Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
Professeur Y. Bodian
FSJP – UCAD
À L’USAGE DE LA LICENCE 2
2022
Sommaire (de la première partie)
Introduction
L’action publique : « action pour l’application des peines »1 = article premier du Code
de procédure pénale.
- Conditions positives : les faits doivent être constitutifs d’une infraction 2. Ainsi,
l’action publique n’existe que si une infraction pénale a été commise : vol,
meurtre abus de confiance etc. Lorsque les faits ne supportent aucune
qualification pénale (faute civile par exemple) l’action publique n’existe pas3.
général.
3Lorsque les faits ne constituent pas une infraction, l’Officier de police judiciaire ou le
procureur de la République doit classer le dossier sans suite. Le juge d’instruction saisi doit
rendre une ordonnance de non informer et la juridiction de jugement doit rendre une
décision de relaxe pure et simple.
I- LE DÉCLENCHEMENT DE L’ACTION PUBLIQUE
- Quels sont les mécanismes par lesquels l’action publique est mise en
mouvement par le ministère public ?
- La loi prévoit ainsi la citation directe, la comparution immédiate et la réquisition
introductive d’instance.
a) La citation directe
- Elle est utilisée lorsque l’infraction dont la répression est poursuivie n’exige pas
une information préalable (ex : les contraventions ou les délits pour le jugement
desquels l’ouverture d’une information n’est pas jugée nécessaire).
b) Le réquisitoire introductif
- Le réquisitoire est dit « introductif5 » dès lors qu’il permet de saisir le juge
d’instruction et, en même temps, de déclencher l’action publique,
d’« introduire » ou d’engager les poursuites.
- Il peut être délivré soit contre une ou des personnes dénommées (réquisitoire
nominatif)6 soit contre un inconnu que le juge d’instruction devra identifier.
4
Le procès-verbal d’enquête, ou tout autre document pouvant justifier l’ouverture de
l’information, est généralement annexé au réquisitoire introductif.
5 Réquisitoire introductif d’instance.
6
MICHAUD, « La portée du réquisitoire nominatif », RSC, 1972, p. 180.
- Il doit obligatoirement qualifier les faits et viser les textes de loi applicables ce
d’autant qu’il fixe la saisine du juge d’instruction.
7
D’ailleurs dans cette hypothèse, il ne s’agit pas d’une extension de la saisine du juge
d’instruction.
8
DE NAUW, « La décision de poursuivre ; instruments et mesures », RSC, 1976-1977,
p. 449. 44 R. LEVY, « Recherche sur le flagrant délit », RSC, 1985, p. 410.
9
Article 384, al. 3 du Code de procédure pénale. Il résulte de l’alinéa 2 du même texte
que lorsque le prévenu use de cette faculté, le délai qui lui est accordé ne pourra être
inférieur à trois jours.
✓ La plainte avec constitution de partie civile est un mode spécifique à la
victime. Elle a été admise, pour la première, par la jurisprudence dans
l’affaire Placet10.
✓ Le Ministère public doit prendre une décision sur la suite à donner à l’affaire. Il
a le choix entre l’abandon des poursuites et l’engagement des poursuites.
L’abandon des poursuites peut intervenir soit dans le cadre d’un classement sans suite
soit après une médiation pénale.
✓ Nécessité d’une mise en demeure préalable dans certains cas ( cas du délit
d’abandon de famille (abandon de foyer) prévu par l’article 350 1 e et 2e du Code
pénal dont se rend coupable le père ou la mère de famille ou le conjoint qui
10
Crim., 8 décembre 1906 Placet, dit Laurent-Atthalin, du nom du conseiller rapporteur de
la Cour de cassation dans cette affaire. Voir également : A. DONNIER, Les effets d’une
constitution de partie civile jugée irrecevable », note sous Cass. Crim. 18 juin 2014, (deux
arrêts) JCP 2014, Actualités, n°783, p.1337.
11
Aandré VITU, « Le classement sans suite », RSC, 1947, p. 505 et s. GLESENER, « Le
classement sans suite et l’opportunité des poursuites », RSC, 1972-1973, p. 353.
12
Jean-Jacques THOUROUDE, « Vers un déclin du principe de l’opportunité des poursuites
», Gaz. Pal, 1981, 2, doctr. 495.
abandonne sans motif grave, pendant plus de deux mois, la résidence familiale
; la poursuite n’est possible que quinze jours après une interpellation du
délinquant par un officier de police judiciaire ou un huissier).
13
André VARINARD, La prescription de l’action publique (sa nature juridique, droit matériel,
droit formel), Thèse, Lyon, 1973.
o 3 ans en matière de délits, sauf si la loi en décide autrement. Il
existe en effet des délits pour lesquels le délai de prescription
est fixé à 7 ans. Il en est ainsi pour les infractions prévues aux
articles 152 et 153 du Code pénal14 et par la loi n° 2018-02 du
23 février 2018 relative à la répression du faux monnayage et
des autres atteintes aux signes monétaires15 ;
o 1 an dans le cas d’une contravention.
14
Il s’agit des cas de détournements, de soustractions et d’escroqueries portant sur les
deniers publics.
15 JO n° 7095 du 14 mai 2018 ; voir article 25 de cette loi.
PARAGRAPHE 2 - L’OBJET ACCESSOIRE : L’ACTION CIVILE
Dans la procédure pénale, l’action civile est celle ouverte aux particuliers victimes
d’infractions. L’existence de cette action (A) doit être bien comprise pour mieux en
appréhender les modalités d’exercice (B).
L’action civile a ainsi pour objet exclusif la réparation du dommage causé par
l’infraction16.
Il faut distinguer l’action des personnes physiques (a) de celle des groupements (b).
✓ Pour les personnes physiques : le préjudice personnel est celui subi par la
victime dans son intégrité physique, dans son patrimoine ou dans son honneur
(ex : la victime d’un vol peut se constituer partie civile parce qu’elle a subi une
atteinte dans son patrimoine).
16
Fernand BOULAN, « Le double visage de l’action civile exercée devant la juridiction
répressive », JCP, 1973, I, 2563 ; Joseph GRANIER, « Quelques réflexions sur l’action civile
», JCP 1957, I, 1386 ; J. VIDAL, « Observations sur la nature juridique de l’action civile »,
RSC, 1963, p. 481 et s.
17
Crim. 25 février 1897, S. 1898.1. 201, J.-A. ROUX, 11 décembre 1969, D. 1970, 156.
préjudice personnel18. Dans ce cas, ces héritiers sont titulaires d’une action qui
leur est propre. // Victime décédée après l’infraction et que celle-ci n’est pas
la cause directe du décès, les héritiers n’ont pas d’action propre, ils ne peuvent
exercer que l’action appartenant à la victime en vertu du mécanisme de la
succession19.
Dans cette hypothèse, la question s’est posée de savoir si les héritiers peuvent, en cette
qualité, mettre en mouvement l’action publique. Les solutions admises conduisent à
faire les distinctions suivantes :
✓ La victime décédée a déjà exercé l’action civile avant son décès en cours
d’instance ; dans ce cas, les héritiers peuvent continuer l’action déjà entamée
pour obtenir réparation du préjudice causé à la victime.
✓ La victime est décédée sans avoir exercé l’action civile et l’action publique n’a
pas été mise en mouvement par le parquet, la jurisprudence décide que
« l’action publique n’ayant été mise en mouvement ni par le ministère public ni
par la victime, seule la voie civile est ouverte à l’hériter »20. Cependant, si l’action
publique a été déclenchée par le ministère public21 ; l’action civile des héritiers
est recevable à la condition que la victime n’ait pas renoncé à l’action civile.
18
La nature du préjudice peut cependant susciter des discussions.
19
En vertu de l’article 407 du Code de la famille, les héritiers légitimes naturels et le
conjoint survivant sont saisis de plein droit des actions du défunt sous l’obligation
d’acquitter toutes les charges de la succession. La Cour de cassation française, Assemblée
plénière, arrêt n° 566 du 9 mai 2008 a ainsi décidé que « toute personne victime d’un
dommage, quelle qu’en soit la nature, a droit d’en obtenir réparation de celui qui l’a causé
par sa faute ; que le droit à réparation du préjudice éprouvé par la victime avant son décès,
étant né dans son patrimoine, se transmet à ses héritiers ».
20
Cass. Ass. Plén. 9 mai 2008, n°06-85.751, D. 2008, AJ. 1415,note Léna ; AJ pénal 2008,
366, Obs. Claire Saas.
21
Directement ou au vu de la constitution de partie civile.
22 Jean Larguier, L’action publique menacée (à propos de l’action civile des associations
✓ L’action civile étant accessoire, la victime a un droit d’option pour choisir entre
exercer son action devant le juge civil ou devant le juge pénal (droit d’option
prévu par l’article 4 CPP
✓ Cette option est exclue dans certains cas : infractions en matière de presse.
En dehors de ces situations exceptionnelles, la partie civile peut exercer son action
devant la juridiction répressive (a) ou l’exercer devant la juridiction civile (b).
Le choix de la voie répressive procure ainsi des facilités de preuve. La victime profite
des pouvoirs d’investigations du magistrat instructeur qui a de larges prérogatives de
recherche des éléments de preuve de nature à prouver la matérialité des faits reprochés
à l’inculpé.
23
Le changement laisserait penser que la victime est brusquement prise d’un sentiment
de défiance à l’égard de la juridiction qu’elle-même avait saisie, défiance qui lui viendrait
de ce qu’elle paraît craindre que cette juridiction ne lui donne pas une suffisante
satisfaction ; or il ne faut pas que son adversaire ait à pâtir des erreurs d’orientation qu’elle
a faites. L’on justifie également l’interdiction de renoncer à la voie civile pour la voie pénale
par une sorte d’humanisme manifestée à l’égard de la personne poursuivie. V. Ch.
FREYRIA, « L’application en jurisprudence de la règle electa una via », RSC, 1951, p. 213.
✓ Article 5 du Code de procédure pénale : la partie qui a exercé son action
devant la juridiction civile compétente ne peut la porter devant la juridiction
répressive. Il n’en est autrement que si celle-ci a été saisie par le ministère public
avant que le jugement sur le fond ait été rendu par la juridiction civile. Mais, il
résulte de ce texte que seul le choix de la voie civile est irrévocable ; ce qui veut
dire que celle de la voie pénale est révocable.
Les principes directeurs consacrés dans la procédure pénale sont nombreux et tendent,
tous, à la protection de l’individu. Ils s’expriment, de manière plus visible, à travers
plusieurs principes que sont notamment :
- la présomption d’innocence ;
- la liberté de la preuve ;
- les droits de la défense.
Il convient dès lors de voir le contenu des principes directeurs de la procédure pénale
en étudiant ceux protecteurs des droits de la défense (paragraphe 1) et ceux relatifs à
la présomption d’innocence et de la liberté de la preuve (paragraphe 2).
24
Sauf dans certains cas particuliers.
Paragraphe I : Les principes protecteurs des droits de la défense
A- Le principe du contradictoire
Il implique que les parties soient mises en mesure de discuter les différents éléments
du dossier. Autrement dit, il consiste à imposer un débat entre les parties avant la
décision du juge.
25
Notamment par le Vocabulaire juridique d’Henri Capitant de 1930.
26
V. G. TAUPICA-NOUVEL et A. BOTTON, « La réforme du droit à l’information en procédure
pénale », JCP 2014, doctr. p.1351 et s.
27
Il faut cependant remarquer que l’appartenance du principe du contradictoire aux droits
de la défense admise de manière unanime. Pour autant, cette incertitude n’a pas de
véritable incidence sur le contenu du principe du contradictoire et il est possible de le
présenter comme faisant partie des droits de la défense à l’image de beaucoup de décisions
de la Cour européenne des droits de l’homme.
28
L’on retrouve ce principe dans les presque toutes les procédures : civile, sociale,
administrative.
Le principe du contradictoire est intimement lié à l'équilibre des droits des parties. Un
débat contradictoire ne peut avoir de sens que si toutes les parties ont pris
connaissance des mêmes éléments.
Le droit à l’assistance d’un avocat est une dimension fondamentale des droits de la
défense. Il est ainsi consacré par la Charte africaine des droits de l’homme et des
peuples qui stipule en son article 7, 1. « Toute personne a droit à ce que sa cause soit
entendue. Ce droit comprend: (…) c) le droit à la défense, y compris celui de se faire
assister par un défenseur de son choix ». L’article 9 de la Constitution y renvoie lorsqu’il
dispose que la défense est un droit absolu.
Au plan communautaire, le droit à l’assistance d’un conseil est prévu par le Règlement
UEMOA. Aux termes de l’article 5 de ce texte, « Les avocats assistent leurs clients dès
leur interpellation, durant l’enquête préliminaire, dans les locaux de la police, de la
gendarmerie ou devant le parquet (…). Les avocats assistent et défendent leurs clients
dès leur première comparution devant e juge d’instruction ».
29
Nous avons émis un avis plus relativisé, dans un article cosigné avec le Professeur Papa
T. FALL, notamment au sujet de l’applicabilité de l’article 5 du Règlement UEMOA.
30
JO n°6976 du 26 novembre 2016.
31
Le droit à l’égalité des armes n’est pas expressément invoqué en jurisprudence dans nos
juridictions. Mais il peut être envisagé dans l’exigence du procès équitable ou le respect
des droits de la défense. C’est en ce sens qu’en France, la chambre criminelle de la cour
de cassation a pu se fonder sur la violation du principe de l’égalité des armes en matière
de détention provisoire, pour censurer une chambre d’accusation qui avait entendu une
partie sans ordonner la comparution de toutes les parties : Crim. 18 décembre 1996 : Bull.
Paragraphe II : Les principes garantissant une bonne administration de la justice
pénale
Dans la mise en œuvre des règles de procédure pénale, il est requis que la personne
poursuivie bénéficie du principe de la présomption d’innocence. Ce principe
fondamental n’est pourtant pas expressément consacré par le Code de procédure
pénale32.
n° 476. Mais, dans cette situation, l’on peut s’appuyer sur le principe du contradictoire
pour arriver au même résultat.
32
Le principe est néanmoins suffisamment consacré dans des instruments de droit
international ayant une valeur constitutionnelle au Sénégal. Il en est ainsi de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen (art. 9) ; de la Déclaration universelle des droits de
l'homme (art. 11) ou de Charte africaine des droits de l'homme de l’Homme et des Peuples
(art. 6, § 2).
33
L’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme que « Tout
homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé
indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa
personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».
34
D’autres exceptions peuvent être recherchées notamment dans le code des douanes.
B- La liberté et la loyauté35 de la preuve en matière pénale
La preuve revêt dans le procès pénal une importance qu'elle n'a dans aucune autre
matière. D'abord, parce qu'elle touche aux garanties des personnes, notamment à la
présomption d'innocence à laquelle elle peut porter atteinte, comme elle concerne
directement l'ordre public. Ensuite, parce que toutes les règles de procédure pénale
n'ont, en définitive, d'autre finalité que la recherche et l'administration de la preuve.
La liberté de la preuve comporte deux dimensions. Elle signifie que les preuves pénales
peuvent être apportées par tous moyens. Il s’agit d’une liberté dans l’admissibilité des
modes de preuve. C’est ainsi que les autorités de poursuite sont habilitées à procéder
à des enquêtes, à des constats, à des perquisitions et saisies, aux écoutes téléphoniques
ou interrogatoires, dans les limites fixées par la loi.
35
Sophie Diagne NDIR, « La loyauté de la preuve en matière pénale », Annales Africaines,
Nouvelle Série, Vol. 1-avril 2019, pp. 1-36.
36
L’on peut ainsi considérer que c’est corrélativement et logiquement, que la liberté́ admise
dans la phase préparatoire à la poursuite et la poursuite elle-même se retrouve en aval de
ces deux phases.
constatations matérielles, les témoignages ou indices 37 pour fonder son intime
conviction. Il n’est en principe pas tenu par une force probante attachée à un mode de
preuve quelconque.
De manière chronologique, les organes de police (Section 1) semblent les plus visibles.
Au fur et à mesure que la procédure se déroule, d’autres organes vont intervenir ;
organes du ministère public ou organes d’instruction qui sont des organes de justice
(Section 2).
En matière pénale, l’auteur de l’infraction n’est pas toujours connu. Or, s’il est possible
de déclencher des poursuites contre une personne non dénommée (c’est-à-dire contre
X), le jugement ne peut être rendu que contre une personne identifiée.
Dès lors, le rôle confié aux organes de police est déterminant. Ces organes sont souvent
chargés, avant l’ouverture du procès pénal, de constater les infractions, de rechercher
les auteurs et de les déférer devant la justice. Le travail ainsi effectué permet aux
organes de justice (juge d’instruction, juge de jugement) d’ instruire les affaires et de
trancher les litiges.
37
Il peut également s’appuyer sur des « SMS » ou des courriers électroniques.
limitée par la nature de l’infraction commise. Par exemple, selon l’article 230 du code
des douanes, en matière douanière, les infractions sont constatées, à titre principal par
les fonctionnaires de l’administration des douanes tels que les inspecteurs, les officiers
contrôleurs et sous-officiers. La loi n° 93- 06 du 04 février 1996 portant Code forestier
donne également aux agents forestiers le pouvoir de constater les infractions en
matière forestière.
D’un point de vue organique, la police désigne l’ensemble des fonctionnaires chargés
de maintenir l’ordre public et de constater les infractions. On parle des fonctionnaires
de police.
Dans un sens fonctionnel, la police désigne l’ensemble des actes accomplis dans le
cadre de l’exécution des lois et des règlements et de la sanction de la violation de ces
règles. De ce point de vue, il convient de distinguer la police administrative de la police
judiciaire.
38
J. CATHELINEAU, « La gendarmerie », D. 1964, chr. 109 ; CHAUMEIL, La police judiciaire,
Paris, Sirey, 1953 ; BESSON, « La police judiciaire et le Code de procédure pénale »,
D.1958, chr. 159.
Pour une bonne appréhension du rôle des autorités de police judiciaire dans la
procédure pénale, il est utile de connaître la composition (A) et les attributions des
officiers de police judiciaire (B).
La liste des OPJ est fixée par l’article 15 du code de procédure pénale. Ce texte confère
la qualité d’officier de police judiciaire :
✓ aux officiers de gendarmerie (les officiers généraux à savoir les généraux de
brigade, de division et de corps d’armée, les officiers supérieurs, à savoir les
commandants, lieutenants-colonels et colonels et les officiers subalternes que
sont les sous-lieutenants, les lieutenants et les capitaines ;
✓ aux sous-officiers de gendarmerie exerçant les fonctions de commandant de
brigade, les commissaires de police, les officiers de police, les élèves officiers et
les sous-officiers de gendarmerie nominativement désignés par arrêté conjoint
du ministre de la Justice et du ministre des Forces armées après avis conforme
d’une commission ;
✓ aux fonctionnaires des cadres de police nominativement désignés par arrêté du
ministre de la Justice sur proposition des autorités dont ils relèvent, après avis
conforme d’une commission.
Selon l’article 16 du Code de procédure pénale, les Officiers de police judiciaire sont
chargés de rechercher et de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les
preuves et d’en rechercher les auteurs tant qu’une information n’est pas ouverte.
Lorsqu’une information est en effet ouverte, les Officiers de police judiciaire exécutent
ces attributions sur délégations des juridictions d’instruction et défèrent à leurs
réquisitions.
Les Officiers de police judiciaire sont chargés de recevoir les plaintes et dénonciations,
mais aussi de procéder aux enquêtes préliminaires.
De même, en cas de crime ou délit flagrant ils exercent, dans le cadre de l’enquête, les
prérogatives que la loi confère aux officiers de police judiciaire.
Ils peuvent également recevoir les déclarations des victimes désireuses de se constituer
partie civile. La constitution de partie peut donc se faire devant l’Officier de police
judiciaire (article 16 alinéa 4 CPP).
La loi leur reconnaît le droit de requérir directement le concours de la force publique
pour l’exécution de leur mission.
Seul l’Officier de police judiciaire peut exécuter les commissions rogatoires des juges
d’instruction (article 142 CPP) ou décider d’une mesure de garde à vue (article 55 CPP).
Sont agents de police judiciaire, lorsqu’ils n’ont pas la qualité d’Officier de police
judiciaire, les militaires de la gendarmerie et les membres des forces de police (article
19 du CPP).
Cependant les gendarmes sont habilités à dresser procès-verbal des infractions qu’ils
constatent et à recevoir, dans la forme requise, les déclarations qui leur sont faites par
toutes personnes susceptibles de leur fournir des indices, preuves et renseignements
sur les auteurs et complices de ces infractions. Ils n’ont cependant pas qualité pour
décider des mesures de garde à vue.
Dans l’exercice de leurs missions, les personnels de police judiciaire sont soumis à
un contrôle (A) qui peut aboutir à l’engagement de leur responsabilité (B).
A- Le contrôle de la police judiciaire
L’exercice des fonctions de police judiciaire implique des atteintes aux libertés
individuelles. C’est la raison pour laquelle le législateur a organisé des mécanismes de
contrôle de la police judiciaire par les autorités judiciaires.
Dans le cadre de ce contrôle, la chambre d’accusation est saisie soit par le procureur
général ou par son président ; elle peut même se saisir d’office à l’occasion de l’examen
d’une procédure.
Dans l’exercice de ses fonctions, l’Officier de police judiciaire peut voir sa responsabilité
engagée.
Les Officiers de police judiciaire peuvent également engager leur responsabilité civile
lorsqu’ils commettent des fautes civiles dans l’exercice de leurs fonctions dans les
conditions du droit commun (articles 118 et suivants du Code des obligations civiles et
commerciales).
Ils peuvent aussi engager leur responsabilité pénale. Selon l’article 216 du Code de
procédure pénale, si la chambre d’accusation estime que l’officier de police judiciaire
a commis une infraction à la loi pénale (séquestration arbitraire, torture, corruption,
etc…) , elle ordonne en outre la transmission du dossier au Procureur général.
La procédure à suivre est réglée par les articles 661 et suivants du code de procédure
pénale.
Les organes de justice sont chargés de trancher les litiges qui s’élèvent au cours du
procès pénal. Il existe deux types d’organes de justice chargés de fonctions
juridictionnelles. Il s’agit d’une part des organes représentant le ministère public
(Paragraphe I) et d’autre part de ceux qui sont chargés de l’instruction des affaires
(Paragraphe II). Les organes de jugement étant consacrés par ailleurs dans la phase
de jugement des infractions.
Le ministère public, organisé sous forme de Parquets, est constitué des magistrats du
parquet encore appelés « magistrats debout » parce qu’ils se lèvent à l’audience pour
prendre leurs réquisitions 39. Le rôle important que joue le ministère public dans le
déroulement de la procédure pénale justifie qu’il soit nécessaire d’étudier son
organisation (A) avant d’étudier ses caractères (B).
Auprès de la cour d’appel, le ministère public est représenté par le Procureur Général
en personne, ou par ses substituts que l’on appelle substituts généraux ou avocats
généraux selon leur grade.
39
J. P. NADAL, « Le ministère public face à certains impératifs », RSC, 1973, p. 492.
2. Le ministère public près les juridictions d’exception
Devant la Haute Cour de Justice, les fonctions du ministère public sont assurées par le
Procureur Général près la cour suprême alors que devant la commission d’instruction
de la haute cour de justice, celles-ci sont dévolues au Procureur Général près la Cour
d’Appel de Dakar.
Devant le tribunal pour enfants, l’article 570, alinéa 3 du code de procédure pénale
prévoit que le ministère public est assuré par un substitut du Procureur de la
République chargé cumulativement avec ses fonctions, des poursuites et du règlement
des affaires concernant les mineurs.
Les magistrats du ministère public sont régis par des règles statutaires qui présentent
des spécificités par rapport à la condition des magistrats du siège. Le ministère public
est ainsi caractérisé par la hiérarchie (1), l’indivisibilité (2) l’irresponsabilité (3) et le
caractère irrécusable (4).
1. La hiérarchie
40
J.O. N° 6986 du mercredi 18 janvier 2017.
la direction et le contrôle de leurs supérieurs hiérarchiques et sous l’autorité du Garde
des Sceaux, Ministre de la Justice.
Par ailleurs, il résulte de l’article 29 du Code procédure pénale que le Procureur général
a autorité sur tous les magistrats du ministère public du ressort de la cour d’appel. A
l'égard de ces magistrats, le Procureur général a les mêmes prérogatives que celles
reconnues au ministre de la Justice. Il est donc le chef hiérarchique de tous les membres
du ministère public exerçant dans le ressort de sa Cour d’Appel.
Enfin, il convient de préciser que, lorsqu’il exerce les fonctions du ministère public, le
président du tribunal d’instance demeure sous le contrôle du Procureur de la
République près le tribunal de grande instance du ressort 43.
Le ministère public est ainsi tenu de prendre des réquisitions écrites conformes aux
instructions qui lui sont données par ses supérieurs hiérarchiques.
D’une manière général le Procureur général exerce un pouvoir de direction sur les
Procureurs de la République du ressort de sa cour d’appel. Ceux-ci ont les mêmes
prérogatives à l’égard de leurs substituts et ainsi que sur leurs délégués.
41
Article 28 du code de procédure pénale.
42
M. DELMAS-MARTY, « La politique pénale est-elle une politique publique comme les
autres ? », RSC, janvier-mars 1994, p. 151 ; V. également, Y. AGUILA, « La politique
pénale est-elle une politique publique comme les autres ? », Rev. Adm., 1993, p. 7.
43
Article 38 du code de procédure pénale.
2. L’indivisibilité
De même, un acte portant mention du Procureur de la République peut très bien être
signé par l’un de ses substituts ou délégué.
Il en est autrement pour les magistrats du siège qui à l’occasion du jugement d’une
affaire, sont tenus de poursuivre leur office jusqu’au prononcé de la décision.
3. L’irresponsabilité
Mais, cette irresponsabilité n’est pas totale. S’il commet une faute personnelle, sa
responsabilité civile peut être mise en jeu, comme pour les magistrats du siège, par la
procédure de prise à partie.
S’il commet une infraction, il pourra être poursuivi, mais il bénéficie d’un privilège de
juridiction.
4. Le caractère irrécusable
Le ministère public, en tant que partie au procès pénal, est irrécusable. La récusation
est l’acte par lequel un plaideur refuse d’être jugé par ou en présence d’un magistrat
dont il conteste l’impartialité notamment en raison des liens qui existent entre ce
magistrat et l’autre partie 44.
En effet, alors qu’un magistrat du siège peut être récusé aussi ben en matière civile que
pénale, le magistrat du parquet ne peut être récusé. Le plaideur ne peut récuser son
adversaire45.
44
V. Vocabulaire juridique H CAPITANT. Il n’empêche qu’un magistrat du parquet puisse
décider de lui-même de s’abstenir de participer au jugement d’une affaire.
45
VIALA, « Le Ministère Public peut-il être récusé ? », Gaz. Pal 1980, I, doc. 163.
Paragraphe I : Les organes d’instruction
Les juridictions d’instruction n’interviennent pas forcément dans toutes les affaires. Il
existe en effet des affaires qui sont portées directement devant les juridictions de
jugement. Par exemple, les contraventions et les délits qui ne présentent pas de
difficultés sont jugés directement en citation directe ou en flagrant délit.
Il existe une juridiction d’instruction du premier degré, à savoir le juge d’instruction (I)
et une juridiction d’instruction du second degré : la chambre d’accusation (II).
Le juge d’instruction est un magistrat du siège 46. En tant que tel, il bénéficie de toutes
les garanties des magistrats du siège. La protection statutaire du juge d’instruction se
manifeste à travers les dispositions régissant sa nomination et son indépendance. Il
existe un juge d’instruction dans chaque tribunal régional. Selon l’article 78 de la loi
organique n° 2017-10 du 17 janvier 2017, le juge d’instruction est nommé par arrêté
du Garde des Sceaux ministre de la Justice pour une période de trois ans renouvelables.
En cas d’empêchement, il est remplacé par un juge provisoirement désigné par
ordonnance du président du tribunal de grande instance. Cette situation se produit
exceptionnellement puisque dans la plupart du temps, il y a plusieurs juges
d’instruction dans les tribunaux de grande instance.
Lorsqu’il, dans un tribunal d’instance il n’y a qu’un seul juge ; celui-ci exerce les
fonctions de juge d’instruction qu’il cumule avec les fonctions de juge de jugement et
éventuellement de délégué du procureur de la République47.
46
Patrick Maistre du Chambon, Le juge d’instruction, 3e édition, Dalloz, 1985 ; Bernard
BOULOC, « Le rôle du juge d’instruction dans la recherche de la vérité », Petites affiches,
n° 130, du 29 octobre 1986 ; M. GARREL, « La juridiction d’instruction est-elle
indispensable ? », JCP, 1986, I, 3266.
47
On a pu qualifier le président du tribunal d’instance investi des pouvoirs de juge
d’instruction, de juge de jugement et de délégué du procureur de « monstre juridique ».
La loi a organisé un dispositif tendant à garantir l’indépendance du juge d’instruction
aussi bien par rapport au Procureur de la République (a) que par rapport à la chambre
d’accusation (b).
D’autre part pour certaines infractions jugées graves, le juge d’instruction est lié par
les réquisitions du ministère public.
48
Sur l’ensemble de la question, V. M. DIOP, « Les limites au pouvoir d’appréciation du
juge pénal », in « Actes du séminaire liberté d’appréciation du juge », RSD, n° 28, janvier,
février mars 1983, p. 13 et ss. ; M. NDIAYE, « Les atteintes à la liberté d’appréciation du
juge relativement à l’article 140 du Code de procédure pénale », in « Actes du séminaire
liberté d’appréciation du juge », RSD, n° 28, janvier, février mars 1983, p. 59 et s.
d’une affaire dure plus de 6 mois, le juge d’instruction fait un rapport circonstancié
adressé au président de la Chambre d’accusation.
La chambre d’accusation est la juridiction d’instruction du second degré 49. Elle est
réglementée par les articles 185 à 217 du Code de procédure pénale. Ces textes
prévoient la composition (A) et les attributions de la chambre d’accusation (B).
En tant que juridiction d’instruction du second degré, la chambre d’accusation est juge
d’appel des ordonnances du juge d’instruction et juge de la régularité de la procédure
suivie devant celui-ci. Elle a ainsi le pouvoir d’infirmer une ordonnance du juge
d’instruction.
Par ailleurs la chambre d’accusation est l’organe disciplinaire des Officiers de police
judiciaire et peut infliger des sanctions à l’encontre de ceux d’entre eux qui ne
respecteraient pas les règles liées à la délicatesse de leurs fonctions.
49
Wilfrid JEANDIDIER, La juridiction d’instruction du second degré, Thèse Nancy, 1975,
édition Cujas, 1975 ; P. CHAMBON, La chambre d’accusation, Dalloz, 1978.
La chambre d’accusation est par également compétente pour donner un avis dans les
procédures d’extradition50.
Elle est juge du règlement des conflits de compétence entre deux juges d’instruction,
deux tribunaux de simple police, deux tribunaux correctionnels se trouvant dans le
ressort d’une même Cour d’Appel.
50
L’extradition est une procédure par laquelle un État peut être amené à remettre un
individu, sous le coup de poursuites ou d’une condamnation pénales et se trouvant sur son
territoire, à un autre Etat qui le réclame pour y être jugé ou subir sa peine.