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SUJET 2 : Comment rendre compte du fait que la nature se laisse expliquer par les
mathématiques ?
1. Explication des concepts
- Comment : De que quelle manière, pour quelles raisons, en quel sens, en quoi, pourquoi ;
- Rendre compte : Démontrer, prouver ;
- La nature : L’ensemble du monde physique considéré en dehors de l’homme ; le cadre physique
constitué des règnes minéral, végétal et animal, considérés comme un tout soumis à des lois ;
l’univers, le cosmos, le monde physique, le réel.
- Expliquer : Interpréter, traduire ; régir ; existence d’un rapport de correspondance, d’adéquation
ou d’identité ;
- Les mathématiques : La science des nombres et des figures.
2. Reformulation : En quel sens dit-on que l’univers est régi par les mathématiques ?
3. Problème : Rapport de la nature avec les mathématiques
4. Problématique
On a tendance à croire qu’il y a une inadéquation entre la nature et les mathématiques. Or à l’analyse, on
se rend compte que les mathématiques expliquent plutôt la nature. D’où la question : en quoi les
mathématiques régissent la nature physique?
5. Plan détaillé
- Les mathématiques expliquent la nature, car il y aurait une harmonie entre les notions
mathématiques et le monde physique. En effet, les mathématiques sont un langage qui rend
compte de l’univers. Le monde, c’est d’abord la voûte céleste où chaque constellation est
caractérisée à la fois par sa forme géométrique et par le nombre d’astres qui la constitue.
Selon les pythagoriciens, l’univers est une harmonie réglée par les nombres, un monde
harmonieux gouverné par les lois mathématiques qui expriment des rapports simples entre
les êtres. On comprend ainsi pourquoi ils disaient : « Les nombres gouvernent le monde.»
Poursuivant leur réflexion, ils disaient encore: « Qu’y a-t-il de plus sage ? Les nombres.
Qu’y a-t-il de plus beau ? L’harmonie. »
- Les mathématiques traduisent la nature, parce que l’univers est commandé par des nombres et des
figures qui constituent l’essence des choses du monde sensible.
Déjà, les pythagoriciens pensaient que les nombres représenteraient l’essence du réel,
qu’ils seraient la substance de la réalité tout entière. Les choses sensibles seraient dès lors
des copies des nombres. On comprend ainsi pourquoi ils disaient: « Tout est nombre. »
Prolongeant leur réflexion, ils disaient: « Les choses sont des nombres et les nombres sont
des choses. »
- Les mathématiques sont adéquates ou s’identifient au réel, parce qu’elles semblent avoir présidé à
l’organisation même de celui-ci.
Dans le livre de la Sagesse, il est écrit : « L’univers est créé avec ordre et mesure. »
PYTHAGORE: «L’univers est un livre écrit en langage mathématique. »
- Les mathématiques rendent compte du réel, parce que l'esprit qui les pense, est fils d’un dieu
mathématicien qui a fait le monde.
Pour les pythagoriciens et les platoniciens, le monde est comme une œuvre d’art créée par
un dieu mathématicien qui aurait fait usage des lois mathématiques.
PLATON pense que le démiurge, c’est-à-dire le dieu artisan a créé et régi le monde
sensible par des Idées mathématiques lorsqu’il écrit : « Dieu est toujours géomètre. »
- Cette vision antique des mathématiques comme étant à l’origine de l’univers a traversé les siècles
et a été partagée par de nombreux philosophes du monde moderne.
René DESCARTES : « Dieu a créé le monde selon les lois mathématiques. »
Gottfried Wilhelm LEIBNIZ : « Le monde est issu des calculs de Dieu. »
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SUJET 3: Dégagez l’intérêt philosophique du texte suivant à partir de son étude ordonnée.
Quand son adversaire aristotélicien, imbu d’esprit empiriste, lui pose la question : « Avez-vous fait une
expérience ? », GALILEE répond avec fierté : « Non, et je n’ai pas besoin de la faire, et je peux affirmer
qu’il en est ainsi car il ne peut en être autrement. Ainsi necesse détermine l’esse. La bonne physique est
faite a priori. » La théorie précède le fait. L’expérience est inutile, parce qu’avant toute expérience nous
connaissons déjà ce que nous cherchons. Les lois fondamentales du mouvement (et du corps), lois qui
déterminent le comportement spatio-temporel des corps matériels, sont des lois de nature mathématique.
De la même nature que celle qui gouvernent les relations et les lois des figures et des nombres. Nous les
trouvons et les découvrons non pas dans la nature, mais en nous-mêmes, dans notre esprit, dans notre
mémoire, comme PLATON nous l’a enseigné autrefois.
Alexandre KOYRE, Etudes d’histoire de la pensée scientifique, Gallimard, 1973, pp 210-211.
1. Présentation
- Auteur : Alexandre KOYRE
- Ouvrage : Etudes d’histoire de la pensée scientifique, Gallimard, 1973, pp. 210-211.
- Thème : Origine / Source / Fondement des lois scientifiques
- Question : Quelle est l’origine des lois scientifiques ?
- Thèse : Les lois scientifiques ont pour origine notre esprit.
2. Arguments
- « Quand son adversaire aristotélicien…nous cherchons. » : La primauté de la théorie par rapport à
l’expérience en science.
KOYRE au début de ce texte, rappelle le débat classique qui eut lieu entre les empiristes et les
rationalistes au sujet de l’origine de la connaissance en général, et en particulier celle scientifique quand il
dit : « Son adversaire aristotélicien, imbu d’esprit empiriste. » A l’instar de GALILEE, KOYRE se range
du côté des rationalistes en affirmant que la théorie est antérieure à l’expérience dans le travail
scientifique, et que l’expérience n’y a même pas droit de cité, car dit-il : « La théorie précède le fait.
L’expérience est inutile, parce qu’avant toute expérience nous connaissons déjà ce que nous cherchons. »
- « Les lois fondamentales du mouvement… nous l’a enseigné autrefois. » : Thèse centrale du texte
de KOYRE sur l’origine des lois scientifiques : c’est notre esprit qui invente, crée la loi
scientifique.
Selon KOYRE, les lois scientifiques proviennent non des choses de la nature (par l’expérience), mais
plutôt de l’esprit, car dit-il : « Nous les trouvons et les découvrons non pas dans la nature, mais en nous-
mêmes, dans notre esprit, dans notre mémoire. »
3. Mérite de l’auteur du texte
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Alexandre KOYRE a le mérite d’avoir montré que, dans l’activité scientifique, la raison a une place
privilégiée par rapport à l’expérience : elle est à l’origine de la loi, et l’expérience s’avère inutile.
Nombreux sont des auteurs qui ont soutenu la même idée que la loi, mieux la connaissance scientifique
est d’origine rationnelle.
4. Adjuvants
- L’expérience ne peut fonder la science, parce que toute science se construit en rompant avec les
données de la sensibilité, les connaissances qui s’appuient sur les sens ou qui en dérivent.
Gaston BACHELARD : « La science n’est pas le pléonasme de l’expérience. »
Gaston BACHELARD : « L’exigence empiriste qui ramène tout à l’expérience a perdu sa
primauté. »
- La connaissance scientifique est une élaboration intellectuelle, un produit de la raison, de la
pensée ou de l’esprit, parce que l’approche du réel est encadrée et structurée par un certain nombre
de données théoriques de base.
Albert EINSTEIN : « La pensée pure est compétente pour comprendre le réel. »
Gaston BACHELARD : « La science est un produit tardif de l’esprit. »
Gaston BACHELARD : « Rien ne va de soi. Rien n’est donné. Tout est construit. »
- C’est la théorie qui fonde la connaissance étant donné que c’est elle qui précède l’expérience.
Gaston BACHELARD: « Dans l’échange entre la théorie et l’expérience, c’est toujours la
première qui engage le dialogue. »
Karl POPPER : « La science se compose de théories qui sont notre œuvre. »
Karl POPPER : « La théorie commande le travail expérimental de sa conception aux
derniers maniements en laboratoire. »
Georges CANGUILHEM : « Il n’y a de fait scientifique qu’à l’intérieur d’une théorie. »
- Mais, si tel est le cas, est-ce à dire qu’on doit exclure absolument l’expérience dans le travail
scientifique ?
5. Contempteurs
- L’empirisme et le rationalisme doivent nouer plutôt une alliance afin que la connaissance
scientifique soit objective, parce que le rationalisme pur ne fait pas la science. En effet, la science
contemporaine obéit à une philosophie à deux pôles complémentaires que sont l’empirique et le
rationnel.
Gaston BACHELARD : « L’empirisme et le rationalisme sont liés dans la pensée
scientifique. »
Gaston BACHELARD : «Toute pensée scientifique interprète à la fois dans un langage
réaliste et dans un langage rationaliste. »
Gaston BACHELARD : L’idéal de complexité de la science contemporaine exige que « le
réalisme et le rationalisme échangent leurs conseils. »
Gaston BACHELARD : «Si l’on pouvait traduire philosophiquement le double
mouvement qui anime actuellement la pensée scientifique, on s’apercevrait que
l’alternance de l’a priori et de l’a posteriori est obligatoire, que le rationalisme et
l’empirisme sont liés dans la pensée scientifique. »
Gaston BACHELARD : « L’empirique a besoin d’être compris et le rationnel a besoin
d’être expliqué. »
Pierre DUHEM : « Une expérience de physique n’est pas seulement l’observation. Elle est
en outre l’interprétation théorique de ce phénomène. »
- La science peut être décrite comme un matérialisme rationnel, c’est-à-dire comme un travail de
l’association de l’expérience et de la raison ; et en même temps un rationalisme appliqué, c’est-à-
dire un constant enrichissement de la raison au contact de l’expérience et vis versa.
Gaston BACHELARD : «La science est un matérialisme rationnel et un rationalisme
appliqué.»
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- La connaissance résulte d’un jeu conjugué de l’expérience et de la raison, parce que la raison
s’empare de ce que les sens lui apportent pour formuler la connaissance. En effet, il y a une
relation dialectique entre l’expérience et la théorie.
Henri POINCARE : « Isolées, la théorie serait vide et l’expérience serait myope. Toutes
deux seraient inutiles et sans intérêt. »
- L’évolution de la science révèle clairement une dialectique entre la théorie et l’expérience : de
l’expérience on aboutit à la mise au point d’une théorie, et de la théorie on retourne à
l’expérimentation pour la vérifier, parce que, une fois établie, la théorie demande à être de
nouveau vérifiée expérimentalement.
Claude BERNARD: « À la source de toute connaissance, il y a une idée, une pensée ; puis
l’expérience vient confirmer l’idée. »
- Toute la science se résume à un rapport réciproque, bilatéral, dialectique ou alliance entre
l’expérience et la théorie, entre l’a posteori et l’a priori.
Gaston BACHELARD : « L’histoire de la science est une alternative sans cesse renouvelée
d’empirisme et de rationalisme. »
Gaston BACHELARD : « Dans la pensée scientifique, […] l’alternance entre l’a posteori
et l’a priori est nécessaire. »
- Il est impossible en sciences expérimentales comme ailleurs de séparer l’expérience et la raison,
parce que quelles que soient les performances de la raison qui élabore, elle a besoin néanmoins de
matériaux d’origine sensible.
Gaston BACHELARD : « Quand le savant raisonne, il faut qu’il expérimente. Quand il
expérimente, il faut qu’il raisonne. »
- La vérité scientifique est une construction rendue possible par un incessant va et vient qui s’opère
entre l’esprit et le réel, la pensée et la nature.
René THOM : « L’expérimentation […] ne dispense pas de penser. »
- Le travail d’élaboration d’une vérité scientifique est le résultat d’une coopération entre
l’expérience et l’esprit, parce que c’est l’esprit qui élabore l’explication de la cause du
phénomène, mais c’est l’expérimentation qui confirme ou infirme.
Francis BACON : « Notre plus grande ressource et celle dont nous devons tout espérer,
c’est l’étroite alliance de ces deux facultés : l’expérimentale et la rationnelle. »
Claude BERNARD : «Le savant complet est celui qui embrasse à la fois la théorie et la
pratique expérimentale.»
- La science est une construction, mais qui vient sans cesse s’éprouver au contact du réel. Et si le
fait est déjà tout pénétré de pensée, l’esprit à son tour n’est fécondé que par les faits.
Henri BERGSON : La connaissance est une union, une fusion de la pensée avec le réel :
elle consiste à « se placer à l’intérieur de lui », à « coïncider » avec lui.
- Le savant doit tenir compte à la fois du travail des sens et de l’exercice de la raison pour atteindre
son but.
Georges CANGUILHEM : « C’est au confluent du sensible et de l’intelligible que se
trouve la réalité du fait scientifique. »
- Dans la recherche scientifique, le sensible et l’intelligible se complètent corrélativement, parce
que ni les sens, ni la raison ne se suffisent à eux-mêmes.
René THOM : « Dans tous les cas, il faut prolonger le réel par l’imaginaire et éprouver
ensuite cet halo d’imaginations qui complète le réel. »
- Le rationalisme appliqué à l’œuvre dans la science contemporaine est un constant enrichissement
de la raison au contact de l’expérience et vis versa.
Gaston BACHELARD : « Si elle expérimente, il faut raisonner ; et si elle raisonne, il faut
expérimenter. »
- Au regard de l’évolution de la science, la théorie et l’expérience s’influencent réciproquement et
commandent la recherche et la découverte de la connaissance à tour de rôle.
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6. Conclusion : Selon le texte de KOYRE, la connaissance scientifique est une élaboration de la raison.
D’autres auteurs ont soutenu au contraire que la connaissance scientifique est plutôt le résultat d’une
démarche dialectique entre l’expérience et la raison humaine.