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DROIT PENAL DES

AFFAIRES

Pr. Mohamed JAOUHAR

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Introduction conceptuelle
 Définition : Le droit pénal des affaires peut être défini comme le
droit répressif applicable aux agissements illégaux et, par
conséquent criminels, du monde des affaires.

 Nature : Droit punitif, qui sanctionne les agissements antisociaux


des hommes d'affaires, qui sont de nature à troubler l'ordre
public économique.

 Composition : Comme tout droit pénal il est articulé autour


d'infractions et de sanctions. Il constitue un terrain de rencontre
entre le droit des affaires et le droit pénal.

 Source : La base juridique peut être puisée, soit dans le code


pénal (Dahir du 26 novembre 1962), soit dans des lois spéciales
réglementant un sujet déterminé. Le jugement des infractions
d'affaires est de la compétence des juridictions pénales.

 Domaine : Appartenance au champ disciplinaire pénal, qui


regroupe plusieurs matières, telle que : le droit pénal général, le
droit pénal spécial, ou encore la procédure pénale.

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CHAPITRE I

Notions sommaires de droit pénal

PI: Les éléments constitutifs de l'infraction

 L'infraction est définie comme l'action ou l'omission interdite par


la loi sous menace d'une peine.
 L'infraction est techniquement divisée selon l'ordre de gravité
en : crime, délit, contravention.
 L'infraction est juridiquement constituée de trois éléments,
l'élément légal, l'élément matériel et l'élément moral.

A- L’élément légal

- Consécration du principe de la légalité criminelle : à savoir


l'exigence d’un texte de loi comme fondement pour
l’incrimination et pour la sanction.
- Art 3 du code pénal : « Nul ne peut être condamné pour un fait
qui n'est pas expressément prévu comme infraction par la loi, ni
puni de peines que la loi n'a pas édictées ».
- Art 23 de la Constitution : « Nul ne peut être arrêté, détenu,
poursuivi ou condamné en dehors des cas et des formes prévus
par la loi ».
- Afin de protéger les libertés individuelles et d'éviter les abus, le
juge pénal se voit obligé de respecter l’interprétation restrictive
de la loi pénale et doit, par conséquent, s'interdire tout
raisonnement par analogie.
- L'application de la loi dans le temps exige le respect du :
principe de non rétroactivité de la loi pénale.

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- Art 4 du CP : « Nul ne peut être condamné pour un fait qui,
selon la loi en vigueur au temps où il a été commis ne constituait
pas une infraction ».
- Art 5 du CP : « Nul ne peut être condamné pour un fait qui, par
l'effet d'une loi postérieure à sa commission, ne constitue plus
une infraction ».
- Art 6 : « Lorsque plusieurs lois ont été en vigueur entre le
moment où l'infraction a été commise et le jugement définitif, la
loi, dont les dispositions sont les moins rigoureuses, doit
recevoir application ».
- L'application de la loi dans l’espace se fait sur la base du :
principe de la territorialité.
- Art 10 du CP : « Sont soumis à la loi pénale marocaine, tous
ceux qui, nationaux, étrangers ou apatrides, se trouvent sur le
territoire du Royaume, sauf les exceptions établies par le droit
public interne ou le droit international ».

B- L’élément matériel

- Il consiste dans l’exécution matérielle de l'acte criminel par


l’auteur de l'infraction et non pas dans le résultat de l'infraction.
- Distinctions : infractions de commission/infractions d’omission ;
infractions instantanées/infractions continues.
- Le régime de la tentative : distinction entre actes préparatoires
non punissables et commencement de l’exécution lequel est
punissable.
- En principe la tentative est punissable comme l’infraction
consommée
- La punissabilité est fonction de la gravité de l'infraction. La
tentative du crime est toujours punissable. La tentative d'un délit
n'est punissable que si elle est envisagée par la loi. La tentative
d'une infraction n'est jamais punissable
- La complicité : est retenue lorsque l'implication de l'agent est
indirecte. La personne est alors qualifiée de complice. L'art 129
cite certaines situations qui réalisent la complicité.
- La coaction : exige une implication directe dans l'exécution
matérielle de l'infraction (art 128). La personne est alors
qualifiée de coauteur.

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C- L’élément moral

- L’agent doit commettre une faute (culpabilité)


- L’agent doit assumer la responsabilité de cette faute
(imputabilité)
- La faute dans les infractions intentionnelles constitue le dol
général se basant sur la connaissance et la volonté. L'erreur
matérielle exclut la responsabilité.
- La faute dans les infractions non intentionnelles repose sur une
autre attitude morale. Elle est qualifiée de faute d'imprudence.
- La non imputabilité est retenue dans les cas de : minorité pénale
et d’aliénation mentale. Ces personnes ne sont pas responsables
pénalement pour absence de discernement.
- Art 134 du CP : « N'est pas responsable et doit être absous celui
qui, au moment des faits qui lui sont imputés, se trouvait par
suite de troubles de ses facultés mentales dans l'impossibilité de
comprendre ou de vouloir ».

PII : Classification des sanctions

A- les peines principales

1- Les peines criminelles principales (art 16) sont :


a- La peine de mort,
b- La réclusion perpétuelle,
c- La réclusion à temps pour une durée de 5 à 30 ans,
d- La résidence forcée,
e- La dégradation civique.

2- Les peines délictuelles principales (art 17) sont :


a- L’emprisonnement d'un mois à 5 ans,
b- L'amende de plus de 1200. DH.

3- Les peines contraventionnelles principales (art 18) :


a- La détention de moins d'un mois,
b- L'amende de 200 à 1200. DH.

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B- Les peines accessoires (art 36)

1- L’interdiction légale ;
2- La dégradation civique ;
3- La suspension de certains droits civiques, civils et de famille ;
4- La perte du droit aux pensions servies par l’État ;
5- La confiscation partielle des biens appartenant au condamné ;
6- La dissolution d’une personne juridique ;
7- La publication de la décision de condamnation.

C- Les mesures de sûreté (art 61 et 62)

- Les mesures de sûreté personnelles sont :


1- La relégation dans un établissement de travail ;
2- Le placement judiciaire dans une colonie agricole ;
3- L’assignation à résidence ;
4- Les déchéances professionnelles ;
5- La déchéance du droit de la puissance paternelle ;
6- L’internement judiciaire dans un établissement psychiatrique ;
7- Le placement judiciaire dans un établissement thérapeutique ;
8- L’interdiction de séjour ;
9- L’incapacité d’exercer toutes fonctions ou emplois publics.

- Les mesures de sûreté réelles sont :


1- La confiscation du matériel ;
2- La fermeture de l’établissement.

PIII : Le régime juridique de la sanction

A- La récidive : elle entraîne l’aggravation de la peine ; la personne


est considérée comme récidiviste si elle a été déjà condamnée
auparavant. Cette situation est vérifiée dans le casier judiciaire.

B- Le sursis : dispense de l’exécution de la peine prononcée qui peut


être accordée à des délinquants primaires, qui sont condamnés à des
peines délictuelles. Sa durée de validité est de 5 ans pour qu'elle soit
irrévocable. En cas de commission d'un nouveau délit, le délinquant

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sera obligé d'exécuter sa peine en plus de la peine du nouveau délit qui
a été commis durant les cinq ans.

C- La prescription :
- Elle suppose l'écoulement d'un certain temps entre la date de la
condamnation par défaut et la date de l'exécution de la peine, si la
personne condamnée vient d'être arrêtée par la suite. Dans ce cas, elle
va échapper à l'exécution de la sanction, on parle alors de prescription
de la peine.
- la prescription de la peine est d'une durée de 15 ans pour les crimes,
de 4 ans pour les délits et d'un an pour les contraventions. Ces délais
sont comptés à partir de la date du prononcé de la peine.

- La prescription de l’action publique empêche le procureur de


poursuivre le coupable après un certain temps écoulé depuis la
commission de l’infraction. L'auteur de l'infraction va échapper alors
aux poursuites du procureur et ne pourra ainsi être jugé du fait de cette
prescription. Lorsqu'elle concerne l'action publique, la prescription est
de 15 ans pour les crimes, pour les délits elle est de 4 ans et pour les
contraventions elle est d'an.

D- L’action civile :
- Parallèlement à l'action publique exercée par le procureur, la victime
peut demander réparation de son préjudice en exerçant l'action civile.
Elle va alors se constituer partie civile devant le juge pour réclamer le
dédommagement.

PIV : Criminalité d’affaires et DPA

A-Caractéristiques de la délinquance d’affaire

- Le criminologue Edwin Sutherland qualifie cette forme de


délinquance de criminalité en col blanc (White Collar Crime)
- Cette criminalité est acquisitive et camouflée;
- État d’anomie chez le délinquant et chez la société ;
- Liens privilégiés avec le pouvoir politique ;
- Réaction molle de la justice.

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B- Domaines et spécificités du DPA

- Le domaine du DPA est un domaine étendu qui embrasse


plusieurs branches du droit des affaires.
- Le DPA présente plusieurs spécificités :

1) Au niveau des infractions :


- Usage du renvoi sur le plan de l’élément légal ;
- Usage élargi des infractions d’omission sur le plan de l’élément
matériel ;
- Parfois absence de l’élément moral (infraction matérielle),
- Rétention de la responsabilité es qualité,
- Responsabilité pénale des personnes morales.

2) Au niveau des sanctions


- Préférence de l’amende par rapport à l’emprisonnement ;
- Amendes souvent élevées, parfois proportionnelles ;
- Usage fréquent des peines accessoires et des mesures de sûreté,
notamment dissolution de la personne morale, confiscation des
biens et des instruments utilisés, fermeture de l'établissement,
publication de la décision judiciaire.

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CHAPITRE II

Les infractions relevant du code pénal

PI: Les infractions contre les biens


A- les infractions de vol
- Réglementation s'étendant de l'art 505 à 539 du code pénal
- Art 505 : vol simple, puni d'un à 5 ans et d'une amende de 200 à
500.DH (délit correctionnel)
- Art 506 : vol de choses de faible valeur, appelé larcin, puni de
l'emprisonnement d'un mois à 2 ans et d'une amende de 200 à
250. DH (délit de police)
- Art 507 à 510 : des vols qualifiés de crime en présence des
circonstances aggravantes. Ces vols sont punis en fonction des
circonstances soit de la réclusion perpétuelle, soit de la réclusion
de 20 à 30 ans, soit de la réclusion de 10 à 20 ans, soit encore de
la réclusion de 5 à 10 ans. IL s'agit de crimes punis d'une peine
criminelle principale
- Art 539 : la tentative du vol en tant que délit est punissable
- Art 534 à 536 : ces articles traitent de l’immunité familiale
- Art 521 : soustraction frauduleuse de l’énergie électrique
- Art 522 : vol d’usage d’un véhicule motorisé
- Art 523 : disposition de biens en commun
- Art 532 et 533 traitent des filouteries.

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B- Les infractions d’escroquerie

- L'escroquerie est considérée comme un mensonge organisé, en


vue de s'emparer des biens d'autrui
- Art 540 : détermine les éléments constitutifs qui sont : les
affirmations fallacieuses, la remise d’une chose, l'intention
coupable et le préjudice.
- Il s'agit d'un délit correctionnel puni d'un à 5 ans
d'emprisonnement et d'une amende de 500 à 5.000DH
- Une seule circonstance aggravante est prévue : l’appel public à
l’épargne, en vue de l'émission d'actions, obligations, bons, parts
ou titres soit d'une société, soit d'une entreprise commerciale ou
industrielle. Ce qui entraîne le doublement de l'emprisonnement
et fait porter l'amende à 100.000 DH
- L'immunité familiale est étendue à l'infraction d'escroquerie (art
541) ; la tentative est punissable selon l'art 546.

C- Les infractions d’abus de confiance

- Art 547 : en fait un délit correctionnel, puni de 6 mois à 3 ans et


d'une amende de 200 à 2.000 DH. Ce délit a 4 éléments
constitutifs :
- La remise de la chose à titre de confiance dans le cadre de
rapports contractuels (louage ; prêt à usage ; dépôt ; mandat ;
nantissement ; travail)
- Le détournement ou la dissipation de la chose remise
- Le préjudice subi
- L’intention coupable
- Pour l’abus de confiance aggravé : 2 situations :
- Art 549 : aggravation qui vise certaines personnes es qualité, qui
entraîne un emprisonnement d'un à 5 ans et une amende de 200 à
5.000 DH
- Art 550 : aggravation pour usage de l'appel public à l’épargne,
qui entraîne le doublement de la peine d'emprisonnement et
porte le maximum de l'amende à 100.000 DH

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D- Les infractions de recel des choses
- Art 571 à 574 : une infraction de conséquence punie en soi, qui
vise à dissimuler le produit du vol, de l’escroquerie ou de l’abus
de confiance
- Incompatibilité entre la qualité de voleur et la qualité de receleur
- Exigence de l'intention, consistant dans la connaissance de
l'origine illicite de la chose
- Infraction punie de 1 à 5 ans et de 1.200 à 2.000 DH

PII : Les infractions de contrefaçon


A- Le faux en écriture
- Deux formes se présentent :
- Le faux en écriture publique ou authentique (art 351 à 356). Ce
type de faux est puni de perpétuité
- Le faux en écriture privée, de commerce ou de banque (art 357 à
359)
- Eléments constitutifs :
1-l’écrit comme condition préalable, défini comme un support de
signes visibles et permanents, servant à l'expression, la fixation
et la transmission de la pensée. Ce qui exclut les supports
magnétiques ou informatiques. Cet écrit doit avoir en outre une
valeur probatoire
2-l’altération de la vérité,
3-le préjudice subi,
4-l’intention criminelle.

- Le faux en écriture publique est puni de la perpétuité s'il est


commis par un magistrat, un fonctionnaire, un notaire ou un adel
- Lorsqu'il est commis par toute autre personne, il est sanctionné
de la réclusion de 10 à20 ans
- En cas d'usage d'un faux public ou authentique, c'est la réclusion
de 5 à 10 ans

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- La sanction du faux en écriture privée : 1 à 5 ans
d’emprisonnement, amende de 1.200 à 2.000 DH
- La sanction du faux en écriture de commerce ou de banque : 1 à
5 ans d’emprisonnement, amende de 1200 à 20.000 DH

- L'usage du faux est érigé en infraction


- La tentative est punissable.

B- Le faux monnayage
- Art 334 à 341 : crime puni de la perpétuité
- Falsification de monnaie métallique ou en papier ayant cours
légal au Maroc ou à l’étranger
- Incrimination de l’introduction sur le territoire marocain d’une
fausse monnaie
- Etant donné qu'il s'agit d'une infraction intentionnelle, le
récepteur de bonne foi, qui remet la fausse monnaie en
circulation ne saurait être sanctionné. La sanction prévue par l'art
338 est de 1 à 6 mois et une amende égale au quadruple de la
somme remise en circulation
- L'art 336 fait bénéficier le dénonciateur de l'excuse absolutoire
- La confiscation en tant que peine complémentaire est
obligatoire.

C- La contrefaçon des droits d’auteur


- Les articles 575 à 579 du code pénal incriminent les atteintes à la
propriété littéraire et artistique.
- Ils font renvoi à la réglementation en vigueur : loi n° 2-00
promulguée par le dahir du 15 février 2000 ; modifiée par le
dahir du 14 février 2006 portant promulgation de la loi n° 34-05.
- Révision des peines de l’art 64 dans le sens de la hausse.

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PIII : Les autres infractions à l’ordre public
économique

- Art 218-1 à 218-9 : infractions du terrorisme. Le financement du


terrorisme (art 218-4)
- Art 249 à 251 : incrimination de la corruption
- Art 288 : atteinte au libre exercice de l’industrie ou du travail
- Art 415 : atteinte à la santé publique (intoxication alimentaire)
- Art 431-1 à 431-4 : la discrimination à l’égard des personnes
physiques et des personnes morales
- Art 446 : violation du secret professionnel
- Art 447 : violation du secret de fabrique
- Art 607-3 à 607-11 : les atteintes aux systèmes de traitement
automatisé de données (STAD)

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CHAPITRE III

Les infractions relevant du code de


commerce

PI : Les infractions du chèque


- Réglementées auparavant dans le code pénal dans les articles
543 à 545, à la suite de l'escroquerie.
- Révision de la réglementation dans le code de commerce de
1996
- Entrée en vigueur du code de commerce le 03 octobre 1997. Le
chèque est traité parmi les effets de commerce au Livre III.
- La révision de la réglementation était dictée par la nécessité de
lutter contre les chèques sans provision.
- Le nouveau dispositif ne repose pas totalement sur la répression
pénale, mais associe le secteur bancaire dans le rôle de
prévention.

A- La responsabilité bancaire

1- Mesures visant l’émetteur

a- La prévention par l’identification et l’information:

- D'une part, les banques ont l'obligation de vérifier l'identité de


tout nouveau client avant l'ouverture d'un compte, d'autre part,
elles doivent consulter le Service Central des Incidents de
Paiement (SCIP), auprès de Banque El Maghreb, avant la remise
d'un chéquier. En outre, elles doivent déclarer au SCIP tout
incident de paiement, dans les cinq jours.

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b- La dissuasion par l’interdiction et la régularisation :

- Suite à l'incident de paiement, la banque a l'obligation d'envoyer


une lettre d’injonction, informant son client de l'incident qui a
entraîné à son égard une interdiction bancaire de 10 ans
- La lettre d'injonction doit également lui ordonner la restitution
de tous les formules de chèques qui se trouvent en sa possession
ou en la possession de ses mandataires (art 313)
- Le client garde cependant la possibilité d'échapper à
l'interdiction d'émission de chèques s’il procède à la
régularisation. Celle-ci intervient à deux conditions :
- En réglant, d'une part, le montant du chèque ou en constituant la
provision ;
- Et en payant d'autre part l'amende fiscale, prévue à l'art 314.
Celle-ci est de l'ordre de 5% du montant du chèque impayé
faisant l'objet de la première injonction. De 10% lors de la
deuxième injonction. De 20% lors de la troisième injonction et
des injonctions suivantes.

2- Mesures relatives au bénéficiaire


- Le code de commerce a prévu un certain nombre de mesures au
profit du bénéficiaire du chèque impayé.
- En premier lieu : l’établissement par la banque d’un certificat de
refus de payement, contenant les informations nécessaires sur
l'identité du client.
- Ce certificat permet non seulement le contrôle par la banque
centrale des incidents de paiement, mais permet au bénéficiaire
d'exercer les procédures judiciaires. Ainsi, il peut faire protêt
auprès du greffe du tribunal. Il peut également, par ce moyen,
obtenir une ordonnance auprès du président du tribunal, pour une
saisie conservatoire.
- En deuxième lieu, le code de commerce a établi à l'égard de la
banque une responsabilité civile, en lui faisant jouer le rôle de
caution, en cas de défaillance de sa part.
- Conformément à l'art 309, la banque est responsable civilement
pour tout refus abusif de payer un chèque normalement
provisionné.

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- L'art 320 oblige la banque à payer tout chèque présenté à hauteur
de 10.000 DH, nonobstant l'absence ou l'insuffisance de la
provision, lorsque ce chèque a été émis au moyen d'une formule,
dont elle n'a pas réclamé la restitution par une lettre
d'injonction ; ou lorsqu'elle a délivré des formules de chèques à
un nouveau client sans avoir consulté préalablement le SCIP.
- En outre, l'art 320 va plus loin, en établissant à l'égard de la
banque une responsabilité solidaire dans le paiement des
dommages et intérêts avec l'émetteur d'un chèque sans provision
qui a été condamné par la justice, et ce à hauteur de 100.000 DH,
lorsque la faute de la banque se trouve établie.

B- L’arsenal répressif

Le renforcement des dispositions répressives, dans le code de


commerce s'est déployé quantitativement et qualitativement, dans
plusieurs sens. Ainsi sur le plan pénal, on ne se réfère plus aux
articles 543 à 545 du code pénal. Aujourd'hui la référence se fait
essentiellement à l'art 316 du code de commerce.

1- Les infractions du tireur


- Concernant les incriminations, on ne parle plus d'émission de
chèque sans provision, mais d'omission de maintien ou de
constitution de la provision en vue du paiement du chèque à la
présentation. Ce qui entraîne une modification de l'élément
matériel.
- L'élément moral n'est pas invoqué, ce qui fait du non payement
du chèque une infraction purement matérielle.
- Sur un autre plan, la violation de l’interdiction bancaire se trouve
elle même incriminée en tant qu'infraction propre à l'art 318.
- L'opposition irrégulière au paiement d'un chèque en dehors des
quatre cas prévus par l'art 271 (perte, vol, utilisation frauduleuse
ou falsification, redressement ou liquidation judiciaire) se trouve
punie, exactement comme le chèque sans provision.
- les sanctions prévues par l'art 316 sont: un à cinq ans
d’emprisonnement et une amende de 2.000 à 10.000 DH, sans

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que cette amende ne puisse être inférieure à 25 % du montant du
chèque.
- La loi donne la possibilité au juge de prononcer une interdiction
judiciaire de 5 ans (art 317). Elle ne doit pas dépasser 5 ans, en
outre la loi autorise le juge à prononcer la publication de la
décision de condamnation.
- En cas de régularisation dans les 20 jours, le juge peut accorder
le sursis, la réduction ou la suppression de la peine
d’emprisonnement

2- Les infractions du bénéficiaire


Deux faits sont incriminés :
1) l'infraction d'acceptation d'un chèque de garantie ;
2) l'infraction d'endossement d'un chèque de garantie.

3- Les infractions du tiré


Elles sont prévues à l'art 319 du code de commerce, ainsi
peut être passible d'une amende de 5.000 à 50.000 DH :
 Le tiré qui indique une provision inférieure à la provision
existante et disponible
 Le tiré qui contrevient aux dispositions lui faisant obligation de
déclarer dans les mêmes délais réglementaires, les incidents de
paiement de chèques, ainsi que les infractions prévues à l'art 318
 Le tiré qui contrevient aux règles de l'opposition régulière, - qui
ne remet pas un certificat de refus de paiement, - qui remet des
formules de chèque à un client sous interdiction bancaire ou
judiciaire, - qui n'a pas envoyé une lettre d'injonction demandant
la restitution des formules de chèques.

4- Le faux en matière de chèque


- L'art 316 ne se limite pas à incriminer la seule falsification ou
contrefaçon du chèque, mais il étend l'incrimination à :
- à l'usage ou la tentative d'usage d'un chèque contrefait ou falsifié
et à l'acceptation, l'endossement ou l'aval d'un chèque contrefait ou
falsifié.
- Les sanctions sont celles de l'art 316, en outre le juge peut
prononcer les mesures de confiscation et de destruction.

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5- Le faux en matière de cartes bancaires
- La falsification des cartes bancaires est également incriminée par
le code de commerce par l’art 331, qui renvoie en ce qui
concerne les sanctions aux peines de l’art 316.

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PII : Les sanctions applicables aux dirigeants
des entreprises en difficultés

- Après la loi 73.17 promulguée par le dahir du 19 avril 2018 c’est


le Titre VII du Livre V du code de commerce qui traite des
différentes sanctions qui peuvent être appliquées, lorsqu'il
s'avère que les dirigeants de l'entreprise sont responsables de ses
déboires et qui ont du fait de leur mauvaise gestion entraîné
l'entreprise vers le redressement judiciaire ou la liquidation
judiciaire (art 736 à 760). Auparavant c’était le Titre V qui
s’étalait de l’article 702 à 727).

- Le titre VII traite trois types de sanctions, à savoir : les sanctions


patrimoniales, la déchéance commerciale considérées comme
des sanctions de nature civile et la banqueroute considérée
comme un délit sanctionné pénalement.

- L’art 736 détermine les différents dirigeants visés par les


sanctions figurant dans les trois chapitres. Il s'agit des dirigeants
de l'entreprise individuelle ou à forme sociale ayant fait l'objet
d'une procédure, qu'ils soient de droit ou de fait, rémunérés ou
non rémunérés.

- Les sanctions patrimoniales et la déchéance commerciale sont


prononcées par le tribunal de commerce, qui a ouvert la
procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire
(art 737). Quant au délit de banqueroute, il relève de la
compétence du tribunal de première instance.

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A- Les sanctions patrimoniales

1- L'action en comblement de l'insuffisance d'actif

- Elle est prévue à l'art 738. Elle n'est applicable qu'aux dirigeants
des sociétés commerciales, qui font l'objet d'une procédure de
traitement.
- Ainsi, en cas de redressement ou de liquidation judiciaire, si
l'actif dégagé pour rembourser les créanciers s'avère insuffisant,
du fait de la gestion catastrophique du dirigeant, le tribunal soit
de son propre chef, soit sur demande du syndic représentant les
créanciers, peut ordonner qu'une partie ou l'ensemble de cette
insuffisance d'actif sera supporté par le dirigeant et devra être
comblé à partir de son patrimoine propre.
- Il s'agit ici de responsabiliser les dirigeants en cas de mauvaise
gestion de leur part. Mais cette action ne peut être mise en œuvre
que si on arrive à démontrer la mauvaise gestion effective des
dirigeants, laquelle n'a pas permis de rembourser intégralement
les créanciers.

2- L'action en extension de la procédure

- Cette action va entraîner l'extension de la procédure de RJ ou de


LJ au patrimoine du dirigeant. Ce qui veut dire qu'en plus du
patrimoine de l'entreprise on va rajouter le patrimoine du
dirigeant et le tout sera soumis au RJ ou à la LJ. Les créanciers
vont ainsi avoir plus de surface financière pour être remboursés.
Cette procédure est prévue dans deux situations :
- La première est envisagée par l'art 739, qui oblige le tribunal à la
prononcer lorsque le dirigeant ne s'est pas acquitté de la part qui
a été mise à sa charge dans le cadre d'une action en comblement
de l'insuffisance d'actif.
- La deuxième concerne des situations de fautes caractérisées
commises par les dirigeants et qui sont mentionnées par la loi.
Ainsi le tribunal se trouve obligé de prononcer l'extension de la
procédure dans l'un des sept cas prévus par l'art 740 et qui se
présentent comme suit :

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1. Avoir disposé des biens de la société comme les siens propres ;
2. Sous le couvert de la société masquant ses agissements, avoir
fait des actes de commerce dans un intérêt personnel ;
3. Avoir fait des biens et du crédit de la société un usage contraire à
l'intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une
autre entreprise, dans laquelle il était intéressé directement ou
indirectement ;
4. Avoir poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une
exploitation déficitaire, qui ne pouvait que conduire à la
cessation des paiements de la société ;
5. Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des
documents comptables de la société ou s'être abstenu de tenir
toute comptabilité conforme aux règles légales ;
6. Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif ou
frauduleusement augmenté le passif de la société ;
7. Avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou
irrégulière.

Selon l'art 744, les condamnations aux sanctions patrimoniales sont


inscrites au registre de commerce et publiées par extrait dans un
JAL et au BO. Elles sont également affichées au tableau du
tribunal.

B- La déchéance commerciale

 Elle est prononcée par le tribunal de commerce saisi de la


procédure de traitement, à l'égard des dirigeants, des entreprises
individuelles ou des entreprises à forme sociale, qui ont été déjà
condamnés à des sanctions patrimoniales. Le tribunal la
prononce d'office ou sur demande du procureur du Roi, ou bien
sur demande du syndic.
 Les effets principaux de la déchéance commerciale sont prévus à
l'art 750-P1 du code de commerce, qui dispose «la déchéance
commerciale emporte interdiction de diriger, gérer, administrer
ou contrôler directement ou indirectement, toute entreprise

21
commerciale ou artisanale et toute société ayant une activité
économique ».
 La déchéance commerciale peut avoir également des effets
secondaires, qui peuvent être prononcés par le tribunal. Ils
peuvent consister : soit dans l'incapacité d'exercer une fonction
publique élective, soit dans la suspension des droits de vote dans
les assemblées générales, soit dans l'injonction de cession des
titres sociaux, soit dans la cession forcée des titres sociaux (art
750- P2 et P3).
 La déchéance commerciale ne peut être inférieure à cinq ans,
elle cesse de plein droit au terme fixé par le tribunal. Le
jugement qui la prononce doit recevoir publication dans le BO
(art 752).

C- La pénalisation de la banqueroute
- Le délit de banqueroute suppose la mauvaise foi du dirigeant qui
vise à priver les créanciers de l'entreprise de leur droit d'être
remboursés. Ce qui dénote d'une volonté de nuisance.
- Le tribunal pénal est saisi soit sur poursuites du ministère public
soit sur constitution de partie civile du syndic.
- Les actes constitutifs de banqueroute sont au nombre de quatre et
ils sont énumérés à l'art 754, qui prévoit qu'en cas d'ouverture
d'une procédure de traitement, sont coupables de banqueroute,
les personnes mentionnées à l'art 736, contre lesquelles a été
relevé l'un des faits ci-après :

1) avoir dans l'intention d'éviter ou de retarder l'ouverture de la


procédure de traitement, soit fait des achats en vue d'une revente au-
dessous du cours, soit employé des moyens ruineux pour se procurer
des fonds ;
2) avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l'actif du débiteur ;
3) avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;
4) avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaître des documents
comptables de l'entreprise ou de la société, ou s'être abstenu de tenir
toute comptabilité lorsque la loi en fait l'obligation.

22
- Le délit de banqueroute est condamné selon l'art 755 d'un à cinq
ans d'emprisonnement et d'une amende de 10.000 à 100.000 DH
ou de l'une de ces deux peines seulement.
- En outre, le juge peut prononcer la déchéance commerciale, à
titre de peine accessoire, si elle n'a pas été déjà prononcée par le
tribunal de commerce (art 756).
- Les peines sont doublées lorsque le banqueroutier est dirigeant
de droit ou de fait d'une société cotée en bourse de valeurs.
- Il faut faire une distinction entre les banqueroutiers de premier
degré et ceux de second degré, c'est à dire ceux qui ne sont pas
des dirigeants et qui peuvent être condamnés par les peines de la
banqueroute.
- Ainsi les complices peuvent écoper des peines de la banqueroute
même s'ils n'ont pas la qualité de dirigeant (art 755).
- Outre les complices, d'autres personnes peuvent être frappées
des peines de la banqueroute. Elles sont mentionnées à l'art 757.
Il s'agit de :

1. Ceux qui ont dans l'intérêt des personnes mentionnées à l'art


702, soustrait, recelé ou dissimulé tout ou partie des biens,
meubles ou immeubles de celle-ci ;
2. Ceux qui ont frauduleusement déclarés dans la procédure,
soit en leur nom, soit par interposition de personne, des
créances fictives.
3. Le créancier qui, après le jugement d'ouverture de la
procédure de RJ ou de LJ, a passé un plusieurs contrats lui
accordant des avantages particuliers au détriment des autres
créanciers ou a fait usage, sans autorisation écrite du
débiteur, des informations prévues aux articles 612 et 619
lors de toute procédure ou action ou auprès de toute autre
partie.

Se trouve puni également des mêmes peines le syndic ayant


commis l'un des faits ci-après :

1) A porté sciemment et de mauvaise foi atteinte aux intérêts


des créanciers, soit en utilisant à des fins personnelles les
sommes perçues dans l'accomplissement de sa mission, soit

23
en attribuant à autrui des avantages qu'il savait n'être pas
dus ;
2) A fait illégalement des pouvoirs qui lui sont dûment
conférés un usage autre que celui auquel ils sont destinés et
contrairement aux intérêts du débiteur ou des créanciers ;
3) A abusé des pouvoirs dont il dispose aux fins d'utiliser ou
d'acquérir pour son compte des biens du débiteur, soit
personnellement soit par personne interposée ;
4) S’être abstenu, en cas de son remplacement, à la passation
de ses missions au nouveau syndic conformément au 2ème
alinéa de l’art 677.

24
CHAPITRE IV :

Les infractions relevant de lois spéciales

PI: Les infractions au droit bancaire


A- Infractions à la réglementation bancaire
La référence dans ce domaine est à puiser dans le dahir du 24
décembre 2014, portant promulgation de la loi n° 103-12 relative aux
établissements de crédit et organismes assimilés. Cette loi vient de
remplacer la loi 34-03 qui était applicable auparavant en vertu du
dahir du 14 février 2006.
La loi 103-12 actuellement en vigueur se compose de 195 articles
répartis sur neuf titres. Elle est quantitativement plus importante que la
loi 34-03, qui ne comportait que 150 articles répartis sur huit titres.

C’est le titre VIII de la loi 103-12 qui traite, dans un chapitre premier
des sanctions disciplinaires (art 172 à 179) soit huit articles, et dans un
chapitre deuxième des sanctions pénales (art 180 à 194) soit 15
articles. Nous examinerons dans un premier temps les sanctions
disciplinaires, pour traiter ensuite les infractions et les sanctions
pénales.

1) Les sanctions disciplinaires

- Elles sont prévues au niveau des articles 172 à 179. Elles sont prises
par l’autorité de tutelle, à savoir Bank El Maghrib, pour non respect de
la réglementation en vigueur.

- Ces sanctions sont cumulables avec d’autres sanctions d'une autre


nature, notamment pénales. Elles visent dans leur grande majorité les
établissements de crédit en tant que personnes morales.

25
- On peut distinguer deux paliers de sanctions prises par le wali de
BAM.

- Le premier palier se compose de :


1- La mise en garde ;
2- L’avertissement ;
3- Les sanctions pécuniaires.

 Les sanctions pécuniaires sont versées par BAM au trésor et ce à


la fin de chaque exercice.
 La liste détaillée des infractions et des sanctions pécuniaires
visées à l’art 173 est fixée par circulaire du wali de BAM, après
avis de la commission de discipline des établissements de crédit.
La sanction pécuniaire est égale au plus au cinquième (1/5) du
capital minimum auquel l'établissement est assujetti.

 Le deuxième palier de sanctions prises par le wali de BAM,


lorsque la mise en garde et l’avertissement demeurent sans effet
peuvent être :
1- La suspension d’un ou plusieurs dirigeants ;
2- L’interdiction ou la restriction de certaines opérations ;
3- La nomination d’un administrateur provisoire ;
4- Le retrait d’agrément.

L’art 179 prévoit, en outre, la possibilité de publication (par tous


moyens) des sanctions disciplinaires infligées.

Par rapport à la loi 34-03 (art 127 à 134), aucun changement notable
n'est à relever ni sur le plan quantitatif ni sur le plan qualitatif.

2) Les infractions pénales

Dans le volet pénal, on relève 15 articles contenant plus d'une


vingtaine d'infractions. Par rapport à loi 34-03, la loi 103-12 a
introduit deux nouveaux articles, à savoir l'art 180 et l'art 181, en
réservant un espace important à la question du secret professionnel.

26
- Le paragraphe 1 de l'art 180 rappelle solennellement que toute
personne participant à un titre ou à un autre aux activités d'un
établissement de crédit ou à un organisme assimilé est absolument
tenue au respect du secret professionnel, sous peine des sanctions
pénales de l'art 446 du code pénal.

- Le paragraphe 2 introduit deux dérogations. La première concerne


les agences de notation pour les besoins de leur activité. La seconde
concerne les personnes avec lesquelles l'établissement de crédit
négocie, conclue ou exécute un certain nombre d'opérations
mentionnées au P2, à condition que ces informations soient
nécessaires pour ces opérations. Les agences de notation et les
personnes en question sont tenues elles même à la confidentialité dans
les mêmes conditions.

- L'art 181 précise que le secret professionnel ne saurait être


opposable :
. A Bank Al Maghrib ;
. A l'autorité judiciaire dans le cadre d'une procédure pénale ;
. A toute autre autorité ressortissante ayant conclu avec le Maroc
une convention bilatérale d'échange d'informations en matière fiscale.

Pour les treize articles qui suivent, les infractions sont calquées sur le
canevas de la loi 34-03, en les synthétisant on peut les présenter
comme suit :

I- Incriminations concernant l’exercice de l’activité bancaire


sans agrément (art 182 ; 183 ; 184)

Ainsi, l'art 182 punit d'un emprisonnement de 3 mois à 1 an et ou une


amende de 20.000 à 200.000 DH :
 L'usage illégal d'une dénomination commerciale, raison sociale,
publicité ou toute expression pouvant faire croire que
l'établissement est agréé en tant qu'établissement de crédit ;
 L'usage de procédés ayant pour objet de créer un doute dans
l'esprit du public sur la catégorie d'établissement.

27
Quant à l'art 183, il punit de 6 mois à 3 ans d'emprisonnement et ou
une amende de 100.000 à 5 millions de DH :
 L'exercice habituel, à titre professionnel, des opérations
bancaires sans être agréé en tant qu'établissement de crédit ;
 Le fait d'effectuer dans un établissement de crédit agréé, des
opérations pour lesquelles il n'a pas été agréé.

Pour l'art 184, il prévoit, en outre, pour les infractions des articles 182
et 183, une mesure de sûreté qui consiste dans la fermeture de
l'établissement et une peine accessoire qui consiste dans la publication
du jugement dans les journaux.

II- Incriminations concernant la violation par les dirigeants


de certaines interdictions (art 185; 186)

L'art 185 prévoit un emprisonnement de 6 mois à 3 ans et ou une


amende de 100.000 à 1.000.000 DH, la violation des interdictions de
l'art 38, concernant des incapacités professionnelles à cause de
condamnations précédentes.

Quant à l'art 186, il punit d'une amende de 100.000 à 1.000.000 DH :


 La violation de l'art 44 concernant les incompatibilités relatives
aux dirigeants à propos du cumul ;
 La peine est applicable à tout actionnaire PP ou PM qui
méconnaît les obligations mentionnées aux articles 93, 94, 95.
(l'art 93 est relatif à la déclaration du seuil de participation égal
ou supérieur à 5% ; l'art 94 est relatif à l'accord de BAM pour
l'acquisition ou la cession de 10%, de 20%, de 30% du capital
social ; l'art 95 est relatif à l'obligation de communication des
informations à BAM).

III- Incriminations concernant la violation par les dirigeants


de l’obligation d’information (art 186; 187; 191)

28
- Le paragraphe 2 de l'art 186 applique les peines précédemment
mentionnées aux dirigeants des PM visées à l'art 81 qui refusent de
communiquer à BAM, les états de synthèse de leurs sociétés (à savoir
les entreprises marocaines qui contrôlent les établissements de crédit).

- Le paragraphe 3 de l'art 186 applique les mêmes peines aux


dirigeants des établissements de crédit qui méconnaissent l'art 84,
concernant l'obligation d'information qui incombe aux dirigeants
relativement au signalement de toute anomalie ou événement grave
survenu dans l'activité ou la gestion d'un établissement de crédit,
susceptible d'en compromettre la situation ou de porter atteinte au
renom de la profession.

 Le paragraphe 4 fait porter l'amende, en cas de récidive, de


200.000 à 2 million de DH.

 Quant à l'art 187, il punit des peines précédentes les dirigeants


des conglomérats financiers et compagnies financières qui ne
procèdent pas à l'établissement ou à la publication des états de
synthèse, ou qui ne transmettent pas à BAM les informations
demandées à l'art 82.

 L'art 191 prévoit la même peine pour tout représentant d'un EC


qui donne sciemment des informations inexactes à BAM.

IV- Incriminations concernant l’intermédiation en matière


bancaire (art 188; 189; 190)

 L'art 188 punit d'une amende de 100.000 à 1.000.000 DH la


violation des dispositions de l'art 161 relatif à l’intermédiation
légale exercée à titre professionnel.
 Quant à l'art 189, il prévoit la même peine pour tout dirigeant
d'une entreprise d’intermédiation qui enfreint l'art 164 relatif à
l'interdiction de cette profession aux personnes désignées à l'art
38 pour des condamnations déjà encourues.

29
 Pour l'art 190, il prévoit un emprisonnement de 3 mois à 1 an et
ou une amende de 100.000 à 1.000.000 DH, pour tout dirigeant
d'une entreprise d’intermédiation qui viole les dispositions de
l'art 166, concernant la justification d'une garantie financière
spécialement affectée à la restitution de ces fonds (donnée par un
EC ou une compagnie d'assurance).

V- Incriminations concernant le contrôle des établissements


de crédit par les commissaires aux comptes (art 194)

Cet article revoie aux articles 404 et 405 de la loi 17-95 sur les S.A,
portant des incriminations et des sanctions relatives au contrôle de ces
sociétés.

Ci- après les dispositions du renvoi :

Dahir du 30 août 1996 portant promulgation de la loi 17-95


relative aux S.A
 Art 404 de la loi sur les SA : « Sera puni d'un emprisonnement
de 1 à 6 mois et d'une amende de 8.000 à 40.000 DH, toute
personne qui, soit en son nom personnel, soit au titre d'associé
dans une société de commissaires aux comptes, aura sciemment,
accepté, exercé ou conservé les fonctions de commissaire aux
comptes nonobstant les incompatibilités légales »
 Art 405 de la loi sur les SA: «Sera puni d'un emprisonnement de
6 mois à 2 ans et d'une amende de 10.000 à 100.000.DH ou de
l'une de ces deux peines seulement, tout commissaire aux
comptes qui, soit en son nom personnel, soit au titre d'associé
dans une société de commissaires aux comptes, aura sciemment,
donné ou confirmé des informations mensongères sur la situation
de la société ou qui n'aura pas révélé aux organes
d'administration, de direction ou de gestion les faits lui
apparaissant délictueux, dont il aura eu connaissance à l'occasion
de l'exercice de ses fonctions.
L'art 446 du code pénal est applicable aux commissaires aux
comptes »

30
-Art 160 de la loi sur les SA : « Nul ne peut exercer les fonctions de
commissaire aux comptes s'il n'est pas inscrit au tableau de l'ordre des
experts-comptables »

-Art161 de la loi sur les SA : « Ne peuvent être désignés comme


commissaires aux comptes :
1) les fondateurs, apporteurs en nature, bénéficiaires d'avantages
particuliers, ainsi que les administrateurs, les membres du conseil de
surveillance ou du directoire de la société ou de l'une de ses filiales ;
2) les conjoints, parents et alliés jusqu'au 2ème degré inclusivement
des personnes visées au paragraphe précédent ;
3) ceux qui reçoivent des personnes visées au paragraphe 1 ci-dessus,
de la société ou de ses filiales, une rémunération quelconque à raison
de fonctions susceptibles de porter atteinte à leur dépendance ;
4) les sociétés d'experts-comptables dont l'un des associés se trouve
dans des situations prévues aux paragraphes précédents.
Si l'une des causes d'incompatibilité ci-dessus indiquées survient en
cours de mandat, l'intéressé doit cesser immédiatement d'exercer ses
fonctions et informer le conseil d'administration ou le conseil de
surveillance, au plus tard 15 jours après la survenance de cette
incompatibilité »

-Art 162 de la loi sur les SA: «Les commissaires aux comptes ne
peuvent être désignés comme administrateurs, directeurs généraux ou
membres du directoire des sociétés qu'ils contrôlent qu'après un délai
minimum de 5 ans, à compter de la fin de leurs fonctions. Ils ne
peuvent, dans ce même délai, exercer lesdites fonctions dans une
société détenant 10% ou plus du capital de la société dont ils
contrôlent les comptes.
Les personnes ayant été administrateurs, directeurs généraux,
membres du directoire d'une S.A ne peuvent être désignés
commissaires aux comptes de cette société dans les 5 années au moins
après la cessation de leurs fonctions. Elles ne peuvent, dans ce même
délai, être désignées commissaires aux comptes dans les sociétés
détenant 10% au plus du capital de la société dans laquelle elles
exerçaient lesdites fonctions »

31
3) Les sanctions pénales

A ce niveau, on retient les observations suivantes :


- L’emprisonnement varie généralement de 3 mois à 3 ans, aucun
changement n'a été opéré par rapport à la loi 34-03.
- Quant aux amendes se situant dans la loi 34-03 entre 10.000 et 1
million de DH, elles passent dans la loi 103-12 à un minimum de
100.000 DH et un maximum de 2 millions de DH.
- Les peines accessoires utilisées sont la fermeture de
l’établissement et la publication du jugement ;
- Les peines prévues visent les seules personnes physiques ;
- La récidive est spéciale, elle est limitée à 1an ;
- Les poursuites sont subordonnées à la plainte ou à la constitution
en tant que partie civile de BAM ou du GPBM.

B- Le blanchiment de capitaux

32
C’est la loi 43-05 promulguée par le dahir du 17 avril 2007, intitulée
loi relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux, qui s’impose
en la matière.
Cette loi a été modifiée, en profondeur par la loi 13-10, promulguée
par le dahir du 20 janvier 2011. Et complétée par la loi 145-12
promulguée par le dahir du 2 mai 2013. La loi 43-05 a été largement
revisitée par la nouvelle loi 12-18 promulguée par le dahir du 08 juin
2021.
La loi 43-05 s’inscrit dans la logique de la lutte contre la criminalité
organisée et la lutte contre le financement du terrorisme. Elle consacre
les recommandations du GAFI et les engagements internationaux du
Maroc (Convention de Palerme sur la CTO).
Dans sa version originale, cette loi se composait de 38 articles répartis
sur quatre chapitres. C'est son premier chapitre qui a été intégré au
code pénal, à la suite de l'art 574.

1) Les dispositions pénales

La loi 43-05 vient de rajouter à la suite de l'art 574 du code pénal une
section VI bis composée de l'article 574-1 à l'article 574-7. Ces
articles traitent de ce qui suit :
 L'art 574-1 énumère les différents faits pouvant être considérés
comme constitutifs de blanchiment de capitaux. Il s'agit d'une
énumération très large englobant plusieurs faits. La version
consolidée de cet article se présente comme suit :

« Constituent un blanchiment de capitaux les actes ci-après, lorsqu'ils


sont commis intentionnellement et en connaissance de cause :
- Le fait d'acquérir, de détenir ou d'utiliser des biens ou leurs
produits dans l’intérêt de l’auteur ou d’autrui, sachant qu’ils
sont le produit de l’une des infractions prévues à l’article 574-2
ci-dessous ;
- Le fait de convertir, de transférer ou de transporter des biens ou
leurs produits dans l’intérêt de l’auteur ou d’autrui sachant
qu’ils sont les produits de l’une des infractions prévues à
l’article 574-2 ci-dessous ;

33
- Le fait de dissimuler ou de déguiser la nature véritable,
l'origine, l'emplacement, la disposition, le mouvement ou la
propriété des biens ou des droits y relatifs dans l’intérêt de
l'auteur ou d’autrui, sachant qu'ils sont les produits de l'une des
infractions prévues à l'art 574-2 ci-dessous ;
- Le fait d'aider toute personne impliquée dans la commission de
l'une des infractions prévues à l'art 574-2 ci-dessous à échapper
aux conséquences juridiques de ses actes ;
- Le fait de faciliter, par tout moyen, la justification mensongère
de l'origine des biens ou des produits de l'auteur de l'une des
infractions visées à l'art 574-2 ci-dessous, ayant procuré à
celui-ci un profit direct ou indirect ;
- Le fait d'apporter un concours ou de donner des conseils à une
opération de garde, de placement, de dissimulation, de
conversion, de transfert ou de transport du produit direct ou
indirect, de l'une des infractions prévues à l'art 574-2 ci-dessous
- Le fait de tenter de commettre les actes prévus au présent
article ».

 Étant une infraction de conséquence comme le recel, le


blanchiment de capitaux doit se baser préalablement sur des faits
délictueux ou criminels relevant d'une infraction d'origine. A cet
effet, l'art 574-2 détermine différentes infractions considérées
comme pouvant être une infraction d'origine, justifiant des
poursuites pour blanchiment de capitaux.
 Dans la version originale de la loi 43-05, elles étaient au nombre
de 7, elles sont passées par la suite à 24 dans la version de la loi
13-10, et à 27 infractions sous-jacentes dans la version de la loi
12-18.
 Il s’agit des infractions suivantes, même si elles étaient
commises à l’étranger :

1) le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes ;


2) le trafic d'êtres humains ;
3) le trafic d'immigrants ;
4) le trafic illicite d'armes et de munitions ;

34
5) la corruption, la concussion, le trafic d'influence et le
détournement de biens publics et privés ;
6) les infractions du terrorisme ;
7) la contrefaçon ou la falsification des monnaies ou effets de crédit
public ou d'autres moyens de paiement.

Dans la version de la loi 13-10, la liste a été allongée pour comprendre


les infractions suivantes :

8) l'appartenance à une bande organisée, formée ou établie dans le


but de préparer ou de commettre un ou plusieurs actes de terrorisme ;
9) l'exploitation sexuelle ;
10) le recel de choses provenant d'un crime ou d'un délit ;
11) l'abus de confiance ;
12) l'escroquerie ;
13) les infractions portant atteinte à la propriété industrielle ;
14) les infractions portant atteinte aux droits d'auteur et aux droits
voisins ;
15) les infractions contre l'environnement ;
16) l'homicide volontaire, les violences et voies de fait volontaires ;
17) l'enlèvement, la séquestration et la prise d'otages ;
18) le vol et l'extorsion ;
19) la contrebande ;
20) la fraude sur les marchandises et sur les denrées alimentaires ;
21) le faux, l'usage de faux et l'usurpation ou l'usage irrégulier de
fonctions, de titres ou de noms ;
22) le détournement, la dégradation d'aéronefs ou de navires ou de
tout autre moyen de transport, la dégradation des installations de
navigations aérienne, maritime et terrestre ou la destruction, la
dégradation ou la détérioration des moyens de communication ;
23) le fait de disposer dans l'exercice d'une profession ou d'une
fonction, d'informations privilégiées en les utilisant pour réaliser ou
permettre sciemment de réaliser sur le marché une ou plusieurs
opérations ;
24) l'atteinte aux systèmes de traitement automatisé des données ;

La loi 12-18 vient de rajouter trois autres infractions d’origine :

35
25) la diffusion d’informations fausses ou trompeuses sur les
instruments financiers et les perspectives de leur évolution ;
26) le recours à des manœuvres sur le marché des instruments
financiers ayant pour objet d’agir sur les cours ;
27) la vente ou la fourniture de services de façon pyramidale ou par
toute autre méthode similaire.

 L'art 574-3 prévoit une peine d'emprisonnement de 2 à 5 ans et


une amende de 50.000 à 500.000 DH pour les personnes
physiques et se contente d'employer la jonction (et). Cet article
vise également les personnes morales avec une amende de
500.000 à 3 millions de DH et précise, en outre, que la tentative
est punissable.
 L'art 574-4 dispose que les peines sont doublées, en cas de
facilitation du délit par la profession et en cas d'habitude ou de
récidive. La récidive est spéciale, elle est de 5 ans.
 L'art 574-5 propose plusieurs peines accessoires et mesures de
sûreté, susceptibles d'être utilisées par le juge. Dissolution de la
personne morale et publication de la décision, ainsi que la
confiscation totale des produits de l’infraction et l’interdiction
d’exercice d’une profession, activité ou art.
 L'art 574-6 précise que selon les cas, les peines peuvent être
étendues aux dirigeants et aux préposés des personnes morales
impliquées.
 L'art 574-7 fait bénéficier les personnes susceptibles d'être
poursuivies, lorsqu'elles dénoncent une tentative de blanchiment
de capitaux, d'une excuse absolutoire, qui leur permet d’être
exemptées de la sanction.

2) Les mécanismes de prévention

La prévention du blanchiment de capitaux s'adresse à ce que la loi


qualifie de personnes assujetties. La liste de ces personnes assujetties
est arrêtée par l'art 2 du chapitre II de la loi 43-05, qui dispose selon la
version de la loi 12-18 :

36
« Sont assujetties aux dispositions du présent chapitre les personnes
physiques et les personnes morales de droit public ou de droit privé,
désignées ci-après :
1. Bank Al Maghrib ;
2. Barid Al Maghreb
3. Les établissements de crédit et organismes assimilés ;
4. Les sociétés holding offshore ;
5. Les conglomérats financiers ;
6. Les sociétés de change de devises ;
7. Les entreprises d'assurance et de réassurance, les agents et
courtiers d’assurance ainsi que toute entité autorisée à offrir
des opérations d’assurance de même que les établissements qui
gèrent un régime obligatoire ou facultatif de retraite offrant la
possibilité de paiement exceptionnel et libre des cotisations, et
la caisse nationale de retraites et d’assurances au titre des
assurances autorisées ;
8. Les sociétés de gestion des organismes de placement collectif
en valeurs mobilières, les sociétés de gestion de placement
collectif en capital, les établissements gestionnaires de fonds de
placement collectif en titrisation et les sociétés de gestion des
organismes de placement collectif immobilier ;
9. Les sociétés de bourse et les conseillers en investissement
financier ;
10. Les teneurs de comptes titres ;
11. Les experts-comptables et les comptables agréés ;
12. Les avocats, notaires et adouls ;
13. Les casinos, y compris les casinos sur internet ou installés
à bord des navires et les établissements de jeux de hasard ;
14. Les agents immobiliers ;
15. Les négociants en métaux et pierres précieux ;
16. Les commerçants d’antiquité et d’œuvres d’art ;
17. Les prestataires de services aux sociétés, qui interviennent
dans leur création, leur organisation et leur domiciliation ».

La loi 43-05 a mis à la charge des personnes assujetties, et à leur tête


les banques trois obligations qui sont de nature à prévenir les risques
de blanchiment de capitaux. Il s'agit de l'obligation de vigilance, de
l'obligation de veille interne, ainsi que de la déclaration de soupçon.

37
a- L'obligation de vigilance : Les banques sont tenues de
recueillir tous les éléments d'information permettant
l'identification de leur clientèle habituelle ou occasionnelle,
notamment avant l'ouverture des comptes. Une série
d'informations sont à vérifier, entre autres se renseigner sur
l'origine des fonds.
L'art 8 ordonne aux banques de procéder à un examen particulier de
toute opération douteuse, de se renseigner sur l'origine, la destination
des sommes et l'identité des bénéficiaires et de consigner dans un
document les caractéristiques de l'opération. La loi ordonne également
la conservation des documents pendant dix ans.

b- La déclaration de soupçon : les banques sont tenues de faire


une déclaration de soupçon concernant :
 Les sommes ou opérations soupçonnées d'être liées au
blanchiment de capitaux ;
 Les opérations dont l'identité du donneur d'ordre ou du
bénéficiaire est douteuse.
Les indications à porter et le montant minimum sont fixés par l'ANRF.
Celle-ci doit recevoir l'identité des personnes habilitées à effectuer les
déclarations de soupçon et assurer la liaison avec elle.
La procédure de déclaration de soupçon est écrite, sauf cas d'urgence.

c- L'obligation de veille interne : La loi ordonne aux banques de


mettre en place un dispositif interne de vigilance, de détection et
de surveillance, permettant de respecter les obligations légales.
Ainsi les personnes habilitées à faire la déclaration de soupçon
ont pour tâches de :
 Centraliser les informations recueillies sur les opérations à
caractère inhabituel ou complexe ;
 Tenir leurs dirigeants informés, par écrit, sur les opérations
effectuées par les clients présentant un profil de risque élevé.
Les banques en tant que personnes assujetties sont tenues de
communiquer à l’’ANRF (ex UTRF) et à leurs autorités de
supervision et de contrôle tous les documents et les renseignements

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nécessaires à l'accomplissement de leur mission, sans pouvoir opposer
le secret professionnel.

3) L’Autorité Nationale du Renseignement Financier

Cette unité appelé auparavant Unité de Traitement du Renseignement


Financier (UTRF), qui est rattachée au premier ministre a de
nombreuses missions en matière de lutte contre le blanchiment de
capitaux.
Il lui revient entre autres de recueillir et de traiter les informations
relatives au blanchiment de capitaux et de décider de la suite à leur
réserver ; d'ordonner des enquêtes et des investigations et de donner
des avis en la matière.
L’Unité a également le pouvoir de s'opposer à l'exécution de toute
opération qui a fait l'objet d'une déclaration de soupçon.
Lorsque l'Unité constate des infractions de blanchiment de capitaux,
elle saisit le procureur du Roi auprès de la TPI de Rabat.
Le procureur du Roi ou bien le juge d'instruction, peut pendant la
phase d'enquête ou d'instruction ordonner :
 Le gel temporaire des biens
 La saisie des biens liés au blanchiment de capitaux

L’Unité peut demander le concours des administrations, des


établissements ou d'autres personnes morales de droit public.
L’Unité peut également échanger des renseignements avec les
autorités étrangères sur la base de conventions internationales ou de la
réciprocité.

4) La protection du personnel

Les personnes assujetties comme les banques bénéficient, quant à


leurs dirigeants et agents d'une immunité contre le recours à l'art 446
du code pénal, en ce qui concerne la violation du secret professionnel,
lorsque la déclaration est faîte de bonne foi. De même, elles sont
protégées contre l'accusation pénale de dénonciation calomnieuse.
Sur le plan civil, on écarte à leur égard, toute responsabilité civile, en
vue de la réparation du dommage causé.

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Quant aux dirigeants et agents de l'Unité, eux aussi jouissent d'une
protection sur le plan civil et sur le plan pénal.
C'est aussi le cas en ce qui concerne les autorités de contrôle et de
supervision des personnes assujetties.

Sur un autre registre, la loi menace les personnes assujetties qui


manquent à leurs devoirs d'une amende disciplinaire allant de 100.000
à 500.000. DH.
En cas de connivence avec la personne impliquée dans le blanchiment
de capitaux, l'agent de la banque risque de s'exposer à des sanctions
pénales.
En cas de constatation de manquements aux obligations légales,
l'Unité saisit l'autorité de contrôle ou bien le procureur du Roi, en
fonction des situations.

5) Autres dispositions

Tout ce dispositif légal est valable en ce qui concerne le blanchiment


de capitaux en faveur du terrorisme. La loi a d'ailleurs réservé un
chapitre à part à ce sujet.
En vue de faciliter la coopération internationale, des renvois sont faits
aux articles 595-6, 595-7 et 595-8 relatifs au financement du
terrorisme dans le code de procédure pénale.
Il faut signaler ici, que les décisions qui sont prises par l'ANRF sont
considérées comme des décisions administratives et donc susceptibles
de recours devant le tribunal administratif.
Enfin, le dernier article de la loi (selon la version initiale) prévoit une
dérogation procédurale, en donnant compétence pour les infractions
du blanchiment de capitaux au seul tribunal de Rabat. Mais la loi 12-
18 vient d’étendre la compétence aux juridictions de Casablanca,
Marrakech et Fès.

C- Le financement du terrorisme

Le financement du terrorisme constitue une infraction parmi les


infractions du terrorisme. Il a été prévu au départ dans la loi 03-03

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relative à la lutte contre le terrorisme, qui a été promulguée par le
dahir du 28 mai 2003, à la suite des attentats du 16 mai 2003 à
Casablanca. Par la suite, une partie de la loi a été incorporée au code
pénal s'étalant sur les articles 218-1 à 218-9. Le financement du
terrorisme a été prévu à l'art 218-4. Cet article a été enrichi à maintes
reprises, notamment à travers la loi 13-10, et par la loi 145-12.

1) Les faits incriminés

Une grande diversité caractérise les actes incriminés. Ainsi selon la


dernière version de l'art 218-4 :

« Le financement du terrorisme constitue un acte de terrorisme.


Constituent un financement du terrorisme, les actes ci-après, même
lorsqu'ils sont commis hors du Maroc et que les fonds aient été
utilisés ou non ;
Le fait de fournir, de procurer, de réunir ou de gérer délibérément,
par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, des
fonds ou des biens, même licites, dans l'intention de les voir utilisés
ou en sachant qu'ils seront utilisés, en tout ou en partie :
 En vue de commettre un ou plusieurs actes de terrorisme, que
l'acte soit commis ou non ;
 Par une personne terroriste ;
 Ou par un groupe, une bande ou une organisation terroriste ;
Le fait d'apporter un concours ou de donner des conseils à cette fin ;
Le fait de tenter de commettre les actes précités »

2) Les sanctions applicables

Ces sanctions ciblent aussi bien les personnes physiques que les
personnes morales. Certaines circonstances aggravantes spécifiques
ont été prévues par la loi. Ainsi, selon l'art 218-4 :

« Les infractions visées au présent article sont punies :


 Pour les personnes physiques de 5 à 20 ans de réclusion et d'une
amende de 500.000 à 2 millions de DH ;

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 Pour les personnes morales, d'une amende d'un million à 5
millions de DH, sans préjudice des peines qui pourraient être
prononcées à l'encontre de leurs dirigeants ou agents impliqués
dans les infractions.
La peine est portée à 10 ans et à 30 ans de réclusion et l'amende au
double :
 Lorsque les infractions sont commises en utilisant les facilités
que procure l'exercice d'une activité professionnelle ;
 Lorsque les infractions sont commises en bande organisée ;
 En cas de récidive ».

Quant à l'art 218-7, il prévoit :

« Lorsque l'auteur est une personne morale, la dissolution de la


personne morale ainsi que les deux mesures de sûreté prévues à l'art
62 du code pénal doivent être prononcées sous réserve des droits
d'autrui ».

La loi 13-10 vient rajouter au code pénal deux autres articles.


L'art 218-4-1, qui dispose :

« En cas de condamnation pour une infraction de financement du


terrorisme ou pour une infraction du terrorisme, la confiscation totale
des choses, objets et biens qui ont servi ou devaient servir à
l'infraction ou qui en sont le produit ou de la valeur équivalente
desdits choses, objets, biens ou produits doit être prononcée, sous
réserve des droits des tiers de bonne foi ».

L'art 218-4-2 qui a été reformulé par la loi 12-18, quant à lui dispose :

« Pour l'application des dispositions des articles 218-4 et 218-4-1 de


la présente loi, on entend par :
 Produits : tous biens provenant, directement ou indirectement
de l'une des infractions prévues aux articles précités ;
 Biens : tous types de fonds, d'avoirs ou de ressources
économiques, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles,
divis ou indivis, et toutes leurs annexes, y compris les fruits ou

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les produits qu’ils génèrent ainsi que ce qui s’y unit ou s’y
incorpore par accession, de même que les actes ou documents
juridiques attestant la propriété de ces biens ou des droits qui
s’y rattachent, quel qu’en soit le support, y compris sous forme
électronique ou numérique ».

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