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Introduction générale

I- LA REALITE DU PHENOMENE CRIMINEL :

Le phénomène criminel est un fait inhérent au groupe social et à la nature humaine.


Dans le temps, il remonte aux origines de l’humanité. Dans l’espace, aucun pays n’y échappe.
Il se présente comme un phénomène social humain.

Le phénomène criminel est un fait social en ce sens qu’il apparait comme la violation
par un individu d’une règle sociale prévue par le Droit. Contre ce comportement qui porte
atteinte aux valeurs dont elle entend se garder l’existence, la société réagit en frappant l’auteur
de la violation d’une sanction. Mais rien ne lui interdit d’écarter l’application d’une peine pour
retenir contre l’individu auteur de l’acte interdit, des mesures pour l’avenir à empêcher ou du
moins à réduire le phénomène criminel.

Fait social, le phénomène criminel est notamment un phénomène humain. L’auteur de


la violation est un individu et on ne doit pas perdre de vue cette question. Il convient même de
prendre en considération cet aspect lorsqu’on veut apprécier la responsabilité de cet individu.
Pour prononcer une sanction à son encontre, il est nécessaire de connaitre sa personnalité et son
milieu social. Tout ceci montre que pour comprendre le phénomène criminel, on ne doit pas se
limiter aux seules sciences juridiques. Il faut faire une place aux disciplines non juridiques.

II- LES SCIENCES JURIDIQUES ET LES DISCIPLINES NON JURIDIQUES  :

Elles doivent être définies puis envisagées dans les rapports qu’elles entretiennent avec
les autres branches du droit.

A- La définition des sciences juridiques :

Les sciences juridiques sont regroupées sous le vocable de Droit Criminel ou de Droit
Pénal. Bien que les termes diffèrent, puis que les premiers mettent l’accent sur le crime, les
seconds sur la sanction, ils sont considérés comme des synonymes et désignent les uns et les
autres l’ensemble des règles du Droit déterminant les infractions et les sanctions. A l’intérieur
du Droit Pénal et du Droit Criminel on peut faire les sous distinctions suivantes :

1- Le Droit Pénal Général :

C’est la matière qui étudie les règles communes à toutes les infractions ainsi que les
règles communes de fixation des peines.

2- Le Droit Pénal Spécial :

Il définit les comportements interdits par la loi et les sanctions qui leurs sont attachées
(étude détaillée des différentes infractions).

3- La Science Pénitentiaire :

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Elle donne un éclairage sur les sanctions et les modes d’exécution.

4- La Procédure Pénale :

Elle étudie les juridictions répressives et les règles de conduites du procès devant ces
juridictions.

B- Les rapports du Droit Pénal ou du Droit Criminel avec les autres branches du
Droit :

Le Droit Pénal entretient des rapports de dépendance étroite avec les autres branches
du Droit, ce qui ne l’empêche pas d’être autonome.

1- Les rapports de dépendance étroite :

Le Droit Pénal ou Droit Criminel entretient des rapports de dépendance étroites avec
les autres branches du droit en ce sens qu’il vient renforcer ces autres branches en sanctionnant
l’inobservation de certaines règles. C’est ainsi par exemple qu’il renforce le Droit civil en
décidant que l’inobservation de propriété mobilière peut sous certaines conditions être
constitutive d’un vol. Et il de même avec toutes les branches du droit. Aussi a-t-on pu dire qu’il
n’existerait pas un Droit Pénal uniforme, mais un droit protéiforme se dissolvant en quelque
sorte dans chacune des branches du droit qu’il vient renforcer. C’est sans doute aller trop loin ;
le droit pénal a une unité profonde qui en fait une discipline autonome.

2- L’autonomie du Droit Pénal :

Parmi les diverses disciplines juridiques le droit pénal occupe une place originale.
Rattachable au droit privé parce que le crime met en présence deux particuliers, le délinquant et
la victime ; et au droit public parce que le crime fait intervenir l’état. Le droit pénal est avant
tout une discipline autonome, c’est un droit à la fois sanctionnateur et normatif.

a- Le droit pénal est un droit normatif :

Le droit pénal ne réprime pas tous les comportements humains, mais uniquement les
agissements qui portent atteinte à l’ordre public et à la morale sociale. En procédant ainsi le
droit pénal impose indirectement des règles éthiques c'est-à-dire des règles fondamentales qui
peuvent être négatives (exemple : ne pas tuer, ne pas voler…) ou positives (exemple :
obligation de porter secours à une personne en danger…). Autrement dit, le droit pénal donne
force à la loi, à des règles morales considérées comme essentielles pour la société.

b- Le droit pénal est un droit sanctionnateur 

Le droit pénal est sanctionnateur car sa mission est d’assurer au moyen des sanctions
qui lui sont propres le respect des règles posées par les autres branches du droit. Le droit pénal
serait en quelque sorte le gendarme du droit.

C- Les disciplines non juridiques 

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Il est évident que de nombreuses disciplines non juridiques sont susceptibles
d’intéresser le droit pénal, comme par exemple la morale, la métaphysique, la psychologie, la
sociologie, la médecine… Deux d’entre elles présentent un intérêt immédiat pour la matière
criminelle. Il s’agit de la Criminalistique et de la Criminologie.

1- La Criminalistique 

Elle regroupe une série de discipline scientifique qui concoure à la constatation


matérielle des infractions et à l’indentification de leurs auteurs. La Criminalistique comprend
trois branches : la médecine légale, la toxicologie et la police scientifique.

a- La médecine légale 

Elle a pour objet la connaissance des causes du décès ou d’une agression par un
examen du corps humain.

b- La toxicologie :

La toxicologie ou science des poisons vise à savoir si le produit administré était ou


non de nature à donner la mort.

c- La police scientifique :

Elle s’attache aux circonstances de l’infraction par un examen des traces laissées par le
délinquant. C’est grâce aux applications de la police scientifique que l’on peut identifier des
cheveux et des empreintes digitales.

2- La Criminologie :

Elle donne un éclairage sur la personne du criminel, les causes de sa criminalité et les
moyens d’y remédier.

III- LES SOURCES DU DROIT PENAL :

Trois codes ont été publiés depuis l’indépendance :


 La loi 65-60 du 21 Juillet 1965 portant CODE PENAL dans ce texte on
peut trouver les crimes et les délits ;

 Le décret N° 65-557du 21 Juillet 1965 portant CODE DES


CONTRAVENTIONS ;
 La loi 65-61 du 21 Juillet 1965 portant CODE DE PROCEDURE
PENAL.

En dehors de ces textes à caractère général, on peut noter l’existence des divers textes
spéciaux comme le CODE DES DOUANES, le CODE FORESTIER…

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IV- CONTENU ET PLAN DU COURS :

Le Droit Pénal Général est la branche du droit qui regroupe les principes
fondamentaux du droit pénal. Les règles qu’il contient déterminent de façon abstraite et général
les conditions et les conséquences de la responsabilité pénale. Ces règles on peut les trouver
dans le Code Pénal et dans le Code des contraventions.
On ne trouve ni dans le Code Pénal ni dans le Code des Contraventions une définition
générale de l’infraction, mais seulement des définitions particulières à propos de telle ou telle
infraction retenue par ces codes. Il est toutefois assez facile d’avoir une vue synthétique et
juridique de l’infraction. On peut définir l’infraction comme une action ou omission humaine
prévue et punie par la loi pénale. Cette définition appelle de notre part deux remarques.
En premier lieu, les mots crimes et délits servent toujours à désigner l’infraction mais
ils ont un sens très restreint car ils visent une catégorie spécifique d’infraction si bien qu’il est
préférable de réserver le terme générique d’infraction à la perception globale du phénomène
criminel.
En second lieu, il est naturel de comparer l’infraction pénale au délit civil qui au sens
de l’article 118 DU Code des Obligations est “tout fait quelconque de l’homme qui cause à
autrui un dommage…“. Les différences qui opposent les deux concepts sont de deux ordres :
 Premièrement : l’infraction pénale en vertu du principe de la légalité criminelle
ne se conçoit pas sans un texte incriminateur. Au contraire le délit civil oblige
son auteur à le réparer dès qu’il y a fait dommageable même si aucun texte na
prévu spécialement ce fait.
 Deuxièmement : l’infraction pénal peut exister indépendamment de tout
dommage. On peut citer à titre d’exemple la Mendicité, le Vagabondage… Ce
qui est impensable pour le délit civil.
 Troisièmement : l’infraction pénale entraine contre son auteur l’application
d’une sanction. Celle-ci peut être une peine ou une mesure de sûreté, au
contraire le délit civil entraine au profit de la victime la réparation du préjudice
subit.

La responsabilité pénale est l’obligation pour une personne de subir les conséquences
pénales de ses actes. Elle exige une faute spécifique à savoir l’infraction (TITRE I). Elle pèse
sur les participants à cette infraction (TITRE II) et les conduit à subir une sanction (PARTIE
III).

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TITRE I : L’INFRACTION PENALE :
LES CLASSIFICATIONS DES INFRACTIONS PENALES

La commission d’une infraction pénale est l’effet générateur de la responsabilité pénale.


Pour examiner les différentes classifications des infractions pénales il convient d’étudier la
classification fondamentale du code Pénal, la classification tirée de la nature des infractions et
celle fondée sur le mode d’exécution des infractions.

Chapitre I : LA CLASSIFICATION FONDAMENTALE DU CODE PENAL

C’est la classification des infractions en crime, délit et contravention. On étudiera


successivement les critères et les intérêts de la classification.

Section 1 : Le critère de la classification 

Le critère retenu est la gravité de la peine. Il convient de présenter cette question


avant de voir ses applications et les difficultés qu’elle soulève.

Paragraphe 1 : La gravité de la peine : critère de la classification 

L’article 1er du Code Pénal dispose : “l’infraction que les lois punissent de peines de
police est une contravention. L’infraction que les lois punissent de peines correctionnelles
est un délit. L’infraction que les lois punissent d’une peine afflictive ou infamante est un
crime“. Il ressort de la lecture de ce texte que les infractions sont classées suivant la gravité de
la peine qui leur est attachée en Crime, Délit et Contravention.

En effet, si l’infraction est punie d’une peine criminelle c’est-à-dire d’une peine
afflictive ou infamante, il s’agit d’un crime. Les peines afflictives ou infamantes sont les
travaux forcés à perpétuités, les travaux forcés à temps (05 à10ans, 10 à 20ans), la détention
criminelle (05 à 10 ans, 10 à 20ans). Il existe une seule peine infamante dans la Code Pénal,
c’est la dégradation civique (voir Art. 08 et 27 CP).

Si maintenant l’infraction est punie d’une peine correctionnelle c'est-à-dire d’un


emprisonnement supérieur à 01mois et d’une amende supérieure à 20.000Fcfa, il s’agit d’un
délit. Enfin, si il est sanctionné d’une peine contraventionnelle ou de police c'est-à-dire d’un
emprisonnement d’un jour à 01 mois ou d’une amende de 200fcfa à 20.000Fcfa, l’infraction
est une contravention.

Paragraphe 2 : L’application du critère 

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La détermination de la nature de l’infraction ne pose en principe aucune difficulté. Il
suffit de s’attacher à la peine pour savoir si l’infraction est un crime, un délit ou une
contravention.

 Exemple 1 : le tapage nocturne (Art. 08 Code des Contraventions) est une
contravention. La peine applicable à son auteur est un emprisonnement d’un
jour à 01mois et une amende de 200Fcfa à 20.000Fcfa.
 Exemple2 : l’empoisonnement est un crime car la peine applicable à son
auteur est celle des travaux forcés à perpétuité (Art. 287 CP).
 Exemple 3 : L’abandon de famille est un délit parce qu’il est puni d’une peine
d’emprisonnement de 3 mois à un an et d’une peine d’amende de 20 000 FCFA
à 250 000 FCFA (Art. 350 CP).
 Exemple 04 : l’escroquerie est un délit (Art. 379 CP) car la peine applicable à
son auteur est un emprisonnement supérieur à 01mois et l’amende excède
20.000Fcfa.

Paragraphe 3 : Les difficultés soulevées par l’application du critère 

L’application du critère retenu par l’article 1er du Code Pénal soulève parfois des
difficultés et il convient de les relever.

Premièrement : Le maximum de la peine entre dans une catégorie différente de celle où


se trouve le minimum. On peut citer comme exemple une infraction pénale punie d’une peine
de police par son minimum et d’une peine correctionnelle par son maximum. Cette infraction
est elle contraventionnelle ou correctionnelle ? La jurisprudence prend position sur cette
question. Pour elle, l’infraction est correctionnelle en retenant cette solution elle enseigne avec
juste raison que la qualification d’une infraction doit être réglée sur le maximum de la sanction
applicable. Cette solution est conforme à la règle posée par l’article 1er du Code Pénal car ce
texte classe les infractions en fonction de la gravité de la peine.

Deuxièmement : L’hypothèse où l’infraction est un délit par sa peine et une


contravention par son régime. Dans ce cas est-on en présence d’un délit ou d’une
contravention ? A propos de ce type d’infraction on a pu parler de délit – contravention. Mais
aujourd’hui, l’hésitation n’est plus permise. Cette infraction est un délit car la peine qui lui est
attachée est correctionnelle. Tel est le cas de certaines infractions en matière douanière et en
matière fiscale.

Troisièmement : L’infraction peut elle changer de qualification (nature) par l’effet


d’une cause d’atténuation ou d’aggravation de la peine ? Pour les causes d’atténuation la
jurisprudence affirme que malgré la modification de la peine, l’infraction ne change pas de
qualification. Selon elle, un fait qualifié crime reste un crime même si par le jeu d’une excuse
ou d’une circonstance atténuante la peine criminelle peut être transformée en une peine
correctionnelle. Mais elle admet le changement de qualification lorsque par suite de
l’application d’une circonstance aggravante, un fait qualifié délit est puni de peine criminelle
(Exemple : Vol Art. 364CP).

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Section 2 : Les intérêts liés à la qualification retenue par l’Art. 1er CP 

La distinction des infractions en Crime, Délit et Contravention intéresse à la fois le


Droit Pénal de Fond et le Droit Pénal de Forme.

Paragraphe 1 : Les intérêts liés au Droit Pénal de Fond 

On entend par Droit Pénal de Fond, les règles relatives à l’incrimination et à la


sanction. Pour mettre en relief les intérêts de la classification, on examinera : la tentative, la
complicité et la prescription de la peine.

1- La tentative :

Elle est toujours punissable en matière de crime (Art. 2CP). Celle des délits ne l’est que
de façon exceptionnelle (Art. 3CP).

 Exemple : la tentative de délit d’abus de confiance n’est pas répréhensible (voir


Art. 383CP) ;
 Exemple 02 : la tentative d’escroquerie est répréhensible (Art. 379CP), mais on
retiendra que la tentative n’est pas punissable en matière de contravention.
2- La complicité :

Elle est toujours punissable en matière criminelle et délictuelle (voir Art. 45CP). Elle
ne l’est pas en matière contraventionnelle sauf disposition contraire.

3- La prescription de la peine :

L’écoulement d’un certain délai fait obstacle à l’exécution de la condamnation. Le


délai de prescription est de 20ans pour les peines criminelles, de 05ans pour les peines
délictuelles ou correctionnelles et de 02ans pour les peines contraventionnelle ou de police.

Paragraphe 2 : Les intérêts au Droit Pénal de Forme 

On entend par Droit Pénal de Forme, les règles relatives à la constatation des
infractions, à la poursuite et à la compétence. Pour mettre en relief les intérêts de la
classification, il convient d’examiner le déroulement de la procédure, la prescription de l’action
publique et la règle de compétence.

1- Le déroulement de la procédure :

Il varie suivant la gravité de l’infraction. La voie du flagrant délit est exclue en matière
criminelle et contraventionnelle. La citation directe qui permet à la victime et au ministère
publique de traduire directement l’auteur d’une infraction devant la juridiction de jugement est
autorisée en matière délictuelle et contraventionnelle, mais elle est impossible pour les crimes.
Enfin, l’ouverture d’une instruction est obligatoire en matière criminelle et elle se déroule
devant 02 juridictions. Devant le juge d’instruction du 1er degré et devant la chambre
d’accusation qui joue le rôle de juge d’instruction de 2nd degré. Pour les délits l’instruction est
facultative. En matière contraventionnelle, elle ne joue que de façon exceptionnelle (voir
Art.70CPP).

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2- La prescription de l’action publique :

L’action publique c’est l’action pour l’application d’une peine, elle ne peut être
engagée que dans les délais prescrits par la loi. En dehors de ces délais on dit que l’infraction
est prescrite c’est-à-dire elle ne plus être poursuivie (Art. 7 à 9 CPP). Le délai de prescription
de l’action publique varie suivant la nature de l’infraction. Il est de 10ans pour les crimes, de
3ans pour les délits et d’un an (1an) pour les contraventions.

3- Les règles de compétence :

Les crimes relèvent de la cour d’assise (Art.218 CPP), les délits sont jugés par le
tribunal régional qui pend la dénomination de tribunal correctionnel (Art.369 et 3670 CPP) et
les contraventions sont jugées par le tribunal départemental qui prend la dénomination de
tribunal de police ou de simple police (Art.509 CPP.

Cette juridiction est également compétente pour juger certains délits. Ces derniers sont
énumérés par la loi n°84-20 du 02 février 1984 ou prévus par des textes spéciaux. Exemple :
la loi n°67-04 du 27 février 1967 tendant à réprimer les dépenses excessives à l’occasion des
cérémonies familiales.

Chapitre II : LA CLASSIFICATION FONDEE SUR LA NATURE DE


L’INFRACTION PENALE

On examinera ici les infractions de droit commun, les infractions politiques, le


terrorisme et les infractions militaires.

Section 1 : La distinction des infractions de droit commun et des infractions politiques 

Paragraphe 1 : Les critères de distinction 

Deux critères ont été proposés en droit français. Il convient de les présenter avant de
voir la solution retenue par le droit sénégalais.

A- Les critères proposés en droit français 

Les critères sont au nombre de deux et il s’agit d’un critère objectif et d’un critère
subjectif.

1- Le critère objectif :

Ce critère considère l’infraction comme politique quand son objet est politique.
Exemple : l’atteinte à la sûreté de l’état.

2- Le critère subjectif :

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Selon ce critère, l’infraction est politique quand le mobile de son auteur est politique.
Le mobile ce sont des sentiments particuliers qui ont animé le délinquant au moment de
l’action. Si on applique ce critère, on qualifiera de politique les infractions de droit commun
inspirées par des mobiles politiques. On appelle ces infractions des infractions complexes. A
titre d’exemple on peut citer l’assassinat du chef de l’état.

Seront également politiques des infractions connexes à une infraction de droit


commun. On entend par infraction connexe, des infractions de droit commun qui sont rattachés
par un lien de causalité à une infraction politique. Il en est ainsi pour le vol d’armes dans une
armurerie au cours d’une insurrection.

B- La solution retenue par le droit sénégalais 

En droit sénégalais peut-on considérer la nature de la peine comme critère de


l’infraction politique. La réponse à cette question est positive pour deux raisons :

Premièrement : en matière correctionnelle, il n’y a pas de peines propres aux infractions


politiques ;

Deuxièmement : en matière criminelle la plupart des peines de droit commun sont aussi des
peines politiques. Il en va ainsi pour les travaux forcés à perpétuités et les travaux forcés à
temps. Les seules peines qui peuvent être considérées comme politiques sont la détention
criminelle et la dégradation civique (lorsqu’elle est prononcée comme peine principale ; voir
Art. 106CP). Peut-on alors se tourner vers les règles de compétence ?

Elles ne nous apportent aucune aide. Les infractions politiques relèvent actuellement
de la compétence des juridictions ordinaires (depuis 1992 le SENEGAL n’a plus de cours de
sûreté de l’Etat). La distinction entre infraction politique et infraction de droit commun est mal
aisée, car il n’existe aucune directive générale dans le code pénal. Il semble qu’on peut trouver
un éclairage dans les différentes lois d’amnistie prises par le SENEGAL depuis son
indépendance. En analysant ces textes on peut penser que le législateur sénégalais a retenu à la
fois le critère subjectif et le critère objectif. Le critère subjectif apparaît dans ce texte puisque la
loi met l’accent sur la psychologie du délinquant en assimilant aux infractions politiques les
infractions connexes et les infractions complexes. La référence au critère objectif est aussi très
nette. Ces lois énumèrent parmi les infractions amnistiées les crimes et délits contre la sûreté de
l’état c’est-à-dire les infractions dont l’objet est politique.

Paragraphe 2 : Les intérêts liés à la distinction 

L’extradition n’est pas possible en matière politique. De même la procédure de


flagrant délit ne s’applique pas aux infractions politiques. En ce qui concerne le régime
d’exécution de la peine, il faut noter que le prisonnier politique bénéficie d’un traitement de
faveur. Il n’est pas astreint au travail pénal (pénitentiaire). Il faut également retenir qu’il n’est
pas tenu de porter le costume pénal.

Section 2 : Le terrorisme 

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Le combat mené par la communauté international contre le terrorisme implique un
réaménagement des législations internes. Le dispositif de lutte mis en place par le SENEGAL
permet d’avoir une idée sur la notion de terrorisme et sur son statut.

Paragraphe 1 : La notion de terrorisme 

Les Art. 279(1-1), 279(1-2), 279(1-3) CP issus de la loi 2007-01 du 12 février 2007
modifiant le Code Pénal prévoient 03 catégories d’infractions :

 La 1ère reprend des incriminations bien connues, la liste est longue, on y trouver
les atteintes volontaires à la vie, l’enlèvement, le détournement des moyens de
transport, les extorsions, les destructions, les dégradations…
 La 2ème est spécifique : elle qualifie d’acte de terrorisme l’introduction
intentionnelle dans l’atmosphère, sur le sol, dans le sous sol ou dans les eaux
une substance de nature à mettre en péril, la santé de l’Homme ou des animaux
ou le milieu naturel. Dans les cas, il faut que le fait commis soit “en relation
avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler
gravement l’ordre publique par l’intimidation ou la terreur“.
 La 3ème catégorie porte sur le financement du terrorisme. A ces trois catégories
d’infractions il faut ajouter l’apologie d’un acte de terrorisme (Art. 279 (1-5)
CP).

Paragraphe 2 : Le statut du terrorisme 

L’acte de terrorisme n’est ni une infraction de droit commun ni une infraction


politique. Le système mis en place par le législateur de 2007déclenche l’application d’un
régime de rigueur dont on présentera rapidement les principaux aspects.

1- En droit pénal de fond :

Les peines applicables aux actes de terrorisme (1ère catégorie, 2ème catégorie, 3ème
catégorie) sont criminelles. Seule l’apologie d’un acte de terrorisme est punie de peine
correctionnelle.

2- En droit pénal de forme :

Il faut retenir que la garde à vue est plus longue qu’en droit commun, 04 jours contre
02 jours (voir Art. 677(1-27) CPP issu de la loi 2007-04 du 12 février 2007 modifiant le CPP).
L’action publique se prescrit par 30ans ; la poursuite, l’instruction et le jugement sont
centralisés à DAKAR. La poursuite est confiée au procureur de la république près du tribunal
régional de DAKAR, l’instruction est assurée au 1er degré par un cabinet d’instruction
spécialisé du tribunal régional de DAKAR et au 2nd degré par la chambre d’accusation de
DAKAR. Pour le jugement des actes de terrorisme qui sont criminels l’affaire est portée devant
la cours d’assise de DAKAR. Par dérogation au droit commun, cette juridiction est composée
des magistrats professionnels (un président et des assesseurs). En optant pour cette solution, le
législateur de 2007 s’est méfié des jurés populaires qui pourraient être sensibles à certaines
menaces ou pressions.

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Section 3 : Les infractions militaires et les infractions de droit commun 

Paragraphe 1 : Les diverses infractions commises par les militaires 

Les militaires peuvent commettre des infractions de deux ordres.

A- Les infractions purement militaires 

Elles sont inconcevables en dehors de la vie militaire. A titre d’exemple on peut citer
le complot militaire et la désertion. De façon plus générale, rentrent dans les infractions
purement militaires, les infractions contre l’honneur ou le devoir militaire.

B- Les infractions de droit commun 

Ces infractions peuvent être réalisées dans les casernes ou en ville à l’encontre des
particuliers. Elles ne différent en rien des infractions de droit commun si ce n’est par la qualité
de leur auteur. Il peut s’agir d’un vol, d’un meurtre, d’un abus de confiance…

Paragraphe 2 : Les intérêts liés à la distinction 

Pour examiner cette question il faut s’intéresser à la compétence, aux peines


applicables et à leur régime juridique.

A- La compétence 

Les contraventions et les délits relèvent de la compétence du tribunal régional de


DAKAR à condition que l’auteur soit un homme de troupe, un sous-officier, un officier
jusqu’au grade de capitaine. Pour les mêmes infractions la cours d’assise de DAKAR est
compétente pour juger les officiers supérieurs et les officiers généraux. Il faut souligner que le
tribunal régional statuant en matière militaire et la cours d’appel doivent s’adjoindre dans leur
composition de 02 assesseurs militaire ayant au moins un grade égal ou supérieur à celui du
prévenu. En matière criminelle la cours d’assise de DAKAR est compétente. Cette juridiction
doit s’adjoindre dans sa composition de 04 jurés militaires. Les jurés militaires doivent avoir au
moins un grade égal ou supérieur à celui de l’accusé. Toutes ces juridictions sont appelées
juridictions ordinaires à formation spéciale (voir la loi N° 94-44 portant Code de Justice
Militaire, Journal Officiel du 15 octobre 1994).

B- Les peines applicables et les régimes juridiques 

On peut appliquer aux militaires les peines de droit commun. On peut aussi leur
appliquer des peines spécifiquement militaires comme la destitution et la perte du grade. Sur le
plan du régime juridique, il faut observer que la condamnation prononcée pour des infractions
purement militaires ne pourront constituer le condamné en état de récidive que si les dites
infractions sont punies par les lois ordinaires. On observera également que l’infraction militaire
ne fait pas obstacle à l’octroi du sursis, sauf s’il est punissable d’après les lois pénales
ordinaires.

Chapitre III : CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MODE D’EXECUTION DES


INFRACTIONS

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Sous – Chapitre I : CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MODE D’EXECUTION
MATERIELLE

Il s’agit d’une classification fondée sur l’élément matériel. L’élément matériel est
l’acte réalisé par l’agent pénal. Il peut se présenter sous des aspects divers selon que l’on classe
les infractions pénales en tenant compte de la durée ou du contenu de leur acte d’exécution.

Section 1 : Classification fondée sur la durée des actes d’exécution 

Il s’agit de voir ici l’impact du temps sur la réalisation de l’infraction.

Paragraphe 1 : L’infraction instantanée et l’infraction continue 

L’infraction instantanée, elle se réalise en un trait de temps peu importe que


l’infraction ait exigé pour sa réalisation une longue préparation. Exemple, pour commettre un
vol, le voleur peut suivre sa victime mais juridiquement le vol est considéré comme réalisé dès
l’instant que le délinquant appréhende la chose d’autrui.

L’infraction continue, elle exige pour sa réalisation un seul acte qui s’étale dans le
temps en raison de la réitération constante de la volonté coupable. Exemple, la situation
juridique créée par le délit de port illégal de décoration se prolonge tant que l’individu persiste
dans son comportement.

Paragraphe 2 : L’infraction permanente et l’infraction continuée 

L’infraction permanente : c’est une infraction qui se réalise en un instant plus ou


moins long mais dont les effets demeurent. L’infraction permanente est une catégorie juridique
qui se ramène à celles des infractions instantanées. Exemple : celui qui colle une affiche à un
endroit interdit commet en ce moment un délit instantané même si son affiche reste collée
plusieurs jours à l’endroit interdit.

L’infraction continuée : elle est constituée par un ensemble d’infractions reliées entre
elles par une intention unique. Exemple 1 : le “déménagement“ d’une villa où le voleur est
obligé de faire plusieurs voyages.

Exemple 2 : le cas du comptable indélicat qui retire chaque jour un billet de banque de
sa caisse. Peut-on imputer au délinquant un ou plusieurs délits ? En droit français, il faut
procéder aux distinctions suivantes :

 Si les divers actes se produisent au cours d’une même action, exemple, un


cambriolage commis en plusieurs fois au cours d’une même nuit, une seule
infraction doit être retenue.
 Lorsqu’au contraire les divers actes s’échelonnent dans le temps, la
jurisprudence tend à admettre qu’il y a plusieurs infractions instantanées.

En droit sénégalais, pour des faits de détournement de deniers public étalés dans le
temps, la jurisprudence a retenu une seule infraction (cette jurisprudence est favorable à la
théorie de l’infraction continuée).

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Section 2 : Classification fondée sur le contenu des actes d’exécution 

Le comportement humain que la loi incrimine peut épouser diverses formes.

Paragraphe 1 : L’infraction d’action et l’infraction d’omission 

L’infraction d’action : l’infraction d’action ou de commission suppose


l’accomplissement d’un fait positif. L’infraction d’action exige un effort physique c’est-à –dire
un geste, un écrit ou une parole. Exemple : 1- le vol s’analyse en une soustraction frauduleuse
de la chose d’autrui (Art.364 CP) ; 2- le meurtre exige pour sa réalisation l’accomplissement
d’un acte homicide (Art.280 CP) ; 3- l’escroquerie s’analyse en l’emploi des moyens
frauduleux dans le but d’obtenir la remise d’une chose appartenant à autrui (Art. 379 CP).

L’infraction d’omission : le comportement incriminé ici par la loi n’est pas une
action mais une inertie, une abstention. Exemples : 1- l’omission de porter secours à une
personne en danger (Art.49 CP) ; 2- le non paiement de la pension alimentaire allouée au
conjoint ou aux enfants.

Paragraphe 2 : L’infraction simple et l’infraction à éléments matériels multiples 

L’infraction simple : elle se réalise par une seule opération matérielle. Exemple :
dans le meurtre peu importe l’ensemble des actions perpétrées par le sujet pour préparer son
forfait, l’infraction n’est réalisé que lorsque le délinquant tue sa victime.

L’infraction complexe : elle suppose l’accomplissement de plusieurs actes matériels


différents. Exemple : l’escroquerie comporte deux séries d’actes différents : les manœuvres
d’une part et la remise de la chose d’autre part (Art.379 CP).

L’infraction d’habitude : elle suppose pour sa réalisation plusieurs actes matériels


semblables dont chacun pris isolement ne serait pas punissable. Exemple : l’exercice illégal de
la médecine. Devant le silence de la loi, la jurisprudence retient que deux actes sont suffisants
pour constituer l’habitude punissable.

Paragraphe 3 : L’infraction matérielle et l’infraction formelle 

L’infraction matérielle : il y a infraction matérielle lorsque le résultat figure parmi


les éléments constitutifs de l’infraction. Exemples : 1- le meurtre n’est réalisé que si la victime
décède ; 2- le vol n’est réalisé que s’il y a soustraction frauduleuse de la chose d’autrui.

L’infraction formelle : une infraction est formelle lorsqu’elle est consommée


indépendamment du résultat dommageable recherché par son auteur. Exemples : 1- il y a
empoisonnement dès l’administration à la victime des substances toxiques indépendamment du
résultat escompté par le délinquant ; 2- la contrefaçon du billet de banque est une infraction
formelle peu importe que les billets aient circulé ou non, le faussaire tombera toujours sous le
coup de la loi ; 3- la corruption de fonctionnaire est un délit formel (Art.161 CP).

Sous – Chapitre II : CLASSIFICATION FONDEE SUR LE MODE D’EXECUTION


PSYCHOLOGIQUE

13
Cette classification fondée sur l’élément moral conduit à distinguer les infractions
intentionnelles et les infractions non intentionnelles.

Section 1 : Les infractions intentionnelles 

Elles ne peuvent être poursuivies que si la preuve de l’intention coupable est faite à
l’encontre de l’agent pénal. L’infraction est intentionnelle lorsque le sujet en agissant à voulu et
recherché le but interdit par la loi. Les crimes sont des infractions intentionnelles, les délits sont
en principe des infractions intentionnelles sauf dans le cas où exceptionnellement le texte
incriminateur, de façon explicite ou implicite permet de déclarer le délit constitué en dehors
même de toute intention.

Section 2 : Les infractions non intentionnelles 

Elles regroupent les délits d’imprudence, les délits matériels et les contraventions.

1- Les délits d’imprudence 

Ce sont des infractions dans lesquelles la loi réprime la négligence de l’agent pénal, sa
maladresse. Exemples : le délit de coups et blessures involontaires, le délit d’homicide par
imprudence.

2- Les délits matériels 

Dans ces délits la recherche d’une automaticité de la répression exclue toute analyse
de la psychologie du délinquant. Exemples : la plupart des infractions douanières sont des
délits matériels, on peut en dire autant pour les délits de chasse et de contribution indirecte.

3- Les contraventions 

Elles sont non intentionnelles ; l’auteur d’une contravention est répréhensible même
s’il allègue sa bonne foi.

TITRE II :

LES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE L’INFRACTION

Toute infraction pénale a des éléments généraux et elle n’est constituée comme telle
que si tous ces éléments ont existés. L’absence de l’une seule de ces composantes fait

14
disparaître l’infraction. Traditionnellement l’infraction pénale est constituée de trois(03)
éléments : l’élément légal, l’élément matériel et l’élément moral.

Chapitre I : L’ELEMENT LEGAL

Un texte de droit est nécessaire à l’existence de l’infraction. En conséquence, la


responsabilité d’une personne ne peut-être engagée si l’infraction pénale n’est pas constituée
faute d’élément légal.

Sous – Chapitre I : LA NECESSITE D’UN TEXTE LEGAL

Elle résulte du principe de la légalité criminelle. Selon ce principe, seul un texte de


droit peut créer les infractions et les sanctions qui leur sont attachées. L’exigence d’un texte de
droit comme condition préalable à toute déclaration de culpabilité trouve son importance dans
la consécration du célèbre principe de la légalité. Mais pour éviter que ce principe ne soit vidé
de sa substance, le droit pénal lui attache un certain nombre de corollaires.

Section 1 : Le principe de la légalité

Ce principe est tellement important qu’il figure en bonne place dans de nombreuses
constitutions d’obédience libérale et dans les Déclarations Universelles des Droits de l’Homme
de 1789 et de 1948. Au SENEGAL, il est inscrit dans l’art. 9(1) constitution de janvier 2001 et
dans l’art. 4 CP. L’art. 4 dispose « nul crime, nul délit, nulle contravention ne peuvent être
punis de peines qui n’étaient pas prévues par la loi ou le règlement avant qu’ils fussent
commis. »

Si on s’en tient à la rédaction de l’article 4 du CP, on pourrait penser que le principe


de la légalité ne concerne que le droit pénal au sens stricte c’est-à-dire l’infraction et la sanction
et non les autres branches du droit criminel. En réalité, le principe de la légalité comme l’ont
souligné la plupart des auteurs, est la clé de voûte de l’ensemble du droit pénal et, à ce titre il
s’applique au droit pénal de fond et à la procédure pénale.

Afin de mieux prendre conscience de l’intérêt du principe de la légalité, il convient


d’examiner d’abord, le fondement et le sens du principe avant de déterminer son application.

Paragraphe 1 : Le fondement et le sens du principe de la légalité 

1) Le fondement du principe 

Le principe de la légalité est justifié au point de vue individuel et au point de vue


social.

Au point de vue individuel, le principe de la légalité est la condition fondamentale de


la sécurité et de la liberté. Il constitue un véritable rempart contre l’arbitraire du juge car les
actes commis par les citoyens ne peuvent être sanctionnés que si au préalable ils ont été prévus
et punis par un texte de loi ou de règlement.

Au point de vue social, le principe est encore bénéfique. En confiant à la loi ou au


règlement le pouvoir de prévoir des incriminations et des sanctions, le principe remplit une

15
fonction d’intimidation dont la société ne peut que profiter. La préexistence d’un catalogue
répressif, en principe connu de tous, exerce, en effet, sur tous les individus une sorte de
contrainte psychologique pouvant contrecarrer leurs penchants délictuels.

2) Le sens du principe de la légalité :

Il s’agit de voir en quoi consiste l’élément légal nécessaire à l’existence de


l’infraction. En DP la doctrine et la jurisprudence ne peuvent faire figure de source. L’article 4
du CP exige comme source du DP un texte de droit. Avant la constitution Française de 1958, la
loi votée par l’assemblée nationale constituait la source par excellence du DP. Le règlement
avait des ambitions modestes, son rôle se limitait à l’exécution des lois. Actuellement, depuis la
constitution de 1958 reprise au Sénégal par la constitution 1963 et celle de 2001, la constitution
a beaucoup évolué. Il existe désormais deux sources en DP : la loi et le règlement.

Pour s’en convaincre il suffit de se référer aux articles 67 et 76 de la constitution de


janvier 2001. L’article 67 prévoit dans les matières qui relèvent de l’autorité de la loi, les
crimes et délits, les peines qui leur sont applicables, l’amnistie, la procédure. De son côté
l’article 76 dispose que tout ce qui n’est pas visé à l’article 67 est du domaine du règlement. On
peut donc dire que les contraventions relèvent du pouvoir exécutif.

Cette dualité de source constitue une véritable atteinte au monopole de la loi.


L’exécutif peut même intervenir par voie d’ordonnance dans le domaine de l’article 67 de la
constitution pour créer des crimes et des délits (article 77 de la constitution).

Paragraphe 2 : L’application du principe de la légalité 

Le principe de la légalité s’applique à la fois aux infractions, aux sanctions et à la


procédure.

A- Application du principe aux infractions et aux sanctions 

S’agissant des infractions, le principe de la légalité contraint le législateur à assurer la


charge d’en établir le catalogue. Pour bien mener cette mission, le législateur est tenu de
rédiger les textes de façon claire et précise. De même il doit déterminer les éléments constitutifs
des incriminations qu’il crée.

S’agissant des sanctions, le législateur est tenu de les fixer de façon précise dans le
texte prévoyant l’incrimination. Mais il peut aussi renvoyer à un autre texte. C’est le principe
de la pénalité par référence. Exemple : le recel de chose est puni des peines prévues par la loi
pour le vol (voir article 430 CP). De son côté, le juge ne peut prononcer que les peines
attachées à l’infraction dont il est saisi. Il ne peut ni créer une sanction ni dépasser le
maximum de la peine prévue par la loi ou le règlement.

En fin le principe de la légalité exige que l’administration pénitentiaire ne fasse


exécuter que les peines régulièrement prononcées par le juge, c’est-à-dire les peines prévues
par la loi ou le règlement.

B- Application à la procédure 

16
C’est à la loi qu’il revient le soin d’instituer des juridictions. Il lui revient la charge de
réglementer la compétence et le déroulement de la procédure. Le principe de la légalité permet
donc aux citoyens de connaître à l’avance les juridictions compétentes pour juger les faits qu’ils
ont commis et les formes du procès.

Section 2 : Les corollaires du principe de la légalité 

Il s’agit du principe de la non rétroactivité et de l’application de la loi pénale par le


juge.

Sous – Section 1 : Le principe de la non rétroactivité de la loi pénale 

Le principe signifie que la loi nouvelle ne s’applique que pour l’avenir. A première
vue, le principe de la non rétroactivité ne soulève guère de difficultés. L’hésitation est
cependant permise lorsqu’une loi nouvelle modifiant une incrimination, une sanction ou une
règle de procédure intervient entre le jour de la commission de l’infraction et le jour de son
jugement définitif. Dans ce cas faut-il appliquer la loi nouvelle ou la loi ancienne ?

Le droit positif a apporté une réponse à cette question en faisant une distinction entre
les lois pénales de fond et les lois pénales de forme.

Paragraphe 1 : Application aux lois pénales de fond 

C’est à propos de ces lois qu’on a édicté le principe de la non rétroactivité de la loi
pénale. Cependant ce principe ne vaut que pour les lois pénales nouvelles plus sévères. Il est
écarté au contraire pour les lois nouvelles plus douces.

A. La non rétroactivité des lois pénales de fond plus sévères 

Les lois pénales plus sévères sont visées par l’article 4 du CP. En principe, elles ne
rétroagissent pas. Cette règle connaît cependant des exceptions.

1- Le principe : La non rétroactivité

Une loi plus sévère que l’ancienne ne peut saisir les faits antérieurs à son entrée en
vigueur. Une loi est dite sévère lorsqu’elle crée une nouvelle incrimination. Elle est également
sévère lorsqu’elle prévoit des circonstances aggravantes ou lorsqu’elle interdit l’octroi de sursis
ou exclut le bénéfice de circonstances atténuantes.

2- L’exception : La rétroactivité

Dans certaines hypothèses, la loi nouvelle s’applique même si elle est plus sévère que
l’ancienne.

a- Les lois pénales nouvelles déclarées rétroactives : le législateur peut prévoir


expressément la rétroactivité des dispositions pénales qu’il édicte. L’art. 9 dernier alinéa
de la constitution prévoit cette possibilité. Dans le même sens on peut citer l’article 431-

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6 CP issu de la loi 2007-02 du 12/02/2007 modifiant le code pénal, journal officiel
10/03/2007. Les infractions pénales pour lesquelles la loi admet une entorse à la règle
de la non rétroactivité sont :

 Les crimes contre l’humanité,

 Les crimes de guerre,

 Les crimes de génocide.

b- Les lois interprétatives : ce sont des lois qui précisent le sens d’une loi ancienne. Par
conséquent ces lois rétroagissent.

c- La loi nouvelle institue une mesure de sûreté : cette loi s’applique immédiatement
même aux faits qui ont été antérieurement commis car elle a pour objet de faire face à
un état dangereux existant. C’est le cas pour les lois prévoyant des mesures rééducation.
C’est également le cas pour les lois relatives à l’assainissement des professions
commerciales.

B- La rétroactivité des lois pénales de fond plus douces ou rétroactivité


IN MITIUS 

Les lois pénales de fond plus douces rétroagissent. Elles s’appliquent aux faits commis
avant leur mise en vigueur et qui n’ont pas encore fait l’objet d’une condamnation définitive.

Une loi de fond est donc douce lorsqu’elle supprime une incrimination existante, une
loi est également douce lorsqu’elle diminue la responsabilité pénale ou lorsqu’elle l’exclut. Il
en va ainsi lorsque la loi prévoit des circonstances atténuantes crée un fait justificatif. Il en va
encore ainsi lorsque la loi supprime une circonstance aggravante. A première vue, il est facile
de savoir si une loi est douce ou plus sévère.il existe cependant des hypothèses où l’hésitation
est permise.

a) La loi prévoit un maximum et un minimum : une nouvelle loi qui élève me maximum
de la peine et abaisse le minimum ou au contraire abaisse le maximum et élève le
minimum est elle plus douce ou moins douce que la loi antérieure ? On admet
généralement dans ce cas qu’il faut considérer la loi nouvelle comme plus sévère si elle
augmente le maximum de la peine car elle expose le délinquant à une sanction plus
rigoureuse que celle qui était applicable au moment où il a commis l’infraction. Mais si
la nouvelle loi abaisse le maximum, elle doit être considérée comme plus douce et doit
être appliquée à des faits antérieurs à son avènement.

b) La loi remplace une peine par une autre : dans ce cas il faut s’attacher à l’échelle des
peines pour savoir si on est en présence d’une loi douce ou plus sévère. En appliquant
ce principe, la jurisprudence a retenu les règles suivantes :

i) Premièrement : les peines criminelles sont plus sévères que les peines
correctionnelles, elles mêmes plus sévères que les peines de police. Sauf à

18
remarquer que pour la jurisprudence, un emprisonnement de police est plus sévère
qu’une amende correctionnelle.

ii) Deuxièmement : entre deux peines de même nature la plus sévère est celle qui
occupe le degré le plus élevé dans l’échelle des peines ; exemple : en matière
délictuelle, l’amende est plus douce que l’emprisonnement.

iii) Troisièmement : entre deux peines de même nature et de même degré, on doit
comparer les durées respectives.

iv) Quatrièmement : lorsque les peines prévues dans les deux lois sont de même nature
et même degré et qu’elles ont le même maximum ou le même minimum, il faut
comparer le minimum ou le maximum.

c) Les difficultés : les cas où la loi nouvelle est plus sévère que l’ancienne sur un point
et plus douce sur un autre : pour régler ce problème on oppose deux types de lois selon
que les dispositions qu’elles comprennent sont divisibles ou indivisibles. Dans le cas où
les dispositions de la loi nouvelles sont divisibles ou dissociables, seules les parties les
plus douces rétroagissent, et les autres sont soumises à l’application du principe de la
non rétroactivité. Mais lorsque les dispositions sont indivisibles, il faut qualifier la loi
dans son ensemble pour savoir si elle est plus douce ou plus sévère. On peut citer
comme exemple une loi française de 1941 qui avait correctionnalisé mais interdisait en
même temps l’octroi des circonstances atténuantes. Les juges français ont qualifié cette
loi dans son ensemble et on affirmé qu’elle était plus douce que l’ancienne. Cette
solution est fondée sur la règle qui veut qu’en cas de conflit en deux dispositions
concernant la répression, l’une portant sur la sanction et l’autre sur sa mesure, qu’on
qualifie la loi dans son ensemble sur la base des dispositions relatives à la sanction.

Paragraphe 2 : Application aux lois pénales de forme 

Elles s’appliquent immédiatement même à des infractions commises antérieurement.


Le droit positif applique cette règle mais lui apporte quelques nuances qu’il faut montrer en
s’attachant aux diverses catégories de lois de forme.

1- La prescription :

La nouvelle loi modifiant un délai de prescription s’applique à toutes les prescriptions


en cours. Cette règle mérite cependant d’être nuancée. Elle ne concerne que les nouvelles lois
de prescription de l’action publique.

Les nouvelles lois de prescription de la peine sont considérées par la jurisprudence


comme les lois nouvelles de fond. Par conséquent elles ne s’appliquent de façon immédiate que
si elles sont plus douces. On remarquera que cette distinction jurisprudentielle entre les lois
relatives à l’action publique et celles relatives à la prescription de la peine a été supprimée le
nouveau code pénal français. Désormais les lois relatives à la prescription sont soumises à une
solution unique. Elles s’appliquent immédiatement sauf quand elles ont pour résultat
d’aggraver la situation de l’intéressé (art. 112 (1-2) 4èmement CP français).

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2- La procédure :

La loi nouvelle de procédure s’applique à toutes les instances en cours. Cette règle
souffre d’exception chaque fois que l’intérêt du prévenu l’exige. Par exemple, une loi nouvelle
qui modifie les conditions de mise en mouvement ou d’existence des poursuites ne s’applique
pas lorsqu’elle facilite la répression. Il y a également survie de la loi ancienne lorsque la loi
nouvelle supprime une voie de recours ou réduit le délai accordé pour agir. Cette solution
juridictionnelle a été reprise par le nouveau code pénal français (article 112(1-2) 3èmement CP).

3- La compétence :

Elle se détermine d’après la loi en vigueur au jour où l’on saisit la juridiction.


L’application de la loi est cependant écartée dans deux hypothèses :

Première hypothèse : une première décision a été rendue sur le fond.

Une 1ère décision est rendue sur le fond. Si une 1ère décision est intervenue sur le fond,
la juridiction d’appel sera déterminée par survie de la loi ancienne. On pense dans cette
hypothèse que le procès est si avancé qu’on ne peut plus modifier les règles de compétence.

Deuxième hypothèse : la modification de compétence est le résultat dune


aggravation de la pénalité.

On ne peut plus se prononcer en faveur de l’application immédiate de la loi nouvelle


lorsque la modification de compétence n’est que le résultat d’une aggravation de la pénalité.
Dans ce cas c’est le principe du non rétroactivité des lois pénales de fond plus sévères qui
s’opposent à l’application de la loi nouvelle de compétence. Exemple : si un fait est un délit au
moment de sa commission et qu’il devient un crime du fait de l’intervention d’une loi nouvelle,
l’auteur de ce qui n’était qu’un délit sera jugé par la juridiction correctionnelle et non par la
cour d’assises.

Sous – Section 2 : L’application de la loi pénale par le juge 

En matière criminelle il faut des lois précises et point de jurisprudences. Malgré cette
affirmation d’un auteur très avisé, le juge a l’obligation d’interpréter la loi pénale. Il peut même
être amené à contrôler la légalité d’un texte créant une incrimination.

Paragraphe 1 : L’interprétation de la loi pénale 

Interpréter une loi consiste pour le juge à en rechercher la signification afin d’en faire
l’exacte application à une espèce déterminée. Lorsque ce problème se pose, l’on conçoit pour
le juge chargé de la résoudre trois méthodes qu’il convient de présenter rapidement avant
d’examiner les solutions retenues par le droit positif.

A- Les méthodes d’interprétation 

20
On peut relever trois méthodes :

1- La méthode littérale :

L’interprétation littérale consiste à s’attacher à la lettre de la loi. Le juge saisi ne peut


rechercher l’intention du législateur qu’à travers ce qu’il a écrit et non ailleurs. Ce système est
une réaction contre l’arbitraire du juge, mais il présente de sérieux inconvénients qu’il faut
relever.

D’abord, la loi n’est pas toujours parfaite : des erreurs grammaticales ou matérielles
peuvent se glisser dans sa rédaction. Dans ce cas il est nécessaire de permettre au juge de les
rectifier, tout en respectant l’intention de la loi.

Ensuite, une loi peut bien vieillir : il en va ainsi lorsque les circonstances qui ont
commandé sa confection ont changé. Dans ce cas, il faudra revenir au juge pour lui permettre
d’adapter la loi à l’évolution économique et sociale de son époque.

2- La méthode téléologique :

Elle attache plus d’importance à l’intention du législateur qu’à la lettre de la loi. Cette
méthode confère au juge un pouvoir beaucoup plus important que la première méthode
d’interprétation. Deux remarques vont nous conforter dans cette position.

En premier lieu, lorsque le texte a une portée douteuse, le juge ne doit pas
systématiquement adopter le parti le plus favorable au prévenu et l’acquitter. Il doit rechercher
par tous les moyens à percer l’intention du législateur.

En second lieu, la méthode téléologique conduit le juge à dépasser le texte pour se


référer à l’histoire, au contexte socio-économique et aux travaux préparatoires.

3- La méthode analogique :

Elle consiste à résoudre une espèce pénale non prévue par la loi, prenant appui sur un
texte qui prévoit une espèce similaire. On notera que cette méthode n’est pas strictement une
méthode d’interprétation puisqu’elle suppose une absence de texte. La doctrine tend à
distinguer deux formes d’analogie : la première est légale, la seconde est juridique.

L’analogie légale tend à intégrer dans le cadre légal, un cas non prévu. Elle consiste
par exemple à sanctionner le fait à punir en lui appliquant le texte incriminant et punissant le
fait le plus voisin.

L’analogie juridique ne se fonde pas sur le voisinage d’un texte mais sur l’esprit
général du droit pénal. Elle permet au juge de créer le droit. L’analogie légale peut être admise
si elle va dans le sens de l’intérêt du prévenu. Le droit pénal n’est pas étranger à cette idée, on
peut faire ce constat si on s’intéresse aux méthodes d’interprétation retenues par le droit positif.

B- Les méthodes d’interprétation retenues par le droit pénal 

Elles varient selon qu’il s’agit de lois de fond ou de forme.

21
1- Les lois pénales de fond :

Pour ces lois, la jurisprudence adopte la règle de l’interprétation restrictive ou stricte.


Elle interdit en ces matières l’interprétation par voie d’extension ou d’analogie. L’application
de la règle de l’interprétation stricte n’est cependant pas aussi simple qu’on le pense. En
pratique, elle donne lieu à des difficultés. Celles-ci se présentent différemment selon que la loi
est claire, obscure ou vieille.

a- Le cas où la loi est claire :

Une loi claire ne doit pas être interprétée, le juge doit l’appliquer purement et
simplement. Mais on remarquera que l’interprétation stricte ne signifie pas interprétation
littérale du texte de loi. Si le texte est clair mais comporte des erreurs matérielles et
grammaticales, le juge doit les rectifier en s’inspirant de la pensée et des intentions des auteurs
de la loi. A titre d’exemple, on peut donc citer un règlement sur la police des chemins de fer
qui interdisait en France de descendre dans les gares que lorsque le train est complètement
arrêté. A la lettre, ce texte obligeait les voyageurs à descendre du train en sautant en marche de
celui-ci. Mais cette interprétation ne peut être retenue car, en bonne logique, on doit descendre
dans une gare et lorsque le train est complètement arrêté et non ailleurs. C’est même pour cette
raison que les juges français ont condamné un voyageur qui était poursuivi pour avoir sauté
d’un train avant l’arrêt.

L’interprétation restrictive ne signifie pas aussi interprétation par analogie. Le juge


doit appliquer le texte aux seules hypothèses qu’il prévoit et seulement à ces hypothèses. Par
exemple, celui qui se fait servir un repas dans un restaurant ne peut être poursuivi pour vol s’il
ne paie pas. Le vol suppose une soustraction frauduleuse, or cette condition n’est pas remplie
en l’espèce. Le comportement de cette personne est une filouterie d’aliment (Article 374 CP).

L’interprétation par analogie est pourtant admise lorsque les lois pénales sont
favorables au prévenu. Exemple, les causes de non imputabilité ont été étendues aux
contraventions malgré le silence de la loi ; il est admis que les faits justificatifs font disparaître
n’importe quelle incrimination, alors que les textes ne visent que l’homicide et les coups et
blessures.

b- Le cas où la loi est obscure :

Dans cette hypothèse le juge doit s’efforcer à rechercher le sens véritable de la loi,
mais il lui est interdit d’imaginer et de se substituer au législateur. Il peut donc appliquer le
texte s’il pense avoir trouvé son sens, mais s’il se rend compte que l’obscurité est
insurmontable, il doit relaxer le prévenu.

c- Le cas où la loi a vieilli :

Un texte clair et précis au moment de sa confection peut vieillir au fil des temps, en
raison de l’apparition de situations nouvelles que ses rédacteurs ne pouvaient pas prévoir. Dans
ce cas, la règle de l’interprétation stricte n’interdit pas au juge d’adapter ce texte à l’évolution
économique et sociale de son époque. En 1810, les rédacteurs du code pénal français ne

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connaissaient pas les sources d’énergie comme l’électricité. Peut-on alors sur la base de
l’article 379 code pénal français (aujourd’hui abrogé) pour réprimer un détournement
d’électricité ? Dans cette hypothèse, la jurisprudence française a décidé qu’il y a vol au sens de
la loi au motif que le courant électrique est chose mobilière susceptible d’appropriation. De
même, le texte sur la diffamation par les journaux et les affiches a été étendu à la diffamation
par la voie de la radio et du cinéma au motif que ces agissements sont «  dans leur objet et leurs
caractères foncièrement identiques à ceux en vue desquels la sanction a été édictée ».

2- Les lois pénales de forme :

Les lois de procédure doivent être interprétées de façon analogique à la condition


qu’elles ne nuisent pas aux intérêts du prévenu.

C’est le cas pour les lois relatives aux garanties de la liberté individuelle et au droit de
la défense. La jurisprudence n’est pas toujours ferme dans l’application de l’interprétation par
voie d’analogie. Elle l’a souvent écartée dans des hypothèses où la loi est pourtant favorable au
prévenu. C’est la solution retenue par la Cour de cassation française à propos de textes
consacrant des règles de droit de la défense. Actuellement, cette haute juridiction interprète de
façon restrictive la règle interdisant d’entendre comme témoin une personne contre laquelle
existent des indices graves de culpabilité. Elle limite son application à la phase de l’instruction
et refuse de l’étendre à la phase de l’enquête préliminaire.

Paragraphe 2 : Le contrôle de la légalité 

Une fois la loi votée, promulguée et publiée, le juge n’a pas à chercher sa conformité à
la constitution, il doit l’appliquer. Le problème est différent pour les règlements. Le juge peut
contrôler leur légalité. Ce contrôle s’opère sous deux formes : par voie d’action ou par voie
d’exception.

 Le contrôle par voie d’action, c’est le recours pour excès de pouvoir. Il est
porté à l’attention devant la chambre administrative de la cours suprême dans
un délai de deux mois à compter de la notification ou de la publication de la
décision attaquée.
 Il y a contrôle par voie d’exception lorsque le prévenu prétend à l’occasion
d’une poursuite que le règlement est entaché d’un vice. C’est ce qu’on appelle
« exception d’illégalité ». Les principes à la base de l’admission de l’exception
d’illégalité présentent des différences en droit français et en droits sénégalais.
Il y a lieu de présenter cette différence avant de voir les conditions
d’application de l’exception d’illégalité et sa portée.

A- En droit français 

En droit français, le principe de la séparation des autorités administratives et


judiciaires implique pour le juge judiciaire l’interdiction de connaître de la légalité d’un acte
administratif. Il doit surseoir à statuer jusqu’à ce que le juge administratif ait réglé cette
question préjudicielle. Mais il en va autrement en matière répressive où l’exception d’illégalité
est admise à l’encontre des actes règlementaires. Cette solution découle d’une décision rendue

23
le 5 juillet 1951 par le tribunal des conflits. Dans cette décision, cette haute juridiction affirme
que « tout juge répressif est habilité à apprécier la légalité d’un acte administratif 

La chambre criminelle de la Cour de cassation française abonde dans le même sens


mais élargit considérablement le domaine du contrôle. Selon cette haute juridiction, la
compétence du juge porte sur tous les actes administratifs assortis d’une sanction pénale, peu
importe qu’ils soient règlementaires ou individuels.

A la faveur de la modification du code pénal de 1810, le législateur est intervenu sur


cette question relative à la compétence des juridictions répressives en matière de contrôle de la
légalité et d’interprétation des actes administratifs. L’article 111 (1-5) du nouveau code pénal
retient la solution la plus favorable aux juridictions répressives en leur donnant une pleine
compétence.

Celle-ci pourront interpréter ou apprécier la légalité d’un acte administratif dès lors
que de cet examen dépend de la solution du procès pénal. Il n’y a donc plus à distinguer comme
le tribunal des conflits, entre les actes individuels et les actes règlementaires ou, comme la Cour
de cassation, entre les actes pénalement sanctionnés et les autres du moment que l’issu du
procès dépend du sens ou de la légalité de l’acte.

B- En droit sénégalais 

Au Sénégal, en l’absence de la dualité d’ordre juridictionnel, la légalité d’un acte


administratif ne peut constituer une question préjudicielle. Les juges sont tenus d’interpréter et
d’apprécier la légalité des décisions des autorités administratives dès lors que la question de la
légalité ou de l’illégalité de ces actes a une répercussion sur la solution du litige qui leur est
soumis (voir art.4 loi 84-19 du 02/02/1984 fixant organisation judiciaire du SENEGAL JO
03/03/1984). Avec la loi 92-25 relative à la Cour de cassation il fallait faire une différence entre
les juridictions de bas de l’étage et la cour de cassation. L’article 36 de ce texte invitait cette
haute juridiction à sursoir à statuer jusqu’à ce que le conseil d’état se prononce sur la légalité de
l’acte administratif. Désormais avec la création du de la cour suprême, la légalité d’un acte
administratif n’est plus une question préjudicielle. Cette haute juridiction est tenue de prendre
partie sur la légalité d’un acte administratif si cette question est soulevée devant elle. La
solution ainsi retenue va dans le sens de la jurisprudence française, en ce sens qu’elle reconnait
à tout juge pénal, même à la chambre criminelle de la cour suprême de connaitre de l’exception
d’illégalité

C- Les conditions d’application de l’exception d’illégalité 

L’exception d’illégalité peut être invoquée devant toutes les juridictions à l’encontre
de tous les actes administratifs, qu’ils soient réglementaires ou individuels. On peut soulever
les mêmes cas d’illégalités qu’en cas de contentieux administratif. Par exemple: la violation de
la loi, l’incompétence de l’autorité administrative, le vice de forme. Le juge pénal est
compétent, si au cours d’une poursuite, le prévenu, qui est le défendeur, prétend que le
règlement qu’il a violé est irrégulier et qu’il lui demande d’examiner la légalité de cet acte.

D- La portée du contrôle de la légalité 

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Le juge est tenu d’examiner la légalité du règlement lorsqu’une partie le lui demande.
Le contrôle une fois fait, la loi lui offre deux possibilités :

a- Il estime que l’acte est irrégulier :

Dans ce cas, le prévenu ne sera pas condamné, mais le texte irrégulier n’est pas
annulé, en conséquence rien n’interdit qu’il puisse avoir de nouvelles poursuites et conduire le
juge à prononcer une condamnation si dans ces instances ultérieures, les parties n’invoquent
pas son illégalité.

b- Il estime que l’acte est légal et régulier :

Dans ce cas, il doit prononcer une condamnation. Cependant comme dans l’hypothèse
précédente, sa décision n’a qu’une autorité relative. Rien n’empêcherait ultérieurement un
prévenu d’invoquer devant lui et même avec succès, le même cas d’illégalité.

Sous – Chapitre II : L’ABSENCE DE L’ELEMENTS LEGAL

Il s’agit de voir ici les circonstances objectives qui rendent l’acte conforme au droit.
Ces circonstances portent le nom de faits justificatifs et sont énumérées par la loi. Il s’agit de la
légitime défense et du commandement de l’autorité légitime. Mais on s’est demandé en
doctrine et en jurisprudence si l’état de nécessité et le consentement de la victime ne pouvaient
pas ainsi être considérés comme des faits justificatifs.

Section 1 : La légitime défense 

L’art. 316 CP dispose : « il n’y a ni crime ni délit lorsque l’homicide, les blessures
et les coups étaient commandés par la nécessité actuelle de la légitime défense de soi-
même ou d’autrui ». A travers ce texte, le CP confère à celui qui se défend, un pouvoir de
police privée, mais ce pouvoir ne doit pas devenir un pouvoir de justice privée. En d’autres
termes, l’agressé ne doit pas profiter de sa situation pour assouvir une vengeance personnelle.
Son comportement ne peut être justifié que s’il s’inscrit dans le cadre des dispositions de la loi.

Paragraphe 1 : Les conditions de la légitime défense 

Elles sont relatives à l’agression et à la défense.

A- L’agression 
Suivant les dispositions de l’art. 316 CP, l’agression peut être dirigée contre l’agent
pénal lui-même ou contre un tiers. Elle n’est prise en considération par la loi que si elle
présente deux caractères.

Tout d’abord elle doit être actuelle; l’actualité signifie que l’agression ne peut être
imaginaire ou simplement éventuelle. Une menace n’est pas suffisante pour justifier celui qui
se ferait justice préventivement. La personne victime des menaces graves doit saisir les
pouvoirs publics.

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Ensuite elle doit être injuste. A contrario, une agression juste serait une agression
ordonnée par la loi et commandée par l’autorité légitime. Ainsi, le voleur n’est pas en état de
légitime défense vis-à-vis du policier qui l’arrête régulièrement. Les choses ne sont toutefois
pas aussi simples lorsque l’agression est due à un agent de l’autorité qui agit illégalement ou à
un « passage à tabac ». L’individu illégalement arrêté ou frappé est-il en état de légitime
défense s’il riposte ? La jurisprudence répond généralement par la négative en invoquant la
présomption de régularité des actes de l’autorité publique. Malgré les critiques qui ont été
adressées, la jurisprudence a toujours refusé d’assouplir sa position au motif que si chaque
personne pouvait résister aux agents du pouvoir, en prétendant que leur action est illégale,
l’exercice de l’autorité publique serait entravée.

B- La défense 
Deux questions méritent d’être examinées ici : la nature de l’infraction et les caractères
de l’infraction de la défense.

(1) La nature de l’infraction :


La jurisprudence française sous l’emprise du code pénal de 1810, aujourd’hui
abrogé refusait la justification lorsque l’infraction commise par la victime de
l’agression est involontaire c'est-à-dire un homicide ou des coups et blessures
involontaires (par imprudence). Cette jurisprudence a été critiquée. Tout d’abord, il
lui a été reproché de distinguer là où la loi ne distinguer pas. L’art. 328 CP a-t-on
fait observer parle de d’homicide et de coups et blessures, mais ne distingue pas
ceux qui sont volontaires et ceux qui ne le sont pas. On a encore opposé à cette
jurisprudence un raison pratique : la victime sera justifiée si elle frappe
intentionnellement son adversaire mais elle ne le sera pas si elle se borne à le
repousser de telle manière que cet individu perde l’équilibre et se tue. On a enfin
opposé à cette jurisprudence d’avoir voulu distinguer entre le vouloir de l’acte de
la défense et les conséquences de cet acte. Or si on veut apprécier les conditions
d’existence de la légitime défense, il faut prendre en considération le vouloir de
l’acte de défense et non le résultat. Ces critiques sont sans doute très pertinentes,
mais la jurisprudence n’a pas encore changé de position sous l’emprise du nouveau
code pénal français.
(2) Les caractères de la défense :
La défense a une valeur justificative si elle présente deux caractères :
En premier lieu, elle doit être d’une nécessité actuelle, ces deux termes (Nécessité,
Actuelle) méritent quelques précisions. La nécessité signifie que la défense ne peut
plus être justifiée quand l’agent pénal pouvait assurer sa protection ou celle
d’autrui en appelant l’autorité publique. L’actualité signifie que l’agressé doit
riposter de façon immédiate pour parer l’agresseur qui le menace, il n’ya plus de
Légitime Défense lorsque le danger n’est qu’hypothétique ou lorsque le sujet réagit
alors que le mal est déjà passé.
En second lieu, elle doit être proportionnée à l’agression c'est-à-dire qu’elle ne
doit pas être excessive. Exemple : une gifle est bien une agression, mais la victime
qui tue son gifleur est mal fondée à invoquer la légitime défense. La victime pourra

26
cependant bénéficier de l’excuse de provocation et des circonstances atténuantes.
On retiendra que l’appréciation du caractère proportionné de la défense est une
question de fait ; cependant, la cour de cassation française demande au juge du fond
de la mettre en mesure de vérifier si la condition de proportionnalité est remplie.

Paragraphe 2 : Le domaine de l’art. 316 du code pénal 

L’art. 316 du CP parle d’homicide, des coups et blessures. Mais on admet l’extension
de la légitime défense à toutes sortes de délits. Ce texte est encore applicable en cas d’agression
contre les biens. Exemple : il a été jugé qu’un châtelain était irresponsable pénalement et
civilement pour les dommages causés au voleur de ses poissons par des détonateurs placés près
de son étang.

Les décisions postérieures ne vont pas condamner la légitime défense des biens. Elles
admettent même la défense automatique des biens. C’est le cas lorsqu’une personne place chez
elle un piège à feu ou laisse en liberté dans son jardin une bête féroce.

Pour cette forme de protection des biens, la jurisprudence demande au propriétaire des
biens d’avertir les individus en apposant devant la porte de leurs maisons, un écriteau signalant
l’existence du piège à feu ou du moyen de défense utilisé. On remarque cependant que même si
le propriétaire respecte cette condition, il ne peut bénéficier de la légitime défense que s’il
existe une proportionnalité entre le mal causé à l’agresseur et la valeur du bien défendu. La
condition de proportionnalité en matière d’agression contre les biens est appréciée de façon
rigoureuse par les juges du fond.

Paragraphe 3 : La preuve de la légitime défense 

La preuve de la légitime défense pèse sur le prévenu ou l’accusé. L’art. 317 du CP


apporte cependant une exception à cette règle en prévoyant deux cas où la légitime défense est
présumée.

*Premier cas : il concerne l’attaque de nuit avec escalade ou effraction des clôtures,
murs ou entrées d’une maison ou d’un appartement habité ou de leurs dépendances.

*Deuxième cas : il est relatif à l’attaque faite avec violence par des voleurs ou des
pillards.

Dans tous ces cas privilégiés légitime défense, la présomption édictée par la loi est
simple c’est-à-dire qu’elle peut être écartée par la preuve contraire. Ainsi, celui qui tue un
homme escaladant les murs de son domaine en sachant que l’intrus voulait simplement
rejoindre à des fins câlines une employée de maison ne peut pas bénéficier de la légitime
défense. Cette solution est tout à fait fondée car celui qui se défend dans cette hypothèse sait en
toute pertinence qu’il n’encoure aucun danger.

Paragraphe 4 : Les effets de la légitime défense 

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La légitime défense exclue la responsabilité pénale et la responsabilité civile. En effet,
l’agresseur est mal fondé à invoquer le bénéfice d’une allocation des dommages-intérêts car le
dommage qu’il subit est dû à l’agression dont il avait pris l’initiative.

Section 2 : L’ordre de la loi et le commandement de l’autorité légitime

L’art. 315 du CP dispose « il n’y a ni crime ni délit lorsque l’homicide, les coups et
blessures étaient ordonnés par la loi et commandés par l’autorité légitime ».

Ce texte semble exiger deux conditions : l’ordre de la loi et le commandement


de l’autorité légitime. En réalité de ces deux conditions, la première seule est nécessaire dans
le cas où la loi donne directement des ordres à un particulier sans passer par l’intermédiaire
d’un supérieur hiérarchique. Ainsi en cas de flagrant délit, la loi autorise toute personne à en
appréhender l’auteur. En pareil cas, celui qui procède à l’arrestation ne peut avoir commis
l’infraction d’arrestation illégale prévue par l’art. 334 du CP.

Au contraire, lorsque l’ordre de la loi ne peut être exécuté que par l’intermédiaire
d’un commandement donné par un supérieur hiérarchique, la question qui se pose est de savoir
si l’obéissance à un ordre illégal mais donné par l’autorité légitime est une cause de
justification. Il faut entendre par autorité légitime une autorité régulièrement investie et qui a un
pouvoir direct sur celui qui va exécuter l’ordre (une autorité civile ou militaire). Dès lors
l’infraction n’est pas justifiée si elle est ordonnée par une autorité privée.

Par rapport à la question posée, on ne trouve en droit sénégalais que quelques textes
spéciaux. Ces textes n’exonèrent pas le fonctionnaire qui a obéi à un ordre hiérarchique illégal.
La loi prévoit tout simplement en ce qui le concerne une excuse absolutoire (voir art. 106 du
CP). L’excuse absolutoire est une cause d’exemption de la peine, et cela signifie que
l’infraction subsiste et que son auteur pourra être condamné au paiement des dommages-
intérêts et aux frais de justice.

En dehors de ces cas légaux, la doctrine a proposé des solutions. Selon la doctrine de
l’obéissance passive, le fait justificatif doit jouer, car l’agent doit obéir sous peine de
compromettre l’autorité de son chef. Cette solution peut conduire à des excès, aussi, certains
auteurs ont-ils senti la nécessité de proposer une solution appelée les « baïonnettes
intelligentes ». Pour les tenants de cette théorie, l’agent n’est pas tenu de respecter un ordre
illégal. Cette proposition est cependant difficile à concilier avec le nécessaire respect de la
discipline dans les armées. Devant cette situation, d’autres auteurs préfèrent un système
intermédiaire où le subordonné ne doit refuser d’exécuter que les ordres manifestement
illégaux. L’application de cette solution n’est pas aisée, car le subordonné n’a pas toujours
l’aptitude requise pour savoir si un ordre est manifestement illégal ou s’il ne l’est pas.

La jurisprudence prend parti dans ce débat. Elle rejette la thèse de l’obéissance passive
et décide généralement que l’infraction commise en exécution d’un ordre illégal est punissable.
Cette solution est fondée mais à début de fait justificatif, l’agent peut bénéficier de l’impunité
en invoquant la contrainte conformément à l’art. 50 du CP. Tel est le cas du militaire en
opération qui doit ses actes aux lois de la guerre sous peines d’être exécuté lui-même

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sommairement. Mais pour avoir gain de cause, il devra prouver que sa volonté a été abolie par
son supérieur.

Section 3 : L’état de nécessité et le consentement de la victime 

Paragraphe 1 : L’état de nécessité 

Il y a état de nécessité quand la commission de l’infraction est le seul moyen


d’éviter un dommage plus grave que celui qui risque d’être causé par cette infraction. L’état de
nécessité se différencie de la légitime défense en ce que le mal dont on est menacé ne résulte
pas de l’agression d’un tiers mais d’un concours de circonstance. Exemple, on a retenu l’état de
nécessité pour la mère indigente qui vole un pain pour éviter que son enfant ne meure de faim.
Autre exemple : l’automobiliste qui défonce une vitrine pour ne pas écraser un piéton pourra
aussi invoquer l’état de nécessité.

En droit sénégalais, il n’existe aucune disposition générale sur l’état de nécessité.


Seuls quelques textes particuliers prévoient l’irresponsabilité de l’auteur d’un délit nécessaire.
A titre d’exemple, on peut citer l’art. 12-2 du code des contraventions et l’art. 425 du CP.

Du moment que tous ces textes sont favorables au délinquant, il est admis que l’état de
nécessité est applicable même aux hypothèses non prévues par la loi. La question est cependant
de savoir comment justifier l’impunité de l’auteur d’un délit nécessaire. La réponse à cette
question n’a pas manqué de poser des difficultés. En doctrine comme en jurisprudence, c’est la
controverse.

Dans un premier temps, l’état de nécessité est assimilé à la contrainte morale. Cette
thèse est critiquable car l’auteur d’un délit nécessaire agit en pleine conscience au moment des
faits. On a ensuite fait appel à l’absence d’intention délictueuse. Cette explication doit aussi
être critiquée. Elle ne vaut que pour les infractions intentionnelles et même dans ces infractions,
elle a le défaut de confondre l’intention et le mobile car, le mobile qu’il soit honorable ou
crapuleux ne fait pas disparaître l’intention. Devant l’insuffisance de ces explications, on
admet aujourd’hui que l’état de nécessité est un fait justificatif. C’est la thèse de la chambre
criminelle, de la cour de cassation française. Cette jurisprudence a été reprise par l’art. 122 (1-
7) du nouveau code pénal français. Il faut retenir que l’agent pénal ne bénéficie de l’impunité
que si certaines conditions sont réunies.

1- Il faut un danger actuel et imminent : La notion de danger est


entendue au sens large comme en matière de légitime défense. Il peut être
physique ou moral. Peu importe que le danger menace le sujet ou un tiers. Pour
le danger moral, on peut citer une affaire où un père de famille a pénétré dans
l’appartement de sa femme malgré une ordonnance de non conciliation pour
soustraire sa fille mineure à une scène de débauche. Il faut retenir qu’un simple
danger ne suffit pas, il faut qu’il soit actuel ou imminent. L’actualité et
l’imminence exclut le danger hypothétique ou éventuel.
2- Il faut que la commission de l’infraction apparaisse comme le
moyen indispensable permettant d’éviter le mal dont le sujet est menacé.

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3- Il faut que l’intérêt sauvegardé soit supérieur à l’intérêt sacrifié :
Une femme qui vole du pain pour nourrir son enfant bénéficie de l’état de
nécessité car une vie humaine est plus importante que la propriété d’un pain. En
revanche, on ne peut pas invoquer l’état de nécessité lorsqu’on tue une personne
pour protéger un animal.

4- Le danger dont est menacé le sujet ne doit pas provenir de sa


faute : cela signifie que l’individu ne doit pas être à l’origine de la situation d’où
découle l’état de nécessité. Exemple : l’état de nécessité a été refusé au
conducteur d’un camion qui s’était imprudemment engagé sur un passage à
niveau et a été amené à défoncer la barrière de sortie de ce passage pour éviter le
choc avec un train qui arrivait (délit de bris de clôture).

Il faut retenir que l’état de nécessité est un fait justificatif à caractère particulier. Il
supprime la responsabilité pénale mais non la responsabilité civile. Cette solution est
compréhensible car l’auteur d’un délit nécessaire est un agresseur. Il est donc normal qu’il
indemnise sa victime.

Paragraphe 2 : Le consentement de la victime 

Dans notre droit, le consentement de la victime n’est pas en principe un fait


justificatif, mais il existe des hypothèses où le consentement de la victime fait disparaître
l’infraction et entraîne l’impunité de l’auteur.

A- Le consentement de la victime 
Ce n’est pas en principe un fait justificatif. La loi pénale n’a pas pour finalité de
privilégier les intérêts privés sur l’intérêt social. Son rôle est d’assurer le maintien de l’ordre
social. Le consentement de la victime est donc inefficace pour effacer le caractère délictueux de
l’infraction. Ce principe de l’indifférence du consentement de la victime est parfois rappelé par
le législateur. Exemples : 1) dans les infractions contre les personnes, l’art. 305 CP incrimine
l’avortement même si la femme enceinte a donné son consentement ; 2) dans les infractions
contre les biens, la loi incrimine l’acceptation en connaissance de cause d’un chèque sans
provision.
La règle de l’exclusion du consentement de la victime comme fait justificatif est
également rappelée par la jurisprudence. Ainsi, il a été jugé que l’homicide sur demande
encore appelée Euthanasie est répréhensible comme un simple homicide malgré le mobile
altruiste qui a pu l’inspirer. Les juges ont encore décidé que le consentement de la victime ne
peut justifier la stérilisation provoquée par un chirurgien dans le but de supprimer la faculté de
procréation. Dans les sports violents, exemple: karaté, judo, boxe, la jurisprudence encore
affirme que les coups et blessures ne sont pas justifiés par le consentement de la victime mais
par la loi. On retiendra qu’en cette matière, l’individu qui porte des coups n’échappe à la
répression que si seulement il respecte les règles du jeu.

B. Les hypothèses où le consentement de la victime fait disparaître l’infraction 

30
Il s’agit d’infractions touchant à des biens ou à des droits dont la victime a la
possibilité de disposer. Dans ces infractions, le consentement de la victime fait obstacle à la
répression. Il en va ainsi pour certaines infractions contre les biens. Par exemple : on peut plus
parler de vol ou d’escroquerie lorsque la victime a consenti à la réalisation de l’infraction. De
même, dans les infractions contre les personnes, il n’y a pas de viol si la victime est
consentante. Dans les hypothèses ainsi présentées, le défaut de consentement de la victime est
une condition d’existence de l’infraction. On ne peut donc parler ici de fait justificatif car si, la
répression ne peut être retenue, c’est que tout simplement la présence du consentement de la
victime supprime un élément constitutif de l’infraction. On retiendra cependant que le
consentement ne peut effacer l’infraction que s’il remplit trois conditions :

*tout d’abord, il doit être antérieur ou concomitant à la réalisation de l’infraction;

*ensuite, il doit être libre: surpris par dol, il ne saurait évidemment effacer l’infraction ; ainsi,
la remise d’une somme d’argent provoquée par l’emploi de moyens frauduleux est une
escroquerie (art 379 CP) ;

*enfin, il doit émaner d’un individu capable de comprendre la portée de son acceptation. Le
consentement est donc sans valeur lorsqu’il émane d’un dément ou d’une personne très jeune.

Chapitre II : L’ELEMENT MATERIEL

En droit pénal, l’infraction n’existe que si elle se révèle à l’extérieur par un fait
matériel objectivement constatable. C’est là une garantie contre l’arbitraire des pouvoirs
publics. Le problème délicat est cependant de savoir à partir de quel moment dans une activité
criminelle faut-il situer l’intervention du droit pénal. Est-ce à compter de la réalisation
définitive de l’infraction ou faut-il sanctionner dès l’instant que le sujet montre par son attitude
sa volonté d’aller à l’encontre des valeurs pénalement protégées par la société ?
A cette question, la loi apporte une réponse en sanctionnant la tentative. Notre droit
intervient également pour attirer dans son champ certaines actions criminelles qui ont été
menées jusqu’à leur terme sans que le résultat recherché ait été obtenu. Ces actions concernent
l’infraction manquée et l’infraction impossible.

Section 1 : La tentative punissable 

Une infraction pénale est presque toujours le résultat d’une longue préparation.
L’agent pénal n’atteint le résultat interdit qu’au terme d’un cheminement complexe. Ce
processus criminel encore appelé chemin du crime « ITER CRIMINIS » se décompose en
trois étapes :
 La première est l’idée du crime, la résolution de l’accomplir ;
 La seconde est constituée par les actes préparatoires ;
 La troisième est celle de l’exécution, de la consommation de l’infraction.

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Lorsque l’agent pénal n’est pas allé jusqu’au bout de ce chemin, le problème est alors
de savoir à partir de quelle étape faut-il situer l’intervention du droit pénal. L’art 2 CP apporte
une réponse à cette question. Pour donner un éclairage à ce texte, nous examinerons d’une part
les conditions requises par la loi pour qu’il ait tentative et d’autre part la peine prévue en pareil
cas (la répression de la tentative).

Paragraphe 1 : Les conditions d’existence de la tentative 

Au terme de l’art 2 CP, la tentative punissable suppose un commencement d’exécution


et une absence de désistement volontaire.

A. Le commencement d’exécution 

En exigeant un commencement d’exécution le législateur exclut du domaine de la


répression de simples projets psychologiques, il n’intervient que s’il existe au moins un acte
matériel. Il faut donc remarquer que si le code pénal réprime certaines menaces, certaines
formes de complots, c’est par ce que ces agissements ne sont pas de simples actes de
conscience, mais des actes qui sont socialement inquiétants. Exemple, l’association de
malfaiteurs art.238 CP.
Ce constat ne règle pas cependant toutes les difficultés. L’acte préparatoire étant un
acte matériel comme le commencement d’exécution, il y a lieu de savoir comment procéder à
leur distinction. En l’absence d’une définition du commencement d’exécution dans la loi, la
doctrine va proposer des critères à la jurisprudence. Celle-ci va également prendre position
dans ce débat.
1°) La doctrine :
Elle a propose deux critères : un critère objectif et un critère subjectif.
a- Le critère objectif :
Il s’attache exclusivement aux actes déjà commis. Selon ce critère, le commencement
d’exécution est constitué par les actes qui font partie de l’infraction soit comme élément
constitutif, soit comme circonstance aggravante. Par exemple dans le vol, il y a commencement
d’exécution soit dans le fait d’appréhender matériellement la chose d’autrui, soit dans le fait
d’escalader le mur d’une maison. Si on s’en tient à ce critère, l’acte préparatoire serait donc
tout acte qui ne rentre pas dans la définition de l’infraction. Sans doute ce critère est très simple
mais il défend très mal les intérêts de la société. Son application conduit à exclure de la
répression une quantité d’actes qui révèlent chez leurs auteurs une intention criminelle bien
arrêtée.
L’individu surpris très tôt alors qu’il n’a pas encore appréhendé la chose d’autrui
échappera à la répression. De même, on ne pourra punir pour tentative assassinat celui qui aura
pénétré dans une maison par escalade ou effraction avec des intentions homicides et qui aura
été arrêté trop tôt. On pourra seulement le poursuivre pour tentative de vol, car l’escalade et
l’effraction sont des circonstances aggravantes du vol. Pour remédier à la faiblesse de ce
critère, certains membres de la doctrine ont dû proposer un autre critère à la jurisprudence.

b- Le critère subjectif :

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Il tient compte beaucoup plus à l’intention qu’aux actes extérieurs. Selon les tenants de
ce critère, il y a commencement d’exécution quand l’individu a la volonté irrévocable de
commettre l’infraction. Ce critère protège assurément les intérêts de la société mais il est source
d’arbitraire. La loi exige un commencement d’exécution alors que cette théorie se contente
d’une intention irrévocable. Devant l’excès de cette thèse et devant la faiblesse de la thèse
objective, certains auteurs vont proposer une voie à égale distance du critère objectif et du
critère subjectif. Reste à voir la position de la jurisprudence.

2°) La jurisprudence :

Elle utilise actuellement deux formules pour définir le commencement d’exécution.

a- Les formules utilisées :

Dans certains arrêts, la jurisprudence se penche en faveur de la théorie subjective. Elle


définit le commencement d’exécution comme un acte tendant directement au délit avec
intention de le commettre. Dans d’autres décisions, elle le définit de façon objective
puisqu’elle considère le commencement d’exécution comme étant constitué par l’acte qui
tend directement et immédiatement à la consommation du délit. Les formules ainsi employées
donnent une impression de désordre. En vérité malgré la différence de rédaction des arrêts, la
chambre criminelle de la cour de cassation française pense que le commencement d’exécution
est constitué lorsque deux conditions sont réunies : une intention irrévocable qui découle du
caractère univoque des actes et un lien de causalité entre l’acte constituant le
commencement d’exécution et l’infraction projetée.
Le lien de causalité implique que le commencement d’exécution soit proche dans le
temps de la consommation de l’infraction (avortement). Ceci étant précisé, il convient
d’examiner l’application de ces deux formules et d’expliquer les raisons qui ont pu conduire la
jurisprudence dans les cas d’espèce qui lui sont soumis à porter son choix sur l’une de ces
formules et non sur l’autre.
b- L’application de ces formules :

D’abord la jurisprudence a donné une définition subjective du commencement


d’exécution. C’est seulement en 1961 qu’elle va utiliser le critère objectif.

 L’application du critère subjectif :

C’est en matière de vol que ce critère a été appliqué pour la première fois. Dans cette
affaire qui date de 1913, la jurisprudence a retenu comme commencement d’exécution, le fait
d’attendre un encaisseur dans un couloir muni d’une arme et d’instruments indispensables à
l’agression. Les magistrats français ont encore admis l’existence du commencement
d’exécution dans le cas où longuement surveillés par la police sont arrêtés au moment où
porteur d’armes et d’instruments destinés à dissimuler leur identité, ils se trouvaient sur le lieu
de l’infraction projetée.

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La jurisprudence a appliqué la conception subjective en matière d’avortement. Des
arrêts ont considéré comme coupables d’une tentative d’avortement, le médecin qui après avoir
accepté de faire avorter une femme et fixé le montant de ses honoraires pour cette opération,
s’est rendu au domicile de la cliente muni d’une trousse contenant les instruments appropriés.
 L’application du critère objectif :

Le critère objectif a été appliqué pour la première fois en 1961. Dans cette affaire un
tueur à gages avait été soudoyé pour supprimer quelqu’un. Mais au dernier moment, il s’est
dérobé. La chambre criminelle de la cour de cassation a estimé que le comportement du
donneur d’ordres était tout simplement un acte préparatoire parce qu’il était très éloigné du but
interdit par la loi. La même formule employée dans cette décision a été reprise par la
jurisprudence en 1979. Dans cette affaire, un jeune homme avait remis à l’un de ses camarades
de collège une somme d’argent destinée à l’achat de la drogue. Cette somme est envoyée à un
autre ami sous forme de mandat et avec mission d’acheter de la drogue. La mère du destinataire
du titre (le mandant) retient le mandat et le renvoie à l’expéditeur, mais aucun contact n’est pris
avec le vendeur de drogue. Y avait-il dans ces faits commencement d’exécution? La cour
d’appel dans cette affaire répond positivement. La chambre criminelle casse la décision ainsi
rendue au motif que le commencement d’exécution n’est caractérisé que par un acte devant
avoir pour conséquence directe de consommer le délit, celui-ci étant entré dans sa période
d’exécution.
Cette solution est justifiée, car dans ce cas d’espèce, il y a trop de maillons
intermédiaires entre le demandeur et le vendeur de drogue. L’initiative du demandeur existe,
mais elle est éloignée du résultat espéré. Seule l’action d’un intermédiaire plus rapproché du
détenteur de drogue aurait pu être considérée comme un commencement d’exécution.
Les exemples jurisprudentiels ainsi présentés pourraient faire penser que la chambre
criminelle de la cour de cassation française n’a pas de ligne directrice et que les solutions
qu’elle retient sont purement arbitraires. Il suffit cependant d’analyser les décisions rendues
comprendre que le choix du critère objectif ou du critère subjectif n’est pas fortuit. Il obéit à
une logique, à une politique de la chambre criminelle de la cour de cassation française. Celle-ci
veut s’affranchir de toute définition rigide du commencement d’exécution, elle entend garder
son pouvoir d’appréciation. On peut faire ce constat si on cherche à expliquer les décisions
qu’elle a rendues en matière de commencement d’exécution.

c- L’explication de l’utilisation des différentes formules :

Les préoccupations criminologiques ne sont absentes de l’esprit des juges et les


solutions de la chambre criminelle sont rarement critiquées sur le plan de leur opportunité. Le
critère applicable dépend de la nature de l’infraction, des circonstances de sa réalisation et
même de la personne du prévenu. Pour les agressions à main armée, les juges appliquent le
critère subjectif. Cette sévérité est fondée sur des considérations de défense sociale. Pour la
même raison, ils retiennent le critère subjectif lorsque l’acte accompli est le fait d’un
récidiviste.

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Dans d’autres infractions, comme l’achat de drogue, les juges font preuve de prudence
dans la définition du commencement d’exécution. Ils sont indulgents pour les jeunes tentés par
la drogue, mais ils deviennent sévères lorsqu’ils ont affaire à un trafiquant de drogues.
B. L’absence de désistement volontaire 

Selon l’art 2 CP, la tentative d’une infraction n’est punissable que si elle a été
suspendue par des circonstances indépendantes de la volonté de son auteur. Il ressort de ce
texte que l’auteur d’un commencement d’exécution bénéficie de l’impunité lorsque le
désistement est volontaire. Mais pour appliquer ce texte, il importe d’apprécier la cause du
désistement avant de préciser jusqu’à quel moment on peut renoncer à une action criminelle.

1°) Appréciation de la cause du désistement :

Il n’est pas aisé de savoir si un désistement est volontaire ou involontaire. L’hésitation


est encore permise lorsqu’on est en présence d’une situation intermédiaire. C’est le cas
lorsqu’un individu s’arrête délibérément mais sous influence d’une cause extérieure qui ne
présente pas les caractères de la force majeure.

a- Le désistement volontaire :

Seule cette forme de désistement peut entrainer l’impunité de l’auteur d’une tentative.
Le désistement volontaire, c’est le désistement spontané. Il présente ce caractère lorsque
l’individu n’est ni incité, ni contraint par autrui. Il importe peu que l’auteur du commencement
d’exécution ait renoncé par pitié, par remords ou par crainte du châtiment.

b- le désistement involontaire :

C’est le désistement déterminé par une cause totalement extérieure à l’individu. Ce


désistement peut résulter d’obstacles matériels. Par exemple, le coffre fort que le délinquant
voulait ouvrir est blindé.
Il y a toujours désistement involontaire lorsque l’auteur de l’infraction s’est heurté à la
résistance de la victime. Enfin, il est involontaire lorsque l’individu est surpris par un tiers ou
par la police.
c- Les situations intermédiaires :

On parle de situation intermédiaire lorsque le désistement est déterminé la fois par un


facteur interne et un facteur externe. On peut citer comme exemple, l’abandon d’une tentative
de vol dans le magasin de libre service parce que son auteur s’est senti épié par les employés.
On peut encore citer le cas de l’individu, surpris en cour d’exécution de vol, par un de ses amis,
qui le dissuade sans aucune contrainte de poursuivre son dessein criminel.
Pour la jurisprudence, il n’existe pas de formules générales pour régler le problème
des situations intermédiaires. Tout est question d’espèce. Il revient au juge dans chaque affaire
de rechercher la cause prépondérante du renoncement à l’entreprise criminelle.

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2°) Le moment du désistement :

a- Avant la consommation de l’infraction :

Pour savoir si le désistement est volontaire, il faut déterminer le moment de la


consommation de l’infraction. Dans le cas où l’infraction est matérielle, le désistement est
volontaire tant que le résultat interdit par la loi n’est pas réalisé. Exemple : une personne jette
sa victime à l’eau dans l’intention de la noyer et la repêche avant qu’elle ne soit morte. Ce
désistement est volontaire et son auteur ne pourra pas être poursuivi pour tentative de meurtre.
Pénalement, on peut le poursuivre tout simplement pour violence et voie de fait. Au contraire
dans l’infraction formelle, il n’y a pas de désistement volontaire puis que cette infraction est
consommée avant que le résultat n’ait été atteint. Exemple : l’incendie volontaire,
l’empoisonnement, la contrefaçon de billets de banques.

b- Après la consommation de l’infraction :

Le repentir actif ou remords tardifs qui intervient après la consommation de


l’infraction est inopérant. Le délinquant est toujours punissable. Il y a repentir actif lorsque le
délinquant s’est efforcé d’atténuer ou d’effacer les conséquences de son acte. C’est le cas
lorsqu’un individu donne un antidote à sa victime après lui avoir administré des substances
toxiques. Autre exemple, c'est encore le cas en matière de vol lorsque le voleur restitue la chose
volée.
Dans des cas pareils, les tribunaux corrigent la rigueur de la loi et appliquent aux
délinquants les circonstances atténuantes. Le législateur intervient aussi mais de façon
exceptionnelle pour diminuer la sanction applicable au repenti ou pour lui accorder une
exemption de peine (voir pour le délit d’association de malfaiteurs Art 239 (2) CP).

Paragraphe 2 : La répression de la tentative 

A. Le fondement de la répression 

La tentative est punie de la même peine que l’infraction consommée (art 2 CP). Cette
solution a été adoptée par le code pénal dans un but d’intimidation en vue de détourner le plus
possible du crime. Elle se justifie également par des considérations de défense sociale. La
protection de la société commande de mettre sur le même pied l’auteur d’une tentative et
l’auteur d’une infraction consommée.

B. La mesure de la répression 

Elle est déterminée par les articles 2 et 3 du Code Pénal. La tentative n’est pas visée dans tous
les cas. Pour les crimes, elle est toujours punissable ; pour les délits, elle ne peut être punie que
dans le cas expressément prévus par la loi. Pour les contraventions, la répression ne s’impose
pas, car le trouble social est trop faible.

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Section 2 : L’infraction manquée et l’infraction impossible 

Paragraphe 1 : L’infraction manquée 

Dans l’infraction manquée, le résultat n’est pas atteint à cause de la maladresse de son
auteur. Mais tous les actes matériels ont été exécutés de façon complète. Tel est le cas de
l’individu qui tire sur son adversaire et qui ne le tue pas parce qu’il a mal visé. L’infraction
manquée ne pose pas en principe des difficultés majeures. L’art 2 CP l’assimile expressément à
la tentative .Cette assimilation est justifiée car l’auteur d’une infraction manquée est aussi
dangereux pour l’ordre social que l’auteur d’une tentative.

Paragraphe 2 : L’infraction impossible 

Dans cette infraction, le sujet a accompli tous les actes matériels mais il n’a pas atteint
le but visé. Ainsi définie, l’infraction impossible se rapproche nettement de l’infraction
manquée. Mais il existe une différence entre ces deux catégories d’infractions.
Dans l’infraction manquée, le but visé pouvait matériellement être atteint. Par
contre, dans l’infraction impossible le résultat ne pouvait pas matériellement être obtenu car
l’objet même de l’infraction n’existe pas ou encore les moyens employés étaient insusceptibles
de consommer l’infraction.
Par exemple, il y a infraction impossible lorsqu’un individu désirant voler un
portefeuille plonge sa main dans la poche intérieure d’une veste alors que celle-ci est vide. Il y
a encore infraction impossible lorsqu’une personne pratique des manœuvres abortives sur une
femme non enceinte.
L’auteur d’une infraction impossible doit-il être puni comme coupable de tentative ?
Peut-on assimiler l’infraction impossible à l’infraction tentée ? Pour répondre à ces questions, il
faut consulter la doctrine et la jurisprudence.

A. La doctrine 

Elle a proposé trois thèses : la thèse de l’impunité, la thèse de la répression


systématique et les thèses transactionnelles.

1°) La thèse de l’impunité :

Selon les tenants de cette thèse, l’infraction impossible doit rester impunie pour deux
raisons.
Premièrement, cette infraction ne cause aucun trouble à l’ordre social.
Deuxièmement, on ne peut pas assimiler cette catégorie d’infraction à l’infraction
tentée. L’art 2 CP exige un commencement d’exécution, or en cas d’infraction impossible, il
n’y a pas de commencement d’exécution concevable. Cette thèse est critiquable, car dans une
infraction impossible, ce qui est impossible c’est le résultat et non le commencement
d’exécution.

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2°) La thèse de la répression systématique :

Les tenants de cette thèse avancent deux arguments pour expliquer leur position.
Premièrement, au point de vue subjectif, il faut observer que l’infraction impossible révèle chez
son auteur une intention criminelle dangereuse. Deuxièmement, au point de vue objectif, il faut
remarquer l’infraction impossible ne suppose pas de simples actes matériels d’exécution, son
auteur est allé jusqu’au but de son action même si le résultat escompté n’est pas atteint.
Les arguments ainsi présentés vont amener les membres de cette doctrine à assimiler
l’infraction impossible à l’infraction tentée.

3°) Les thèses transactionnelles :

Il existe deux thèses transactionnelles : la première repose sur la distinction entre


impossibilité absolue et impossibilité relative. La seconde sur la distinction entre impossibilité
de droit et impossibilité de fait.

a- La distinction entre impossibilité absolue et impossibilité relative  :

L’impossibilité est absolue lorsque l’objet de l’infraction n’existe pas. L’impossibilité


est encore absolue lorsque les moyens employés par la réalisation sont inefficaces. Exemple, le
fait de tirer avec un fusil qui n’est pas chargé ou le fait d’empoisonner sa victime avec des
substances non toxiques.
L’impossibilité est relative lorsque l’objet existe mais ne se trouve pas là où l’agent
croyait qu’il se troublait ou lorsque les moyens sont en eux-mêmes efficaces mais ont été
utilisés de façon maladroite. Exemple, le fait de tirer dans une chambre d’hôtel
momentanément vide ou encore, le fait de tirer avec une arme qui s’est rayée.

b- Distinction fondée sur l’impossibilité de fait et l’impossibilité de droit :

L’impossibilité de fait qui dû aux moyens utilisés ou à l’emplacement de l’objet. C’est


le cas lorsqu’un individu met sa main dans la poche d’une veste pour y dérober de l’argent
alors que celle-ci est vide. Cette forme d’impossibilité n’exclut pas la répression.
En revanche, l’impossibilité de droit résultant de l’absence d’un élément constitutif de
l’infraction entraîne l’impunité. Tel est le cas de l’individu qui tire sur une personne déjà
morte.
Ces thèses transactionnelles sont critiquables, car il n’existe pas de degré dans
l’impossibilité. Elles ont aussi l’inconvénient de ne tenir aucun compte de la volonté de l’auteur
de l’infraction impossible et laissent impuni un individu qui s’est révélé dangereux pour la
société. C’est pour ces raisons que ces distinctions transactionnelles n’ont pas reçu un écho
favorable auprès de la jurisprudence actuelle.

A. La jurisprudence 

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Elle assimile actuellement l’infraction impossible à l’infraction tentée. Cette règle
connait cependant des limites.
1°) L’assimilation de l’infraction impossible à l’infraction tentée :

Pour la jurisprudence, l’infraction impossible n’est rien d’autre qu’une infraction


tentée. Les juges retiennent dans une infraction impossible tous les éléments de la tentative :
 Un commencement d’exécution,
 Une absence de désistement volontaire.
C’est sur la base de cette analyse que les juges ont été conduits à retenir la répression
pour une tentative d’avortement commise par des procédés inaptes à la procurer. En
s’engageant ainsi sur la voie d’une répression généralisée, la cour de cassation française a
retenu la tentative de meurtre sur une personne déjà décédée.
Selon cette haute juridiction, le fait d’exercer des violences sur une personne dans
l’intention de lui donner la mort est un commencement d’exécution et le fait que la victime soit
déjà morte est une circonstance indépendante de la volonté de son auteur.

2°) Les limites de la répression :

L’infraction impossible est punissable dans toutes les hypothèses où la tentative est
punissable. Ainsi, si la tentative d’un délit n’est pas prévue par le code pénal ; on ne pourra pas
sanctionner l’infraction impossible qui concernerait ce délit.
Cette limite est liée aux prescriptions de l’art 3 CP exemple : L’art 49 al 2 du CP punit
le refus de porter secours à une personne en danger. Ce texte ne s’applique que lorsque la
victime est vivante au moment des faits.
Il y a infraction impossible lorsque l’individu s’abstient de porter secours à une
personne en péril et qui était déjà morte. L’auteur de cette infraction impossible échappe à la
répression, car l’art 49 al 2 ne réprime pas la tentative du délit de non assistance à personne en
danger.
La répression de l’infraction impossible est encore exclue lorsque les circonstances de
l’infraction révèlent que l’élément moral fait défaut. C’est le cas lorsqu’un individu tire sur une
personne avec un fusil d’enfant tout en sachant que cette arme est absolument inoffensive.

Chapitre II : L’ELEMENT MORAL

L’élément moral est le rapport psychologique qui existe entre le sujet pénal et son
acte. En son absence, le sujet échappe à la répression même si son comportement correspond à
l’élément matériel tel qu’il a été décrit par la loi. L’élément moral est donc une condition
nécessaire à l’existence de l’infraction.

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Section 1 : Le contenu de L’élément moral 

Il varie selon que l’infraction est intentionnelle ou non.

Paragraphe 1 : L’élément moral dans les infractions intentionnelles :

Dans ces infractions, l’élément moral est l’intention délictueuse

A. Définition de l’intention délictueuse

L’intention délictueuse encore appelée dol général est la volonté tendue vers la
réalisation de l’infraction. Dans cette définition, on peut trouver deux éléments.
Premier élément : la volonté de réaliser l’acte interdit, l’auteur d’une infraction intentionnelle
doit agir avec volonté c'est-à-dire en toute conscience et en toute liberté. De façon négative, il
ne doit être ni dément, ni contraint.
Deuxième élément : la recherche du résultat prohibé par la loi , l’intention délictueuse résulte
le plus souvent dans le texte incriminateur de l’utilisation d’expressions telles que « mauvaise
foi » « sciemment » « à dessein » »avec connaissance »  « frauduleusement »,  « volontaire »
exemple : l’art 280 CP dispose « l’homicide commis volontairement est qualifié meurtre ».
L’intention dans le délit de meurtre consiste en la volonté de commettre l’homicide. En
d’autres termes, l’intention suppose ici qu’étant ni dément, ni contraint, on a désiré ôter à autrui
l’existence
A. La distinction de l’intention délictueuse et les mobiles 

Cette distinction est capitale, car si l’intention à l’existence de l’infraction. Le mobile


est différent sauf exception.

1°) Le principe de l’indifférence des mobiles

Les mobiles sont les sentiments particuliers qui ont inspiré l’acte défendu par la loi.
Ils varient d’une infraction à l’autre et même dans le cadre d’une incrimination donnée.
Exemple : le meurtre peut être commis par jalousie, cupidité, vengeance, cruauté, pitié, amour.
Les mobiles sont donc différents de l’intention, qui, elle est une notion abstraite, en ce sens
qu’elle est toujours semblable pour une même infraction.
Ainsi dans le meurtre, l’intention, c’est toujours la volonté consciente et libre
d’accomplir l’acte entraînant la mort de la victime. Il faut retenir que seule l’intention est
indispensable à l’existence de l’infraction. Les mobiles, qu’ils soient honorables ou crapuleux,
ne sont pas des éléments constitutifs de l’infraction et ne font pas échec à la répression.

2°) Exception au principe de l’indifférence des mobiles

Le mobile peut influer soit sur la répression, soit sur l’existence de l’infraction.

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a. Le mobile peut influer sur la répression :

Si en droit, le principe est l’indifférence des mobiles, en pratique le problème se


présente autrement. Les juges du fond réduisent le taux de la peine en fonction du mobile grâce
au jeu des circonstances atténuantes. De même, en cours d’assises, les juges n’hésitent pas à
acquitter lorsqu’à leurs yeux le mobile n’est pas répréhensible. Cette situation souvent retenue
pour les crimes passionnels constitue sur le plan juridique une confusion regrettable entre
l’intention et le mobile.

b. Le mobile peut influer sur l’existence de l’infraction :

Dans certains cas, le législateur prend en considération le mobile de sorte que


l’infraction n’existe que si à la volonté abstraite s’ajoute un mobile particulier. Ce mobile
particulier, on l’appelle dol spécial. Exemple : en matière de vol, seule la volonté de se
comporter en maître de la chose d’autrui permet de qualifier la soustraction (animus domini).

c. L’intention délictueuse et les résultats de l’action envisagée :

Si le résultat effectivement atteint est exactement celui qui était désiré, il y a dol
simple ou déterminé ; mais des complications peuvent surgir. Il en va ainsi lorsque la
circonstance entre le dol et le résultat n’est pas nette. C’est l’hypothèse du dol indéterminé, du
dol éventuel, ou du dol praeter intentionnel.

1°) Le dol indéterminé :

Tout en recherchant un résultat délictueux ; l’agent ne pouvait à l’avance se


représenter en quoi il allait consister. L’individu qui porte des coups volontaires sur sa victime
ne peut à priori savoir s’il en résultera pour la victime des ecchymoses ou une incapacité
temporaire voire définitive. La loi règle ce problème en tenant compte de la gravité du résultat
produit. On peut citer comme exemple les arts. 294 à 296 CP relatifs aux CBV. Ces textes
proportionnent le taux de la peine à l’étendue du préjudice éprouvé par la victime.

2°) Le dol éventuel :

Il y a dol éventuel lorsque le sujet sans vouloir le résultat dommageable l’envisage


comme simplement possible. C’est l’hypothèse de l’automobiliste qui brûle un feu rouge et tue
un piéton ? La question posée, c’est de savoir s’il faut assimiler le dol éventuel à une intention
criminelle ou s’il faut considérer comme une simple imprudence.
Deux solutions sont concevables : la première est favorable à l’impunité de l’auteur
d’un dol éventuel ; la seconde voie est la répression. Dans cette hypothèse, deux attitudes sont
possibles : qualifier le dol éventuel de faute d’imprudence ou l’assimiler à une intention
criminelle.
La thèse de la faute d’imprudence est actuellement adoptée par la jurisprudence et la
plupart des auteurs. La loi intervient sur cette question difficile non pour poser une règle

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générale mais pour assimiler dans certains cas le dol éventuel à l’intention criminelle. Par
exemple, l’art 406 dernier alinéa CP punit l’incendie volontaire ayant entrainé la mort d’une ou
de plusieurs personnes comme un assassinat.

3°) Le dol praeter intentionnel :

Praeter intentionnel signifie au-delà de l’intention. C’est l’hypothèse où le résultat


effectivement atteint n’a été visé que partiellement par l’intention. Pour ces raisons, la peine
applicable est la peine intermédiaire entre celle correspondant au résultat voulu et celle
correspondant au résultat atteint.
On peut trouver un bel exemple dans l’art 299 al 1er du CP. Selon ce texte, si les
violences ou privation commises sur un enfant de moins de 15 ans ont occasionne la mort sans
intention de la donner, son auteur en court non la peine des travaux forcés à perpétuité prévue
par l’art 289 du CP pour le meurtre mais la peine des travaux forces à temps de 10 à 20 ans. Le
délinquant est puni moins sévèrement que l’auteur d’un meurtre mais plus sévèrement que
l’auteur d’un délit de CBV.

Paragraphe 2: L’élément moral dans les infractions non intentionnelles 

Pour les infractions les moins graves, le législateur exige seulement une faute non
intentionnelle. Ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire pour que le délit soit réalisé que l’agent
pénal ait eu l’intention d’accomplir un acte illicite. Les infractions non intentionnelles
regroupent les délits d’imprudence, les contraventions et les délits matériels.

A. Les délits d’imprudence 

L’imprudence consiste soit à n’avoir pas prévu les conséquences dommageables de


l’acte qu’on accomplit ; soit à omettre de prendre les précautions qui auraient empêché le
dommage de survenir. Concrètement, l’imprudence consiste selon les termes de la loi en une
inattention, une maladresse ou une négligence ou une inobservation des règlements
(violation des règlements).
La doctrine distingue deux catégories d’imprudence une imprudence consciente et une
imprudence inconsciente.
L’imprudence est consciente lorsque le sujet accomplit son action alors qu’il savait
que celle-ci pouvait entraîner un résultat dommageable. C’est le cas de l’automobiliste qui
roule à grande vitesse sur une route fréquentée par des piétons.
L’imprudence est inconsciente lorsque le sujet n’a pas prévu la possibilité du résultat
mais, a cependant commis un oubli. Tel est le cas de l’individu qui nettoie son fusil de chasse et
tue la personne qui est devant lui alors qu’il pensait avoir déchargé son fusil.
L’auteur d’une faute d’imprudence peut être condamné à une peine mais aussi à des
dommages - intérêts envers la victime. Une telle solution est dictée par la règle de l’identité de
la faute pénale et de la faute civile d’imprudence. Exemple, dans l’infraction de CB
involontaires, le juge pourra appliquer une sanction pénale sur la base de l’art 307 du CP et

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allouer des dommages intérêts à la victime par application des arts 118 et 119 du Code des
Obligations.

B. Les contraventions 

Les contraventions consistent le plus souvent dans une désobéissance à une mesure de
police, à une règle jugée nécessaire au maintien de l’ordre et destinée à prévenir des atteintes à
la sécurité ou à éviter des dommages.

C. Les délits matériels 

Ce sont des délits correctionnels qui n’exigent pas une intention. Il s’agit des délits en
matière de chasse, sont aussi des délits en matériel, la plupart des infractions douanières.
Dans toutes ces infractions, l’élément moral est très mince. Il est établi lorsque le sujet
a agi volontairement au moment de son action. La jurisprudence est du même avis puisqu’elle
affirme avec force que « toute infraction même non intentionnelle suppose que son auteur ait
agi avec volonté ».

Section 2 : La disparition de l’élément moral 


L’élément moral disparaît en présence des causes de non imputabilité. Contrairement
aux faits justificatifs qui sont des causes objectives d’irresponsabilité parce que liés à
l’infraction, les causes de non imputabilité sont des causes subjectives d’irresponsabilités en ce
sens qu’elles sont rattachées à la personne de l’agent pénal. Les causes de non imputabilités
sont : la démence, la contrainte et l’erreur.

Paragraphe 1 : La démence 

L’art 50 CP dispose : « il n y a crime, ni délit, lorsque le prévenu était en état de


démence au temps de l’action… ». Ce texte prévoit pour son application deux conditions : un
état de démence et une démence qui doit exister au moment de l’action. Il convient d’analyser
ces deux conditions avant de passer à l’examen des effets de la démence.

A. L’état de la démence 

En médecine mentale, la démence est une déchéance progressive et irréversible de la


vie psychique. En droit pénal, le terme démence désigne toute forme d’aliénation mentale. Il
s’applique aux affections de l’intelligence peu importe qu’elles soient acquise par l’effet d’une
maladie. Il en va ainsi pour l’imbécilité, l’idiotie et le crétinisme. Il vise aussi la folie générale
ou localisée, comme la folie de persécution pourvue seulement que l’insuffisance des facultés
mentales se manifeste au moment des faits. La détermination de la démence est une question de
fait laissée à l’appréciation des juges du fond. En pratique le juge fera procéder à un examen
par des médecins psychiatres mais le rôle de ces experts est purement consultatif et leurs
conclusions ne lient pas le juge. La principale difficulté de l’application de l’art. 50 CP tient est

43
au fait qu’il existe à côté de la démence proprement dite des états voisins de la démence qui
peuvent entrainer une altération de la volonté. Il s’agit des anomalies mentales et de l’ivresse.

a. Les anomalies mentales :

N’est pas une démence complète, l’individu qui en est affecté souffre de troubles
mentaux qui altèrent de façon passagère sa faculté de comprendre et de vouloir. C’est le cas des
déficients mentaux et des demi-fous.

b. L’ivresse :

Pour résoudre le problème de l’ivresse, on a dû procéder aux distinctions suivantes :


 si l’ivresse est accidentelle, la responsabilité du sujet est exclue. C’est le cas
lorsqu’un individu absorbe une boisson sans connaître son pouvoir enivrant et
commet ensuite une infraction.
 si l’individu a bu sciemment une boisson alcoolique sans avoir nourri
l’intention de commettre l’infraction, sa responsabilité pénale subsiste malgré
l’altération de sa volonté.
 Enfin, si l’individu a pris une boisson pour se donner le courage de commettre
l’infraction, sa responsabilité sera totale.

B. La démence doit exister au temps de l’action 

La démence n’exclue la responsabilité pénale que si elle est contemporaine de


l’infraction. Cependant si la démence ne survient qu’après l’infraction, les poursuites pénales
seront arrêtées à l’encontre de l’aliéné. Par contre, si la démence se déclare après la
condamnation irrévocable, dans ce cas les peines privatives de droit et les peines pécuniaires
seront exécutées. Il en va ainsi pour l’amende et la dégradation civique mais il y aura obstacle à
l’exécution des peines privatives de liberté.

C. Les effets de la démence 

La démence entraîne deux effets :

1. Sur le plan pénal :

La démence exclut le discernement et entraîne comme conséquence, la suppression de


la responsabilité pénale. Peu importe que l’infraction soit un crime, un délit ou une
contravention. Mais étant une cause subjective, la démence ne fait que disparaître la
responsabilité du dément. Par conséquent l’infraction subsiste pour tous ceux qui y ont
participé comme auteurs et comme complices. Si l’affaire est entre les mains du juge
d’instruction, le dément doit bénéficier d’un non lieu. Si le dossier est porté à la connaissance
de juridiction de jugement, le dément doit être relaxé ou acquitté.

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2. Sur le plan civil :

La démence ne supprime pas la responsabilité civile. L’art. 121 du Code des


Obligations le dit en des termes très clairs « celui qui a causé un dommage à autrui alors qu’il
était sous l’emprise d’un trouble mental n’en est pas moins obligé à réparation ».

Paragraphe 2 : La contrainte 

Elle est prévue par l’art 50 CP. Ce texte dispose « il n’y a ni crime, ni délit lorsque le
prévenu a été contraint par une force à laquelle il n’a pu résister ». Il résulte de ce texte que
la contrainte est une force qui enlève au moment de l’action, tout pouvoir de décision à l’agent
pénal. On peut même dire qu’elle abolit la volonté de l’individu. Pour étudier la contrainte il
faut examiner tour à tour les formes de la contrainte et les conditions que doit remplir la
contrainte pour pouvoir exonérer le délinquant.

A. Les formes de la contrainte :

La contrainte peut épouser deux formes : elle peut être physique ou morale.

1. La contrainte physique :

Cette forme de contrainte agit sur le corps de l’individu ; elle peut être externe ou
interne.
a. La contrainte physique externe :

Dans cette hypothèse, la contrainte peut être le fait des forces de la nature : une
tempête, une inondation. Exemple : le baigneur obligé de se montrer nu en raison de la
dispersion de ses vêtements par le vent, ne saurait être condamné pour outrage public à la
pudeur. Le fait de l’homme est une autre manifestation de la contrainte physique externe.
Exemple : un marin ligoté par des voleurs et qui ne peut se rendre à son bord en raison de ces
circonstances, ne saurait être poursuivi pour désertion.

b. La contrainte physique interne :

Le droit civil ne connait que la contrainte physique externe ou force majeure. En droit
pénal l’art 50CP permet de penser que la contrainte peut être externe ou interne. Fort de la
rédaction des textes, les juges reconnaissent un effet exonératoire à la contrainte physique
interne. Exemple : une personne malade depuis plusieurs jours et qui ne défère pas à la
convocation d’un juge instructeur ne peut être poursuivie pour délit de non comparution. Le
sommeil peut aussi exonérer le délinquant. Exemple : un voyageur qui a succombé à un
profond sommeil lui ayant fait dépasser la gare de destination ne peut être poursuivie pour
infraction à la police des chemins de fer.

2. La contrainte morale :

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La contrainte morale agit sur la volonté et supprime ses facultés de libre et complète
détermination. Elle est d’origine externe ou interne.

a. contrainte morale externe :

Dans cette hypothèse, la contrainte peut résulter des menaces émanant d’un tiers. C’est
l’individu qui, menacé de mort est obliger d’héberger un malfrat en fuite. C’est aussi le cas du
caissier qui, parce qu’un revolver est braqué sur lui, est obligé de remettre aux bandits les
sommes d’argent qui ne lui appartient pas.

b. contrainte morale interne :

Cette forme de contrainte résulte des passions, émotions ou des convictions de


l’individu. C’est le cas par exemple de l’individu qui, parce que sa concubine a été condamnée,
envoie des injures à un magistrat. C’est aussi le cas de l’individu passionné des jeux qui tire sur
sa banque des CSP. C’est aussi le cas de l’individu qui invoque ses convictions religieuses pour
ne pas exécuter ses obligations militaires.
Sauf dans le cas où elle est assimilable à la démence, la contrainte morale interne
n’entraine jamais l’impunité. Cette solution est compréhensible car tous les délits sont le
résultat d’émotions ou de passion auxquelles l’individu a précisément le devoir de résister.
Deux restrictions ont été apportées au principe de l’exclusion de la contrainte morale interne.
En fait tout d’abord les juges accordent le bénéfice des circonstances atténuantes à
l’auteur d’un crime passionnel. C’est le cas de l’époux trompé qui blesse ou tue sa femme et
son amant. C’est également le cas de la fille séduite puis abandonnée qui, pour venger son
honneur tue ou blesse son séducteur. Parfois même, les cours d’assises vont jusqu’à acquitter
les délinquants passionnels. Ensuite en définitive, l’auteur d’un meurtre de CBV bénéficie de
l’excuse de provocation s’il a été provoqué par des coups ou violences envers les personnes Art
309 CP.

B. Les conditions que doit remplir la contrainte 

On admet que la loi exige deux conditions :

1. L’irrésistibilité de la contrainte :

Cela signifie que la contrainte doit détruire entièrement chez l’agent pénal la liberté de
décision sans laquelle il ne peut y avoir de volonté coupable. La jurisprudence apprécie
sévèrement la notion d’irréversibilité. Pour les juges cette condition n’est remplie que lorsque
le sujet est dans l’impossibilité absolue de respecter la loi.
Malgré la critique de la doctrine et les termes de la loi, qui ne semblent viser que
l’impossibilité relative, la jurisprudence a toujours retenu la même solution. Les meilleures
parties seraient pourtant d’apprécier l’irréversibilité en tenant compte e la personne de l’agent
et de le juger en fonction de ses possibilités.

46
Mais on peut comprendre la position actuelle de la jurisprudence ; elle cherche à éviter
toute difficulté de preuve quant à l’irréversibilité de la contrainte. En effet, il n’est pas toujours
certain que la contrainte invoquée ait été si pressante, si forte qu’elle ait supprimé toute
possibilité d’agir autrement.

2. L’absence de faute antérieure :

La contrainte ne doit pas être précédée par une faute de l’agent pénal. Cela veut dire que
l’attitude de l’agent pénal ne doit pas être à l’origine de la contrainte. L’exemple célèbre est
celui du marin déclaré déserteur alors qu’il n’avait pas pu regagner son bord l’heure prévue par
suite d’une mise en garde à vue consécutive à une ivresse.

Paragraphe 3 : L’erreur 

Malgré le silence de la loi, la doctrine et la jurisprudence se son posé la question de


savoir si on peut admettre l’erreur comme cause d’irresponsabilité. La réponse à cette question
présente des différences selon que l’erreur est de fait ou de droit.

A. L’erreur de fait 

C’est une représentation inexacte de la réalité matérielle. Les solutions apportées à une
erreur de fait varie selon que l’infraction est intentionnelle ou non intentionnelle.

1. L’erreur de fait dans les infractions intentionnelles :

Dans ces infractions, l’erreur exclut la responsabilité lorsqu’elle porte sur un fait
essentiel de l’infraction mais elle la laisse subsister lorsqu’il s’agit d’un élément accessoire.

a. L’erreur portant sur un élément essentiel de l’infraction :

Il faut entendre par élément essentiel de l’infraction un élément essentiel de l’infraction.


Exemple : il a été jugé qu’on ne peut poursuivre pour détournement de mineur si une personne
se trompe sur l’âge de la personne détournée. Doit on tirer comme conséquence que la personne
qui invoque une erreur de fait est à l’abri de toute poursuite. A cette question, il faut répondre
par la négative. Sans doute on ne peut poursuivre pour infraction intentionnelle mais on peut
retenir une infraction non intentionnelle si l’erreur est le fruit d’une négligence ou d’une
imprudence. Exemple : le pharmacien qui, au lieu du remède prescrit, livre par erreur un
poison, est coupable, non du crime d’empoisonnement mais seulement du délit d’homicide par
imprudence.

b. L’erreur portant sur un élément accessoire de l’infraction :

Dans ce cas la responsabilité pénale subsiste. Exemple : l’agent croit voler un tableau
de maître mais en réalité il ne dérobe qu’une simple copie.

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L’erreur sur la personne. Cette erreur n’atténue en rien l’intention criminelle. Ainsi, il
y a homicide volontaire si un individu tue X alors qu’il voulait tuer Y. la jurisprudence
considère même dans cette hypothèse que l’auteur de cette infraction est responsable de toutes
les circonstances aggravantes attachées à la personne de la victime qu’il voulait atteindre.
Exemple : la peine de parricide peut être retenue à l’encontre de l’individu qui tue un tiers en
croyant tuer son père. Que penser maintenant de l’hypothèse où un individu, en dirigeant mal
son coup, atteint une personne autre que celle qu’il avait visée. On a prétendu que dans cette
hypothèse, il y aurait deux délits : un délit manqué à l’égard de la personne visée, un délit
d’imprudence à l’égard de la personne atteinte par erreur. Mais ce raisonnement n’est pas celui
de la jurisprudence.
Pour la jurisprudence, il n y a qu’un seul délit, celui qui était voulu par l’agent pénal.
Elle décide encore que les circonstances doivent être attachées à la personne de l victime que
l’on voulait atteindre. Si par exemple le sujet était en état de légitime défense vis-à-vis de la
personne qu’il visait, il le sera vis à vis de celle qui a été la victime. De même, si le délit a été
prémédité vis-à-vis de la personne que l’on voulait atteindre, il le sera à l’égard de la victime
réelle.

2. L’erreur de fait dans les infractions non intentionnelles :

Dans les infractions non intentionnelles, l’erreur de fait est indifférente. En claire, elle
ne supprime pas l’élément moral. C’est dire simplement que malgré son erreur, l’auteur d’une
infraction d’imprudence ou d’une contravention est toujours punissable. Exemple : si au cours
d’une chasse, un individu tue son compagnon alors qu’il croyait tuer un phacochère, on pourra
toujours le poursuivre pour homicide par imprudence. L’individu qui blesse un tiers en
nettoyant son fusil qu’il croyait déchargé reste coupable de blessure par imprudence.

B. L’erreur de droit 

Elle peut consister soit dans une ignorance de la loi, soit dans une interprétation
inexacte de ses dispositions. Cette forme d’erreur n’exclu pas la responsabilité pénale. Celle-ci
demeure entière qu’il s’agisse d’une infraction intentionnelle ou d’une infraction non
intentionnelle. Cette solution trouve son fondement dans l’adage : ‘‘ nul n’est sensé ignorer la
loi’’.

TITRE III : LES PARTICIPANTS A L’INFRACTION : LES


PERSONNES RESPONSABLES

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Une infraction peut avoir été commise par plusieurs personnes. La participation de ces
divers agents peut se présenter sous des formes variées. Trois situations vont retenir notre
attention : la complicité, la coaction et la responsabilité pénale du fait d’autrui.

Chapitre I : LA COMPLICITE

Elle met en scène une personne qui commet l’infraction de manière complète et une
autre personne qui tire les ficelles. La complicité est réglée par les articles 45 et 46 du CP. Ces
deux textes posent les conditions de la complicité et la répression du complice.

Section 1 : Les conditions de la complicité punissable 

La loi exige trois conditions : un fait principal punissable, un acte matériel de


complicité et un élément moral de complicité.

Paragraphe 1 : Un fait principal punissable 

Pour que la complicité soit punissable, il faut qu’il y ait un fait principal punissable.
Le fait principal punissable est un crime, un délit et exceptionnellement une contravention. Si le
fait principal n’est pas punissable parce qu’il n’est pas prévu par la loi ou parce qu’il est
amnistié, la complicité n’est pas punissable. Le complice échappe donc à la répression si
l’auteur principal bénéficie d’un fait justificatif ou d’une amnistie légale comme celle de l’art
365 du CP. Ce texte justifie le vol entre époux ou entre parents ; si l’auteur principal figure
parmi les personnes énumérées par ce texte, le complice ne peut plus être poursuivi. Pour
l’application des règles de la complicité, il importe peu que l’auteur principal soit effectivement
punit, l’acte du complice est lié au fait principal punissable, donc il emprunte la criminalité. Il
peut donc être poursuivi même si l’auteur principal est décédé ou n’a pas été découvert.
Pour l’application des règles de complicité, il faut retenir qu’il n’est pas nécessaire que
le fait principal soit consommé, une simple tentative suffit. On exprime cela en disant que la
complicité de tentative est punissable. La complicité de tentative s’oppose à la tentative de
complicité qui elle, n’est pas punissable.

Paragraphe 2 : Un acte matériel de complicité 

A. La forme des actes matériels de complicité 

L’art 46 du CP prévoit 03 cas de complicité : l’instigation, la fourniture de moyen et


l’aide ou l’assistance.

1)- La complicité par instigation :

L’instigation consiste à pousser quelqu’un vers quelque chose. Elle prend plusieurs
formes.
a) La provocation (art. 46 al.1 CP) :

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Elle se manifeste par l’un des moyens suivants : les dons, promesses, menaces, abus
d’autorité ou de pouvoir, machination ou artifices coupables. Exemple : une somme d’argent
remise à une personne en vue de la commission de l’infraction est tout à fait suffisante pour
réprimer au sens de la loi même si celle emploie dans l’art. 46 CP, le pluriel.
Des combinaisons sont également possibles tel est le cas de l’amant qui incite sa
maîtresse à se faire avorter en lui promettant de l’argent si elle y consent et en la menaçant de
l’abandonner dans le cas contraire.
Ceci précisé, il faut retenir que’ la provocation ne peut intéresser la loi que si elle
rempli 03 conditions.
En premier lieu, elle doit être directe c'est-à-dire que l’idée doit être exprimée de
façon très nette par le provocateur. En second lieu, elle doit être individuelle c'est-à-dire
adressée personnellement à celui qui que l’on veut convaincre de commettre l’infraction.
Enfin, elle doit être suivie des faits. Cette condition est remplie lorsque le crime ou le délit a
été consommée ou tenté par la personne provoquée.

b) Les instructions (art. 46 al.2) CP) :


Elles ne sont prises en considération que si elles sont précisées pour guider vraiment
l’auteur principal dans la commission de l’infraction. Exemple : des simples conseils donnés en
vue de commettre l’avortement sans aucun détail ne constituent pas un acte de complicité. En
revanche, il y a complicité lorsqu’une personne indique en vue d’un cambriolage, les heures
auxquelles une personne est absente chez elle.

2)- La fourniture de moyens (art. 46 (2) CP) :

Sont complices ‘‘ ceux qui auront des armes, des instructions ou tout autre moyen
qui aura servi à l’action sachant qu’ils devaient y servir’’. C’est le cas de celui qui a prêté une
arme en vue de commettre un crime. C’est encore le cas lorsqu’une personne procure une
échelle, des fausses clés en sachant qu’elles devaient servir à la commission de l’infraction. En
droit français, le nouveau CP ne fait pas référence à la complicité par fourniture de moyen.
Celle-ci est aujourd’hui considérée comme une forme de complicité par aide ou par assistance.

3)- La complicité par aide ou assistance (art. 46 (3) CP) :

Sont complices ‘‘ ceux qui auront avec connaissance, aidé ou assisté l’auteur ou les
auteurs de l’action dans les faits qu’ils auront préparé ou facilité ou dans ceux qu’ils auront
consommé.’’ L’aide ou l’assistance recouvre une quantité d’articles. La loi vise les faits qui ont
préparé ou facilité l’infraction et également les faits réalisés au moment même de l’exécution
matérielle de l’infraction. Exemple : on peut citer le cas de l’individu qui téléphone pour faire
venir la victime. Si l’auteur principal réalise l’infraction projetée, la personne qui a téléphoné
sera poursuivie pour complicité. Exemple : il y a complicité par aide ou assistance lorsqu’un
individu joue du clairon pour couvrir les cris de la personne qu’assassine ou qu’on viole.

B. Les conditions de manifestation des actes de complicité 

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1)- Les actes de complicité doivent être positifs :

L’individu qui assiste sans rien dire et sans intervenir ne peut être poursuivi, si
blâmable que soit sa passivité. La meilleure preuve en est qu’il a fallu créer des délits
d’omission pour sanctionner de telles abstentions (voir art. 48 et 49 du CP). Cependant, la
jurisprudence a reconnu parfois un cas d’aide positif à un comportement essentiellement passif.
C’est le cas de l’amant qui se borne à accompagner sa maîtresse chez une avorteuse. Cet
individu est répréhensible selon la jurisprudence parce que par sa présence et son attitude, il
apporte un appui moral à l’auteur de l’avortement.
Qu’en est-il maintenant lorsqu’il s’agit d’une complicité indirecte ? Pour avoir la
complicité indirecte ou ce qu’on appelle complicité indirecte, il faut partir d’exemples.
Exemple 1 : un homme A met en rapport une femme B qu’il sait enceinte et entend se
faire avorter avec un tiers C qui lui indique l’adresse d’un avorteur D. A est il complice du délit
d’avortement commis par D ?
Exemple 2 : un individu A désireux de commettre un cambriolage, demande à son
complice B de se renseigner auprès d’un familier C qui donne les instructions nécessaires. C est
il coupable de complicité de vol. Pour la doctrine majoritaire, on peut punir le complice du
complice. Sur cette question, la jurisprudence a longtemps manqué de netteté, mais aujourd’hui
sa position ne fait aucun doute, elle est favorable à la répression du complice du complice.

2)- Les actes matériels de complicité doivent être antérieurs ou concomitants à la


commission de l’infraction :

Sont antérieurs à l’infraction principale, les instructions, la provocation et la fourniture


de moyens sont également antérieurs à l’infraction principale, l’aide ou l’assistance prêtée à
l’auteur ou aux auteurs dans les faits qui ont préparé ou facilité l’infraction.
Pour les actes de complicité concomitants à la commission de l’infraction, il pourra
s’agir des faits d’aide ou d’assistance les plus variées. Par exemple, tenir une échelle, jouer de
la trompette pour couvrir les cris de la victime en cas de viol. De simples faits postérieurs à la
réalisation de l’infraction ne peuvent donc être considérés comme des actes de complicité. Ces
actes échappent à toute sanction pénale sauf s’ils sont érigés en délits distincts. Exemple : le
recel des choses n’est pas un fait de complicité mais un délit distinct (voir les articles 430 et
431 CP).
Mais on retiendra que la jurisprudence actuelle considère qu’une attitude postérieure à
la commission d’une infraction peut donner lieu à des poursuites sous le chef de complicité si
cette intervention est déterminée par un accord conclu entre avant l’infraction. Exemple : celui
qui aide et assiste dans leur fuite les coauteurs d’un vol peut être poursuivi comme complice si
cette protection résulte d’un accord préalable.

Paragraphe 3 : L’élément moral de complicité 

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L’élément moral est une faute intentionnelle si on s’en tient bien entendu à l’art. 46
CP. La preuve de l’intention incombe à la partie poursuivante, le juge est invité à constater
l’existence de l’intention. On peut cependant relever 03 difficultés.

1)- L’infraction commise par l’auteur principal diffère de l’infraction projetée :

 Si la différence entre les deux infractions tient à leurs éléments constitutifs, la


complicité n’est pas punissable. Exemple : on prête un fusil à un créancier pour qu’il puisse
intimider son débiteur, mais il commet un meurtre sur une personne autre que le débiteur, la
jurisprudence a décidé dans ce cas que le prêteur du fusil n’était pas complice de cette action
qui était étrangère au plan qui avait été arrêté ;
 Si les deux infractions diffèrent seulement par leurs circonstances, la complicité
est alors punissable. Exemple : un individu fourni des renseignements à l’auteur principal pour
la réalisation d’un vol simple mais ce vol a été commis de nuit ou en réunion. La jurisprudence
pense dans ce cas que cet individu est répréhensible même s’il ignorait les circonstances qui
avaient accompagné l’infraction réalisée par l’auteur principal.
Pour expliquer cette solution, la jurisprudence affirme dans ses arrêts que l’individu
qui entend collaborer à la réalisation d’une infraction doit prévoir toutes les circonstances qui
sont susceptibles d’accompagner ce fait.

2)- Les problèmes soulevés par les infractions d’imprudence :

Exemple : l’individu se trouvant à côté du chauffeur d’un véhicule, encourage ce


dernier à commettre un excès de vitesse générateur d’un accident corporel. Dans ce cas, la
jurisprudence n’hésite pas à retenir la complicité. Mais la doctrine est réticente. Elle fait
remarquer que l’appel aux règles de la complicité est inutile puis que la faute du complice
réunit les éléments constitutifs du délit d’imprudence. Tous les participants sont en réalité des
coauteurs. On remarquera cependant que dans certains arrêts, la jurisprudence est favorable à
cette analyse. Exemple : une personne confie son véhicule à son ami qui n’est pas titulaire du
permis de conduire. Supposons que cet ami cause un accident mortel, dans ce cas les juges ne
considèrent pas le propriétaire du véhicule comme complice mais comme un simple coauteur.
3)- Le problème soulevé par une volonté d’abandon manifestée par le complice
avant la commission de l’infraction :

Exemple : en ayant fourni une arme ou un plan des lieux, le complice se ravise et
n’apporte et n’apporte plus son aide à l’auteur principal. Un tel désistement assurera à ce
complice l’impunité mais c’est à la condition qu’il agisse positivement et qu’il fasse tout pour
empêcher l’accomplissement de l’acte principal.
Par exemple en avertissant la police, en récupérant l’instrument qu’il avait confié à
l’auteur principal, en alertant la victime de l’imminence de l’agression projetée contre elle.
Bref, le complice doit allumer des véritables contre feux, à défaut desquels sa volonté
d’abandon ne vaudra pas désistement salvateur. Une simple abstention comme le refus
d’assister l’auteur principal au moment du crime ne saurait suffire.

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Section 2 : La répression de la complicité punissable 

Selon l’art 45 CP, le complice sera puni de la même peine que l’auteur principal. Il
convient d’analyser le sens de l’art 45 CP avant de voir comment appliquer ce texte en présence
d’une circonstance aggravante ou d’une cause d’atténuation de la peine.

Paragraphe 1 : Le sens de l’art. 45 CP 

L’art. 45 CP consacre ce qu’on appelle le principe de l’emprunt de criminalité. La


règle ne signifie pas que la peine appliquée aux complices sera celle appliquée à l’auteur
principal. Elle signifie que légalement la peine prévue pour le fait principal punissable est la
même que celle prévue pour le fait de complicité. Mais la peine principale peut sur le plan
judiciaire être appliquée de façon différente pour l’auteur principal comme pour le complice.
Par exemple, le juge peut en raison de son pouvoir d’individualisation, condamner l’auteur
principal au maximum de la peine et retenir le bénéfice des circonstances atténuantes pour le
complice. L’hypothèse inverse est même possible.

Paragraphe 2 : L’art 45 CP en présence d’une cause d’aggravation ou d’atténuation de le


peine :

A. L’art 45 CP en présence d’une cause d’aggravation de la peine 

La loi a prévu plusieurs causes d’aggravation.

1)- Les causes d’aggravation réelle 

Une cause d’aggravation est réelle lorsqu’elle se rattache à l’infraction elle-même dont
elle modifie la nature. Pour les causes d’aggravation réelle, il est établi qu’elles rejaillissent sur
le complice même s’il les avait ignorées au moment où il apportait sa collaboration à la
réalisation de l’infraction projetée. Exemple : les circonstances aggravantes du vol telles que
l’escalade, l’effraction et l’usage d’une arme font encourir aux complices les peines du vol
qualifié même si son aide porte sur une phase de l’infraction antérieure à ces circonstances.

2)- Les causes d’aggravation personnelle 

Une cause d’aggravation est personnelle lorsqu’elle s’attache à la personne de l’agent


pénal. Elle ne change pas la qualification de l’acte mais modifie seulement la responsabilité de
l’auteur. Exemple : si l’auteur principal est un récidiviste, cette qualification ne sera pas retenue
à l’endroit du complice.

3)- Les circonstances aggravantes mixtes 

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Elles tiennent à la personne de l’auteur et à l’acte et ont pour effet de changer la
qualification de l’infraction. Exemple : l’homicide commis volontairement est un meurtre (art
280 CP) ; cette infraction change de qualification. Lorsque son auteur est le fils de la victime,
elle devient un parricide (art 287 CP). On admet que les circonstances aggravantes mixtes sont
applicables aux complices même s’ils les avaient ignorées.

A. L’art. 45 CP en présence d’une cause d’atténuation de la peine 

Comme son nom l’indique, une cause d’atténuation de la peine a pour effet de
diminuer la peine normalement applicable au délinquant. C’est le cas de l’excuse de minorité.
C’est également le cas des circonstances atténuantes. Ces circonstances nées dans la personne
de l’auteur principal ne profitent pas aux complices car elles sont essentiellement personnelles.

Chapitre II : LA COACTION

Bien que le complice soit en principe assimilé à l’auteur du point de vue de la


qualification et de la répression, il n’est pas sans intérêt de le distinguer de celui-ci. Ceci
implique l’établissement d’un critère de distinction. Il faut dégager ce critère et les intérêts qui
s’y attachent avant de voir la position de la jurisprudence sur cette question.

Section 1 : Les critères de distinction coaction – complicité et les intérêts de cette
distinction 

Paragraphe 1 : Les critères de la distinction 

On appelle coauteurs, les individus qui réunissent en leur personne tous les éléments
de l’infraction commises en participation. Le coauteur est donc l’auteur d’une infraction avec
d’autres personnes. Il peut être poursuivi même si les autres auteurs bénéficient de l’impunité
pour une raison qui leur est propre. Exemple : l’art 365 CP prévoit une immunité familiale pour
le vol. Si le voleur figure parmi les personnes énumérées par ce texte, il échappe à la
répression, mais le coauteur lui sera responsable car c’est un agent a part entière.

Le complice au contraire est celui qui se borne à coopérer à la commission de


l’infraction par un acte matériel dont les contours sont précisés par la loi. Cet acte en lui-même
n’est pas répréhensible, il ne tombe sous le coup de la loi que parce qu’il est rattaché à un fait
principal punissable. Exemple : (différence complicité et coaction) lors du cambriolage d’un
château, trois malfaiteurs y pénètrent et volent ensembles deux tableaux et plusieurs objets
d’arts ; ils ressortent récupérer le guetteur et grimpent dans la camionnette conduite par le
chauffeur. Les 03 voleurs sont des coauteurs, le guetteur et le chauffeur sont des complices. En
effet, les 03 premiers ont participé directement à l’infraction en cause, pour le guetteur et le
chauffeur, leurs comportements ne sont répréhensibles que si on les rattachent à l’acte de 03
coauteurs.

Paragraphe 2 : Les intérêts de la distinction 

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La distinction entre coauteur et complice présente plusieurs intérêts :

1)- la qualification d’une infraction dépend exclusivement de la qualité personnelle


de l’auteur et non celle du complice. Exemple : l’homicide commis par le fils de la victime est
un parricide alors qu’il n’est qu’un simple meurtre si le fils n’est que le complice.

2)- En matière contraventionnelle en principe il n’y a pas de complicité, mais les


coauteurs d’une même contravention sont punissables.

3)- Le faits qu’une infraction a été commise par plusieurs auteurs peut être une
circonstance aggravante, c’est le cas par exemple du vol en réunion.

Le critère de la distinction est bien simple, il est objectif. Il suffit de s’en tenir aux
actes savoir si l’agent pénal est un auteur ou un complice. La jurisprudence applique ce critère
mais pour le besoin de la répression, elle confond souvent coauteur et complice.

Section 2: La position de la jurisprudence :

Pour obtenir la répression la plus complète, la jurisprudence confond coauteur et


complice. Dans certains cas, elle traite le coauteur comme un simple complice.

Paragraphe 1 : L’assimilation du complice au coauteur 

La jurisprudence considère souvent comme coauteur, celui qui n’est en réalité qu’un
simple complice. C’est la méthode qu’elle utilise pour atteindre les complices d’une
contravention, c’est encore la même solution qu’elle retient à l’encontre du guetteur.
Normalement, celui qui collabore à la réalisation d’un vol simple, en faisant le guetteur est un
complice. Mais la jurisprudence ne retient pas cette façon de voir, elle considère le guetteur
comme un coauteur et retient à son encontre la circonstance aggravante de réunion.

Avec cette analyse, le guetteur encoure les peines d’un vol qualifié. C’est encore pour
des considérations répressives que la jurisprudence va être amenée à poursuivre l’instigation
comme un auteur moral. Ce point de vue a reçu un écho favorable en droit sénégalais. En effet,
dans certains cas, le CP considère comme auteur un individu qui n’a pas accompli l’acte
constitutif du délit mais qui en a été la cause intellectuelle. L’art 346 CP sur l’enlèvement du
mineur constitue un bel exemple. Dans ce texte la loi réprime de la même façon celui qui
enlève un mineur et celui qui fait enlève un mineur.

Paragraphe 2 : L’assimilation du coauteur au complice 

Selon la jurisprudence, le coauteur aide nécessairement l’autre coupable dans les faits
qui consomment l’infraction et devient par la force des choses son complice. La règle ainsi
dégagée va permettre aux tribunaux de prononcer contre un coauteur une peine aussi grave que
celle qu’il aurait encourue s’il avait été complice. Cette règle connue sous le nom de complicité
cor respective a été appliquée en matière de parricide.

Exemple : deux individus tuent le père de l’un d’entre eux, pour le fils coauteur, l’acte
est un parricide ; pour l’autre coauteur l’acte n’est qu’un simple meurtre. C’est pour éviter ce

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résultat que la jurisprudence considère ce coauteur comme complice. Ainsi dans notre exemple,
le coauteur devenu complice encoure comme le fils la peine du parricide mais on remarquera
que l’application de complicité cor respective ne représente plus d’intérêt dans l’exemple cité
car depuis 2004 au Sénégal, la peine de mort a été abolie. Il en résulte que dans l’exemple cité,
le fils parricide et son coauteur n’encourent plus la peine de mort mais celle des travaux forcés
à perpétuité.

Exemple : l’idée de complicité cor respective a donné lieu à une seconde application
extrêmement pratique. A l’occasion des coups volontaires portés au cours d’une scène de
violence unique par plusieurs individus, la victime décède ou est atteinte d’une infirmité
permanente. Il est sûr que tous les membres du groupe ont frappé mais il est impossible de
déterminer celui qui a donné le coup le grave.

Une jurisprudence abondante et ferme décide en cas que tous les participants sont
exposés à une poursuite sous la qualification afférente au dommage corporel le plus grave subit
par la victime, chaque participant étant en somme complice de celui qui a porté le coup ayant
entrainé le résultat le plus sérieux.

Chapitre III : LA RESPONSABILITE DU FAIT D’AUTRUI

En droit civil, les père et mère, les maîtres et commettants sont responsables du fait de
leurs enfants mineurs, de leurs domestiques ou préposés. En droit pénal en principe, toute
personne est responsable de son fait personnel. Il faut cependant souligner que dans certaines
hypothèses, une personne peut être condamnée comme coauteur d’une infraction commise par
une autre personne.

Section 1 : Le domaine de la responsabilité pénale du fait d’autrui 

La loi par un texte spécial ou la jurisprudence en l’absence d’un texte formel affirme
souvent le principe de la responsabilité pénal du fait d’autrui. Le cadre privilégié de ces
responsabilités sont l’entreprise. L’entreprise est entendue au sens large, il peut s’agir d’un
établissement commercial, d’un établissement industriel ou agricole.
La responsabilité patronale intéresse donc une petite officine de pharmacie et même
une grande usine métallurgique. Il est encore admis que les règles de la responsabilité du fait
d’autrui sont applicables non seulement aux entreprises qui ont fait l’objet d’une
réglementation spéciale mais encore aux entreprises soumises à une réglementation générale,
telle que la législation du travail et de la sécurité sociale.
Exemple : le pharmacien est considéré comme l’auteur des infractions à la législation
pharmaceutique commises par ses préparateurs et employés.

Section 2 : Les conditions de la responsabilité du fait d’autrui 

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Deux conditions sont exigées : une infraction commise par le préposé et une faute
imputable au chef d’entreprise ou au patron.

Paragraphe 1 : Une infraction commise par le préposé 

L’infraction commise est non intentionnelle (exemple : délit de pollution), mais la


jurisprudence pense que l’infraction peut aussi être intentionnelle. Exemple : il a été jugé qu’un
exploitant de cinéma est pénalement responsable du fait de ses préposés qui lèsent le fisc en
admettant des spectateurs démunis de billet.

Paragraphe 2 : Une faute imputable au patron ou au chef d’entreprise :

La faute du patron ou du chef d’entreprise est présumée, elle est considérée comme
établie dès l’instant que l’acte réalisé par le préposé contrevient à une règlementation générale
ou spéciale que le chef d’entreprise ou le patron avait l’obligation de faire respecter. Les
décisions rendues sont extrêmement sévères, il faut cependant retenir que le patron peut se
dégager de toute responsabilité s’il délègue ses pouvoirs à l’un de ses préposés. La délégation
n’est admise que si certaines conditions sont réunies.
Tout d’abord, il faut une entreprise d’une certaine importance, cela signifie que la
structure de l’entreprise doit être si complexe que le chef d’entreprise ou le patron soient dans
l’impossibilité matérielle de tout contrôler ou de surveiller lui même.
En second lui, le délégataire doit avoir une qualification suffisante. L’agent remplit
cette condition dès lors qu’il est pourvu de la compétence et de l’autorité nécessaire pour veiller
au respect des mesures édictées au sein de l’entreprise.
Enfin, la délégation doit être antérieure à l’infraction et elle doit avoir un objet précis
et limité. Dans tous les cas, la délégation n’a aucune valeur lorsqu’elle est générale ou
lorsqu’elle ne donne aucun pouvoir au délégataire.
Il faut encore préciser que la délégation n’a pas besoin d’être écrite, elle peut résulter
de l’organigramme de l’entreprise ou du contrat d’embauche.

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