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Faculté de Droit
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Définir le droit pénal est un exercice extrêmement périlleux ; c’est un art difficile. Il
faut alors se référer aux grands maîtres de la discipline. Le droit pénal ou droit criminel est,
enseignait H. DONNEDIEU DE VABRES, « l’ensemble des lois qui règlementent dans un
pays l’exercice de la répression par l’Etat »1.
Dans son sens premier, le droit pénal est donc le droit de la peine. Cette branche du
droit regroupe les règles qui définissent les infractions et qui édictent des sanctions à
l’encontre du délinquant. La fonction du droit pénal est de prévenir par la définition des
infractions et la menace de peines, dont la principale demeure encore aujourd’hui
l’emprisonnement2. Ainsi, en traçant les frontières du permis et de l’interdit, le droit pénal
devrait, si son but était atteint, détourner les individus des comportements constitutifs de
l’infraction. Aujourd’hui, cette définition est devenue trop étroite : l’apparition d’une
législation, dite de défense sociale, visant à la rééducation du délinquant, non à sa punition, et
où la mesure est dépouillée de toute idée de blâme, élargi en effet le domaine du droit pénal.
Aussi peut-on désormais le définir comme l’ensemble des règles juridiques qui organisent la
réaction de l’Etat vis-à-vis des infractions et des délinquants 3. Dans sa généralité, le terme de
réaction inclut aussi bien la prévention et la rééducation, d’une part, que la répression d’autre
part. Le droit pénal contemporain est donc « le droit de l’infraction et de la réaction sociale
qu’elle engendre »4.
La compréhension du droit pénal implique de procéder par étapes pour analyser son
contenu, et cerner son environnement (I). Il est également indispensable de tracer les grandes
lignes de son évolution historique (II), ce qui permet de comprendre l’avènement du droit
pénal moderne en Afrique, notamment au Bénin (III). Enfin il apparaît utile de décrire les
grands axes de l’ouvrage (IV).
2
de nombreuses mesures de sûreté destinée à éviter la récidive. Il impose à l’homme une
certaine conduite pour assurer le respect de la paix publique, de l’ordre public. Si toutes les
branches du droit ont cette fonction normative, le droit pénal dispose d’un avantage
considérable car il est le seul droit qui dispose de la peine, sanction redoutable pour
l’individu. Les autres disciplines juridiques ont des moyens de faire respecter l’application des
règles, mais ces moyens ne présentent pas de caractère dissuasif marqué, et s’analysent en des
réparations patrimoniales. Par la menace qu’il fait peser sur les libertés, par les pressions qu’il
exerce sur les personnes, le droit pénal inspire naturellement méfiance et prudence 5. Ainsi se
retrouve-t-il dans toutes les branches du droit, car il prête sa sanction pour assurer l’effectivité
des règles. En droit civil par exemple, l’inexécution d’un contrat par l’une des parties ne
donnera lieu qu’à la résolution de la convention ou au paiement de dommages-intérêts.
Cependant si la preuve est rapportée que l’inexécution est frauduleuse, ce comportement peut
devenir alors une infraction pénale - un abus de confiance par exemple. Le droit commercial
fait appel au droit pénal pour sanctionner le malhonnête dans le cadre de l’activité
commerciale ou lors d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaires. Chaque
droit procède à l’emprunt de la sanction pénale.
Cette précision du contenu oblige à étudier les principales distinctions de la matière ;
car le droit pénal se divise en plusieurs branches désormais complétées par l’apport spécialisé
de certaines sciences.
5
Yves MAYAUD, Droit pénal général, Paris : PUF, 2004, n° 12.
3
mise en œuvre de la réaction sociale déclenchée par la commission d’une infraction pénale.
Le procès pénal, et tout particulièrement le jugement, est sans doute l’aspect le plus visible de
la procédure pénale. C’est en quelque sorte son point culminant. Toutefois, la justice ne
s’exprime pas toujours par un véritable procès : il existe en effet de nombreux modes de
règlements des conflits pour la solution desquels le juge n’intervient pas (classement sans
suite, transaction entre délinquants et certaines autorités habilitées : les agents des eaux et
forêt). Autant dire que la procédure pénale n’est bien souvent que la mise en forme des lois
pénales de fond6. Le code pénal regroupe l’ensemble des règles de fond, le code de procédure
pénal réunit les règles de forme.
- les règles de fond sont des règles qui définissent les incriminations et les sanctions
attachées à chaque infraction.
- Les règles de forme ont pour fonction d’organiser le procès pénal dans ses trois phases
que sont la poursuite, l’instruction et le jugement, et d’encadrer l’enquête policière.
La procédure pénale est donc le passage obligé de l’incrimination abstraite à la
sanction concrètement infligée au délinquant.
Le droit pénal est de prime abord interne. En tant que tel, il traduit la souveraineté
nationale d’un Etat. En effet, le législateur définit les comportements permis et interdits en
considérant les valeurs qu’il entend protéger. Par conséquent, le droit pénal a un champ
d’application nécessairement limité territorialement. Le droit pénal interne ne peut s’appliquer
que sur le territoire d’un pays déterminé : la loi pénale est territoriale. Le droit pénal interne
béninois ne peut s’appliquer en principe, qu’aux infractions commises sur le territoire
béninois (sauf certains cas où l’infraction est commise à l’étranger par un Béninois). On
retrouve l’essentiel de ces précisions dans les dispositions de l’article 557 et 553 du code de
procédure pénale. Pour le premier (557), est réputée commise sur le territoire béninois « toute
infraction dont un acte caractérisant un de ses éléments constitutifs a été accompli au
Bénin » ; et pour le second article (553) : « Tout citoyen béninois qui, en dehors du territoire
de la République, s’est rendu coupable d’un fait qualifié crime par la loi béninoise, peut être
poursuivi et jugé par les juridictions béninoises.
Tout citoyen béninois, qui en dehors du territoire de la république, s’est rendu coupable d’un
fait qualifié délit par la loi béninoise, peut être poursuivi et jugé par les juridictions
béninoises, si le fait est puni par la législation du pays où il a été commis… ».
L’internationalisation constante de la vie sociale et économique entraîne
simultanément le développement de l’internationalisation du droit pénal. Celle-ci s’inscrit
6
Sur le sujet, lire Corinne MASCALA, Droit pénal général, Paris : Montchrestien, 2003, pp. 8-9.
4
dans trois démarches parallèles : le droit pénal comparé, le droit pénal international, et le droit
international pénal.
Le droit comparé a naturellement toute sa place dans le droit pénal par la confrontation
des divers systèmes répressifs de fond et de forme. Il permet d’en tirer des emprunts à des fins
scientifiques et législatives7. Il n’est désormais plus possible pour les différentes législations
issues de grandes tendances telles que la Common law ou le droit romano-germanique de
s’ignorer, même si l’on peut observer une timide tendance à l’interpénétration.
Le droit pénal international tend, quant à lui, à organiser la coopération internationale
afin d’apporter aux juridictions saisies les éléments d’appréciation qui leur sont nécessaires
notamment par le recours à l’extradition ou à des commissions rogatoires internationales.
Dans certains cas, il doit permettre de déterminer la législation et la juridiction nationales
compétentes. Le nombre de traités ou de conventions internationales s’est beaucoup
développé depuis quelques années dans une perspective universelle (ONU) ou dans des cadres
régionaux (Union africaine, CEDEAO, Conseil de l’Europe, Union européenne).
Le droit international pénal retient pour sa part une optique plus ambitieuse puisqu’il
confie à des juridictions internationales le soin de poursuivre et de juger des comportements
incriminés à l’échelle internationale : tel est le cas des crimes de guerre et des crimes contre
l’humanité dont les responsables furent traduits après la Seconde guerre mondiale devant le
tribunal international de Nuremberg. Il en va de même des deux tribunaux créés à la Haye et à
Arusha dans le cadre des Nations Unies, afin de connaître les infractions commises dans l’ex-
Yougoslavie ou au Rwanda. La convention de Rome de juillet 1998 a même prévu la création
d’une cour pénale internationale permanente siégeant à la Haye afin de connaître pour l’avenir
de tels agissements. Ayant atteint le nombre de ratification, cette convention est entrée en
vigueur le 1er juillet 2002.
7
Jean PRADEL, op. cit., n° 53.
5
contraventionnelle). Des notions fondamentales, telle que la consommation de l’infraction,
n’ont jamais été homogènes (consommation formelle, consommation matérielle). Quant aux
règles communes rassemblées dans la partie « générale » du code pénal, elles se caractérisent
par leur petit nombre.
Mais progressivement, ce système, qui demeurait malgré tout cohérent, a subi une
dégradation progressive dont il y a lieu de s’inquiéter. Des îlots de particularisme se sont
constitués à côté du noyau dur que constituent le droit pénal général et ses différentes
branches. L’infraction et le délinquant qui constituent l’ossature du droit pénal ne peuvent pas
être compris s’ils sont isolés de leur contexte. A cette fin, le droit pénal doit être lié avec de
nombreuses disciplines extra-juridiques, qui permettent de cerner le phénomène criminel. Se
sont progressivement développées, sur le terrain de l’analyse criminelle, un certain nombre de
sciences dont le champ d’application est plus précis. La criminologie s’attache ainsi à
l’analyse des facteurs susceptibles de conduire à des comportements déviants ou criminels. Il
apparaît que la délinquance trouve ses racines tant dans la personnalité de l’individu que dans
le milieu dans lequel il vit ; à cet effet, elle s’intéresse tout particulièrement à la recherche des
facteurs les plus divers pouvant tenir à la personnalité même de l’auteur des faits ou au
contexte (social, économique, culturel, ou géographique) dans lequel il se trouve. Pour mieux
appréhender l’extrême complexité du phénomène criminel, la criminologie se nourrit des
apports de sciences les plus diverses. La sociologie criminelle et les statistiques (policières,
judiciaires et pénitentiaires) jouent un rôle de premier plan. Il en va de même de la
criminalistique qui regroupe de très nombreuses disciplines scientifiques poursuivant le même
objectif : mettre en œuvre les moyens les plus efficaces pour réunir les preuves et découvrir
les auteurs des infractions. Les disciplines les plus importantes sont : la médecine légale, la
psychiatrie criminelle, l’anthropométrie criminelle (identification du délinquant à partir de ses
caractéristiques physiques que sont empreintes digitales, ADN), la police scientifique
(balistique, incendie, explosif, chimie, physique, toxicologie). Idem pour la victimologie,
nouvelle science centrée sur l’étude des personnes atteintes par une infraction.
6
Le droit pénal est né avec « le contrôle social de la violence »8. On en trouve les
premières expressions dans l’échelle des peines du Code de Hammourabi (1750 av. J-C.) ou
dans les tarifs de compositions de la loi des XII tables (450 av. J.-C.), c’est-à-dire à des
époques où un pouvoir de type étatique a pu se substituer à la vengeance. On présente en effet
l’histoire de la répression suivant trois types d’époques. Il y aurait eu d’abord une période de
« vengeance privée », où la victime d’une agression et son clan décidaient s’il y avait ou non
offense et déterminaient la mesure de la riposte. Avec la loi du talion (« œil pour œil, dent
pour dent »), la vengeance est devenue mesurée et l’on est alors entré dans une période de
« justice privée », durant laquelle les conflits étaient réglés par les particuliers sous forme
d’une composition pécuniaire versée par l’agresseur à la victime ou à sa famille 9. Enfin, est
apparue une période de « justice publique » ou l’Etat a déterminé les infractions et exercé lui-
même le droit de punir. Cette évolution n’a évidemment pas été linéaire, il y eut des périodes
d’affaiblissement de l’Etat et de retour en arrière, néanmoins il est possible de considérer que
le droit pénal est né avec les premières formes de compositions tarifiées et qu’il s’est renforcé
avec la justice publique. Deux grandes périodes sont ici à prendre en compte : la première
s’étend de la fin de l’époque féodale à la Révolution française ; la seconde, marquée par une
conquête légaliste sens retour en arrière possible, s’ouvre avec la Révolution.
8
Jean-Marie CARBASSE, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, Paris : PUF, 2000 ; v. aussi A.
LAINGUI, Histoire du droit pénal, Paris : PUF, 1985, n° 690.
9
Cette composition était désignée par la « poiné » en Grèce et par « poena » ou le « peccus » (ce qui signifiait le
petit bétail) dans la Rome antique.
10
R. MARTINAGE, Histoire du droit pénal en Europe, Paris : PUF, 1998, n° 3401, p. 5 et s.
7
En effet, la grande ordonnance criminelle de Louis XIV de 1670 poussa à l’extrême
les rigueurs de la procédure inquisitoriale et fournit une liste de peines qui laisse entrevoir la
sévérité du droit pénal de l’époque : la mort, les galères perpétuelles ou à temps, le
bannissement perpétuel ou à temps, le fouet ou l’amende honorable (XXV, 13). Et encore,
cette liste ne rend pas compte de l’inégalité qui existait alors entre les condamnés et ne
mentionne pas l’ensemble des supplices qui étaient pratiqués pour des « crimes énormes »,
tels que l’écartèlement, la roue ou le feu vif, sans compter la torture qui s’appliquait dans la
phase d’instruction11. Mais le pire ne réside peut-être pas tant dans la cruauté que dans
l’arbitraire des peines. « Les peines sont arbitraire en ce Royaume », disait-on sous l’Ancien
Régime. Originairement cet arbitraire n’était pas synonyme de fantaisie, de caprice donc
d’injustice, mais d’arbitrage par le juge, lequel tranchait en fonction de « l’exigence du cas »,
avec un esprit de modération, sans exclure la référence à la coutume ou au texte 12. Cependant
lorsque le juge se référait aux »usages du royaume » ou à certains textes, ceux-ci étaient
souvent si imprécis qu’il avait une grande latitude dont il pouvait en abuser. Beaucoup
d’infractions résultaient de la « jurisprudence des arrêts » à partir d’une interprétation large
des textes (parricide, assassinat entre époux, suicide) et certaines peines, comme la promenade
sur l’âne du proxénète, étaient des créations prétoriennes. Mais l’arbitraire a surtout montré
ses dérives avec la justice retenue et la pratique des lettres de cachet : il s’agissait des lettres
contenant un ordre du roi, dont les plus connues étaient les des ordres d’incarcération. Sous
Louis XIV, ces ordres se sont multipliés 13. L’arbitraire est alors devenu synonyme de bob
plaisir du roi ou de ses « zélés serviteurs ». aussi, au XVIIIe siècle, en réaction aux dérives de
l’arbitraire et aux excès de cruauté de l’Ancien Régime, les philosophes des lumières ont
défendu les idées de légalité des délits et des peines, d’égalité et de modération dans la
répression : le châtiment doit être prévisible donc prévu par la loi sans possibilité pour le juge
de s’en écarté, la loi pénale doit être la même pour tous et la répression, plutôt cruelle, doit
intervenir avec certitude et promptitude. Cette nouvelle ère s’ouvre avec Cesare BECCARIA
(1738-1794), auteur d’un petit ouvrage intitulé Des délits et des peines (1764) qui aura un
rayonnement immense.
8
Avec la Révolution, le principe de légalité s’est durablement installé 14. Certes, on a fait
fonctionner la guillotine pendant les années révolutionnaires, mais les pines atroces de
l’Ancien Régime ont été supprimées ainsi que l’incertitude liée à l’arbitraire dévoyé. Plus
précisément, les idées révolutionnaires ont été mises en application d’abord dans le code
pénal promulgué par une loi des 25 septembre et 6 octobre 1791 15 : il concernait
principalement les crimes. Sa particularité était de limiter la répression aux seuls actes
« nuisibles » à la société ; il fit en effet disparaître la foule des crimes d’ordre moral ou
religieux de l’Ancien droit (l’hérésie, le blasphème, le suicide, l’homosexualité, etc.). Quant
aux pénalités, elles étaient dans l’ensemble modérées (bien que la peine de mort soit
conservée), égales pour tous (« tout condamné à mort aura la tête tranchée »), strictement
personnelles (la confiscation des biens est abolie) mais également fixes. Ce dernier aspect est
la marque d’une réaction contre l’arbitraire des juges de l’Ancien Régime. Néanmoins il a
bien vite montré ces limites, conduisant parfois les juges à nier la culpabilité de l’accuser
faute de pouvoir adapter la peine.
Aussi, le code pénal de 1810, tout en maintenant le principe de la légalité criminelle
que Portalis avait repris en 1804 (« En matière répressive, il faut des lois précises et point de
jurisprudence »), proposa une division tripartite des infractions selon leur gravité (crime, délit,
contravention) et abandonna le système des peines fixes pour les délits et les contraventions :
il était prévu pour chaque peine un maximum, pouvant être rehaussé en cas d’aggravation, et
un minimum, en dessous duquel le juge pouvait descendre en raison d’excuses légales et de
circonstances atténuantes. Le juge retrouvait donc un certain pouvoir d’arbitrer la peine. Il
s’agissait cependant d’un code sévère (peine de mort, amputation du poing, marque au fer
rouge, carcan, tentative puni comme le délit consommé, complice puni comme l’auteur) et la
fixité subsista pour les crimes jusqu’à la loi du 28 avril 1832 qui généralisa les circonstances
atténuantes et supprima le marquage au fer rouge, l’amputation du poing et le carcan. Par la
suite, le législateur alterna la sévérité et la clémence, en fonction de la nature de la criminalité
et de la personnalité des délinquants. Ainsi, les récidivistes firent l’objet d’une politique de
« débarras » avec une loi du 27 mai 1885, instaurant la relégation des délinquants d’habitude
présumés incorrigibles. Mais, parallèlement, l’espoir de réinsertion a été encouragé pour les
14
L’expression de cette conquête légaliste se trouve notamment dans la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen de 1789, laquelle dispose que « la loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société… »
(art. 5) ; que « la loi est l’expression de la volonté générale, elle doit être la même pour tous, soit qu’elle protège,
soit qu’elle punisse… » (art. 6) ; et que « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment
nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée qu’antérieurement au délit » (art.
7).
15
Jean-Marie CARBASSE, Dictionnaire de la culture juridique, Paris : PUF, pp. 210-216.
9
autres délinquants, ce qui se traduisit par la création en 1885 de la libération conditionnelle et
en 1891 du sursis. Enfin, au XXe siècle, le code pénal français a connu, jusqu’à son
abrogation en 1992, un mouvement de balancement entre la sévérité pour lutter contre les
nouvelles formes de criminalité et l’humanisation des peines, avec notamment la
multiplication des alternatives à l’emprisonnement et comme point marquant l’abolition de la
peine de mort le 9 août 1981.
10
Ce constat est d’une importance capitale, pour ne plus revenir sur une idée
négativement répandue, idée selon laquelle l’Afrique noire n’a pas d’histoire sous prétexte
qu’elle n’a pas connu l’écriture. L’inexistence supposée de cette écriture, encore discutable 20,
tient principalement du fait que le continent noir a connu, et continue toujours de connaître,
une tradition essentiellement basée sur l’oralité. Par conséquent, le droit coutumier africain est
un droit oral, et difficile d’accès pour un non initié, ou pour ceux qui ont tendance à raisonner
à partir des concepts occidentaux. Il est donc difficile de décrire les institutions africaines en
termes de vocabulaire européen ; et chercher à y retrouver une identité institutionnelle ou à
employer les méthodes des droits européens ne peut mener qu’à une déformation totale de la
conception africaine des choses.
L’avènement du droit pénal en Afrique francophone, et par conséquent d’un code
pénal, est "indétachable" de l’évolution historique du droit pénal en France.
L’adoption du nouveau code pénal français en 1992 (entré en vigueur du code pénal 1er
mars 1994), et les deux réformes importantes du code de procédure pénale en 1993 21, avaient
nourri l’espoir d’ "une pause législative"22. Mais la réalité en a été autre ; ces deux
événements majeurs ont ouvert la brèche à des réformes permanentes. Tant de textes ont,
depuis, modifié les infractions, les peines et les procédures.
La pause législative promise en début de chaque année, en France, ne le sera jamais,
puisque le très vaste chantier législatif ouvert par les codes pénaux dans la dernière décennie
du XXe siècle est apparemment une porte ouverte à une interminable suite de réformes.
Paris : Marabout Université, 1970, 256 p ; Marcel MAUSS, Manuel d’ethnographie, Paris : Payot, 1947, 211 p ;
Théophile OBENGA, Les Bantu, langues, peuples, civilisation, Paris : Présence Africaine, 1985, 376 p ; Anne
RETEL-LAURENTIN, Sorcellerie et ordalies en Afrique noire. Essai sur le concept de négritude, Paris :
Anthropos, 1974, 364 p.
20
Les fouilles de Siga/Takembrit, port de Mauritanie (Algérie de l’ouest), ont permis en 1937 à Pierre GRIMAL
de découvrir deux inscriptions libyques qui datent du VIIe-VIe siècle. On les lit grâce à l’alphabet connu en
Algérie orientale et en Tunisie. V. René REBUFFAT, "Les inscriptions libyques de Siga", in Antiquités
africaines n° 42, Paris : CNRS, 2006, p. 87.
Au Cameroun par exemple les Bamouns avaient une écriture depuis le sultan Njoya. Njoya fut le plus
grand monarque de la dynastie Bamoun. Désigné par Tsankou son père, comme hérité dès l'âge de 4 ans, c'est en
1895 qu'il monte sur le trône. Il est alors âgé de 21 ans. Personnage autoritaire ambitieux et imaginatif, il invente
une écriture dont l'alphabet est constitué de 80 idéogrammes. Il rédige "L'histoire des lois et des coutumes
Bamouns". Ecarté du pouvoir par l'administration française qui le juge trop indépendant, il est envoyé en exil à
Yaoundé en 1931 ou il meurt trois ans après.
21
V. Loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, JO 5 janvier 1993, p. 215, et Loi n°
93-1013 du 24 août 1993 modifiant la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, JO
25 août 1993, p. 11991.
22
Jean DANET, La justice pénale, le tournant, op. cit., p. 13.
11
Cependant, contrairement à la France, on assiste à un renoncement de l’arme pénale en
Afrique. Au Bénin, le code pénal actuel est le code Bouvenet 23, qui était en vigueur en France
en 1958 (avant l’indépendance d’août 1960) ; le code de procédure pénale toujours en vigueur
est issu d’une ordonnance24 n° 25 PR/MJL du 07 août 1967 portant code de procédure
pénale25. Ce code n’est qu’une inspiration du droit français en vigueur à cette époque.
Au niveau continental, il faut constater que certains pays ont fait semblant de se doter
de codes nationaux, en y apportant des modifications relativement peu importantes par rapport
aux codes en vigueur avant l’indépendance; ce que Etienne Le ROY a qualifié de
« mimétismes et de métissages »26.
IV - Subdivision du cours
Le droit pénal général a pour objet l’étude de la théorie générale de la responsabilité pénale :
conditions d’existence et conséquences de la responsabilité. Ce qui conduit à étudier les deux
grands principes fondamentaux de base que sont :
Deuxième : La peine
23
Pour avoir une idée, le code pénal en vigueur actuellement au Bénin est le code BOUVENET d’avant
l’indépendance. Nous rappelons qu’historiquement ce code date du 6 mai 1877.
24
L’ordonnance, il faut le rappeler, est, selon le "Lexique des termes juridiques", un « acte fait par le
Gouvernement, avec l’autorisation du Parlement, dans les matières qui sont du domaine de la loi… Avant sa
ratification par le Parlement, l’ordonnance a valeur de règlement… ». In Raymond GUILLIEN et Jean
VINCENT, Lexiques des termes juridiques, 16ème édition, Paris : Dalloz, 2007, p. 458.
25
En principe, le code de procédure pénale relève de la loi (art. 98 de la constitution). Mais en août 1967, le
Bénin était sous un régime militaire, celui du Général Christophe SOGLO, et le parlement avait été dissous ; ce
qui explique le non ratification de cette ordonnance portant code de procédure pénale. Elle est restée, et demeure
aujourd’hui encore, un règlement.
26
Etienne LE ROY, Les Africains et l’institution de la justice. Entre mimétismes et métissages, Paris : Dalloz,
2004.
12
Première partie : L’infraction pénale
Les sociologues, comme les criminalistes, ont proposé de l’infraction des définitions
nombreuses, parfois très savantes. Elles ne sont pourtant pas bien satisfaisantes, car elles
s’inspirent souvent des tendances d’une école. C’est ainsi que pour l’école de la justice
absolue, l’infraction est « tout acte contraire à la morale et à la justice »27. Pour
GAROFALO, c’est « l’outrage fait, en tout temps et en tout pays, à un certain sentiment
moyen de probité et charité »28. Pour CARRARA, c’est « la violation d’une loi de l’Etat,
résultant d’un acte externe de l’homme qui ne se justifie pas par l’accomplissement d’un
devoir ou l’exercice d’un droit, et qui est frappé d’une peine »29.
Au plan de la logique juridique, c’est la définition objective paraît certainement la plus
exacte. L’infraction, le mot l’indique, consiste essentiellement dans la méconnaissance des
prescriptions légales. Elle est un « cas de figure », une situation juridique et matérielle
correspondant à une incrimination abstraite, générale et impersonnelle. L’ « élément moral »
de la responsabilité est une notion distincte ; elle ne concerne pas les faits, mais le délinquant
qui les a commis, et qui en subira les conséquences pénales30.
Toutefois, de même qu’il est abusif d’assimiler complètement les concepts d’infraction
et de volonté délictueuse, de même il serait excessif de perdre de vue que, si le délit est
punissable, c’est en tant que symptôme d’une pensée criminelle. L’élément moral, étranger à
la constitution morphologique de l’infraction, intervient à chaque instant comme facteur de
discussion dans la mise au point du régime juridique de l’infraction. Bien que le législateur ait
pris le parti d’une approche subjective de l’infraction 31, on s’en tiendra ici à la définition
objective sans cependant négliger son arrière-plan subjectif. Il paraît préférable de s’enfermer
dans ce cadre du droit pénal contemporain, et de définir très simplement l’infraction comme
« l’action ou l’omission, imputable à son auteur, prévue ou punie par la loi d’une sanction
pénale »32. En d’autres termes, c’est un fait interdit par la loi sous la menace d’une peine 33,
imputable à son auteur.
27
Pierre BOUZAT et Jean PINATEL, Traité de droit pénal et de criminologie, Paris : Dalloz, 1970, p. 129.
28
Ibidem.
29
Ibidem.
30
En faveur d’une existence objective de l’infraction, quelle que soit la responsabilité pénale de son auteur, il est
intéressant de se reporter à certaines décisions rendues en matière d’enfance délinquante : Civ. 2è, 9 juill. 1964,
D. , 1964. 641, Aix-en-Provence, 11 juill. 1968, GP, 1968.2.316. Cf. LEGEAIS, Une délinquance très juvénile.
A propos de l’arrêt de la cour d’Aix-en-Provence du 11 juill. 1968 sur l’aptitude des jeunes enfants à commettre
une infraction, Chron. D. 1969, p. 87.
31
V. Jacques LEROY, Droit pénal général, Paris : LGDJ, 2ème édition, 2007, n° 124.
32
Bernard BOULOC, Droit pénal général, Paris : Dalloz, 2007, n° 94.
33
Jean LARGUIER, Droit pénal général, Paris : Dalloz, 19ème édition, 2004, p. 12.
13
Cette définition met d’abord en exergue les différents éléments constitutifs de
l’infraction ; ensuite, elle permet de réfléchir sur les différentes sortes (classification) des
infractions, et enfin du délinquant et de sa responsabilité.
14
A ces trois éléments traditionnels et classiques, certains auteurs 34 y ajoutent un autre :
l’acte devrait encore être contraire au droit, ce que la doctrine allemande appelle la
Rechtswidrigkeit-antigiuridicita (l’antijuridicité), et en France connue sous le nom de
l’élément injuste, résultant de l’absence de toute cause légale de justification. Or, toute
infraction est-elle en soi un fait antijuridique. « Mais comme un fait n’est antijuridique que
s’il est prohibé par la loi ou justifié par elle, en définitive, l’élément injuste se ramène à
l’élément légal et se confond avec lui »35.
34
Par exemple Jean LARGUIER, Philippe CONTE, Patrick MAISTRE du CHAMBON, Droit pénal général,
Paris : Dalloz, 2008, p. 12 : « L’infraction suppose la réunion de quatre éléments constitutifs : l’élément légal,
l’élément matériel, l’élément moral, l’élément injuste ».
35
Bernard BOULOC, op. cit., n° 210.
15
Ce principe a d’abord a été consacré par la Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen de 1789 (art.8). Il est repris dans le Pacte des Nations Unies relatifs aux droits civils et
politiques (art. 15), dans la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (art. 6), puis
dans la loi n°90-032 du 11 décembre 1990 portant constitution de la République du Bénin
(art. 17-2 principalement). Le principe de la légalité criminelle est donc fondamental.
En ouvrant effectivement le code pénal béninois, on découvre à l’article 295 que
« l’homicide commis volontairement est qualifié de meurtre », ou encore à l’article 379 « le
vol est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ». Ces conduites délibérées36 d’une
personne, consistant à « ôter la vie » à son prochain ou à « s’approprier un bien appartenant à
autrui » contre le gré du propriétaire sont décrits dans un texte légal, tant dans leur matérialité
que dans la psychologie de leurs auteurs. On dit que ces actes sont incriminés dans l’article
295 (pour le premier) et 379 (pour le second) du code pénal. S’ils ne l’étaient pas, aucune
poursuite pénale ne pourrait être engagée. L’incrimination exprime le rattachement de l’acte à
la loi. C’est, d’après le Vocabulaire juridique Henri CAPITANT, « une mesure de politique
criminelle consistant pour l’autorité compétente (en principe le pouvoir législatif) à ériger un
comportement déterminé (non pas nécessairement en crime) mais en infraction, en
déterminant les éléments constitutifs de celle-ci et la peine applicable »37.
L’incrimination a une existence légale et est donc un préalable à l’acte commis ; il a
pour fondement le principe de la légalité criminelle.
L’expression « légalité des délits et des peines » pourrait laisser croire qu’en matière
pénale le principe ne concerne que les lois de fond et qu’il est sans application dans le
domaine procédural. Or, de cette impression, sont responsables à la fois le législateur
napoléonien qui n’avait exprimé le principe que dans le code pénal de 1810 et son article 4, et
la doctrine pénaliste qui, jusqu’à une époque récente, n’examinait le principe que dans le strict
domaine du droit pénal proprement dit. Mais cette conception et trop étroite et il importe de
restituer au principe de légalité criminelle sa véritable signification en matière criminelle, en
rappelant dès maintenant qu’il couvre également tout le domaine de la procédure répressive38.
Il convient de donner des indications plus approfondies sur les sources du droit pénal
(section I), puis de préciser le sens du principe « nullum crimen, nulla poena sine lege »
(section II).
36
Ce sont encore là la manifestation de la conception subjective du législateur ; mais elle importe peu dans le
développement.
37
Gérard CORNU, Vocabulaire juridique, Paris : PUF, 8ème édition, 2007, p. 480.
38
Cette conception large du principe a été exprimée dès 1959 par le professeur LEVASSEUR, Une révolution en
droit pénal, le nouveau régime des contraventions, D., 1959, chron., 121 et s.
16
Section I : Les sources du droit pénal
La norme pénale doit être écrite. La coutume, sauf exception légale39, ne joue donc
qu’un rôle marginal en matière pénale et ne saurait en tout état de cause créer des infractions
ou des peines. D’une façon générale, l’élément légal nécessaire à l’existence de l’infraction
est un texte de loi au sens large de ce terme par opposition à une décision de justice.
Les sources écrites du droit pénal sont essentiellement internes, nationales, puisque le
droit de punir reste l’un des attributs de la souveraineté. L’article 98 de la loi n° 90-32 du 11
décembre 199à portant constitution de la République du Bénin ayant procédé à un partage de
compétence entre la loi et le règlement, il existe deux sources internes du droit pénal,
complémentaires, la loi gardant une place principale puisqu’elle reste seule compétente pour
déterminer les infractions les plus graves. Cette compétence exclusive de la loi et du
règlement est particulièrement vraie s’agissant des sanctions pénales. Toutefois, s’agissant des
incriminations, ou plus exactement des obligations dont la violation est sanctionnée, il
convient d’ajouter à ces sources internes les textes internationaux. La règle écrite peut donc
revêtir trois formes : la loi, le règlement et les textes de droit international.
Section II : Le sens du principe « nullum crimen, nulla poena sine lege »
Principe cardinal du droit pénal, ce qui permet de mettre en lumière l’étude de ses
justifications (§1), on devrait s’attendre à ce que le principe rayonne particulièrement fort sur
toute la matière répressive. L’étude de sa portée (§ 2) ne confirme que partiellement cette
idée. En effet, de plus en plus, le principe de la légalité connaît un incontestable déclin (§ 3).
39
Parfois, la loi renvoie elle-même à la coutume. A titre d’exemple, l’article 1er du décret-loi du 23 octobre 1935
sur le maintien de l’ordre public soumet à déclaration préalable toute manifestation sur la voie publique mais
dispense de cette formalité les sorties sur la voie publique conformes aux usages locaux. De même, l’article 521-
1 du nouveau code pénal français qui réprime les sévices graves et les actes de cruauté envers les animaux
prévoit qu’il n’est pas applicable aux courses de taureaux ou aux combats de coqs lorsqu’il peut être établi
qu’existe une tradition locale ininterrompue. Dans ce cas, les juges de fond apprécient souverainement
l’existence d’une coutume locale et ne sont notamment pas liés par une décision de l’autorité administrative
(Crim. 16 septembre 1997, Bull. crim. n°295). Les usages jouent alors un rôle de fait justificatif, mais
uniquement parce que la loi le prévoit.
17
Aujourd’hui, le principe de la légalité des délits et des peines est affirmé à différents
niveaux : les constitutions40, les traités internationaux41, par les lois au travers des codes
pénaux42. Traditionnellement, trois arguments militent en faveur du principe de la légalité.
Le principe se justifie d’abord sur l’intérêt des individus 43. Le principe de la légalité
procède de l’affirmation selon laquelle l’homme possède naturellement des droits. Il est libre
et, s’il concède une part de cette liberté à la société, cette part doit être clairement et
précisément définie. Il n’y aurait pour eux ni tranquillité, ni liberté s’il pouvait être puni pour
des faits dont il ne connaissait pas d’avance le caractère punissable, par des peines dont il ne
pouvait davantage mesurer la gravité44.
Le principe se justifie de plus par l’intérêt de la société : l’indication dans la loi des
infractions, avec les peines qui les sanctionnent, est de nature à faire réfléchir ceux qui
auraient la tentation de les commettre, beaucoup plus que ne le feraient une infraction et une
peine hypothétiques que le juge aurait pouvoir d’établir ou d’écarter. Il exerce donc une
fonction intimidante en plaçant le délinquant potentiel devant ses responsabilités. Ainsi
constitue-t-il un rempart contre l’arbitraire du juge.
Au-delà, le principe de légalité des délits et des peines est l’application au droit
criminel du principe général de légalité, fondement de l’Etat de droit, qui exige que les
pouvoirs des autorités publiques soient définis par la loi : là réside le principe de la séparation
des pouvoirs. Le pouvoir d’incriminer est un attribut de la souveraineté. Dès lors, il appartient
au pouvoir législatif, et non aux pouvoirs exécutif et judiciaire, le soin de définir les
infractions et les peines. Seul le législateur, représentant le peuple et investi de la légitimité
populaire, doit déterminer les infractions et peut par conséquent limiter les libertés
individuelles.
18
Eu égard à l’importance politique du principe de légalité, sa portée devrait être
particulièrement grande. Si l’examen du domaine du principe (I) semble confirmer cette
hypothèse, celui de ses conséquences (II) s’avère décevant.
19
l’individu doit savoir, avant d’agir, à quelles sanctions il s’expose. En outre la peine indiquée
le renseigne sur l’importance, pour la société, de la valeur protégée par l’incrimination.
Appliqué aux sanctions, le principe de la légalité englobe à la fois les peines et les mesures de
sûreté.
Il suffit enfin d’ajouter que le principe de la légalité s’applique aussi à la procédure
pénale et à l’exécution des condamnations pour se convaincre que le domaine du principe est
fort large. Ce constat est, somme toute, très rassurant dans la mesure où l’exigence légaliste
est protectrices des libertés individuelles. Sous ce rapport, l’étude des conséquences de la
légalité s’avère, toutefois, décevante.
Appliqué au droit pénal, le principe de légalité signifie avant tout qu’un texte est exigé
pour définir en des termes généraux et par avance l’incrimination et la sanction encourue. Le
principe de la légalité criminelle s’adresse donc en premier au législateur (A), chargé de la
« production » des textes pénaux. Mais il s’adresse également au juge (B), appelé à appliquer
la loi pénale.
1 - L’exigence de précision
Les définitions trop vagues d’infractions pénales sont dangereuses pour la liberté
individuelle car on peut y faire entrer de trop nombreux comportements, au gré de l’arbitraire
des juges. Le principe de légalité exige donc que l’infraction soit définie d’une manière
relativement claire et précise, définissant nettement les incriminations et indiquant sans
erreurs possibles les peines applicables. Sinon, à quoi servirait d’affirmer la légalité des délits
et des peines si, par des formules vagues, les rédacteurs de la loi ouvraient la porte à un
arbitraire judiciaire qu’on prétend empêcher ?
Dans un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme, il résulte du principe de
légalité des délits et des peines « qu’une infraction doit être clairement définie par la loi,
condition qui se trouve remplie lorsque l’individu peut savoir, à partir du libellé de la clause
20
pertinente et, au besoin, à l’aide de son interprétation par les tribunaux, quels actes et
omissions engagent la responsabilité pénale »45.
Les incriminations trop larges violent alors le principe de légalité au même titre que
l’absence d’un texte, puisqu’aucune garantie n’est ménagée et que la possibilité d’arbitraire
demeure entière. L’histoire a connu des exemples de dispositions rédigées de manière
tellement générale qu’elles permettaient de poursuivre toute personne ne se situant pas dans la
ligne officielle. Ainsi, une loi de Vichy du 7 septembre 1941 donnait compétence au Tribunal
d’Etat pour juger tout acte de nature à troubler l’ordre, la paix intérieure, la tranquillité
publique « ou d’une manière générale à nuire au peuple français ». Plus récemment encore,
l’article 82 de l’ancien code pénal français punissait « quiconque, en temps de guerre,
accomplira sciemment un acte de nature à nuire à la défense nationale non prévu et réprimé
par un autre texte ».
Ces exemples sont bien entendus extrêmes. Mais le législateur, lorsqu’il utilise des
termes vagues qu’il omet de définir, encourt le même grief d’imprécision.
Reste qu’il n’est pas toujours possible d’indiquer à l’avance avec précision tous les
détails d’une activité criminelle. Le texte doit alors énoncer clairement quel est le résultat
sanctionné. Au demeurant le recours aux formules telles que « toutes infractions aux
dispositions de la présente loi » est interdit car il ne permet aucune définition précise de
l’infraction46, mais aussi n’est pas conforme aux normes internationales, notamment sur le
terrain des droits de l’homme.
Une loi ne peut, à l’évidence, que régir l’avenir, car on voit mal comment il serait
possible de punir quelqu’un pour le non-respect d’un texte inexistant 47. Toutefois, la question
n’est pas simple et ne saurait être cernée en des termes aussi simples. Il existe souvent une loi,
qu’une nouvelle vient modifier ; laquelle des deux lois faut-il appliquer ?
45
Arrêt du 25 mai 1993, Kokkinankis c/Grèce, Série A, n° 269 ; arrêt du 15 novembre 1996, Cantoni c/ France,
Rec. 1996-V, n° 20.
46
Crim., 1er février. 1990, RSC 1991, p. 556, obs. VITU.
47
Bernard BOULOC, Droit pénal général, Paris : Dalloz, 20ème édition, 2007, n° 144.
21
Par ailleurs, un Béninois expatrié commet un acte à l’extérieur (par exemple il
fabrique et écoule de faux billets CFA). Faut-il le juger d’après la loi de du lieu où il se
trouve, qui est indifférente à la fausse monnaie béninois, ou d’après la loi béninoise qu’il n’a
pas méconnue, en ce sens qu’il n’a pas accompli aucun acte sur le sol béninois ?
A première vue chaque loi doit être appliquée sur le territoire sur lequel l’autorité qui
l’a édictée est souveraine. Mais il importe aussi de tenir compte de certains intérêts relatifs à
son application dans le temps (α) et dans l’espace (β).
22
délictueux se soit poursuivi, fût-ce un instant, sous l’empire de la loi nouvelle pour que celle-
ci soit applicable. En cas d’infraction d’habitude, on admet que la réalisation d’un seul acte
d’habitude suffit sous l’empire de la loi nouvelle suffit à rendre cette loi applicable, dès lors
que d’autres actes d’habitude ont été accomplis sous l’empire de la loi ancienne.
Le droit pénal béninois s’applique bien entendu aux infractions commises sur le
territoire béninois. Mais une infraction peut comporter des éléments d’extranéité, c’est-à-dire
que d’autres Etats sont concernés : les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, ou
encore deux étudiants béninois et italiens, en excursion, commettent des dégradations sur un
campus américain puis rentre en France leur pays de résidence, avant que le forfait ne soit
découvert ; etc.
Les délinquants ne connaissent pas de frontière. La criminalité internationale présente
par ailleurs d’importants enjeux. Lorsqu’une infraction est commise à l’étranger, le droit
pénal béninois peut-il s’appliquer ? Si l’ordre public béninois ne semble pas perturbé outre
mesure, l’infraction peut toutefois porter atteinte aux intérêts de l’Etat, voire à ceux de la
communauté internationale dans son ensemble. Selon celui-ci, plusieurs systèmes (quatre)
sont théoriquement envisageables48, mais ils font l’objet de cours spécifiques, notamment le
droit pénal international, ou le droit international pénal; c’est pourquoi la portée du principe
de non –rétroactivité de la loi pénale ne sera étudiée que dans le temps.
Seul le législateur peut déclarer une loi nouvelle rétroactive 49. En principe, la loi
nouvelle n’est pas applicable aux situations en cours, pour la simple raison que les faits ont
été commis antérieurement à son entrée en vigueur. Mais le principe de non-rétroactivité est
assorti, s’agissant des situations en cours, de plusieurs exceptions. Elles concernent les lois
interprétatives, les lois de forme et les lois pénales de fond plus douces.
Les lois interprétatives viennent clarifier le sens d’une loi antérieure obscure. Ces lois
entrent en vigueur au jour de la loi qu’elles interprètent. Mais elles rétroagiront et
48
Le système de la territorialité (compétence territoriale de la loi pénale), le système de la personnalité
(compétence personnelle de la loi pénale), le système de la réalité (compétence réelle de la loi pénale) et le
système de l’universalité (compétence universelle de la loi pénale).
49
Voir par exemple l’article 17 de la loi du 3 janvier 1967, sur les ventes d’immeubles à construire.
23
s’appliqueront aux faits commis antérieurement, à condition toutefois qu’ils n’aient pas
encore été définitivement jugés.
Les lois qui ne modifient ni les caractéristiques de l’infraction, ni la responsabilité de
l’auteur, ni la fixation de la peine, mais qui sont relatives à la constatation et à la poursuite des
infractions, à la compétence et à la procédure, sont considérées comme les lois pénales de
forme. Leur rétroactivité n’est qu’exceptionnelle. Elles s’appliquent immédiatement, même
aux faits commis antérieurement à leur entrée en vigueur. L’application immédiate des lois
pénales de forme aux affaires en cours est justifiée par une présomption : on présume que les
lois nouvelles de forme ne nuisent pas au délinquant puisqu’elles ne modifient ni sa
responsabilité, ni le quantum de la peine. De telles lois ont pour but, en principe, d’améliorer
l’administration de la justice. A cet effet, les lois nouvelles concernant l’organisation
judiciaire et la compétence régissent le jugement, non seulement des infractions commises
après leur entrée en vigueur, mais aussi des infractions commises antérieurement, qui n’ont
pas encore été poursuivies ou qui même le sont déjà, à la condition qu’il n’existe pas un texte
qui écarte expressément l’application immédiate de ces lois nouvelles, et en l’absence d’un tel
texte, qu’une décision sur le fond ne soit pas déjà intervenue50.
De même, les lois nouvelles de procédure, qui sont relatives au déroulement du procès
pénal, s’appliquent à la poursuite et au jugement des infractions commises avant leur entrée
en vigueur, même si l’instance est déjà engagée lors de leur entrée en vigueur, pourvu qu’une
décision définitive n’ait pas encore été rendue. Ainsi la jurisprudence a déclaré applicable aux
instructions déjà ouvertes, au moment de son entrée en vigueur, la loi du 8 décembre 1897,
qui a modifié l’instruction préparatoire51.
Reste que certaines lois nouvelles de forme peuvent être défavorables au délinquant. Il
en est ainsi, par exemple, des lois qui suppriment une voie de recours, ou qui modifient le
délai d’exercice. C’est pourquoi de telles lois ne s’appliquent pas aux recours formés contre
les décisions prononcées avant leur entrée en vigueur.
La même difficulté peut se rencontrer avec les lois relatives à la prescription. Les lois
nouvelles relatives à la prescription de l’action publique ont été pendant longtemps assimilées
par la jurisprudence à des lois de fond. En conséquence, elle ne les appliquait aux infractions
commises avant leur entrée en vigueur que lorsqu’elles étaient plus douces, par exemple,
abrégeaient le délai de la prescription52.
50
Crim., 20 juin 1946, D. 1946, 360 ; 19 janv. 1960, Bull. n° 29, p. 57 ; crim. 29 mai 1975, JCP 1976.II.18292,
note E. ROBERT.
51
Crim. 8 déc. 1899. S. 1902.1.101.
52
Crim. 21 déc. 1907, S. 1909.I.413.
24
Depuis 1930, la Chambre criminelle a considéré que les lois de prescription de l’action
publique comme des lois de forme, puisqu’elle les a déclaré applicables aux infractions
commises avant leur promulgation sans distinguer si elles abrègent ou allongent le délai de la
prescription53. En revanche, mais seulement, en ce qui concerne la prescription de la peine,
elle avait décidé qu’il faut s’en tenir à la loi en vigueur au moment où la prescription a
commencé à courir, car l’application d’une loi nouvelle supprimant la prescription ou
allongeant le délai, aurait pour effet d’aggraver la répression54.
La loi nouvelle qui allonge la durée de la prescription de l’action publique ou de la
peine est défavorable au délinquant. C’est pourquoi le nouveau code pénal français dans
l’article 112-2-4° adopte une solution plus claire et radicale : la loi nouvelle ne peut remettre
en cause les prescriptions (de l’action publique ou de la peine) acquises avant son entrée en
vigueur.
Si une loi nouvelle relative à la prescription de l’action publique, favorable au
prévenu, s’applique immédiatement, même aux infractions commises avant se promulgation,
c’est à condition que la prescription ne soit pas déjà réalisée, lors de l’entrée en vigueur de
cette loi nouvelle. Lorsque l’action publique est éteinte par le prescription, le délinquant a un
droit acquis à ne plus être poursuivi et la loi nouvelle qui allonge le délai de la prescription est
impuissante à lui retirer ce droit55.
Pour les lois pénales de fond, lois qui déterminent les incriminations et les peines qui
leur sont applicables ainsi que les conditions de la responsabilité, elles s’appliquent aux faits
commis avant leur entrée en vigueur lorsque les dispositions sont plus douces que celles de la
loi ancienne. On parle de rétroactivité in mitius (mitius : plus doux). En conséquence, une loi
pénale qui crée une incrimination nouvelle, ou qui élève la peine applicable à une infraction
antérieurement définie ne s’applique pas aux faits accomplis avant on entrée en vigueur. Tel
est le cas de la loi du 26 juillet 1873 (art. 313-5 du code pénal) qui a puni le fait de se faire
servir des boissons ou des aliments en sachant qu’on est dans l’impossibilité absolue de payer
(filouterie d’aliment), fait qui jusqu’alors n’était pas punissable, n’a pu être appliquée à des
faits de ce genre commis avant l’entrée en vigueur de la loi.
Pour comparer la sévérité des lois en conflit, on distingue habituellement entre les lois
d’incrimination et les lois de pénalité.
S’agissant des lois d’incrimination, est plus douce la loi qui supprime une infraction,
celle qui supprime l’incrimination de la tentative, celle qui correctionnalise un crime, ou qui
53
Crim. 16 mai 1931, Gaz. Pal., 1931.2.178.
54
Crim. 26 déc. 1956, D. 1957.126, note P. A. V.
55
Crim. 28 mai 1974, Bull. n° 202, obs. LARGUIER, RSC, 1976. 94.
25
contraventionnalise un délit, celle qui supprime une circonstance aggravante ou encore celle
qui admet une nouvelle impunité.
S’agissant des lois de pénalités, est plus douce la loi qui supprime une peine, celle qui
substitue une peine correctionnelle à une peine criminelle, ou une peine contraventionnelle à
une peine correctionnelle, ou encore celle qui, entre deux peines de même nature, abaisse la
durée de l’emprisonnement ou le montant de l’amende ; c’est aussi, et plus généralement,
dans le régime des fourchettes des peines, celle qui abaisse le maximum en ne modifiant pas
le minimum, ou qui abaisse à la fois et le minimum et le maximum de la peine. Il va de soi
que ces énumérations ne sont pas limitatives.
Que décider lorsqu’une loi nouvelle contient certaines dispositions plus douces et
d’autres plus sévères ? Ainsi, par exemple, en France une loi du 2 septembre 1941 a
transformé l’infanticide en délit - par là, elle était plus douce que la loi précédente qui le
qualifiait de crime - mais a interdit au juge de relever des circonstances atténuantes – par là,
elle était plus sévère que le texte ancien. Dans une telle hypothèse, on admet généralement
qu’il faut faire une application distributive des dispositions de la loi nouvelle, du moins
lorsque celles-ci sont divisibles. Ainsi, les dispositions nouvelles plus douces seront
d’application immédiate, alors que les dispositions plus sévères ne rétroagiront pas. En
revanche si les dispositions de la loi nouvelle forme un tout indissociable, il semble qu’il
faille apprécier la sévérité globale de la loi nouvelle56.
Enfin, lorsqu’une affaire est définitivement jugée, la loi nouvelle de fond plus douce
ne peut pas, en principe, être appliquée car ce serait remettre en cause à la fois le principe de
non-rétroactivité et l’autorité de la chose jugée qui s’attache aux décisions de justice.
Pourtant, le nouveau code pénal français de 1994 a institué deux dérogations à ce principe.
D’une part, lorsque la loi nouvelle supprime une incrimination, l’article 112-4 prévoit que les
peines antérieurement prononcées à raison de l’incrimination abrogée cessent de recevoir
application. D’autre part, lorsque la loi nouvelle modifie le régime d’exécution d’une peine ou
d’une mesure de sûreté, cette loi s’applique immédiatement à tous les condamnés qui sont en
cours d’exécution de la peine ou de la mesure de sûreté modifiées. Ils l’exécuteront pour
l’avenir dans les conditions fixées par la loi nouvelle.
Telles sont les conséquences qu’engendre le principe de la légalité pour le législateur.
Il convient de l’aborder à l’égard du juge.
56
Crim. 5 juin 1971, RSC 1972, 97, obs. LEGAL.
26
C’est pour le juge répressif que le principe de la légalité criminelle comporte les
conséquences les plus importantes. Outre la qualification des faits, le principe de la légalité
impose au juge deux obligations principales : il doit respecter la loi (1) et ne doit pas
l’interpréter (2)
27
peuple » pour interpréter les textes. Le principe de la légalité criminelle interdit au juge
d’étendre par voie interprétative, les textes à des cas que ceux-ci n’ont pas prévus.
Mais les termes de la loi sont souvent généraux, parfois, le législateur reste vague,
imprécis ou utilise des termes susceptibles de plusieurs interprétations. Parfois encore, le texte
comporte des lacunes, des insuffisances, voire des contradictions. Le juge, amené à appliquer
les textes à des cas concrets, doit alors interpréter des notions pour en préciser le sens.
La méthode d’interprétation exclue l’interprétation analogique. Il s’agit d’une
interprétation extensive qui consiste à étendre le texte pénal à des faits non mentionnés par le
texte mais voisins de ceux qui y sont mentionnés est exclue en matière pénale. S’il s’avère
qu’un texte ne permet pas de poursuivre certains comportements, le juge ne doit pas réprimer,
particulièrement si la loi procède à une énumération limitative.
Seul le législateur pourra, le cas échéant, modifier la rédaction de l’infraction ou en
créer une nouvelle pour pallier cette carence. La Cour de cassation rappelle ainsi parfois au
juge répressif qu’il lui est interdit de procéder « par extension, analogie, ou induction ». Ainsi,
avant l’incrimination du délit de la filouterie d’aliments, le fait de se faire servir un repas en
se sachant pas dans l’impossibilité de le payer n’était pas punissable. On ne pouvait retenir ni
le vol (les aliments ne sont pas soustraits mais remis), ni d’escroquerie (le délinquant n’utilise
aucune manœuvre frauduleuse), ni l’abus de confiance (la chose remise n’avait pas vocation à
être restituée). Et le juge ne pouvait élargir le domaine des incriminations existantes en
raisonnant par analogie. Il a donc fallu recourir à des incriminations spéciales (art. 313-5 code
pénal).
En revanche, les règles favorables au délinquant, celles dont l’élargissement ne
constitue pas une menace pour sa liberté, peuvent être interprétée. Le juge peut alors raisonner
par analogie in favorem. Ainsi le juge béninois peut admettre que la légitime défense pouvait
s’appliquer à des contraventions alors qu’elle n’est expressément prévue par le code pénal en
vigueur au Bénin (art. 327), que pour les crimes et délits.
L’interdiction d’interpréter des règles défavorables au délinquant est une obligation pour le
juge, alors que l’interprétation des règles favorables n’est pour lui qu’une faculté.
L’esprit de l’interprétation pénale retenue est celle « stricte ». En présence d’un texte
clair, le juge ne dispose d’aucun pouvoir d’interprétation. Il doit appliquer le texte sans
chercher ni à l’étendre ni à le restreindre. Pour autant, le juge ne s’est jamais enfermé dans un
littéralisme étroit. Ainsi, il peut faire évoluer les incriminations pour les adapter aux réalités
actuelles. Il utilise pour cela le raisonnement téléologique : lorsqu’il interprète un texte, le
juge pénal doit prendre en considération le but suivi par l’autorité qui a édicté la règle, sa
28
motivation, sa volonté. C’est ainsi que la jurisprudence a été amenée à appliquer la
qualification de vol aux détournements de courant électrique, alors que le code pénal de 1810
ne le prévoyait pas. Le juge ne fait donc que compléter le législateur, il ne s’y substitue pas.
Aussi, en présence d’un texte obscur, le juge ne peut refuser de statuer. Il se rendrait
coupable de déni de justice (art. 4 code civil). Il doit donc s’efforcer de deviner le sens du
texte, notamment à l’aide des travaux préparatoires et des réponses ministérielles qui lui
permettront de découvrir l’intention du législateur. S’il ne parvient pas à éclaircir le sens du
texte, le juge ne peut condamner sur le fondement de ce texte. Il doit relaxer ou acquitter le
délinquant.
Le juge doit toutefois surmonter les fautes de rédaction. Par exemple, un texte de
police des chemins de fer de 1917 qui interdisait de descendre « ailleurs que dans les gares
lorsque le train est complètement arrêté ». La Cour de cassation57 a corrigé cette erreur de
syntaxe et condamné le passager qui avait sauté du train en marche, en prétendant que le
règlement l’y autorisait ; ce texte n’a bien sûr pas été interprété comme obligeant les
voyageurs à monter dans le train ou de descendre de celui-ci en marche.
Ce sont là les principales conséquences du principe de la légalité criminelle pour le
juge. Pour autant, ce principe connaît aujourd’hui un déclin.
57
V. crim. 8 mars 1930, D. 1930, 1, 310, note VOIRIN.
29
pour qu’il y ait infraction, et il n’est pas toujours nécessaire que cet acte ait laissé des traces
matérielles ou provoqué une conséquence nuisible.
L’infraction est révélée par un fait matériel constatable. Deux hypothèses se
présentent, selon que l’infraction est réalisée (section I) ou simplement tentée (section II).
Pour la plupart des infractions, le fait matériel consiste en un acte positif. Il s’agit
d’une infraction de commission. Ainsi en est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui
(le vol). Il y a pourtant des infractions qui n’impliquent qu’une inaction : ce sont les
infractions d’omission ; exemple : la non-déclaration de naissance.
30
l’inexécution de cette obligation, c’est-à-dire l’abstention, qui constitue une infraction. Ces
infractions tendent à se multiplier de plus en plus.
L’exemple le plus représentatif est l’omission de porter secours à une personne en
péril, c’est-à-dire le fait, pour une personne, face à un péril menaçant la santé, l’intégrité
corporelle ou la vie d’une autre personne, de s’abstenir volontairement de lui porter secours
ou de demander secours à un tiers, alors qu’elle pouvait intervenir, sans risque pour elle ou un
tiers.
Cette infraction est distincte, par exemple du meurtre ou des violences volontaires.
Comme la plupart des infractions d’omission, aucune conséquence spécifique n’est exigée.
L’abstention est sanctionnée indépendamment de son résultat, c’est-à-dire que la personne en
péril soit sauvée par d’autres moyens ou qu’elle décède et, dans ce dernier cas, que l’on ait
voulu ou non sa mort.
Parmi les principales infractions par omission, on peut citer l’abstention de combattre
un sinistre dangereux pour la sécurité des personnes, la non-révélation de crime aux autorités
judiciaires ou administratives, dès lors qu’il est encore possible d’en prévenir ou d’en limiter
les effets, ou que les auteurs susceptibles de commettre de nouveaux crimes pourraient en être
empêchés, l’omission de témoigner en faveur d’une personne innocente, en détention
provisoire ou jugée pour crime ou délit, l’omission de déclarer la naissance d’un enfant à
l’état civil.
Parmi les infractions d’omission, certaines pourraient revêtir des éléments de
commission. C’est le problème que posent les infractions de commission par omission.
Qu’il consiste dans une action ou une omission, l’acte qui constitue l’élément matériel
de l’infraction peut être, soit un acte dont la durée est négligeable, soit un acte susceptible par
sa nature de durée plus ou moins longtemps. Il est possible d’opérer une distinction parmi les
infractions en fonction de leur durée de réalisation : l’infraction instantanée et l’infraction
continue.
31
s’exécute en un instant ou dont la durée d’exécution plus ou moins longue est indifférente à la
réalisation de l’infraction. Tel est le cas du meurtre, du vol, des coups et blessures.
Du moment qu’elle se réalise en un trait de temps, l’infraction est instantanée. Il
importe que la durée entre dans ses éléments constitutifs (abandon de famille), ni même que
ses effets se prolongent dans le temps (cas de la bigamie qui peut durer plus ou moins
longtemps).
Malgré les apparences, la bigamie est un délit instantané, car elle est réalisée en un
instant58 ; seules les conséquences ou les suites sont liées à la notion de durée. Quant au délit
de partage des produits de la prostitution (proxénétisme), il constitue également une infraction
instantanée59. Certains auteurs ont introduit une complication inutile en faisant des délits, dont
les effets se prolongent dans le temps (bigamie, apposition d’une affiche dans un lieu prohibé)
une catégorie particulière, celle des infractions permanentes. Ces infractions permanentes
sont, en réalité, des infractions soumises à tous égard aux règles des infractions instantanées.
32
Ils sont instantanés en ce que le premier acte commis constitue à lui seul l’infraction
punissable. Mais comme tous les actes successifs répétés forment cependant une unité tant par
le dessein de l’agent que par le droit violé, on admet, malgré la pluralité d’actes, qu’il y a un
délit unique exposant son auteur à une seule des peines. Aussi ce délit instantané par sa
réalisation, mais composé de plusieurs actes successifs qui lui confèrent une certaine unité et
le rapprochent du délit continu, est-il appelé continué ou répété, ou encore délit collectif par
unité de but.
L’infraction continuée se caractérise donc par la répétition de l’activité matérielle
incriminée par la loi. Chacun des actes accomplis ici est punissable isolément 60 : l’infraction
continuée est une succession d’infractions simples61 de même type qui concourent
accidentellement à l’exécution d’une même entreprise délictueuse. Tel est par exemple le cas
lorsqu’un cambrioleur, ne pouvant pas emporter les objets qu’il a décidé de voler dans une
maison inoccupée, effectue plusieurs voyages ; du voleur qui s’empare en une séance de
plusieurs billets de banque, de plusieurs bouteilles de vin, ou le pickpocket qui dévalise
plusieurs personnes pendant la même cérémonie.
L’infraction continuée, bien que n’étant pas continu par sa nature, on le considère
soumis aux règles du délit continu ou successif, bien différentes de celles du délit instantané.
60
Contrairement à l’infraction d’habitude, comme on le verra un peu plus loin.
61
Voir la définition un peu plus loin.
33
de la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui (articles 379 code pénal béninois, 311-1
code pénal français), le meurtre qui suppose un seul coup mortel porté à la victime. Au
contraire, l’infraction d’habitude comporte l’accomplissement de plusieurs actes matériels
semblables, dont chacun pris isolément n’est pas punissable mais dont la répétition constitue
l’infraction. Exemple, l’exercice illégal de la médecine 62 (article L. 4161-1 du code de santé
publique). D’après ce texte, « exerce illégalement la médecine, toute personne qui prend part
habituellement… à l’établissement d’un diagnostic ou au traitement de maladies ou
d’affections chirurgicales, congénitales ou acquises, réelles ou supposées… sans être titulaire
d’un diplôme » de docteur en médecine. Un acte médical unique ne constitue donc point le
délit d’exercice illégal.
Sont également des délits d’habitude : l’exercice illégal de la profession de géomètre,
le recel de malfaiteur. En revanche le partage des produits de prostitution (délit de
proxénétisme) n’est pas un délit d’habitude et se trouve réalisé par un acte unique63.
La seule difficulté de cette distinction est dans la détermination de l’habitude
punissable. Pour qu’il y ait habitude, il n’est pas nécessaire que les actes aient été accomplis à
l’égard des personnes différentes ; elle existe même s’ils l’ont été à l’encontre d’une seule et
même personne. Il n’est pas nécessaire non plus, que le nombre des actes soit élevé ; d’après
la jurisprudence, eux peuvent suffire pour constituer l’habitude punissable64.
62
Crim. 3 mars 1971, Bull. n° 73, Gaz. Pal., 1971.I.362, obs. VITU.
63
Crim. 29 janv. 1965, D. 1965.288, note COMBALDIEU.
64
Crim. 24 mai 1944, DA 1944.75.
34
En laissant de côté les intérêts relèvent du droit pénal international et de la compétence
juridictionnelle (lorsque les actes ont été commis dans le ressort de tribunaux différents), les
intérêts essentiels de la distinction sont relatif à la prescription de l’action publique, à
l’exercice de l’action civile, à la compétence territoriale des tribunaux et à l’application d’une
loi nouvelle. C’est cette dernière qui sera évoquée ici. Pour les infractions simples, la règle est
aussi simple ; il suffit de se référer aux intérêts qui résultent des infractions instantanées. Les
intérêts ne concerneront ici que les infractions d’habitude et complexes, qui d’ailleurs, à bien
d’égard, sont presque identiques.
Au regard de l’application d’une loi nouvelle, la loi pénale nouvelle applicable est celle en
vigueur le jour du dernier acte constitutif de l’infraction d’habitude et complexe, même si
cette loi, entrée en vigueur postérieurement à l’accomplissement du premier acte, est plus
sévère.
35
dès que les substances nocives ont été absorbées par la victime 65 ; c’est aussi le cas de la
fabrication de la fausse monnaie sans émission et mise en circulation et de nombreuses autres
infractions66. L’attentat à la pudeur a pu être considéré comme une infraction formelle67.
II – Intérêt de la distinction
§ 1 : La tentative
65
Crim. 19 déc. 1963, Gaz. Pal., 1964.I.230 et 24 mars 1965, D.1965.434.
66
V. crim. 23 octobre 1989, JCP 1990.IV.47.
67
Crim. 24 juill. 1974, Bull. n° 266, Gaz. Pal., 29 nov. 1974, somm. p. 3.
36
La perpétration d’une infraction ne se réalise pas sans une préparation préalable. Le plus
souvent, il s’écoule, entre la naissance de la pensée criminelle et le résultat dommageable, une
série de phases, variables, mais pouvant être schématisées :
1. Phase interne
Pensée : l’infraction est envisagée comme une simple éventualité.
Désir : on souhaite commettre l’infraction.
Projet : on forme un plan pour mener à terme l’infraction.
2. phase externe
Préparation de l’infraction, on étudie les lieux, on se procure des instruments, des armes.
Exécution : si l’exécution est parfaite (par exemple la victime est atteinte mortellement dans
le cas du meurtre), on parle d’infraction « consommée ».
Si par la volonté de l’agent ou pour toute autre raison, les agissements criminels sont
interrompus avant ce stade, l’infraction est seulement tentée. La tentative est « l’action
d’essayer de commettre un délit »68 ou un crime. Il y a tentative de commettre une infraction
lorsque le comportement réalisé, tout en ressemblant sur un plan matériel et moral au
comportement incriminé, ne coïncide pas entièrement avec lui 69. La volonté de commettre
l’infraction est d’ores et déjà certaine.
La définition de la tentative est donnée par l’article 2 du code pénal béninois : « Toute
de crime qui aura été manifestée par un commencement d’exécution, si elle n’a été suspendue
ou si elle n’a manqué son effet que par des circonstances indépendantes de la volonté de son
auteur, est considéré comme le crime même ». Cette définition était cependant si peu claire
qu’elle avait donné lieu à des débats doctrinaux et à des incertitudes jurisprudentielles sans
doute parmi les plus importants de tout le droit pénal général 70. On peut d’ailleurs être étonné,
pour ne pas dire scandalisé, que le nouveau code pénal français non seulement n’ait en rien,
ne serait-ce qu’abordé les questions posée, mais encore ait été jusqu’à reprendre les termes
mêmes de la loi ancienne à l’origine du désordre du droit positif en sorte que « rien n’est
changé »71.
La seule modification législative (il y en a tout de même une), consiste à énoncer à
l’article 121-4 : « Est auteur de l’infraction la personne qui … 2° tente de commettre un crime
68
J. BERRIAT SAINT-PRIX, cité par Jean PRADEL, Droit pénal général, op. cit., n° 376.
69
Emmanuel DREYER, Droit pénal général, Paris : Flammarion, 2006, p. 119.
70
Michèle-Laure RASSAT et Gabriel ROUJOU de BOUBEE, Droit pénal général, Paris : Ellipses, 2006, n° 268.
71
Jean PRADEL, cité par Michèle-Laure RASSAT et Gabriel ROUJOU de BOUBEE, ibidem.
37
ou … un délit ». Et à l’article 121-5 de reprendre « La tentative est constituée dès lors que,
manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet
qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur ».
Tout de même, que ce soit dans les deux codes (béninois et français », l’auteur de la
tentative est considéré comme « auteur » de l’infraction (articles 2 code pénal béninois, et
121-4 code pénal français). Cette règle traduit la tendance de la loi de tenir compte de la
puissance de nuire plus que de l’acte matériel.
On sait ainsi comment est punissable la tentative. Mais il faut déterminer quand elle
l’est. Il faut pour cela définir les éléments de la tentative, et préciser son domaine.
38
Encore faut-il distinguer sur ce point les actes préparatoires, et le commencement
d’exécution.
Briser la vitre d’une voiture pour voler à l’intérieur ; pénétrer dans une voiture pour
voler celle-ci ; venir pour commettre un vol, avec instruments d’effraction et camion, et
éprouver la solidité des barreaux d’une fenêtre ; se tenir en embuscade avec véhicule et arme,
pour une agression contre les convoyeurs de fonds ; accepter un achat de stupéfiant ; recruter
le destinataire d’une importation de stupéfiants ; commencer à scier un barreau pour une
évasion ; exposer des véhicules à la vente avec de fausses indications, pour une tromperie ;
demander l’ouverture de la porte d’une banque et attendre quelqu’un pour commettre un vol
avec arme ; pour une escroquerie à l’assurance, déclarer à l’assureur, comme accidentel, un
incendie volontairement provoqué, ou un vol de véhicule avec faux certificat de marquage ;
pour une agression sexuelle, se présenter faussement comme médecin pour un prétendu
examen, avec demande de se déshabiller ; fait de mettre un préservatif pour tenter un viol ;
74
Crim. 25 oct. 1962, D. 1963. 221, note BOUZAT.
39
rechercher des pilotes acceptant de poser un hélicoptère dans la cour d’une prison en vue
d’une évasion.
L’incendie volontaire d’un bien assuré, pour une escroquerie, mais sans aucune
démarche auprès de l’assureur ; la remise d’argent en vue de faire commettre un meurtre
(mais si le meurtre a été commis ou tenté, la remise d’argent sera une complicité punissable).
40
On ne tient pas compte du mobile qui a poussé l’agent à s’arrêter (remords, peur ;
exemple, après avoir commencé par creuser pour s’évader, cesser volontairement (voir le
film sur "Les évadés"– mais il y a dégradation de bien) : c’est un système utilitaire de prime
au repentir intervenant assez tôt.
Mais il faut un désistement vraiment volontaire, spontané. La tentative demeure
punissable si le désistement est causé par un événement extérieur. Il y a là une question de fait
parfois délicate.
Exemples d’interruptions involontaires : arrivée de la police ; présence imprévue d’un
tiers sur les lieux où devrait se commettre le crime ; se sentir épié par des tiers, et ne pouvoir
obtenir le concours d’un comparse ; renoncer à s’évader à cause d’un mouvement des
gardiens découvrant l’évasion d’un autre détenu ; renoncer à un vol dans une banque en raison
du manque de coordination avec des complices ; ne pas commettre un viol en raison d’une
déficience momentanée ; évasion manquée en raison du refus de pilotes d’hélicoptère de la
favoriser ; renoncer à un enlèvement en raison des appels de secours de la victime ; renoncer à
une escroquerie à l’assurance en raison de la demande d’expertise de l’assureur.
Il y a deux cas dans lesquels la non-consommation de l’infraction est indiscutablement
indépendante de la volonté de l’agent : l’infraction manquée, par maladresse par exemple, le
tireur manquant sa victime : il y a tentative punissable ; l’infraction impossible, cas qui est
plus discuté.
L’infraction impossible est un cas particulier d’infraction manquée : comme
l’infraction manquée ordinaire, l’infraction impossible est manquée, mais parce qu’elle ne
pouvait pas réussir (exemple, vol dans une poche vide, meurtre sur un cadavre). Ces deux
infractions seront abordées plus en détail dans le § 2 qui leur est consacré.
II – Le domaine de la tentative
La répression de la tentative est exclue par la loi parfois pour des raisons tenant de la
faible gravité de l’infraction, parfois en raison de la nature de l’infraction.
41
En l’absence d’un tel texte, il n’y a donc répression que si l’infraction est consommée ;
d’où l’importance de la distinction des infractions matérielles et formelles.
- La tentative de contravention n’est pas punissable.
42
Il s’agit de cas dans lesquels l’agent a fait tout ce qui était en son pouvoir pour que
l’infraction se réalise, celle-ci n’ayant échoué qu’indépendamment de sa volonté et sans
intervention extérieure. Ils répondent à deux sortes de situations.
Dans la première hypothèse, l’élément matériel de l’infraction est intégralement
accompli avec l’intention requise mais l’action n’a pas produit le résultat escompté en raison
d’une défaillance quelconque (la balle tirée n’a pas atteint la victime, celle-ci était insensible
au poison administré, ou encore le candidat au viol a été trahi par ses possibilités physiques).
Il s’agit de l’infraction manquée. Dans l’infraction manquée, on peut être certain au contraire,
de la volonté de l’agent d’aller jusqu’au bout de sa résolution criminelle, puisqu’il a fait, en ce
qui le concerne, tout ce qu’il avait à faire pour que l’infraction réussisse et que celle-ci n’a
manqué son but que par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. C’est parfois à
cause de l’étourderie ou de maladresse de l’agent que le résultat n’est pas atteint 75. Dans la
perspective d’un régime répressif plus nuancé que ne l’est le droit béninois, même français,
l’infraction manquée devait prendre place dans un ordre de gravité croissant entre la tentative
véritable et l’infraction consommée.
Dans une seconde hypothèse, l’agent a mis en œuvre tout ce qui était nécessaire pour
réussir mais l’infraction était vouée à l’échec pour une raison dont il n’était pas informé (coup
de feu tiré dans le dossier d’un fauteuil ou la victime potentielle n’était pas assise). Il s’agit de
l’infraction impossible.
L’infraction impossible est désormais utilisée en jurisprudence française pour
d’ailleurs élargir celle d’infraction manquée. Dès lors que l’agent a eu le comportement
envisagé par le texte d’incrimination et que l’absence de résultat est étrangère à sa volonté, il
a fait preuve de sa dangerosité et mérite une sanction. Ainsi, la tentative de vol peut être
retenue contre un individu qui cambriole une maison vide76 et la tentative de meurtre contre
un individu qui porte des coups qu’il croit mortels à une personne déjà décédée77.
75
Jean PRADEL, op. cit., n° 388.
76
Crim. 15 mars 1994, RDP. 1994, n°153, obs. VERON.
77
Crim. 16 janv. 1986. JCP 1987, II, 20774, note ROUJOU de BOUBEE ; D. 1986, 265, note MAYER et
GAZOUNAUD. V. l’arrêt en annexe.
43
l’actus reus (acte criminel), constitue l’élément moral. L’acte n’est punissable que s’il y a
responsabilité pénale, c’est-à-dire si son auteur matériel est un être humain responsable,
jouissant de ses facultés morales (c’est l’imputabilité), à défaut de quoi il n’y a pas
responsabilité, et ayant commis une faute (c’est la culpabilité).
A : L’âge
L’insuffisance des facultés mentales peut tenir à l’âge (la minorité).
Au Bénin, on est majeur à 18 ans.
Au-dessous de 18 ans : les mineurs capables de discernement sont préalablement
responsables de crimes, délits ou contraventions dont ils sont reconnus coupables ; si le
mineur n’est pas capable de discernement, aucune mesure ne peut être prise à son égard.
« Capable de discernement » suppose que le mineur ait compris et voulu l’acte matériel
reproché ; une infraction, même non intentionnelle, suppose intelligence et volonté : le
principe peut conduire à une relaxe (exemple, dans le cas de blessures non intentionnelles par
un enfant de 6 ans78), ou à une décision de culpabilité (exemple, pour un incendie volontaire
par un enfant de 9 ans79.
Pour les mineurs de 10 ans capables de discernement : seules les mesures éducatives
peuvent être décidées.
78
Affaire Laboube, Crim. 13 déc. 1956, D. 1957, 349, note PATIN.
79
Cass. ass. Plén., 9 mai 1984, D. 1984, 525, concl. CABANNES, note CHABAS.
44
Pour les mineurs de 10 à 13 ans : peuvent être décidées des mesures éducatives, et des
sanctions éducatives, selon les circonstances et la personnalité du mineur ; aucune peine ne
peut être prononcée.
Pour les mineurs de 13 à 18 ans : peuvent être décidées des mesures et des sanctions
éducatives ; mais des peines peuvent être prononcées, selon les circonstances et la
personnalité du mineur : dans ce cas la loi prévoit une diminution de peine.
Pour les effets de la diminution de peine :
- Obligatoire entre 13 et 16 ans
- Pouvant être écartée (facultative) entre 16 et 18 ans, sauf cas particulier (nouvelle
récidive d’un crime, ou d’un délit commis avec une circonstance aggravante).
Il s’agit bel et bien d’une cause d’irresponsabilité partielle 80, et non totale. Selon le droit
positif béninois (article 66 du code pénal), si en raison des circonstances et de la personnalité
du délinquant, il est décidé qu’un mineur âgé de plus de treize ans doit faire l’objet d’une
condamnation pénale, il bénéficie d’un régime d’abaissement de la peine, sous réserve, de la
possibilité d’écarter l’excuse atténuante de minorité à l’égard d’un mineur âgé de plus de
seize ans.
S’il a encouru une peine de mort, de la réclusion criminelle à perpétuité, de la détention
criminelle à perpétuité, il sera condamné à une peine de dix à vingt ans d’emprisonnement.
S’il a encouru la peine de la réclusion criminelle à temps de dix à vingt ans ou de cinq à dix
ans, il sera condamné à l’emprisonnement pour un temps égal à la moitié au plus de celui pour
lequel il aurait pu être condamné à l’une de ces peines.
Quelques remarques doivent être observées :
1) L’âge du mineur s’apprécie non au jour de la comparution en justice, mais au jour où
l’infraction est commise
2) L’âge avancé n’est pas en soi une cause d’irresponsabilité pénale, sauf s’il constitue en
même temps une cause de grave trouble psychique, mais alors pour cette dernière
raison ; il existe parfois des règles légales spéciales pour la peine (exemple,
interdiction de séjour).
80
Jean-Claude SOYER, Droit pénal général et procédure pénale, Paris : LGDJ, 20ème édition, 2008, n° 209.
45
l’expertise médicale. Les juges de fond doivent s’expliquer sur l’état mental du prévenu à la
date des faits, et sans se borner par exemple à viser le comportement du prévenu à l’audience.
Ces troubles peuvent avoir deux degrés de gravité.
Remarque :
Si le trouble ne survient qu’après l’infraction, l’altération des facultés mentales
empêchant l’inculpé d’assurer sa défense, il est sursis au renvoi devant la juridiction de
jugement.
Si le trouble ne survient qu’après condamnation définitive, il ne fait pas obstacle à
l’application des peines pécuniaires ou des peines privatives de droit, mais il fait obstacle à
l’exécution des peines privatives de liberté.
Si, ayant existé au temps de l’acte, le trouble n’a été découvert qu’après la
condamnation, il peut y avoir révision du procès.
46
les juges retiennent les circonstances atténuantes ; ils abaissent la peine applicable, ou
choisissent une peine mieux adaptée. Exemple, malade schizophrène qui entend une voix lui
dire de lever le pied, lequel heurte la jambe de la victime (la cour d’appel de Paris a prononcé
une dispense de peine, avec dispense d’inscription au casier judiciaire).
II – L’altération passagère
A : Notion
47
responsabilité découlant de l’obscurcissement des facultés mentales, ou appréciation
sévère comme sanction de l’ivresse.
La loi prévoit dans certaines situations une aggravation de peine, par exemple en cas
d’homicide par imprudence commis par un conducteur sous l’empire d’un état alcoolique ou
après usage de stupéfiant.
B : Irrésistible
La contrainte doit supprimer le choix de l’agent (à la différence de l’état de nécessité).
Il n’a d’autres choix que de commettre l’infraction.
La jurisprudence (de la chambre criminelle de la Cour de cassation) est assez
rigoureuse : par exemple, le devoir d’obéissance de l’employé n’est pas la contrainte. N’est
48
pas force majeure, effaçant un abus de confiance, la brusque décision d’une banque de retirer
son appui.
C : Imprévisibilité
La jurisprudence se montre sévère à ce sujet. En principe, il n’y a pas contrainte en cas
de défaillance mécanique du véhicule, ou physique du conducteur.
Selon la jurisprudence, il n’y a pas contrainte en cas de faute antérieure de l’auteur des faits.
Toutefois, cette solution est critiquable : les éléments de l’infraction doivent en effet
s’apprécier au moment où celle-ci est matériellement commise.
81
Jean PRADEL, op. cit., n° 501.
49
est défini par la loi » et « la conscience chez le coupable d’enfreindre les prohibitions
légales »82. En d’autres termes, c’est « la conscience et le volonté infractionnelle »83.
Mais la faute intentionnelle ne doit se confondre ni avec la simple volonté, ni avec le
mobile. En quoi consistent donc ces deux nouvelles notions ? Et une fois que l’on sait qu’il
n’est point possible de confondre ces notions avec l’intention, il faut analyser ce qu’elle est.
L’intention coupable est la volonté orientée vers l’accomplissement d’un acte interdit.
La volonté c’est la faculté de se déterminer à l’action. Il en résulte que tout acte intentionnel
est un acte volontaire, mais l’acte volontaire peut n’être pas intentionnel.
La volonté apparaît donc comme une condition nécessaire de l’intention mais non pas
comme une condition suffisante de celle-ci. Exemple : appuyer sur la gâchette d’un revolver
relève de la volonté mais ne traduit une intention que si cela est fait dans le dessein de tuer.
Le mobile, c’est le sentiment qui détermine à l’action et qui pour une même infraction
varie selon les individus et les circonstances. Ainsi peut-on concevoir un meurtre par haine,
jalousie, vengeance, cupidité, cruauté, pitié, amour. L’intention, elle, demeure toujours
semblable pour une même infraction : c’est toujours la volonté consciente d’accomplir l’acte
illégal ; dans le cas du meurtre, c’est nécessairement la volonté d’accomplir l’acte entraînant
la mort de la victime. Cela signifie que le mobile se définit par rapport au délinquant et
l’intention par rapport à l’infraction.
La distinction entre les deux notions se révèle fondamentale. Alors que l’intention est
l’élément essentiel de toute une catégorie d’infractions, qualifiées précisément d’infractions
intentionnelles, le mobile n’est pas pris en considération par le droit 84. Exemple, euthanasie,
excision pour se conformer à des coutumes ancestrales.
Ce point de vue apparaît compréhensible car le mobile explique peut-être la faute mais
il ne la supprime pas. Ainsi que l’affirme la Cour de cassation, « le mobile même honorable
est par lui-même incapable de détruire la faute du délinquant »85
Il se peut toutefois, à titre exceptionnel, que le mobile soit intégré par le droit. Cela se
rencontre d’abord dans la détermination des conditions de l’infraction. Il arrive en effet au
82
E. GARCON, art. 1, n° 77, in Jean PRADEL, ibid., n° 502.
83
Jean PRADEL, ibidem.
84
Crim. 7 juin 1961, Bull. n° 290.
85
Crim. 5 juin 1940, D.C., 1941.I.30, note DONNEDIEU de VABRES, in R. MERLE et A. VITU, Traité de
droit criminel, op. cit., n° 591.
50
législateur de l’ériger en élément constitutif de l’infraction de telle sorte que, pour que celle-ci
existe, il faut rapporter la preuve de l’intention ordinaire, qualifiée de dol général, ainsi que
celle du mobile particulier exigé par la loi, qualifié alors de dol spécial. On le rencontre, par
exemple, dans le nouveau code pénal français en son article 413-1 par rapport aux vitesses
maximales autorisées : « lorsque celle-ci sont plus restrictives, les vitesses maximales édictées
par l’autorité investie du pouvoir de police prévalent sur celles autorisées par le présent
code »86. Il arrive parfois qu’il devienne une circonstance aggravante entraînant une peine plus
élevée.
Exemples, meurtre d’un témoin pour l’empêcher de déposer ; enlèvement pour obtenir
une rançon ; modification de l’état des lieux du crime pour entraver la manifestation de la
vérité.
Il faut ajouter qu’en fait, juges et jurés sont parfois sensibles aux mobiles, si sensibles
même qu’ils peuvent aller jusqu’à nier la culpabilité comme dans certains cas d’euthanasie ou
en matière de meurtre passionnel. En 1984, une cour d’assises a acquitté un fils qui avait tué
son père, à l’expresse et insistante demande de celui-ci, qui était certain de ressusciter sans
tarder.
51
L’intention suppose en principe que l’agent ait eu connaissance du caractère illégal de
ses actes. Mais au lieu d’exiger la démonstration positive du fait que le délinquant a eu une
telle conscience on présume celle-ci dans le cadre de l’adage « nul n’est censé ignorer la loi ».
Il signifie que l’on ne peut se soustraire à l’application d’une règle de droit en en prétextant
l’ignorance et donc que l’on est implicitement supposé connaître le droit. Une telle
présomption prend alors l’allure d’une fiction qui se justifie essentiellement par la nécessité
d’assurer le bon fonctionnement de l’ordre juridique et social.
A vrai dire, l’expression « faute non intentionnelle » est trompeuse dans la mesure où
le comportement de l’agent est, le plus souvent, pleinement volontaire. Par exemple,
l’automobiliste pressé franchit une intersection sans respecter le signalement rouge des feux
tricolores.
Le législateur vise la faute non intentionnelle dans différents textes. Il emploie
indifféremment les mots d’imprudence, de négligence, d’inattention, de manquement à une
obligation de sécurité ou de prudence, de mise en danger délibéré d’autrui. Toute cette
terminologie, riche et variée, doivent être considérée comme synonyme puisque, à travers
elle, ce que l’on reproche à l’individu, c’est de ne pas avoir pris les précautions de nature à
empêcher le dommage de survenir. Il faut ajouter que dans l’imprudence, le résultat n’étant
pas désiré, on parle également d’infraction involontaire, ce qui demeure discutable car il y a
toujours une part de volonté dans la conduite imprudente même si cette volonté ne d’étend pas
au résultat.
L’imprudence se présente sous deux formes distinctes selon qu’elle est consciente ou
inconsciente.
L’imprudence consciente se caractérise par le fait que l’individu a voulu un acte, qu’il en a
prévu le résultat comme possible mais qu’il n’a pas désiré celui-ci. C’est le cas de ce
88
Jean PRADEL, op. cit., n° 512.
52
conducteur qui, lucidement, brûle un feu rouge ou ne respecte pas le signal « stop » et blesse
ou tue quelqu’un89. On est en présence d’une grosse faute d’imprudence qu’il arrive
exceptionnellement au droit pénal d’assimiler à une intention à raison de sa gravité et de
l’importance de l’intérêt social en jeu90.
On parle en revanche d’imprudence inconsciente lorsqu’un individu, tout en voulant
quelque chose, agit de manière différente et cause ainsi un dommage qu’il n’a ni prévu, ni
désiré. C’est le cas du pharmacien qui se trompe de médicament ; du garde barrière qui, lors
de la survenance d’un train, oublie d’abaisser la barrière du passage à niveau. Ce
comportement apparait à une erreur mais il est évident que celle-ci ne saurait l’exonérer de la
responsabilité qui pèse sur lui car ce qu’on lui reproche, c’est précisément d’avoir commis
une telle erreur91.
II – La répression
89
Trib. corr. Lille 4 nov. 1958, JCP 1959, 11014, note J.-B. HERZOG.
90
Crim. 29 janv. 1921, S. 1922, I, n° 86, note J. A. ROUX.
91
Crim. 16 mai 1961, JCP 1961, 12315, note SAVATIER.
92
Lorsqu’il aura précédé, accompagné ou suivi un crime.
93
30 ans de réclusion criminelle en France (art. 221-1 code pénal)
94
La répression est presque identique en France : 3 ans d’emprisonnement et une amende de 300 000 francs (art.
221-6 code pénal français)
95
Arts. 221-6, al. 2 ; 222-19, al. 2 et 222-20.
53
A l’exception du domaine de la conduite automobile où le code de la route prévoit des
dispositions contraires, les infractions d’imprudence ne sont traditionnellement répréhensibles
que si elles ont produit un résultat dommageable. Ce lien entre la sanction et le résultat
apparaît ici encore critiquable car l’auteur de la faute est évidemment aussi dangereux lorsque
le dommage est survenu que dans le cas inverse. D’aucuns suggèrent avec raison de s’orienter
vers une sanction de l’imprudence en dehors de tout résultat chaque fois que cela se révèle
possible96. Le nouveau code pénal français s’est encore engagé dans cette voie : « Le fait
d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessure de nature à
entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement
délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou de
règlement… »97 est punissable en l’absence de tout résultat.
96
Jean LARGUIER, Droit pénal général, Paris : Dalloz, 20ème édition, 2005, pp. 45-46.
97
Art. 223-1.
54
Suivant que l’infraction est punie d’une peine criminelle, correctionnelle ou de police,
on l’a qualifie de crime, délit ou contravention. Suivant qu’elle est punie d’une peine
ordinaire ou particulière (politique ou militaire), on distingue les infractions de droit commun,
par opposition aux infractions politiques ou militaires. Il semble que le code, à vrai dire, a
tenu compte soit de la gravité objective de l’infraction (chapitre I), soit de sa nature
particulière (chapitre II).
55
Cette classification est extrêmement importante à raison de très nombreux intérêts (Section I)
qu’elle comporte, ce qui n’empêche pas de discuter parfois la valeur (Section II).
Dans le domaine de la sanction, de très nombreuses institutions qui seront examinées après,
fonctionnent différemment selon que l’on est en face d’un crime, d’un délit ou d’une
contravention.
98
A titre d’exemple, l’instruction préliminaire est obligatoire pour les crimes, en principe facultative pour les
délits (parfois obligatoire, exemple : pour les mineurs), et a lieu seulement sur réquisitions du procureur de la
République pour les contraventions.
56
Section II : La valeur de la distinction
La classification tripartite de l’article 1er du code pénal n’encourt aucun reproche de
forme. Il est très pédagogique et facilite le diagnostic99. Toutefois, il continue par faire l’objet
de deux critiques, l’une sur l’illogisme du principe, l’autre sur son imprécision.
99
Roger MERLE et André VITU, op. cit., n° 408.
100
Pierre BOUZAT et Jean PINATEL, op. cit., n° 128.
101
Ibidem.
57
mérite de mettre en relief « la hiérarchie des conduites »102 interdites et la hiérarchie des
traitements dont ces conduites devraient être assorties, et enfin qu’elle était adaptée à
l’organisation juridictionnelle. Aussi est-elle quelque peu assouplie par le biais de la
correctionnalisation judiciaire.
102
Roger MERLE et André VITU, op. cit., n° 411.
58
Section I : Distinction des infractions de droit commun et des infractions
politiques
Le principe d’une distinction entre les infractions politiques d’une part et les
infractions de droit commun, d’autre part, trouve son appui bien avant le code pénal de 1810.
Sous l’Ancien régime, les crimes politiques étaient traités en France comme à l’étranger, avec
une sévérité toute particulière103. On souligne généralement qu’alors que le malfaiteur de droit
commun manifeste des tendances antisociales profondes, le délinquant politique s’attaque
moins, à la société en elle-même qu’à ses structures politiques et mérite à ce titre un
traitement plus doux104.
Le code pénal ne donne aucune indication particulière sur les infractions politiques ;
l’expression n’y figure d’ailleurs pas105. Et comme par le passé, il revient à la doctrine de
rechercher à établir le critère paraissant avoir guidé le législateur.
103
Pierre BOUZAT et Jean PINATEL, op. cit., n° 140.
104
Roger MERLE et André VITU, op. cit., n° 414.
105
Bernard BOULOC, op. cit., n° 188 et s.
106
Roger MERLE et André VITU, op. cit., n° 415.
107
Ibidem.
108
Sur les critères objectif et subjectif, v. Bernard BOULOC, op. cit., n° 190.
59
Dans la pratique, entre ces deux conceptions, l’une objective et étroite, l’autre
subjective et large, le droit positif paraît donner sa préférence à la conception objective. C’est
par l’objet même de l’infraction qu’il détermine l’infraction politique.
60
Les infractions militaires sont celles qui présentent le double caractère d’être
commises par des militaires et de toucher à la vie militaire. Elles se subdivisent en deux
catégories : les infractions militaires stricto sensu (I) et les infractions militaires mixtes (II).
Elles consistent dans un manquement aux devoirs militaires prévus par les lois
militaires ; elles ne peuvent être commises donc que par des militaires. Ce sont par exemple,
l’insoumission, la désertion, les infractions contre l’honneur et le devoir, la discipline etc.
Ce sont des faits qui, lorsqu’ils sont commis par des civils (exemple, dépouiller un
blessé en zone d’opération militaire), sont punis par le code pénal, mais qui lorsqu’ils ont pour
auteurs des militaires, sont incriminés d’une façon spéciale, souvent plus rigoureuse, par les
lois pénales militaires. Exemple, crimes et délits de droit commun dans l’exécution du
service ; une agression sexuelle commise dans l’exécution du service).
61
militaire de l’auteur, pour juger les infractions de droit commun commises par un
militaire dans l’exercice de ses fonctions.
Procédure : les juridictions des forces armées prévue pour le temps de guerre applique
une procédure qui présente pour le prévenu des garanties analogues à celles qui
existent devant les juridictions répressives de droit commun (présence d’un avocat,
respect des droits de la défense).
Répression : certaines peines sont spécifiquement militaires, exemple la perte de
grade ; le régime des peines est particulariste, exemple pour le sursis ou la récidive.
Telles sont les principales, et importantes classifications qui nous ont paru importantes
dans le cadre de ce titre. D’autres qualifications s’expliquent que par rapport à l’exécution
matérielle de l’acte, c’est-à-dire par rapport à l’élément matériel, ou par référence à la faute de
leur auteur, et donc fondée sur l’élément moral. Ces spécificités ont été déjà étudiées dans
chacun des chapitres qui leur étaient consacrés. Il est donc inutile de les reprendre ici.
62
D’un point de vue juridique, le délinquant est celui qui a commis une infraction, et qui
encourt une peine. L’infraction est généralement le fait d’un seul individu, elle peut être
parfois le fait de plusieurs personnes : les problèmes de responsabilité deviennent alors plus
complexes, le comportement individuel de chaque personne étant enchevêtré avec une
conduite collective. Mais, pour être déclaré coupable, il ne suffit pas d’avoir été l’auteur ou le
complice d’une infraction, il faut aussi être juridiquement responsable. Or le responsabilité
juridique peut être écartée lorsqu’il existe l’une des causes d’irresponsabilité spécialement
prévues par la loi. Cela ne signifie pas, pourtant, qu’aucune mesure ne puisse jamais être
appliquée à un délinquant non responsable, ni davantage que la peine soit toujours
proportionnée à la gravité objective de l’infraction et qu’elle soit toujours la même pour tous
les délinquants responsables du même délit.
Puisque le droit pénal béninois ne connait pas encore la responsabilité pénale des
personnes morales, et étant donné que les causes subjectives de non-responsabilité (trouble
psychique et neuropsychique, la contrainte, etc.) ont déjà été étudiées dans l’élément moral de
l’infraction, il ne reste qu’à examiner ici :
63
Mais notre droit pénal ne connaît que deux manières d’être pénalement responsable
d’une infraction : auteur ou complice. L’auteur peut être juridiquement considéré comme le
principal responsable, alors que le complice est en quelque sorte (d’un point de vue juridique)
un responsable de second plan.
Ces deux manières d’imputer une infraction pénale à une personne déterminée obéissent à des
règles différentes. Elles sont toutefois gouvernées par un principe d’intérêt général commun :
celui de la responsabilité personnelle.
Le principe selon lequel la responsabilité pénale est une responsabilité individuelle ou
personnelle, à la différence du nouveau code pénal français, n’est pas inscrit dans le code
pénal béninois. Il est cependant depuis longtemps affirmé par la Cour de cassation, qui
rappelle souvent que « nul n’est punissable qu’en raison de son fait personnel »112. Le
législateur français de 1992 a fini par consacrer ce principe dans l’article 121-1 du code
pénal : « Nul n’est pénalement responsable que de son propre fait »..
Il convient d’examiner les règles relatives à l’auteur (section 1) et au complice (section 2).
Crim. 3 mars 1859, B., n° 69 ; 3 mars 1933, B., n° 49 ; 16 déc. 1948, B., n° 291 ; 28 fév. 1956, JCP, 1956, II,
112
64
Apparemment il existerait une très grande iniquité à faire supporter une responsabilité
intégrale à quelqu’un qui n’a pas matériellement commis l’infraction en cause 113. En effet, la
notion d’auteur peut revêtir des réalités très différentes, en raison même de l’extrême diversité
des infractions. Il y a naturellement peu de rapports entre l’auteur d’une infraction de
commission (qui a effectivement réalisé un acte matériel) et celui d’une infraction d’omission
(à qui il est justement reproché de n’avoir pas agi) ; de même entre l’auteur d’une infraction
intentionnelle (qui a voulu commettre les faits incriminés pour obtenir un certain résultat) et
celui d’une infraction non intentionnelle (qui a fait preuve de négligence). Même lorsque le
texte incriminateur règle précisément la question, comme c’est souvent le cas, la solution
n’est pas toujours facile dans la pratique.
Certaines infractions sont définies de telle façon que leur auteur peut n’avoir commis
lui-même les actes matériels incriminés par la loi. Elles sanctionnent en effet la personne qui
fait accomplir certains actes par un tiers. Ainsi, l’article 354 du code pénal punit comme
auteur, non seulement celui qui enlève un mineur par fraude ou violence, mais aussi celui qui
le fait enlever. L’auteur d’une telle infraction est désigné par la doctrine comme l’auteur
moral ou l’auteur intellectuel, par opposition à l’auteur matériel, qui commet lui-même le fait
incriminé. L’auteur intellectuel est un individu spécialement dangereux et il est normal que la
répression l’atteigne114 ; pour ce faire le droit pénal béninois a choisi la solution plus générale
de la complicité (complicité par provocation)115.
Pour sa part, le législateur français de 1992 est parfois allé plus loin jusqu’à prévoir
contre l’auteur intellectuel une incrimination distincte de celle prévue pour l’auteur matériel,
afin de le réprimer plus sévèrement que ce dernier. L’article 222-34 du code pénal français
réprime ainsi à la réclusion criminelle à perpétuité le dirigeant ou l’organisateur d’un
groupement ayant pour objet le trafic de stupéfiant, alors que ceux qui exécutent ce trafic
encourent des peines à temps (en application des articles 222-35 et 222-36). Il en est de
même, pour la répression d’un mouvement insurrectionnel, des articles 412-4 à 412-16 qui
distinguent les participants au mouvement de ceux qui en sont les dirigeants ou les
organisateurs. On peut encore citer les articles 413-14 et suivants, qui punissent plus
113
Michèle-Laure RASSAT et Gabriel ROUJOU de BOUBEE, op. cit., n° 375.
114
Michèle-Laure RASSAT et Gabriel ROUJOU de BOUBEE , ibid., n° 377.
115
Voir développement en section II.
65
sévèrement l’organisateur d’un groupe de combat ou d’un mouvement dissous que les simples
participants.
Dans tous les cas, ces personnes que la loi pénale française désigne comme auteurs
auraient pu être sanctionnées comme des complices par instruction. Si elles sont présentées
comme auteurs, c’est pour refléter la réalité criminelle (génocide) ou pour aggraver la
répression (trafic de stupéfiants, mouvement insurrectionnel).
Lorsque de telles raisons n’existent pas, le législateur s’attache généralement à
respecter la distinction classique entre l’auteur et le complice.
Ces notions, purement doctrinales et qui sont intimement liées à la question du lien de
causalité, ont été quasiment consacrées par le législateur français dans la loi du 10 juillet 2000
tendant à préciser la définition des délits non intentionnels.
La première hypothèse correspond à celle de l’auteur indirect qui s’oppose à l’auteur
direct. L’auteur direct est celui qui frappe lui-même la victime, ou qui projette contre celle-ci
l’objet qui la heurtera. L’auteur indirect intervient en amont dans la chaînes des causalités
ayant abouti au dommage, ce qui peut correspondre à des situations très variables.
La doctrine a ainsi pu qualifier d’auteurs indirects :
- Le responsable d’un accident ayant provoqué chez la victime un traumatisme crânien
grave à la suite duquel elle s’est suicidée ;
- L’automobiliste qui gare son véhicule sur le trottoir, obligeant un piéton à descendre
sur la chaussée où il est renversé par le véhicule roulant à sa suite ;
- Le directeur d’une usine ayant employé un ouvrier souffrant d’insuffisance
respiratoire dans des ateliers empoussiérés.
La notion d’auteur médiat est à la fois une extension et une subdivision de la notion
d’auteur indirect, parfois définie par la doctrine comme celui qui laisse commettre
l’infraction, en raison d’une « omission fautive », par une personne placée sous son autorité
(qui sera elle-même auteur direct). Elle correspond essentiellement à la situation des chefs
d’entreprise ou des décideurs publics, et est en partie recouverte par l’hypothèse de la
personne qui ne prend pas les mesures permettant d’éviter un dommage.
En voici quelques exemples :
- Un chef de chantier qui n’interrompt pas les travaux d’une grue malgré le vent,
causant un accident ;
66
- Une personne qui confie sa voiture à un tiers ne possédant pas le permis de conduire et
provoquant un accident.
On voit donc que, le plus souvent, l’auteur médiat est également un auteur indirect.
La notion d’auteur indirect ou médiat, dans un code pénal (comme c’est le cas en
France depuis la loi du 10 juillet 2000), présente une importance particulière, puisque ces
auteurs ne pourront être condamnés pour les délits d’imprudence qu’en cas de faute qualifiée.
III- Coauteurs
Lorsqu’une infraction est le fait de plusieurs personnes, chacune d’elles peut avoir
commis les éléments constitutifs de celle-ci. Ainsi deux individus qui pénètrent dans une
maison pour y dérober plusieurs objets commettent chacun les éléments constitutifs du vol
réprimé par l’article 379 du code pénal. Ces personnes sont alors qualifiées de coauteurs. On
rentre ici dans l’action collective, puisque l’infraction n’est plus le fait d’une personne isolée,
mais de plusieurs. La notion de participation en rend compte, avec cependant bien une
spécificité marquée, tout mode participatif ne relevant pas de la coactivité. La jurisprudence
en donne une définition précise, afin de ne pas la confondre notamment avec la
complicité : « Dans les actes de complicité, il faut distinguer ceux qui, extrinsèques à l’acte,
de ceux qui, tendent à en préparer, faciliter et réaliser la consommation, de ceux qui, par la
simultanéité d’action et l’assistance réciproque, en constituent la perpétration même ; il suit
que les individus coupables de ces derniers actes sont bien moins des complices que des
coauteurs de l’infraction »116. La formule est bien explicite, en renvoyant avec précision à ce
qui est le propre d’une action partagée entre plusieurs auteurs. Elle tient à la simultanéité de
leur conduite respective, et à la réciprocité de leur soutien mutuel, assurant à l’infraction une
assise d’autant plus forte, qu’elle est le produit de convergences appuyées. Les coauteurs sont
des auteurs à égalité, qui participent personnellement, et avec la même intensité, à tout ce qui
constitue l’infraction, et partagent entre eux, sans différence aucune, le résultat de l’infraction.
Il y a presque toujours coaction en cas d’infraction commise par un auteur intellectuel,
puisque celui-ci a fait réaliser des actes délictueux par l’auteur matériel.
De ces observations, il ressort que les coauteurs se distinguent des complices, qui, au
contraire, sont en retrait par rapport à l’action principale, pour n’apporter qu’une aide ou une
assistance secondaire (section II). L’auteur de l’infraction est alors désigné comme l’auteur
principal. La distinction entre coauteur/complice est cependant, comme nous le verrons,
parfois mise à mal par la jurisprudence.
116
Crim. 17 déc. 1859, DP, 1860.I.196.
67
Section I : Le complice
Notre droit pénal distingue entre les participants directs à l’infraction (auteurs et
coauteurs) et les participants secondaires (les complices).
Nous venons de le voir, le coauteur est traité comme l’auteur car il réunit en sa personne tous
les éléments généraux et spéciaux de l’infraction. Qu’en est-il alors du coopérant qui sans
accomplir personnellement l’infraction, en favorise l’accomplissement par l’auteur ?
La réponse à cette question passe par l’examen des différentes conceptions possibles
de la complicité, puis, par rapport à elles, les choix opérés par le droit béninois en la matière.
La législation béninoise, s’inspirant de celle française, révèle en matière de complicité une
indiscutable originalité qui sera étudiée successivement à travers les conditions de la
complicité (§ 1) et la répression dont elle est assortie (§ 2).
Le fait principal punissable est une référence objective, pour renvoyer exclusivement à
ca qui est susceptible d’être sanctionné sur le plan pénal 118. Etant donné que l’acte du
complice emprunte la criminalité de l’auteur principal 119, il importe d’abord de procéder à la
qualification du fait (A), ensuite étudier le caractère punissable de ce fait (B).
68
L’article 59 du code pénal béninois évoque les notions « crime ou délit » ; on peut
alors s’interroger aussi sur le sort de la contravention.
2 – Le cas de la contravention
Compte tenu de l’article 59 du code pénal, la jurisprudence admet que la complicité de
contravention n’est pas punissable, sauf exception 120. Ces termes ont d’ailleurs été repris par
l’article 121-7 du nouveau code pénal français de telle sorte que le principe paraît a priori
toujours valable. Mais ce nouvel article a une originalité particulière ; il vise en effet
doublement le complice, et par référence à un « crime » ou à un « délit », lorsqu’il agit par
aide ou assistance, ou en facilite la préparation ou la consommation (al. 1er), et en rapport avec
une « infraction », lorsqu’il en provoque la réalisation ou donne des instructions pour la
commettre (al. 2).
120
Pour certaines contraventions, toutefois, la loi punit ceux qui aident ou assistent les auteurs de bruits ou
tapages injurieux ou nocturnes (art. 623-2 du code pénal).
Mais cet article 121-7 du code pénal français
69
De cette différence de rédaction entre les deux hypothèses, il ressort nettement que les
contraventions ne sont pas comprises dans la première, alors qu’elles le sont dans la seconde.
Il n’en résulte pas moins une extension sensible de son domaine.
Pour être punissable, la complicité doit réunir un élément moral, voire intentionnel (la
connaissance de cause), et un élément matériel (la participation à l’un quelconque des cas
légaux de complicité).
121
Toutefois, la provocation au suicide comme la propagande ou la publicité en faveur de méthodes préconisées
comme moyen de se donner la mort, est punissable en tant que délit distinct.
122
Jean-Claude SOYER, Droit pénal général et procédure pénale, op. cit., n° 158.
123
Crim. 1er déc. 1944, D.1945, 162.
70
Cette exigence pose la question de la correspondance entre l’intention du complice et
l’infraction accomplie par l’auteur, et celle de la complicité dans les infractions non
intentionnelles.
Il existe bel et bien une correspondance entre l’intention de l’auteur et celle du
complice lorsque, dans le cadre d’une entente, l’auteur avait projeté la commission d’une
infraction à laquelle le complice entendait s’associer et que c’est bien cette infraction qui en
définitive a été commise. Le problème apparaît lorsqu’il y a discordance entre l’infraction
accomplie par l’auteur et l’intention du complice.
Il y a lieu, dans ce cas, d’envisager trois situations différentes :
1) Il se peut d’abord que l’auteur commette une infraction complètement différente de
celle à laquelle le complice entendait s’associer : cas du braconnier qui se verrait
remettre un fusil de chasse pour braconner et qui s’en servirait pour tuer quelqu’un.
Dans ce cas, la jurisprudence décide que l’infraction commise étant différente de
l’infraction projetée le complice n’est pas punissable124.
2) Il se peut ensuite que l’auteur, à l’insu du complice, assortisse l’exécution de
l’infraction de circonstances aggravantes réelles : le complice entendait par exemple
s’associer à un vol simple que l’auteur effectue à main armée. O décide alors que le
complice supporte l’aggravation qui en résulte car « il devait prévoir toutes les
qualifications dont le fait était susceptible, toutes les circonstances dont il pouvait être
accompagnées »125.
3) Il se peut enfin que le complice se révèle prêt à s’associer à n’importe quelle infraction
commise par l’auteur ; il sera alors tenu responsable quelle que soit l’infraction
commise.
Par rapport à l’infraction d’imprudence (voir un peu plus haut), la réponse à la question de
savoir s’il est possible de se rendre complice d’un crime ou d’un délit est a priori négative
puisque l’imprudence exclue toute idée d’intention et donc d’entente que la complicité, elle,
implique. Ceci est parfaitement exact en matière d’imprudence inconsciente, mais il en va
différemment en cas d’imprudence consciente. La part de volonté délibérée que celle-ci
comporte permet alors à l’intention spécifique du complice de se développer. C’est dans ces
conditions que la jurisprudence a été conduite à admettre qu’il pouvait y avoir complicité
d’une infraction d’imprudence126.
124
Crim. 13 janv. 1955, D., 1955, 291, note A. CHAVANNE.
125
Crim. 19 juin 1984, B. n° 231.
126
Cf. notamment Chambéry 8 mars 1956, JCP 1956, 9224, note R. VOUIN.
71
B : l’élément matériel de complicité
A priori, par référence aux articles 60 et 61 du code pénal béninois, on peut énumérer
cinq cas légaux de complicité : la complicité par provocation, la complicité par instruction, la
complicité par fourniture de moyens, la complicité par aide ou assistance, le recel. Mais si
l’on retient que les actes de complicité doivent être des actes positifs, antérieurs ou
concomitants à l’infraction, on peut s’interroger sur le cas du recel (qui est postérieur à la
consommation de l’infraction).
Partant de ce constat, et en vertu de l’article 60 du code pénal béninois sous réserve de
l’article 61 sur le recel, les actes matériels de participation punissables au titre de complicité,
dans une vision suffisamment large, sont : la provocation, l’instruction, la fourniture de
moyens, l’aide ou l’assistance. Dans une version plus restreinte, on retient deux modes de
complicité : la complicité par instigation (1), et celle par collaboration (2). Ces deux modes
opératoires recouvrent tous les cas légaux de complicité, à l’exception du recel qui sera
abordé particulièrement (3).
127
Trib. corr. Grasse, 23 sept. 1964, JCP 1965.II.13964, note RIEG. Mais pour la définition, voir note suivante.
128
On assimile aux dons et promesses le pari et l’assurance par lesquels on garantit un individu contre les
conséquences de son infraction.
En ce qui concerne le "pari", il a été jugé que « celui qui, sous forme de pari, s’engage à donner à un autre une
somme d’argent pour le cas où ce dernier commettrait une action ayant le caractère d’un délit, doit être réputé
complice de ce délit, comme ayant provoqué par promesse à le commettre » (Crim. 28 nov. 1856, DP 1857.I.28).
Quant à l’assurance, l’article 53 de la loi du 28 avril 1816 sur les douanes fait une application de la règle selon
laquelle le fait d’assurer une personne contre les risques du délit dont elle peut se rendre coupable peut être punie
complice ; il y a alors, déclare la Cour de cassation, provocation par promesses (Crim. 23 oct. 1825).
129
Crim. 25 fév. 1942, D. 1942.1.91 ; crim. 24 juill. 1958, b. n° 573 ; crim. 29 mars 1971, B. n° 112.
72
Les instructions sont des indications précises de nature à faciliter la commission de
l’infraction, par exemple, le fait de donner des détails sur le mode de vie de la victime 130 ou
d’indiquer la manière de réaliser l’infraction131.
Ici, le fait du complice est nécessairement antérieur au fait principal punissable. On
peut citer : le recrutement d’un tueur à gages (exemple de provocation) ; la livraison du mode
d’emploi qui permet de pénétrer frauduleusement un système informatique (exemple
d’instruction).
On remarquera que si l’instigation n’est pas suivie de passage à l’acte, l’instigateur
échappe à la répression, par faute d’un fait principal punissable. Il ne s’agit alors que d’une
tentative de complicité, qui n’est pas punissable, il en est de même de la complicité au second
degré, ou complicité de complicité132, à l’inverse de la complicité de tentative, laquelle tombe,
comme nous l’avons déjà étudiée, sous le coup de la loi pénale.
130
Crim. 31 janv. 1974, JCP 1975, 17984, note A. MAYER-JACK, RSC 1975, 679, obs. J. LARGUIER.
131
Crim. 28 oct. 1965, JCP 1966, 14524.
132
Yves MAYAUD, op. cit., n° 358.
133
Crim. 13 juin 1811.
134
Crim. 18 nov. 1880, D., 83.I.139.
135
Roger MERLE et André VITU, op. cit., n° 551.
73
L’aide ou l’assistance constitue une forme de participation particulièrement large
susceptible même d’englober de nombreuses applications. C’est un acte antérieur ou
concomitant à l’action principale, ce qui exclut les faits produits postérieurement à la
perpétration de l’infraction136 (exemple, recel de malfaiteur, certains faux pour procurer
l’impunité à l’auteur d’un crime ; ces actes ne relèvent pas du domaine de la complicité sauf
s’ils résultent d’un accord antérieur).
La complicité par aide ou assistance est parfois difficile à distinguer de la coaction,
surtout quand elle est concomitante à l’infraction (le problème de la complicité et de la
coaction ne se pose pas en principe pour les complicités par instigation, différentes de la
collaboration, et normalement antérieures à l’infraction).
Exemple : guet durant un cambriolage, pour « couvrir » le cambrioleur.
En vertu du texte, celui qui fait le guet pendant qu’un autre est en train de commettre
le vol, ou celui qui joue de la musique pour qu’on n’entende pas les cris de la personne qu’on
assassine (affaire Fualdès)137 doit être considéré comme un complice par aide ou assistance.
Car s’il facilite l’exécution du vol ou de l’assassinat, il n’accomplit pas lui-même les actes
matériels rentrant dans la définition légale du vol ou de l’assassinat (voir respectivement
articles 379 pour le vol et 296, 297 et 298 pour l’assassinat).
Toutefois la jurisprudence, dans un souci de répression, a tendance à considérer
comme coauteurs, et non pas seulement comme complices, tous ceux qui coopèrent à la
perpétration de l’infraction, même s’ils n’ont pas participé directement à l’élément matériel
constitutif de cette infraction. Elle en a décidé pour celui qui fait le guet, pendant l’exécution
d’un vol138 ou qui par son attitude en facilite la commission139. Malgré les critiques de la
doctrine, la chambre criminelle n’a pas modifié sa jurisprudence, qui étend la qualité de
coauteurs à ceux qui n’ont fait qu’aider ou assister, s’ils étaient présents au moment de la
commission des faits140.
136
Crim. 6 août 1945, Gaz. Pal. , 1945.2.143.
137
Le 19 mars 1817 Antoine Bernardin Fualdès, ancien procureur impérial du département de l'Aveyron, sort de
chez lui à la nuit tombée. On retrouve son corps, flottant dans l'Aveyron, le lendemain matin. Le 18 août 1817, le
premier procès de l'affaire Fualdès débute à Rodez. Charles Bastide-Gramont, filleul de Fualdès, Joseph Jausion,
agent de change, ainsi que Jean-Baptiste Collard, habitants de la maison Bancal, sont condamnés à la prison.
Clarisse Manzon est accusée de complicité. Le jugement est annulé pour vice de forme. Le 25 mars 1818, le
deuxième procès de l'affaire Fualdès se tient à Albi. Clarisse Manzon est libérée. Bastide, Jausion et Collard sont
guillotinés. Le 21 décembre 1818, un troisième procès se tient à Albi. Plusieurs notables accusés de complicité
sont relaxés.
138
Crim. 19 nov. 1943, B. n° 129 ; crim. 25 janv. 1973, Gaz. Pal. 1973.I.94, note DOUCET.
139
Crim. 4 août 1927, S. 1929.I.33, note ROUX.
140
Cette jurisprudence a été quelque peu légalisée en France par la loi du 2 février 1981 modifiant l’article 382
du code pénal : « sera puni d’un emprisonnement d’un an à cinq ans et d’une amende de 5000 F à 200000 F le
coupable de vol commis "ou tenté" soit avec violence, soit à l’aide d’effraction extérieure ou intérieure, ou d’une
escalade, ou de fausses clefs ou de clefs volées, ou d’une entrée par ruse dans un local d’habitation ou un lieu
74
3 – Le cas du recel
L’article 61 du code pénal béninois, entretenant malencontreusement une
confusion ajoute aux cas précédemment énoncés, que « ceux qui connaissant la conduite
criminelle des malfaiteurs exerçant des brigandages ou des violences contre (…) les
personnes ou les propriétés, leur fournissent habituellement logement, lieu de retraite ou de
réunion, seront punis comme leurs complices ».
Cette conception du recel comme cas de complicité au Bénin est un héritage du passé
pénal français. Le législateur français réprime en règle générale le recel comme une infraction
autonome, puni de peines spéciales. Mais il n’en a pas toujours été ainsi : le recel de choses,
de 1810 à 1915, était un cas de complicité. Une loi du 22 mai 1915 l’a érigé en délit distinct
pour éviter certains inconvénients141. Par conséquent, le recel, même dans le droit positif
béninois, doit être considéré comme un délit distinct et non comme un cinquième cas légal de
complicité.
Le receleur joue dans l’infraction un rôle particulier. Le receleur, c’est la personne qui
se borne à accepter, après coup, de cacher ou de dissimuler soit les protagonistes de
l’infraction pour les soustraire aux recherches de la justice (recel de malfaiteurs), soit les
produits de l’infraction (recel de choses), soit même les traces les plus compromettantes de
l’infraction (recel de cadavre)142.
La complicité suppose en principe des faits antérieurs ou concomitants à l’infraction. Il
n’y a pas en principe de complicité pour des faits postérieurs à l’infraction 143. Il serait
d’ailleurs illogique de voir des complices dans ceux qui n’ont en rien facilité la commission
de l’acte délictueux et qui n’ont agi qu’après que celui-ci a été consommé ; exemples
jurisprudentiels : prêt d’une balance pour le partage du butin, aide à évader après évasion.
Mais cela ne veut pas dire que tous les actes postérieurs échappent à la répression à titre de
complicité. La jurisprudence elle-même considère parfois comme un acte de complicité
punissable, bien qu’il soit postérieur à l’infraction, un acte en liaison directe et préméditée
avec celui-ci. Il y a donc complicité en cas d’accord antérieur ou concomitant ; exemple,
voiture prévue pour faciliter la fuite 144. La preuve de l’intention peut se déduire d’un
comportement ultérieur.
75
§ 2 : La répression de la complicité
La question qui se pose est de savoir si la répression de l’acte de complicité doit être
solidaire de la répression légale de l’acte de l’auteur ? Autrement dit, la responsabilité pénale
du complice sera-t-elle étroitement commandée, au plan de l’incrimination et de la sanction
légalement applicable, par l’acte accompli par l’auteur ?
Il résulte de l’article 59 du code pénal béninois que « les complices d’un crime ou d’un
délit seront punis de la peine que les auteurs mêmes de ce crime ou de ce délit, sauf les cas où
la loi en aurait disposé autrement ». A l’emprunt de la criminalité s’ajoute donc un emprunt de
la pénalité. Certes, cela ne veut pas dire qu’il y a une identité des peines effectivement
prononcées, mais que les peines encourues sont les mêmes, par référence à ce que la loi
réserve à l’auteur principal.
L’examen de la portée de cette règle (I), permettra d’apprécier son influence sur la
condition du complice (II).
145
C’est la formulation retenue par le code pénal français (art. 121-6). Il a été estimé que l’emprunt de pénalité
pourrait soulever des difficultés s’il advenait qu’une personne physique et qu’une personne morale puisse se
retrouver auteur et complice d’une même infraction, les peines n’étant plus les mêmes pour les deux catégories
de personnes.
76
L’infraction peut s’accompagner de circonstances aggravantes et d’excuses. Lorsque
l’auteur principal d’une infraction encourt des causes d’aggravation ou bénéficie des causes
d’atténuation, se répercutent-elles sur le complice ?
Pour répondre à cette question, il faut envisager trois hypothèses, suivant que les
circonstances aggravantes ont un caractère réel (A), personnel (B) ou mixte (C).
146
Crim. 23 mai 1879, S.1881.I.41.
147
Crim. 31 déc. 1947, RSC 1948, somm. 105.
148
Malgré le caractère personnel de l’immunité, la jurisprudence, contre l’avis unanime de la doctrine, décide
que le complice n’est pas punissable lorsque l’auteur principal bénéficie de l’immunité de l’article 380 du code
pénal (Crim. 1er avr. 1825, B. n° 73 ; 8 janv. 1921, D.1921.I.169. En revanche, le complice redevient punissable
lorsqu’il est associé à la perpétration du vol commis conjointement par un parent et un coauteur étranger (Ch.
réun. (Interprétation de la loi), 25 mars 1845.D.1845.I.290. Req. DUPIN).
149
Pas davantage, le complice ne peut bénéficier de l’amnistie personnelle accordée à l’auteur principal.
77
Ce sont celles qui concernent à la fois la personne et l’acte, parce qu’elles prennent
leur source dans une qualité de l’agent, mais se répercutent sur l’infraction. On admet que,
puisqu’elles changent la gravité objective de l’infraction, leur caractère réel l’emporte sur leur
caractère personnel ; en conséquence, si elles se rencontrent en la personne de l’auteur
principal, elles nuisent ou profitent au complice, qu’il les ait connues ou non.
Il en est ainsi de la circonstance aggravante de domesticité dans le vol (art. 386 code
pénal)150, de la circonstance aggravante de descendant de la victime (art. 299 code pénal)151,
de la circonstance aggravante de préméditation (article 296 code pénal)152.
Il en résulte que si un fils s’associe au meurtre commis par un tiers sur la personne de
son père, la peine infligée à l’un et à l’autre sera celle du meurtre ordinaire 153 et que, si un
domestique se rend complice d’un vol commis au préjudice de son maître par un tiers,
domestique et tiers ne seront punis que des peines du vol ordinaire, et non pas de celles du vol
domestique154.
Mais si le fils ou le domestique, au lieu de s’en tenir au rôle de complice, devenait
coauteur, il acquerrait alors une criminalité propre, et encourrait respectivement les peines de
parricide et du vol domestique. Et même, ces peines s’étendraient aux autres coauteurs : les
coauteurs sont complices les uns des autres155.
Mais cette règle, bien qu’elle soit imposée par les nécessités pratiques, n’est
évidemment qu’une fiction juridique : elle évite que le coauteur, généralement plus coupable
que le simple complice, soit traité plus favorablement156.
Dans le système béninois de l’emprunt absolu de la criminalité, la distinction entre
coauteurs et complices ne présentent que quelques intérêts pratiques.
En effet, la qualification légale de l’infraction peut changer suivant que les co-
délinquants sont des coauteurs ou complices, car c’est en considération des coauteurs et non
des complices, que s’apprécient les éléments constitutifs et les circonstances aggravantes de
l’infraction. Ainsi, l’homicide est qualifié de parricide si le fils de la victime est coauteur,
autrement il n’est qu’un simple meurtre si ce fils était complice ; un vol commis par des
150
Crim. 16 juill. 1903, S.1907.251.
151
Crim. 16 juill. 1842, B. n° 184.
152
Crim. 8 juin 1843, S.1843.I.558. La préméditation transforme le meurtre en un assassinat.
153
Cf., au sujet d’une mère complice par aide ou assistance du viol commis sur la personne de sa fille : crim. 2
oct. 1856, S.1857.I.79 ; la mère coupable ne subit pas l’effet de la circonstance aggravante résultant de l’article
333 du code pénal.
154
Crim. 17 sept. 1847, B. n° 227.
155
Crim. 9 juin 1848, S.1848.I.527 ; 15 juin 1860, S.1861.I.398 : « Attendu, dit la cour, que le coauteur d’un
crime aide nécessairement l’autre coupable dans les faits qui consomment l’action, et devient, par la force des
choses, légalement son complice ».
156
Crim. 23 mars 1953, JCP 1953.IV.73 et 14 déc. 1955, JCP 1956.IV.10.
78
coauteurs n’est pas un vol simple, mais un vol commis en réunion (ou en association), c’est-à-
dire un vol aggravé, qui, s’il s’y ajoute d’autres circonstances aggravantes, constitue un crime
(art. 381 code pénal), alors qu’un vol commis par un seul auteur et des complices demeure un
vol simple (art. 379 code pénal).
En résumé, les circonstances aggravantes et les excuses légales ne se communiquent
pas toutes indistinctement des coauteurs aux complices.
157
Roger MERLE et A. VITU, op. cit., n° 431.
158
Bernard BOULOC, op. cit., n° 377.
79
Section I : Les faits justificatifs reconnus par la loi
C’est de manière sélective que certaines causes seront déclinées. En effet, l’abrogation
de la loi pénale, l’amnistie et la prescription de l’action publique relèvent de dispositions trop
ponctuelles et diversifiées pour en faire état ici. Seuls les faits justificatifs généraux,
précisément par leur vocation à la généralité, rentrent donc dans cette partie. On les retrouve
aux articles 327, 328 et 329 du code pénal. Le premier (327) est relatif à l’ordre de la loi et le
commandement de l’autorité légitime, et les deux derniers (328 et 329) évoquent la légitime
défense.
80
d’instruction béninois qui met un individu en détention préventive dans les conditions prévues
par la loi.
C’est également le cas également le cas du médecin, qui suivant les obligations
instituées par certains décrets, déclare une maladie contagieuse dont la déclaration obligatoire,
est justifiée, quant à la violation du secret professionnel, bien qu’il agisse sans l’ordre d’une
autorité légitime. C’est ce qui ressort de l’article 378 du code pénal (art. 226-14 code pénal
français) qui réprime la divulgation du secret professionnel «hors le cas où la loi » oblige ou
autorise les dépositaires du secret « à se porter dénonciateur ».
Dans ce cas, la loi d’incrimination violée par le justiciable contient elle-même la
réponse et réserve l’application de textes particuliers.
Il ne faut aussi voir à côté de l’ordre de la loi, la permission de la loi
160
Crim. 2 déc. 1908, S.1910.I.160.
161
Crim. 30 mai 1990, B. n° 232 (opération faite sans intérêt thérapeutique : responsabilité du chirurgien).
81
En revanche, on refuse à admettre qu’une infraction puisse être justifiée sur le
fondement de l’autorisation ou de la tolérance de l’administration162. De manière générale,
l’autorisation, et à plus forte raison la tolérance de l’administration ne peuvent être assimilées
à l’ordre de la loi163.
82
manifeste de l’ordre empêcherait d’invoquer le fait justificatif ; l’illégalité non manifeste
serait une cause de justification.
Par rapport à ces trois théories de la doctrine, le droit positif béninois (le code pénal)
n’a donné au problème que quelques réponses parcellaires et particulières. Ainsi dans les
articles 114164 et 190165 du code pénal décident-ils que celui qui a commis des infractions
indiquées conformément au commandement de l’autorité légitime mais conformément à la loi
bénéficierait d’une exemption de la peine.
83
non-imputabilité, mais un véritable fait justificatif fondé sur l’intérêt social. La personne qui a
agi en état de légitime défense, doit être considérée comme ayant exercé un droit. La défense
individuelle, en principe prohibée, devient légitime en cas d’agression injuste, par suite de la
défaillance de l’intervention sociale. Dans le conflit entre les intérêts de l’agresseur et ceux de
la victime, la vie et l’intégrité corporelle de l’agresseur apparaissent des intérêts moins
respectables que la vie et l’intégrité corporelle de la personne attaquée167. L’auteur du fait
incriminé se fait « police à soi-même »168, comblant ainsi les carences de la société. La
légitime défense relève donc davantage de la police privée que de la justice privée169.
Le code pénal béninois reconnaît la légitime défense comme « un droit exceptionnel
qui n’existe pas avec n’importe quelle agression »170 et en a fait un fait justificatif (en ses
articles 328 et 329).
Ces articles distinguent deux catégories de légitime défense : les cas de légitime
défense proprement dite (I) et les cas « privilégiés »171, dans lesquels les conditions
d’application de la légitime défense ne sont pas exigées (II).
84
pénal, qui concerne spécialement les atteintes aux biens. Et du moment qu’elle se justifie
généralement par l’exercice d’un droit, et même d’un devoir de participation à la défense de
l’ordre social troublé par l’agression, elle doit être étendue à toutes les agressions, quel qu’en
soit leur objet.
Aussi la jurisprudence elle-même n’hésitait pas, comme on le verra, n’hésitait pas à
étendre la légitime défense au cas d’attaque des biens.
Il reste que, l’attaque, pour qu’existe la légitime défense, doit être à la fois certaine et injuste.
1 – La certitude de l’agression
L’attaque et le danger doivent être actuels. L’article 328 exige « la nécessité actuelle ».
Ce texte postule le caractère immédiat, ou tout au moins l’imminence, de l’agression. Il faut
avant tout que le danger menaçant le prévenu ait été objectivement indéniable 173. Cette
première condition d’existence de l’état de légitime défense s’impose avec clarté, car seule
une attaque immédiate met la personne visée dans l’impossibilité de se placer sous la
protection des lois ou des autorités publiques. L’agression doit donc être, sinon déjà actuelle,
du moins imminente, en sorte que la riposte est commandé par la nécessité. Il n’y a donc pas
de place pour la légitime défense si celui qui l’invoque réagit après une agression déjà
consommée.
Inversement, la défense ne peut davantage être légitimée si elle anticipe une agression
future. Néanmoins si une personne se sent menacée, il ne lui est pas interdit de prendre des
précautions ; pourvu que celles-ci restent dans la légalité : il est possible de prévenir la police
pour conjurer le péril, on ne saurait arguer de la légitime défense et se faire justice à soi-
même.
2 – L’injustice de l’agression
L’acte de défense ne saurait être justifié que s’il intervient en réponse à un acte injuste
ou injustifié. L’attaque juste exclut la légitime défense ; il est donc inconcevable que le voleur
qui se défend contre un policier procédant à son arrestation, puisse invoquer une quelconque
justification pour les violences qu’il a commises. Il en irait de même de l’individu arrêté par
un simple particulier en application des dispositions du code de procédure pénale (art. 62) qui
autorise quiconque à appréhender l’auteur d’une infraction flagrante. Il ne saurait donc y avoir
légitime défense contre celui qui ne fait qu’exercer un droit.
173
Jean PRADEL, op. cit., n° 326.
85
Que dire au cas où l’agent de l’autorité a agi illégalement ?
Selon la jurisprudence, il n’y a jamais légitime défense contre un acte de l’autorité,
même si cet acte est illégal174.
La doctrine, ne partageant pas cet avis, est en général plus sévère à l’égard de cette
jurisprudence. Elle a proposé des assouplissements qui n’ont toutefois pas prévalu. A cet
effet, trois systèmes ont été proposés175 :
Le premier, qui accorde au citoyen un droit de résistance absolu est inapplicable en
pratique. Le second autorise la résistance même violente lorsque l’illégalité est manifeste, par
exemple au cas où un huissier opère la nuit une saisie. Devant la fragilité du critère de
l’illégalité manifeste, une doctrine a imaginé un troisième système fondé sur la nature du bien
menacé par l’attitude illégale de l’agent ; si l’agression est dirigée contre les biens (saisie
irrégulière), la rébellion n’est pas justifiée, si elle est dirigée contre la personne (« passage à
tabac »), elle l’est.
Cette solution, selon Jean PRADEL, semble être la meilleure, même si son application
n’est pas toujours aisée176.
Aussi doit-on admettre que l’agression reste injuste si elle provient d’une personne
pénalement irresponsable (fou, enfant) ; car la cause d’irresponsabilité n’efface pas le
caractère délictueux de l’acte. Est donc légitime la riposte à l’acte injuste d’un dément ou
d’un enfant177.
Enfin convient-il de préciser qu’il ne saurait y avoir légitime défense pour l’agressé si
l’agresseur est lui-même en état de légitime défense pour avoir été d’abord attaqué (car sa
propre agression est alors elle-même justifiée) : pas de légitime défense contre la légitime
défense. Il y aura cependant légitime défense pour l’agresseur X si Y, attaqué par X d’une
manière légère, riposte d’une manière excessive.
174
Crim., 5 janv. 1821, chron. 358 ; justifier la rébellion « serait subversif de tout ordre public » ; 27 août 1908,
D.1909.I.79.
175
Jean PRADEL, op. cit., n° 327 et s.
176
Ibidem.
177
Crim., 11 janv. 1896, D.1896.I.368.
86
Si l’on procédait à une interprétation littérale de l’article 328 du code pénal, on déciderait
d’une part, que la légitime défense ne justifie que l’homicide, les blessures et les coups, et,
d’autre part qu’elle les justifie dans tous les cas. Ce serait une double erreur.
Il est certain que la légitime défense qui justifie des actes aussi graves que l’homicide,
les blessures et les coups, justifie également d’autres actes moins graves, lorsqu’ils sont
nécessaires et suffisants pour maîtriser l’agresseur.
Ainsi, une personne en état de légitime défense pourra, au lieu de tuer ou de blesser
(faits uniquement prévus par l’article 328 du code pénal), s’emparer du revolver ou du
couteau dont elle est menacée sans commettre de vol, ou encore enfermer son agresseur sans
commettre une séquestration arbitraire178.
Cependant, la légitime défense ne peut justifier que des actes volontaires et non des
actes involontaires comme des infractions d’imprudence : la légitime défense est incompatible
avec le caractère involontaire de l’infraction179.
Pour justifier la légitime défense, l’acte de défense doit être nécessaire et
proportionnel. La défense est considérée comme nécessaire, lorsque l’acte accompli
constituait le seul moyen de se défendre. Outre son caractère nécessaire, tout le monde
s’accorde à dire que la défense doit être proportionnée à l’attaque et qu’il faut éviter tout
excès, notamment dans la légitime défense des biens. Des actes de défense excessifs ne
seraient pas justifiés.
L’appréciation de la proportionnalité est une question de fait, tranchée par le juge en
considération du péril qui pouvait être redouté. Par exemple, celui qui tue une personne qui l’a
giflé, ne peut en aucun cas évoquer la légitime défense ; il y a là disproportion.
Mais la défense mesurée ne signifie pas que le mal causé par celui qui s’est défendu ne
puisse jamais être plus grave que le mal qui serait résulté de l’agression ; par exemple, la
femme qui tue l’homme qui tente de la violer, est sans aucun doute en état de légitime
défense. Il appartient aux juges de fond d’apprécier souverainement si la proportionnalité a
été respectée.
178
Crim. 20 nov. 1956, B n° 761, a jugé que la légitime défense s’applique non seulement aux crimes et délits
mais aussi à la contravention des violences légères.
179
Crim. 16 fév. 1967 (Couzinet), JCP 1967.II.15034, note R. COMBALDIEU.
87
1° Si l’homicide a été commis, si les blessures ont été faites, ou si les coups ont été portés en
repoussant pendant la nuit l’escalade ou l’effraction des clôtures, murs ou entrée d’une
maison ou d’un appartement habité ou de leurs dépendances ;
2° Si le fait a eu lieu en se défendant contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec
violence ».
On considère alors que l’article 329 du code pénal institue deux cas privilégiés de
légitime défense. On étudiera successivement les conditions d’application de ce texte, ainsi
que sa portée.
B : La portée
L’article 329 soulève une question très importante et délicate. Qu’ajoute-t-il à la règle
générale posée par l’article 328 ?
On admet de façon générale que le code pénal de 1810 ne répondait pas à la question
de savoir si une infraction était justifiée pour assurer la sauvegarde d’un bien : en effet,
l’article 328 du code pénal, ne faisait pas la moindre allusion à ce problème et, suivant
l’interprétation dominante, l’article 329 ne traitait que des présomptions de légitime défense,
non de la légitime défense des biens.
Il a créé des présomptions de légitime défense. En règle générale celui qui se prévaut
de ce texte doit prouver devant les juridictions que les conditions de la légitime défense
étaient réunies. Il suffit de prouver qu’il était en fait dans l’un des deux cas visés par l’article
329, ce qui est naturellement plus facile.
88
L’admission de ce point a fait réfléchir plus d’un. On s’est alors demandé si les
présomptions de légitime défense devraient être considérées comme des présomptions
simples, susceptibles de preuve contraire, ou comme des présomptions absolues, irréfragables.
Le problème a soulevé de vives discussions. La doctrine, après avoir hésité, s’était prononcée
à peu près unanimement pour le caractère de présomption simple. D’éminents auteurs
(DONNEDIEU de VABRES, VIDAL et MAGNOL) déclarent qu’admettre le caractère
irréfragable serait faire découler de l’article 329 un brevet légal d’impunité, constituant un
défi à la justice et au bon sens.
La jurisprudence a aussi longtemps hésité. On rappelle toujours deux affaires célèbres
du XIXe siècle dans lesquelles la question s’était posée : la première, celle de madame de
JEUFOSSE, qui fit tuer par son garde CREPEL un de ses voisins qui venait, la nuit, après
avoir escaladé la clôture de son parc, déposer un billet doux sur la fenêtre de sa fille ; la
deuxième, celle de POCHON, qui fit tuer, par son fils, dans des circonstances analogues,
l’amoureux de sa fille. Madame JEUFOSSE et son garde180, POCHON père et fils181 ont été
acquittés. Ces acquittements prononcés par le jury de jugement ne prouvent pas que la
présomption de l’article 329 soit irréfragable ; en effet, le jury se laissait guider uniquement
par des considérations de fait. Au contraire, les chambres de mises en accusation ayant
prononcé le renvoi en cour d’assises ont admis implicitement que la présomption de l’article
329 était une présomption simple, souffrant de preuve contraire.
Mais un arrêt remarqué avait été rendu, en 1902, d’où l’on a déduit l’admission de
cette forme de légitime défense182. En réalité, cet arrêt n’émane que de la chambre des
requêtes et ne traite que du recours civil intenté par le maraudeur qui, venu dérober du poisson
dans un étang du sieur de FAVILLE, avait perdu une jambe par l’effet des détonateurs placés
par ce dernier dont l’étang avait été déjà visité ; et l’arrêt a décidé que le sieur de FAVILLE
n’encourait aucune responsabilité.
Finalement, dans un arrêt du 19 février 1959 la chambre criminelle a déclaré de
manière catégorique que la présomption était simple.183
Par la suite, diverses décisions ont été produites par les juridictions de fond. Et, sauf
une184 toutes les décisions sont de condamnation. Tantôt, les juges retenaient une imprudence
180
Cour d’assises de l’Eure, 18 déc. 1957, Le Droit, 19 déc. 1857.
181
Cour d’assises de la Moselle, 27 fév. 1858, Le droit, 3 mars 1858.
182
Req., 25 mars 1902, S.1903.I.5, note LYON-CAEN, D.1902.I.356.
183
D. 1959.162, note favorable M.R.M.P. et JCP, 1959.II.1112, note critique P. BOUZAT et obs. LEGAL, in
RSC 1959, p. 839.
184
Paris, 9 oct. 1978, JCP, 1979.II.19232, note P. BOUZAT, relaxe d’un policier ayant blessé par balle, au cours
d’une poursuite, le voleur qui avait pris la fuite.
89
à la charge du volé et le condamnaient pour homicide ou blessures involontaires 185. Tantôt, les
juges retenaient les coups mortels ou les violences 186. On ajoutera deux arrêts de la chambre
criminelle, le premier retenant la qualification d’homicide involontaire 187, et le second celle de
coups mortels188 ; les deux espèces étaient, il est vrai, un peu différentes.
Ceci a conduit le nouveau code pénal français de 1994 à consacrer la légitime défense
des biens.
90
la légitime défense, un mal est infligé à un agresseur coupable, alors que l’état de nécessité
atteint une personne complètement innocente.
L’impunité de l’infraction nécessaire est rationnellement indiscutable. Avant de voir
ses effets (II), certaines conditions sont requises pour se prévaloir de l’état de nécessité (I).
189
Trib. corr. Nantes, 12 nov. 1956, D.1957.30.
190
V. crim.20 juin 1896, S.1897.I.105, note LACOINTA.
91
Enfin, et c’est la dernière condition, l’état de nécessité ne doit pas être dû à une faute
antérieure de l’agent. En ce sens, l’agent pourrait bénéficier de circonstances atténuantes.
Cette condition admise par la jurisprudence 191 a été critiquée, voire contestée, par la
doctrine192 : la cour d’appel de Renne avait condamné pour délit de dégradation de barrière,
sans admettre la justification par l’état de nécessité, dans un cas où le conducteur avait
défoncé la barrière d’un passage à niveau (après s’être engagé malgré l’avertissement du
garde-barrière) pour éviter le train qui arrivait. Pour la doctrine, l’état de nécessité s’apprécie
au moment où il se manifeste et non pas d’après la conduite antérieure de l’auteur.
L’état de nécessité, lorsqu’il est accordé produit des effets.
II - Les effets
Lorsqu’il est admis, l’état de nécessité supprime l’infraction pénale. Il n’y a donc pas
de responsabilité pénale, mais peut-être la responsabilité civile 193, fondée sur une notion autre
que la faute. C’est là que se trouve la différence fondamentale entre la légitime défense et
l’état de nécessité.
Celui qui invoque la légitime défense est en général une victime non fautive, tandis
que celui qui invoque l’état de nécessité est un agresseur. La victime de l’acte nécessaire, à la
différence de la victime en état de légitime défense, n’a aucune part de responsabilité dans les
circonstances qui ont amené la commission de l’infraction.
I – Les conditions
191
Crim. 25 juin 1958, D.1958.633 note M.R.M.P. et JCP 1959.II.10941, note LARGUIER.
192
V. note P. BOUZAT sous C. Rennes, 12 avr. 1954, S.1954.II.185.
193
En ce sens : crim. 27 déc. 1884, D.1885.I.219.
92
Si le consentement de la victime laisse, en général, subsister la responsabilité pénale, il
existe un certain nombre d’infractions qui sont effacées par ce consentement. Il en est ainsi
des infractions contre la propriété (on ne vole pas une chose dont le propriétaire donne lui-
même la permission de prendre ; des infractions contre la liberté (il ne saurait y avoir
séquestration arbitraire si la prétendue victime a consenti à son incarcération) ; de certaines
infractions contre les mœurs (on ne viole pas une femme qui se prête d’elle-même aux
relations sexuelles).
Bien que la loi pénale soit d’ordre public, le consentement donné en connaissance de
cause par la victime peut faire disparaître l’un des éléments constitutifs de l’infraction. Il faut
que ce consentement soit antérieur, ou tout au moins concomitant à l’infraction, qu’il soit
sincère et libre, enfin qu’il émane d’une personne raisonnable.
II – Les controverses
On tente d’expliquer certaines impunités traditionnelles d’auteurs de coups et
blessures, parfois de meurtre, en faisant appel au consentement de la victime : « Violenti non
fit injuria »194. C’est par exemple le cas pour le chirurgien ou le sportif poursuivi à la suite du
décès ou de lésions corporelles subies par l’opéré ou l’adversaire.
Or, ce n’est pas le consentement du malade qui justifie l’atteinte médicale ou
chirurgicale à l’intégrité corporelle : c’est l’autorisation de la loi ou de la coutume (comme
nous l’avons vue) qui fonde la justification. La loi, par autorisation ou une permission
spéciale se trouvant dans les règles d’organisation de la profession médicale et se fondant sur
les études et les titres permettant d’exercer cette profession, considère que les médecins et les
chirurgiens bénéficient du fait justificatif de l’ordre de la loi de l’article 327 du code pénal
pour les blessures ou homicides susceptibles de résulter des traitements médicaux ou des
opérations chirurgicales. Encore faut-il que ces professionnels aient agi selon les règles de
leur art, sinon ils encourent une responsabilité pénale par imprudence ou négligence :
l’impunité cessera en cas de faute grave dans l’exercice de la profession195. Cela implique
aussi que la justification soit exclue en dépit du consentement de la victime toutes les fois
qu’un médecin ou un chirurgien n’agit pas en vue de le soigner, mais en vue d’expériences
sans but curatif196. Cependant, après une période de répression systématique, la jurisprudence
s’est assouplie en matière d’intervention de chirurgie esthétique : sans doute n’y a-t-il pas en
principe de but thérapeutique à ces interventions, mais, si une telle opération n’est génératrice
194
« On ne cause pas de tort à celui qui consent » ; in Digeste, livre 47, titre X, De injuria, loi I, § 5.
195
Crim. 12 juill. 1961, D.1962. Somm. 23.
196
Cour d’Aix, 22 oct. 1906, D.1907.II.41, note MERIGNHAC.
93
d’aucun danger ou dommage disproportionné par rapport au but à atteindre, rien ne s’oppose à
la justification du chirurgien197.
Dans la pratique de sports violents, ce n’est pas non plus le consentement de la victime
à la participation au jeu qui présente une valeur justificative assurant l’impunité à l’auteur des
coups. C’est dans la permission de la loi qui a autorisé la pratique de ces sports que se trouve
le fondement de cette impunité. Encore faut-il que les règles du jeu aient été respectées, qu’il
n’y ait eu aucune imprudence ou négligence ou aucun usage abusif de la force ou de la
violence198.
Enfin, dans le cas de la stérilisation, le consentement de la victime est sans valeur : un
individu avait pratiqué l’opération de la vasectomie sur des néo-malthusiens qui lui avaient
demandé de les priver de la faculté de procréer. Il fut condamné, pour coups et blessures
volontaires, par la Cour de Bordeaux et la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre
l’arrêt199. Il s’était retranché derrière le consentement de la victime. Mais l’intérêt de l’Etat et
de l’ordre public interdisent à un individu de disposer de sa faculté de procréer, même s’il ne
lui plaît pas de la posséder.
197
Cf. notamment Poitiers 19 nov. 1953, D.1954.150, note R. VOUIN ; Paris 13 janv. 1959, D.1959.26.
198
Crim. 24 janv. 1956, D.1956.197.
199
Crim. 1er juill. 1937, S.1938.I.193, note René TORTAT.
94
Deuxième partie : La sanction pénale : étude spécifique de
la peine
Quand on parle de sanction, l’opinion publique ne voit que l’aspect répressif : la
punition du coupable. Habituellement, il s’agit d’une peine.
Outre la peine, il existe des mesures de sûreté. Par rapport aux peines, les mesures de
sûreté sont de création relativement récente ; elles datent de la fin du XIXe siècle. Les
mesures de sûreté sont de simples précautions de protection sociale destinées à prévenir la
récidive d’un délinquant ou à neutraliser l’état dangereux.
Le droit criminel béninois utilise largement à l’heure actuelle, la peine ; nous
limiterons donc l’étude sur la peine, en étudiant successivement :
95
Titre I : nomenclature et classification des peines
Pour punir l’auteur d’une infraction, la loi prévoit soit une peine soit une mesure de
sûreté, tantôt à la fois l’une et l’autre.
Quoiqu’il en soit, pour la commodité de l’étude, les différentes peines du droit pénal
béninois vont être passées en revue, en faisant apparaître les diverses classifications utiles à
leur mise en œuvre.
96
Chapitre 1 : La hiérarchie des peines
En tenant compte de leur caractère juridique, les peines se prêtent à deux
classifications différentes susceptibles d’être combinées : une, sous-entendue dans le code
pénal (§ 1), et une autre, résultant directement de la loi (§ 2).
97
Les peines accessoires, au contraire, sont, comme leur nom l’indique, l’accessoire
d’une autre peine qui joue à leur égard le rôle de peine principale. Elles sont la conséquence
légale, automatique et implicite du prononcé de certaines peines principales, car elles
s’exécutent sans que le juge ait besoin de le décider. Elle est prévue par des textes rédigés à la
manière de l’article 1er de la loi du 30 août 1947 : « Nul ne pourra… entreprendre une
profession commerciale ou industrielle s’il a fait l’objet d’une condamnation définitive à une
peine criminelle ». On peut aussi citer parmi les peines accessoires l’impossibilité d’acquérir
la nationalité béninoise établie contre les étrangers condamnés à une peine supérieure à un
délai déterminé, et non assortie d’une mesure de sursis.
Les peines complémentaires, tout comme les peines accessoires, font suite à une peine
principale, mais à la différence des peines accessoires, elles doivent être prononcées
expressément par les juges. Elles ne revêtent le caractère pénal que si, dans le texte de
pénalité, elles sont associées à une peine principale, et c’est ce qui explique leur nom. Il arrive
donc que certaines sanctions soient pénales ou non, selon qu’elles sont ou non ajoutées à une
peine principale. C’est le cas de l’institution dénommée « faillite personnelle » qui consiste en
la déchéance du droit d’exercer le commerce et en la privation de certains droits de
citoyenneté.
98
Chapitre II : Le contenu des peines
Le nombre des peines a varié au cours des temps. Contrairement à la France, le droit
pénal béninois distingue deux sortes de peines : les peines corporelles (section 1) et les peines
non corporelles (section 2).
Les peines privatives de liberté représentent, contre la criminalité, une arme très
fréquemment utilisée, que ce soit la réclusion ou la détention criminelle, que ce soit
200
Sur ces précisions, v. P. BOUZAT et J. PINATEL, op. cit., n° 369.
99
l’emprisonnement correctionnel201. Elles consistent en l’incarcération du condamné pour une
durée déterminée ou illimitée et sous un régime particulier. Il est important de noter que la
privation de liberté n’est pas exclusivement une sanction pénale. La garde à vue, à la suite
d’une interpellation, ou la détention provisoire et avant jugement, ne sont pas des peines mais
intéressent la procédure pénale.
Le code pénal a institué : les travaux forcés et la réclusion et la détention pour les
crimes, l’emprisonnement correctionnel pour les délits, l’emprisonnement de police pour les
contraventions de police.
L’amende consiste dans le payement forcé, à titre de châtiment, d’une certaine somme
d’argent au Trésor public. C’est d’ailleurs la plus importante des peines pécuniaires.
201
Jean-Claude SOYER, Droit pénal et procédure pénale, op. cit., n° 336.
100
Titre II : Le sort de la peine
Il est généralement admis que certains faits, concomitants ou postérieurs à la décision
de condamnation peuvent modifier les effets. Les uns ont un résultat certain et immédiat : ils
produisent une suspension de l’exécution de la peine (chapitre 1) ; d’autres mettent fin avec
ou sans effacement de la condamnation : ils éteignent la peine (chapitre 2).
101
Chapitre I : La suspension de la peine
Les mesures de suspension des peines ne sont pas un droit pour le condamné, mais
plutôt une faveur. Notre droit connaît deux causes de suspension : Le sursis (section I) et la
libération conditionnelle (section II).
102
pour but principal d’éviter le séjour de la prison au condamné ; elle se comprend beaucoup
moins pour l’amende.
Le sursis ne peut être accordé qu’à une certaine catégorie de délinquants : les
délinquants primaires, par opposition aux récidivistes.
De l’esprit de l’article 585 du code de procédure pénale, il faut comprendre par
délinquant primaire : « le condamné [qui] n’a pas fait de condamnation antérieure pour crime
ou délit de droit commun ».
202
Bernard BOULOC, op. cit., n° 762.
103
§ 1 : Les conditions d’octroi de la libération conditionnelle
La libération conditionnelle s’applique à toutes les peines privatives de liberté,
perpétuelles ou temporaires.
Au Bénin, le droit d’accorder la libération conditionnelle appartient au ministre de la
Justice, sur avis de la Commission de surveillance. Le dossier de proposition comporte les
avis du chef de l’établissement dans lequel l’intéressé est détenu et du ministère public près la
juridiction qui a prononcé la condamnation (art. 581 CPP).
Deux critères paraissent nécessaires pour octroyer la libération conditionnelle : le délai
(A), la bonne conduite et le gage sérieux de réadaptation sociale du délinquant (B).
I – Le délai
Il paraît rationnel que la libération conditionnelle puisse être accordée dès le moment
où elle se révèlerait le plus utile, aussi bien pour la société que pour le délinquant. C’est vrai
que l’opinion publique africaine, favorable sur le caractère rétributif de la peine, n’est pas
encore prête à accepter une libération très précoce.
Au Bénin, la libération conditionnelle est réservée aux condamnés ayant accompli
trois mois de leur peine, si cette peine est inférieure à six mois, et à la moitié de la peine dans
les autres cas. Pour les condamnés en état de récidive légale, le temps d’épreuve est porté à
six mois si la peine est inférieure à neuf mois et aux deux tiers de la peine dans le cas
contraire ; pour les condamnés à une peine perpétuelle, le temps d’épreuve est de quinze ans
(art. 580, al. 2 et 3 CPP).
104
§ 2 : Les effets de la libération conditionnelle
Libération ne signifie pas liberté complète, puisque le libéré peut se voir imposer
certaines mesures et obligations, dont le respect conditionne son sort définitif. En outre, cette
faveur n’entraîne pas la dispense de la peine, dont l’exécution n’est que suspendue, pas plus
qu’elle n’efface la condamnation. Le libéré reste donc tenu de respecter les peines accessoires.
Admis au régime de la libération conditionnelle, le condamné y demeure soumis toute la
durée de la peine non subie au moment de la libération. C’est dire que le condamné doit faire
la preuve de sa réadaptation sociale. L’arrêté de libération conditionnelle fixe, s’il y a lieu, les
modalités d’exécution et les conditions auxquelles l’octroi ou le maintien de la liberté est
subordonné, ainsi que la nature et la durée des mesures d’assistance et de contrôle. Cette
durée ne peut être inférieure à la durée de la peine non subie au moment de la libération. S’il
s’agit d’une peine temporaire, elle peut la dépasser pour une période maximum d’un an.
Toutefois, lorsque la peine en cours d’exécution est une peine perpétuelle, la durée des
mesures d’assistance et de contrôle est fixée pour une période qui ne peut être inférieure à
cinq années, ni supérieure à dix années (art. 583, al. 3).
Pendant toute la durée de la liberté conditionnelle, les dispositions de l’arrêté de
libération peuvent être modifiées.
105
Chapitre II : L’extinction de la peine
Les peines s’éteignent de différentes façons. La situation normale est bien évidemment
celle où la peine disparaît parce qu’elle a été exécutée ; mais il arrive que la peine, bien
qu’inexécutée, vienne à s’éteindre. Il convient donc de distinguer deux hypothèses
d’extinction, selon qu’il y a eu exécution ou inexécution de la peine.
Cette distinction, a priori banale, nécessite, cependant, quelques précisions préalables.
D’une part, l’extinction de la peine par l’effet de son exécution est un phénomène naturel, qui
n’appelle pas en son principe, de commentaire particulier. D’autre part, on évoque en effet,
parfois, que la peine peut disparaître en dehors de l’achèvement de son exécution ;
l’inexécution de tout ou partie de la peine, sera envisagée comme telle.
I – La grâce
La grâce est une mesure de clémence accordée au chef de l’Etat en vertu de laquelle
un condamné est soustrait à l’application de la peine qu’il aurait dû subir. Elle dispense un
106
condamné de tout ou partie de sa peine ; mais elle dispense seulement d’exécuter la peine ;
elle ne vaut pas exécution.
Du point de vue de sa légitimité, la grâce peut porter atteinte au principe de la
séparation des pouvoirs en permettant au chef de l’Etat de s’immiscer dans l’œuvre du
pouvoir judiciaire, voire de la détruire pratiquement. Mais cette critique n’est pas pour autant
recevable dans la mesure où elle n’efface pas la condamnation prononcée par le pouvoir
judiciaire ; elle dispense seulement de l’exécution de la peine. Cette exécution relève
d’ailleurs du pouvoir exécutif. Sans doute, convient-il d’accorder des grâces modérées et non
politiciennes susceptibles de choquer l’opinion publique.
Du point de vue pratique, elle permet de donner une satisfaction immédiate aux
exigences de l’humanité et de la justice. Elle permet de remédier aux rigueurs et erreurs
judiciaires. Elle garde un rôle social des plus importants.
II – La prescription de la peine
En dehors des remises de peine opérées par voie de grâce, il faut mentionner que la
peine peut prendre fin avant le délai fixé par la juridiction de jugement, par l’effet de certaines
remises accordées par le juge. Celui-ci a reçu un pouvoir apparenté à celui de la grâce. Les
détenus en exécution d’une peine privative de liberté peuvent, s’ils ont donné des preuves
suffisantes de bonne conduite, bénéficier d’une réduction de peine.
203
Bernard BOULOC, op. cit., n° 783.
107
IV – Le décès du condamné
I – L’amnistie
L’amnistie est une institution qui permet à la société de reléguer dans l’oubli les
mesures de caractère pénal dont elle ne veut plus se souvenir. C’est une mesure de clémence
prise, en principe par la voie législative pour retirer leur caractère d’infraction à certains faits
commis dans le passé204.
Dans sa conception traditionnelle, l’amnistie, à la différence de la grâce et de la
réhabilitation qui ont un caractère personnel, avait un caractère réel, c’est-à-dire qu’elle était
dispensée en considération, non pas de la qualité et des mérites du délinquant, mais en raison
de la nature des infractions et de l’époque où elles avaient été commises. D’autre part, elle
n’était guère employée qu’après une crise politique, pour réaliser la pacification des esprits,
en passant l’éponge sur les infractions politiques, voire certains délits apparentés. C’est le cas
de l’amnistie accordée à certains faits pendant la Conférence nationales des forces vives de la
nation béninoise de février 1990. Les crimes et délits apparentés commis par le régime
révolutionnaire du Général Matthieu KEREKOU entre le 26 octobre 1972 à la veille de la
Conférence nationale de 1990 ont été amnistiés. C’était d’ailleurs une des conditions posées
pour l’acceptation des recommandations de ladite conférence.
II – La réhabilitation
La réhabilitation est une institution qui permet de réputer non avenue une déclaration
de culpabilité quand, après avoir exécuté sa peine principale, le condamné a fait preuve d’une
bonne conduite prolongée.
Dans son principe juridique, bien qu’elle ait les mêmes effets que l’amnistie, elle
diffère de ces procédés. Elle se distingue de l’amnistie, qui est aussi une cause d’effacement
de la condamnation ; les mobiles des deux institutions ne sont pas les mêmes ; tandis que
Fréderic DESPORTES, Francis Le GUNEHEC, Le nouveau droit pénal, t. 1 : Droit pénal général, Paris :
204
108
l’amnistie a un but d’apaisement, la réhabilitation suppose une condamnation définitive ; il
faut même sauf exceptions, que la peine principale ait été intégralement subie ; la
réhabilitation ne revient pas sur le passé pour faire oublier une condamnation pénale ; elle se
borne à faire cesser pour l’avenir certaines conséquences juridiques.
Il ne faut pas non plus confondre la réhabilitation avec la révision, qui, elle, vise à
obtenir l’annulation des condamnations prononcées à tort, sous l’influence d’une erreur de fait
commises par les juges.
La réhabilitation est réglementée par les articles 627 à 643 du code de procédure
pénale béninois. De la lecture de l’article 628, la réhabilitation s’obtient de deux façons. Selon
la voie la plus ancienne, elle résulte d’une décision expresse qui émane du pouvoir judiciaire.
Pour les délinquants primaires, elle s’acquiert de plein droit, après quelques années de bonne
conduite. Quel que soit le moyen par lequel elle est obtenue, elle a des effets uniformes.
109
I - Le contenu du droit pénal...................................................................................2
A : Les branches du droit pénal..........................................................................3
B : Le déclin contemporain du droit pénal ou l’apport des disciplines
spécialisées..........................................................................................................5
II – L’évolution du droit pénal................................................................................7
A : De l’époque féodale à la Révolution.............................................................7
B : Depuis la Révolution.....................................................................................9
III – Le droit pénal en Afrique..............................................................................10
IV - Subdivision du cours.....................................................................................12
Première partie : L’infraction pénale........................................................................................13
Titre I : Les éléments constitutifs de l’infraction..................................................................15
Chapitre I : l’élément légal de l’infraction ou la légalité pénale.......................................16
Section I : Les sources du droit pénal...........................................................................17
Section II : Le sens du principe « nullum crimen, nulla poena sine lege »..................17
§ 1 : La justification du principe de légalité.............................................................18
§ 2 : La portée du principe........................................................................................19
I – Le domaine du principe de la légalité..............................................................19
A : Nullum crimen sine lege : pas d’infraction sans texte.................................19
B : Nulla poena sine lege : pas de peine sans texte..........................................20
II : Les conséquences du principe de la légalité...................................................20
A : Les conséquences du principe de la légalité criminelle pour le législateur 20
1 - L’exigence de précision...........................................................................20
2 - L’interdiction des textes rétroactifs.........................................................21
a : La signification du principe de non-rétroactivité.................................22
β : Le champ d’application de la loi pénale dans l’espace........................23
b : La portée du principe de non-rétroactivité en matière pénale.............24
B : Les conséquences du principe de la légalité pour le juge...........................27
1 - L’obligation de respecter la loi................................................................27
2 - L’interprétation stricte de la loi pénale....................................................28
Chapitre II : L’élément matériel de l’infraction................................................................30
Section I : La nécessité d’un résultat : l’infraction consommée...................................30
§ 1 : Le mode de réalisation de l’infraction..............................................................30
I – La nature du fait matériel.................................................................................30
A : L’infraction de commission........................................................................31
B : L’infraction d’omission...............................................................................31
II – La durée de la réalisation de l’infraction........................................................32
A : L’instantanéité de l’élément matériel : infractions instantanées et
permanentes......................................................................................................32
B : La continuité de l’élément matériel : infractions continues ou successives et
infractions continuées.......................................................................................32
III – L’unicité et la pluralité d’actes.....................................................................33
A : Les infractions simples, complexes et d’habitudes.....................................34
1 – Infraction simple et infraction d’habitude...............................................34
2 – Les infractions simples et les infractions complexes..............................35
B : Les intérêts de la distinction........................................................................35
§ 2 : L’infraction fondée sur le résultat.....................................................................35
I – Les infractions matérielles et les infractions formelles...................................36
II – Intérêt de la distinction...................................................................................36
Section II : L’indifférence du résultat...........................................................................36
§ 1 : La tentative.......................................................................................................37
110
I – Les éléments constitutifs de la tentative..........................................................38
A : Le commencement d’exécution..................................................................38
a : Exemples de commencements d’exécution.........................................39
b : Ne sont pas des commencements d’exécutions...................................40
B : L’interruption involontaire de l’exécution (absence de désistement
volontaire).........................................................................................................40
1 – Le désistement doit être antérieur à la consommation de l’infraction....40
2 – Le désistement doit être volontaire.........................................................41
II – Le domaine de la tentative.............................................................................42
A : Distinction selon la gravité des infractions.................................................42
B : Les infractions étrangères par leur nature à la notion de tentative..............42
§ 2 : L’exécution infructueuse..................................................................................43
Chapitre III : L’élément moral de l’infraction..................................................................44
Section I : L’imputabilité..............................................................................................44
§ 1 : L’état des facultés intellectuelles......................................................................44
I – L’insuffisance des facultés..............................................................................44
A : L’âge...........................................................................................................44
B : Les troubles psychiques ou neuropsychiques.............................................46
1 – Trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli le discernement et le
contrôle des actes..........................................................................................46
2 – Trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré le discernement ou
entravé le contrôle des actes.........................................................................47
II – L’altération passagère....................................................................................47
A : Notion.........................................................................................................47
B : Influence de l’ivresse sur la responsabilité.................................................47
§ 2 : Le libre exercice des facultés mentales : le problème de la contrainte.............48
I – Les conditions larges de la contrainte..............................................................48
II – Les conditions étroites....................................................................................48
A : Extérieure à l’agent.....................................................................................48
B : Irrésistible....................................................................................................49
C : Imprévisibilité.............................................................................................49
Section II : La culpabilité..............................................................................................49
§ 1 : La faute intentionnelle......................................................................................49
I – Distinction de l’intention et de la volonté.......................................................50
II – Distinction de l’intention et du mobile...........................................................50
C : Les composantes de l’intention...................................................................51
§ 2 : La faute d’imprudence ou de négligence..........................................................52
I – La notion de faute d’imprudence ou de négligence.........................................52
II – La répression..................................................................................................53
Titre II : La classification des infractions.............................................................................55
Chapitre I : La distinction des infractions selon leur gravité............................................56
Section I : Le principe de distinction............................................................................56
§ 1 : Au point de vue du fond...................................................................................56
§ 2 : Au point de vue de la forme..............................................................................56
Section II : La valeur de la distinction..........................................................................57
§ 1 : Le reproche sur l’illogisme...............................................................................57
§ 2 : Le reproche sur l’imprécision...........................................................................58
Chapitre II : La distinction des infractions selon leur nature............................................59
Section I : Distinction des infractions de droit commun et des infractions politiques. 59
§ 1 : Le critère de l’infraction politique....................................................................59
111
§ 2 : Les intérêts de la classification.........................................................................60
Section II : Distinction des infractions de droit commun et des infractions militaires.60
§ 1 : Critère de la distinction.....................................................................................61
I – Les infractions proprement militaires..............................................................61
II – Les infractions mixtes....................................................................................61
§ 2 : Intérêt de la distinction.....................................................................................61
Titre III : Le délinquant et la responsabilité pénale..............................................................63
Chapitre 1 : La pluralité de participation à l’infraction....................................................64
Section I : L’auteur.......................................................................................................64
§ 1 : Définition de l’auteur........................................................................................64
§ 2 : Diversité d’application......................................................................................65
I – Auteur intellectuel et auteur matériel..............................................................65
II – Auteur indirect et auteur médiat.....................................................................66
III- Coauteurs........................................................................................................67
Section I : Le complice.................................................................................................68
§ 1 : Les conditions de la complicité........................................................................68
I – Un fait principal punissable.............................................................................69
A : La qualification du fait principal.................................................................69
1 – L’exigence d’un fait qualifié crime ou délit...........................................69
2 – Le cas de la contravention.......................................................................70
B : Le caractère punissable du fait....................................................................70
II – La participation au fait principal....................................................................71
A : L’élément intentionnel de complicité.........................................................71
B : l’élément matériel de complicité.................................................................72
1 – La complicité par instigation..................................................................72
2 – La complicité par collaboration..............................................................73
3 – Le cas du recel........................................................................................75
§ 2 : La répression de la complicité..........................................................................76
I – La portée de l’article 59 du code pénal............................................................76
II – L’influence sur la condition du complice.......................................................77
A : Les circonstances aggravantes réelles (ou objectives)................................77
B : Les circonstances personnelles (ou subjectives).........................................77
C : Les circonstances mixtes.............................................................................78
Chapitre 2 : Les causes objectives de non-responsabilité.................................................80
Section I : Les faits justificatifs reconnus par la loi......................................................80
§ 1 : L’ordre de la loi et le commandement de l’autorité légitime...........................80
I – L’ordre de la loi...............................................................................................81
A : Règles générales sur l’ordre de la loi..........................................................81
B : La permission (ou l’autorisation) de la loi..................................................82
II – Le commandement de l’autorité légitime.......................................................82
A : La théorie de l’obéissance passive..............................................................83
B : La théorie dite des « baïonnettes intelligentes » ou de l’obéissance
raisonnée...........................................................................................................83
C : La solution médiane....................................................................................83
§ II : La légitime défense..........................................................................................84
I – La légitime défense proprement dite...............................................................85
A : La situation de légitime défense.................................................................85
1 – La certitude de l’agression......................................................................86
2 – L’injustice de l’agression........................................................................86
B : L’acte de défense légitime..........................................................................87
112
II – Les cas « privilégiés » de la légitime défense................................................88
A : Les conditions d’application.......................................................................89
B : La portée......................................................................................................89
Section II : Les faits justificatifs de source jurisprudentielle ou doctrinale..................91
§ 1 : L’état de nécessité.............................................................................................91
I - Les conditions requises...................................................................................92
II - Les effets........................................................................................................93
§ 2 : Le consentement de la victime..........................................................................93
I – Les conditions..................................................................................................93
II – Les controverses.............................................................................................94
Deuxième partie : La sanction pénale : étude spécifique de la peine.......................................96
Titre I : nomenclature et classification des peines................................................................97
Chapitre 1 : La hiérarchie des peines................................................................................98
Section 1 : La classification sous-entendue dans le code.............................................98
§ 1 – Les peines encourues, prononcées et exécutées...............................................98
§ 2 – Les peines principales, accessoires et complémentaires..................................98
Section 2 : La classification relevant directement de la loi..........................................99
Chapitre II : Le contenu des peines.................................................................................100
Section I : Les peines corporelles...............................................................................100
Section II : Les peines non corporelles.......................................................................100
§ 1 : Les atteintes à la liberté individuelle..............................................................100
I – Les peines privatives de liberté.....................................................................100
II – Les peines restrictives de liberté..................................................................101
§ 2 : L’atteinte aux droits : les peines privatives ou restrictives de droit................101
§ 3 : Les atteintes patrimoniales..............................................................................101
Titre II : Le sort de la peine................................................................................................102
Chapitre I : La suspension de la peine............................................................................103
Section I : Le sursis.....................................................................................................103
§ 1 : Les conditions d’application du sursis simple................................................103
I – Les condamnations auxquelles peut s’appliquer le bénéfice du sursis simple
.............................................................................................................................103
II – Les délinquants pouvant bénéficier du sursis simple...................................104
§ 2 : Les effets du sursis simple..............................................................................104
Section II : La libération conditionnelle.....................................................................104
§ 1 : Les conditions d’octroi de la libération conditionnelle..................................105
I – Le délai..........................................................................................................105
II – La bonne conduite et le gage de réadaptation social....................................105
§ 2 : Les effets de la libération conditionnelle........................................................106
Chapitre II : L’extinction de la peine..............................................................................107
Section I : L’extinction de la peine exécutée..............................................................107
Section II : L’extinction de la peine inexécutée..........................................................107
§ 1 : Extinction par suite d’une exécution fictive...................................................107
I – La grâce.........................................................................................................107
II – La prescription de la peine...........................................................................108
III – La réduction de la peine..............................................................................108
IV – Le décès du condamné................................................................................109
§ 2 : Extinction par suite de la disparition de la condamnation..............................109
I – L’amnistie......................................................................................................109
II – La réhabilitation...........................................................................................109
Table des matières...................................................................................................................111
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