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La commercialisation de l’oignon au Bénin

ENTRE INVESTISSEMENT ET PERTE

En ville, dans la zone de l’Afrique subsaharienne, l’alimentation représente entre 40 et


60% des dépenses des ménages. La sécurité alimentaire de ces ménages dépend donc du
bon fonctionnement du marché qui doit leur offrir des produits alimentaires à des prix
accessibles. L’oignon est l’un de ces produits alimentaires qui jouent un rôle essentiel dans
la sécurité alimentaire des populations urbaines du Bénin.

Prisca EDAYE

De son nom scientifique Allium Cepa, sa production est surtout développée dans le
département de l’Alibori (Malanville et Karimama) et dans une moindre mesure du
département du Mono (Grand-Popo). L’oignon rencontré au Bénin provient essentiellement
du Niger. Nous avons l’oignon de Galmi ( ou oignon blanc de Galmi), l’oignon violet de Galmi
(ou oignon Agadès). Sur les marchés, on trouve également l’oignon Dendi de Malanville (ou
oignon rouge local). C’est une denrée alimentaire présente sur tous les marchés à l’intérieur
du pays. Mais c’est celui de Tokpa Mahoulé qui abrite la vente en gros et détail de cette
dernière. Les consommateurs béninois préfèrent l’oignon de Galmi, bien que plus cher pour
son caractère organoleptique et sa moindre difficulté de conservation.

Bien que l’oignon se cultive au Bénin, son importation s’effectue aussi du Niger qui ne
dispose que de deux variétés : le violet et le rouge. Selon Bernice HOUESSINON, vendeuse
d’oignons au marché de Godomey, c’est le violet qui s’écoule plus car aux dires des
consommateurs, la nourriture préparée avec le rouge, noircit après quelques minutes ; tel
n’est pas le cas avec le violet. « Mais le rouge a plus de vitamine que le violet » souligne t-
elle.

En effet, la commercialisation de cette denrée connaît deux saisons au cours de l’année


dont chacune d’elle avec ses réalités.  « Au Benin, nous n’avons qu’une seule période de
production de l’oignon qui va du mois de décembre  à la fin  du mois d’avril tandis que les
Nigériens produisent à plein temps tout au long de l’année.

Quand commerce rime avec perte.

Au cours de la première période, les productions du Mali viennent s’ajouter à la production


locale. L’offre est beaucoup plus forte que la demande et nous  n’arrivions pas à faire des
bénéfices. Par contre, au cours de la deuxième, seuls les oignons provenant du Niger sont
sur le marché et nous en profitons pour faire de la marge mais cela ne dure que deux mois »,
explique Boubacar IDRISSOU, un vendeur grossiste.
Notons que les 100kg d’oignon de meilleure qualité qu’est l’oignon de Galmi coûte entre
15.000F cfa et 18.500F cfa en période d’abondance (mars-mai), contre 50.000F ca et
75.000F cfa en période de cherté (août-février).

Les oignons sont des denrées très périssables qui ne supportent pas du tout la chaleur. Or,
pour leur acheminement, le produit est emballé dans des sacs depuis les pays voisins
jusqu’au marché principal de Cotonou. Les packages n’arrivent pas tous en bon état à
destination. Ainsi pour limiter les dégâts liés à sa conservation, les vendeurs les livrent aux
détaillants, qui sont souvent en contact avec les acheteurs pour les besoins de ménages.
Ceux-ci après la vente, remboursent les sous à leurs fournisseurs.

Une concurrence déloyale

Sur le marché, en période d’abondance les grossistes sont confrontés à un vrai problème  :
celui de la concurrence déloyale de la part des producteurs. Ces derniers deviennent aussi
commerçants de leurs propres marchandises. « Ils ne vendent pas dans le but de gagner de
l’argent ; mais celui de récupérer ce qu’ils ont investi dans la  production ». « Nous autres,
commerçants grossistes faisons des prêts pour mener cette activité et nous nous retrouvons
maintenant en concurrence avec ces derniers. Pendant que, nous vendons le sac à 25mille
francs ou à  28mille francs, ils les proposent  à 15mille ou 20mille francs. Malgré ces prix très
bas, ils font des bénéfices ». « Avec cette activité, c’est  dans l’insécurité totale que nous
vivons  chaque jour » s’indigne Edwige AÏHOU, commerçante grossiste à Tokpa
Mahoulé. Cette situation que vivent les acteurs de la  filière oignon dure depuis près d’une
décennie. C’est d’ailleurs la raison de l’abandon de certains parmi nous qui ploient sous des
dettes martèle dame Edwige.

Difficultés liées à la commercialisation

Les acteurs de la filière sont confrontés à divers problèmes majeurs comme: l’insuffisance de
la production nationale de l’oignon, la moindre qualité de la variété locale qui pourrit plus
vite que celles importées et le manque de technologie adaptée pour la conservation en
grande quantité sur une longue durée. A cela, il faut ajouter les tracasseries routières subies
par les commerçants de la part des agents de sécurité et de contrôle (policiers, gendarmes,
…) et la faible organisation de la filière au Bénin. Contrairement au Bénin, le niveau
d’organisation au Niger est tel que le coût de la commercialisation est réduit au minimum. Il
y est instauré un ticket-valeur qui sert de laissez-passer pour le commerçant au cours du
transport. Les tracasseries provenant des divers agents de sécurité et de contrôle routier
sont ainsi supprimées.
Pour une meilleure collaboration

Face à ces difficultés liées à l’importation de l’oignon vers le Bénin, les grossistes sont déjà
allés plusieurs fois rencontrés les responsables de la filière au Niger  dans le but de clarifier
les choses afin que les producteurs ne s’occupent désormais que de leurs activités et que les
commerçants fassent de même. Des efforts sont toujours déployés mais la satisfaction peine
à être obtenue. Mais le principe de la libre circulation instauré par l’Union Monétaire des
Etats de l’Afrique de l’Ouest ralentit le processus. 

Conclusion

L’oignon rencontré au Bénin provient principalement du Niger. Toutefois, des quantités non
négligeables proviennent du Burkina Faso et même du Nigéria, sans oublier la production
nationale qui reste insuffisante. Les acteurs de la commercialisation du produit au Bénin sont
principalement les Nigériens et les Béninois. Les consommateurs béninois préfèrent l’oignon
de Galmi, bien que plus cher, pour son caractère organoleptique et sa moindre difficulté de
conservation. Des obstacles internes liés à des charges domestiques peu justifiées réduisent
la compétitivité de ce produit au point que l’accessibilité est réduite pour le consommateur.
Il importe donc de prendre des dispositions pour une organisation plus fiable de la filière au
Bénin. A cela s’ajoute la nécessité de poursuivre les recherches en vue de l’amélioration des
techniques de production (les semences notamment) et la mise au point de technologies de
conservation du produit sur une longue durée.

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