Pr Larbi EL BOUBEKRI 4ème séance Titre premier : les éléments constitutifs de l’infraction
La constitution de l’infraction nécessite trois
éléments : l’élément légal (chapitre premier) , l’élément matériel (chapitre deuxième ) et l’élément moral (chapitre troisième ) Chapitre premier : l’élément légal de l’infraction Un comportement ne peut être réprimé sans avoir été préalablement incriminé et sanctionné par la loi , c’est ce qu’on entend par le principe de la légalité(section première ) . Aussi la sanction de l’acte incriminé ne doit pas tomber sous le coup des faits justificatifs déterminés à titre limitatif par la loi pénale (section 2) Section première : le principe de la légalité I –Définition du principe Nommé aussi principe de la textualité , le principe de la légalité comporte l’incrimination de l’acte , ainsi que sa sanction . Cela veut dire que nul ne peut être poursuivi qu’en vertu d’une règle de droit préexistant à son acte ( M.L.Rassat ).
Le juge de ministère public ne peut poursuivre quelqu’un qu’en vertu d’une
loi pénale préalable incriminant l’acte commis , et le juge de fond ( )قاضي الحكم ne peut le juger qu’en vertu d’une infraction édictée et sanctionnée par la loi pénale . le principe de la légalité est exprimé sous la formule d’un adage latin : « Nullem crimen ; nulla poena sine lege » qui veut dire en français : « Pas d’infraction , pas de peine sans loi » Ce principe est consacré dans notre législation marocaine , par l’article 23 de la constitution et aussi par l’article 3 du code pénal qui dispose que: « Nul ne peut être condamné pour un fait qui n’est pas expressément prévu comme infraction par la loi , ni puni de peines que la loi n’a pas édictées » Ce principe est puisé de sources internationales , notamment : la déclaration internationale des droit de l’homme de 1948 (atr11-2) et le pacte international relatif aux droits civils et politiques (art 15-1) Justification du principe : - Protéger les libertés individuelle : Eclairer les personnes sur les actes illicites dans la sociétés et les conséquences découlant de la commission de ces actes ; - Eviter l’arbitraire du juge pénal ; - Protéger la société et renforcer sa cohésion , en consacrant ses valeurs à travers la liste des incriminations , et aussi à travers l’intimidation collective ( ) الردع العامet individuelle()الردع الخاصque constitue la sanction pénale ; II- conséquences du principe de la légalité Conséquences relatives à l’interprétation de la loi pénale , à son application dans le temps et dans l’espace . A-l ’interprétation de la loi pénale Face aux dispositions de la loi pénale , le juge répressif est tenu par l’interprétation stricte ; ceci pour ne pas créer des infractions ou sanctions non édictées par le législateur. Ainsi , l’analogie ( )القياسlui est interdite pour les actes non incriminés par la loi , quoi que similaires à des actes incriminés. En effet, l’interprétation stricte ne veut pas dire toujours interprétation littérale , le juge peut s’inspirer de la volonté du législateur ( )إرادة المشرعpour réctifier les erreurs matérielles et grammaticales . Il peut aussi rechercher l’esprit de la loi lorsqu’il se trouve devant un texte obscur ou imprécis , en se basant sur les travaux préparatoires, l’histoire de la loi ou du contexte socio- économique encadrant l’élaboration de cette loi , c’est ce qu’on appelle l’interprétation téléologique . B-l ’application de loi pénale dans le temps L’application de la loi dans le temps ,se fait , en droit pénal , de façon non rétroactive (1),ce principe de non rétroactivité connait quand même des exceptions (2) 1- le principe de la non rétroactivité • Ce principe est prévu dans l’article 4 du code pénal qui dispose que « Nul ne peut être condamné pour un fait , qui selon la loi en vigueur au temps ou il a été commis , ne constituait pas une infraction » . • Selon ce principe , la loi pénale ne s’applique qu’aux actes infractionnelles commises après son entrée en vigueur . • Le but de la consécration de ce principe est de protéger les libertés individuelles et garantir la sécurité de la société. 2- la rétroactivité comme exception Le législateur prévoit des cas où l’on applique la loi pénale de façon rétroactive: a-la rétroactivité de la loi la plus douce • Ce principe est prévu par l’article 6 du code pénal qui dispose que : « lorsque plusieurs lois ont été en vigueur entre le moment où l’infraction a été commise et le jugement définitif , la loi ,dont les dispositions les moins rigoureuses , doit recevoir application » • Lorsqu’en a plusieurs lois; entre la date de la commission de l’infraction et celle de son jugement définitif; le juge doit appliquer la loi la plus douce , qui apporte des avantages au délinquant ; diminution de la peine ou suppression de circonstances aggravantes à titre d’exemple . • La loi la plus douce peut être celle en vigueur avant la commission de l’infraction ou une nouvelle loi promulguée après la commission de cette infraction , dès lors bien sûr que cette infraction ne soit jugée définitivement . b-La rétroactivité des loi interprétatives Le rôle de loi interprétative est de préciser une loi antérieure, elle ne comporte pas de dispositions apportant de nouvelles incriminations ou sanctions . De là ,la loi interprétative reçoit l’application rétroactive. c-l ’application immédiate des mesures de sûreté L’objectif escompté de la mise en place, par le législateur, de mesures de sûreté est de faire face à un état dangereux présent ou éventuelle , d’où son application immédiate . d-L ’application immédiate des lois pénales de forme A la différence des lois de fond dont la rétroactivité n’est qu’exceptionnelle , le principe est la rétroactivité pour les lois de formes. La justification de cette application immédiate des lois de forme est qu’elles n’apportent pas de modification au sujet des incriminations et sanctions , ni même à la responsabilité pénal . L’objectif principal des modifications portant sur la forme est souvent d’assurer une bonne administration de la justice pénale, ce qui ne peut en principe nuire aux intérêts de l’accusé . C-l ’application de la loi pénale dans l’espace Deux principes régissent l’application de la loi pénale dans l’espace , notamment le principe de la territorialité et le principe de la personnalité de la loi pénale , toutefois dans des situations données , d’autres principes interviennent ,comme le principe de l’universalité de la loi pénale . On se contentera d’étudier les deux premiers principes 1-Le principe de la territorialité de la loi pénale Le législateur marocain consacre ce principe par l’article 1O du code pénal qui dispose que «sont soumis à la loi pénale marocaine ,tous ceux qui , nationaux , étrangers ou apatrides , se trouvent sur le territoire du Royaume , sauf les exceptions établis par le droit public interne ou le droit international » , c’est-à-dire que les tribunaux marocains sont compétentes de connaitre des infractions commises sur le territoire marocain , sans considération des nationalités des auteurs de ces infractions . Le territoire marocain comprend en plus de ses éléments terrestres , maritimes et aériens; les aéronefs et navires marocains ou battant un pavillon marocain quel que soit l’endroit ou ils se trouvent , sauf s’ils sont soumis , en vertu du droit international , à une loi étrangère (art 11du code pénal ). Aussi les juridictions marocaines sont compétentes pour connaitre des infractions commises à bord des navires ou aéronefs étrangers lorsque la victime est marocaine ou lorsqu’ils atterrissent au Maroc après la commission du crime ou délit (art 706 du code de procédure pénale ) Toutefois ce principe connait des exceptions établis par le droit public interne , concernant le Roi (art 43 de la constitution) et les membres du parlement dans les limites de la disposition de l’article 64 de la constitution ; et aussi par le droit public externe concernant les chefs d’Etats et les représentants diplomatiques des pays étrangers ;ainsi que les membres de certaines organisations internationales . 2-Le principe de la personnalité de la loi pénale Ce principe est fondé sur la personnalité des parties de l’infraction , il a deux aspects :positifs et négatif a-L ’aspect positif du principe de personnalité : Selon cet aspect , tout fait qualifié crime ou délit commis hors du Royaume marocain par un marocain peut être poursuivi et jugé au Maroc , en tenant compte des conditions suivantes : -Que l’auteur soit renté au Maroc - Qu’il ne soit pas jugé irrévocablement à l’étranger , ni avoir purgé une peine ou obtenu une grâce. b-L ’aspect négatif du principe de la personnalité Selon ce principe la loi pénale est applicable à toute infraction commise à l’étranger lorsque la victime de cette infraction est de nationalité marocaine . toutefois la poursuite de l’inculpé ne peut avoir lieu lorsqu'il justifie que le jugement est devenu définitif à l’étranger et , en cas de condamnation , avoir purgé ou prescrit sa peine(art 710 du code de la procédure pénale ) .