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L’action publique : « action pour l’application des peines »8 = article premier du Code
de procédure pénale.
- Conditions positives : les faits doivent être constitutifs d’une infraction 9. Ainsi,
l’action publique n’existe que si une infraction pénale a été commise : vol,
meurtre abus de confiance etc. Lorsque les faits ne supportent aucune
qualification pénale (faute civile par exemple) l’action publique n’existe pas 10.
général.
10Lorsque les faits ne constituent pas une infraction, l’Officier de police judiciaire ou le
procureur de la République doit classer le dossier sans suite. Le juge d’instruction saisi doit
rendre une ordonnance de non informer et la juridiction de jugement doit rendre une
décision de relaxe pure et simple.
7
Ces conditions apparaissent dans le déclenchement de l’action publique.
I- LE DÉCLENCHEMENT DE L’ACTION PUBLIQUE
L’action publique pour l’application des peines est mise en mouvement (…) par les
magistrats ou les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi = article premier
CPP.
Elle est également confiée à certaines dans les conditions définies par la loi.
a) La citation directe
La citation directe est la possibilité donnée aux parties de saisir directement les
juridictions pénales de jugement en citant l'auteur supposé de l'infraction à
comparaître devant ladite juridiction de jugement.
Elle est utilisée lorsque l’infraction dont la répression est poursuivie n’exige pas une
information préalable. Il en est ainsi en ce qui concerne les contraventions ou dans les
cas de délits pour le jugement desquels l’ouverture d’une information n’est pas jugée
nécessaire.
Il s’agit ainsi d’une procédure qui permet soit au ministère public (citation directe à la
requête du Parquet) soit à la victime de l’infraction (citation directe à la requête de la
victime) de saisir directement la juridiction de jugement en informant le prévenu par
exploit d’huissier de la date et du lieu de l’audience ainsi que des faits à lui reprochés11.
L’exploit doit également préciser les textes applicables. Il est remis à l’intéressé contre
signature de l’original.
11 BATIFFOL H., « La citation directe », Rev. crit. Législ. et jurisp., 1930, p. 472.
8
l’exécution sera confiée à un de ses membres qui peut donner des commissions
rogatoires ou des délégations judiciaires dans le cadre de sa mission.
b) Le réquisitoire introductif
Le réquisitoire est dit introductif13 dès lors qu’il permet de saisir le juge d’instruction
et, en même temps, de déclencher l’action publique.
Le réquisitoire peut être délivré soit contre une ou des personnes dénommées
(réquisitoire nominatif)14 soit contre un inconnu que le juge d’instruction devra
identifier.
Il doit cependant obligatoirement qualifier les faits et viser les textes de loi applicables
ce d’autant qu’il fixe la saisine du juge d’instruction.
En matière correctionnelle, la voie de l’information est utilisée lorsque les faits sont
complexes et nécessitent des investigations poussées, lorsque l’auteur est inconnu ou
en fuite. Elle peut également être utilisée en matière de délits politiques ou de presse.
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Il s’agit d’une procédure de comparution rapide devant la juridiction de jugement qui
est règlementée pour l’essentiel par les articles 63 et 381 à 385 du code de procédure
pénale16.
Les articles 381 et 382 du code de procédure pénale prévoient que le prévenu doit être
traduit sur le champ à l’audience du tribunal et s’il n’est point tenu d’audience, il est
déféré à l’audience du lendemain, le tribunal étant au besoin spécialement convoqué
à la requête du ministère public.
Dans la pratique, le ministère public se limite à enrôler l’affaire à une audience assez
proche, le mis en cause comparaissant devant la juridiction de jugement dans la
semaine de son placement sous mandat de dépôt.
Il arrive cependant que d’autres personnes soient habilitées par la loi à mettre disposer
d’un pouvoir pénal. Il en est ainsi des victimes d’infractions pénales et de certains
fonctionnaires des administrations.
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La plainte avec constitution de l’action publique est un mode spécifique à la victime.
Elle a été admise, pour la première, par la jurisprudence dans l’affaire Placet 18.
En tout état de cause, il doit prendre une décision (A). Mais, dans l’hypothèse où les
poursuites méritent d’être exercées, le magistrat du ministère public doit s’assurer qu’il
n’existe pas d’obstacles (B).
L’abandon des poursuites peut intervenir soit dans le cadre d’un classement sans suite
soit après une médiation pénale.
Il doit cependant notifier à la victime sa décision dans les huit jours de celle-ci, précisant
que le plaignant peut, s’il le désire, prendre l’initiative de mettre l’action publique en
mouvement en se constituant partie civile. Ce pouvoir est une manifestation de la règle
de l’opportunité des poursuites qui permet au Procureur de la République d’apprécier
librement la suite à donner aux plaintes, dénonciations et autres enquêtes20.
Cette règle de l’opportunité des poursuites comporte néanmoins des limites prévues
par la loi.
11
- D’abord, la poursuite de certaines infractions est subordonnée à une plainte
préalable de la victime (adultère, diffamation contre un particulier, vol entre
ascendants et descendants).
b) La médiation pénale
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La prescription : l’action publique doit être mise en mouvement dans un certain délai,
à défaut elle est prescrite. La prescription dont il s’agit ici est la prescription de l’action
publique21 qu’il faut distinguer de la prescription de la peine.
La prescription de l’action publique se justifie d’une part par le fait qu’au bout d’un
certain temps il est préférable d’oublier l’infraction dans un intérêt de paix et de
tranquillité publique.
D’autre part, avec le temps les preuves s’effacent et l’œuvre de justice se fait moins
sûre.
Lorsque l’infraction est une contravention, le délai est de prescription est d’un an.
Dans tous les cas, le délai de prescription peut être interrompu ou suspendu.
L’abrogation de la loi pénale. Elle enlève au fait son caractère délictueux et entraine
la disparition de l’élément légal. L’action publique est donc éteinte lorsque la loi pénale
qui prévoyait un acte est abrogée avant l’exercice des poursuites.
21 André VARINARD, La prescription de l’action publique (sa nature juridique, droit matériel,
droit formel), Thèse, Lyon, 1973.
22 Il s’agit des cas de détournements, de soustractions et d’escroqueries portant sur les
deniers publics.
13
L’autorité de la chose jugée. Lorsqu’une décision est intervenue sur l’action publique
celle-ci s’éteint et il n’est plus possible d’exercer à nouveau des poursuites contre le
délinquant en raison des mêmes faits, même si on adopte une qualification différente.
Toutefois par dérogation à cette règle le retrait de la plainte éteint l’action publique
dans les cas où la plainte est une condition d’exercice des poursuites. Il en est ainsi en
matière d’immunité familiale (article 365 CP), de diffamation contre un particulier et
d’adultère.
Dans la procédure pénale, l’action civile est celle ouverte aux particuliers victimes
d’infractions. L’existence de cette action (A) doit être bien comprise pour mieux en
appréhender les modalités d’exercice (B).
L’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction appartient à tous ceux
qui ont personnellement souffert du dommage causé par l’infraction = article 2 CPP.
L’action civile a ainsi pour objet exclusif la réparation du dommage causé par
l’infraction23.
24 Crim. 25 février 1897, S. 1898.1. 201, J.-A. ROUX, 11 décembre 1969, D. 1970, 156.
14
Il faut distinguer l’action des personnes physiques (a) de celle des groupements (b).
Pour les personnes physiques, le préjudice personnel est celui subi par la victime dans
son intégrité physique, dans son patrimoine ou dans son honneur. Par exemple la
victime d’un vol peut se constituer partie civile parce qu’elle a subi une atteinte dans
son patrimoine.
L’exigence d’un préjudice personnel pose le débat de l’action des héritiers de la victime.
Il faut en effet distinguer suivant que la victime est décédée immédiatement des suites
de l’infraction ou après la commission de l’infraction.
Si la victime est décédée des suites directes de l’infraction, les héritiers peuvent se
prévaloir d’un préjudice personnel 25. Dans ce cas, il est titulaire d’une action propre.
Par contre, dans l’hypothèse où la victime est décédée après l’infraction et que celle-ci
n’est pas la cause directe du décès, les héritiers n’ont pas d’action propre, ils ne peuvent
exercer que l’action appartenant à la victime en vertu du mécanisme de la succession 26.
Dans cette hypothèse, la question s’est posée de savoir si les héritiers peut, en cette
qualité, mettre en mouvement l’action publique. Les solutions admises conduisent à
faire les distinctions suivantes :
- La victime décédée a déjà exercé l’action civile avant son décès en cours
d’instance ; dans ce cas, les héritiers peuvent continuer l’action déjà entamée
pour obtenir réparation du préjudice causé à la victime.
- La victime est décédée sans avoir exercé l’action civile et l’action publique n’a
pas été mise en mouvement par le parquet, la jurisprudence décide que
15
« l’action publique n’ayant été mise en mouvement ni par le ministère public ni
par la victime, seule la voie civile est ouverte à l’hériter »27. Cependant, si l’action
publique a été déclenchée par le ministère public28 ; l’action civile des héritiers
est recevable à la condition que la victime n’ait pas renoncé à l’action civile.
Lorsque le groupement agit en justice pour défendre des intérêts collectifs qu’il a pour
mission de protéger, il est nécessaire de déterminer s’il a la qualité requise. Cette
situation vise surtout le cas des syndicats et des associations.
27 Cass. Ass. Plén. 9 mai 2008, n°06-85.751, D. 2008, AJ. 1415,note Léna ; AJ pénal 2008,
366, Obs. C. Saas.
28 Directement ou au vu de la constitution de partie civile.
29 Jean Larguier, L’action publique menacée (à propos de l’action civile des associations
devant les juridictions répressives), D. 1958, Chron. p. 29.
30 Mais, les groupements ne se prévalent pas toujours d’un intérêt personnel.
31 L’existence de la personnalité juridique dépend de la nature du groupement. S’il s’agit
par exemple d’une société, elle doit être immatriculée au Registre du commerce et du
crédit mobilier. S’il s’agit d’une association ou d’une fondation, les procédures sont
différentes.
16
S’il s’agit de syndicat de salariés, il est habilité à exercer l’action civile chaque fois que
l’infraction a eu pour objet la violation de la réglementation protectrice des intérêts
matériels et moraux des travailleurs. Par exemple, une infraction d’entrave à la liberté
du travail.
Pour les syndicats patronaux, ils peuvent exercer l’action civile pour défendre le respect
des conditions d’accès à la profession. Par exemple un ordre de médecins peut exercer
l’action civile en cas de commission d’une infraction d’exercice illégale de la médecine.
S’agissant des associations, il n’y a pas un texte de portée générale à l’image de l’article
L. 15 du code du travail leur permettant de se constituer partie civile pour défendre les
intérêts de leurs membres.
Mais, de plus en plus le législateur sénégalais, inspiré par son homologue français,
utilise la technique de l’habilitation ponctuelle et admet la recevabilité de la
constitution de partie civile d’associations défendant des intérêts collectifs. Il en est
ainsi des associations de défense de l’environnement mais uniquement pour les
infractions portant atteinte à l’environnement 32.
En principe, la victime de l’infraction a un droit d’option reconnu par la loi. Elle peut
choisir d’exercer son action civile devant le tribunal civil ou devant la juridiction pénale.
Ce droit d’option est consacré par l’article 4 du Code de procédure pénale. Selon ce
texte l’action civile peut être aussi exercée séparément de l’action publique.
Mais, il arrive que le législateur ferme la voie civile, en réservant seulement une
possibilité d’exercice de l’action civile devant le tribunal pénal. Il en est ainsi en matière
d’infractions de presse.
En dehors de ces situations exceptionnelles, la partie civile peut exercer son action
devant la juridiction répressive (a) ou l’exercer devant la juridiction civile (b).
32V. Jean CALAIS AULOY, « Les actions en justice des associations de consommateurs »,
D. 1988, Chr. p. 193 ; voir également René VASSAS, « L’action civile des associations de
consommateurs », Gaz. Pal, 20 avril 1983.
17
L’exercice de l’action civile devant la juridiction répressive présente des avantages
certains. Elle apparaît en effet moins coûteuse et plus pratique 33 pour les victimes que
l’action devant le juge civil puisqu’elle leur permet de bénéficier des preuves réunies
pendant l’enquête de police et l’instruction, alors que, au civil, c’est le demandeur qui
doit apporter la preuve et supporter les frais des éventuelles expertises.
Par ailleurs, la constitution de partie civile donne à la victime une place au procès pénal
dont elle peut ainsi contrôler le déroulement. Cette possibilité est de plus en plus
recherchée par les victimes d’infractions qui portent un intérêt croissant à la découverte
des causes du délit et tiennent souvent à être associées à toutes les phases du procès,
y compris à celles qui relatives à l’analyse de la culpabilité et le choix de la peine 34.
Le choix de la voie répressive procure ainsi des facilités de preuve. La victime profite
des pouvoirs d’investigations du magistrat instructeur qui a de larges prérogatives de
recherche des éléments de preuve de nature à prouver la matérialité des faits reprochés
à l’inculpé.
La victime peut également choisir de porter son action civile devant le tribunal civil.
Mais ce choix emporte un certain nombre d’incidences sur le déroulement de la
procédure.
En principe, l’option faite par la victime de porter son action devant la juridiction civile
est définitive et irrévocable. La victime ne peut pas revenir sur le choix qu’elle a fait.
Ayant porté son action devant une juridiction civile, elle ne peut pas s’en désister pour
saisir la juridiction répressive. C’est ce que l’on exprime par la maxime traditionnelle :
« electa una, via non datur recursus ad alteram », d’où le nom donné à cette règle : la
règle electa une via35.
Ce principe est consacré par l’article 5 du Code de procédure pénale selon lequel la
partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente ne peut la porter
devant la juridiction répressive. Il n’en est autrement que si celle-ci a été saisie par le
ministère public avant que le jugement sur le fond ait été rendu par la juridiction civile.
33 Maurice PATIN « L’action civile devant les tribunaux répressifs », Rec. Gén. Lois, 1957,
p. 8.
34 Il est ainsi fréquent de voir des victimes d’infractions pénales réclamer plus de sévérité
et chercher à exercer une influence sur le déroulement du procès.
35 Le changement laisserait penser que la victime brusquement prise d’un sentiment de
défiance à l’égard de la juridiction qu’elle-même avait saisie, défiance qui lui viendrait de
ce qu’elle paraît craindre que cette juridiction ne lui donne pas une suffisante satisfaction ;
or il ne faut pas que son adversaire ait à pâtir des erreurs d’orientation qu’elle a faites.
L’on justifie également l’interdiction de renoncer à la voie civile pour la voie pénale par une
sorte d’humanisme manifestée à l’égard de la personne poursuivie. V. Ch. FREYRIA, «
L’application en jurisprudence de la règle electa una via », RSC, 1951, p. 213.
18
Mais, il résulte de ce texte que seule le choix de la voie civile est irrévocable ; ce qui
veut dire que celle de la voie pénale est révocable. Cette règle est une faveur faite au
prévenu puisque l’on considère que la voie répressive est une voie plus ardue, exposant
ce dernier à des sanctions pénales.
La mise en œuvre de l’action civile est par ailleurs dominée par la prééminence de
l’action publique sur l’action civile. Cette prééminence s’exprime à travers deux règles :
la règle selon laquelle le criminel tient le civil en l’état et l’autorité de la chose jugée au
pénal sur le civil.
Le principe de l’autorité de la chose jugée du pénal sur le civil signifie que lorsque la
juridiction civile statue après la juridiction répressive, elle ne jouit pas d’une liberté
d’appréciation et de décision. La juridiction civile est en effet liée par ce qui a été jugé
au pénal.
Ainsi, lorsque le prévenu a été déclaré coupable d’occupation illégale d’un terrain
appartenant à autrui (article 423 du CP) devant le juge pénal, le tribunal civil saisi d’une
action en expulsion contre le prévenu sera tenu d’ordonner son expulsion.
Les principes directeurs de la procédure pénale sont définis comme l’ensemble des
règles de valeur universelle qui régissent la marche du procès pénal. Il s’agit des
normes qui encadrent la procédure pénale en vue de garantir le respect des droits de
la personne humaine.
L’article 7 de la Constitution dispose que « La personne humaine est sacrée. Elle est
inviolable. L’État a l’obligation de la respecter et de la protéger. Les doits ainsi reconnus
à la personne sont considérés par le constituant comme « base de toute communauté
humaine, de la paix et de la justice dans le monde37 ».
19
Les principes directeurs consacrés dans la procédure pénale sont nombreux et tendent,
tous, à la protection de l’individu. Ils s’expriment, de manière plus visible, à travers les
principes de la présomption d’innocence, de la liberté de la preuve (Paragraphe II) ou
des droits de la défense (Paragraphe I).
A- Le principe du contradictoire
20
Il implique que les parties soient mises en mesure de discuter les différents éléments
du dossier. Autrement dit, il consiste à imposer un débat entre les parties avant la
décision du juge.
Le principe du contradictoire est intimement lié à l'équilibre des droits des parties. Un
débat contradictoire ne peut avoir de sens que si toutes les parties ont pris
connaissance des mêmes éléments.
Le droit à l’assistance d’un avocat est une dimension fondamentale des droits de la
défense. Il est ainsi consacré par la Charte africaine des droits de l’homme et des
peuples qui stipule en son article 7, 1. « Toute personne a droit à ce que sa cause soit
entendue. Ce droit comprend: (…) c) le droit à la défense, y compris celui de se faire
assister par un défenseur de son choix ». L’article 9 de la Constitution y renvoie lorsqu’il
dispose que la défense est un droit absolu.
Au plan communautaire, le droit à l’assistance d’un conseil est prévu par le Règlement
UEMOA. Aux termes de l’article 5 de ce texte, « Les avocats assistent leurs clients dès
leur interpellation, durant l’enquête préliminaire, dans les locaux de la police, de la
gendarmerie ou devant le parquet (…). Les avocats assistent et défendent leurs clients
dès leur première comparution devant e juge d’instruction ».
42 Nous avons émis un avis plus relativisé, dans un article cosigné avec le Professeur Papa
T. FALL, notamment au sujet de l’applicabilité de l’article 5 du Règlement UEMOA.
43 JO n°6976 du 26 novembre 2016.
21
d’exercer un contrôle sur le caractère équitable du procès. 44 La consécration d’une
présomption d’innocence s’inscrit dans cette dynamique.
Dans la mise en œuvre des règles de procédure pénale, il est requis que la personne
poursuivie bénéficie du principe de la présomption d’innocence. Ce principe
fondamental n’est pourtant pas expressément consacré par le Code de procédure
pénale45.
44 Le droit à l’égalité des armes n’est pas expressément invoqué en jurisprudence dans nos
juridictions. Mais il peut être envisagé dans l’exigence du procès équitable ou le respect
des droits de la défense. C’est en ce sens qu’en France, la chambre criminelle de la cour
de cassation a pu se fonder sur la violation du principe de l’égalité des armes en matière
de détention provisoire, pour censurer une chambre d’accusation qui avait entendu une
partie sans ordonner la comparution de toutes les parties : Crim. 18 décembre 1996 : Bull.
n° 476. Mais, dans cette situation, l’on peut s’appuyer sur le principe du contradictoire
pour arriver au même résultat.
45 Le principe est néanmoins suffisamment consacré dans des instruments de droit
international ayant une valeur constitutionnelle au Sénégal. Il en est ainsi de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen (art. 9) ; de la Déclaration universelle des droits de
l'homme (art. 11) ou de Charte africaine des droits de l'homme de l’Homme et des Peuples
(art. 6, § 2).
46 L’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme que « Tout
homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé
indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa
personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».
22
personne concernée, le doute qui existerait sur sa culpabilité. Ainsi, à défaut de charges
suffisantes, le juge doit prononcer la relaxe. C’est tout le sens de l'adage in dubio pro
reo, qui trouve une application dans la phase de jugement.
La preuve revêt dans le procès pénal une importance qu'elle n'a dans aucune autre
matière. D'abord, parce qu'elle touche aux garanties des personnes, notamment à la
présomption d'innocence à laquelle elle peut porter atteinte, comme elle concerne
directement l'ordre public. Ensuite, parce que toutes les règles de procédure pénale
n'ont, en définitive, d'autre finalité que la recherche et l'administration de la preuve.
47D’autres exceptions peuvent être recherchées notamment dans le code des douanes.
48Sophie Diagne NDIR, « La loyauté de la preuve en matière pénale », Annales Africaines,
Nouvelle Série, Vol. 1-avril 2019, pp. 1-36.
23
Cette spécificité découle, notamment, des modes de rassemblement des preuves.
La liberté de la preuve comporte deux dimensions. Elle signifie que les preuves pénales
peuvent être apportées par tous moyens. Il s’agit d’une liberté dans l’admissibilité des
modes de preuve. C’est ainsi que les autorités de poursuite sont habilitées à procéder
à des enquêtes, à des constats, à des perquisitions et saisies, aux écoutes téléphoniques
ou interrogatoires, dans les limites fixées par la loi.
49L’on peut ainsi considérer que c’est corrélativement et logiquement, que la liberté́ admise
dans la phase préparatoire à la poursuite et la poursuite elle-même se retrouve en aval de
ces deux phases.
24
De manière chronologique, les organes de police (Section 1) semblent les plus visibles.
Au fur et à mesure que la procédure se déroule, d’autres organes vont intervenir ;
organes du ministère public ou organes d’instruction qui sont des organes de justice
(Section 2).
En matière pénale, l’auteur de l’infraction n’est pas toujours connu. Or, s’il est possible
de déclencher des poursuites contre une personne non dénommée (c’est à dire contre
X), le jugement ne peut être rendu que contre une personne identifiée.
Dès lors, le rôle confié aux organes de police est déterminant. Ces organes sont souvent
chargés, avant l’ouverture du procès pénal, de constater les infractions, de rechercher
les auteurs et de les déférer devant la justice. Le travail ainsi effectué permet aux
organes de justice (juge d’instruction, juge de jugement) d’ instruire les affaires et de
trancher les litiges.
D’un point de vue organique, la police désigne l’ensemble des fonctionnaires chargés
de maintenir l’ordre public et de constater les infractions. On parle des fonctionnaires
de police.
Dans un sens fonctionnel, la police désigne l’ensemble des actes accomplis dans le
cadre de l’exécution des lois et des règlements et de la sanction de la violation de ces
25
règles. De ce point de vue, il convient de distinguer la police administrative de la police
judiciaire.
Pour une bonne appréhension du rôle des autorités de police judiciaire dans la
procédure pénale, il est utile de connaître la composition (A) et les attributions des
officiers de police judiciaire (B).
La liste des OPJ est fixée par l’article 15 du Code de procédure pénale. Ce texte confère
la qualité d’officier de police judiciaire :
- aux officiers de gendarmerie (les officiers généraux à savoir les généraux de
brigade, de division et de corps d’armée, les officiers supérieurs, à savoir les
commandants, lieutenants colonels et colonels et les officiers subalternes que
sont les sous-lieutenants, les lieutenants et les capitaines ;
- aux sous-officiers de gendarmerie exerçant les fonctions de commandant de
brigade, les commissaires de police, les officiers de police, les élèves officiers et
les sous-officiers de gendarmerie nominativement désignés par arrêté conjoint
du ministre de la justice et du Ministre des chargé des Forces armées après avis
conforme d’une commission ;
- aux fonctionnaires des cadres de police nominativement désignés par arrêté du
ministre de la justice sur proposition des autorités dont ils relèvent, après avis
conforme d’une commission.
26
Selon l’article 16 du Code de procédure pénale, les Officiers de police judiciaire sont
chargés de rechercher et de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les
preuves et d’en rechercher les auteurs tant qu’une information n’est pas ouverte.
Lorsqu’une information est en effet ouverte, les Officiers de police judiciaire exécutent
ces attributions sur délégations des juridictions d’instruction et défèrent à leurs
réquisitions.
Les Officiers de police judiciaire sont chargés de recevoir les plaintes et dénonciations
mais aussi de procéder aux enquêtes préliminaires.
De même, en cas de crime ou délit flagrant ils exercent, dans le cadre de l’enquête, les
prérogatives que la loi confère aux officiers de police judiciaire.
Ils peuvent également recevoir les déclarations des victimes désireuses de se constituer
partie-civile. La constitution de partie peut donc se faire devant l’Officier de police
judiciaire (article 16 alinéa 4 CPP).
Seul l’Officier de police judiciaire peut exécuter les commissions rogatoires des juges
d’instruction (article 142 CPP) ou décider d’une mesure de garde à vue (article 55 CPP).
Sont agents de police judiciaire, lorsqu’ils n’ont pas la qualité d’Officier de police
judiciaire, les militaires de la gendarmerie et les membres des forces de police (article
19 du CPP).
27
- de seconder, dans l’exercice de leurs fonctions, les officiers de police judiciaire;
- de rendre compte à leurs chefs hiérarchiques de tous crimes, délits ou
contraventions dont ils ont connaissance;
- de constater, en se conformant aux ordres de leurs chefs, les infractions à la loi
pénale et de recueillir tous les renseignements en vue de découvrir les auteurs
de ces infractions, le tout dans le cadre et dans les formes prévus par les lois qui
leur sont propres.
Cependant les gendarmes sont habilités à dresser procès-verbal des infractions qu’ils
constatent et à recevoir, dans la forme requise, les déclarations qui leur sont faites par
toutes personnes susceptibles de leur fournir des indices, preuves et renseignements
sur les auteurs et complices de ces infractions. Ils n’ont cependant pas qualité pour
décider des mesures de garde à vue.
Dans l’exercice de leurs missions, les personnels de police judiciaire sont soumis à
un contrôle (A) qui peut aboutir à l’engagement de leur responsabilité (B).
L’exercice des fonctions de police judiciaire implique des atteintes aux libertés
individuelles. C’est la raison pour laquelle le législateur a organisé des mécanismes de
contrôle de la police judiciaire par les autorités judiciaires.
Dans le cadre de ce contrôle la chambre d’accusation est saisie soit par le procureur
général ou par son président ; elle peut même se saisir d’office à l’occasion de l’examen
d’une procédure.
Dans l’exercice de ses fonctions l’Officier de police judiciaire peut voir sa responsabilité
engagée.
28
Les Officiers de police judiciaire peuvent également engager leur responsabilité civile
lorsqu’ils commettent des fautes civiles dans l’exercice de leurs fonctions dans les
conditions du droit commun (articles 118 et suivants du Code des obligations civiles et
commerciales).
Ils peuvent aussi engager leur responsabilité pénale. Selon l’article 216 du Code de
procédure pénale, si la chambre d’accusation estime que l’officier de police judiciaire
a commis une infraction à la loi pénale (séquestration arbitraire, torture, corruption
etc…) , elle ordonne en outre la transmission du dossier au Procureur général.
La procédure à suivre est réglée par les articles 661 et suivants du code de procédure
pénale.
Les organes de justice sont chargés de juger les auteurs d’infractions à la loi pénale. Il
existe deux types d’organes de justice chargés de fonctions judiciaires. Il s’agit d’une
part des organes représentant le ministère public (Paragraphe I) et d’autre part de
ceux qui sont chargés de l’instruction des affaires (Paragraphe II). Les organes de
jugement étant consacrés par ailleurs dans la phase de jugement des infractions.
Le Ministère public, organisé sous forme de Parquets, est constitué des magistrats du
parquet encore appelés « magistrats debout » parce qu’ils se lèvent à l’audience pour
prendre leurs réquisitions 52. Le rôle important que joue le Ministère public dans le
déroulement de la procédure pénale justifie qu’il soit nécessaire d’étudier son
organisation (A) avant d’étudier ses caractères (B).
29
Procureur de la République près le tribunal D’INSTANCE, l’article 24 du code de
procédure pénale prévoit en son alinéa 2 que les fonctions du ministère public sont
assurées par le Président de cette juridiction, sous le contrôle direct du Procureur de la
République.
Auprès de la cour d’appel, le ministère public est représenté par le Procureur Général
en personne, ou par ses substituts que l’on appelle substituts généraux ou avocats
généraux selon leur grade.
Devant la Haute Cour de Justice, les fonctions du ministère public sont assurées par le
Procureur Général près la cour suprême alors que devant la commission d’instruction
de la haute cour de justice, celles-ci sont dévolues au Procureur Général près la Cour
d’Appel de Dakar.
Devant le tribunal pour enfants, l’article 570, alinéa 3 du code de procédure pénale
prévoit que le ministère public est assuré par un substitut du Procureur de la
République chargé cumulativement avec ses fonctions, des poursuites et du règlement
des affaires concernant les mineurs.
Les magistrats du Ministère Public sont régis par des règles statutaires qui présentent
des spécificités par rapport à la condition des magistrats du siège. Le Ministère public
30
est ainsi caractérisé par la hiérarchie (1), l’indivisibilité (2) l’irresponsabilité (3) et le
caractère irrécusable (4).
1. La hiérarchie
Par ailleurs, il résulte de l’article 29 du Code procédure pénale que le Procureur général
a autorité sur tous les magistrats du ministère public du ressort de la cour d’appel. A
l'égard de ces magistrats, le Procureur général a les mêmes prérogatives que celles
reconnues au Ministre de la Justice. Il est donc le chef hiérarchique de tous les membres
du ministère public exerçant dans le ressort de sa Cour d’Appel.
Enfin, il convient de préciser que, lorsqu’il exerce les fonctions du ministère public, le
président du tribunal d’instance demeure sous le contrôle du Procureur de la
République près le tribunal de grande instance du ressort 56.
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Le ministère public est ainsi tenu de prendre des réquisitions écrites conformes aux
instructions qui lui sont données par ses supérieurs hiérarchiques.
D’une manière général le Procureur général exerce un pouvoir de direction sur les
Procureurs de la République du ressort de sa cour d’appel. Ceux-ci ont les mêmes
prérogatives à l’égard de leurs substituts et ainsi que sur leurs délégués.
De même, un acte portant mention du Procureur de la République peut très bien être
signé par l’un de ses substituts ou délégué.
Il en est autrement pour les magistrats du siège qui à l’occasion du jugement d’une
affaire, sont tenus de poursuivre leur office jusqu’au prononcé de la décision.
3. L’irresponsabilité
Mais, cette irresponsabilité n’est pas totale. S’il commet une faute personnelle, sa
responsabilité civile peut être mise en jeu, comme pour les magistrats du siège, par la
procédure de prise à partie.
S’il commet une infraction, il pourra être poursuivi mais il bénéficie d’un privilège de
juridiction.
4. Le caractère irrécusable
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Le Ministère public, en tant que partie au procès pénal, est irrécusable. La récusation
est l’acte par lequel un plaideur refuse d’être jugé par ou en présence d’un magistrat
dont il conteste l’impartialité notamment en raison des liens qui existent entre ce
magistrat et l’autre partie57.
En effet, alors qu’un magistrat du siège peut être récusé aussi ben en matière civile que
pénale, le magistrat du parquet ne peut être récusé. Le plaideur ne peut récuser son
adversaire58.
Les juridictions d’instruction n’interviennent pas forcément dans toutes les affaires. Il
existe en effet des affaires qui sont portées directement devant les juridictions de
jugement. Par exemple, les contraventions et les délits qui ne présentent pas de
difficultés sont jugés directement en citation directe ou en flagrant délit.
Il existe une juridiction d’instruction du premier degré, à savoir le juge d’instruction (I)
et une juridiction d’instruction du second degré : la chambre d’accusation (II).
Le juge d’instruction est un magistrat du siège 59. En tant que tel, il bénéficie de toutes
les garanties des magistrats du siège. La protection statutaire du juge d’instruction se
manifeste à travers les dispositions régissant sa nomination et son indépendance.
Il existe un juge d’instruction dans chaque tribunal de grande instance. Selon l’article
78 de la loi organique n° 2017-10 du 17 janvier 2017, le juge d’instruction est nommé
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par arrêté du Garde des Sceaux Ministre de la justice pour une période de trois ans
renouvelable. En cas d’empêchement, il est remplacé par un juge provisoirement
désigné par ordonnance du président du tribunal de grande instance. Cette situation
se produit exceptionnellement puisque dans la plupart du temps, il y a plusieurs juges
d’instruction dans les tribunaux de grande instance.
Lorsque dans un tribunal d’instance il n’y a qu’un seul juge, celui-ci exerce les fonctions
de juge d’instruction qu’il cumule avec les fonctions de jugement et éventuellement de
délégué du procureur de la République60.
D’autre part pour certaines infractions jugées graves, le juge d’instruction est lié par
les réquisitions du Ministère public.
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b) L’indépendance du juge d’instruction par rapport à la chambre
d’accusation
La chambre d’accusation est la juridiction d’instruction du second degré 62. Elle est
réglementée par les articles 185 à 217 du Code de procédure pénale. Ces textes
prévoient la composition (A) et les attributions de la chambre d’accusation (B).
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composant la chambre d’accusation sont désignés chaque année, pour la durée de
l’année judiciaire suivante, par l’assemblée générale de la Cour.
En tant que juridiction d’instruction du second degré, la chambre d’accusation est juge
d’appel des ordonnances du juge d’instruction et juge de la régularité de la procédure
suivie devant celui-ci. Elle a ainsi le pouvoir d’infirmer une ordonnance du juge
d’instruction.
Par ailleurs la chambre d’accusation est l’organe disciplinaire des Officiers de police
judiciaire et peut infliger des sanctions à l’encontre de ceux d’entre eux qui ne
respecteraient pas les règles liées à la délicatesse de leurs fonctions.
La chambre d’accusation est par également compétente pour donner un avis dans les
procédures d’extradition63.
Elle est juge du règlement des conflits de compétence entre deux juges d’instruction,
deux tribunaux de simple police, deux tribunaux correctionnels se trouvant dans le
ressort d’une même Cour d’Appel.
63 L’extradition est une procédure par laquelle un État peut être amené à remettre un
individu, sous le coup de poursuites ou d’une condamnation pénales et se trouvant sur son
territoire, à un autre Etat qui le réclame pour y être jugé ou subir sa peine.
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