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Paragraphe 2: La théorie des preuves

La CEDH ne réglemente pas la recevabilité des divers modes de preuve, car


ne relève pas de sa compétence, il lui appartient seulement de vérifier que
la procédure dans son ensemble respecte bien l’art. 6 de la Conv. EDH.

Le législateur n’a pas prévu de théorie générale de la preuve en matière


pénale. Il est revenu donc à la doctrine et à la jurisprudence d’élaborer cette
théorie générale. C’est regrettable, car le problème est très important en
procédure pénale. Le problème de la preuve est posé depuis l’antiquité.

Il y a eu la procédure inquisitoire sous l’ancien régime, qui était écrite


secrète et non contradictoire. Secrète car les personnes étaient interrogées
en secret, et non contradictoire car il n’y avait pas de débat et de
contradiction apportée aux témoins et aux denonceurs.

A cette dernière on oppose la procédure accusatoire qui est orale, publique


et contradictoire.

Aujourd’hui on a une procédure mixte ayant des caractères de la procédure


inquisitoire et de la procédure accusatoire. Il y a différentes étapes dans
lesquelles la procédure est plus ou moins inquisitoires ou accusatoires. Ex :
les audiences sont publiques (caractère accusatoire) ; l’instruction est
secrète (caractère inquisitoire).

Le plus important est que la procédure soit contradictoire, i.e., le respect du


principe du contradictoire ou encore principe de la contradiction. C’est un
principe directeur de la procédure pénale trouvé à l’art. 6 Conv. EDH et à
l’art. préliminaire du CPP.

Le juge ne doit pas statuer en équité, car il est tenu de respecter le principe
de légalité. C’est la procédure pénale que doit être équitable.

Le code de 1808 a abandonné le système inquisitoire, et a adopté la règle


de l’intime conviction, i.e., le juge se décide d’après son intime conviction.
Mais qu’est-ce que l’intime conviction ?

Il y a 3 grandes différences s’agissant des preuves en procédure civile et


pénale :

- En procédure civile le juge a un rôle passif → e procédure pénale le


juge a un rôle plus actif. En procédure civile le demandeur a la charge
de la preuve, i.e., le créancier doit apporter les preuves de sa créance
et le débiteur les contre-preuves → en matière pénale c’est le
procureur qui doit apporter la preuve de la culpabilité.

- En droit civil il y a une hiérarchie des preuves, mais pas en procédure


pénale
- En matière pénale la recherche des éléments de preuve a un
caractère coercitif qui n’existe pas en matière civile.

En droit américain il y a une discipline du droit de la preuve pénale.

En droit français il y a deux domaines qui orientent le juge dans


l’appréciation de la preuve .

Le principe de la liberté de la preuve


La liberté est totale, concernant les auteurs sur le mode de preuve et pour
le juge car il apprécie comme il veut les preuves qui sont apportées devant
lui.

Liberté et modes de preuve


Cette liberté on la retrouve à l’art. 427 CPP (« peuvent être établies par tout
mode de preuve »).

La charge de la preuve
La preuve incombe aux ministères publics (parquet, procureur de la
république), i.e., il leur est incombé de prouver la culpabilité de la personne
poursuivie, et cela découle du principe de la présomption d’innocence. Ce
principe n’a d’autres significations que de la charge de la preuve. Ce
principe est tellement important qu’il figure à tous les étages de la
hiérarchie des normes, notamment à l’art. préliminaire du CPP, dans le bloc
de constitutionnalité (art. 9 DDHC de 1789 ; valeur constitutionnelle
reconnue par le CC), à l’art. 6 de la Conv.EDH, et à l’art. 9-1 al. 1er C. civ.

Les manifestations du droit au respect du principe de la présomption


d’innocence
Ces manifestations sont positives et négatives.

- Positivement : la personne poursuivie est dispensée de démontrer son


innocence. Il revient au MP de le prouver.

- Négativement :

o Bénéfice du doute : le doute profite à l’accusé, i.e., en cas de


doute sur la culpabilité de l’accusé à juridiction doit le relaxé
(TC) ou l’acquitter(CA).

 Est-ce que les juges doivent motiver le relaxe ou


acquittement en cas de bénéfice du doute ? la question
ne se pose pas devant la CE car les arrêts de la CA en
France n’ont pas à être motivés. Mais cela pourra
changer vu l’arrêt récemment rendu par la CEDH vis-à-
vis de la Belgique. En revanche pour les TP, des juges du
fond l’ont déjà fait dans certaines décisions. La Crim. 21
mars 1990 a approuvé les juridictions du fond en ce
sens. Néanmoins cette décision de la Cour de Cassation
et cette pratique des juges du fond sont critiquables
juridiquement et en pratique :

• Juridiquement car l’art. 470 CPP prévoit les causes


de la relaxe de façon énumérative et le bénéfice
du doute n’est pas prévue par ce texte. Ceci eut
donc paraitre contraire au principe de la légalité
pénale

• En pratique car si on a une décision qui est


motivée en ce sens cela signifie qu’il y a un doute
sur sa culpabilité, mais aussi sur son innocence,
ce qui prouve que le principe de la présomption
d’innocence n’est pas respecté.

o Droit de ne pas contribuer à sa propre incrimination. C’est un


droit qui découle du principe de la présomption d’innocence et
il se trouve à tous les étages de la hiérarchie des normes. C’est
le droit à ne pas s’auto-incriminer, s’auto-accuser ou encore de
témoigner contre soi même. Ce droit a été développé par la
CEDH et comporte deux droits particuliers :

 Droit de garder le silence. La loi du 4mars 2002 imposait


aux OPJ de dire que la personne avait le droit de garder
le silence, mais la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité
intérieure a supprimé l’obligation pour les OPJ d’informer
la personne arrêtée qu’elle avait le droit de garder le
silence. Cela ne veut pas dire que ce droit n’existe plus,
il existe toujours, mais il est devenu une indication
purement textuelle. Ce droit a été consacré par la CEDH
dans un arrêt CEDH 25 février 1993, Funke c/ France.
Cela signifie que le droit de se taire implique qu’il est
interdit de condamner un suspect au seul motif de son
silence. Ce droit n’interdit pas de prendre en compte son
silence, simplement il faut que ce silence soit corroboré
par d’autres éléments. Enfin la CEDH a dégagé le droit
de ne pas contribuer à sa propre incrimination ;

 Droit de ne pas produire des documents contre soi-


même. La personne poursuive n’a pas d’obligation de
déclarer des éléments à charge de sa culpabilité.

La relativité du principe
Le principe est relatif dans le sens où le législateur peut prévoir des
mécanismes de présomption de responsabilité pénale, i.e., il peut prévoir un
renversement de la charge de la preuve. Dans ce cas, la personne
poursuivie est présumée coupable et c’est à elle prouver son innocence.

La CEDH 7 octobre 1988, Salabiaku c/ France, n’a pas condamné la France


car elle a reconnu qu’il était possible de le faire à condition que la
présomption de cette responsabilité soit simple, i.e., que la personne
poursuivie puisse apporter la preuve de son innocence ce qui n’est en
réalité que la mise en œuvre du principe de la contradiction. Bien
évidemment la présomption irréfragable ne serait pas de même.

Le CC DC 16 juin 1999 a considéré que le législateur ne peut instituer des


présomptions de culpabilité en matière répressive (art. 9 DDHC), mais à
titre exceptionnel de telles présomptions peuvent être établies notamment
en matière contraventionnelle dès lors qu’elles ne revêtent pas de caractère
irréfragable.

L’objet de la preuve
C’est au ministère public d’en apporter la preuve. Il doit prouver l’infraction
et l’imputabilité de cette infraction à la personne poursuivie.

Il doit prouver l’élément légal, l’élément matériel de l’infraction et l’élément


moral ou la faute pénale. Ensuite il doit prouver l’imputabilité de l’infraction
à la personne poursuivie. Simplement si la personne prétend bénéficier d’un
fait justification c’est à elle d’en apporter la preuve.

Les modes de preuve


- Preuve par indice : c’est la technique de la présomption de fait, i.e., à
partir d’un fait connu on en déduit un fait inconnu ;

- Expertises : c’est l’utilisation des connaissances techniques par un


spécialiste pour aider á la solution du procès pénal. Elles sont prévues
à l’art. 156 CPP pour les questions d’ordre technique. Le juge n’est
jamais lié par l’expertise. La loi du 5 mars 2007 a renforcé le
caractère contradictoire de l’expertise en ajoutant l’art. 161-1 et 161-
2 au CPP qui permettent aux parties soit de demander une contre-
expertise (à un 2e expert), soit de formuler à l’expert précis d’autres
questions supplémentaires.

- Ecrits : aveux extrajudiciaires ou procès verbaux.

- Témoignages : le témoin rapporte ce qu’il a vu ou entendu


personnellement qui prêtent serment à l’audience ;

- L’aveu : la loi du 9 mars 2004 a créé la comparution sur


reconnaissance préalable de culpabilité

Le principe de la légalité de la preuve

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