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UNIVERSITE CHEIKH ANTA DIOP DE DAKAR

Faculté des Sciences Juridiques et Politiques


Département de droit privé

Professeur Y. Bodian
FSJP – UCAD

À L’USAGE DE LA LICENCE 2
2021
Sommaire

Introduction
1ère PARTIE : LE CADRE GÉNÉRAL DE LA PROCÉDURE PÉNALE

CHAPITRE 1 : OBJET ET PRINCIPES DIRECTEURS DE LA PROCÉDURE PÉNALE

SECTION 1 : L’OBJET DE LA PROCÉDURE PÉNALE


SECTION 2 : LES PRINCIPES DIRECTEURS DE LA PROCÉDURE PÉNALE

CHAPITRE 2 : LES ORGANES DE LA PROCÉDURE PÉNALE

SECTION 1 : LES ORGANES DE POLICE


SECTION 2 : LES ORGANES DE JUSTICE

2ème PARTIE : LA CONDUITE DE LA PROCÉDURE PÉNALE

CHAPITRE 1 : L’ENQUETE ET L’INSTRUCTION

SECTION 1 : LA PHASE DE DEROULEMENT DE L’ENQUETE PENALE


SECTION 2 : L’INSTRUCTION PREPARATOIRE

CHAPITRE 2 : LE JUGEMENT

SECTION 1 : LES DIFFÉRENTES JURIDICTIONS DE JUGEMENT


SECTION 2 : LA DÉCISION RENDUE À L’ISSUE DU JUGEMENT
Introduction
***

La procédure pénale recouvre l’ensemble des règles relatives à la recherche et


au jugement des personnes poursuivies pour avoir commis une infraction. Elle
est particulièrement révélatrice des fondements d’une société et il n’est pas
étonnant qu’elle soit souvent l’objet de débats passionnés. Il s’avère en effet
que l’application des sanctions pénales dépend de l’issue de la procédure
pénale. La mise en œuvre des règles de procédure pénale a ainsi pour objet
fondamentalement de parvenir à découvrir les véritables auteurs d’infractions
et les éléments matérialisant leur commission.

Si la finalité du droit pénal général est de définir les comportements jugés


contraires à l’ordre social et d’en fixer les peines applicables, la procédure
pénale vise, pour sa part, à déterminer les modalités de la réaction sociale
lorsqu’une infraction pénale est supposée commise. La répression des
infractions commises ne peut se faire en effet que si leurs auteurs sont
identifiés et les éléments de preuve réunis.

Dans son sens juridique la procédure renvoie à la « branche du droit qui a pour
objet de déterminer les règles d’organisation judiciaire, de compétence,
d’instruction des procès et d’exécution des décisions de justice ». Le droit de
la procédure pénale est dès lors constitué des règles de forme qui gouvernent
la constatation des infractions pénales, l’identification, l’appréhension et le
jugement de leurs auteurs1.

Certes, les formes de la réaction sociales sont variées et peuvent dépendre de


la nature des infractions et des personnes poursuivies, il n’en demeure pas
moins que la procédure pénale obéit à des principes fondamentaux2 dont la
vocation est de permettre la protection des droits et libertés reconnus à la
personne humaine.

L’étude de la procédure pénale s’attèle ainsi à permettre une bonne


compréhension des règles mises en place pour l’application des sanctions
pénales.

L’importance des règles de procédure pénale est à la mesure de la lutte contre


l’arbitraire et la violence collective. Aujourd’hui, la procédure pénale est
interpellée dans la lutte contre le crime organisé et les menaces terroristes.
Elle doit en effet permettre une réaction sociale efficace, tout en garantissant
les droits des individus.

Elle doit garantir les droits et libertés de la personne poursuivie, quelle que
soit la gravité du comportement et la nécessité d’en assurer la répression. La

1
Dans ce sens, la procédure pénale peut être considérée comme synonyme de procès
pénal.
2
Ces principes seront présentés dans la seconde partie du cours.
procédure pénale détermine largement le modèle de vie collective adopté par
une société. Ainsi dans les systèmes protecteurs des droits et libertés, la
poursuite et le jugement des infractions, quelle que soit leur gravité,
s’exercent dans les conditions prévues par la réglementation et dont le non
respect peut conduire à la nullité ; ce que soit celle de l’acte accompli
irrégulièrement ou de l’ensemble de la procédure (si la formalité omise ou
accomplie de manière irrégulière est considérée comme substantielle pour le
déroulement de la procédure).

La procédure pénale est ainsi conçue pour permettre la mise en œuvre des
règles de droit pénal général. Elle intéresse à ce titre tous les citoyens3, en ce
qu’elle s’évertue, dans la répression des comportements déviants, de veiller à
la garantie de droits et libertés des citoyens. La conciliation des intérêts en
jeux (intérêt social et intérêt individuel) justifie la variété des modèles de
procédure pénale4.

- Le modèle de procédure pénale accusatoire, comme son nom


l’indique, fait reposer les poursuites sur la victime de l’infraction. L’accusation
est faite et démontrée par cette partie au procès5. De nature orale, publique et
contradictoire, la procédure accusatoire est réputée plus favorable à la
protection des intérêts individuels.

- Le modèle de procédure pénale de type inquisitoire, s’évertue à


privilégier l’intérêt social, et s’oppose ainsi à celle accusatoire. La poursuite
est conduite par le ministère public qui bénéficie, à cet effet, d’importantes
prérogatives dans la direction du procès, la recherche et l’appréciation des
preuves. La procédure inquisitoire est secrète, écrite et non contradictoire6.

- Le modèle de procédure pénale mixte : elle résulte de la combinaison


des deux précédents modèles de procédure pénale, conçues pour prendre en
charge des intérêts contradictoires, de manière isolée. Il s’agit d’un type de
procédure pénale plus conciliant, qui associe les aspects de la procédure
inquisitoire avec ceux de la procédure accusatoire.

Le code de procédure pénale consacre le système mixte qui se manifeste aussi


bien en ce qui concerne l’initiative des poursuites qu’au niveau du
déroulement de la procédure.

En effet, l’initiative des poursuites appartient, en principe, au ministère public,


représentant de la société, conformément au système inquisitoire. Mais, en
même temps, la victime de l’infraction est habilitée à déclencher l’action
publique, ce qui est une manifestation du système accusatoire.

3
L’on a ainsi l’habitude de dire que « la procédure pénale est faite pour tous, le droit pénal
général, pour le seul délinquant ».
4
C’est ce qui explique que le niveau de démocratie dans une société se mesure,
notamment, à la lumière de ses règles de procédure pénale.
5
La personne poursuivie se contente simplement de riposter.
6
Ce type de procédure est jugée trop autoritaire et attentatoire aux droits et libertés.
Relativement au déroulement de la procédure, le caractère mixte apparaît dans
la phase de jugement et dans la phase de l’instruction préparatoire. Le
jugement est ainsi marqué par le débat oral, public et contradictoire alors que,
dans l’instruction préparatoire, toute la procédure est secrète. Aux termes de
l’article 11 du code de procédure pénale, « Sauf dans les cas où la loi en
dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au
cours de l’enquête et de l’instruction est secrète »7.

Les règles de procédure pénale sont essentiellement contenues dans le Code


de procédure pénale. Celui-ci a été adopté par la loi n°65-61 du 21 juillet
1965, plusieurs fois modifiée8. Mais la procédure pénale a également et
fondamentalement comme sources la constitution et les conventions
internationales. C’est ainsi que certains principes directeurs du procès ont une
base constitutionnelle. C’est l’hypothèse des droits de la défense, de la
présomption d’innocence dont la formulation résulte notamment de la
déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, considérée comme
partie intégrante du bloc de constitutionnalité.

En tout état de cause, les règles qui gouvernent la procédure pénale relève
essentiellement de la souveraineté de l’État. Celui-ci sera ainsi amené à
organiser la procédure applicable selon le modèle qui convient à la sauvegarde
de l’ordre social et à la protection des droits et libertés. C’est ainsi que les
règles mises en place dans le système sénégalais comportent plusieurs phases
qui prennent en charge les différents actes accomplis en vue de la constatation
des infractions, l’identification, l’arrestation et au jugement des auteurs. Ces
actes sont accomplis dans un cadre déterminé, avec les acteurs ou organes
auxquels la loi confie les pouvoirs nécessaires à cet effet.

7
La loi n°2016-30 du 8 novembre 2016 modifiant le Code de procédure pénale (JO 6976
du samedi 26 novembre 2016 introduit, dans cet article 11, la possibilité pour le Procureur
de la république de tenir des points de presse pour communiquer ses des affaires en cours
d’enquête ou d’instruction.
8
La loi de 1965 a effet été successivement modifiée par les lois suivantes :
- loi n°66-18 du 1er février 1968 ;
- loi n°69-71 du 30 octobre 1969 ;
- loi n°75-114 du 20 décembre 1975 ;
- loi n° 77-32 du 22 février 1977 ;
- loi n°77-86 du 10 aout 1977 ;
- loi n°79-39 du 11 avril 1979 ;
- loi n°81-71 du 10 décembre 1981 ;
- loi n°81-77 du 10 décembre 1981 ;
- loi n°85-25 du 27 février 1985 ;
- loi n°92-32 du 04 juin 1992 ;
- loi n°99-88 du 3 septembre 1999 ;
- loi n°2000-39 du 29 décembre 2000 ;
- loi n°2007-04 du 12 février 2007 ;
- loi n°2007-05 du 12 février 2007 ;
- loi n°2008-23 du 25 juillet 2008 ;
- loi n°2008-50 du 23 septembre 2008 ;
- loi n°2014-28 du 27 octobre 2014 ;
- loi n°2016-30 du 08 novembre 2016.
Le code de procédure pénale adopté en 1965 et encore en vigueur comprend
deux grandes parties consacrées à l’exercice de l’action publique (livre 1) et
aux juridictions de jugement (Livre 2). Il comporte un titre préliminaire
consacré à l’action publique et à l’action civile dont les conditions d’existence
ont été réglementées. Cependant, l’étude de la procédure pénale conduit à
cerner ses différentes phases certes, mais aussi à une présentation de son
objet.

Les phases du procès pénal se définissent dans le déroulement de la procédure


pénale (2e Partie) dont l’objet et le cadre doivent être, au préalable, bien
appréhendés (1ère Partie).

1ère Partie : LE CADRE GÉNÉRAL DE LA PROCÉDURE PÉNALE

- Existence de principes directeurs de la procédure pénale


- Encadrement de la procédure pour l’atteinte d’un objet précis
- Existence d’organes chargés de la mise en œuvre de la procédure pénale

CHAPITRE 1 : OBJET ET PRINCIPES DIRECTEURS DE LA PROCÉDURE PÉNALE

SECTION 1 : L’OBJET DE LA PROCÉDURE PÉNALE

- L’objet principal c’est l’action publique (Parag.1).


- L’objet accessoire c’est l’action civile pour la réparation du dommage
causé par l’infraction (Parag.2).

PARAGRAPHE 1 : L’OBJET PRINCIPAL : L’ACTION PUBLIQUE

L’action publique : « action pour l’application des peines »9 = article premier


du Code de procédure pénale.

- Nécessité de conditions pour le déclenchement de l’action publique.

- Conditions positives : les faits doivent être constitutifs d’une


infraction10. Ainsi, l’action publique n’existe que si une infraction pénale
a été commise : vol, meurtre abus de confiance etc. Lorsque les faits ne
supportent aucune qualification pénale (faute civile par exemple) l’action
publique n’existe pas11.

9
Cf. art. 1er CPP.
10
Cette condition relative à l’infraction est étudiée dans le cadre du cours de droit pénal
général.
11
Lorsque les faits ne constituent pas une infraction, l’Officier de police judiciaire ou le
procureur de la République doit classer le dossier sans suite. Le juge d’instruction saisi doit
rendre une ordonnance de non informer et la juridiction de jugement doit rendre une
décision de relaxe pure et simple.
- Conditions négatives : absence d’obstacles à l’existence de l’action
publique.

Ces conditions apparaissent dans le déclenchement de l’action publique.

I- LE DÉCLENCHEMENT DE L’ACTION PUBLIQUE

- Fondement juridique : Article 1er CPP : L’action publique pour


l’application des peines est mise en mouvement (…) par les magistrats
ou les fonctionnaires auxquels elle est confiée par la loi.

A- Le déclenchement de l’action publique par le ministère public

- Quels sont les mécanismes par lesquels l’action publique est mise
en mouvement par le ministère public ?
- La loi prévoit ainsi la citation directe, la comparution immédiate et la
réquisition introductive d’instance.

a) La citation directe

- possibilité donnée aux parties de saisir directement les juridictions


pénales de jugement en citant l'auteur supposé de l'infraction à
comparaître devant ladite juridiction de jugement.

- utilisée lorsque l’infraction dont la répression est poursuivie n’exige pas


une information préalable (ex : les contraventions ou les délits pour le
jugement desquels l’ouverture d’une information n’est pas jugée
nécessaire).

b) Le réquisitoire introductif

- procédure par laquelle, le procureur de la République, par la délivrance


d’un réquisitoire introductif, demande au juge d’instruction de mener
une enquête sur des faits qu’il considère comme une violation de la loi
pénale12.

- introductif13 dès lors qu’il permet de saisir le juge d’instruction et, en


même temps, de déclencher l’action publique, d’« introduire » ou
d’engager les poursuites.

- peut être délivré soit contre une ou des personnes dénommées


(réquisitoire nominatif)14 soit contre un inconnu que le juge d’instruction
devra identifier.

12
Le procès-verbal d’enquête, ou tout autre document pouvant justifier l’ouverture de
l’information, est généralement annexé au réquisitoire introductif.
13
Réquisitoire introductif d’instance.
14
MICHAUD, « La portée du réquisitoire nominatif », RSC, 1972, p. 180.
- doit obligatoirement qualifier les faits et viser les textes de loi
applicables ce d’autant qu’il fixe la saisine du juge d’instruction.

- le procureur de la République peut étendre la saisine du juge


d’instruction en lui délivrant un réquisitoire supplétif. La délivrance du
réquisitoire supplétif n’est pas nécessaire lorsqu’il s’agit de poursuivre
des personnes non visées dans le réquisitoire, dès lors qu’elles sont
poursuivies pour les faits ayant donné lieu à celui-ci15.

c) La procédure de flagrant délit

- Permet la comparution rapide de la personne poursuivie devant la


juridiction de jugement ; elle est règlementée pour l’essentiel par les
articles 63 et 381 à 385 du code de procédure pénale16.

- Procédure utilisable dans deux cas :


en cas de délit flagrant lorsque le fait est puni d’une peine
d’emprisonnement ou ;

lorsqu’il existe contre une personne des indices graves et


concordants de nature à motiver son inculpation pour une
infraction correctionnelle et lorsque cette personne reconnaît
devant le procureur de la république avoir commis les faits
constitutifs du délit considéré.

- Le président du tribunal doit avertir le prévenu de son droit de


demander un délai pour préparer sa défense17.

B- Le déclenchement de l’action publique par d’autres personnes

- Certaines personnes sont habilitées par la loi à mettre en mouvement


l’action publique. Il en est ainsi des victimes d’infractions pénales et de
certains fonctionnaires des administrations.

- La victime d’une infraction pénale dispose, en plus de la citation directe,


de la plainte avec constitution de partie civile comme moyens de
déclencher l’action publique.

15
D’ailleurs dans cette hypothèse, il ne s’agit pas d’une extension de la saisine du juge
d’instruction.
16
DE NAUW, « La décision de poursuivre ; instruments et mesures », RSC, 1976-1977,
p. 449. 44 R. LEVY, « Recherche sur le flagrant délit », RSC, 1985, p. 410.
17
Article 384, al. 3 du Code de procédure pénale. Il résulte de l’alinéa 2 du même texte
que lorsque le prévenu use de cette faculté, le délai qui lui est accordé ne pourra être
inférieur à trois jours.
- La plainte avec constitution de partie civile est un mode spécifique à la
victime. Elle a été admise, pour la première, par la jurisprudence dans
l’affaire Placet18.

II- L’EXERCICE DE L’ACTION PUBLIQUE

- Distinguer mise en mouvement et exercice de l’action publique.

- Le Ministère public doit prendre une décision sur la suite à donner à


l’affaire. Il a le choix entre l’abandon des poursuites et l’engagement
des poursuites.

A- La décision sur les poursuites

L’abandon des poursuites peut intervenir soit dans le cadre d’un classement
sans suite soit après une médiation pénale.

a) Le classement sans suite

- L’article 32 du Code de procédure pénale dispose notamment que le


Procureur de la République peut décider de classer l’affaire sans suite19 ;
dans ce cas il doit aviser la victime éventuelle.

- Ce pouvoir est une manifestation de la règle de l’opportunité des


poursuites qui permet au Procureur de la République d’apprécier
librement la suite à donner aux plaintes dénonciations et autres
enquêtes20.

- Limites à l’opportunité des poursuites prévues par la loi.

- Nécessité d’une plainte préalable de la victime pour la poursuite de


certaines infractions (adultère, diffamation contre un particulier, vol
entre ascendants et descendants).

- Nécessité d’une mise en demeure préalable dans certains cas ( cas du


délit d’abandon de famille (abandon de foyer) prévu par l’article 350 1e
et 2e du Code pénal dont se rend coupable le père ou la mère de famille
ou le conjoint qui abandonne sans motif grave, pendant plus de deux
mois, la résidence familiale ; la poursuite n’est possible que quinze jours
après une interpellation du délinquant par un officier de police judiciaire
ou un huissier).

18
Crim., 8 décembre 1906 Placet, dit Laurent-Atthalin, du nom du conseiller rapporteur de
la Cour de cassation dans cette affaire. Voir également : A. DONNIER, Les effets d’une
constitution de partie civile jugée irrecevable », note sous Cass. Crim. 18 juin 2014, (deux
arrêts) JCP 2014, Actualités, n°783, p.1337.
19
Aandré VITU, « Le classement sans suite », RSC, 1947, p. 505 et s. GLESENER, « Le
classement sans suite et l’opportunité des poursuites », RSC, 1972-1973, p. 353.
20
Jean-Jacques THOUROUDE, « Vers un déclin du principe de l’opportunité des poursuites
», Gaz. Pal, 1981, 2, doctr. 495.
- Enfin, dans certains cas exceptionnels, la décision de poursuivre peut se
trouver paralysée par l’existence d’une question préjudicielle à l’action.
Il s’agit de questions de nature essentiellement civile, qui ne peuvent
être tranchées que par une juridiction civile ou commerciale. La doctrine
reconnait une question préjudicielle à l’action dans l’article 348 du Code
pénal. Selon ce texte lorsqu'une mineure enlevée ou détournée aura
épousé son ravisseur, celui-ci ne pourra être poursuivi que sur la plainte
des personnes qui ont qualité pour demander l'annulation du mariage
et ne pourra être condamné qu'après que cette annulation aura été
prononcée.

b) La médiation pénale (32 du code de procédure pénale)

- Objet de la médiation : assurer la réparation du dommage causé à la


victime, mettre fin au trouble résultant de l’infraction et contribuer au
reclassement de l’auteur.
- Initiateur : Le Procureur de la République, préalablement à la décision
sur l’action publique, et avec l’accord des parties. En cas d’échec de la
médiation pénale, le Procureur de la République apprécie alors
l’opportunité d’engager des poursuites. Les informations recueillies
dans le cadre de la médiation ne peuvent être utilisées contre l’une ou
l’autre partie.

B- L’absence de causes d’extinction de l’action publique

- La prescription : l’action publique doit être mise en mouvement dans


un certain délai, à défaut elle est prescrite. La prescription dont il s’agit
ici est la prescription de l’action publique21 qu’il faut distinguer de la
prescription de la peine.

- Justification : elle se justifie d’une part par le fait qu’au bout d’un
certain temps il est préférable d’oublier l’infraction dans un intérêt de
paix et de tranquillité publique. D’autre part, avec le temps les preuves
s’effacent et l’œuvre de justice se fait moins sûre.

- Durée : elle est de :


o 10 ans en matière de crime ;
o 3 ans en matière de délits, sauf si la loi en décide autrement. Il
existe en effet des délits pour lesquels le délai de prescription est
fixé à 7 ans. Il en est ainsi pour les infractions prévues aux articles
152 et 153 du Code pénal22 et par la loi n° 2018-02 du 23 février

21
André VARINARD, La prescription de l’action publique (sa nature juridique, droit matériel,
droit formel), Thèse, Lyon, 1973.
22
Il s’agit des cas de détournements, de soustractions et d’escroqueries portant sur les
deniers publics.
2018 relative à la répression du faux monnayage et des autres
atteintes aux signes monétaires23 ;
o 1 an dans le cas d’une contravention.

- Le décès du prévenu. Le principe de la personnalité des peines interdit


de poursuivre des délinquants par personnes interposées. On ne peut
pas poursuivre les héritiers en cas de décès du délinquant. Mais, cette
règle ne constitue pas un obstacle à la poursuite des co-auteurs et des
complices.

- L’amnistie. Lorsqu’elle intervient avant le jugement elle constitue une


cause d’extinction de l’action publique. Lorsqu’elle intervient après le
jugement elle constitue une cause d’extinction de la peine.

- L’abrogation de la loi pénale. Elle enlève au fait son caractère


délictueux et entraine la disparition de l’élément légal. L’action publique
est donc éteinte lorsque la loi pénale qui prévoyait un acte est abrogée
avant l’exercice des poursuites.

- L’autorité de la chose jugée. Lorsqu’une décision est intervenue sur


l’action publique celle-ci s’éteint et il n’est plus possible d’exercer à
nouveau des poursuites contre le délinquant en raison des mêmes faits,
même si on adopte une qualification différente.

- La transaction. Elle consiste à proposer au délinquant l’abandon des


poursuites moyennant la reconnaissance de l’infraction et le versement
d’une somme d’argent fixée par l’autorité des poursuites. Lorsque la loi
accorde dans certains cas à certaines administrations le pouvoir de
transiger, la transaction éteint l’action publique si intervient avant le
jugement30.

- Le retrait de la plainte. En principe, le retrait de la plainte est sans


influence sur la mise en mouvement de l’action publique. C'est-à-dire
que le retrait de la plainte et sans influence sur le cours de l’action
publique. Toutefois par dérogation à cette règle le retrait de la plainte
éteint l’action publique dans les cas où la plainte est une condition
d’exercice des poursuites (cas d’immunité familiale (article 365 CP), de
diffamation contre un particulier et d’adultère).

PARAGRAPHE 2 : L’OBJET ACCESSOIRE : L’ACTION CIVILE

Dans la procédure pénale, l’action civile est celle ouverte aux particuliers
victimes d’infractions. L’existence de cette action (A) doit être bien comprise
pour mieux en appréhender les modalités d’exercice (B).

23
JO n° 7095 du 14 mai 2018 ; voir article 25 de cette loi.
A- L’existence de l’action civile

Article 2 CPP : « L’action civile en réparation du dommage causé par


l’infraction appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du
dommage causé par l’infraction ».

L’action civile a ainsi pour objet exclusif la réparation du dommage causé par
l’infraction24.

La jurisprudence rappelle souvent que « l’exercice de l’action civile devant la


juridiction pénale est un droit exceptionnel qui, en raison de sa nature, doit
être strictement renfermé dans les limites fixées par la loi » 25.

Il faut distinguer l’action des personnes physiques (a) de celle des


groupements (b).

a) L’action des personnes physiques

- Pour les personnes physiques : le préjudice personnel est celui subi


par la victime dans son intégrité physique, dans son patrimoine ou dans
son honneur (ex : la victime d’un vol peut se constituer partie civile parce
qu’elle a subi une atteinte dans son patrimoine).

- Nature et caractères du préjudicie réparable : le préjudice subi doit


être direct (= il doit y avoir une relation de cause à effet entre l’infraction
survenue et le dommage invoqué). Le préjudice doit provenir
directement de la commission de l’infraction. Le préjudice doit-il être
personnel ? Qu’en est-il de l’action civile des héritiers de la
victime ? Il faut en effet distinguer suivant que la victime est décédée
immédiatement des suites de l’infraction ou après la commission de
l’infraction. // Victime décédée des suites directes de l’infraction,
les héritiers peuvent se prévaloir d’un préjudice personnel26. Dans ce
cas, ces héritiers sont titulaires d’une action qui leur est propre. //
Victime décédée après l’infraction et que celle-ci n’est pas la cause
directe du décès, les héritiers n’ont pas d’action propre, ils ne peuvent
exercer que l’action appartenant à la victime en vertu du mécanisme de
la succession27.

24
Fenand BOULAN, « Le double visage de l’action civile exercée devant la juridiction
répressive », JCP, 1973, I, 2563 ; Joseph GRANIER, « Quelques réflexions sur l’action civile
», JCP 1957, I, 1386 ; J. VIDAL, « Observations sur la nature juridique de l’action civile »,
RSC, 1963, p. 481 et s.
25
Crim. 25 février 1897, S. 1898.1. 201, J.-A. ROUX, 11 décembre 1969, D. 1970, 156.
26
La nature du préjudice peut cependant susciter des discussions.
27
En vertu de l’article 407 du Code de la famille, les héritiers légitimes naturels et le
conjoint survivant sont saisis de plein droit des actions du défunt sous l’obligation
d’acquitter toutes les charges de la succession. La Cour de cassation française, Assemblée
plénière, arrêt n° 566 du 9 mai 2008 a ainsi décidé que « toute personne victime d’un
dommage, quelle qu’en soit la nature, a droit d’en obtenir réparation de celui qui l’a causé
par sa faute ; que le droit à réparation du préjudice éprouvé par la victime avant son décès,
étant né dans son patrimoine, se transmet à ses héritiers ».
Dans cette hypothèse, la question s’est posée de savoir si les héritiers peuvent,
en cette qualité, mettre en mouvement l’action publique. Les solutions
admises conduisent à faire les distinctions suivantes :
- La victime décédée a déjà exercé l’action civile avant son décès en cours
d’instance ; dans ce cas, les héritiers peuvent continuer l’action déjà
entamée pour obtenir réparation du préjudice causé à la victime.
- La victime est décédée sans avoir exercé l’action civile et l’action
publique n’a pas été mise en mouvement par le parquet, la jurisprudence
décide que « l’action publique n’ayant été mise en mouvement ni par le
ministère public ni par la victime, seule la voie civile est ouverte à
l’hériter »28. Cependant, si l’action publique a été déclenchée par le
ministère public29 ; l’action civile des héritiers est recevable à la
condition que la victime n’ait pas renoncé à l’action civile.

Le droit des groupements de se prévaloir de l’action civile devant les


juridictions pénales est encore plus encadré.

b) L’action des groupements

La recevabilité de l’action civile des groupements n’est admise qu’avec de


nombreuses réserves. La jurisprudence l’a certes consacrée de manière
progressive30, mais elle la soumet à de conditions encore plus restrictives que
celles qui président à la recevabilité de l’action exercée par les personnes
physiques. Ainsi, tout dépend de l’intérêt qu’ils défendent en justice.

Le groupement (syndicat, association, société commerciale, etc.) peut avoir


personnellement été victime d’une infraction ; dans ce cas il se prévaut d’un
intérêt qui lui est personnel31. Par exemple, une association qui a été victime
de vol dans son siège social. Dans ce cas, le groupement pourra se constituer
partie civile dans les mêmes conditions que les personnes physiques victimes
d’infraction, avec la réserve qu’il lui faut toutefois justifier de la personnalité
juridique32.

Lorsque le groupement agit en justice pour défendre des intérêts collectifs


qu’il a pour mission de protéger, il est nécessaire de déterminer s’il a la qualité
requise. Cette situation vise surtout le cas des syndicats et des associations.

28
Cass. Ass. Plén. 9 mai 2008, n°06-85.751, D. 2008, AJ. 1415,note Léna ; AJ pénal 2008,
366, Obs. Claire Saas.
29
Directement ou au vu de la constitution de partie civile.
30
Jean Larguier, L’action publique menacée (à propos de l’action civile des associations
devant les juridictions répressives), D. 1958, Chron. p. 29.
31
Mais, les groupements ne se prévalent pas toujours d’un intérêt personnel.
32
L’existence de la personnalité juridique dépend de la nature du groupement. S’il s’agit
par exemple d’une société, elle doit être immatriculée au Registre du commerce et du
crédit mobilier. S’il s’agit d’une association ou d’une fondation, les procédures sont
différentes.
À défaut de justifier d’un préjudice direct découlant de la commission de
l’infraction (intérêt collectif) le syndicat doit justifier d’un titre juridique qui est
délivré par le législateur. Pour les syndicats, il y a un texte de portée générale
qui habilite le syndicat à agir en justice pour défendre les intérêts collectifs de
ses membres. Aux termes de l’article L. 15 du code de travail du Sénégal, les
syndicats peuvent saisir les juridictions répressives pour exercer les droits de
la partie civile.

S’il s’agit de syndicat de salariés, il est habilité à exercer l’action civile chaque
fois que l’infraction a eu pour objet la violation de la réglementation
protectrice des intérêts matériels et moraux des travailleurs. Par exemple, une
infraction d’entrave à la liberté du travail.

Pour les syndicats patronaux, ils peuvent exercer l’action civile pour défendre
le respect des conditions d’accès à la profession. Par exemple un ordre de
médecins peut exercer l’action civile en cas de commission d’une infraction
d’exercice illégale de la médecine.

S’agissant des associations, il n’y a pas un texte de portée générale à l’image


de l’article L. 15 du Code du travail leur permettant de se constituer partie
civile pour défendre les intérêts de leurs membres.

Mais, de plus en plus le législateur sénégalais, inspiré par son homologue


français, utilise la technique de l’habilitation ponctuelle et admet la recevabilité
de la constitution de partie civile d’associations défendant des intérêts
collectifs. Il en est ainsi des associations de défense de l’environnement, mais
uniquement pour les infractions portant atteinte à l’environnement33.

B- L’exercice de l’action civile

En principe, la victime de l’infraction a un droit d’option reconnu par la loi. Elle


peut choisir d’exercer son action civile devant le tribunal civil ou devant la
juridiction pénale. Ce droit d’option est consacré par l’article 4 du Code de
procédure pénale. Selon ce texte, l’action civile peut être aussi exercée
séparément de l’action publique.

Mais, il arrive que le législateur ferme la voie civile, en réservant seulement


une possibilité d’exercice de l’action civile devant le tribunal pénal. Il en est
ainsi en matière d’infractions de presse.

En dehors de ces situations exceptionnelles, la partie civile peut exercer son


action devant la juridiction répressive (a) ou l’exercer devant la juridiction
civile (b).

33
V. Jean CALAIS AULOY, « Les actions en justice des associations de consommateurs »,
D. 1988, Chr. p. 193 ; voir également René VASSAS, « L’action civile des associations de
consommateurs », Gaz. Pal, 20 avril 1983.
a) L’exercice de l’action civile devant la juridiction pénale

L’exercice de l’action civile devant la juridiction répressive présente des


avantages certains. Elle apparaît en effet est moins coûteuse et plus pratique34
pour les victimes que l’action devant le juge civil puisqu’elle leur permet de
bénéficier des preuves réunies pendant l’enquête de police et l’instruction,
alors que, au civil, c’est le demandeur qui doit apporter la preuve et supporter
les frais des éventuelles expertises.

Par ailleurs, la constitution de partie civile donne à la victime une place au


procès pénal dont elle peut ainsi contrôler le déroulement. Cette possibilité
est de plus en plus recherchée par les victimes d’infractions qui portent un
intérêt croissant à la découverte des causes du délit et tiennent souvent à être
associées à toutes les phases du procès, y compris à celles qui relatives à
l’analyse de la culpabilité et le choix de la peine35.

Le choix de la voie répressive procure ainsi des facilités de preuve. La victime


profite des pouvoirs d’investigations du magistrat instructeur qui a de larges
prérogatives de recherche des éléments de preuve de nature à prouver la
matérialité des faits reprochés à l’inculpé.

b) L’exercice de l’action civile devant la juridiction civile

La victime peut également choisir de porter son action civile devant le tribunal
civil. Mais ce choix emporte un certain nombre d’incidences sur le déroulement
de la procédure.

En principe, l’option faite par la victime de porter son action devant la


juridiction civile est définitive et irrévocable. La victime ne peut pas revenir sur
le choix qu’elle a fait. Ayant porté son action devant une juridiction civile, elle
ne peut pas s’en désister pour saisir la juridiction répressive. C’est ce que l’on
exprime par la maxime traditionnelle : « electa una, via non datur recursus ad
alteram », d’où le nom donné à cette règle : la règle electa une via36.

Ce principe est consacré par l’article 5 du Code de procédure pénale selon


lequel la partie qui a exercé son action devant la juridiction civile compétente
ne peut la porter devant la juridiction répressive. Il n’en est autrement que si
celle-ci a été saisie par le ministère public avant que le jugement sur le fond
ait été rendu par la juridiction civile. Mais, il résulte de ce texte que seul le

34
Maurice PATIN « L’action civile devant les tribunaux répressifs », Rec. Gén. Lois, 1957,
p. 8.
35
Il est ainsi fréquent de voir des victimes d’infractions pénales réclamer plus de sévérité
et chercher à exercer une influence sur le déroulement du procès.
36
Le changement laisserait penser que la victime brusquement prise d’un sentiment de
défiance à l’égard de la juridiction qu’elle-même avait saisie, défiance qui lui viendrait de
ce qu’elle paraît craindre que cette juridiction ne lui donne pas une suffisante satisfaction ;
or il ne faut pas que son adversaire ait à pâtir des erreurs d’orientation qu’elle a faites.
L’on justifie également l’interdiction de renoncer à la voie civile pour la voie pénale par une
sorte d’humanisme manifestée à l’égard de la personne poursuivie. V. Ch. FREYRIA, «
L’application en jurisprudence de la règle electa una via », RSC, 1951, p. 213.
choix de la voie civile est irrévocable ; ce qui veut dire que celle de la voie
pénale est révocable. Cette règle est une faveur faite au prévenu puisque l’on
considère que la voie répressive est une voie plus ardue, exposant ce dernier
à des sanctions pénales.

La mise en œuvre de l’action civile est par ailleurs dominée par la prééminence
de l’action publique sur l’action civile. Cette prééminence s’exprime à travers
deux règles : la règle selon laquelle le criminel tient le civil en l’état et l’autorité
de la chose jugée au pénal sur le civil.

En vertu de la règle « le criminel tient le civil en l’état », la victime d'une


infraction pénale peut choisir d'engager son action en réparation devant le
juge civil (article 4, al. 1 CPP)37. Toutefois, lorsque le juge civil est saisi d'une
action en réparation du dommage causé par une infraction pénale alors qu'une
action publique, relative à cette infraction, est engagée devant une juridiction
pénale (article 4, al.2 CPP), il est tenu de surseoir à statuer dans l'attente de la
décision définitive du juge répressif.

Le principe de l’autorité de la chose jugée du pénal sur le civil signifie que


lorsque la juridiction civile statue après la juridiction répressive, elle ne jouit
pas d’une liberté d’appréciation et de décision. La juridiction civile est en effet
liée par ce qui a été jugé au pénal.

Ainsi, lorsque le prévenu a été déclaré coupable d’occupation illégale d’un


terrain appartenant à autrui (article 423 du CP) devant le juge pénal, le tribunal
civil saisi d’une action en expulsion contre le prévenu sera tenu d’ordonner
son expulsion.

SECTION 2 : LES PRINCIPES DIRECTEURS DE LA PROCÉDURE PÉNALE

Les principes directeurs consacrés dans la procédure pénale sont nombreux et


tendent, tous, à la protection de l’individu. Ils s’expriment, de manière plus
visible, à travers les principes de la présomption d’innocence, de la liberté de
la preuve (Paragraphe II) ou des droits de la défense (Paragraphe I).

Paragraphe I : Les principes protecteurs des droits de la défense

Historiquement, les droits de la défense sont considérés comme liés à la


matière pénale. Ils ont ainsi pu être définis comme : « l’ensemble des droits
reconnus à la personne inculpée en vue de lui permettre de préparer et de
présenter sa défense... » 38. L’importance de ces droits dans le déroulement du
procès pénal a conduit à les ériger en droits fondamentaux, inhérents à la
personne humaine. La constitution dispose que « La défense est un droit
absolu dans tous les états et à tous les degrés de la procédure ».

37
Sauf dans certains cas particuliers.
38
Notamment par le Vocabulaire juridique d’Henri Capitant de 1930.
Les droits de la défense comportent plusieurs dimensions.39 Il est cependant
possible d’y voir deux volets complémentaires : le principe du contradictoire40
(A) et le droit à l’assistance d’un avocat (B).

A- Le principe du contradictoire

Le principe du contradictoire, encore appelé principe du respect de la


contradiction, s'applique à tous les états de la procédure en général41 et de la
procédure pénale en particulier. C’est en vertu de ce principe que la personne
poursuivie doit être informée de la nature et de la cause de l’accusation portée
contre elle. C’est également en vertu de ce principe que chaque partie doit
pouvoir connaitre et discuter les observations ou preuves produites devant le
juge et qui serviront à la solution du litige. Il résulte ainsi de l’article 414, al.
2 du Code de procédure pénale que « Le juge ne peut fonder sa décision que
sur des preuves qui lui ont été apportées au cours des débats et discutées
devant lui ».

Le principe du contradictoire ne trouve à s'appliquer que principalement au


cours des phases d'instruction et de jugement.

Il implique que les parties soient mises en mesure de discuter les différents
éléments du dossier. Autrement dit, il consiste à imposer un débat entre les
parties avant la décision du juge.

Le principe du contradictoire est intimement lié à l'équilibre des droits des


parties. Un débat contradictoire ne peut avoir de sens que si toutes les parties
ont pris connaissance des mêmes éléments.

B- Le droit à l’assistance d’un avocat

Le droit à l’assistance d’un avocat est une dimension fondamentale des droits
de la défense. Il est ainsi consacré par la Charte africaine des droits de
l’homme et des peuples qui stipule en son article 7, 1. « Toute personne a
droit à ce que sa cause soit entendue. Ce droit comprend: (…) c) le droit à la
défense, y compris celui de se faire assister par un défenseur de son choix ».
L’article 9 de la Constitution y renvoie lorsqu’il dispose que la défense est un
droit absolu.

Au plan communautaire, le droit à l’assistance d’un conseil est prévu par le


Règlement UEMOA. Aux termes de l’article 5 de ce texte, « Les avocats

39
V. G. TAUPICA-NOUVEL et A. BOTTON, « La réforme du droit à l’information en procédure
pénale », JCP 2014, doctr. p.1351 et s.
40
Il faut cependant remarquer que l’appartenance du principe du contradictoire aux droits
de la défense admise de manière unanime. Pour autant, cette incertitude n’a pas de
véritable incidence sur le contenu du principe du contradictoire et il est possible de le
présenter comme faisant partie des droits de la défense à l’image de beaucoup de décisions
de la Cour européenne des droits de l’homme.
41
L’on retrouve ce principe dans les presque toutes les procédures : civile, sociale,
administrative.
assistent leurs clients dès leur interpellation, durant l’enquête préliminaire,
dans les locaux de la police, de la gendarmerie ou devant le parquet (…). Les
avocats assistent et défendent leurs clients dès leur première comparution
devant e juge d’instruction ».

L’interprétation de ce texte a conduit certains auteurs à considérer la présence


de l’avocat comme obligatoire dès l’interpellation42. Le législateur a apporté
une réponse à cette question en précisant, dans le Code de procédure pénale,
les modalités d’assistance de l’avocat dès l’enquête de police.

En effet la loi n°2016-30 du 08 novembre 2016 modifiant la loi n° 65-61 du


21 juillet 1965 portant Code de procédure pénale43, a réglementé la présence
de l’avocat dès l’interpellation. L’article 55 du Code de procédure issu de cette
réforme dispose ainsi que « L’officier de police judiciaire informe la personne
interpellée de son droit de constituer conseil parmi les avocats inscrits au
tableau ou admis en stage. Mention de cette formalité est faite obligatoirement
sur le procès-verbal d’audition à peine de nullité ».

La consécration du droit à l’assistance d’un conseil se justifie amplement par


le souci de consacrer l’égalité des armes entre les parties. Ces exigences
permettent aujourd’hui d’exercer un contrôle sur le caractère équitable du
procès.44 La consécration d’une présomption d’innocence s’inscrit dans cette
dynamique.

Paragraphe II : Les principes garantissant une bonne administration de la


justice pénale

A- Le principe de la présomption d’innocence

Dans la mise en œuvre des règles de procédure pénale, il est requis que la
personne poursuivie bénéficie du principe de la présomption d’innocence. Ce
principe fondamental n’est pourtant pas expressément consacré par le Code
de procédure pénale45.

42
Nous avons émis un avis plus relativisé, dans un article cosigné avec le Professeur Papa
T. FALL, notamment au sujet de l’applicabilité de l’article 5 du Règlement UEMOA.
43
JO n°6976 du 26 novembre 2016.
44
Le droit à l’égalité des armes n’est pas expressément invoqué en jurisprudence dans nos
juridictions. Mais il peut être envisagé dans l’exigence du procès équitable ou le respect
des droits de la défense. C’est en ce sens qu’en France, la chambre criminelle de la cour
de cassation a pu se fonder sur la violation du principe de l’égalité des armes en matière
de détention provisoire, pour censurer une chambre d’accusation qui avait entendu une
partie sans ordonner la comparution de toutes les parties : Crim. 18 décembre 1996 : Bull.
n° 476. Mais, dans cette situation, l’on peut s’appuyer sur le principe du contradictoire
pour arriver au même résultat.
45
Le principe est néanmoins suffisamment consacré dans des instruments de droit
international ayant une valeur constitutionnelle au Sénégal. Il en est ainsi de la Déclaration
des droits de l'homme et du citoyen (art. 9) ; de la Déclaration universelle des droits de
l'homme (art. 11) ou de Charte africaine des droits de l'homme de l’Homme et des Peuples
(art. 6, § 2).
La présomption d'innocence est un principe en vertu duquel, en matière
pénale, toute personne poursuivie est considérée comme innocente des faits
qui lui sont reprochés tant qu'elle n'a pas été déclarée coupable par la
juridiction compétente. Inscrite dans la Déclaration des droits de l'homme et
du citoyen46 et ayant à ce titre valeur constitutionnelle, cette présomption a
notamment pour effet de faire bénéficier à la personne concernée, le doute qui
existerait sur sa culpabilité. Ainsi, à défaut de charges suffisantes, le juge doit
prononcer la relaxe. C’est tout le sens de l'adage in dubio pro reo, qui trouve
une application dans la phase de jugement.

La mise en œuvre de la présomption d’innocence entraine des effets sur la


charge de la preuve en matière pénale. Ainsi, la personne poursuivie
bénéficiant d’une présomption d’innocence, il apparaît au ministère public, qui
soutient l’accusation, de rapporter la preuve des faits et de la culpabilité de la
personne à laquelle ils sont imputés.

Le respect de la présomption d’innocence connaît néanmoins certaines


exceptions, qui concernent la caractérisation de quelques rares infractions. Par
exemple, l’individu qui ne peut justifier de ressources correspondant à son
train de vie tout en vivant avec une personne se livrant habituellement à la
prostitution est réputé commettre le délit de proxénétisme47. Il en est de
même, de manière plus controversée cette fois, pour la caractérisation du délit
d’enrichissement illicite prévu par la loi n°81-51.

B- La liberté et la loyauté48 de la preuve en matière pénale

La preuve se définit, d’une manière générale, comme la démonstration de


l'existence d'un fait dans les formes admises par la loi. Dans le cadre du procès
pénal, la preuve doit permettre de démontrer non seulement l’existence des
faits et leur imputation à une personne, mais aussi, et souvent, l’intention que
cette personne avait de commettre un tel fait. La réunion de ces éléments ne
semble pas compatible avec le système de la preuve légale en ce que
l’efficacité de la répression en serait limitée.

La preuve revêt dans le procès pénal une importance qu'elle n'a dans aucune
autre matière. D'abord, parce qu'elle touche aux garanties des personnes,
notamment à la présomption d'innocence à laquelle elle peut porter atteinte,
comme elle concerne directement l'ordre public. Ensuite, parce que toutes les
règles de procédure pénale n'ont, en définitive, d'autre finalité que la recherche
et l'administration de la preuve.

46
L’article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen affirme que « Tout
homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé
indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa
personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».
47
D’autres exceptions peuvent être recherchées notamment dans le code des douanes.
48
Sophie Diagne NDIR, « La loyauté de la preuve en matière pénale », Annales Africaines,
Nouvelle Série, Vol. 1-avril 2019, pp. 1-36.
L’admissibilité de la preuve en matière pénale obéit également à une logique
différente des règles admises en droit civil.

En matière pénale le législateur a consacré le principe de la liberté de la


preuve. Il résulte en effet de l’article 414 du Code de procédure pénale que
« les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge
décide d’après son intime conviction ».

Cette spécificité découle, notamment, des modes de rassemblement des


preuves.

La recherche et l’admissibilité de la preuve pénale sont ainsi régies par le


principe de la liberté qui signifie que les parties au procès peuvent user de
tous les moyens de preuves, sous la seule réserve qu’elle soit obtenue
loyalement.

La liberté de la preuve comporte deux dimensions. Elle signifie que les preuves
pénales peuvent être apportées par tous moyens. Il s’agit d’une liberté dans
l’admissibilité des modes de preuve. C’est ainsi que les autorités de poursuite
sont habilitées à procéder à des enquêtes, à des constats, à des perquisitions
et saisies, aux écoutes téléphoniques ou interrogatoires, dans les limites
fixées par la loi.

Mais le principe de la liberté de la preuve signifie aussi la liberté́, pour le juge,


d'admettre ou de refuser une preuve49. Le juge pénal peut s’appuyer sur les
constatations matérielles, les témoignages ou indices50 pour fonder son intime
conviction. Il n’est en principe pas tenu par une force probante attachée à un
mode de preuve quelconque.

La liberté de la preuve se trouve cependant encadrée, notamment par la prise


en compte des exigences de loyauté. Ainsi, si les parties sont libres d’user des
modes de preuves dont elles disposent pour soutenir leurs prétentions, c’est
dans la mesure où ces preuves ont été obtenues de manière loyale.

La loyauté de la preuve est souvent assimilée à la conformité des éléments


produits à la loi. Ce principe signifie que les preuves ne doivent pas être
obtenues à partir de procédés contraires à la réglementation ou ayant pour
conséquence de vicier la recherche de la vérité. C’est ainsi que demeurent
contraires à la loyauté, les procédés mis en œuvre à l’insu ou contre le gré de
la personne concernée, qui tendent soit à provoquer l’infraction, dont on
recherche à établir la preuve, soit à éluder les protections prévues par la loi
pour la réunion des preuves.

49
L’on peut ainsi considérer que c’est corrélativement et logiquement, que la liberté́ admise
dans la phase préparatoire à la poursuite et la poursuite elle-même se retrouve en aval de
ces deux phases.

50
Il peut également s’appuyer sur des « SMS » ou des courriers électroniques.
CHAPITRE 2 : LES ORGANES DE LA PROCÉDURE PÉNALE

De manière chronologique, les organes de police (Section 1) semblent les plus


visibles. Au fur et à mesure que la procédure se déroule, d’autres organes vont
intervenir ; organes du ministère public ou organes d’instruction qui sont des
organes de justice (Section 2).

SECTION 1 : LES ORGANES DE POLICE

En matière pénale, l’auteur de l’infraction n’est pas toujours connu. Or, s’il est
possible de déclencher des poursuites contre une personne non dénommée
(c’est-à-dire contre X), le jugement ne peut être rendu que contre une
personne identifiée.

Dès lors, le rôle confié aux organes de police est déterminant. Ces organes
sont souvent chargés, avant l’ouverture du procès pénal, de constater les
infractions, de rechercher les auteurs et de les déférer devant la justice. Le
travail ainsi effectué permet aux organes de justice (juge d’instruction, juge
de jugement) d’ instruire les affaires et de trancher les litiges.

Les organes de police renvoient surtout à la police judiciaire.

Mais, il y a des corps de fonctionnaires qui se voient chargés d’exercer, à titre


occasionnel, des missions de police judiciaire. Ces agents peuvent constater
des infractions commises au préjudice de leur administration ; ils ont une
compétence limitée par la nature de l’infraction commise. Par exemple, selon
l’article 230 du code des douanes, en matière douanière, les infractions sont
constatées, à titre principal par les fonctionnaires de l’administration des
douanes tels que les inspecteurs, les officiers contrôleurs et sous-officiers. La
loi n° 93- 06 du 04 février 1996 portant Code forestier donne également aux
agents forestiers le pouvoir de constater les infractions en matière forestière.

Mais, dans le cadre de ce cours, nous intéresserons essentiellement à la police


judiciaire, en étudiant d’une part le corps de la police judiciaire (Paragraphe
I) avant d’analyser d’autre part le contrôle de la police judiciaire (Paragraphe
II).

Paragraphe I : L’organisation de la police judiciaire

Sur le plan juridique, le mot police peut avoir deux sens.


D’un point de vue organique, la police désigne l’ensemble des fonctionnaires
chargés de maintenir l’ordre public et de constater les infractions. On parle
des fonctionnaires de police.

Dans un sens fonctionnel, la police désigne l’ensemble des actes accomplis


dans le cadre de l’exécution des lois et des règlements et de la sanction de la
violation de ces règles. De ce point de vue, il convient de distinguer la police
administrative de la police judiciaire.

La police administrative est constituée de l’ensemble des mesures de


protection des personnes et des biens ayant pour objet de garantir la sécurité
publique, la tranquillité publique et l’ordre public. Cette police est
essentiellement préventive dès lors qu’elle est destinée à éviter la commission
d’infractions pénales.

La police judiciaire a pour objet la constatation des infractions, la recherche et


l’arrestation de leurs auteurs51. Cette police judiciaire est pour l’essentiel une
police répressive qui suppose la commission d’infractions.

Le personnel de la police judiciaire se compose de plusieurs catégories. Il y


ainsi les officiers de police judiciaire (I) et les agents de police judiciaire (I).

I : Les officiers de police judiciaire (OPJ)

Pour une bonne appréhension du rôle des autorités de police judiciaire dans
la procédure pénale, il est utile de connaître la composition (A) et les
attributions des officiers de police judiciaire (B).

A- La composition du personnel des OPJ

La liste des OPJ est fixée par l’article 15 du code de procédure pénale. Ce texte
confère la qualité d’officier de police judiciaire :
- aux officiers de gendarmerie (les officiers généraux à savoir les
généraux de brigade, de division et de corps d’armée, les officiers
supérieurs, à savoir les commandants, lieutenants-colonels et colonels
et les officiers subalternes que sont les sous-lieutenants, les lieutenants
et les capitaines ;
- aux sous-officiers de gendarmerie exerçant les fonctions de
commandant de brigade, les commissaires de police, les officiers de
police, les élèves officiers et les sous-officiers de gendarmerie
nominativement désignés par arrêté conjoint du ministre de la Justice et
du ministre des Forces armées après avis conforme d’une commission ;
- aux fonctionnaires des cadres de police nominativement désignés par
arrêté du ministre de la Justice sur proposition des autorités dont ils
relèvent, après avis conforme d’une commission.

51
J. CATHELINEAU, « La gendarmerie », D. 1964, chr. 109 ; CHAUMEIL, La police judiciaire,
Paris, Sirey, 1953 ; BESSON, « La police judiciaire et le Code de procédure pénale »,
D.1958, chr. 159.
B- Les attributions des OPJ

Selon l’article 16 du Code de procédure pénale, les Officiers de police judiciaire


sont chargés de rechercher et de constater les infractions à la loi pénale, d’en
rassembler les preuves et d’en rechercher les auteurs tant qu’une information
n’est pas ouverte.

Lorsqu’une information est en effet ouverte, les Officiers de police judiciaire


exécutent ces attributions sur délégations des juridictions d’instruction et
défèrent à leurs réquisitions.

Les Officiers de police judiciaire sont chargés de recevoir les plaintes et


dénonciations, mais aussi de procéder aux enquêtes préliminaires.

De même, en cas de crime ou délit flagrant ils exercent, dans le cadre de


l’enquête, les prérogatives que la loi confère aux officiers de police judiciaire.

Ils peuvent également recevoir les déclarations des victimes désireuses de se


constituer partie civile. La constitution de partie peut donc se faire devant
l’Officier de police judiciaire (article 16 alinéa 4 CPP).

La loi leur reconnaît le droit de requérir directement le concours de la force


publique pour l’exécution de leur mission.

Seul l’Officier de police judiciaire peut exécuter les commissions rogatoires


des juges d’instruction (article 142 CPP) ou décider d’une mesure de garde à
vue (article 55 CPP).

L’article 18 du Code de procédure pénale fait obligation aux officiers de police


judiciaire de rendre compte sans délai au Procureur de la République ou à son
délégué des crimes, délits et contraventions dont ils ont connaissance.

Ils doivent également, à la clôture de leurs opérations faire parvenir


directement à ce magistrat l’original des procès-verbaux ainsi que tous actes
et documents y afférents.

Les objets saisis sont tenus à la disposition du ministère public au greffe de la


juridiction. Dans l’accomplissement de leur mission, les Officiers de police
judiciaire sont assistés par des agents de police judiciaire.

II : Les agents de police judiciaire

Sont agents de police judiciaire, lorsqu’ils n’ont pas la qualité d’Officier de


police judiciaire, les militaires de la gendarmerie et les membres des forces de
police (article 19 du CPP).
En vertu de l’article 20 du Code de procédure pénale, les agents de police
judiciaire ont pour mission :
- de seconder, dans l’exercice de leurs fonctions, les officiers de police
judiciaire;
- de rendre compte à leurs chefs hiérarchiques de tous crimes, délits ou
contraventions dont ils ont connaissance;
- de constater, en se conformant aux ordres de leurs chefs, les infractions
à la loi pénale et de recueillir tous les renseignements en vue de
découvrir les auteurs de ces infractions, le tout dans le cadre et dans les
formes prévus par les lois qui leur sont propres.

Cependant les gendarmes sont habilités à dresser procès-verbal des


infractions qu’ils constatent et à recevoir, dans la forme requise, les
déclarations qui leur sont faites par toutes personnes susceptibles de leur
fournir des indices, preuves et renseignements sur les auteurs et complices de
ces infractions. Ils n’ont cependant pas qualité pour décider des mesures de
garde à vue.

Paragraphe II : Le contrôle et la responsabilité des officiers de police


judiciaire

Dans l’exercice de leurs missions, les personnels de police judiciaire sont


soumis à un contrôle (A) qui peut aboutir à l’engagement de leur
responsabilité (B).

A- Le contrôle de la police judiciaire

L’exercice des fonctions de police judiciaire implique des atteintes aux libertés
individuelles. C’est la raison pour laquelle le législateur a organisé des
mécanismes de contrôle de la police judiciaire par les autorités judiciaires.

Ainsi, la police judiciaire est placée sous la direction du procureur de la


République, sous la surveillance du Procureur général près les Cours d’appel
et sous le contrôle de la chambre d’accusation.

Dans le cadre de ce contrôle, la chambre d’accusation est saisie soit par le


procureur général ou par son président ; elle peut même se saisir d’office à
l’occasion de l’examen d’une procédure.

B- La responsabilité de la police judiciaire

Dans l’exercice de ses fonctions, l’Officier de police judiciaire peut voir sa


responsabilité engagée.

Il peut d’abord engager sa responsabilité disciplinaire. En effet, les


fonctionnaires de la police judiciaire sont avant tout des membres de la
fonction publique. À ce titre, ils peuvent faire l’objet de sanctions disciplinaires
de la part de leurs supérieurs hiérarchiques.
Les Officiers de police judiciaire peuvent également engager leur
responsabilité civile lorsqu’ils commettent des fautes civiles dans l’exercice de
leurs fonctions dans les conditions du droit commun (articles 118 et suivants
du Code des obligations civiles et commerciales).

Ils peuvent aussi engager leur responsabilité pénale. Selon l’article 216 du
Code de procédure pénale, si la chambre d’accusation estime que l’officier de
police judiciaire a commis une infraction à la loi pénale (séquestration
arbitraire, torture, corruption, etc…) , elle ordonne en outre la transmission du
dossier au Procureur général.

La procédure à suivre est réglée par les articles 661 et suivants du code de
procédure pénale.

La Chambre d’Accusation prononce s’il y a lieu le renvoi devant la Cour


d’appel, composée de cinq magistrats au moins, seule compétente pour
statuer sur le crime commis par l’OPJ.

SECTION 2 : LES ORGANES DE JUSTICE,

Les organes de justice sont chargés de trancher les litiges qui s’élèvent au
cours du procès pénal. Il existe deux types d’organes de justice chargés de
fonctions juridictionnelles. Il s’agit d’une part des organes représentant le
ministère public (Paragraphe I) et d’autre part de ceux qui sont chargés de
l’instruction des affaires (Paragraphe II). Les organes de jugement étant
consacrés par ailleurs dans la phase de jugement des infractions.

PARAGRAPHE I : Les organes du ministère public

Le ministère public, organisé sous forme de Parquets, est constitué des


magistrats du parquet encore appelés « magistrats debout » parce qu’ils se
lèvent à l’audience pour prendre leurs réquisitions52. Le rôle important que
joue le ministère public dans le déroulement de la procédure pénale justifie
qu’il soit nécessaire d’étudier son organisation (A) avant d’étudier ses
caractères (B).

A. L’organisation du ministère public

Il s’agira de distinguer le ministère public près les juridictions ordinaires (1)


du ministère public près les juridictions d’exception (2).

1. Le ministère public près les juridictions ordinaires

Auprès du tribunal d’instance, le ministère public est représenté par le délégué


du Procureur de la République ou son adjoint. Cependant en l’absence d’un

52
J. P. NADAL, « Le ministère public face à certains impératifs », RSC, 1973, p. 492.
délégué du Procureur de la République près le tribunal D’INSTANCE, l’article
24 du code de procédure pénale prévoit en son alinéa 2 que les fonctions du
ministère public sont assurées par le Président de cette juridiction, sous le
contrôle direct du Procureur de la République.

Auprès du tribunal de grande instance, le ministère public est représenté par


le Procureur de la République en personne ou par ses substituts. En cas
d’empêchement ou d’absence momentanée, il est remplacé, s’il n’a pas de
substitut, par un délégué du Procureur de la République du ressort ou par un
juge commis à cet effet par le Président du Tribunal de grande instance sur sa
proposition ou à défaut sur celle du Procureur Général.

Auprès de la cour d’appel, le ministère public est représenté par le Procureur


Général en personne, ou par ses substituts que l’on appelle substituts
généraux ou avocats généraux selon leur grade.

2. Le ministère public près les juridictions d’exception

Devant la Haute Cour de Justice, les fonctions du ministère public sont


assurées par le Procureur Général près la cour suprême alors que devant la
commission d’instruction de la haute cour de justice, celles-ci sont dévolues
au Procureur Général près la Cour d’Appel de Dakar.

Devant le tribunal militaire, le ministère public est représenté par le procureur


de la République près le tribunal de grande instance hors classe de Dakar ou
un de ses substituts lorsque l’infraction a été commise par un militaire dont le
grade ne dépasse pas celui de capitaine. Au-delà de ce grade, l’affaire est
directement portée devant la cour d’appel de Dakar où le ministère public est
assuré par le Procureur Général près ladite cour ou un de ses avocats
généraux.

Devant le tribunal pour enfants, l’article 570, alinéa 3 du code de procédure


pénale prévoit que le ministère public est assuré par un substitut du Procureur
de la République chargé cumulativement avec ses fonctions, des poursuites et
du règlement des affaires concernant les mineurs.

Devant la cour de répression de l’enrichissement illicite, il revient au procureur


spécial assisté d’un substitut de remplir les fonctions de ministère public.

B. Le statut des magistrats du ministère public

Les magistrats du ministère public sont régis par des règles statutaires qui
présentent des spécificités par rapport à la condition des magistrats du siège.
Le ministère public est ainsi caractérisé par la hiérarchie (1), l’indivisibilité (2)
l’irresponsabilité (3) et le caractère irrécusable (4).
1. La hiérarchie

La soumission des magistrats du ministère publique, chargé des poursuites et


de requérir l’application des peines faits l’objet de nombreuses critiques. Il est
ainsi reproché à ce système de la hiérarchie des magistrats représentant le
ministère public de ne contredire le principe d’indépendance de la justice,
notamment à l’égard du pouvoir Exécutif. Ainsi, l’article 7 de la Loi organique
n° 2017-10 du 17 janvier 2017 portant Statut des magistrats53 prévoit que les
magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs
supérieurs hiérarchiques et sous l’autorité du Garde des Sceaux, Ministre de
la Justice.

En effet, « le Garde des Sceaux, ministre de la Justice peut dénoncer au


Procureur général les infractions à la loi pénale dont il a connaissance, lui
enjoindre d’engager ou de faire engager les poursuites ou de saisir la
juridiction compétente de telles réquisitions écrites qu’il juge opportunes54 ».

Il ressort de ce texte que si le ministre de la Justice peut donner l’ordre de


poursuivre, il ne peut toutefois ordonner le classement d’une affaire. On dit
que l’ordre de poursuivre est légal, mais l’ordre de ne pas poursuivre est
illégal.

Par ailleurs, parallèlement à ces instructions particulières concernant une


procédure, le ministre peut agir par voie de circulaire pour définir la politique
pénale, destinée à assurer une application coordonnée et cohérente de la loi
répressive55.

Par ailleurs, il résulte de l’article 29 du Code procédure pénale que le


Procureur général a autorité sur tous les magistrats du ministère public du
ressort de la cour d’appel. A l'égard de ces magistrats, le Procureur général a
les mêmes prérogatives que celles reconnues au ministre de la Justice. Il est
donc le chef hiérarchique de tous les membres du ministère public exerçant
dans le ressort de sa Cour d’Appel.

Enfin, il convient de préciser que, lorsqu’il exerce les fonctions du ministère


public, le président du tribunal d’instance demeure sous le contrôle du
Procureur de la République près le tribunal de grande instance du ressort56.

Le ministère public est ainsi tenu de prendre des réquisitions écrites


conformes aux instructions qui lui sont données par ses supérieurs
hiérarchiques.

53
J.O. N° 6986 du mercredi 18 janvier 2017.
54
Article 28 du code de procédure pénale.
55
M. DELMAS-MARTY, « La politique pénale est-elle une politique publique comme les
autres ? », RSC, janvier-mars 1994, p. 151 ; V. également, Y. AGUILA, « La politique
pénale est-elle une politique publique comme les autres ? », Rev. Adm., 1993, p. 7.
56
Article 38 du code de procédure pénale.
Il y a lieu cependant de souligner que le législateur ne confère pas au Procureur
général près la cour Suprême cette autorité sur les parquets.

D’une manière général le Procureur général exerce un pouvoir de direction sur


les Procureurs de la République du ressort de sa cour d’appel. Ceux-ci ont les
mêmes prérogatives à l’égard de leurs substituts et ainsi que sur leurs
délégués.

Cependant ce pouvoir comporte une limite puisqu’à l’audience, lorsqu’il


requiert, le magistrat du parquet est libre de dire tout ce qu’il croit au bien de
la justice. On exprime cette idée en disant que « la parole est libre et la plume
serve ».

2. L’indivisibilité

L’indivisibilité du ministère public signifie que chacun de ses magistrats


représente le parquet tout entier. C’est pour cette raison qu’ils peuvent se
remplacer mutuellement l’un débutant une audience et prenant la parole pour
poser des questions, l’autre terminant la même audience en prenant des
réquisitions.

De même, un acte portant mention du Procureur de la République peut très


bien être signé par l’un de ses substituts ou délégué.

Il en est autrement pour les magistrats du siège qui à l’occasion du jugement


d’une affaire, sont tenus de poursuivre leur office jusqu’au prononcé de la
décision.

3. L’irresponsabilité

Les magistrats du parquet sont irresponsables. A la différence de la partie


civile qui en cas de non-lieu peut être condamnée à des dommages-intérêts,
le ministère public qui a intenté à tort l’action publique ne peut jamais être
condamné à des dommages-intérêts envers le prévenu acquitté.

Mais, cette irresponsabilité n’est pas totale. S’il commet une faute personnelle,
sa responsabilité civile peut être mise en jeu, comme pour les magistrats du
siège, par la procédure de prise à partie.

S’il commet une infraction, il pourra être poursuivi, mais il bénéficie d’un
privilège de juridiction.

4. Le caractère irrécusable

Le ministère public, en tant que partie au procès pénal, est irrécusable. La


récusation est l’acte par lequel un plaideur refuse d’être jugé par ou en
présence d’un magistrat dont il conteste l’impartialité notamment en raison
des liens qui existent entre ce magistrat et l’autre partie57.

En effet, alors qu’un magistrat du siège peut être récusé aussi ben en matière
civile que pénale, le magistrat du parquet ne peut être récusé. Le plaideur ne
peut récuser son adversaire58.

Paragraphe I : Les organes d’instruction

Les juridictions d’instruction n’interviennent pas forcément dans toutes les


affaires. Il existe en effet des affaires qui sont portées directement devant les
juridictions de jugement. Par exemple, les contraventions et les délits qui ne
présentent pas de difficultés sont jugés directement en citation directe ou en
flagrant délit.

Cependant, pour d’autres affaires le recours au juge d’instruction est


nécessaire. Il en est ainsi chaque fois qu’il y a des éléments à élucider par
exemple lorsque l’auteur de l’infraction est inconnu.

Il existe une juridiction d’instruction du premier degré, à savoir le juge


d’instruction (I) et une juridiction d’instruction du second degré : la chambre
d’accusation (II).

I : La juridiction d’instruction du premier degré

Le juge d’instruction est la juridiction d’instruction du premier degré. Il s’agit


d’une juridiction à part. Nous allons étudier son statut ( A) avant d’analyser
les garanties d’indépendance que la loi a prévues pour ce magistrat ( B).

A- Le statut du juge d’instruction

Le juge d’instruction est un magistrat du siège59. En tant que tel, il bénéficie


de toutes les garanties des magistrats du siège. La protection statutaire du
juge d’instruction se manifeste à travers les dispositions régissant sa
nomination et son indépendance. Il existe un juge d’instruction dans chaque
tribunal régional. Selon l’article 78 de la loi organique n° 2017-10 du 17
janvier 2017, le juge d’instruction est nommé par arrêté du Garde des Sceaux
ministre de la Justice pour une période de trois ans renouvelables. En cas
d’empêchement, il est remplacé par un juge provisoirement désigné par
ordonnance du président du tribunal de grande instance. Cette situation se
produit exceptionnellement puisque dans la plupart du temps, il y a plusieurs
juges d’instruction dans les tribunaux de grande instance.

57
V. Vocabulaire juridique H CAPITANT. Il n’empêche qu’un magistrat du parquet puisse
décider de lui-même de s’abstenir de participer au jugement d’une affaire.
58
VIALA, « Le Ministère Public peut-il être récusé ? », Gaz. Pal 1980, I, doc. 163.
59
Patrick Maistre du Chambon, Le juge d’instruction, 3e édition, Dalloz, 1985 ; Bernard
BOULOC, « Le rôle du juge d’instruction dans la recherche de la vérité », Petites affiches,
n° 130, du 29 octobre 1986 ; M. GARREL, « La juridiction d’instruction est-elle
indispensable ? », JCP, 1986, I, 3266.
Lorsqu’il, dans un tribunal d’instance il n’y a qu’un seul juge ; celui-ci exerce
les fonctions de juge d’instruction qu’il cumule avec les fonctions de juge de
jugement et éventuellement de délégué du procureur de la République60.

B- Les garanties d’indépendance du juge d’instruction

La loi a organisé un dispositif tendant à garantir l’indépendance du juge


d’instruction aussi bien par rapport au Procureur de la République (a) que par
rapport à la chambre d’accusation (b).

a) L’indépendance du juge d’instruction par rapport au Procureur de


la République

Dans la conduite de l’instruction, le juge d’instruction est totalement


indépendant et libre d’accomplir les actes qu’il estime nécessairement l’ordre
qu’il juge bon de suivre. Il n’est pas tenu de déférer aux réquisitions du
ministère public. Il peut refuser d’accomplir un acte sollicité par le Procureur
de la République, tout comme il peut accomplir un acte contre la volonté de
celui-ci.

Mais, en droit sénégalais, force est de constater l’existence d’atteintes à


l’indépendance du juge d’instruction par rapport au Parquet61.

D’une part, en cas de pluralité de juge d’instruction, il revient au procureur de


la République de choisir le juge d’instruction qui sera chargé de l’affaire après
simple, avis du président du tribunal qui ne lie pas le procureur (article 74 du
Code de procédure pénale). De sorte que celui-ci peut passer outre l’avis du
Président et désigner le juge qu’il estime le plus docile.

D’autre part pour certaines infractions jugées graves, le juge d’instruction est
lié par les réquisitions du ministère public.

b) L’indépendance du juge d’instruction par rapport à la chambre


d’accusation

La chambre d’accusation est la juridiction d’instruction du second degré. A ce


titre elle dispose d’importantes prérogatives dans le déroulement de la
procédure pénale et, notamment, à l’égard du juge d’instruction.

Elle exerce en effet le contrôle et la surveillance de l’activité des cabinets


d’instruction. Ainsi, le juge d’instruction est surveillé par le président de la

60
On a pu qualifier le président du tribunal d’instance investi des pouvoirs de juge
d’instruction, de juge de jugement et de délégué du procureur de « monstre juridique ».
61
Sur l’ensemble de la question, V. M. DIOP, « Les limites au pouvoir d’appréciation du
juge pénal », in « Actes du séminaire liberté d’appréciation du juge », RSD, n° 28, janvier,
février mars 1983, p. 13 et ss. ; M. NDIAYE, « Les atteintes à la liberté d’appréciation du
juge relativement à l’article 140 du Code de procédure pénale », in « Actes du séminaire
liberté d’appréciation du juge », RSD, n° 28, janvier, février mars 1983, p. 59 et s.
chambre d’accusation qui s’assure du bon fonctionnement des cabinets
d’instruction. A cet égard, chaque cabinet d’instruction établit à son intention
un état des affaires en cours portant mention pour chacune d’elles de la date
du dernier acte accompli. Par ailleurs, lorsque l’instruction d’une affaire dure
plus de 6 mois, le juge d’instruction fait un rapport circonstancié adressé au
président de la Chambre d’accusation.

La chambre d’accusation est habilitée à infirmer les ordonnances du juge


d’instruction rendues en violation de la loi.

Toutefois, elle ne peut imposer au juge d’instruction l’accomplissement d’un


acte contraire à sa conviction. Par exemple, lorsque le magistrat instructeur
refuse de mettre en détention une personne et que le procureur relève appel
contre l’ordonnance de refus de placement sous mandat de dépôt, si la
chambre d’accusation n’est pas du même avis, elle ne peut imposer au juge
d’instruction une décision de placement sous mandat de dépôt. La chambre
d’accusation doit prendre elle-même une décision de placement sous mandat
de dépôt.

II : La juridiction d’instruction du second degré : la chambre d’accusation

La chambre d’accusation est la juridiction d’instruction du second degré62. Elle


est réglementée par les articles 185 à 217 du Code de procédure pénale. Ces
textes prévoient la composition (A) et les attributions de la chambre
d’accusation (B).

A- La composition de la chambre d’accusation

La composition de la chambre d’accusation est fixée par l’article 185 du Code


de procédure pénale. La chambre d’accusation est une section spéciale de la
Cour d’appel.

Elle est composée d’un président de chambre, ou à défaut d’un conseiller,


exclusivement attaché à ce service, et de deux conseillers qui peuvent, en cas
de besoin, assurer le service des autres chambres de la cour. Le président et
les conseillers composant la chambre d’accusation sont désignés chaque
année, pour la durée de l’année judiciaire suivante, par l’assemblée générale
de la Cour.

B- Les attributions de la chambre d’accusation

En tant que juridiction d’instruction du second degré, la chambre d’accusation


est juge d’appel des ordonnances du juge d’instruction et juge de la régularité
de la procédure suivie devant celui-ci. Elle a ainsi le pouvoir d’infirmer une
ordonnance du juge d’instruction.

62
Wilfrid JEANDIDIER, La juridiction d’instruction du second degré, Thèse Nancy, 1975,
édition Cujas, 1975 ; P. CHAMBON, La chambre d’accusation, Dalloz, 1978.
Par ailleurs la chambre d’accusation est l’organe disciplinaire des Officiers de
police judiciaire et peut infliger des sanctions à l’encontre de ceux d’entre eux
qui ne respecteraient pas les règles liées à la délicatesse de leurs fonctions.

La chambre d’accusation est par également compétente pour donner un avis


dans les procédures d’extradition63.

Elle est juge du règlement des conflits de compétence entre deux juges
d’instruction, deux tribunaux de simple police, deux tribunaux correctionnels
se trouvant dans le ressort d’une même Cour d’Appel.

2ème PARTIE : LA CONDUITE DE LA PROCÉDURE PÉNALE

Le déroulement de la procédure pénale permet de distinguer celle-ci en des


phases qui poursuivent des objectifs avec des acteurs différents. La procédure
pénale vise en effet à assurer la constatation des infractions, la recherche des
éléments de preuve et le jugement des affaires. C’est ainsi qu’il est possible
d’appréhender le déroulement de la procédure pénale en distinguant trois
phases : l’enquête, l’instruction et le jugement. Les deux premières phases –
l’enquête et l’instruction (Titre 1) servent la même finalité qui est de réunir
les éléments nécessaires au jugement des affaires pénales (Titre 2).

TITRE I : L’enquête et l’instruction

L’importance des règles de procédure pénale s’apprécie essentiellement au


niveau des phases ou étapes cruciales de l’enquête et de l’instruction. Ces
étapes déterminent largement l’issue du procès pénal dans le jugement qui
sera rendu en statuant sur les faits imputés à la personne poursuivie. Lors de
la phase de jugement, le juge s’appuie sur les éléments du dossier tels qu’il
résulte de l’enquête et, le cas échéant, de l’instruction.

Chapitre 1 : La phase de déroulement de l’enquête pénale

Le Code de procédure pénale distingue l’enquête préliminaire et l’enquête sur


infraction flagrante. Il ressort de cette distinction que les pouvoirs reconnus
aux enquêteurs sont plus ou moins importants selon que l’on considère
l’enquête de flagrance (Section 2) ou l’enquête préliminaire (Section 1).

63
L’extradition est une procédure par laquelle un État peut être amené à remettre un
individu, sous le coup de poursuites ou d’une condamnation pénales et se trouvant sur son
territoire, à un autre Etat qui le réclame pour y être jugé ou subir sa peine.
Section 1 : La phase de l’enquête préliminaire

L’enquête préliminaire est règlementée par les articles 67 à 69 du Code de


procédure pénale64, lesquels confient aux officiers de police judiciaire la
possibilité d’y procéder soit d’office soit sur instructions du procureur de la
République. Cette enquête est conduite par des organes définis par le Code de
procédure pénale (Parag.1.) et qui sont dotés de certains pouvoirs de police
judiciaire (Parag.2).

Parag.1 : La conduite de l’enquête préliminaire

Les organes de l’enquête préliminaire sont les personnels de police judiciaire,


auxquels il faut ajouter les fonctionnaires et agents de certaines administrations.

L’enquête préliminaire peut être ouverte d’office par les officiers de police
judiciaire pour donner suite aux plaintes et dénonciations dont ils sont saisis (art
16) ou au vu des comptes rendus des agents de police judiciaire relativement aux
informations dont ils ont connaissance (article 20 du CPP).

Elle peut également être ouverte sur instruction du procureur de la République qui
reçoit les plaintes et dénonciations des particuliers et les informations des
autorités constituées, des officiers publics ou des fonctionnaires qui, dans
l’exercice de leurs fonctions, peuvent avoir connaissance d’une infraction (art 32
du CPP).

Parag.2 : Les pouvoirs des autorités dans l’enquête préliminaire

Contrairement à l’enquête de flagrance qui a un caractère coercitif, l’enquête


préliminaire repose essentiellement sur l’assentiment, le consentement des
personnes impliquées dans la conduite des opérations.

L’absence de pouvoir coercitif apparait dans l’accomplissement de certaines


opérations telles que les auditions (A), les perquisitions visites domiciliaires et
saisies de pièces à conviction (B).

A- Les auditions et mises en garde à vue

Le Code de procédure pénale n’a pas expressément prévu la possibilité pour


l’OPJ de procéder à l’audition des personnes susceptibles d’apporter des
indications sur les circonstances de l’infraction dans le cadre d’une enquête
préliminaire. Il n’en reste pas moins que ces auditions peuvent être faites avec
le consentement des personnes concernées.

64
G. DENIS, « De quelques aspects de l’enquête préliminaire », Rev. pol. nat.1969, juin-
juillet, p. 5 ; BLONDET, « L’enquête préliminaire dans le nouveau code de procédure pénale
», JCP, 1959, I, 1513.
En ce qui concerne le placement en garde à vue, il résulte de l’article 69 du
Code de procédure pénale que l’officier de police judiciaire peut retenir une
ou plusieurs personnes contre lesquelles existent des indices de culpabilité.
Cependant, il ne peut le faire que pour les nécessités de l’enquête et ne peut
les retenir plus de quarante-huit heures.

Les délais de garde à vue sont doublés en ce qui concerne les crimes et délits
contre la sûreté de l’État, les crimes et délits en période d’état de siège, d’état
d’urgence ou d’application de l’article 47 de la Constitution, sans que ces deux
causes de doublement puissent se cumuler.

Dans ce cas l’OPJ doit, conformément à l’article 55 alinéa 9 du Code de


procédure pénale, informer le cas échéant la personne gardée à vue des motifs
de la prolongation de sa garde à vue en lui notifiant son droit de se faire
examiner par un médecin et son droit de se faire assister par un conseil. Ces
mentions sont prescrites à peine de nullité du procès-verbal.

B- Les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à


conviction

En vertu de l’article 68 du Code de procédure pénale, les perquisitions, visites


domiciliaires et saisies de pièces à conviction ne peuvent être effectuées sans
l’assentiment exprès de la personne chez qui l’opération a lieu.

Cet assentiment doit faire l’objet d’une déclaration écrite de la main de


l’intéressé. Si celui-ci ne sait pas écrire, le procès- verbal en fait mention ainsi
que de son assentiment.

Dans l’exécution de ces opérations les OPJ doivent en outre se conformer aux
garanties prévues par les articles 49 à 51 du Code de procédure pénale dans
le cadre de l’enquête de flagrance. Il s’agit de la présence de la personne
soupçonnée ou de celle au domicile de laquelle les opérations ont lieu et de
l’interdiction de la perquisition de nuit.

Section 2 : L’enquête sur infraction flagrante

L’enquête menée en cas d’infraction flagrante est caractérisée par son


caractère coercitif. Dans ce cas, la police judiciaire dispose de pouvoirs
coercitifs étendus justifiés par l’évidence des faits65. En raison de cet aspect
coercitif de l’enquête en cas de flagrance, de nature à porter atteinte aux
libertés individuelles, il importe de cerner les contours de la notion d’infraction
fragrante (Parag.1 ) avant d’étudier les attributions de la police judiciaire en
cas de flagrance (Parag.2 ).

65
V. A. FAYE, « Le suspect dans les enquêtes de police », Rev.Ass.sén.dr.pén, 2010, n° 9,
p. 22.
Parag.1 : La notion d’infraction flagrante

Il résulte de l’article 45 alinéa 1e du CPP que le législateur distingue l’infraction


flagrante proprement dite de l’infraction fragrante par assimilation.

A- L’infraction flagrante proprement dite

L’on qualifie de crime ou de délit flagrant, le crime ou le délit qui se commet


actuellement. Il s’agit dès lors d’une infraction dont l’auteur est appréhendé au
moment où il accomplit ses actes. Il en est ainsi lorsque la personne est
appréhendée au moment où elle porte sur sa victime les coups mortels. Tel est
également le cas lorsque l’auteur d’un vol est appréhendé pendant qu’il réalise
son forfait. Il est pris, dit-on, « la main dans le sac ».

Est aussi considéré comme flagrant, le crime ou le délit qui vient de se commettre.
Dans cette hypothèse, les éléments constitutifs de l’infraction sont réunis, la
personne soupçonnée tentant généralement de se retirer une fois son forfait
commis.

Il y a également crime ou délit flagrant, lorsque dans un temps très voisin de


l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est
trouvée en possession d’objets ou présente des traces ou indices laissant penser
qu’elle a participé au crime ou au délit.

A souligner que la condition relative à l’intervention des enquêteurs dans un temps


très voisin de l’infraction, est nécessaire à la constitution de la flagrance. Sa
réalisation est laissée à l’appréciation des enquêteurs, sous le contrôle des
magistrats.

A côté de ces cas de crimes ou de délits flagrants, le législateur assimile certains


cas à la flagrance.

B- L’infraction flagrante par assimilation

L’article 45, alinéa 2 du Code procédure pénale assimile aux infractions flagrantes
les crimes ou délits qui, même non commis dans les circonstances de flagrance,
ont été perpétrés dans une maison dont le chef requiert le Procureur de la
République ou un officier de police judiciaire de le constater.

Les autorités chargées de procéder à une enquête de flagrance (ou sur infraction
flagrante) sont celles de la police judiciaire (qui agissent sous la direction du
Procureur de la République), le Procureur de la République et le juge d’instruction.

En effet lorsqu’une infraction flagrante a été commise, le procureur de la


République peut se transporter sur les lieux. Dès lors, l’arrivée du procureur de la
République dessaisit l’officier de police judiciaire (article 60 du Code de procédure
pénale).
Par ailleurs, le juge d’instruction pouvant également se transporter sur les lieux,
son arrivée produit les mêmes effets à l’égard du procureur qui se trouve
également dessaisi. Cependant, le juge d’instruction n’étant pas habilité à exercer
l’action publique, il est tenu de transmettre les pièces de l’enquête une fois ses
opérations terminées (art 64 du Code de procédure pénale).

Au demeurant, l’article 65 du Code de procédure pénale dispose que dans les cas
de crime ou délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a
qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police
judiciaire le plus proche. Il s’agit cependant d’une situation exceptionnelle où l’on
confère aux citoyens les pouvoirs de police judiciaire.

Parag.2 : Les pouvoirs de la police judiciaire en cas de flagrance


La perquisition. La perquisition est prévue par l’article 48 du CPP. Elle peut
être définie comme la recherche d’indices ou de pièces à conviction utiles à la
manifestation de la vérité, dans un lieu clos. Selon l’article 48 du CPP, l’OPJ
peut effectuer des perquisitions aux domiciles de toutes personnes qui
paraissent avoir participé à la commission de l’infraction ou qui paraissent
détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés.

Ainsi, l’officier de police judiciaire se transporte sans désemparer au domicile


de ces dernières pour y procéder à une perquisition dont il dresse procès-
verbal. Il s’agit d’un procès-verbal de perquisition.

Seul l’OPJ, la personne soupçonnée, la personne au domicile de laquelle se fait


la perquisition ou éventuellement l’expert commis par l’OPJ, ont le droit de
prendre connaissance des papiers ou documents avant la saisie.

La garde à vue peut être définie comme le fait pour l’OPJ de garder à sa
disposition une personne susceptible de fournir des renseignements sur les
faits ou les documents saisis, pour les nécessités de l’enquête.
La garde à vue est encadrée par l’article 55 du Code de procédure pénale. Selon
ce texte, l’OPJ peut être amené à garder à sa disposition une ou plusieurs
personnes pour lesquelles il apparaît nécessaire d’établir ou de vérifier
l’identité ou qui sont susceptibles de fournir des renseignements sur des faits
constitutifs d’un crime ou d’un délit. Dans ce cas, ces personnes ne peuvent
être gardée à vue plus de 24 heures.
Par contre, s’il existe contre une personne des indices graves et concordants
de nature à motiver son inculpation, l’OPJ doit la conduire devant le procureur
de la République sans pouvoir garder à vue la personne plus de 48h. mais ce
délai peut être prorogé d’un nouveau délai de 48h (article 55, alinéa 7, du Code
de procédure pénale).
En tout état de cause, tous les délais prévus par l’article 55 du Code de
procédure pénale sont doublés en période d’état d’urgence notamment.
Chapitre 2 : L’instruction préparatoire

L’instruction est la phase de la procédure pénale au cours de laquelle le juge


d’instruction recherche, sous le contrôle de la chambre d’accusation, s’il existe
des charges sérieuses qui justifient le renvoi de l’inculpé devant la juridiction
de jugement. Il s’agit d’une « instruction préparatoire » dès lors qu’elle permet
de procéder à la « mise en état de l’affaire ». Elle est conduite par le juge
d’instruction (Section 1) qui est, dans l’exercice de cette fonction, habilité à
prendre certains actes ainsi que des décisions juridictionnelles (Section 2).

Section I : La conduite de l’instruction

L’instruction préparatoire est mise en œuvre après la mise en mouvement de


l’action publique, contrairement à l’enquête préliminaire.

Dans le déroulement de l’instruction, le juge d’instruction peut être amené à


prendre divers actes. Il en est ainsi des actes d’information, des mandats
(Parag.1) et des ordonnances (Parag.2).

Parag.1 : Les actes d’information et les mandats

Aux termes de l’article 72 du Code de procédure pénale, « le juge d’instruction


procède conformément à la loi à tous les actes d’information qu’il juge utiles
à la manifestation de la vérité ». De manière concrète, le juge d’instruction
procède aux perquisitions, aux saisies ou aux interrogatoires. Il peut
également ordonner une expertise.

Les actes ainsi visés ont pour objet de réunir les éléments de preuve
nécessaires au jugement de l’affaire. Ils constituent dès lors les principaux
actes d’information qui sont accomplis par le magistrat instructeur.

Le juge d’instruction peut, en fonction de la situation de la personne


poursuivie, décerner mandat de comparution, d’amener, de dépôt ou d’arrêt66.

Le mandat de comparution a pour objet de mettre l’inculpé en demeure de se


présenter devant le juge à la date et à l’heure indiquées par ce mandat67.

Le mandat d’amener est l’ordre donné par le juge à la force publique de


conduire immédiatement l’inculpé68 ou un témoin devant lui.

66
Ces mandats sont exécutoires sur tout le territoire de la République (Article 110 CPP).
67
Ce mandat n’est pas, en soi, très coercitif. C’est ce qui explique qu’il puisse être notifié
par voie d’huissier de justice (art. 115, al. 4 CPP). Si l’inculpé ne comparaît pas, le juge
d’instruction lui décernera alors un mandat plus coercitif, le mandat d’amener.
68
L’inculpé est la personne qui, au cours d’une instruction, a fait l’objet d’une inculpation.
Lorsqu’à l’issue de cette information cette personne est renvoyée devant le tribunal de
police ou devant le juge correctionnel, elle devient un « prévenu ». Par contre, dans le cas
où elle fait l’objet d’une ordonnance de mise en accusation qui saisit les chambres
criminelles, la personne prend l’appellation d’ « accusé ».
Le mandat de dépôt est un ordre donné par le juge d’instruction au directeur
de l’établissement pénitentiaire de recevoir et de retenir l’inculpé. Ce mandat
doit être motivé. Le juge d’instruction ne peut décerner un mandat de dépôt
qu’après interrogatoire de la personne poursuivie et si l’infraction comporte
une peine d’emprisonnement au moins correctionnelle.

La détention provisoire, autrefois appelée détention préventive, est


spécialement organisée par les articles 127 à 141 du Code de procédure
pénale.

Il résulte de ces textes que la volonté du législateur est non seulement de


réduire l’utilisation de cette mesure, qui porte atteinte à la présomption
d’innocence (détention avant jugement), mais également de la rendre
éphémère. C’est en ce sens que la détention provisoire est interdite dans
certains cas (article 127 Code de procédure pénale). C’est également ce qui
explique qu’en matière correctionnelle, la durée de la détention provisoire ne
peut excéder six (6) mois non renouvelables (article 127 bis Code de procédure
pénale).

Dans tous les cas, le juge d’instruction peut placer l’inculpé sous contrôle
judiciaire. Celui-ci consiste pour l’inculpé à se présenter aux dates fixées par
le juge, soit à lui-même, soit à l’officier de police judiciaire qu’il désigne
(article 127 ter Code de procédure pénale).

La détention provisoire est cependant obligatoire dans les cas prévus par la
loi. C’est ainsi qu’aux termes de l’article 139 Code de procédure pénale, « sur
réquisitions motivées du ministère public, le juge d’instruction est tenu de
décerner mandat de dépôt contre toute personne inculpée de l’un des crimes
ou délits prévus par les articles 56 à 10069 et 22570 du Code pénal ».

La détention provisoire est également obligatoire en cas de détournement de


deniers publics, lorsque le montant détourné est au moins égal à un million
de franc et ne fait pas l’objet d’un remboursement ou du cautionnement de
son intégralité ou d’une contestation sérieuse (art 140 Code de procédure
pénale).

La mise en liberté de l’inculpé, sauf disposition législative particulière et


lorsqu’elle n’est pas de droit, peut être ordonnée d’office par le juge
d’instruction (article 128 du Code de procédure pénale).

Le mandat d’arrêt, en fin, est l’ordre donné à la force publique de rechercher


l’inculpé et de le conduire à la maison d’arrêt où il sera détenu.

69
Il s’agit des crimes et délits contre la sûreté de l’État.
70
Il s’agit des dégradations de biens appartenant à l’État ou intéressant la chose publique.
Parag.2 : Les ordonnances du juge d’instruction
Le magistrat instructeur est un, habilité à prendre des décisions
juridictionnelles appelées « ordonnances ». A cet égard, il tranche les
contestations qui s’élèvent au cours de l’instruction (recevabilité de la
constitution de partie civile, compétence, restitution d’objets saisis, charges
qui pèsent sur l’inculpé, etc…).
Le juge d’instruction peut rendre des ordonnances dès l’ouverture de
l’information (A), au cours ou à la clôture de celle-ci (B).

A- Ordonnances relatives à l’ouverture de l’information

Dès l’ouverture de l’information, le juge d’instruction peut être amené à rendre


plusieurs ordonnances. Il peut d’abord répondre au réquisitoire introductif ou
à la plainte avec constitution de partie civile par une ordonnance de refus
d’informer, notamment lorsque les faits portés devant lui ne supportent
aucune qualification pénale (article 77 in fine du Code de procédure pénale).

Il peut, s’il s’agit d’une plainte avec constitution de partie civile, refuser
d’informer en rendant une ordonnance d’irrecevabilité de la constitution de
partie civile au motif que les conditions de fond et de forme ne sont pas
réunies. Il en est ainsi notamment lorsque le plaignant n’a pas respecté son
obligation de consignation, ou n’a pas justifié de sa qualité de partie civile.

Le juge d’instruction devra aussi communiquer au parquet la plainte avec


constitution de partie civile et à cette fin, il rendra une ordonnance de soit-
communiqué, c'est-à-dire qu’il ordonnera que le dossier soit communiqué au
procureur de la République (article 77 alinéa 1e du Code de procédure
pénale)71.

Le magistrat instructeur peut également dès le début de l’information rendre


une ordonnance d’incompétence lorsqu’il constate qu’il n’est pas compétent
(compétence d’attribution ou territoriale) pour connaitre des faits72.

B- Ordonnances relatives au déroulement de l’information

Au cours de l’information, le juge d’instruction est amené à rendre de


nombreuses ordonnances. Certaines sont destinées à faciliter les actes
d’information, d’autres concernent la clôture de l’information.

Les ordonnances destinées à faciliter les actes d’information. Les décisions


les plus importantes interviennent en matière de détention provisoire autrefois

71
L’ordonnance de soit-communiqué n’est pas une ordonnance juridictionnelle. Elle
constitue une mesure administrative qui ne peut faire l’objet de voies de recours ouvertes
contre les décisions juridictionnelles.
72
Le magistrat instructeur peut aussi dès le début de l’instruction rendre une ordonnance
de dessaisissement lorsque notamment il constate qu’un juge d’instruction d’un autre
ressort également compétent, en raison de la pluralité des principes de compétence
territoriale, a été saisi ; ce qui entraine le transfert du dossier à son collègue.
appelée « détention préventive ». Cette mesure peut également résulter des
effets attachés au mandat de dépôt.

Les décisions juridictionnelles prises à la fin de l’information. Lorsqu’il a


accompli tous les actes d’instruction qu’il a cru utiles de faire et que
l’information parait terminé, le juge d’instruction rend une ordonnance de
règlement que l’on appelle aussi ordonnance de clôture de l’information. Cette
ordonnance dessaisit le juge d’instruction. Il statue sur les charges qui pèsent
sur l’inculpé. Avant de rendre cette ordonnance, le juge devra communiquer le
dossier au parquet par une ordonnance de soit communiqué et aux conseils
de l’inculpé et de la partie civile (article 169 du Code de procédure pénale).

Selon l’article 171 du Code de procédure pénale, le juge d’instruction peut


rendre une ordonnance de non-lieu s’il estime que les faits ne constituent ni
crime, ni délit, ni contravention, ou qu’il n’existe pas de charges suffisantes
contre l’inculpé, ou si l’auteur est resté inconnu, il déclare, par ordonnance,
qu’il n’y a lieu à suivre. Ainsi, le non-lieu peut être aussi bien fondé sur des
motifs de droit (absence d’infraction, existence d’une cause de non
imputabilité ou d’un fait justificatif, etc…) que sur des considérations de fait
(insuffisance de charges).

Le juge d’instruction sera amené à rendre une ordonnance de renvoi devant le


tribunal s’il estime qu’il y a des charges suffisantes qui pèsent sur l’inculpé.
C’est l’ordonnance de renvoi qui saisit la juridiction de jugement.

Si le juge estime que les faits constituent une contravention, il prononce le


renvoi de l’affaire devant le tribunal de simple police et ordonne la mise en
liberté du prévenu (article 172 du Code de procédure pénale).

S’il s’agit d’un délit, le juge prononce le renvoi devant le tribunal régional ou
devant le tribunal départemental statuant en matière correctionnelle pour les
délits de la compétence de cette juridiction (article 173 du Code de procédure
pénale).

Si le juge d’instruction estime que les faits constituent une infraction qualifiée
crime par la loi, il rend une ordonnance de mise en accusation devant la
chambre criminelle73 qui procède au jugement de l’affaire.

TITRE II : Le jugement

Le jugement est la dernière phase de la marche du procès pénal qui suit


normalement la phase de l’instruction. A cours de cette étape les juridictions
de jugement se prononcent sur la culpabilité des personnes poursuivies, en
rendant une décision de relaxe, d’acquittement ou de condamnation.

Les juridictions de jugement ne peuvent englober dans les poursuites des


personnes qui n’ont pas été renvoyées devant elle à titre de prévenus. Dans

73
Article 175 CPP.
l’étude de l’étape du jugement, il s’avère nécessaire d’envisager la
présentation des juridictions de jugement(chapitre 1), avant de voir la
décision qu’elles sont susceptibles de rendre (chapitre 2)

Chapitre 1 : LES DIFFÉRNTES JURIDICTIONS DE JUGEMENT

D’une manière générale, les juridictions répressives sont les mêmes que celles
qui sont chargées de juger les affaires civiles ou administratives. Cependant
les décisions qu’elles peuvent rendre prennent une connotation particulière en
raison des enjeux qui s’y attachent. Il s’agira dès lors d’étudier la physionomie
des juridictions répressives (Section 1) avant de voir les décisions qu’elles
rendent (Section 2).

Section II : La physionomie des juridictions de jugement

Malgré leur nombre relativement important, il est possible de distinguer les


juridictions de jugement entre celles qui des juridictions ordinaires (Parag. I)
de celles sont considérées comme des juridictions d’exception (Parag. II).

Parag. I : Les juridictions ordinaires

Les juridictions ordinaires sont celles qui ont vocation à juger toutes les
infractions sauf celles pour lesquelles un texte spécial a attribué compétence
à une autre juridiction74. Il faut distinguer à ce niveau les juridictions de
premier degré des autres juridictions.

L’organisation judiciaire fixée par la loi n° 2014-26 du 03 novembre 2014 a


permis de rompre le lien entre le ressort territorial des juridictions et les
circonscriptions administratives. Ainsi, la compétence territoriale des
juridictions est fixée par décret. C’est en ce sens que le décret n°2015-1039
du 20 juillet 2015 portant aménagement de l’organisation judiciaire a été
adopté75. Ce décret fixe le siège, la composition et le ressort des tribunaux
d’instance, des tribunaux de grande instance et des cours d’appel76.

I : Les juridictions du premier degré

Les juridictions du premier degré qui exercent une compétence répressive


sont le tribunal d’instance (A) et le tribunal de grande instance (B).

A. Le tribunal d’instance

En principe, le tribunal d’instance prend, en matière pénale, la dénomination


de tribunal de simple police. Il statue cependant comme juridiction
correctionnelle dans les affaires relatives aux délits qui sont de sa compétence.

74
C’est la définition que l’on donne habituellement aux juridictions de droit commun.
75
J.O. N° 6862 du mercredi 22 juillet 2015.
76
Il s’avère plus prudent d’éviter d’établir le lien nécessaire entre le ressort territorial des
juridiction et les circonscriptions administratives, même si, pour l’instant, la plupart de ces
juridictions ont leur compétence territoriale définie en considération de ces circonscription.
Il est institué dans les différents départements77 et se compose d’un président,
d’un ou de plusieurs juges dont l’un est nommé juge d’instruction. Les
fonctions de ministère public sont exercées par le délégué du procureur. S’il
n’y a pas de délégué c’est le président du tribunal qui exerce ces attributions.

Le tribunal est en principe compétent pour statuer sur les contraventions


c’est-à-dire des infractions punies de peines de police78.

Mais, le tribunal d’instance a une compétence exceptionnelle en matière de


délits. La loi n° 84-20 du 2 février 1984 fixant les attributions des tribunaux
départementaux en matière correctionnelle a établi une liste de délits qui
relèvent de la compétence du tribunal d’instance. Il s’agit du vol simple, du vol
au préjudice de l’employeur, de l’usurpation de fonction, du détournement de
mineur sans fraude ni violence, de l’outrage public à la pudeur, notamment.

B. Le tribunal de grande instance

Les tribunaux de grande instance sont institués, à la place des tribunaux


régionaux, à la faveur de la réforme judiciaire de 2014. Leur compétence ne
s’étend cependant pas au territoire de la région, comme ce fut le cas des
anciens tribunaux régionaux.

En matière pénale, le tribunal de grande instance a une double physionomie.


Il prend la dénomination de tribunal correctionnel lorsqu’il statue sur les
affaires qualifiés de délits. En effet, le tribunal connaît de tous les délits autres
que ceux pour lesquelles la loi 84-20 attribue compétence au tribunal
d’instance. C’est dès lors la juridiction qui est normalement compétente pour
juger les délits79.

Le TGI a également plénitude de juridiction, à travers sa chambre criminelle,


pour juger en premier ressort les personnes renvoyées devant lui soit par une
ordonnance du juge d’instruction, soit par un arrêt de la chambre
d’accusation, pour des infractions qualifiées de crime et toutes autres
infractions connexes. La réforme de 2014 ayant conduit à la suppression des
cours d’assises, celles-ci sont remplacées par les chambres criminelles
instituées dans l’organisation du tribunal. Le choix original ainsi fait par le
législateur, à travers la loi de 2014 fixant la nouvelle organisation judiciaire,
se justifie par le souci de favoriser le traitement rapide des affaires criminelles.

77
Tribunal d’instance HC de Dakar, pour le département de Dakar ; tribunal d’instance de
Pikine pour le département de Pikine, tribunal d’instance de Guédiawaye pour le
département de Guédiawaye, tribunal d’instance de Rufisque pour le Département de
Rufisque….
78
Article premier, alinéa 1 du Code pénal. Selon l’article premier du code des
contraventions, les peines de police sont l’emprisonnement d’un jour à un mois, l’amende
et la confiscation d’objets saisis.
79
Le tribunal régional connait du vol en réunion, du vol avec usage de fausses clés, de
l’escroquerie, du viol, du détournement de deniers publics, du détournement de mineur
avec fraude ou violence, notamment.
Le TGI est composé d’un président, d’un ou de plusieurs juges dont l’un est
nommé juge d’instruction. Les fonctions de ministère public sont exercées par
le procureur de la République assisté de substituts80.

En outre, le tribunal régional est le juge d’appel des décisions rendues par les
tribunaux d’instance en matière de contravention.

II : Les Cours d’Appel et la Cour suprême

A- Les cours d’appel

Les cours d’appel sont des juridictions du second degré. Elles sont composées
d’un premier président, de présidents de chambres (chambre correctionnelle,
chambre civile et commerciale, chambre sociale, chambre criminelle et
chambre d’accusation) et de conseillers. Les fonctions de ministère public sont
assurées par le procureur général assisté de substitut généraux et d’avocats
généraux.

La Cour d’appel est la juridiction compétente pour statuer en appel sur les
décisions rendues par les tribunaux de grande instance, et sur les délits de la
compétence du tribunal d’instance.

La cour d’appel est également la juridiction compétente pour juger les crimes
et délits commis par les Officiers de police judicaire dans l’exercice de leurs
fonctions. Il en est de même lorsque la personne poursuivie est un greffier, un
greffier en chef ou un administrateur des greffes.

Aux termes de l’article 661 du Code de procédure pénale, « Lorsqu’un Officier


de police judiciaire est prévenu d’avoir commis un délit, le Procureur général
près la Cour d’appel le fait citer devant la première chambre de cette Cour 81».
Dans ce cas, le Procureur général et le premier président de cette cour assurent
respectivement les fonctions d’officier du ministère public et de juge
d’instruction.

B- La Cour suprême

La Cour suprême a été instituée, après la réforme de 1992, par la loi


organique n° 2008-35 du 7 août 2008 portant création de la Cour suprême.
Aujourd’hui, elle est régie par la loi organique n° 2017-09 du 17 janvier 2017
abrogeant et remplaçant la organique n° 2008-35 du 08 août 2008 sur la
Cour suprême.

80
Aux termes de l’article 17 du décret n° 2015-1145 du 03 août 2015 fixant la composition
et la compétence des cours d’appel, des tribunaux de grande instance et des tribunaux
d’instance, « Il y a, auprès de chaque tribunal de grande instance, un procureur de la
République chargé d’exercer les fonctions de ministère public telles qu’elles sont définies
par la loi ».
81
Ces dispositions s’appliquent également au personnel des greffes.
La Cour suprême comprend quatre chambres à savoir la chambre criminelle,
la chambre civile et commerciale, la chambre sociale et la chambre
administrative82.

Le siège de la Cour suprême est composé du 1e président de la Cour, de


présidents de chambre, de conseillers, titulaires et de conseillers délégués et
d’auditeurs. Le parquet est dirigé par le procureur général près la cour
Suprême, d’un avocat général, de deux avocats généraux, d’avocats généraux
délégués.

En matière pénale, la Cour Suprême est compétente pour statuer sur les
pourvois en cassation dirigés contre les décisions rendues en derniers ressort
en matière pénale.

Elle est par ailleurs compétente pour les poursuites et le jugement des
infractions commises par des magistrats ou certains fonctionnaires, elle est
juge du fond. En effet, la cour suprême est la juridiction compétente pour se
prononcer sur les délits ou crimes commis les inspecteurs généraux d’État83.

En cas de poursuites contre un inspecteur général d’Etat, les fonctions


d’officier du ministère public sont dévolues au Procureur général près la Cour
suprême et celles de juge d’instruction sont confiées au Président de ladite
Cour ou par leurs Délégués choisis parmi les membres de ladite.

En matière correctionnelle, c’est la Première Chambre de la Cour suprême qui


statue.

En matière criminelle, la première Chambre prononce la mise en accusation et


renvoie devant les Chambres réunies.

Les co-auteurs et les complices sont déférés devant les mêmes formations de
jugement.

Les décisions ainsi rendues par la première Chambre ou par les Chambres
réunies de la Cour suprême tant en matière criminelle qu’en matière
correctionnelle, ne peuvent faire l’objet d’aucun recours.

Les chambres réunies de la cour suprême sont saisies lorsqu’après cassation


d’une décision rendue dans une même affaire et entre les mêmes parties, la
même décision est attaquée par les mêmes moyens que la première décision.
Les chambres réunies sont également compétentes pour juger les crimes
commis par les magistrats.

82
Article 8 de la loi organique n°2017-09 du 17 janvier 2017.
83
Il en est de même des greffiers, greffiers en chef et administrateurs des greffes.
Parag. II : Les juridictions d’exception

Les juridictions d’exception ont connu un développement, en raison d’une


volonté de spécialisation du contentieux.

Elles ont une compétence spéciale et limitée à certaines matières. En matière


pénale, on peut relever, comme juridictions d’exceptions, les juridictions pour
mineurs (I), celles statuant en matière militaire (II) , la haute cour de justice
(III) et la Cour de l’enrichissement illicite (IV).

I : Les juridictions pour mineurs

Il y a deux juridictions pour mineurs : le tribunal pour enfant et la chambre


spéciale de la Cour d’Appel.

Le tribunal pour enfants est institué auprès du tribunal de grande instance (


article 569 CPP). Il est présidé par un magistrat spécialement désigné par
ordonnance du président du tribunal de grande instance (article 577 CPP). Ce
magistrat peut désigner comme assesseurs ayant une voie consultative
certaines personnes ayant une connaissance du dossier du mineur. Il en est
ainsi notamment de la personne ayant diligenté l’enquête sociale ou du
représentant du centre d’observation ayant rédigé le rapport versé au dossier
ou toute personne qualifiée.

L’instruction est assurée par un juge d’instruction désigné par ordonnance du


président du tribunal régional. Les fonctions de ministère public sont assurées
par un substitut du procureur de la République.

Le tribunal pour enfants est compétent pour juger les crimes et délits commis
par les mineurs de 18 ans. Lorsque seule l’année de naissance du mineur est
connue, il est présumé né le 31 décembre de ladite année (article 566 CPP).

La chambre spéciale de la Cour d’Appel chargée des affaires des mineurs est
présidée par un conseiller délégué à la protection de l’enfance choisi par le
premier président de la Cour d’appel parmi les magistrats désignés pour
composer la chambre d’accusation.

II : Les juridictions jugeant en matière militaire

Ce sont des juridictions ordinaires, mais qui ont une composition spéciale. En
effet, lorsqu’un délit ou une contravention est commise par un militaire dont
le grade ne dépasse celui de capitaine, la juridiction compétente est le Tribunal
de grande instance hors classe de Dakar. Mais lorsque les mêmes faits sont
commis par un officier supérieur, c’est la Cour d’Appel de Dakar qui est
compétente. Elle statuent en premier et en dernier ressort.
Les fonctions de ministère public sont assurées par le procureur de la
République de Dakar ou par le Procureur général près la Cour d’Appel de
Dakar lorsque l’infraction est commise par un officier supérieur.

L’instruction est confiée à un juge d’instruction du tribunal de grande instance


de Dakar ou à la chambre d’accusation qui comporte dans ce cas deux
assesseurs militaires.

S’agissant des crimes, c’est la Cour d’assises de Dakar qui est compétente,
mais le jury sera alors composée de quatre jurés militaires.

III : Le Haute Cour de Justice

La Haute Cour de Justice est instituée par les articles 99 à 101 la Constitution.
Elle est composée de députés élus par l’Assemblée nationale au début de
chaque législature.

La présidence est assurée par un magistrat désigné par l’Assemblée nationale.


L’instruction est confiée à une commission comprenant un président, quatre
membres titulaires et deux suppléants. Les fonctions de ministère public sont
assurées par le procureur général près la Cour suprême ou par un avocat
général.

Le Greffe est tenu par un fonctionnaire de l’Assemblée nationale ou du Sénat.

La Haute cour de justice est compétente pour juger le président de la


République pour les crimes de haute trahison et les membres du
gouvernement pour les crimes et les délits commis dans l’exercice de leurs
fonctions.

Le président de la République ne peut être mis en accusation que par


l'Assemblée nationale, statuant par un vote au scrutin secret, à la majorité
des trois cinquièmes des membres les composant.

IV : La Cour de répression de l’enrichissement illicite

La cour de répression de l’enrichissement illicite est organisée par la loi n° 81-


54 du 10 juillet 1981 créant une Cour de Répression de l'Enrichissement
illicite. Cette loi était depuis lors dans l’ordonnancement juridique, mais
n’avait pas connu dans la pratique une application effective.

Récemment, à la suite de l’avènement de la deuxième alternance démocratique


au Sénégal, les nouvelles autorités ont entrepris de réactiver la Cour de
répression de l’enrichissement illicite en vue de lutter contre les
détournements. Elle est composée d’un président et de quatre assesseurs.
L’instruction est assurée par une commission composée de quatre membres.

Les fonctions de ministère public sont assurées par un procureur spécial.


D’ailleurs, récemment les membres de la Cour de répression de
l’enrichissement illicite et leurs suppléants ont été désignés parmi les
magistrats des cours et tribunaux.

La procédure devant cette cour est très particulière.

C’est le procureur spécial qui informé par des rapports de police, des rapports
administratives, des plaintes et dénonciations qui fait procéder à une enquête
préliminaire. A l’issue de cette enquête, s’il y a des indices d’enrichissement
illicite, les pièces du dossier sont tenues à la disposition de la personne
poursuivie. Le procureur spécial entend ensuite cette personne assistée de
son conseil.

Il fait connaitre les résultats de l’enquête en ce qui concerne le montant de ses


ressources connues comparé aux détails des éléments de son patrimoine ou
de son train de vie.

L’intéressé est mis en demeure de justifier dans le délai d’un mois de l’origine
licite de ces éléments. S’il ne se présente pas ou s’il ne fournit pas les éléments
de justification nécessaires le procureur spécial saisit la commission
d’instruction. Celle-ci peut à la suite de l’instruction qui ne peut excéder 6
mois rendre son arrêt de non-lieu soit un arrêt de renvoi. C’est justement
l’arrêt de renvoi qui saisit la cour de répression de l’enrichissement illicite.

La procédure spéciale prévue devant la cour de répression de l’enrichissement


illicite fait souvent l’objet de critiques. Certains lui reprochent de porter
atteinte au principe de la présomption d’innocence en mettant à la charge de
la personne soupçonnée l’obligation de rapporter la preuve de son innocence.

La compétence de la Cour de répression de l’enrichissement illicite est définie


par rapport à la nature de l’infraction. Elle est compétente pour connaitre du
délit d’enrichissement illicite et des délits de corruption ou de recel connexes.

Selon l’article 163 bis du Code pénal inséré dans le code pénal par la loi n°
81-53 du 10 juillet 1981 relative à la répression de l'enrichissement illicite «
le délit d'enrichissement illicite est constitué lorsque, sur simple mise en
demeure, une des personnes désignées ci-dessus, se trouve dans
l'impossibilité de justifier de l'origine licite des ressources qui lui permettent
d'être en possession d'un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport
avec ses revenus égaux».

L'origine licite des éléments du patrimoine peut être prouvée par tout moyen.
Toutefois la seule preuve d'une libéralité ne suffit pas à justifier de cette
origine licite.

Dans le cas où l'enrichissement illicite est réalisé par l'intermédiaire d'un tiers
ou d'une personne physique dirigeant la personne morale seront poursuivis
comme complices de l'auteur principal.
Section 2 : La décision rendue à l’issue du jugement

Paragraphe I : La prise de la décision pénale

En procédure pénale l’audience et les débats occupent une place importante


dans la prise de décision finale.

Les débats sont marqués par trois principes fondamentaux: la publicité,


l’oralité et la contradiction.

D’abord, les débats ont lieu publiquement. Il s’agit de l’une des plus solides
garanties des droits de la défense et d’’une bonne justice. Le principe de la
publicité des débats est posé par l’article 388 CPP. Selon ce texte : « les
audiences sont publiques ».

Mais, ce principe souffre de quelques exceptions. En effet, le tribunal peut, en


constatant que la publicité est dangereuse pour l’ordre public et les bonnes
mœurs, décider que les débats auront lieu ou seront poursuivis à huis clos.
Mais, dans tous les cas, même si le huit clos est ordonné par la juridiction de
jugement, le jugement sur le fond doit toujours être prononcé en audience
publique.

Les débats sont dominés par les échanges et interrogatoires qui se font
oralement. L’article 446 du Code de procédure pénale prévoit cependant que
le prévenu, les autres parties et leurs conseils, peuvent déposer des
conclusions.

Enfin les débats sont marqués par le principe du contradictoire. Les parties
devant le tribunal sont placées sur un pied d’égalité. Le ministère public, la
partie civile et le prévenu ont les mêmes droits et notamment celui de poser
des questions aux témoins.

En outre, en vertu du principe du contradictoire, la personne poursuivie ne


peut être jugée sans avoir été régulièrement convoquée ou citée en justice en
vue de lui permettre de faire valoir ses moyens de défense. Lorsque le
jugement est rendu par défaut, la loi ouvre la possibilité au prévenu défaillant
de faire opposition contre le jugement.

Les débats dans le procès pénal commencent par l’appel des parties à savoir
le prévenu, la partie civile, éventuellement le civilement responsable, les
témoins et les experts. Il est ensuite procédé à la vérification de l’identité du
prévenu à qui le tribunal donne lecture de l’acte de saisine.

Le président du tribunal procède ensuite à l’instruction d’audience qui


commence généralement par l’interrogatoire du prévenu, complété par les
questions des assesseurs, du ministère public et éventuellement des conseils.
Les témoins (qui avaient été au préalable isolés) et experts défilent ensuite à
la barre pour déposer et répondre aux questions qui leur sont posées.

Au terme de cette phase relative à l’administration des preuves, commence


celle des observations durant laquelle la partie civile est entendue, puis le
ministère public en ses réquisitions avant que le prévenu ne présente sa
défense (article 447 CPP).

Au terme des débats, la décision rendue par la juridiction de jugement dénoue


l’instance pénale. Cette décision est précédée de la délibération qui obéit à
certaines formes essentielles à la validité des jugements.

La délibération consiste en un échange de vues et de discussions entre les


membres de la juridiction pour parvenir à la décision à rendre. Le délibéré
s’impose même dans les hypothèses où la juridiction est composée d’un seul
juge. Il s’agit alors pour le juge statuant seul, de réfléchir, de rechercher les
éclairages utiles sur les points qui lui paraissent douteux.

Le délibéré peut être très bref ; il en est ainsi dans les cas où la décision est
rendue sur le siège. Ainsi, le président du tribunal au terme des débats se
tourne successivement vers ses deux assesseurs avant de prononcer le
jugement. Il prononce à cet égard la formule « le tribunal après en avoir
délibéré (…)».

Mais, pour les affaires délicates qui nécessitent des recherches, le tribunal se
retire pour délibérer en chambre du conseil ou annonce souvent qu’il « met
l’affaire en délibéré » à une date précisée.

Paragraphe II : LES VOIES DE RECOURS

Les décisions des juridictions répressives peuvent être entachées d’erreurs de


fait ou de droit. C’est la raison pour laquelle les parties ont la possibilité de
demander que leur procès soit jugé à nouveau84. Les procédures par lesquelles
les parties attaquent une décision rendue afin de la faire modifier ou réformer
sont appelées voies de recours. On distingue, comme en droit commun, les
voies de recours ordinaires des voies de recours extraordinaires.

Les voies de recours ordinaires sont ouvertes pour n’importe quel motif ; ce
sont des voies de droit commun largement ouvertes. Il s’agit de l’appel et
l’opposition.

L’appel peut être défini comme une voie de réformation par laquelle une partie
à un procès demande le réexamen de son affaire par une juridiction
supérieure, en application de la règle du double degré de juridiction.

84
G. LEVASSEUR, «De quelques singularités des voies de recours en matière répressive »,
Mélanges Vinvent, 1981, p. 218 et s.
L’opposition est une voie de recours ordinaire ouverte de plein droit au
justiciable défaillant et une voie de rétractation tendant à faire revenir l’affaire
devant la même juridiction que celle qui avait déjà statué en l’absence du
prévenu.

Les voies de recours extraordinaires. Les voies de recours extraordinaires


ne sont admises que dans les cas limitativement énumérées par la loi et
seulement lorsque les voies de recours ordinaires ne sont plus possibles. Il
s’agit du pourvoi en cassation, ouverte pour erreur de droit et du pourvoi en
révision recevable pour erreur de fait.

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