de la République va devoir informer le plaignant et l’éventuelle victime.
Cette décision de classement sans suite constitue une simple décision de nature
administrative qui n’interdit pas ultérieurement au Procureur de la République d’exercer des
poursuites. Le Procureur n’est donc pas lié par sa décision de classer l’affaire sans suite, il peut
toujours revenir sur cette décision. C’est l’apport de l’arrêt de la chambre criminelle de la Cour de
cassation du 12 mai 1992. De plus même si l’affaire est classée sans suite, comme la décision du
Procureur de la République revêt un caractère administratif, rien n’interdit à la victime de mettre en
mouvement l’action publique soit en procédant à une citation directe soit en procédant à une plainte
avec constitution de partie civile.
Si à l’inverse l’auteur de l’infraction exécute les obligations qui ont été mis à sa charge, dans
ce cas en pratique le plus souvent le Procureur de la République va classer l’affaire sans suite.
Cependant ce n’est pas une obligation pour le Procureur de la République et il peut même si l’auteur
de l’infraction exécute cette obligation préalable décider d’engager des poursuites. Légalement rien
ne lui interdit de le faire. C’est ce qu’a énoncé la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un
arrêt du 21 juin 2011.
Les articles 40-1 et suivants du Code pénal nous montrent que l’action publique ne s’éteint
pas lorsque la personne soumise à ces obligations préalables. Comme l’action publique ne s’éteint
pas, rien n’interdit au Procureur de la République de mettre en mouvement l’action publique. C’est
une raison de texte qui justifie essentiellement cela. Ici contrairement aux mesures alternatives aux
poursuites, l’action publique ne s’éteint pas.
Le choix du Procureur de la République peut parfois être tempéré et il exige des principes
correcteurs au principe du libre choix du Procureur de la République. Ces correcteurs vont éviter soit
que le Ministère public ne fasse rien = l’inertie du Ministère public, soit à l’inverse qu’il n’agisse trop
rapidement.
Les cas où le Procureur de la République est obligé de mettre en mouvement l’action publique :
1er cas de figure : lorsqu’il reçoit des instructions d’un supérieur hiérarchique lui prescrivant de
poursuivre telle ou telle infraction. Le Ministère public est organisé selon une structure hiérarchique
donc il est tout à fait possible qu’un magistrat du parquet reçoive une instruction d’engager des
poursuites s’agissant de telle ou telle infraction.
2ème cas de figure : une action de la victime : cette action va parfois contraindre le Procureur de la
République à mettre en mouvement l’action publique. Ces actions de la victime sont au nombre de
2:
Ces 2 mécanismes vont chacun de leur côté avoir
Plainte avec constitution de partie civile
pour effet de mettre en mouvement l’action
Citation directe
publique ce qui va contraindre le Procureur de la
République à exercer cette action.
79
Les cas où la mise en mouvement l’action publique par le Procureur de la République sont
subordonnés à une condition, on parle d’action publique conditionnée.
Pour certaines infractions très précises, cette condition va consister en une plainte de la part
de la victime (encore faut-il qu’elle ait été valablement déposée). C’est le cas par exemple de
l’infraction d’atteinte à la vie privée prévue par l’article 226-1 du Code pénal. Elle ne peut donner
lieu à une mise en mouvement de l’action publique que sur plainte de la victime selon l’article 226-6
du Code pénal.
D’autre fois ce n’est pas une plainte de la victime qui conditionne l’action publique mais une
autorisation. Parfois en effet, le Ministère public doit obtenir une autorisation avant de pouvoir
engager des poursuites à l’encontre d’une personne. Ce système avait été employé par la
Constitution de 1958 à l’égard des membres des assemblées. Dans ce cas de figure, l’autorisation
était un préalable à l’exercice de l’action publique ce qui avait pour effet de protéger les membres
des assemblées parlementaires. Ce système en réalité aujourd’hui n’est plus pratiqué sauf dans des
cas très marginaux. C’est donc très rare.
L’action publique peut s’éteindre dans plusieurs hypothèses qui sont prévues par l’article 6
du Code de Procédure Pénale. Lorsque l’action publique s’éteint, elle ne peut plus être mise en
mouvement naturellement, et donc aucune poursuite ne peut plus être exercée de ce fait aucune
condamnation ne pourra être prononcée à l’encontre de l’auteur de l’infraction. L’extinction est donc
très importante puisqu’elle va faire obstacle à la condamnation de la personne.
En effet le législateur peut supprimer l’élément légal d’une infraction ce qui va permettre
d’ôter à certains faits leur qualification pénale. Cette suppression peut prendre deux formes :
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Les lois d’amnisties : aujourd’hui elles ne sont plus très fréquentes. Mais avant il y
avait une sorte de tradition dans le France républicaine qui consistait à chaque fois
qu’un Président de la République était élu à amnistier un certain nombre
d’infractions qui avaient sanctionné jusque là. Par exemple les Président de la
République élus amnistiaient l’ensemble des actes commis en matière de
contraventions routières. L’effet d’une telle loi d’amnistie était de supprimer toute
qualification pénale à des faits qui avaient été déjà commis avant que n’entre en
vigueur cette loi d’amnistie. Elle avait donc pour effet d’éteindre l’action publique
s’agissant de l’ensemble des infractions qui rentraient dans son champ d’application.
La grosse différence avec l’abrogation de la loi pénale c’est que la loi d’amnistie ne
faisait pas disparaitre l’infraction pour l’avenir. En effet les différentes infractions
amnistiées demeuraient pour l’avenir.
L’autorité de la chose jugée c’est l’autorité qui est attachée à une décision qui a déjà jugé.
L’idée au fond c’est qu’une personne qui a été condamnée par une décision de justice ne peut pas
être condamnée à nouveau par une seconde décision de justice. Ou encore une personne qui a été
relaxée par une décision de justice ne peut plus à nouveau être poursuivie. Donc l’autorité qui est
attachée à une décision de justice qu’on appel l’autorité de chose jugée a pour effet d’éteindre
l’action publique, ce qui fait qu’une nouvelle mise en mouvement de cette action publique n’est plus
possible. Cette règle de l’autorité de la chose jugée a un corollaire qui est parfois invoqué par la Cour
de cassation, il s’agit de la règle « ne bis in idem » qui veut dire « on ne peut pas être jugé 2 fois pour
les mêmes faits ». Cette règle reprend quelque part le mécanisme de l’autorité de la chose jugée. De
plus cette règle a été consacrée par la Cour de cassation dans un arrêt du 14 novembre 2019 rendue
par la Chambre criminelle, mais elle a aussi été consacrée par l’article 4 du protocole n°7 de la
Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
1ère condition : les poursuites engagées doivent avoir le même objet que celles qui ont donné lieu à
un précédent jugement. Or les poursuites engagées en matière pénale ont toujours le même objet
puisqu’elles tendent au prononcé d’une peine à l’encontre contre l’auteur d’une infraction. Donc
cette première condition ne fait pas radicalement défaut.
2ème condition : une identité de partie. En effet, il est assez logique que si une personne a fait l’objet
d’un jugement, cela n’empêche pas de poursuivre une autre personne ultérieurement. Donc pour
que l’autorité de la chose jugée fasse obstacle à l’exercice de nouvelles poursuites, il faut qu’il existe
une identité de partie. Il faut que ce soit les mêmes parties qui aient été jugées et qui fassent objet
de poursuites.
3ème condition : il faut que les poursuites soient fondées sur les mêmes faits. C'est cette condition qui
pose le plus de difficulté. Cette condition impose que la personne ait été jugée s’agissant des mêmes
faits que ceux qui font aujourd’hui l’objet de poursuites. Donc pour les faits qui ont donné lieu à
jugement, aucune poursuite n’est plus possible. Toute la question est de savoir :
Dans quel cas les faits sont identiques et suffisamment identique pour ne pas que
soient engagées de nouvelles poursuites ?
Cette question est assez complexe puisqu’elle pose le problème de savoir ce qui est un fait. Il
y a des cas complexes, par exemple une personne est poursuivie pour meurtre et elle est jugée
innocente. Est-il possible, sous prétexte d’ajouter un fait d’intentionnalité, de la poursuivre
ultérieurement à nouveau pour assassinat ? A savoir : ce qui différencie le meurtre et l’assassinat
c’est l’intention de l’auteur de l’acte. Donc est-ce que le fait que la personne ait été relaxée sous la
qualification de meurtre empêche d’exercer ensuite des poursuites du chef d’assassinat ? Autrement
dit est-ce que le simple fait de l’intentionnalité de l’acte suffit à considérer qu’elle ne serait plus
poursuivie pour les mêmes faits que ceux pour lesquelles elle avait été jugée. La Cour de cassation
n’est pas très précise quant à cette question. Dans un arrêt Thibault en date du 25 mars1954, la Cour
nous montre la difficulté de savoir reconnaitre un fait.
Faits : un mari était malheureux puisque sa femme a été retrouvée brûlée vive dans le lit conjugale.
Le mari a été condamné pour homicide involontaire, autrement dit à cause d’une imprudence de sa
part. Mais de nouvelles investigations sont menées et il apparait qu’en réalité le mari n’avait peut
être pas aussi involontairement que cela brûlé vive sa femme. En effet les nouvelles investigations
ont fait apparaitre que le mari avait aspergé sa femme d’un produit incendiaire avant d’y mettre le
feu. Donc ce n’était plus du tout un homicide involontaire mais soit un meurtre soit un assassinat.
Problème de droit : est-ce que la simple circonstance que le mari ait été jugé et condamné pour
homicide involontaire empêchait-elle ultérieurement qu’il soit poursuivi pour assassinat ?
Solution : la Cour de cassation a estimé que le nouvel élément que constituait l’élément moral /
intentionnel lié à l’infraction, constituait un fait nouveau qui justifiait que de nouvelles poursuites
soient engagées.
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Dans cette affaire, la Cour de cassation a admis que de nouvelles poursuites soient engagées
à l’encontre du mari qui avait été condamné pour homicide involontaire parce qu’un nouvel
élément avait été mi en avant : un élément moral / intentionnel qui avait été ignoré lors du
premier procès.
On voit aussi avec cet exemple que les choses sont assez délicates. Il est assez délicat de dire
dans quel cas il y a identité de fait ou non. En réalité tout va être une affaire d’équilibre.
Equilibre puisque si la Cour de cassation retient trop souplement cette notion d’identité de
fait, cela va empêcher la poursuite de faits sous des qualifications pénales qui seraient
extrêmement différente. A l’inverse si la Cour de cassation est trop sévère, cela va conduire à
ce que des faits présentés sous une qualification pénale un tout petit peu différent puissent
donner lieu à des poursuites successives. L’équilibre n’est donc pas simple à trouver.
L’action publique s’éteint soit en raison d’un désistement soit d’un retrait de plainte de la
partie civile.
Ces cas exceptionnels ce sont ceux où la mise en mouvement de l’action publique est
subordonnée à une plainte de la victime. Par exemple en cas d’infraction d’atteinte à la vie privée la
mise en mouvement de l’action publique est subordonnée à cette plainte de la part de la victime. Par
voix de conséquence si la victime retire sa plainte ou se désiste du procès, la conséquence est que
l’action publique s’éteint et que l’auteur de l’infraction ne peut plus être poursuivi. C'est très rare
puisque le principe est que le retrait de plainte n’a aucun effet sur l’action publique.
Lorsque l’auteur d’une infraction exécute les mesures alternatives aux poursuites.
Lorsque ce dernier exécute ces mesures alternatives aux poursuites convenues avec le
Procureur de la République, l’action publique s’éteint (par exemple la composition pénale).
Il faut faire attention car il y a deux sortes de prescription en procédure pénale. D’abord il y a
la prescription de la peine = une fois qu’un individu a été condamné, il doit dans un certain délai
commencer à exécuter cette condamnation. Passé ce délai, la peine ne pourra plus être exécutée. Ce
délai de délai de prescription de la peine est variable :
Il existe des exceptions et pour certains crimes particulièrement graves, ce délai peut être
augmenté et il peut même être dans certains cas supprimés s’agissant par exemple des crimes contre
l’humanité (la peine est imprescriptible). Tous ces délais sur la prescription de la peine sont codifiés
de l’article 133-2 à 133-4 du Code pénal.
Cette prescription de l’action publique a été profondément réformée par une loi du 27
février 2017. Cette loi a donc modifié non seulement en partie les délais de prescription applicable
mais également les règles de calculs des délais de prescription.
Au-delà de ces délais de principe, il existe des délais de prescription de l’action publique qui
sont parfois plus long, ou parfois plus court même si c’est plus rare.
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Ces délais peuvent être plus longs parce que le législateur a voulu répondre plus
efficacement à certaines infractions. En effet certaines infractions ont été considérées comme
appelant une réponse pénale et le législateur afin de favoriser une réponse pénale à ces infractions a
augmenté le délai de prescription. Par exemple certains crimes qu’on peut juger comme étant plus
graves que certains autres, comme ceux liés au terrorisme ou trafic de stupéfiants, se prescrivent
pas un délai de 30 années. De la même manière, certains crimes ou certains délits commis contre les
mineurs voient leur délai de prescription passer parfois à plus de 10 ans ou plus de 20 ans. Par
exemple l’assassinat ou le viol commis sur un mineur se prescrit par 30 ans. Il s’agit des articles 7,8 et
9 du Code de Procédure Pénale.
Le calcul du délai de prescription vaut pour tous les délais de prescription (matière pénale et
civile). Ce calcul suppose de fixer le point de départ de ce délai de prescription. Cette fixation du
point de départ est primordiale car ça ne sert à rien de connaitre un délai si on ne peut pas savoir à
partir de quel moment il commence à courir.
1 - Le principe
Les conséquences dépendent en grande partie de la nature de l’infraction qui a été commise.
Si a été commise une infraction dite « instantanée » cela implique qu’elle se déroule dans un trait de
temps. Si par exemple je tue mon voisin à l’instant même, il s’agit d’une infraction instantanée. Pour
ces infractions instantanées, la mise en œuvre du principe ne pose pas de difficulté. Le délai de
prescription va courir le lendemain du jour où a été commise cette infraction.
La chose est plus complexe concernant 2 autres séries d’infraction : les infractions dites
« d’habitude » et celles dites « continues ».
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Les infractions continuent supposent que l’activité délictueuse, ses éléments constitutifs, se
prolonge dans le temps. C’est par exemple le cas du recel. Le recel suppose la dissimulation d’une
chose, cette dissimulation va durer plus ou moins longtemps. Donc pour ces infractions continues
dont l’activité délictueuse se prolonge dans le temps, le point de départ du délai de prescription est
fixé au lendemain de la fin de la commission de cette infraction continue. Par exemple en cas de
recel, le point de départ du délai de prescription sera fixé au jour où l’auteur se sera dépossédé de
cet élément recelé. La Cour de cassation a donné une illustration récemment à propos d’une
infraction relative au recel et à la dissimulation de cadavres. Cela consiste à dissimuler un cadavre,
notamment parce qu’il aurait été tué dans des conditions relativement suspectes. Il s’agissant d’une
affaire qui a donné lieu à un arrêt du 13 décembre 2017. La Cour de cassation a dit dans cet arrêt que
le point de départ de la prescription s’agissant de cette infraction de recel ou de dissimulation de
cadavres, commençait uniquement à courir à compter de la fin du recel ou de la dissimulation. Dans
cet arrêt du 13 décembre 2017, plusieurs personnes étaient poursuivies (notamment pour meurtre)
et une personne pour dissimulation de cadavre. La morale voudrait que ceux qui ont tué la personne
soient condamnés et à la rigueur celui qui a dissimulé le cadavre ne soit pas poursuivi. Eh bien
l’application de la prescription a conduit à la solution inverse. En effet le meurtre est une infraction
instantanée, les faits de meurtres étaient prescrits. En revanche la dissimulation de cadavre est une
infraction continue et le cadavre avait été retrouvé relativement récemment, ce qui fait que la
personne qui avait dissimulé le cadavre a pu être poursuivie : l’action publique n’était pas éteinte.
Tandis que les personnes qui avaient pratiqué le meurtre ne pouvaient plus l’être car action
instantanée et donc action publique éteinte.
Les infractions d’habitude : ce sont les infractions qui consistent à réitérer plusieurs fois un
même acte. L’exemple le plus connu est celui de l’exercice illégal de la médecine. En effet cela
consiste à délivrer par habitude à plusieurs reprises des consultations médicales. Pour ces infractions
le délai de prescription ne commence à courir que le jour où le dernier acte illégal a été accompli.
Par exemple si une personne se livre à l’exercice illégal de la médecine depuis 20 ans et
qu’aujourd’hui il décide de cesser son activité, le point de départ de la prescription sera fixé
aujourd’hui, donc le délai commencera à courir le lendemain à minuit.
2 - Les exceptions
Il y a 3 variétés d’hypothèses :
En effet, certains crimes ou délits commis sur des mineurs peuvent voir le point de départ de
la prescription retardée. L’idée c’est que le mineur n’est pas forcément en mesure de comprendre la
portée des actes qui sont commis à son encontre. Donc pour ces mineurs le délai de prescription va
commencer à courir le jour où le mineur atteindra l’âge de la majorité. C’est un certain report du
délai de prescription. Admettons qu’un mineur subisse un viol à l’âge de 8 ans, le délai de
prescription ne commencera à courir que lorsqu’il aura atteint 18 ans. A cette date un délai de
prescription de nature criminelle. Ce délai sera de 30 années.
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Point de départ retardé pou certaines infractions qui revêtent un caractère clandestin aux
yeux du Ministère public et même de quiconque.
Pour ces infractions, on peut hésiter à faire partir le délai de prescription du jour de leur
commission. En effet si l’infraction est clandestine cela signifie qu’elle n’est pas visible. Ces
infractions voient leur point de départ de prescription retardé au jour où elles deviennent
apparentes. C’est l’article 9-1 du Code de Procédure Pénale.
Le problème d’un tel mécanisme c’est que la révélation de l’infraction peut intervenir très
tardivement. Elle peut intervenir 30 ou 70 ans après la commission de l’infraction. Donc engager des
poursuites plus de 30 ans après, cela peut paraitre peu souhaitable. Même si le point de départ de la
prescription est ainsi retardé, le législateur a posé une sorte de délai butoir. Il nous dit à l’article 9-1
du Code de Procédure Pénale qu’en aucun cas le report du point de départ du délai ne peut avoir
pour conséquence que le délai excède 12 années révolues pour les délits et 30 années révolues
pour les crimes.
/!\ Seuls les délits et les crimes peuvent ainsi bénéficier d’un report du point de départ du délai de
prescription en raison du caractère clandestin de l’infraction, pas les contraventions.
La Cour de cassation, et la loi du 27 février 2017 depuis l’or, a dissocié deux variétés
d’infraction clandestine : les infractions dissimulées et les infractions occultes.
Infractions dissimulées : ce sont toutes celles dont l’auteur va accomplir délibérément une
manœuvre en vu d’en empêcher la découverte. Par essence ces infractions ne sont pas
nécessairement non apparentes. En effet elles peuvent dans certains cas être tout à fait apparentes.
C’est le cas par exemple d’un meurtre, mais parce que l’auteur de l’infraction accompli des
manœuvres pour dissimuler et empêcher la découverte de son infraction, celle-ci devient dissimulée.
Ici il n’y a plus lieu de s’attacher à certains infractions particulières, ce ne sont plus les éléments
constitutifs en eux-mêmes qui justifient cette qualification d’infraction clandestine, ce sont les
agissements de l’auteur de l’acte. C’est parce qu’il a accompli certaines manœuvres en vu de
dissimuler l’infraction que le point de départ de la prescription est reculé.
Concernant ces infractions dissimulées, la Cour de cassation a toujours été réticente pour
admettre leur existence. Elle l’a admis à propos de quelques infractions particulières, notamment
pour les abus de biens sociaux lorsqu’ils étaient dissimulés par l’auteur de l’acte. Mais lors de
certaines infractions commises à l’égard de bien, la Cour de cassation a toujours été très prudente
quant à l’admission de cette catégorie d’infraction. Elle a donc tendance a refusé d’admettre qu’une
infraction commise contre une personne puisse être qualifiée d’infraction dissimulée.
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Ça dépend des manœuvres qui ont été accomplies par l’auteur de l’infraction.
Le délai de prescription ne court pas toujours d’un seul trait. Certains évènements vont
pouvoir perturber le déroulé de ce délai de prescription.
1 - L’interruption de La prescription
Définition : un évènement qui a pour effet d’anéantir un délai déjà écoulé et de faire courir un autre
délai de la même durée que l’ancien. C’est l’article 9-2 du Code de Procédure Pénale.
Effet : agir comme si la prescription n’avait au fond jamais commencé à courir. A compter de cet
évènement un nouveau délai commence à courir.
Dans cette affaire il faut aussi se mettre à la place des juges. Dans cette affaire la Cour de
cassation a incontestablement fait un effort pour trouver un acte interruptif et donc, elle a
admis que ce « soit transmis » soit constitutif d’une interruption de la prescription.
Le législateur dans sa réforme du 27 février 2017 a défini avec plus de précisions ces notions
d’actes interruptifs de prescription. Il a répertorié 4 catégories d’actes interruptifs de prescription
énumérés à l’article 9-2 du Code de Procédure Pénale :
Un acte qui émane du Ministère public ou d’une partie civile et qui a pour effet de mettre
en mouvement l’action publique.
Exemple : un réquisitoire introductif qui serait rédigé par le Procureur de la République pourrait
interrompre la prescription.
Un acte d’enquête, un procès verbal dressé par un officier de police judiciaire qui tend à la
recherche ou à la poursuite des auteurs d’une infraction.
De la même manière tous les actes accomplis par un juge d’instruction, une chambre de
l’instruction ou des officiers de police judicaire qui tendent effectivement à la recherche ou
à la poursuite des auteurs d’une infraction interrompt la prescription.
Enfin, tous les jugements ou tous les arrêts même non définitif s’ils ne sont pas nuls. Une
fois qu’une personne sera condamnée par un jugement ou un arrêt, cela va interrompre le
délai de prescription et donc en cas d’exercice d’une voix de recours un nouveau délai de
prescription aura commencé à courir à compter de l’arrêt qui condamne ou relaxe l’individu.
2 - La suspension de la prescription
Définition : le cas où le temps est suspendu, tout ce passe donc comme si le délai de prescription ne
courrait plus. Mais lorsque la cause de suspension disparait, le délai de prescription recommence à
courir pour le temps qu’il restait.
Exemple : une infraction qui serait commise en 2018, le délai de prescription est de 6 ans. Donc
en principe le délai de prescription ne devrait expirer qu’en 2024. Cependant une cause de
suspension de la prescription intervient pendant une durée d’un an en 2021. A cause de ça, la
date à laquelle le délai de prescription expirera sera également reportée d’un an. Donc la
prescription courra jusqu’en 2025.
Cette notion de suspension de la prescription a été là encore grandement précisée par la loi
du 27 février 2017. Cette loi nous dit que la prescription est suspendue par tout obstacle de droit ou
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tout obstacle de fait insurmontable et assimilable à la force majeure qui rend impossible la mise en
mouvement ou l’exercice de l’action publique. C’est l’article 9-2 du Code de Procédure Pénale.
L’obstacle de droit est une notion relativement peu utilisée. C’est le cas où certaines règles
vont empêcher l’exercice de l’action publique. Par exemple parce que certaines personnes
bénéficieraient momentanément d’une protection. C’est le cas, s’agissant nous a dit la Cour de
cassation, de l’inviolabilité dont bénéficiait le Président de la République. Comme le Président ne
peut pas être cité ou renvoyé devant une juridiction pendant la durée de son mandat, pendant cette
durée le délai de prescription est suspendu. Il s’agit de l’apport de l’arrêt d’Assemblée Plénière du 10
octobre 2001 de la Cour de cassation. Il s’agit d’un obstacle légal.
L’obstacle de fait : pour suspendre la prescription cet obstacle doit être insurmontable et
assimilé à la force majeure (article 9-2 Code de Procédure Pénale). Ces cas où existe un obstacle de
fait qui pourrait être assimilé à la force majeure sont peu fréquents. C’est dans des circonstances
exceptionnelles que la Cour de cassation admet de reconnaitre l’existence de tels obstacles factuels.
Par exemple, la Cour de cassation nous a dit qu’en matière de meurtre ou d’assassinat, la
dissimulation d’un cadavre ne constitue pas en elle même un obstacle insurmontable. C’est l’apport
d’un arrêt de la chambre criminelle du 13 décembre 2017. De la même manière la chambre
criminelle nous a indiqué dans un arrêt du 17 octobre 2018 qu’une amnésie traumatique ne
constitue pas un obstacle de fait insurmontable. En effet c’est le cas pour des infractions qui
seraient particulièrement violente pour les victimes.
Cependant la Cour de cassation a admis l’obstacle de fait dans une hypothèse un peu
particulière qui a donné lieu à un arrêt rendu en Assemblée plénière le 7 mai 2014. Cet arrêt
concernait le meurtre et l’assassinat d’enfants dont les cadavres avaient été dissimulés par leur
mère. Une femme enceinte dissimulait sa grossesse et après l’accouchement tuait ses enfants et
ensuite elle les dissimulait. Ici la Cour de cassation a admis dans une hypothèse très particulière où
une mère dissimulait sa grossesse, accouchait seule, tuait ses enfants et dissimulait leur cadavre,
l’existence d’obstacle de fait.
Mais en fait, à la lecture de cet arrêt on se rend compte que la Cour de cassation s’attache
précisément aux circonstances de la cause. Elle relève bien que les grossesses de la femme étaient
masquées par son obésité, qu’elles ne pouvaient pas être décelées par ses proches ou par des
médecins, que les accouchements ont eu lieu sans témoins et que les nouveaux nés sont restés
cachés jusqu’à la découverte des 2 premiers corps. Donc la Cour de cassation au regard de toutes ces
données factuelles a estimé qu’effectivement existait en l’occurrence un obstacle insurmontable.
90
Chapitre II
On pourrait se dire que la place naturelle de l’action civile c’est devant les juridictions civiles.
En effet c’est le tribunal judiciaire qui devrait à priori être compétent pour octroyer des dommages et
intérêts à une éventuelle victime d’une infraction pénale. Pourtant, depuis aujourd’hui assez
longtemps, le système procédural français admet que les victimes se portent parties civiles dans le
procès pénal et donc par ce biais, qu’elles obtiennent des dommages et intérêts de la part du juge
répressif. Dans ce cas là, le juge répressif va statuer sur les demandes de dommages et intérêts que
les victimes pourraient former. C’est une possibilité qui est admise depuis longtemps en procédure
pénale française. Le plus souvent, ces victimes vont se fonder sur le principe commun du droit de la
responsabilité civile, c'est-à-dire sur la responsabilité pour faute ou la responsabilité du fait des
choses…
Toute la question est de savoir pourquoi les victimes peuvent s’adresser ainsi aux juridictions
répressives pour obtenir des dommages et intérêts. Au fond, pourquoi le système répressif pénal
français l’admet. Si on l’admet c’est pour 2 séries de considérations et parce que d’une part c’est
plutôt intéressant vis-à-vis des victimes et d’autre part, parce que ça présente quelques intérêts pour
le service public de la justice.
Pour la victime, agir devant le juge répressif va lui permettre de satisfaire un certain nombre
d’intérêts :
1ère intérêt : mettre une espèce de terme à un sentiment de vengeance. En exerçant une action
devant le juge répressif, elle va avoir une sorte d’impression qu’elle participe à la condamnation de
l’auteur de l’infraction.
La chambre criminelle a admis que la partie civile puisse agir devant le juge répressif même si
elle ne sollicite aucun dommages et intérêts, juste afin que la culpabilité du prévenu soit
établi. C’est l’apport d’un arrêt du 8 juin 1971. Il est admis que la justice agissent devant le
juge répressif même pas pour solliciter des dommages et intérêts mais uniquement pour
établir la culpabilité du prévenu. Avec cette admission, on voit bien que la victime est
satisfaite d’une espèce de volonté de vengeance.
2ème intérêt : lui permettre d’obtenir réparation plus rapidement, en tout cas sous forme
pécuniaire. Plus rapide car si la victime s’adresserait au juge civil, ce dernier devrait, avant de statuer
sur sa demande de dommages et intérêts, attendre que le juge répressif ait statué sur la culpabilité
de l’individu. Autrement dit si le juge civil était saisi d’une demande de réparation d’un dommage
cause directement pas l’infraction, il devrait sursoir à statuer dans l’attente de la décision du juge
répressif. Ce gain de temps est tout à fait appréciable pour la victime surtout quand on sait que la
justice française n’est pas forcément très rapide.
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En général la victime, lorsqu’elle est ainsi associée au procès pénal, le plus souvent elle va
essayer de corroborer l’action publique et d’établir la culpabilité de l’individu. Autrement dit entre la
victime et le Ministère public va s’instaurer une sorte d’entre aide qui va permettre plus facilement
d’établir la culpabilité de l’individu. Pour toutes ces raisons, il parait aujourd’hui assez satisfaisant
que les victimes puissent agir devant le juge répressif.
Au-delà de ça, il faut voir qu’en droit français existe un fort mouvement en faveur d’une
indemnisation des préjudices. On supporte de plus en plus mal qu’un individu puisse subir un
dommage sans en être indemnisé. En raison de cela se met en place une législation extrêmement
favorable aux victimes. Cette faveur aux victimes passe notamment pas l’instauration de régime
d’indemnisation. En effet il existe un fond de garantie des actes de terrorisme et d’autres
infractions (FGTI). Il va permettre une indemnisation des victimes qui va s’avérer notamment utile
lorsque la personne responsable soit n’est pas identifiée soit n’est pas en mesure de réparer le
préjudice subi par la victime. On retrouve ce système aux articles 706-3 et suivants du Code de
Procédure Pénale. Ce système d’indemnisation est plutôt favorable aux personnes qui subissent les
infractions les plus graves. Elles ont le droit d’être indemnisé intégralement des dommages qu’elles
auraient subi, et plus spécifiquement elles pourront obtenir une indemnisation intégrale des
dommages qui en résulteront pour leur personne. Les dommages aux biens sont exclus. Les
infractions les plus graves sont toutes celles qui sont énoncées par l’article 706-3 du Code de
Procédure Pénale, il s’agit notamment des faits qui auraient pu occasionner la mort, une incapacité
de travail supérieure à 6 mois, les viols… En revanche pour les infractions un peu moins graves,
l’indemnisation n’est pas systématique et n’est pas intégrale. Elle est ici subordonnée à des
conditions.
La victime d’une infraction va disposer d’une option puisqu’elle a une alternative qui se
présente à elle. Soit elle va pouvoir solliciter une indemnisation devant les juridictions civiles et
notamment devant le tribunal judiciaire. Cette possibilité existe mais elle n’est pas forcément
favorable à la victime. Soit elle va pouvoir agir devant le juge répressif. Il va alors se poser 2
questions :
L’action civile devant le juge répressif peut s’exercer selon 2 modalités différentes, dont
l’usage de l’une et de l’autre dépend de savoir si l’action publique a ou non déjà été mise en
mouvement. Autrement dit si l’action publique a déjà été mise en mouvement, l’exercice de l’action
civile va suivre une modalité et lorsque l’action publique n’a pas encore été mise en mouvement
l’action civile va suivre une autre modalité.
92
1. Mise en mouvement
Lorsque l’action publique a déjà été mise en mouvement, l’exercice d’une action civile par la victime
ne pose pas de difficulté procédurale. Dans un tel cas de figure, l’action civile est relativement facile à
exercer. On dira alors que la victime exerce son action civile par voix d’intervention.
Exemple : un viol est commis sur une femme le Procureur de la République est averti de ce
viol et saisi un juge d’instruction. Une fois que le Procureur de la République aura ainsi saisi ce
juge, l’action publique aura été mise en mouvement. A partir de ce stade il sera très simple
pour la victime de greffer son action civile sur l’action publique.
Mais il est également possible que l’action publique n’est pas été mise en mouvement par le
Ministère public. La victime peut alors le faire mais elle va devoir suivre des contraintes procédurales
un peu plus lourdes. On dit que la victime exerce son action civile par voix d’action. Cet exercice par
voix d’action va avoir pour effet secondaire de mettre en mouvement l’action publique et donc de
contraire le Ministère public a agir.
L’hypothèse de l’exercice de l’action civile par voix d’intervention c’est celle où l’action
publique a déjà été mise en mouvement. L’exercice est donc relativement simple. Au fond, il n’y a
plus qu’à la personne se prétendant victime de l’infraction d’exercer son action civile pour la greffer
sur l’action publique qui a déjà été exercée. Le Ministère public peut mettre en mouvement l’action
publique soit en saisissant un juge d’instruction soit en saisissant directement une juridiction de
jugement. Dans un cas comme dans l’autre, la victime pourra aisément exercer son action civile par
voix d’intervention. Cet exercice n’est pas subordonné à des formes très contraignantes.
De la même manière lorsque l’affaire est devant une juridiction de jugement, la partie civile
pourra là encore agir par voix d’intervention. La victime pourra soit agir avant l’audience en se
déclarant auprès du greffe, soit pendant l’audience en procédant à une déclaration ou en déposant
des conclusions. C’est ce que nous dit l’article 419 du Code de Procédure Pénale.
En procédure pénale il y a 2 actes qui vont permettre à une personne d’exercer l’action civile
par voix d’action. Cet exercice de l’action civile par voix d’action permettant de mettre en
mouvement l’action publique. C’est deux actes sont :
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La citation directe : qui va comme son nom l’indique, citer un individu à comparaitre devant
une juridiction de jugement. (saisi une juridiction de jugement).
La plainte avec constitution de partie civile : elle va avoir pour effet de saisir un juge
d’instruction afin qu’il diligente un certain nombre d’investigations.
Pour la victime, le choix entre citation directe et plainte avec constitution de partie civile
n’est pas tout à fait absolu puisqu’il y a des hypothèses où la victime devra utiliser la citation directe
et d’autres où elle devra utiliser la plainte avec constitution de partie civile.
La citation directe, comme en disposent les articles 388 et 392 du Code de Procédure Pénale,
ne peut être utilisée qu’en matière délictuelle et, selon les articles 531 et 533 du Code de Procédure
Pénale en matière contraventionnelle. De son côté la plainte avec constitution de partie civile peut
être utilisée en matière délictuelle et en matière criminelle d’après l’article 85 du Code de Procédure
Pénale.
Finalement ce n’est qu’en matière délictuelle que la victime va pouvoir décider d’utiliser la
plainte avec constitution de partie civile ou d’utiliser la citation directe pour mettre en mouvement
l’action publique. Les deux sont différents. Avec la plainte avec constitution de partie civile, un juge
d’instruction va être saisi, celui-ci va réaliser des actes d’investigation. Autrement dit lorsqu’une
personne ne dispose pas de suffisamment de preuves, il est plutôt favorable pour elle de se tourner
vers une juge d’instruction qui va procéder à des actes d’investigation. Donc le juge d’instruction va
permettre la manifestation de la vérité.
Ces 2 mécanismes, parce qu’ils mettent en mouvement l’action publique sont susceptible de
dégénérer en abus. Donc le droit prévoit un certain nombre de mécanismes qui sont destinés à
sanctionner ces abus de constitution de partie civile. Celui qui formerait une citation directe ou qui
recourait à une plainte avec constitution de partie civile trop hâtivement, s’expose à ce que cet acte
soit qualifié d’abus et s’expose à d’éventuelles sanctions.
Cette plainte avec constitution de partie civile se dissocie de la plainte « courante » que les
individus déposent aux gendarmes ou policiers. La plainte avec constitution de partie civile est
réalisée entre les mains du juge d’instruction. Elle va mettre en mouvement l’action publique.
Contrairement à elle la plainte simple ne met pas en mouvement cette action publique.
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La plainte avec constitution de partie civile est un acte peu formaliste qui va consister en une
lettre écrite datée et signée, et qui va être adressée par la personne qui s’estime victime au doyen
des juges d’instruction. La chose qui importe le plus dans cette lettre c’est que la personne qui se
prétend victime manifeste sa volonté de se constituer partie civile, c'est-à-dire participer au procès
en tant que partie. Une fois cette plainte reçue, le doyen va la communiquer au Procureur de la
République afin que ce dernier prenne des réquisitions vis-à-vis de cette plainte. C’est donc très
facile à rédiger. C’est tellement simple qu’il y a un risque d’abus que le législateur a essayé de
prévenir en mettant en place des filtres qui vont éviter ces abus.
1er filtre : subordonner la recevabilité de cette plainte avec constitution de partie civile à un refus
du Procureur de la République de mettre en mouvement l’action publique. Autrement dit, la plainte
avec constitution de partie civile n’est recevable que si le Procureur de la République n’a pas voulu
mettre en mouvement l’action publique pour poursuivre l’infraction. C’est l’article 85 du Code de
Procédure Pénale qui prévoit cela.
En fait pour la personne qui va porter cette plainte, si celle-ci s’aperçoit que le Procureur de
la République ne met pas en mouvement l’action publique dans le délai de 3 mois,
intérieurement elle va se dire que peut être il n’y a pas lieu de mettre en mouvement l’action
publique, et donc quelque part ça va la refreiner dans ces ardeurs.
2ème filtre : il est de nature financière, il consiste au moment où le juge d’instruction va enregistrer la
plainte avec constitution de partie civile à fixer le montant d’une consignation, c'est-à-dire d’une
somme d’argent que devra verser l’auteur de la plainte avec constitution de partie civile auprès du
trésor public. Cette somme qui va être ainsi consignée sera versée au Trésor public définitivement
s’il est établi qu’il existe un abus. Autrement dit si la personne abuse de la plainte avec constitution
de partie civile. Cette somme va être fixée par le juge d’instruction en fonction des revenus de la
victime. Si la personne ne veut pas payer cette somme, sa constitution de partie civile est
irrecevable. En principe cette somme n’est pas là pour ruiner la personne, juste à la faire réfléchir aux
conséquences que cela pour avoir.
Si ces 2 filtres sont passés (ou 1 seul en cas de crime), que la personne a attendu le délai de 3
mois après avoir signalé l’infraction au Procureur de la République et si la personne a consigné la
somme, en principe le juge d’instruction va prendre une initiative. Elle consiste à transmettre la
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plainte avec constitution de partie civile au Procureur de la République afin que ce dernier prenne
des réquisitions.
/!\ La plainte avec constitution de partie civile n’a pas besoin de passer par le mécanisme de passer
devant le Procureur de la République lorsqu’il s’agit d’un crime. Le premier filtre est donc optionnel.
Ils disposent de plusieurs options qui sont listées par l’article 86 du Code de Procédure
Pénale. Le principe c’est que le Procureur de la République doit demander au juge d’instruction
d’instruire l’affaire. Le principe c’est donc qu’une information judiciaire soit ouverte. Ce principe a
été énoncé dans un très vieil arrêt : l’arrêt Laurent Atthalin du 8 décembre 1906. Dans cet arrêt la
Cour de cassation a reconnu que le principe était que lorsqu’une plainte avec constitution de partie
civile était formée, soit ouverte une information judiciaire et donc que le juge d’instruction effectue
des actes d’investigation. Le principe est donc que le Procureur de la République prenne un
réquisitoire introductif destiné à ce que soit ouverte une information judiciaire.
Mais ce principe n’est pas tout à fait absolu et fait l’objet d’un certain nombre de limites. En
effet, on veut éviter que le juge d’instruction ne soit tenu d’effectuer des actes d’investigation sur
tout et n’importe quoi. Il faut que les plaintes avec constitution de partie civile qui manifestement ne
doivent pas donner lieu à l’ouverture d’une information judiciaire soient écartées. Donc il a toujours
été admis depuis très longtemps qu’une ordonnance de refus d’informer puisse être rendue par le
juge d’instruction. Donc le Procureur de la République peut saisir le juge d’instruction d’une
ordonnance de refus d’informer. Cette ordonnance de refus d’informer et des réquisitions aux fins de
refus d’informer ne sont possibles que si aucune poursuite n’est envisageable. En fait aucune
poursuite n’est envisageable quand par exemple les faits qui ont été dénoncés ne revêtent aucune
qualification pénale.
Exemple : mon voisin se plaint d’un de ses voisins qui taille la haie à une nouvelle heure ou qui
fait trop de bruit en tondant la pelouse.
De la même manière, une ordonnance de refus d’informer peut être rendue lorsque les faits
qui sont dénoncés dans la plainte avec constitution de partie civile ne peuvent légalement comporter
aucune poursuite pour « des causes qui affectent l’action publique elle même » (article 86 Code de
Procédure Pénale). Donc autrement dit, lorsque l’action publique est manifestement éteinte (par
exemple parce qu’il est évident qu’elle est éteinte par voix de prescription) le juge d’instruction peut
rendre une ordonnance de refus d’informer et donc le Procureur de la République peut donc le saisir
de réquisitions aux fins de refus d’informer.
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Une solution assez similaire devrait s’imposer lorsqu’il est manifeste que les faits dénoncés
n’ont pas été commis. Ce qui pose difficulté c’est qu’on a manifestement les faits dénoncés même
s’ils étaient dans l’absolu constitutif d’une infraction pénale sauf qu’ils n’ont jamais été commis. Dans
ce cas là, le juge d’instruction ne va pas rendre une ordonnance de refus d’informer mais une
ordonnance de non-lieu.
o Il reste un cas délicat où l’infraction a été commise. Le but de l’information judiciaire c’est de
réunir des éléments de preuve et donc si une infraction a à l’évidence était commise, le but de cette
information judiciaire. En effet il n’y a plus de raison de rechercher des éléments de preuve s’il est
évident que l’infraction a été commise. Dans ce cas on peut se demander si l’ouverture d’une
information judiciaire.
En matière criminelle il n’y a pas de difficulté, même s’il est évident que l’infraction a été
commise, un juge d’instruction doit être saisi. En effet en matière criminelle la gravité de l’infraction
suppose nécessairement qu’un juge d’instruction instruise l’affaire et effectue de nouveaux actes
d’investigations.
En revanche en matière délictuelle lorsqu’il est évident que l’infraction a été commise, le
Procureur de la République et après lui le juge d’instruction peuvent refuser d’informer et inviter
l’auteur de la plainte avec constitution de partie civile a saisir directement une juridiction de
jugement. Autrement dit lorsqu’il est évident que l’infraction a été commise, en matière délictuelle
le juge d’instruction va pouvoir rendre une ordonnance de refus d’informer et inviter l’auteur de la
plainte à saisir directement des juridictions de jugement. Pour se faire, il existe un mécanisme très
simple : la citation directe.
B- La citation directe
La citation directe consiste à citer directement une personne à comparaitre devant une
juridiction et plus particulièrement devant un Tribunal correctionnel ou un Tribunal de police. Cette
citation directe est prévue notamment par l’article 392 du Code de Procédure Pénale. Elle va avoir
pour particularisme d’obliger une personne à comparaitre devant une juridiction afin qu’elle soit
jugée devant celle-ci. Ce mécanisme est laissé à la personne qui serait victime d’une infraction et qui
voudrait se porter partie civile. Si ce mécanisme est identique à celui que l’on retrouve lorsqu’il est
utilisé par le Procureur de la République, cela signifie que dans la citation directe on va retrouver des
informations sur la date de l’audience, sur le fait qui est poursuivi… C’est donc un acte relativement
formaliste qu’est cette citation directe. Elle est subordonnée à un certain nombre de conditions
formelles. Elle va être remise au destinataire, c'est-à-dire à la personne que l’on souhaite voir cité à
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comparaitre devant une juridiction par un huissier de justice (voir citation directe déjà décrite dans le
cours).
Cependant lorsque la citation directe est mise en œuvre par un justiciable qui s’estimerait
lésé d’une infraction et qui souhaite saisir une juridiction de jugement, obéit à 2 particularités :
1er particularité : cette citation directe va obliger la personne qui l’utilise à consigner une somme
d’argent. C’est pareil que pour la plainte avec constitution de partie civile. Le montant va être fixé
par le Tribunal correctionnel ou le Tribunal de police au regard des revenus de la personne.
2nd particularité : la personne qui se constitue partie civile au moyen de cette citation directe va
devoir comparaitre en justice. En effet si elle ne comparait au jour de l’audience qui a été fixé, la
juridiction ne statuera pas SAUF si le Procureur de la République le requiert. Autrement dit la
personne qui utilise cette citation directe va devoir comparaitre à l’audience à laquelle elle cite
l’auteur d’une infraction à comparaitre. Si elle ne comparait pas, on considère qu’elle se désiste de sa
constitution de partie civile et en conséquence la juridiction ne statuera pas.
L’action civile sera recevable s’il apparait au regard des allégations, au regard des faits
énoncés par l’auteur de la plainte, qu’il a le droit de se constituer partie civile. L’action en justice ne
sera recevable que si au regard de ce qui est prétendu on peut considérer que la personne qui se
constitue partie civile a bien le droit de mettre en mouvement l’action publique.
§1 Les conditions requises s’agissant des personnes qui défendent un intérêt propre
Quelles sont les conditions requises pour qu’une personne se constitue partie
civile pour défendre ses propres intérêts ?
Cette question trouve une réponse à l’article 2 du Code de Procédure Pénale. Cet article 2
révèle une volonté à l’origine du législateur de limiter autant que possible l’accès des victimes au
juge pénal. Autrement dit toutes les victimes n’auront pas la possibilité de solliciter une
indemnisation devant le juge pénal. Certaines devront solliciter une indemnisation devant le juge
civil. L’article 2 a une tournure assez restrictive. Il nous dit que l’action civile en réparation du
dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont
personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. Ce texte réserve le droit
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d’agir devant le juge répressif à une catégorie restreinte. En effet la volonté à l’origine du législateur
était de limiter le nombre de personne qui pouvaient agir devant le juge répressif.
Il apparait que pour qu’une personne agisse dans le cadre du procès pénal, il faut qu’elle ait
personnellement subi un préjudice qui découle directement du dommage causé par l’infraction. En
effet ce qu’exprime cet article c’est l’existence d’un lien de causalité entre le dommage subi par la
personne et l’infraction. Ce lien de causalité tel qu’il est exprimé par l’article 2 est extrêmement
restrictif et certainement plus qu’en matière civile. Il faut en effet que la personne prétende avoir
subi un préjudice personnellement et qui découle directement du dommage.
Exemple : pour un vol > le but du législateur était sans doute que seul puisse agir en justice
devant le juge pénal et se constituer partie civile celui qui était propriétaire du bien volé.
De la même manière en ce qui concerne les violences volontaires sur une personne, le but
du législateur était sans doute que seule la personne qui avait subi ces violences puisse agir devant le
juge pénal.
Dire que l’infraction doit avoir directement causé le dommage renvoie à cette idée d’une
causalité resserrée. Dans sa jurisprudence la chambre criminelle rappelle en effet que cet article 2
implique une causalité étroite et donc que toute personne qui peut se prévaloir d’un dommage ne
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peut pas forcément en demander indemnisation devant le juge répressif si il n’est pas allégué que ce
dommage ait été causé directement par l’infraction.
1ère illustration : une affaire, et plus spécifiquement l’infraction d’apologie des atteintes volontaires à
la vie. C’était l’histoire d’un oncle qui avait à son petit neveu un T-shirt sur lequel il était indiqué « né
le 11 septembre, je suis une bombe ». Ce T-shirt n’a pas plu au personnel d’une école maternelle.
Donc l’oncle a été finalement condamné pour ce T-shirt. En réalité il apparaissait que ce n’était pas
forcément une blague. La commune dans laquelle était scolarisé cet enfant s’est portée partie civile
pour essayer d’obtenir des dommages et intérêts. La Cour de cassation a indiqué que le délit
d’apologie de crime dont l’oncle avait été déclaré coupable ne pouvait occasionner pour la commune
un préjudice direct né de l’infraction. La commune s’est donc vu déclarer sa constitution de partie
civile irrecevable car elle ne pouvait pas se prévaloir d’un quelconque préjudice direct. C’est un arrêt
du 17 mars 2015.
2nd illustration : les attentats commis à Nice sur la promenade des anglais. La commune de Nice
s’était constituée partie civile pour obtenir réparation de son préjudice matériel, à savoir la
destruction de certains biens publics et indemnisation d’un préjudice d’image puisque la commune
estimait que cet attentat terrorisme avait fait perdre une partie de son attractivité à la ville de Nice.
Là encore la Cour de cassation a décidé que la ville de Nice était irrecevable dans sa constitution de
partie civile car, selon la Haute juridiction, cette entreprise terroriste n’était susceptible d’avoir porté
directement atteinte qu’aux personnes physiques victimes des actes terrorismes ou aux intérêts de la
nation. Donc la commune de Nice n’était pas recevable. C’est un arrêt de la chambre criminelle du 12
mars 2019. Cela ne veut pas dire qu’elle ne peut pas obtenir une indemnisation mais que la Cour de
cassation estime que s’agissant de cette entreprise terrorisme la commune de Nice ne pouvait pas
obtenir indemnisation devant le juge répressif.
Dans son sens originel, l’article 2 du Code de Procédure Pénale, sans doute impliquait-il que
les personnes victimes par ricochet ne puissent pas obtenir indemnisation devant le juge répressif.
Ces victimes devraient donc obtenir indemnisation devant le juge civil et non devant le juge répressif.
C’est ainsi que la Cour de cassation avait entendu l’article 2 dans un premier temps. C’est ce qu’elle
nous avait dit dans un arrêt rendu en assemblée plénière le 12 janvier 1979. Mais depuis cet arrêt de
1979, les choses ont évolué dans le sens d’une plus grande souplesse. Cette dernière s’est traduite
par l’admission de l’action civile des victimes par ricochet devant le juge répressif. Dès un arrêt de la
chambre criminelle du 9 février 1989, il a été admis que les victimes par ricochet puissent solliciter
une indemnisation devant le juge répressif, et de ce fait, se constituer partie civile. Il y a donc eu une
sorte de revirement de jurisprudence. Depuis cet arrêt de 1989, la Cour de cassation a toujours fait
l’œuvre d’une certaine souplesse à l’égard des victimes par ricochet. Cette souplesse a été mise en
lumière dans un arrêt du 4 février 1998. Dans cet arrêt était en cause un enfant né de relation
incestueuse entre un père et sa fille mineure. La Cour de cassation a admis que cet enfant se
constitue partie civile devant le juge répressif. Elle a donc admis que cet enfant, qu’on peut
considérer comme une victime par ricochet obtienne indemnisation devant le juge répressif. La seule
victime du viol était sa mère. Aujourd’hui, l’exigence d’un dommage directe est en grande partie
appréciée souplement par la Cour de cassation. En fin de compte, la jurisprudence de la Cour de
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cassation tend dans une certaine mesure à se rapprocher de la jurisprudence des chambres civiles
s’agissant de l’appréciation du lien de causalité.
Seuls ceux qui ont personnellement souffert du dommage peuvent se constituer partie civile,
c’est en effet ce que nous dit l’article 2 du Code de Procédure Pénale. Donc si une personne n’a pas
souffert personnellement du dommage, en principe elle ne peut pas se constituer partie civile. La
chose est relativement simple mais elle a posé une difficulté vis-à-vis des héritiers d’une victime.
En effet ces héritiers ont soulevé une difficulté. Dans le procès pénal, l’héritier souvent a une
double casquette car il peut se prévaloir de 2 variétés de préjudice. D’une part l’héritier comme tous
les proches de la victime directe de l’infraction peut se prévaloir d’un préjudice propre et personnel,
d’un préjudice par ricochet : parce qu’il a vu la personne souffrir, qu’il l’a assisté… Cette 1ère
casquette de l’héritier ne pose pas de difficulté, il suffit de demander si les victimes par ricochet
peuvent prétendre à obtenir une indemnisation.
Ils ont une autre casquette : si la victime directe est décédée, il a recueilli par le jeu de la
succession le droit à réparation de la personne qui est décédée. Il va ainsi donc solliciter une
indemnisation pour le compte de la personne décédée. C’est cet éventuel droit à réparation qui
serait exercé par l’héritier pour le compte de la personne décédée qui peut poser difficulté. En effet,
l’héritier lorsqu’il recueille ce droit par le biais de la succession, on peut se demande s’il exerce
véritablement une action personnelle. Cet héritier n’a pas personnellement subi le dommage et s’il
se constitue partie civile et demande indemnisation du préjudice subi par la victime directe ce n’est
pas pour lui mais pour la victime. La question de savoir s’il peut sollicité cette indemnisation devant
le juge répressif a soulevé des difficultés. La jurisprudence a mis du temps à se fixer. Au sens strict de
l’article 2 on peut se dire que l’héritier n’a pas personnellement subi le dommage et est donc
irrecevable en sa constitution de partie civile. La Cour de cassation a donc posé une solution en
demie teinte vis-à-vis de ces héritiers dans plusieurs arrêts du 9 mai 2008. Ces arrêts ont été tous
rendus en Assemblée Plénière. La Cour de cassation a opéré une distinction selon que l’action
publique a déjà été mise en mouvement ou pas encore. Lorsque l’action publique a déjà été mise en
mouvement, la Cour de cassation admet que l’héritier se constitue partie civile pour obtenir
indemnisation pour le préjudice qu’avait personnellement subi la personne décédée. En revanche, si
l’action publique n’a pas encore été mise en mouvement, la Cour de cassation estime que les
héritiers ne peuvent pas se constituer partie civile pour obtenir une indemnisation pour la personne
décédée. Cela implique que, l’héritier lorsqu’il recueille le droit à réparation d’une personne qui a
directement subi un dommage, ne pourra se constituer partie civile que dans 2 cas :
Lorsque la personne décédée avait avant son décès mis en mouvement l’action
publique.
101
Ces intérêts collectifs peuvent dans une certaine mesure être défendus par les syndicats et
les associations. L’intérêt collectif est difficile à définir.
Définition : C’est un intérêt qui est à mi chemin entre l’intérêt personnel et l’intérêt général. C’est
donc un intérêt qui va dépasser les intérêts individuels et qui va concerner une catégorie de
personne. Il n’y a pas beaucoup de définition plus précise que celle là. C’est l’intérêt d’une catégorie
abstraite de personne. Par exemple les intérêts des membres d’une profession, une collectivité…
Cet intérêt collectif dans certains cas tend à se rapprocher, même à se confondre avec
l’intérêt général. Il est aujourd’hui admis qu’un certain nombre d’intérêts collectifs résident dans 2
grandes causes : les syndicats et les associations. Lorsqu’une atteinte est portée à ces intérêts
collectifs, cela concerne à peu près tout le monde et chacun. Dans ce cas il s’assimile presque à
l’intérêt général.
Il y a 2 variétés de groupements qui peuvent agir en défense d’un intérêt collectif. A côté de
ces 2 variétés il y en a d’autres, par exemple les ordres professionnels.
Il ne s’agit pas ici de défendre l’intérêt propre du syndicat. Bien évidemment si le syndicat est
personnellement victime d’un dommage il pourra se constituer partie civile. Dès 1913 la Cour de
cassation avait admis qu’un syndicat puisse agir pour la défense des intérêts collectifs de la
profession qu’il représente. Cette solution énoncée en 1913 par la Cour de cassation est aujourd’hui
reprise par la loi et plus précisément par l’article L.2132-3 du Code du travail. Cet article habilite les
syndicats à agir en justice pour défendre l’intérêt collectif de la profession qu’il représente. Toute la
difficulté est de savoir quand est porté atteinte à l’intérêt collectif d’une
profession ?
Comme la notion d’intérêt collectif est assez abstraite, déterminer quand il y a atteinte à cet
intérêt collectif et savoir quand un syndicat peut agir en justice c’est compliqué. Sur ce point la
jurisprudence est difficile à systématiser. La Cour de cassation a par exemple pu retenir que le
harcèlement d’un employé sur son lieu de travail par un supérieur hiérarchique ne porte pas atteinte
à l’intérêt collectif de la profession (arrêt de 2002). En revanche le fait qu’une personne soit licenciée
en raison de son appartenance à un syndicat cela porte atteinte à l’intérêt collectif de la profession =
apport de l’arrêt du 29 octobre 1996.
102
Pour les associations, ce n’est pas pareil que pour les syndicats. Les associations représentent
et défendent des causes beaucoup plus floues que les syndicats. Les syndicats, leur structure et les
intérêts qu’ils défendent sont assez encadrés par la loi. En revanche les associations peuvent
défendre à peu près tout et son contraire. Elles peuvent donc défendre des intérêts collectifs
extrêmement diversifiés. On peut donc se demander si ces associations peuvent se constituer partie
civile alors que les intérêts qu’elles défendent sont très variés. Le principe à l’égard des associations
est inverse de celui des syndicats. Le principe est qu’elles ne peuvent pas agir en justice pour
défendre les intérêts collectifs qu’elles représentent. Donc le principe c’est la prohibition.
Ce principe comporte énormément de dérogations. De très nombreuses fois il est admis que
par exception des associations puissent agir en justice afin de défendre des intérêts collectifs. Il faut
se référer aux articles 2-1 jusqu’à 2-23 du Code de Procédure Pénale. Ils énoncent un certain nombre
de cas où des associations peuvent agir en justice afin de défendre tel ou tel intérêt. Les listes
données par ces articles sont très diversifiées (intérêt collectif des maires de France, de la langue
française…). Généralement le législateur dans ces articles, subordonnent la possibilité à une
association de défendre un intérêt collectif à un certain nombre de conditions qui sont posées par les
textes (toujours les articles 2-1 à 2-23). Ces conditions peuvent être par exemple qu’une association
ait bénéficié d’un agrément, qu’une association soit constituée depuis un certain nombre d’année…
Le but est de limiter les associations qui sont admises à défendre un intérêt collectif.
Dans la plupart des cas les associations vont ainsi pouvoir défendre un intérêt collectif alors
même que la victime directe de l’infraction ne donnerait pas son consentement. En effet il y a très
peu de cas où le consentement de la victime directe est posé en condition de recevabilité de
l’intervention d’une association pour défendre un intérêt collectif. C’est ce qu’a rappelé la chambre
criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 22 avril 2020. Ce qu’a dit la chambre dans cet
arrêt c’est que les conditions de recevabilité de l’action de l’association sont subordonnées aux
seules conditions posées par les articles 2-1 à 2-23 du Code de Procédure Pénale. En conséquence, le
juge ne peut pas ajouter aux conditions qui sont posées par ces textes. Donc si les textes ne
prévoient pas que la victime directe doit consentir à ce que l’association intervienne, le juge ne peut
pas subordonner l’intervention de l’association au consentement de la victime directe.
103
La mise en état des affaires pénales poursuit une finalité très simple, c’est celle de mettre
l’affaire en état d’être jugée. Le but c’est donc que les juridictions de jugement puissent apprécier la
culpabilité de l’individu, de disposer des éléments nécessaires pour se forger leur conviction. Cette
phase de mise en état des affaires pénales se subdivisent en 2 grandes variétés. D’un côté : l’enquête
pénale et d’un autre côté l’instruction.
Le principe du secret gouverne autant l’enquête que l’instruction. Ce principe est énoncé par
l’article 11 alinéa 1er du Code de Procédure Pénale. Cet article nous dit que la procédure au cours de
l’enquête et de l’instruction est secrète. Ce principe laisse entendre qu’il s’applique à tout le monde.
En réalité, ce secret de l’enquête et de l’instruction ne concerne pas tout le monde. Tout le monde
n’est pas soumis à ce principe du secret. Toujours selon l’article 11, ce principe ne s’impose qu’aux
personnes qui concourent à la procédure. Donc toute la question qui se pose est de savoir :
Qui sont les personnes qui concourent à la procédure, donc qui sont
soumises au principe du secret ?
Il y a des cas qui ne posent aucune difficulté. Les magistrats du siège, le juge d’instruction
sont bien évidemment astreints au secret puisqu’ils concourent à l’instruction. De la même manière
les différentes forces de police (gendarmes, enquêteurs, experts) concourent eux aussi à
l’instruction, ils sont donc soumis eux aussi au secret de l’enquête et de l’instruction.
Les avocats de leur côté ne sont pas considérés comme concourants à la procédure. Donc ils
ne sont en principe pas tenus à ce secret. Pour autant pour les avocats, par un autre biais on parvient
exactement au même résultat. En effet il existe dans l’obligation de logique des avocats un principe
du secret. Donc lorsqu’ils exercent leur profession, leur déontologie leur impose un secret. Donc
même si les avocats ne sont pas compris dans le champ d’application de l’article 11 du Code de
Procédure Pénale, ils seront quand même soumis au secret.
Exemple : une enquête implique une perquisition ou une garde à vue. Après qu’elle ait été
pratiquée un membre des services de police diffuse un certain nombre d’informations relatives
à cette perquisition ou cette garde à vue, cette violation ne pourrait avoir aucune conséquence
sur l’acte de procédure. Celui-ci demeurerait valable.
Les journalistes très souvent, ce sont eux qui en effet divulguent les informations relatives à
une enquête ou à l’instruction. Assurément les journalistes ne sont pas soumis et ne rentrent pas
dans le champ d’application de l’article 11 du Code de Procédure Pénale. On ne peut pas considérer
qu’ils concourent à l’enquête ou à l’instruction. Cependant ils ne peuvent pas tout faire, il existe en
effet un certain nombre d’incriminations qui peuvent leur être appliquées s’ils diffusent des éléments
concernant une enquête ou une instruction. Par exemple il existe l’incrimination du recel de la
violation du secret de l’instruction. Cette incrimination va trouver à s’appliquer lorsque les
journalistes diffusent des informations qu’ils ont obtenu d’une personne dont ils savent qu’elle était
tenue au secret de la procédure et qu’elle a méconnu ce secret de la procédure. Donc même si le
105
journaliste n’est pas lui même astreint au secret de l’instruction diffuse des éléments qu’il a obtenu
d’une personne dont il sait très bien qu’elle était tenu au secret de l’instruction, il s’expose à une
incrimination de recel de la violation du secret de l’instruction.
La liberté d’expression est une valeur qui est protégée par la convention de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales. La CEDH estime que par principe cette protection
du secret de l’enquête et de l’instruction même vis-à-vis des journalistes n’est pas contraire à la
liberté d’expression. Plus exactement la CEDH estime que si la liberté d’expression est consacrée,
celle-ci peut faire l’objet d’atteinte dans une certaine mesure. Donc la CEDH estime que dans le fait
d’interdire la diffusion d’informations relatives à une enquête ou à l’instruction ne porte pas en elle
même atteinte à la liberté d’expression. La CEDH opère une balance des intérêts en recherchant et
en mettant en perspective les intérêts de la liberté d’expression d’un côté et les intérêts protégés par
le secret de l’enquête et de l’instruction de l’autre. Solution = pas de méconnaissance de la
convention de sauvegarde dans le fait de limiter la liberté d’expression par le principe du secret.
106
Chapitre I
L’enquête pénale
Le but de l’enquête pénale est de réunir des éléments de preuve afin de déterminer si une
personne a ou non commis une infraction. Il y a plusieurs modalités d’enquête pénale car les
circonstances des découvertes d’une infraction ne sont pas toujours les mêmes, de ce fait il faut
adapter la procédure. Il y a des cas dans lesquels il y a aura une certaine urgence justifiant ainsi
d’accorder des pouvoirs assez importants aux officiers de polices judiciaires. En l’absence d’urgence
ces pouvoirs peuvent être moindres.
Parfois certaines enquêtes vont être diligentées longtemps après qu’une infraction a été
commise = enquête préliminaire. Nécessité de réunir des éléments de preuve alors qu’en apparence
il n’y a pas d’urgence, pas de nécessité d’aller vite. L’étendue des pouvoirs accordés aux officiers de
police judicaire va donc varier selon l’enquête pénale en cours.
§1 L’enquête de flagrance
Expression « en flagrant délit ». L’enquête de flagrance c’est celle qui concerne les
infractions en train d’être commise ou tout juste commise. L’étendue des pouvoirs accordés aux
officiers de police judiciaire est alors élevée.
Les conditions d’ouverture sont énumérées par l’article 53 du Code de Procédure Pénale. Cet
article nous dit « qu’est qualifié de crime ou de délit flagrant celui qui se commet actuellement ou qui
vient de se commettre, est également flagrance lorsque dans un temps très voisin de l’action la
personne soupçonnée et poursuivit par la clameur publique ou est trouvé en possession d’objet où
présentent des traces ou indices laissant penser qu’elle a participé au crime ».
Deux conditions doivent être réunies : 1ère condition = il faut que soit commis un crime ou un
délit puni d’emprisonnement, l’infraction doit donc être suffisamment grave. Cette condition est
précisée par l’article 67 du Code de Procédure Pénale ainsi que 53 de ce code. En cas de crime ou de
délit les pouvoirs accordés seront les mêmes. Les infractions échappent à cette enquête de flagrance
(contraventions et délits qui ne sont pas punis d’une peine d’emprisonnement). 2ème condition : il faut
qu’il existe un cas de flagrance. Il faut donc un laps de temps assez court entre la commission de
107
La difficulté qui existe = au moment où on décide d’ouvrir l’enquête on ne sait pas encore de
manière certaine si un délit ou un crime punit d’emprisonnement a été commis. Il n’y a que des
indices avant le jugement. On va exiger des enquêteurs et contrôler qu’il existant au moment de
l’ouverture de l’enquête de flagrance des indices révélant la commission d’un crime ou d’un délit
puni d’emprisonnement. On exige des enquêteurs qu’ils se fondent sur des indices « apparents »
selon les termes de la Cour de cassation. Il est important que les enquêteurs ou le Procureur de la
République, constatent l’existence d’indices qui rendent probable la commission d’un crime ou d’un
délit punissable d’une peine d’emprisonnement. Les indices apparents peuvent être tirés du
comportement de l’individu.
Exemple : le fait qu’en matière de stup des officiers aient pu observer des allers-retours vers un
lieu avec des gens qui ressortaient avec des barrettes constituent un indice suffisant = chambre
criminelle arrêt du 5 septembre 2018.
Autre indice apparent = déclarations d’une victime si elle prétend avoir été la victime d’un
assassinat = indice apparent qui laisse penser qu’un crime puni d’emprisonnement a été
commis, du moins tenté = chambre criminelle arrêt du 11
L’odeur qui peut se dégager lors d’un contrôler routier = indice apparent pour les stup, ou
encore si un chien fait un marquage devant une maison ou un individu. Chambre criminelle de
la Cour de cassation en 2019.
Chambre criminelle de la Cour de cassation arrêt du 11 mars 1992 = même si une enquête de
flagrance est ouverte et que finalement il ne peut être prouvé que la commission d’une
contravention, si les indices apparents laissaient penser qu’avait été commis un crime ou un délit
d’emprisonnement, l’enquête de flagrance n’en demeure pas moins justifiée. Ce qui importe ce son
les indices, d’avantage que la réalité de la commission.
1ère conséquence : l’officier de police judiciaire qui va être mis au courant de la commission d’un
crime ou d’un délit flagrant va devoir en avertir le Procureur de la République = article 54 du Code
de Procédure Pénale. Il va devoir sans délais se transporter sur les lieux de l’infraction, la loi lui en
fait l’injonction = article 54 et 67 du Code de Procédure Pénale. Il va pouvoir prendre des mesures
conservatoires = effet de conserver les différents éléments de preuve (photo, relevé d’identité,
consignation de déclarations spontanées….).
108
2ème conséquence : les officiers de police ne puissent pas mettre en œuvre leurs pouvoirs
importants pendant une période trop longue. Le principe = l’enquête de flagrance ne peut se
poursuivre que pendant une durée de 8 jours, il faut que des actes d’enquête soient réalisés sans
discontinué = il faut que les enquêteurs procèdes à des investigations sans interruption. Il faut une
certaine continuité. Au bout de 8 jours cette enquête est normalement fermée.
Si des investigations sont encore nécessaires, il y a 2 possibilités : soit peut être ouverte une
enquête préliminaire, soit peut être ouverte à l’initiative du Procureur de la République une
information judiciaire qui a pour effet la saisine d’un juge d’instruction.
Pour les crimes graves ce délai peut paraitre insuffisant. C’est pourquoi une dérogation est
prévue par l’article 53 du Code de Procédure Pénale. Cet article dit que le Procureur de la République
peut décider de prolonger l’enquête de flagrance pour 8 jours supplémentaires si plusieurs
conditions sont réunies :
1ère condition : que l’infraction soit punie d’au moins 5 ans d’emprisonnement.
2nd : que les différentes investigations ne puissent pas être différées, de manière urgente.
A l’issue de ces 16 jours il n’est plus possible que l’enquête de flagrance se poursuive. Si elle
se referme ainsi, aucun acte d’investigation ne peut plus être pratiqué dans le cadre de cette
enquête. Il faudra ouvrir une enquête préliminaire ou saisir un juge d’instruction pour toute autre
investigation.
§2 L’enquête préliminaire
Cette enquête est ouverte toutes les fois où une enquête de flagrance ne peut pas ou ne
peut plus l’être. L’enquête préliminaire c’est l’enquête « normale ». Ces enquêtes vont être menées
par les officiers de police judicaire et vont être ouvertes soit sur décision de l’officier de police soit
sur décision du Procureur de la République. Ce qui va caractériser ces enquêtes, c’est qu’elles
laissent moins de pouvoir aux officiers de police. L’enquête préliminaire suppose 2 séries de
conséquences.
1ère conséquence : le principe du consentement des personnes qui subissent les mesures. Cela
implique qu’au cours de l’enquête préliminaire les différents actes d’investigation ne peuvent pas
donner lieu à actes contraignants. Autrement dit, aucun pouvoir de contrainte n’est possible et seul
peut donc être pratiqué un acte d’investigation lorsque celui qui va la subir y consent. En réalité ce
principe concerne aujourd’hui un unique acte d’investigation = la perquisition. Pour les autres actes
d’investigation ce principe de consentement est écarté.
2ème conséquence : certains actes d’investigation ne pourront plus être accomplis à l’initiative des
officiers judiciaires, mais seront subordonnés à une autorisation du Procureur de la République. C’est
le cas des réquisitions = injonctions faites aux administrations.
109
1er cas celui où serait découvert un cadavre dès lors que la mort de l’individu est inconnue ou
suspecte. Hypothèse traditionnelle de l’enquête pour mort suspecte à laquelle une loi de 2004 a
assimilé l’hypothèse où serait découverte une personne grièvement blessée. Au bout de 8 jours à
compter de l’ouverture de cette enquête, elle va se refermer. Il n’est pas possible de la prolonger.
2ème cas : celui de la disparition d’un majeur qui présenterait un caractère inquiétant ou suspect, ou
celui de la disparation d’un mineur ou d’un majeur protégé. De la même manière, cela ne constitue
pas un indice qu’une infraction aurait été commise. On ne peut donc pas sans indice qu’un crime ou
un délit aurait été commis, ouvrir une enquête de flagrance. Cette enquête va permettre aux officiers
d’accomplir de nombreux actes d’investigations pendant une durée de 8 jours. Aucune prolongation
n’est possible. Enquête spécifique ici prévue par l’article 74-1 du Code de Procédure Pénale.
3ème cas : celui de la fuite d’une personne. Lorsque cette personne a été condamnée à une peine
privation de liberté sans sursit égale ou inférieure à 1 an ou fait face à un mandat d’arrêt, va pouvoir
être ouvert cette enquête spécifique = article 74-2 du Code de Procédure Pénale.
Identifier une personne = établir son identité. Le but de cette identification est de déterminer
l’identité d’une personne. Pour déterminer cette identité, il y a toute une variété de procédures. Il y
a les procédures de contrôle d’identité et celles de vérification d’identité. Différence d’intensité
entre ces 2 variétés de contrôle.
Ces contrôles d’identité visent à identifier une personne. Caractéristique du droit français : il
existe plusieurs variétés de contrôle d’identité. Généralement on classifie ces différents contrôles
d’identité en opposant les contrôles qui visent à prévenir la commission d’infraction = contrôle de
police administrative et les contrôles qui visent à rechercher les auteurs d’une infraction = contrôle
110
d’identité judicaire. Cette distinction n’a pas une très grande portée en droit français car dans tous
les cas ce sont les juridictions judiciaires qui demeureront compétentes pour apprécier la régularité
de ce contrôle. Elle a néanmoins une portée pédagogique car elle révèle bien que des contrôles sont
préventifs alors que les autres sont curatifs.
Leur finalité est de prévenir la commission d’une infraction. Ces contrôles même s’ils ont une
nature administrative, ils sont susceptibles de porter atteinte à certaines libertés fondamentales et
notamment à la liberté d’aller et venir ou au respect du à la vie privée des individus. Pour cette
raison, ils sont codifiés dans le Code de Procédure Pénale. De la même manière le contrôle de leur
régularité appartiendra au juge.
1er type de contrôle de police administrative = celui pratiqué en cas de soupçon d’atteinte à l’ordre
public. Ce contrôle est prévu par l’article 78-2 alinéa 7. Il va permettre de contrôler l’identité d’un
individu lorsqu’il existe un soupçon d’atteinte à l’ordre public. Les conditions de mise en œuvre de ce
contrôle sont extrêmement floues. Pour limiter les excès auxquels pourraient donner lieu de tels
contrôles, il y a une exigence : le contrôle doit être motivé par celui qui le pratique. Pour que ce
contrôle soit licite, il faut que cette possible atteinte à l’ordre public soit motivée par celui qui
contrôle. Dans un 1er temps la Cour de cassation avait exigé que ce contrôle soit déduit du
comportement d’une personne, il fallait que par son comportement elle ait laissé penser qu’il
existait un possible trouble à l’ordre public. Dans un arrêt du 10 novembre 1992 la chambre
criminelle conteste la position de la Cour de cassation en disant que c’est trop restrictif. Le législateur
s’est détaché de la jurisprudence de 1992 et a permis de pratiquer des contrôles d’identité à titre
préventif et pour prévenir une atteinte à l’ordre public même lorsque le trouble est déduit d’autres
éléments que ceux tirés du comportement du suspect. Il a donc permis ce contrôle sur la base
d’indices qui ne découleraient pas du comportement de l’individu contrôlé dès une loi de 1993.
Aujourd’hui on retrouve cela article 78-2 alinéa 8 du Code de Procédure Pénale.
2nd type de contrôle de police administrative = le contrôle dit « Schengen », article 78-2 aliéna 9 du
Code de Procédure Pénale. Il est destiné et effectué afin de vérifier les obligations de port et de…
prévue par la loi. C'est-à-dire les documents qui autorisent le séjour en France ou encore ceux qui
imposent d’avoir un permis de conduire. Ces contrôles Schengen se sont substitués aux contrôles aux
frontières. Ces contrôles sont pratiqués près des frontières, plus spécifiquement à une zone située en
deçà de 20 km des frontières avec les états parties à la convention de Schengen. Ces contrôles
peuvent être pratiqués dans certains ports, aéroports ou gares ferroviaires ouverts au trafic
international. De la même manière dans un rayon de 10 km autour des ports et aéroports, ce
contrôle peut être pratiqué.
Longtemps le législateur français est resté assez flou sur les modalités ouvertes pour pratiquer
ces contrôles, à tel point que la CJUE avait condamné le système français dans un arrêt du 22 juin
2010. Dans cet arrêt, le flou du système français été dénoncé. Le législateur est donc intervenu avec
111
une loi du 14 mars 2011 elle précise les cas où on peut pratiquer ce contrôle. Le législateur
indique 3 conditions pour pratiquer ce contrôle :
1ère condition : ce contrôle ne peut être effectué qu’en vue de la prévention et de la recherche
d’infraction liée à la criminalité transfrontalière. Seul objet = prévention et recherche d’infraction.
2nd condition : un contrôle ne peut pas être effectué en un lieu plus de 12 heures consécutives.
3ème condition : ces contrôles ne peuvent pas être systématiquement pratiqués sur les personnes
présentent ou circulant dans ces lieux.
2. En réalité la Cour de cassation n’a pas compris ce texte et a considéré que cette condition
implique simplement que le contrôle ne soit pas pratiqué pour 12 heures consécutives et que
ce contrôle soit nécessairement lié à la recherche d’infraction particulière. Donc en fait la
Cour de cassation a désactivé cette 3ème condition : 1ère chambre civile Cour de cassation
arrêt du 25 mai 2007. Donc au final il y a juste 2 conditions.
Tous les contrôles d’identité pratiquement sont régis par les articles 78 et 78-2 du Code de
Procédure Pénale. En fait chaque alinéa porte sur un point spécifique.
Ces contrôles poursuivent une finalité répressive. Ils sont destinés à découvrir et établir
l’existence d’une infraction. Ces contrôles, il y en a 2 variétés. Certains sont pratiqués à l’initiative
des services de police judiciaire et d’autres à l’initiative du Procureur de la République.
Initiative des services de police, plus spécifiquement à l’initiative des OPJ : prévu par l’article 78-2
alinéa 1er du Code de Procédure Pénale. Ce texte indique que l’identité d’une personne peut être
contrôlée à l’initiative d’un OPJ toutes les fois qu’il existe une ou plusieurs raisons plausibles de
soupçonner : (4 cas)
-ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit ;
[ -ou qu'elle a violé les obligations ou interdictions auxquelles elle est soumise dans le cadre d'un contrôle
judiciaire, d'une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique, d'une peine ou d'une mesure
suivie par le juge de l'application des peines ;] = 5ème cas, ajout loi de 2016
-ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.
112
Il faut ajouter un 5ème cas rajouté par une loi de 2016 = quand une personne a violé les
obligations ou interdictions auxquelles elle était soumise dans le cadre d’un contrôle judiciaire, dans
le cadre d’une assignation à résidence avec surveillance électronique ou d’une peine ou mesure
suivie par le juge d’application des peines.
Cette ou ces raisons plausibles ne sont rien d’autre que des indices, il faut que l’OPJ motive
son contrôle en se fondant sur des indices. Par exemple le fait qu’un individu déambule dans les
couloirs du métro avec un État de détresse manifeste notamment susceptible de provenir de la
consommation de stupéfiants peut caractériser une raison plausible de soupçonner que la personne
a commis un crime ou délit et donc de motiver un contrôle d’identité = chambre criminelle arrêt du
7 avril.
1ère condition : le Procureur de la République va devoir indiquer dans ses réquisitions ce que
pourront faire les OPJ, donc indiquer si les OPJ peuvent outre le contrôle d’identité procéder à la
fouille de véhicule et/ou de bagages. Expressément indiqué.
2ème condition : ce contrôle ne peut être effectué uniquement à fin de poursuivre certaines
infractions spécifiques qui ont été listées par la loi. La liste de ces infractions = article 78-2-2 du
Code de Procédure Pénale.
113
3. A l’origine les infractions visées étaient celles liées au terrorisme au sens large (trafic
d’armes….) mais petit à petit ce système c’est étendu. Aujourd’hui on peut trouver des
infractions ayant peu de liens avec le terrorisme (trafic de stup ou vol).
3ème condition : ces contrôles ne peuvent pas excéder 24H renouvelable : article 78-2-2 du Code de
Procédure Pénale. Arrêt chambre criminelle 13 septembre 2017 : si le Procureur de la République
peut renouveler ses réquisitions, il lui est interdit dans un unique jeu de réquisitions de prévoir
plusieurs contrôles d’identité renforcés pour des périodes supérieures à 24H. Donc 1 jeu de
réquisition = 24H maximum. Si le Procureur de la République souhaite que des contrôles soient faits
en plus il doit prendre d’autres réquisitions.
B- La vérification d’identité
Il est fréquent que lorsque la personne dont l’identité est contrôlée ne peut pas être
identifiée car elle ne dispose pas de sa carte d’identité ou ne veut pas procéder à son établissement,
il faut procéder à une procédure de vérification d’identité. Autrement dit, lorsque la procédure de
contrôle d’identité ne permet pas de vérifier l’identité d’une personne il faut mettre en place la
vérification d’identité. Cette procédure est mise en place et régie par l’article 78-3 du Code de
Procédure Pénale.
Originalité de cette procédure : les services de police vont devoir accomplir un certain
nombre d’investigation pour pouvoir établir l’identité de la personne contrôlée. Lors d’un contrôle
d’identité il n’y pas véritablement d’acte d’investigation.
C’est donc beaucoup contraignant pour la personne qui fait l’objet de ce contrôle. Elle va
pouvoir durer jusqu’à 4H (maximum) où la personne va être retenue soit sur le lieu du contrôle
d’identité soit dans un local de police. Cette durée de 4H va permettre aux OPJ de procéder à un
certain nombre d’actes d’investigations. L’officier va commencer par informer la personne des droits
dont elle va disposer au cours de ces 4H. Elle a le droit de faire aviser le Procureur de la République
ou de faire aviser une personne de sa famille ou une autre personne de son choix. Une fois les droits
de la personne notifiés, l’OPJ va procéder à un certain nombre d’investigations.
Il y a 2 grandes variétés :
1. Celle où la personne dont l’identité est ainsi vérifiée, collabore avec l’OPJ. Le plus souvent si
la personne n’est pas parvenue à démontrer son identité ce n’est pas parce qu’elle ne voulait
114
pas mais parce qu’elle ne le pouvait pas. grâce à cette collaboration, la personne va aisément
parvenir à démontrer son identité.
2. Celle où la personne refuse de collaborer. Donc vérification de son identité malgré elle. Dans
un tel cas de figure, l’OPJ va pouvoir recourir selon l’article 78-3 du Code de Procédure
Pénale, à des procédés d’indentification judiciaire. Il va donc pouvoir recourir par exemple à
des photographies. Ce recours à des procédés d’identification n’est ouvert à l’OPJ que si cela
constitue l’unique moyen d’établir l’identité de l’individu, c’est un peu le dernier moyen.
Au bout de 4H et quand son identité est démontrée, la personne est en principe libérée. SAUF s’il
apparait grâce à ce contrôle d’identité qu’elle aurait commis une infraction. Dans ce cas, elle pourra
être placée en garde à vue à condition que les conditions du placement en garde à vue soient réunies.
Recueillir des indices c’est recueillir un certain nombre d’éléments sur les faits. Cette notion
d’indice est assez large. Ces indices proviennent d’un certain nombre d’actes d’investigation. Le
moyen le plus connu pour le recueille des indices c’est la perquisition. Ensuite, on peut aussi
procéder à des fouilles ou à des réquisitions. Il existe bien sur d’autres moyens comme les
prélèvements corporels qui vont permettre d’identifier le patrimoine génétique d’un individu.
A- Les perquisitions
Une fois pratiquées et si elles sont fructueuses, elles vont donner lieu à des saisies. Les
différents éléments découverts grâce à la perquisition vont pouvoir être saisis. Il faut ensuite préciser
ce qu’il convient d’en faire.
1. Définition
Aucune définition de cette notion de perquisition n’est donnée par le Code de Procédure
Pénale, pourtant elle est importante car cela va permettre d’identifier les lieux dans lesquels peuvent
être pratiqués une perquisition. L’identification de ces lieux est importante puisque la perquisition
donne lieu à un certain nombre de règles protectrices des individus.
Cette notion de perquisition est donnée par la jurisprudence de la Cour de cassation. Elle
définit la perquisition dans un arrêt du 29 mars 1994, la Cour de cassation nous a dit que « toute
perquisition implique la recherche à l’intérieur d’un lieu normalement clos d’indices permettant
d’établir l’existence d’une infraction et d’en déterminer l’auteur ». Selon cette définition, plusieurs
conditions doivent être réunies :
1ère condition : il faut qu’ait lieu une recherche sur un lieu. Cette recherche doit être effectuée en
vue de découvrir un certain nombre d’indices qui vont révéler un certains nombre de faits relatifs à
une enquête.
115
Si les OPJ prennent des photos de la rue d’une habitation, cela ne constitue pas une
perquisition. en effet, ils n’opèrent aucunes fouilles ni recherches = chambre criminelle arrêt
du 29 mars 1994.
2ème condition : la recherche et la fouille doivent se dérouler dans un lieu normalement clos, plus
exactement dans un lieu normalement clos à usage privé.
Il faut que le lieu normalement clos soit destiné ou affecté à un usage d’habitation ou soit
qu’il soit destiné et affecté à un usage professionnel. La Cour de cassation a fait une appréciation
assez extensive de cette 2nd condition, elle a considéré qu’une chambre d’hôtel c’est un lieu
normalement clos affecté à un usage d’habitation = chambre criminelle arrêt du 24 janvier 1987. De
la même manière elle a considéré qu’une recherche et des fouilles dans un bureau peuvent
constituer une perquisition. Cette condition est favorable aux libertés individuelles car si on
considère qu’une perquisition est pratiquée, un certain nombre de règles propres à la perquisition
vont être mises en place et qui vont permettre de protéger les libertés individuelles.
Les perquisitions ne sont pas forcément défavorables aux individus, en effet les règles liées à
la perquisition vont s’appliquer = protection des personnes dont les lieux clos sont ainsi fouillés.
1. Juste avant le début d’une perquisition lorsqu’un gendarme s’apprête à pénétrer dans un lieu, il
doit se poser des questions. En effet une perquisition ne peut pas être pratiquée en principe à toute
heure du jour et de la nuit, n’y dans n’importe quel lieu clos.
Pour que la perquisition soit faite dans un lieu clos, il faut que les enquêteurs suspectent la
présence de documents ou d’objets intéressant l’enquête = article 56 et 116 du Code de Procédure
Pénale.
Une perquisition ne peut pas être faite n’importe quand à toute heure du jour ou de la nuit :
articles 59 et 76 du Code de Procédure Pénale. Elle doit débuter entre 6H et 21H. Il faut protéger
l’intimité des lieux clos qui servent fréquemment de domicile aux individus. Cette interdiction
d’horaires est stricte mais elle peut faire l’objet d’un certain nombre d’aménagements. Un certain
nombre de cas de perquisitions nocturnes sont autorisées en cas de « réclamations faites de
l’intérieur » article 59 Code de Procédure Pénale. Une réclamation faite de l’intérieur = hypothèse
où une personne appellerait les services de police afin qu’ils se rendent à son domicile. Une
perquisition nocturne peut être pratiquée sur autorisation du juge des libertés et de la détention.
Cette autorisation ne peut être donnée que dans des conditions très strictes :
Que s’agissant des locaux non affectés à l’habitation sauf si il y a un risque d’atteinte à la vie
privée ou à l’intégrité physique ;
116
2. Une fois tout cela respecté, le gendarme va pouvoir pénétrer dans le domicile où dans le lieu clos à
usage d’habitation. Néanmoins avant de toquer, il va devoir se rappeler 2 règles :
Article 76 Code de Procédure Pénale : le Procureur de la République peut dans le cadre d’une
enquête préliminaire autoriser une perquisition chez une personne lorsque l’enquête est
relative à un crime ou à un délit puni d’une peine d’emprisonnement au moins égale à 3
ans, autorisé malgré l’absence de consentement.
2) Le gendarme doit être assisté d’un tiers pour assister aux opérations de perquisition. A
fin de garantie des opérations de perquisition, la loi a prévu que la perquisition ne puisse pas
se dérouler avec le seul enquêteur : donc soit en la présence de l’occupant du domicile, soit
en la présence d’un représentant de cet occupant désigné par lui, soit encore par 2 témoins
désignés par l’OPJ. Il faut que ces 2 témoins soient extérieurs aux services de police judicaire.
Lorsque ces conditions sont remplies, l’enquêteur va pouvoir pénétrer dans le domicile ou
dans le lieu clos à usage privé. Une fois qu’il aura pénétré, il va pouvoir sonder les portes, les
cloisons... En bref à une fouille complète du domicile.
3. Une fois la fouille terminée, l’OPJ va rédiger un procès verbal dans lequel il va relater les
différentes opérations qu’il a mené. Il va aussi lister les différents éléments qu’il aura pu saisir grâce à
cette perquisition.
B- Les fouilles
Ce qui caractérise les opérations de fouilles, c’est qu’elles sont relativement peu régies par le
Code de Procédure Pénale. De ce fait la Cour de cassation a tendance à appliquer par voix d’analogie
le régime de la perquisition à ces fouilles.
sécurité. Certaines fouilles consistent à fouiller les poches ou les éventuels vêtements d’un individu.
Enfin il y a des fouilles intégrales = consistent à demander à une personne de se dénuder. Enfin il y a
des fouilles corporelles internes = fouiller l’intérieur de l’organisme, elles peuvent être menées dans
le cadre des enquêtes de stupéfiants. Toutes ces fouilles ne sont pas soumises aux mêmes règles.
Pendant très longtemps toutes ces fouilles n’ont pas fait l’objet d’un réel support textuel. La
Cour de cassation a assimilé les fouilles pratiquées sur les individus à des perquisitions. Cette
assimilation a permis que soit appliquées les règles protectrices de la perquisition dans le cadre des
fouilles à corps : Arrêt chambre criminelle du 21 juillet 1982 = la Cour de cassation a considéré que
s’agissant des fouilles à corps, les règles de la perquisition devaient s’appliquer.
Cependant, cette assimilation ne s’applique pas aux palpations de sécurité. Les palpations
de sécurité sont considérées comme étant peu attentatoires aux libertés individuelles. La Cour de
cassation est parvenue à la conclusion qu’il n’y avait pas lieu s’agissant de ces palpations d’appliquer
le régime protecteur de la perquisition = arrêt chambre criminelle 1er mars 2006.
Cette assimilation des fouilles corporelles aux perquisitions va permettre d’appliquer les
régimes de la perquisition. Cela va impliquer que la fouille corporelle d’un individu ne puisse être
pratiquée s’il existe des indices qui permettent de laisser penser qu’il détient des éléments utiles à la
manifestation de la vérité. Ce régime permet donc de protéger les individus faisant l’objet de fouilles.
Elles ne pourront être pratiquées qu’avec le consentement de la personne qui en fait l’objet. Grâce à
ce recours à l’analogie, la Cour de cassation va pouvoir protéger en quelque sorte les fouilles.
Loi du 14 avril 2011 = elle est applicable selon le législateur aux fouilles réalisées au cours
d’une garde à vue. Le législateur dans cette loi a réglementé les « fouilles intégrales ». Elles ne
peuvent être effectuées que dans un espace fermé, par une personne de même sexe. De plus elles
ne peuvent être utilisées que de manière subsidiaire = dernier recours, article 67-3 du Code de
Procédure Pénale. Même si ce texte est spécifique à la garde à vue, il doit s’appliquer à toutes les
fouilles intégrales.
La frontière entre fouille corporelle et de bagage est très floue. Par exemple lorsqu’on fouille
une banane ou un porte feuille quel type de fouille est-il effectué ? Il y a un régime assez lacunaire.
En effet la fouille de bagage n’est admise que dans certaines hypothèses très particulières. Face à ce
vide législatif, la Cour de cassation a appliqué là encore le régime de la perquisition. Quelques
textes autorisent la fouille des bagages dans le cadre de certains contrôles d’identité notamment
dans le cas de la vérification d’identité. Il faut juste que le Procureur de la République l’indique dans
ses réquisitions : article 78-2-2 du Code de Procédure Pénale. Le législateur a permis la fouille de
bagage afin de prévenir une atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens, hypothèse
prévue à l’article 78-2-4 du Code de Procédure Pénale. Le consentement du propriétaire du bagage
est normalement requis pour procéder à la fouille, sauf si le Procureur de la République autorise les
OPJ à se passer du consentement de l’individu.
118
Là encore le cadre légal mis en place par le législateur n’est pas complet. La jurisprudence a
du palier ce manque. Le législateur a réglementé cette fouille dans 3 cas :
3. Celui d’une optique sécuritaire fouille autorisée lorsqu’il est nécessaire de prévenir une
atteinte grave à la sécurité des personnes et des biens. Là encore cette optique suppose en
principe le consentement du conducteur qui va consentir à la fouille, à défaut de
consentement l’OPJ doit recueillir l’autorisation du Procureur de la République.
Dans ces 3 cas le déroulement de la fouille est assez similaire. En effet, la fouille ne peut avoir
lieu qu’en présence du conducteur sauf ci celui-ci est absent auquel cas un éventuel tiers peut être
utilisé. Hypothèses prévues par l’article 78-2-2 du Code de Procédure Pénale.
Ce cadre législatif est imparfait puisqu’il y a un certain nombre d’hypothèses qui n’ont pas été
prévues par le législateur, notamment celle où au cours d’une enquête de flagrance la fouille d’un
véhicule serait nécessaire. Les OPJ vont donc forcément fouiller des véhicules pour retrouver
l’infracteur et donc pas nécessairement des gens qui ont des choses à se reprocher. Cette hypothèse
n’est pas régie par le Code de Procédure Pénale. La jurisprudence s’est alors prononcée. La Cour de
cassation s’agissant de cette hypothèse spécifique a apporté un début de réponse dans un arrêt
TRIGNOL du 8 novembre 1979 : une fouille de véhicule peut être pratiquée dans le cadre d’une
enquête de flagrance en l’absence de consentement du propriétaire et/ou du conducteur. La
question posée à la Cour de cassation était : quelles sont les garanties applicables dans
le cadre de cette fouille ? Sur cette question la Cour de cassation a estimé qu’on ne pouvait
pas appliquer à la fouille de véhicules toutes les règles applicables à la perquisition. Elle n’a pas
répondu précisément.
119
C- Les réquisitions
Réquisition = acte de procédure pénale classique : acte par lequel un magistrat ou un OPJ enjoint à
une personne d’effectuer une prestation matérielle ou de fournir un certain nombre d’éléments
comme des examens scientifiques ou techniques qui vont aider l’OPJ.
Une réquisition peut consister à ce qu’on demande à un serrurier d’intervenir pour ouvrir
une serrure. On peut aussi demander à quelqu’un disposant de caméras dans un parking de les
fournir pour pouvoir vérifier ce qui s’y est passé. L’une des réquisitions la plus fréquente aujourd’hui
= s’adresser aux opérateurs téléphoniques pour tracer les appels.
Ce recueille peut impliquer 2 acteurs différents du procès pénal : le témoin ou le suspect. Les
modalités pour recueillir ces déclarations sont très différentes selon la personne entendue.
Témoignage : récit qui va être fait à un OPJ par une personne à l’encontre de laquelle il n’existe pas
de raison plausible de penser qu’elle a commis une infraction.
Pour que ce témoin soit auditionné il y a une condition préalable : le témoin va devoir se
rendre physiquement devant l’officier de police.
Une personne est-elle tenue de comparaitre en qualité de témoin lorsque l’OPJ l’a
convoque ?
Oui. Les témoins peuvent être convoqués si besoin en recourant à la force publique. Ce
recours sera autorisé par le Procureur de la République. Une fois que le témoin va se trouver amené
devant l’OPJ, sa retenue au poste de police est limitée. Le principe énoncé à l’article 62 du Code de
Procédure Pénale, c’est que la personne doit être retenue pour un temps strictement nécessaire au
recueille de ses déclarations, maximum 4H. L’OPJ va simplement rédiger un procès verbal dans
lequel il va recueillir les déclarations de l’intéressé, ce PV sera à la fin signé par le témoin. Le témoin
peut néanmoins refuser de signer le PV : article 61 alinéa 4 du Code de Procédure Pénale. Il n’y a pas
de sanction contre un refus de signature du PV, simplement ce refus peut exprimer un désaccord du
120
témoin. Le juge voyant ce refus peut considérer que ce qui est énoncé dans le PV est peut être
contraire à ce qu’avait voulu dire le témoin.
Il peut arriver qu’au cour du recueille, l’OPJ s’aperçoive qu’en réalité le témoin convoqué
n’est pas véritablement un témoin mais un suspect. De ce fait l’OPJ peut faire passer le statut du
témoin en suspect. Le régime d’audition sera alors soit le régime de l’audition libre soit le régime de
la garde à vue. Ces 2 régimes concernent effectivement le recueille des déclarations des suspects.
Il y a 2 régimes : l’audition libre et la garde à vue. Ce qui distingue ces 2 régimes c’est
l’exercice d’un pouvoir de contrainte à l’encontre des libertés individuelles des individus.
Dans le cadre de la garde à vue, la personne est privée de sa liberté d’aller et venir alors que
dans le cadre de l’audition libre la personne même suspecte reste en principe libre d’aller et venir.
1) Article 73 du Code de Procédure Pénale prévoit que chacun d’entre nous peut
appréhender la personne qui a commis une infraction dès lors qu’il s’agit d’un délit puni d’une peine
d’emprisonnement ou d’un crime. Cette appréhension est faite afin de conduire l’auteur de cette
infraction devant un OPJ. Célèbre arrêt de 1988 : certains ont interpellé un individu qui avait commis
une infraction et qui l’avait séquestré pendant plusieurs heures pour l’interroger mais c’est INTERDIT.
La garde à vue :
C’est une mesure qui a été profondément réformée par une loi assez récente : loi du 14 avril
2011. Le système français de la garde à vue avait été condamné tant par la CEDH que par le Conseil
constitutionnel et la chambre criminelle de la Cour de cassation. L’ancien système ne permettait pas
aux suspects d’être assistés par un avocat dès le début de la garde à vue. Il permettait d’auditionner
121
la personne sans qu’elle soit assistée par un avocat de manière systématique. Cette réforme de la
garde à vue a donné lieu à une définition de ce qu’est une garde à vue donnée par l’article 62-2 du
Code de Procédure Pénale :
Garde à vue : « La garde à vue est une mesure de contrainte décidée par un officier de police judiciaire, sous le
contrôle de l'autorité judiciaire, par laquelle une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs
raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine
d'emprisonnement est maintenue à la disposition des enquêteurs ».
Elle implique donc nécessairement un pouvoir de contrainte, ce qui l’a dissocie de l’audition
libre. Ce pouvoir de contrainte justifie un régime relativement fourni et détaillé.
Article 63 du Code de Procédure Pénale : l’OPJ peut le faire d’office de sa propre initiative ou
sur instruction du Procureur de la République.
Il y a 2 motifs. D’abord la loi du 14 avril 2011 a indiqué que seul un suspect peut être placé
en garde à vue, il faut qu’il existe des raisons plausibles de penser qu’une personne a commis ou
tenté de commettre une infraction pour la placer en garde à vue = article 62-2 du Code de Procédure
Pénale. Le second élément résultant de cette loi = l’infraction doit être d’une gravité suffisamment
importante, un placement en garde à vue n’est possible que pour un crime ou un délit puni d’une
peine d’emprisonnement. Donc une personne soupçonnée de n’avoir commis qu’une contravention
ou qu’un délit qui n’est pas puni par une peine d’emprisonnement ne peut pas faire l’objet d’une
garde à vue, tjrs article 62-2.
On ne peut pas placer un individu pour n’importe quoi, on le peut que pour parvenir à un
objectif précis. L’article 62-2 liste ces objectifs précis que doit tendre à atteindre la garde à vue. La
liste contient 6 objectifs :
2° Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite
à donner à l'enquête ;
4° Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches ;
5° Empêcher que la personne ne se concerte avec d'autres personnes susceptibles d'être ses coauteurs ou complices ;
6° Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit »
122
Ce placement en garde à vue lorsque les conditions sont remplies, va donner lieu à 2 séries de
notification.
2nd notification destinée à la personne gardée à vue : l’article 63-1 du Code de Procédure Pénale
prévoit que la personne gardée à vue doit se voir notifier ses droits. Cette notification doit avoir lieu
dès le placement en garde à vue. La seule raison justifiant un retard de cette information, c’est que
cette notification ait été impossible la personne n’est pas en mesure de comprendre = les gens
ivres ou défoncés. Par exemple la chambre criminelle de la Cour de cassation a admis qu’une
personne interpellée à 00H30 n’a été notifié de ses droits qu’à 13H45 parce qu’en raison de son taux
d’alcoolémie élevée elle n’était pas en mesure de comprendre ses droits = arrêt du 6 décembre
2016. De la même manière, la Cour de cassation a admis que les circonstances de l’interpellation
pouvaient aussi justifier un retard de la notification des droits de la personne gardée à vue. Par
exemple en cas de menaces de la sécurité des personnes qui avaient procédés au placement en
garde à vue = arrêt du 22 octobre 2020.
D’abord la personne va devoir être informée de son placement en garde à vue dès le début.
Elle va être informée aussi de la durée de cette mesure et des éventuelles prolongations dont la
garde à vue peut faire l’objet. Elle va aussi être informée de la nature, de la date et du lieu de
l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise. Ces notifications qui vont être faites par la
personne qui procède au placement en garde à vue sont primordiales.
Là encore la chambre criminelle sanctionne très sévèrement les retards dans la notification
des droits puisque la chambre estime que ce retard porte nécessairement atteinte aux intérêts de la
personne gardée à vue, ce qui a pour conséquence d’entrainer la nullité du placement au motif que
le suspect subit un préjudice = arrêt de la chambre criminelle du 30 avril 1987.
peut être prolongé par le Procureur de la République pour 24H supplémentaire lorsque la personne
gardée à vue est soupçonnée d’avoir commis un crime ou un délit punit d’une peine
d’emprisonnement égale ou supérieure à 1 an. Le Procureur de la République va devoir motiver
cette prolongation de la garde à vue en indiquant les raisons de cette prolongation (par exemple pour
réaliser d’autres investigations).
En réalité il y a bcp de régimes dérogatoires qui ouvrent la garde à vue à bien plus que 48H
notamment en matière de criminalité organisée on peut procéder à une prolongation de 48H
supplémentaires décidée par le juge des libertés et de la détention. On arrive donc à 96H. En matière
terroriste on peut encore prolonger au-delà. En tout ici la garde à vue peut avoir une durée de 6
jours maximum.
Avec le temps les droits du gardé à vu se sont renforcés avec le temps. Ce renforcement des
droits s’est traduit par une disposition assez symbolique : l’article 63-5 du Code de Procédure Pénale
qui a indiqué que la garde à vue devait se dérouler dans des conditions qui assurent le respect de la
dignité de la personne humaine. Le déroulement de la garde à vue va aujourd’hui permettre à la
personne suspecte de disposer de droits extrêmement précis et détaillés :
1er droit : celui de se taire ou de faire des déclarations = article 63-1 du Code de Procédure Pénale.
2ème droit : informer certains tiers = ce droit s’est renforcé récemment. Historiquement ce droit
correspond au droit de faire prévenir par l’OPJ ou un agent de police judicaire certains tiers. Cette
information d’un tiers était possible auprès d’une personne proche (concubin/conjoint) ou d’un
parent. Cette intervention doit intervenir dans les 3H qui suivent la demande de la personne gardée
à vue. Bien évidemment ce doit peut être limité. De même la personne gardée à vue peut aussi faire
prévenir son employeur : tjrs un délai de 3H. Ce droit s’est développé = loi du 3 juin 2016 permet
que la personne gardée à vue s’entretienne avec un proche ou son employeur soit au téléphone
soit en directe = article 63-2 du Code de Procédure Pénale.
3ème droit : droit à un examen médical = le Procureur de la République ou l’OPJ peut également
demander à ce que la personne gardée à vue soit examinée par un médecin article 63-3 du Code
de Procédure Pénale. Ce droit tend à se renforcer. En cas de prolongation de la garde à vue on peut
demander un second examen médical. Au-delà de 48H de garde à vue l’examen médical devient
obligatoire = la loi impose ce dernier.
4ème droit : le droit à un avocat, a été renforcé par la loi du 14 avril 2011 : article 63-3-1 du Code de
Procédure Pénale = la personne gardée à vue peut bénéficier de la présence d’un avocat dès le début
de la garde à vue. L’avocat va d’abord se voir confier un certain nombre d’informations sur la date de
l’infraction… Il va aussi pouvoir consulter le PV de placement en garde à vue afin de vérifier que
toutes les modalités procédurales ont bien été respectées.
1er mission = conseiller la personne gardée à vue en s’entretenant avec elle. Double
mission
2ème mission = assister la personne lorsque celle-ci est interrogé par les enquêteurs.
124
Les auditions et confrontations ne débutent pas avant que l’avocat parvienne aux locaux où
la personne est gardée à vue : expiration d’un délai de 2H suivant le moment où l’OPJ a fait prévenir
l’avocat. Autrement dit si la personne demande à être assisté par un avocat dès le début de sa garde
à vue, l’OPJ doit le faire prévenir. Dès ce moment l’avocat à 2H, pendant ce temps la personne
gardée à vue ne peut pas être questionnée. Si au bout de 2H l’avocat n’est pas là, l’OPJ va pouvoir
débuter l’interrogatoire : article 63-4-2 du Code de Procédure Pénale. Il y a cependant des
tempéraments lorsque la situation est urgente (enlèvement d’un mineur), sur autorisation du
Procureur de la République.
L’audition libre :
C’est une procédure qui suppose la liberté de la personne qui est suspectée. Aujourd’hui
même si la personne est libre de ses mouvements, il y a un certain cadre juridique qui entoure son
audition. En effet on estime à juste titre que cette personne doit avoir accès à un certain nombre
d’informations, qui consiste à lui notifier ce qu’on lui reproche. Ces différentes informations sont
résumées par l’article 61-1 du Code de Procédure Pénale. Cette personne a aussi le droit d’être
assisté par un avocat.
125
Chapitre II
L’instruction
Elle est marquée par le juge d’instruction. Son rôle est d’instruire l’affaire. Le but est que la
juridiction qui sera ultérieurement saisie dispose des éléments nécessaires pour rendre une décision.
Il y a 2 statuts possibles reconnus aux personnes suspectes. La personne suspecte peut déjà
être mise en examen. C’est ce statut qui va accorder le plus de droit à la personne suspectée. A côté
de ce statut de grand suspect il y en a un plus petit correspondant à celui du témoin assisté. Dans les
2 cas, plus les indices sont importants et plus les soupçons sont importants envers la personne. Plus
elle peut faire l’objet de mesures de contrainte importantes et plus on va lui permettre de se
défendre et de participer à la manifestation de la vérité générale.
A- Le mis en examen
C’est le suspect qui va bénéficier du plus de droit. Ce mis en examen dispose de droits
importants. En général le juge d’instruction ne peut pas mettre n’importe qui en examen. Pour qu’un
individu soit mis en examen il faut que certaines conditions soient remplies, elles sont posées par
l’article 80-1 du Code de Procédure Pénale « le juge d'instruction ne peut mettre en examen que les
personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles
aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi . ».
Il s’agit d’une simple possibilité pour le juge d’instruction. Il n’est pas contraint de mettre en
examen un individu. Il n’y sera contraint que s’il entend placer cette personne en détention
provisoire ou lui faire subir un contrôle judicaire ou une assignation à résidence. Tant qu’il n’y a pas
ces formes de recours pas de mise en examen obligatoire. En revanche il lui est interdit lorsqu’il
existe des indices graves et concordants c’est de ne pas mettre la personne en examen mais
d’essayer de la placer en détention provisoire ou de la soumettre à un contrôle judicaire… Cette mise
en examen ne constitue que l’ultime mesure. Le juge d’instruction peut tout à fait préférer lui
conférer le statut de témoin assisté qui est bien plus ouvert plutôt que de mis en examen, dès lors
qu’il existe à l’encontre d’une personne des indices rendant vraisemblable sa participation au titre
d’auteur ou de complice à l’accomplissement d’une infraction dont le juge d’instruction est saisi.
Lorsque les indices ne sont plus graves ou concordants mais graves et concordants, le
législateur a pensé que la protection de la personne suspectée était nécessaire. L’idée du législateur
= à partir d’un certain seuil d’indices il faut que la personne ait la possibilité de se défendre. En cas
d’indices graves et concordants le juge d’instruction va devoir recourir au statut procédural adapté.
126
Lorsqu’existent de tels indices, la logique du texte est de mettre l’individu en examen et donc de
rendre la mise en examen obligatoire pour le suspect.
Donc :
3) Présence d’indices graves ET concordants = Mise en examen Obligatoire : ici le juge d’instruction
ne peut pas entendre la personne sans aucun statut, donc à minima il ne peut l’entendre que sous le
statut de témoin assisté.
Cette mise en examen passe obligatoirement par une présentation préalable au juge
d’instruction. Le juge d'instruction va entendre la personne avant de la mettre en examen au cours
d’un interrogatoire de 1ère comparution. A l’issue de cet interrogatoire, le juge d'instruction va
décider ou non de mettre la personne en examen. Cet interrogatoire est régi par l’article 116 du
Code de Procédure Pénale. A l’issue il y a 2 possibilités : soit le juge décide de ne pas mettre la
personne en examen, cela implique quand même qu’à un moment le juge d'instruction a envisagé le
placement en examen. Comme il y a eu un doute de la part du juge d'instruction le législateur a
pensé que même si ce dernier ne met pas la personne en examen, ce doute qui a justifié la tenue de
l’interrogatoire de 1ère comparution, justifie aussi que la personne bénéficie d’un statut. Donc si elle
n’est pas mise en examen la personne est automatiquement placée sous le statut de témoin
assisté. 2ème possibilité = le juge d'instruction met la personne en examen = il lui fait part de ses
droits
La personne mise en examen va pouvoir être assistée par plusieurs avocats = article 115 Code
de Procédure Pénale. Elle va pouvoir accéder à une certaine information sur l déroulement et le
contenu de la procédure = elle va pouvoir accéder au dossier de la procédure afin d’organiser au
mieux sa défense. Enfin, elle va avoir le droit de participer à l’instruction elle peut demander à ce
que soient accomplis des actes nécessaires à la manifestation de la vérité = droit de demander
l’accomplissement de mesure d’instruction ≠ pas un droit d’exiger.
B- Le témoin assisté
La loi pose une distinction entre les cas où ce statut doit obligatoirement être attribué à un
individu et les cas où ce statut n’est que facultatif, en ce sens le juge d'instruction va jouir d’une
certaine marge d’appréciation pour accorder ou non ce statut.
127
Statut obligatoire :
1) Lorsque l’individu a été soupçonné à un moment par un magistrat, et plus spécialement lorsqu’il a
été désigné comme suspect dans un réquisitoire introductif (acte accompli par le Procureur de la
République afin de saisir le juge d'instruction). A priori, cet individu pourrait aussi se voir, si les
conditions sont remplies, reconnaitre le statut de mise en examen.
2) Lorsque le juge d'instruction a envisagé de mettre une personne en examen et donc a organisé
un interrogatoire de 1ère comparution, dans ce cas l’attribution de statut de témoin assisté est
automatique si la personne n’est finalement pas mise en examen.
Statut facultatif :
Ici le statut est subordonné à l’appréciation d’un individu, le plus souvent du juge
d'instruction. En effet dans un certain nombre de cas, le juge d'instruction peut placer l’individu sous
le statut de témoin assisté sans que ce soit pour lui une obligation. C’est le cas lorsqu’une personne
est mise en cause par un témoin ou lorsqu’une personne est visée par une plainte ou encore qu’elle
soit mise en cause par une victime. Dans tous ces cas, l’attribution du statut de témoin assisté est
une possibilité, rien d’obligatoire. De la même manière lorsqu’il existe des indices rendant
vraisemblable que la personne ait participé comme auteur ou complice à la commission d’une
infraction, l’attribution de ce statut est facultative.
La personne soupçonnée, elle même, peut estimer nécessaire d’être placée sous ce statut
de témoin assisté et ainsi demander à bénéficier de ce statut. En effet dans un certain nombre de
cas, lorsque la personne estime qu’elle doit bénéficier de ce statut elle va pouvoir demander la
reconnaissance de ce statut. C’est le cas par exemple, lorsqu’une personne est visée dans une
plainte. Elle peut aussi en faire la demande lorsque précédemment elle a été mise en examen et
qu’elle n’était pas nécessaire.
Ce placement sous le statut de témoin assisté va résulter soit de la loi qui va exiger dans
certain cas ce placement, soit de l’appréciation du juge d'instruction soit de la personne
soupçonnée. En principe ce placement résulte d’une audition de la personne, qui après cette
audition sera placée sous ce statut. On ne parle plus d’interrogatoire de 1ère comparution mais de 1ère
audition.
Ce statut est utile parce qu’il va permettre à l’individu d’être assisté par un avocat. Cet
avocat va accéder au dossier de la procédure et va pouvoir assister à l’audition du témoin assisté. Le
témoin assisté va aussi pouvoir demander à être confronté aux personnes qui l’ont mise en cause.
Pour cette raison ce statut peut être utile pour la personne soupçonnée. Le témoin assisté n’a pas
comme le mis en examen le droit de solliciter l’accomplissement de mesure d’instruction et d’actes
d’investigation. Ce droit est réservé à la personne mise en examen. Il y a une différence au niveau
128
des indices : pour le mis en examen = indices graves et/ou concordants et pour le témoin assisté =
indices ayant rendu vraissemblable. Ce qui différencie véritablement les 2 cas c’est le régime qui va
les accompagner. Le mis en examen a plus de droit que le témoin assisté car il peut solliciter
l’accomplissement d’actes d’investigation. Mais le mis en examen a aussi la possibilité d’être placé en
détention provisoire, de faire l’objet d’un contrôle judicaire ou d’être assigné à résidence. En
revanche le témoin assisté ne peut faire l’objet d’aucune de ces mesures. L’article 113-5 du Code de
Procédure Pénale les exclues pour le témoin assisté. Il en découle donc que très souvent que le juge
d'instruction pour choisir le statut de l’individu va réaliser une sorte de syllogisme inversé. Il va se
demander s’il veut le placer sous une mesure contraignante ou non, si réponse affirmative = mise en
examen. Bien évidemment il existe des possibilités pour qu’un témoin assisté passe au statut de mis
en examen.
L’objet de l’instruction est aussi de déterminer le sort qui doit être réservé à la personne
mise en examen. Donc le déroulement de l’instruction se subdivise : d’un côté le juge d'instruction a
une mission probatoire, d’un autre côté il va falloir déterminer quel est le sort de la personne qui est
mise en examen.
Le juge d'instruction dispose de pouvoirs extrêmement étendues qui sont prévus par l’article
81 du Code de Procédure Pénale. Cet article a valeur de symbole. Il dispose du pouvoir d’entendre
des personnes : des témoins qui seront convoqués de la même manière que dans le cadre d’une
enquête de police judiciaire. Même recueille de témoignage si ce n’est qu’au cours de l’instruction le
témoin jure de dire la vérité et rien que la vérité = différence fondamentale entre les deux types
d’audition. Dans le cadre de l’instruction le témoin est entendu sous serment. Le juge d'instruction
va aussi entendre les suspects et notamment entendre la personne mise en examen et celle placée
sous le statut de témoin assisté. Il va les entendre directement : interrogatoire = mis en examen et
audition = témoin assisté.
Le juge d'instruction peut décider qu’une personne suspecte sera entendue lors d’une garde
à vue, il faut néanmoins pour la garde à vue que les conditions soient réunies. Il faut qu’il existe à
l’encontre de l’individu une ou plusieurs raisons plausibles : article 154 du Code de Procédure Pénale.
Si la personne est ainsi sous garde à vue, c’est un OPJ qui sera commissionné pour procéder à son
interrogatoire. Ce placement en garde à vue est possible pour la personne suspecte mais ce
placement est interdit à l’égard de certaines personnes au cours de l’instruction car il ne faut pas
méconnaitre les droits de la défense. En effet à l’égard du témoin assisté et du mis en examen la
possibilité de les placer en garde à vue est réduite. La personne mise en examen ne peut pas être
entendue par un OPJ = article 152 du Code de Procédure Pénale, elle sera alors entendue par le juge
d'instruction. Elle ne peut pas être placée en garde à vue car cela serait contraire à l’exercice des
droits de la défense. Le témoin assisté ne peut être entendu par un OPJ qu’avec le consentement de
l’intéressé. La possibilité est donc assez restreinte, tjrs article 152.
129
Le juge d'instruction peut demander des perquisitions. Enfin il va pouvoir délivrer des
mandats. Ils sont originaux en matière d’instruction. Ces mandats sont des ordres écrits par lesquels
le juge d'instruction enjoint de porter atteinte à la liberté d’une personne. Par exemple le mandat
de recherche. Le degré d’atteinte va être très variable. Ils ne peuvent être dirigés que contre les
personnes à l’égard desquelles il existe une ou plusieurs raisons plausibles de penser qu’elles ont pu
commettre une infraction : article 122 du Code de Procédure Pénale. Les témoins par conséquent ne
peuvent pas faire l’objet d’un mandat.
Il y a 4 mandats qui peuvent être pris par le juge d'instruction, et un 5ème qui peut être pris
par un autre magistrat qui peut intervenir au cours de l’instruction : le juge des libertés et de la
détention :
1. Mandat de recherche : destiné à rechercher une personne afin qu’elle soit placée en
garde à vue. Prévu par l’article 1522 du Code de Procédure Pénale.
3. Mandat d’amener : son objet est d’amener une personne devant le juge
d'instruction. Contrairement au mandat de comparution, ici on peut recourir aux
pouvoirs de contraintes, la force publique peut contraindre l’individu à se rendre
devant le juge d'instruction.
5. Mandat de dépôt = juge des libertés : donne l’ordre aux agents de la force publique
de conduire une personne dans une maison d’arrêt. Pour que ce mandat soit émis, il
faut que la personne ait été préalablement placée en détention provisoire.
Problème : au stade de l’instruction la personne est présumée innocente, et donc elle n’a pas été
jugée coupable par une juridiction. En principe elle peut donc restée libre. Même s’il y a présomption
d’innocence, s’il existe un certain nombre d’indices à son égard on peut hésiter à la laisser libre
d’aller et venir. Cet équilibre passe par un principe : le mis en examen demeure en principe libre
mais dans certaines exceptions il va pouvoir être placé en détention provisoire sous contrôle
judicaire ou faire l’objet d’une assignation à résidence.
130
1. La détention provisoire
C’est une mesure qui est « exceptionnelle » article 137 du Code de Procédure Pénale.
Exceptionnel puisqu’il n’est possible que si les autres mesures que sont l’assignation à résidence et le
contrôle judicaire s’avèrent insuffisantes. Lorsque cette exception doit être utilisée, ce placement
n’est pas décidé par le juge d'instruction mais par le juge des libertés et de la détention au terme
d’un débat contradictoire. La détention provisoire est limitée dans le temps : article 144-1 du Code
de Procédure Pénale = « durée raisonnable », pas très précis. L’idée générale est que plus l’infraction
est grave, plus la durée de la détention provisoire peut être longue. Pour les crimes, le placement en
détention provisoire peut être ordonné pour une durée initiale d’un 1 an. Le juge des libertés et de
la détention va pouvoir ordonner des prolongations de cette détention par petites périodes de 6
mois. De ce fait en matière criminelle pour les infractions les plus graves on peut parvenir à une
durée maximum de 4 ans et 8 mois. En matière correctionnelle, la durée de la détention est de 4
mois lorsque la personne encourt une peine d’emprisonnement inférieure à 5 ans et qu’auparavant
elle n’a été condamnée à aucune peine criminelle et à aucune peine d’emprisonnement sans sursis
supérieur à 1 an. A tout moment l’individu peut demander sa libération et sa remise en liberté et si
les conditions de la détention provisoire apparaissent ne plus être réunies, le juge des libertés et de
la détention ou le juge d’instruction pourra ordonner la remise en liberté de la personne.
Conditions :
Il faut un motif pour placer l’individu : il existe 7 motifs visés par l’article 144 du Code de
Procédure Pénale. Il faut que la détention provisoire constitue l’unique moyen de parvenir à
l’un de ces motifs visés par le texte.
2. Le contrôle judicaire
Il consiste à astreindre une personne mise en examen à respecter certaines obligations. Les
obligations peuvent être de rester dans certaines limites territoriales, ou de verser une somme
d’argent à titre de cautionnement = une caution. Ce cautionnement va permettre de garantir que la
personne se présente bien aux différents actes d’instruction auxquels elle est convoquée, ainsi que la
garantie qu’elle indemnise la personne victime éventuellement.
Il va être ordonné par le juge d’instruction en général. Le juge des libertés peut aussi le faire
mais ce n’est pas très courant. Le juge d'instruction va vérifier que la personne exécute bien les
mesures de ce contrôle judicaire. En cas de violation, la personne peut être placée en détention
provisoire par le juge des libertés et de la détention.
131
C’est une mesure qui impose à une personne de demeurer à son domicile ou à sa résidence
et de n’en sortir qu’aux conditions et aux motifs qui ont été fixés par le juge. Article 142-5 du Code
de Procédure Pénale. Il est possible d’être assigné à rester chez un tiers, dans un couvant. Cette
assignation suppose la mise en place d’une surveillance électronique. Cette surveillance électronique
va être mise en place soit par un système électronique mobile soit par un système électronique fixe.
Dans tous les cas, ce n’est possible que si la personne mise en examen est soupçonnée d’avoir
commis une infraction punie d’au moins 2 ans d’emprisonnement : article 142-5 du Code de
Procédure Pénale.
Si la personne ne respecte pas, en cas de violation elle encourt d’être placée en détention
provisoire.
132
Chapitre III
Conditions de nullité :
Article 802 du Code de Procédure Pénale : texte fondamental = conditions prévues pour que
la nullité d’un acte de procédure soit envisagée. La nullité d’un acte de procédure pénal
(exemple : perquisition) est subordonnée à deux conditions cumulatives :
1. La nullité doit être prévue par la loi, ou qu’elle résulte de la méconnaissance d’une
formalité substantielle. C’est indiqué dans le Code de Procédure Pénale par « à
peine de nullité ». En dehors de ces cas qui sont peu nombreux, c’est la
jurisprudence qui a pallié le manque. Elle a donc découvert un très grand nombre de
formalités « substantielles ». Ce sont celles dont la nullité n’est pas prévue par la loi
mais pour lesquelles la jurisprudence considère que si elles sont méconnues l’acte de
procédure sera nul. Par exemple s’agissant de la notification des droits de la
personne gardée à vue, elle n’est pas prévue à peine de nullité mais pourtant la Cour
de cassation a dit qu’il s’agissait d’une cause éventuelle de la garde à vue = arrêt
chambre criminelle du 30 avril 1996.
2. Il faut que l’irrégularité ait eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie
qu’elle concerne (article 802). Cela veut dire que la partie qui se prévaut d’une
nullité ne peut pas simplement dire que la nullité a été prévue par la loi ou la
jurisprudence, il faut qu’elle établisse que l’irrégularité lui a causé un grief.
D’abord elle a dit pour certaines causes de nullité d’ordre public que le grief n’a pas lieu. Les
nullités d’ordre public = exemple : lorsqu’un juge d'instruction instruit une affaire alors qu’il
n’a pas été saisi = arrêt assemblée plénière du 17 juin 1988.
133
Second cas = nullité avec griefs présumés : dans un certain nombre d’hypothèses la chambre
criminelle considère que les parties lorsqu’elles soulèvent la nullité n’ont pas à établir
l’existence d’un grief car le grief est présumé. Par exemple quand elle dit « la violation de ces
modalités cause nécessairement grief ». Le grief est donc présumé de manière irréfragable,
la partie s’en prévalent n’aura donc pas à le prouver. Par exemple s’agissant de la notification
tardive des droits de la personne gardée à vue, la chambre criminelle dit qu’il s’agit d’une
formalité qui si était méconnu portait nécessairement grief à la personne gardée à vue. Elle
n’aura pas à prouver le grief.
Une fois que l’acte de procédure est déclaré nul, il est censé disparaitre et donc il ne peut
plus être utilisé dans les débats. Là où il y a une difficulté, c’est sur les autres actes de procédure :
Si un acte est déclaré nul, est ce que les autres actes de la procédure sont entachés ?
Le principe c’est qu’il faut distinguer. S’agissant des actes accomplis avant l’acte déclaré nul,
il ne peut pas être entaché de nullité. Pour les actes accomplis après, il faut rechercher si ces actes
postérieurs trouvent leur support nécessaire dans l’acte qui a été annulé. Si c’est le cas ils doivent
eux mêmes être annulés = arrêt chambre criminelle 26 septembre 2018.