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²Introduction au Droit Pénal Général

Il n’existe pas à proprement parler de Code Pénal des Affaires. Tout ce dont on est sûr,
c’est qu’il existe des infractions qui intéressent la Vie des Affaires.
Les unes relèvent du Droit Commun, les autres présentent une certaine spécificité en
raison de leur domaine d’intervention. Il en va ainsi du Droit Pénal de la banque, du Droit Pénal
des sociétés, du Droit Pénal des changes.
En prévoyant ces infractions, le Législateur entend s’en prendre aux tentations
malhonnêtes. Par la même occasion, il fait appel à la "Crainte du Gendarme". Ce gendarme
dont l’existence repose sur des règles techniques, c’est le Droit Pénal.
Avant de voir les Infractions relatives à la vie des affaires, il serait souhaitable d’étudier
de façon sommaire les Règles Gouvernant le Droit Pénal et de présenter rapidement les
Juridictions répressives de jugement au Sénégal.

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Première Partie : Etude Sommaire des Règles Gouvernant le Droit Pénal

Le Droit Pénal est une discipline juridique qui prévoit les infractions et les sanctions qui
leur sont attachées. Il étudie aussi les Personnes Responsables et les Règles Relatives au Procès.
Cette définition montre bien que le Droit Pénal a plusieurs branches que l’on présentera
rapidement.

✓ Le Droit Pénal Spécial : c’est l’étude des différentes infractions et des peines
applicables dans chaque cas ;
✓ La Procédure Pénale : c’est l’étude des règles relatives au procès. Elle permet
d’avoir un éclairage sur l’enquête, l’instruction et le jugement ;
✓ Le Droit Pénal Général : C’est l’étude des règles applicables à toutes les infractions
quelles qu’elles soient. Cette matière permet d’avoir une idée générale sur
l’infraction et la sanction. Il convient donc de s’appuyer sur sa méthode pour faire
ressortir les règles qui donnent au Droit Pénal toute sa technicité.

Chapitre 1 : L’Infraction

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On peut définir l’Infraction comme toute action ou omission que la société interdit sous
la menace d’une sanction.
L’infraction repose sur trois (3) éléments : un élément légal, un élément matériel et un
élément moral.
Avant d’analyser les éléments constitutifs de l’infraction, il convient d’examiner les
différentes classifications des infractions.

Sous-chapitre 1 : Les Différentes Classifications des Infractions

On distingue d’abord la Classification Fondamentale du Code Pénal, ensuite la


classification tirée de la Nature des Infractions, et enfin la classification fondée sur le Mode
d’Exécution des Infractions.

Section 1 : La Classification Fondamentale du Code Pénal

C’est la division tripartite des infractions en Crime, Délit et Contravention. Cette


classification fondamentale a son siège dans l’article 1 er du Code Pénal. Elle est si importante
qu’il est nécessaire de traiter de son critère, avant d’examiner ses intérêts.

Paragraphe 1 : Le Critère de la Classification

L’article 1er du Code Pénal dispose : "L’infraction que les Lois punissent de peine de
police est une Contravention ; l’infraction que les Lois punissent d’une peine correctionnelle
est un Délit ; l’infraction que les Lois punissent d’une peine afflictive ou infamante est un
Crime".

A / Le Sens de l’Article 1er du Code Pénal

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L’article 1er du Code Pénal classe les infractions en prenant comme critère la gravité de
la peine. En effet, si l’infraction est punie d’un emprisonnement d’un jour à un mois et d’une
amende de 200 FCFA à 20 000 FCFA, elle constitue une contravention.
Par contre, si elle est punie d’une peine correctionnelle, c’est-à-dire d’un
emprisonnement supérieur à un mois et d’une amende supérieure à 20 000 FCFA, l’infraction
est un délit.
Enfin, si elle est sanctionnée d’une peine afflictive ou infamante, elle constitue un crime.
Les peines afflictives et infamantes sont énumérées par la Loi. Il s’agit des Travaux Forcés à
perpétuité, des Travaux Forcés à temps (5 à 10 ans ou 10 à 20 ans), de la Détention Criminelle
(5 à 10 ans ou 10 à 20 ans).
Il existe dans le Code Pénal une seule peine infamante : c’est la dégradation civique.
Cette sanction consiste à priver une personne de tous ses droits. Par exemple la privation des
droits de vote, du droit d’être témoin, du droit d’être juré, du droit de servir dans les armées
(voir art 8 du Code Pénal).

B / Application du Critère

La nature d’une infraction se déduit de la peine que le Législateur a prévu pour cette
infraction. Exemple : l’escroquerie est un délit car son auteur encourt un emprisonnement d’un
an à cinq ans et une amende de 100 000 FCFA à 1 000 000 FCFA (art 379 du Code Pénal). Le
meurtre est un crime car la peine applicable à son auteur est celle des travaux forcés à perpétuité.

Paragraphe 2 : Les Intérêts de la Distinction

La distinction des infractions en crime, délit et contravention intéresse à la fois les règles
de fond et les règles de forme.

A / Les Règles de Fond

Ces règles sont relatives à l’incrimination et à la sanction. Pour faire ressortir les intérêts
de la classification, on examinera les trois points suivants :

✓ La Tentative ;

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✓ La Complicité ;
✓ La Prescription de la peine.

1 – La Tentative

Elle est toujours punissable en matière de crime. Celle des délits ne l’est que de façon
exceptionnelle. Exemple : la tentative de délit d’abus de confiance n’est pas répréhensible. La
tentative d’escroquerie est répréhensible.
On retiendra enfin que la tentative n’est pas répréhensible en matière contraventionnelle.

2 – La Complicité

Elle est punissable pour les crimes et délits. Elle ne l’est pas en matière
contraventionnelle, sauf disposition contraire.

3 – La prescription de la Peine

L’écoulement d’un certain délai fait obstacle à l’exécution de la condamnation. Le délai


de prescription de la peine est de vingt (20) ans pour les peines criminelles, cinq (5) ans pour
les peines correctionnelles ou délictuelles, et deux (2) ans pour les peines contraventionnelles
ou de police.

B / Les Règles de Forme

Ce sont des règles relatives à la constatation, à la poursuite des infractions et à la


compétence. Pour étudier cette question, il faut examiner la procédure applicable, la
prescription de l’action publique et les règles de compétence.

1 – La Procédure Applicable

Elle varie suivant la gravité de l’infraction. La voie du Flagrant Délit est exclue en
matière criminelle et contraventionnelle.

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La Citation Directe qui permet à la victime et au Ministère Public d’assigner l’auteur
d’une infraction devant la Juridiction de jugement est autorisée pour les délits et contraventions.
Mais elle est impossible pour les crimes.
Enfin l’Ouverture d’une Instruction est obligatoire en matière criminelle, et elle se
déroule devant deux (2) Juridictions : devant le Juge d’Instruction du 1er degré et devant la
Chambre d’Accusation qui joue le rôle du Juge d’Instruction du 2nd degré.
Pour les délits, l’instruction est facultative. En matière contraventionnelle, elle ne joue
que de façon exceptionnelle.

2 – La Prescription de l’Action Publique

L’action publique, c’est l’action pour l’application des peines. Elle ne peut être engagée
que dans les délais prévus par la Loi. En dehors de ces délais, une infraction ne peut plus être
poursuivie. On dit que l’infraction est prescrite.
Le délai de prescription de l’action publique varie suivant la nature de l’infraction. Il est
de dix (10) ans pour les crimes, de trois (3) ans pour les délits et d’un (1) an pour les
contraventions.

3 – Les Règles de Compétence

Les Crimes relèvent de la compétence de la Cour d’Assises.


Les Délits sont jugés par le Tribunal Correctionnel.
Les Contraventions sont jugées par le Tribunal de Police ou de Simple Police.

Section 2 : La Classification Fondée sur la Nature de l’Infraction

Paragraphe 1 : La Distinction des Infractions de Droit Commun et des Infractions


Politiques

Deux (2) critères ont été proposés : un Critère Objectif et un Critère Subjectif.

1 – Le Critère Objectif

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Selon ce critère, l’infraction est politique quand son objet est politique. C’est par
exemple l’atteinte à la Sûreté de l’Etat.

2 – Le Critère Subjectif

Pour les tenants de ce critère, l’infraction est politique quand le mobile de son auteur est
politique. On entend par mobile, les sentiments particuliers qui ont animé le délinquant au
moment de l’infraction.

Paragraphe 2 : Les Infractions de Droit Commun et les Infractions Militaires

Les Militaires peuvent commettre deux (2) types d’infractions : les infractions purement
militaires et les infractions de droit commun.
1 – Les Infractions Purement Militaires

Elles sont inconcevables en dehors de la vie militaire. C’est par exemple le Complot
Militaire.

2 – Les Infractions de Droit Commun

Il s’agit ici des infractions de Droit Commun que nous connaissons. Il peut s’agir d’un
vol, d’un abus de confiance, d’un meurtre …

Section 3 : Les Classifications Fondées sur le Mode d’Exécution de l’Infraction

Deux (2) classifications vont nous retenir ici : la classification fondée sur le Mode
d’Exécution Matérielle de l’infraction, et celle fondée sur le Mode d’Exécution Psychologique
de l’infraction.

Paragraphe 1 : La Classification Fondée sur le Mode d’Exécution Matérielle de


l’Infraction

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L’élément matériel est le support de cette classification. On appelle élément matériel
l’acte réalisé par le sujet pénal. Il se présente sous des aspects divers.

A / L’Infraction d’Omission et l’Infraction de Commission

Dans l’Infraction d’Omission, l’élément matériel est une Abstention. L’individu ne fait
pas ce que la Loi oblige de faire dans l’intérêt général. L’exemple le plus illustratif reste la Non
Assistance à Personne en Danger.
Le Droit des Affaires comporte de nombreuses infractions d’omission. A titre
d’exemple, on peut citer l’omission par le Commissaire aux Comptes de révéler au Ministère
Public les faits délictuels dont il a eu connaissance (art 900 de l’AU/DSC) ainsi que la non
désignation ou la non convocation des commissaires aux comptes aux Assemblées Générales
(art 897 de l’AU/DSC).

Dans l’Infraction de Commission, la Loi réprime l’accomplissement d’un Fait Positif.


La Loi interdit par exemple de voler (art 364 du Code Pénal).
Pour ces infractions, il faut un geste, une parole ou un écrit.

B / L’Infraction Instantanée et l’Infraction Continue

L’infraction instantanée se consomme en un trait de temps. Le vol par exemple se


consomme par l’acte de soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ;
L’infraction continue implique un prolongement dans le temps de l’activité
répréhensible. Le délit de port illégal de décoration est continu.
L’acte incriminé par la Loi se prolonge tant que l’individu persiste dans son
comportement.

C / L’Infraction Simple et l’Infraction d’Habitude

L’infraction simple est constituée par une seule opération matérielle. Pour le vol par
exemple, l’acte matériel incriminé est la soustraction de la chose d’autrui.
L’infraction d’habitude suppose, pour sa réalisation, plusieurs actes matériels
semblables dont chacun, pris isolément, ne serait pas punissable. L’exercice illégal de la
Médecine est une infraction d’habitude, et cette infraction n’est pénalement répréhensible que

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si la personne dépourvue de titre a, à deux reprises au moins, fait un diagnostic et prescrit un
traitement.

D / L’Infraction Simple et l’Infraction Complexe

L’Infraction Complexe suppose l’accomplissement de plusieurs actes matériels


différents. L’escroquerie par exemple comporte deux actes distincts : les manœuvres et la
remise de la chose.

E / L’Infraction Matérielle et l’Infraction Formelle

Il y a Infraction Matérielle lorsque le résultat figure parmi les éléments constitutifs de


l’infraction. Exemple le vol n’est réalisé que s’il y a soustraction frauduleuse de la chose
d’autrui.
Une infraction est dite Formelle lorsqu’elle est considérée comme consommée
indépendamment du résultat cherché par son auteur. Exemple il y a empoisonnement dès
l’instant que le délinquant administre des substances toxiques à sa victime.

Paragraphe 2 : La Classification Fondée sur le Mode d’Exécution Psychologique


de l’Infraction

Cette classification fondée sur l’élément moral conduit à distinguer les Infractions
Intentionnelles et les Infractions Non Intentionnelles.

A / Les Infractions Intentionnelles

L’infraction est intentionnelle lorsque le sujet, en agissant, a voulu rechercher le but


interdit par la Loi.
L’intention peut être définie comme la volonté de commettre l’acte que l’on sait illicite.
En d’autres termes, il y a intention si l’individu a conscience du caractère illicite de l’acte
accompli. Exemple : le vol, l’escroquerie, l’abus de confiance sont des infractions
intentionnelles.
L’intention résulte le plus souvent dans le texte incriminateur, de l’utilisation
d’expressions telles que "Mauvaise Foi", "Sciemment", "Frauduleusement".

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B / Les Infractions Non Intentionnelles

Dans ce cadre, on peut trouver les Délits d’Imprudence ou de Négligence, les


Contraventions et les Délits Matériels comme par exemple les délits de douane, les délits de
contributions indirectes. Ces infractions sont punies en raison de la seule violation de la règle
légale sans qu’on ait à s’inquiéter de la psychologie du sujet pénal.

Sous-chapitre 2 : Les Eléments Constitutifs de l’Infraction

Ils sont : l’Elément Légal, l’Elément Matériel et l’Elément Moral.

Section 1 : L’Elément Légal

Le Droit Pénal connaît le Principe de la Légalité. Il convient de présenter rapidement ce


principe, avant de voir les corollaires qui lui sont attachés.

Paragraphe 1 : Le Principe de la Légalité

Contrairement au Droit Civil où tout fait quelconque de l’homme peut engager la


responsabilité de son auteur, en Droit Pénal, l’article 4 du Code Pénal pose le Principe de la
Légalité des incriminations et des peines.
Ce principe signifie que seuls sont punissables et seulement dans la mesure prévue, les
faits expressément visés par la Loi ou le Règlement au moment où ils ont été commis.
L’infraction pénale et la sanction reposent donc sur un texte claire et précis. En l’absence de
celui-ci, l’acte commis échappe à toute répression.

Paragraphe 2 : Les Corollaires du Principe de la Légalité

Deux corollaires sont attachés au Principe de la Légalité : la Non Rétroactivité de la Loi


Pénale et l’Interprétation par le Juge de la Loi Pénale.

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A / La Non Rétroactivité de la Loi Pénale

Ce Principe signifie que la Loi nouvelle ne s’applique que pour l’avenir. Elle ne peut
régir les faits antérieurs à son avènement.
Ce principe ne s’applique cependant que si la Loi nouvelle est sévère. Il est écarté
lorsque la Loi Nouvelle est plus douce que l’ancienne. En conséquence, si une loi nouvelle
abaisse la peine antérieurement applicable, le délinquant bénéficiera ici de l’application de la
loi nouvelle, mais à condition qu’il ne soit pas définitivement condamné.

B / L’Interprétation de la Loi Pénale par le Juge

Interpréter une Loi, c’est chercher son sens en vue d’en faire l’exacte application aux
faits portés à l’attention du Juge.
En matière pénale, il est interdit au Juge de raisonner par analogie, c’est-à-dire d’étendre
à un fait malhonnête un texte visant un fait voisin. Il lui est demandé d’interpréter
restrictivement et strictement la Loi pénale, c’est-à-dire appliquer la Loi aux seules hypothèses
qu’elle prévoit et seulement à ces hypothèses. Par exemple, le vol suppose une soustraction,
c’est-à-dire un enlèvement. On ne peut donc poursuivre pour vol celui qui s’est fait servir des
repas dans un restaurant et qui ne les paie pas. Son comportement relève d’une qualification
spéciale : c’est ce que l’on appelle la Filouterie d’aliment.
Le Principe de l’Interprétation restrictive ou stricte n’interdit pas cependant d’adapter le
texte applicable à l’évolution économique et sociale de son époque. Exemple le vol suppose
une appréhension matérielle de la chose d’autrui. Mais que décider dans le cas des magasins de
libre service où les articles sont offerts gracieusement aux clients ? Doit-on réprimer le client
qui ne paie pas l’article qui lui a été remis ? Son comportement est-il un vol au sens de la Loi ?
Pour réprimer, on a soutenu que le client est un possesseur sous condition et il
n’intéresse la Loi que s’il franchit la caisse sans avoir payé le prix. On voit bien que pour adapter
l’infraction de vol, on a été obligé de donner une autre définition de la soustraction.
L’adaptation n’est donc pas interdite au Juge, mais encore faut-il qu’on puisse le faire.
Exemple : le client d’une banque détenteur d’une carte bancaire se fait remettre une somme
d’argent supérieure au solde créditeur de son compte. Peut-on poursuivre ce client pour vol ?
A cette question, la Jurisprudence répond par la négative au motif qu’il y a ici remise
volontaire de l’argent par la banque, par machine interposée.

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Section 2 : L’Elément Matériel

L’infraction pénale n’existe que si elle se révèle à l’extérieur par un fait matériel
objectivement constatable. Ce fait, on l’appelle élément matériel. Il doit respecter la description
retenue par le texte incriminateur. Cet acte peut épouser diverses formes. Cette question a déjà
été examinée à l’occasion de notre enseignement sur la classification fondée sur le mode
d’exécution matérielle de l’infraction.
Le problème qu’il y a lieu de régler maintenant est celui de savoir à partir de quel
moment dans une activité criminelle faut-il situer l’intervention du Droit Pénal ? Est-ce à
compter de la réalisation définitive de l’infraction ou est-ce à compter du moment où l’individu
montre par son attitude sa volonté de porter atteinte aux valeurs pénalement protégées par la
société ?
A cette question, la Loi apporte une réponse en sanctionnant la Tentative. Elle intervient
également pour attirer dans son champ d’autres comportements, à savoir l’Infraction Manquée
et l’Infraction Impossible.

Paragraphe 1 : La Tentative

La Loi exige deux (2) conditions : un Commencement d’Exécution et une Absence de


Désistement Volontaire.

A / Le Commencement d’Exécution

Dans les affaires de Tentative, le point délicat est la distinction entre l’Acte Préparatoire
non punissable et le Commencement d’Exécution qui est punissable.
La frontière entre ces deux (2) notions est difficile à tracer. Exemple un individu achète
un pistolet. A-t-il l’intention de tuer une personne déterminée ? A supposer que cette personne
se rende chez un tiers. Si on l’appréhende en cours de route, peut-on considérer son
comportement comme un acte préparatoire ou comme un commencement d’exécution ?
Plusieurs définitions du commencement d’exécution ont été retenues par la
Jurisprudence. La dernière formule est la suivante : "Le commencement d’exécution n’est
caractérisé que par un acte devant avoir pour conséquence de consommer le délit". Si on s’en
tient à cette formule, on peut affirmer que l’acte cesse d’être préparatoire et devient un acte
d’exécution lorsqu’il implique chez le sujet la volonté définitive et certaine de commettre

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l’infraction. En d’autres termes, l’acte devient commencement d’exécution quand il n’est plus
susceptible d’interprétation.
En clair, il y a commencement d’exécution lorsque l’acte est univoque. Exemple : Dans
l’escroquerie à l’assurance, l’assuré qui met le feu à son véhicule ne commet qu’un seul acte
préparatoire. Son comportement devient un commencement d’exécution lorsqu’il se présente
devant son assureur en vue de demander le paiement d’une indemnité. La Jurisprudence a admis
l’existence de commencement d’exécution dans le cas où les individus longuement surveillés
par la police sont arrêtés au moment où, porteurs d’armes et d’instruments destinés à dissimuler
leur identité, ils se trouvaient sur le lieu de l’infraction projetée.

B / L’Absence de Désistement Volontaire

Outre le commencement d’exécution, il faut une absence de désistement volontaire. Le


seul désistement justificatif est le désistement volontaire.
Le désistement est volontaire lorsqu’il est spontané, c’est-à-dire lorsque l’individu a
interrompu son action criminelle sous l’influence d’aucune cause extérieure.
Le désistement est involontaire lorsque l’action a avorté parce qu’il y a intervention d’un
tiers, de la police, ou parce que l’auteur s’est heurté à la résistance de la victime. Cette forme
de désistement ne justifie pas son auteur. Il faut retenir qu’on ne peut plus parler de désistement
lorsque l’infraction est déjà consommée. Exemple : Dans le délit d’abus de confiance, c’est le
détournement qui consomme l’infraction. Le délit est toujours établi même si le caissier restitue
les fonds qu’il a détournés. Le comportement de ce caissier qui se situe après l’infraction est un
Repentir Actif ou Remord Tardif. L’infraction subsiste mais le Juge pourra lui accorder des
circonstances atténuantes.

Paragraphe 2 : L’Infraction Manquée et l’Infraction Impossible

A / L’Infraction Manquée

Dans l’Infraction Manquée, le résultat n’est pas atteint à cause de la Maladresse de son
auteur, mais tous les actes matériels ont été exécutés de façon complète. Tel est le cas de
l’individu qui tire sur son adversaire et qui ne le tue pas parce qu’il a mal visé.
L’Infraction Manquée est expressément assimilée par la Loi à la Tentative.

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B / L’Infraction Impossible

Dans l’Infraction Impossible, le résultat ne peut matériellement être obtenu car l’objet
de l’infraction n’existe pas ou encore les moyens employés sont insusceptibles de consommer
l’infraction. Exemple : Il y a infraction impossible lorsqu’un individu désirant voler un
portefeuille plonge sa main dans la poche intérieure d’une veste alors que celle-ci est vide. Il y
a un commencement d’exécution et absence de désistement volontaire.
La tendance en Jurisprudence, c’est d’assimiler l’Infraction Impossible à une Tentative.

Section 3 : L’Elément Moral

Pour qu’une infraction soit juridiquement constituée, il ne suffit pas qu’un acte matériel
prévu et puni par la Loi ait été commis ou tenté. Il faut encore que l’accomplissement de cet
acte constitue une faute imputable à son auteur.
L’Elément Moral peut être défini comme le lien psychologique qui existe entre le sujet
pénal et son acte.
Le contenu de l’élément moral varie selon que l’infraction est intentionnelle ou non.
(Cette question a été étudiée lorsque nous nous sommes intéressés à la classification fondée sur
le mode d’exécution psychologique de l’infraction).
L’élément moral disparaît en présence de certaines circonstances appelées causes de non
imputabilité. Les causes de non imputabilité sont la Démence, la Contrainte et l’Erreur.

1 – La Démence

C’est l’insuffisance dans les facultés mentales pourvu seulement qu’elle se manifeste au
moment de l’infraction.
La Démence supprime le discernement et exclut la Responsabilité Pénale.

2 – La Contrainte

C’est une Force qui enlève au moment de l’action tout Pouvoir de Décision au sujet
pénal. La volonté est donc abolie.

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La contrainte est le plus souvent le fait de la Nature ou le fait d’un Tiers. Tel est le cas
du caissier qui remet l’argent de sa caisse au bandit parce qu’un révolver est braqué sur lui.
Comme la Démence, la Contrainte exclut la Responsabilité Pénale du sujet.

3 – L’Erreur

On distingue deux (2) formes d’erreurs : l’Erreur de Droit et l’Erreur de Fait.


L’Erreur de Droit peut consister soit dans une ignorance de la Loi, soit dans une
interprétation inexacte de ses dispositions. Cette forme d’erreur n’exclut pas la Responsabilité
Pénale.
L’Erreur de Fait est une représentation inexacte de la réalité matérielle. Elle peut avoir
une influence si l’infraction a pour élément moral une faute intentionnelle, car l’erreur peut
faire disparaître l’intention.
Exemple : Celui qui, par erreur de fait s’empare de la chose d’autrui en croyant
appréhender sa propre chose, ne peut être poursuivi pour vol.

Sous-chapitre 3 : Les Participants à l’Infraction

Une infraction pénale peut avoir été commise par plusieurs personnes. La participation
de ces divers sujets peut se présenter sous des formes variées. Dans cet enseignement, le travail
portera sur la Complicité, la Coaction et la Responsabilité Pénale du Fait d’Autrui.

Section 1 : La Complicité

Il convient de voir ici les conditions d’existence de la complicité et la répression


envisagée par la Loi.

Paragraphe 1 : Les Conditions d’Existence de la Complicité

Trois conditions sont exigées par la Loi : un Fait Principal Punissable, un Acte Matériel
de Complicité et un Elément Intentionnel.

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A / Un Fait Principal Punissable

Pour que la Complicité soit punissable, il faut qu’il y ait un fait principal punissable. Le
fait principal punissable est un crime, un délit et exceptionnellement une contravention.
Si le fait principal n’est pas punissable, la complicité n’est pas punissable.
Pour l’application des règles de la complicité, il importe que l’auteur principal soit
effectivement puni. L’acte du complice est lié au fait principal punissable dont il emprunte la
criminalité. Il peut donc être poursuivi même si l’auteur principal est décédé ou n’a pas été
découvert. C’est l’Emprunt de Criminalité.
Il faut encore retenir qu’il n’est pas nécessaire que le fait principal soit consommé. Une
simple Tentative suffit.

B / Un Acte Matériel de Complicité

La Loi a prévu trois (3) actes matériels de complicité.

1 – L’Instigation

L’Instigation est le fait de pousser quelqu’un à faire quelque chose. Elle peut revêtir
deux (2) formes :

✓ La Provocation : Elle peut se manifester par des dons, des promesses, des menaces,
un abus d’autorité ou de pouvoir, une machination ou un artifice coupable.
✓ Les Instructions : Elles doivent être précises et destinées à guider l’auteur principal
dans la consommation de l’infraction. Exemple : il y a complicité lorsqu’une
personne indique en vue d’un cambriolage les heures auxquelles une personne est
absente de chez elle.

2 – La Fourniture de Moyens

Sont complices ceux qui auront procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen
qui aura servi à l’action, sachant qu’il devait y servir. Exemple : Prêter une arme à un individu
tout en sachant que celui-ci va commettre une infraction.

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3 – L’Aide ou l’Assistance

La Loi vise les faits qui ont préparé ou facilité l’infraction et également les faits réalisés
au moment même de l’exécution matérielle de l’infraction. Exemple : Peuvent être poursuivis
comme complices, les directeurs, les experts comptables, les comptables salariés ou non, les
commissaires aux comptes qui, sciemment, ont participé à la confection de faux bilans,
spécialement lorsqu’ils ont imaginé ou employé les artifices destinés à masquer la situation
réelle de la société.
Tous les actes matériels de complicité doivent remplir deux (2) conditions :

✓ Ils doivent être Positifs : Cela signifie que de simples actes d’omission ne peuvent
être réprimés au titre de la complicité. En Droit des Affaires, la Jurisprudence retient
cependant la Répression lorsqu’un membre du directoire d’une Société Anonyme
ayant connaissance des abus de biens sociaux du Président, les a laissé commettre
alors qu’il avait les moyens de s’y opposer.
✓ Les actes de complicité doivent être antérieurs ou concomitants à l’infraction
principale.

C / Un Elément Intentionnel

Le complice ne peut tomber sous le coup de la Loi que s’il collabore à la commission
de l’infraction principale en connaissance de cause.

Paragraphe 2 : La Répression de la Complicité

Le complice est assimilé à l’auteur principal. Mais cela ne veut pas dire que la peine
prononcée contre l’auteur principal sera celle applicable au complice. Par le jeu des
circonstances atténuantes laissées à l’appréciation du Juge, le complice pourra être frappé moins
sévèrement que l’auteur principal. La solution inverse est possible.

Comment réprimer le complice en cas de circonstances aggravantes ?

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Comme l’indique leur nom, les circonstances aggravantes ont pour effet d’aggraver la
situation du délinquant. Pour répondre à cette question, il faut procéder aux distinctions
suivantes : les circonstances aggravantes personnelles et les circonstances aggravantes réelles.

1 – Les Circonstances Aggravantes Personnelles

Elles sont liées à la personne du délinquant. La Loi a prévu une seule circonstance
aggravante personnelle : c’est la Récidive.
Cette circonstance aggravante ne concerne que l’auteur principal. Elle ne peut rejaillir
sur le complice.

2 – Les Circonstances Aggravantes Réelles

Elles se rattachent à l’infraction dont elles modifient la nature. Exemple : l’usage d’une
arme, la réunion, la nuit sont des circonstances aggravantes du vol. Il est admis que les
circonstances aggravantes s’appliquent au complice.

Section 2 : La Coaction

Le Code Pénal assimile le complice à l’auteur principal. Il existe cependant une


différence entre ces deux (2) individus. Pour faire ressortir cette différence, il faut s’intéresser
au Coauteur. On appelle coauteurs des individus qui réunissent en leurs personnes tous les
éléments constitutifs de l’infraction commise en participation. Le Coauteur est donc l’auteur
d’une infraction avec d’autres personnes. Il peut être poursuivi même si les autres bénéficient
de l’impunité pour une raison qui leur est propre.
Le Complice au contraire, est celui qui coopère à la commission de l’infraction par un
acte matériel dont les contours sont précisés par la Loi. Cet acte en lui-même n’est pas
répréhensible. Il ne tombe sous le coup de la Loi que parce qu’il est rattaché à un fait principal
punissable.

Section 3 : La Responsabilité Pénale du Fait d’Autrui

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Le Principe de la Personnalité Pénale implique que seul le délinquant peut être
sanctionné. Peu importe qu’il soit l’auteur ou le complice. Le Droit Pénal connaît cependant
des hypothèses où une personne est responsable du fait commis par autrui.
Le cadre privilégié de cette responsabilité est l’entreprise. Celle-ci est entendue au sens
large. Deux conditions sont exigées pour l’application de la Responsabilité du fait d’autrui.

✓ Une infraction commise par le Préposé : Elle peut être non intentionnelle. Exemple
le délit de pollution. Elle peut être intentionnelle. Exemple la fraude fiscale.
✓ Une faute imputable au Patron : La faute du Patron est considérée comme établie
dès l’instant que l’acte réalisé par le préposé contrevient à une réglementation que
le chef d’entreprise avait l’obligation de faire respecter. Exemple : La violation des
règles d’hygiène et de sécurité. Le Patron ne peut échapper à la Loi que s’il délègue
ses pouvoirs à l’un de ses Préposés, pourvu que celui-ci ait la compétence requise
pour mener à bien la mission qui lui a été confiée.

Chapitre 2 : La Sanction

La Peine peut se définir comme la ou les Sanctions infligées au délinquant en rétribution


de l’infraction qu’il commet. En examinant l’article 1er du Code Pénal, nous savons maintenant
que les peines sont criminelles, correctionnelles ou contraventionnelles. On retiendra également
que les Peines sont soit Principales (exemple : l’emprisonnement ou l’amende), soit
Complémentaires (exemple : la confiscation). Sans nous étaler davantage sur les diverses
sanctions visées par la Loi, on retiendra dans ce travail deux (2) choses : la Fixation de la Peine
d’une part, la Suspension et l’Extinction de la Peine d’autre part.

Section 1 : La Fixation de la Peine

La Peine applicable peut être aggravée par le Législateur. On le sait à l’occasion de notre
enseignement sur la Répression de la Complicité. Dans ce travail, on s’intéressera
sommairement à la Récidive.
Le délinquant est en état de Récidive si deux (2) conditions sont réunies :

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✓ Il doit avoir commis une première infraction et il doit être condamné définitivement ;
✓ Il faut que l’individu commette une deuxième infraction.

Il faut retenir que la peine légale peut faire l’objet d’une atténuation. Atténuer la peine,
c’est la diminuer. Exemple : les circonstances atténuantes. Elles permettent au Juge d’abaisser
la peine normalement applicable au délinquant.

Section 2 : La Suspension et l’Extinction de la Peine

La mesure de suspension envisagée par la Loi est le Sursis. Le Sursis dispense le


condamné de l’exécution de la peine sous la Condition qu’il se conduise bien pendant un certain
temps.
On retiendra que le Sursis n’est jamais un droit pour le condamné. Son application est
laissée à l’appréciation du Juge.
Les peines envisagées par la Loi peuvent disparaître. Plusieurs causes d’extinction sont
prévues par la Loi :

✓ La Prescription de la Peine ;
✓ La Grâce : c’est une faveur en vertu de laquelle un individu coupable et
définitivement condamné se trouve dispensé en tout ou partie de l’exécution de sa
peine. La Grâce est une prérogative du Chef de l’Etat. Elle s’applique à toutes les
infractions et formes de délinquance ;
✓ L’Amnistie : c’est une mesure d’oubli. Elle est prise par l’Assemblée Nationale et
efface la peine attachée à l’infraction.
✓ La Réhabilitation : réhabiliter, c’est placer la personne condamnée dans la situation
antérieure. Donc c’est effacer la peine. Tout se passe comme si elle n’a jamais été
condamnée.

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Deuxième Partie : Les Juridictions Répressives de Jugement

L’analyse portera ici sur les Juridictions de Droit Commun.

Chapitre 1 : Le Tribunal Départemental

En matière Pénale, le Tribunal Départemental prend le nom de Tribunal de Police ou de


Simple Police.

Section 1 : Organisation du Tribunal

Depuis 1984, il existe dans chaque Département un Tribunal. Cette Juridiction est
composée d’un Président, d’un Vice-président et de plusieurs Magistrats. Le Parquet est
représenté par un délégué du Procureur de la République. L’Instruction est assurée par un ou
plusieurs Magistrats.

Section 2 : La Compétence du Tribunal Départemental

Le Tribunal Départemental connaît des Contraventions et également certains délits. Les


décisions rendues par le Tribunal en matière contraventionnelle vont en appel devant le
Tribunal Correctionnel (tribunal régional). Mais les délits jugés par le Tribunal Départemental
sont portés en appel devant la Cour d’Appel.

Chapitre 2 : Le Tribunal Régional

En matière Pénale, le Tribunal Régional prend la dénomination de Tribunal


Correctionnel.

Section 1 : Organisation du Tribunal Régional

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Outre son Président, le Tribunal comprend plusieurs Vice-présidents et plusieurs
Magistrats. L’Instruction est assurée par un ou plusieurs Juges.
Le Parquet est dirigé par le Procureur de la République.

Section 2 : Compétence du Tribunal Régional

Le Tribunal Correctionnel connaît des délits autres que ceux qui sont portés à l’attention
du Tribunal de Police. Le Tribunal Correctionnel est aussi Juge d’Appel des décisions rendues
par le Tribunal Départemental en matière Contraventionnelle.

Chapitre 3 : La Cour d’Appel

Les Affaires Pénales sont portées devant la Chambre des Affaires Correctionnelles.
Cette Chambre est composée d’un Président et de plusieurs Juges.
Le Parquet y est représenté soit par le Procureur Général, soit par un Avocat Général,
soit par un Substitut Général.
Elle juge les Appels des jugements rendus soit par les Tribunaux Correctionnels, soit
par les Tribunaux de police.

Chapitre 4 : La Cour d’Assises

Elle est composée de trois (3) Magistrats et de quatre (4) Jurés. Le Parquet est représenté
par un membre du Parquet Général (Procureur Général, Avocat Général ou Substitut Général).
La Cour d’Assises est Juge de Droit Commun en matière de Crime. A la différence des
autres juridictions, elle n’est pas Permanente et se réunit par session.

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Chapitre 5 : La Cour de Cassation

Elle est située au sommet de la hiérarchie judiciaire. Le rôle général de la Cour de


Cassation est de veiller à l’application des lois. Cette Haute Juridiction a trois (3) Chambres.
Devant cette Haute Juridiction, les Affaires Pénales sont portées devant la Première Chambre.
Cette Chambre comprend un Président, des Conseillers et éventuellement un ou plusieurs
Auditeurs. Le Parquet est représenté par le Procureur Général près de cette Cour ou un de ses
Avocats Généraux. Saisie d’un Pourvoi en Cassation, cette Haute Juridiction a deux (2)
possibilités :

✓ Rendre un Arrêt de Rejet : La Cour de Cassation rend un arrêt de rejet lorsqu’elle


pense que les griefs soulevés à l’encontre de la décision attaquée ne sont pas fondés.
✓ Rendre un Arrêt de Cassation : Lorsque la décision attaquée n’est pas conforme à la
Loi, la Cour de Cassation rend un arrêt de cassation. L’affaire est alors renvoyée
pour Jugement devant une autre Juridiction du même degré que celle dont la décision
a été cassée, ou devant la même Juridiction autrement composée.

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